Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction

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Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
Guillaume Du Fay
Les Messes à teneur

                     Cut Circle

         Jesse Rodin - direction
Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
Guillaume Du Fay                                     (ca. 1397 – 1474)
         Les Messes à teneur                                                     CD1                                                                                                       CD2

                                                                                               Missa Ecce ancilla Domini/Beata es Maria            [Soli : CB/BG/DM ; incipits : MB]

     1   Se la face ay pale – Guillaume Du Fay                                  02’53     1       Kyrie                                                                                   05’12
         Missa Se la face ay pale   [Soli : CB/LJ/PT ; incipits : BG]                     2       Gloria                                                                                  04’57
     2      Kyrie                                                               03’09     3       Credo                                                                                   08’10
     3      Gloria                                                              07’57     4       Sanctus                                                                                 05’55
     4      Credo                                                               07’41     5       Agnus Dei                                                                               03’58
     5      Sanctus                                                             05’43     6    Ave regina celorum – anonyme, antienne en plain-chant                                      01’47
     6      Agnus Dei                                                           04’11     7    Ave regina celorum III – Guillaume Du Fay                                                  07’13
         Missa L’homme armé    [Soli : MG/SS/DM ; incipits : MB]                               Missa Ave regina celorum   [Soli : MG/SS/PT (Christe II : MG/CB/PT) ; incipits : LJ]

     7      Kyrie                                                               03’47     7       Kyrie                                                                                   05’40
     8      Gloria                                                              07’17     8       Gloria                                                                                  06’22
     9      Credo                                                               10’58     9       Credo                                                                                   08’57
    10      Sanctus                                                             08’04     10      Sanctus                                                                                 06’47
    11      Agnus Dei                                                           05’38     11      Agnus Dei                                                                               05’09

                                                                             TT : 67’21                                                                                                TT : 70’08

4                                                                                                                                                                                                   5
Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
Cut Circle

    Jesse Rodin – direction

    Carolann Buff [CB] – soprano
    Mary Gerbi [MG] – soprano
    Lawrence Jones [LJ] – contreténor
    Steven Soph [SS] – contreténor
    Michael Barrett [MB] – ténor
    Bradford Gleim [BG] – ténor
    David McFerrin [DM] – basse
    Paul Max Tipton [PT] – basse

    www.cutcircle.com

6                                                               7
                                        Cut Circle, © Seth Torres 2014
Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
Légendes des illustrations :                                                                               Remerciements

    Couverture :
                                                                                                               Musique en Wallonie tient à remercier Émilie Corswarem, Marie-Alexis Colin et Barbara Bong ;
    Guillaume Du Fay, Missa Ecce ancilla Domini, Kyrie [détail], Capp. Sist. 14, fol. 76v [© Biblioteca
    Apostolica Vaticana]                                                                                       Christophe Pirenne, Jesse Rodin et Philippe Vendrix.

    Notice :                                                                                                   Jesse Rodin et Cut Circle remercient Heinrich Christensen et Gregg Sorensen, Daphna Davidson,
    1. Petrus Christus, L’annonciation, 1452, Staatliche Museen, Berlin [© bpk/Gemäldegalerie, SMB/Jörg P.     Pamela Dellal, Kaye Denny, Sean Gallagher, Jérôme Gierkens, Frank R. Herrmann, T. Frank
    Anders]                                                                                                    Kennedy, Charles Kronengold, Alia Rejeb Radjeb Meddeb, Herbert Myers, Mark Nye, Helen
                                                                                                               Palmer, Alejandro Enrique Planchart, Andy et Emily Richmond-Pollock, Sonora Rose, Craig Sapp,
    2. Chanson Se la face ay pale, Chansonnier Laborde, fol. 64v-65r [© Library of Congress]                   Anna Schultz, Susan Sommer, Philippe Vendrix, Helen Ward Mannix et Kurt Werner.

    3. Guillaume Du Fay, Missa Se la face ay pale, Kyrie, Capp. Sist. 14, fol. 27v [© Biblioteca Apostolica
                                                                                                               Cet album est dédié à Alejandro Enrique Planchart – musicologue, maître de chœur, mentor et
    Vaticana]
                                                                                                               muse..
    4. Guillaume Du Fay, Missa L’homme armé, Kyrie, Capp. Sist. 14, fol. 101v [© Biblioteca Apostolica
    Vaticana]                                                                                                  Production : Musique en Wallonie, ULg – quai Roosevelt 1B à 4000 Liège – Belgique
                                                                                                               (http://www.musiqueenwallonie.be)
    5. Le couronnement de la Vierge, extrait de Les Très Riches Heures du duc de Berry, Ms. 65, fol. 60v [©    Co-producteurs / Coproducers : Pamela Dellal et Jesse Rodin
    Musée Condé, Chantilly]                                                                                    Enregistrement / Recording : janvier (CD1) et août (CD2) 2014, Church of the Redeemer, Chestnut
                                                                                                               Hill, Massachusetts, USA
    6. Guillaume Du Fay, Missa L’homme armé, Kyrie I, facsimilé, Lucca Codex, fol. 39r [© University of        Prise de son / Recording Engineer : Seth Torres
    Chicago Press]                                                                                             Montage / Editing : Jesse Rodin et Derek Czajka
                                                                                                               Mixage et mastering / Mixing and Mastering : David v.R. Bowles (Swineshead Productions, LLC)
    7. Marie, Reine des Cieux, ca. 1485-1500, National Gallery of Art, Washington DC [© Samuel H. Kress        Direction artistique / Artistic Direction : Jesse Rodin
    Collection]                                                                                                Graphisme / Lay out : Valérian Larose – Quidam

    8. Guillaume Du Fay, Missa Ecce ancilla Domini, Kyrie, Capp. Sist. 14, fol. 76v [© Biblioteca Apostolica
                                                                                                               Réalisé avec le concours du Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles (Service général des Arts
    Vaticana]
                                                                                                               de la scène – Service Musique) et le soutien de la Wallonie.

8                                                                                                                                                                                                                    9
Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
Guillaume Du Fay
                                                     solidement fixées ; dans les années 1470 en
                                                     revanche, la messe était devenue le genre le
                                                     plus prestigieux – et Du Fay était sans aucun
                                                     doute conscient qu’il faisait figure d’autorité
                          Les Messes à teneur        dans une arène pleine de jeunes talents. De
                                                     plus, la Missa Se la face ay pale fut probable-
   Que cela signifiait-il pour Guillaume Du Fay      ment composée quand Du Fay était à la cour
 (ca. 1397-1474), expert caméléon de tous les        de Savoie, alors que les autres messes datent
 genres musicaux de son époque, de composer          de ses dernières années à Cambrai. Ainsi,
 quatre versions de l’ordinaire de la messe vers     contrairement à Haydn et à Beethoven, Du Fay
 la fin de sa vie ? Du point de vue de la géné-      ne composa pas ces œuvres en lien les unes
 ration suivante, lorsque la messe polyphonique      avec les autres, pas plus qu’il ne les composa
 régnait en maître, il peut être tentant d’inter-    dans des circonstances similaires. Et évidem-
 préter ces œuvres comme une forme de bilan          ment, les messes de Du Fay n’étaient pas des-
 de sa carrière – un accomplissement semblable       tinées au concert, mais à la liturgie. Néanmoins,
 aux symphonies londoniennes de Haydn ou aux         faire l’expérience des messes à teneur comme
 quatuors à cordes tardifs de Beethoven. Sur         un tout permet certains constats particuliers.
 un plan purement musical, ces comparaisons          Au travers de ces œuvres, nous pouvons pister
 sont appropriées. Chaque messe émarge d’un          les changements stylistiques sur une période
 terrain musical propre ; elles sont souvent éton-   d’environ vingt ans ; observer la manière dont
 namment expérimentales et l’ensemble est            un genre se développe pour devenir le plus
 magnifique du début à la fin, révélant ainsi un     important de son époque, et enfin voir com-
 compositeur à la hauteur de ses talents.            ment le principal compositeur de son temps
                                                     assembla de courtes sections polyphoniques
                                                     pour en faire des structures d’une admirable
   L’analogie a toutefois ses limites. Les messes
                                                     ampleur.
 à teneur de Du Fay furent composées durant
 un long laps de temps : allant des années 1450
 aux années 1470. Au début de cette période,          Ces messes sont pleines de surprises – avant
 la messe cyclique était encore un jeune genre       de les aborder une à une, il convient de se faire
 dont les conventions n’étaient pas encore           une idée de ce qui les unit. En règle générale,     1. Petrus Christus, L’annonciation, 1452, Staatliche Museen,
                                                                                                                 Berlin [© bpk/Gemäldegalerie, SMB/Jörg P. Anders]
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Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
les voix supérieures sont beaucoup plus actives         binaisons pour les lister ici, mais vous pouvez           Les riches harmonies et l’écriture magnifi-            Ces questions de notation mises à part, il reste
 que les voix graves : le cantus et le contreténor       écouter en particulier quelques duos imitatifs          quement mélodique de la Missa Se la face ay            beaucoup à admirer dans l’écriture de Du Fay.
 supportent l’essentiel de l’intérêt rythmique           (2/3/2’06, 2/10/1’07), y compris certains dans          pale ne doivent pas masquer un fait important          Peut-être le plus impressionnant est-il la façon
 et mélodique, tandis que le ténor et la basse           lesquels l’imitation est très resserrées (1/8/4’09) ;   : cette œuvre est un tournant dans l’histoire          dont la messe donne à entendre la chanson
 fournissent un soutien, le ténor «s’occupant»           ou de saisissantes entrées des voix inférieures         de la notation musicale. C’est la première             dont elle s’inspire. La ballade Se la face ay
 du matériel pré-existant, lequel est chanté en          après de longs duos des voix supérieures                messe dans laquelle l’intégralité de la partie         pale étant (exceptionnellement) strophique,
 valeurs longues. Et pourtant, en beaucoup               (1/3/0’32, 2/1/1’09).                                   de ténor repose sur une seule ligne musicale :         les auditeurs ont trois chances d’entendre sa
 d’endroits, les voix inférieures occupent le                                                                    ici, le ténor de la chanson de Du Fay Se la face       très étrange conclusion. Dans le refrain de la
 devant de la scène, comme quand le ténor                                                                        ay pale. Cela ne signifie cependant pas que            chanson («Sans elle ne puis»; 1/1/0’40), les trois
                                                            Plus aventureux encore sont les passages             le ténor de la messe ressemble tout à fait à la        voix se joignent en un long mélisme présentant
 accélère, permettant de percevoir le maté-
                                                         rythmiquement intenses (1/8/2’26, 2/7/5’45,             chanson ; au contraire, une série d’indications        ce que nous pourrions appeler aujourd’hui une
 riel pré-existant (par exemple, CD1/Tr4/6’28,
                                                         2/9/3’24), les utilisations exotiques de triolets       lui imposent de modifier la durée de chaque            « imitation triadique » : elles sautent de sol à
 1/7/3’26), ou quand la basse investit un registre
                                                         (1/9/6’42, 1/11/0’44, 2/10/5’33), les longues           note. La plupart du temps, le ténor chante             mi et à do, puis, après une pause, de sol à mi
 plus aigu (1/9/9’36) ou même lorsqu’elle
                                                         séquences (2/4/3’08), ou les recours à des              deux fois moins vite, en doublant les valeurs          et à sol (0’44). Comme dans un jeu de saute-
 chante seule (1/10/3’40). Le contreténor est
                                                         dissonances qui feraient rougir tout compositeur        de note («crescit in duplo»). Dans le Gloria et        mouton, les voix s’entrecroisent rapidement, se
 généralement une quinte environ en dessous
                                                         de la génération suivante (1/9/1’45). On trouve         le Credo, Du Fay opte pour un procédé plus             dirigeant petit à petit vers la cadence finale.
 de la voix la plus aiguë, mais dans certains pas-
                                                         de plus subtiles touches encore dans d’auda-            complexe : la première section de chaque               Dans la messe, Du Fay retravaille ce matériel
 sages, il s’élève au-dessus du cantus (1/3/4’55,
                                                         cieux ritardando (1/9/10’16, 2/10/3’32) ou dans         mouvement doit être chantée en triplant la             à cinq reprises à la fin de chaque mouvement
 1/9/1’59). Ailleurs, le cantus se retire, laissant le
                                                         des figures d’hémioles où les voix accentuent           durée des notes, la seconde en les doublant            – mais ce sont les conclusions du Gloria et du
 contreténor chanter certains des passages les
                                                         le deuxième temps d’une «mesure» ternaire               et la troisième, en les présentant “telles qu’elles    Credo qui se démarquent. Comme on y a fait
 plus magiques (1/5/1’55, 2/5/3’21, 2/10/1’43).
                                                         (1/2/0’53-56, 2/12/4’26). Et les passages identi-       sont”, soit à la vitesse normale. Les sections “Et     allusion plus haut, ces deux mouvements sont
 L’interprétation vise à capter l’énergie et
                                                         fiés ici ne sont que la pointe de l’iceberg : c’est     in terra pax” et “Patrem”, en triple augmenta-         intimement liés : parce qu’ils partagent un
 l’intensité de ces passages, au cours desquels le
                                                         une musique qui récompense toute écoute                 tion, sont particulièrement intrigantes, car tripler   même traitement de la partie de ténor, ils sont
 compositeur démonter clairement ses compé-
                                                         attentive. [Pour la suivre en notation moderne,         la valeur de chaque note implique que le ténor         exactement de la même longueur et se ter-
 tences.
                                                         vous pouvez consulter http://josquin.stanford.          se retrouve en décalage avec les autres voix           minent tous les deux sur un bref climax (“Cum
                                                         edu.]                                                   (par exemple, 1/3/1’27). Toutes ces techniques         sancto spiritu”/“Confiteor”). Pour l’ « Amen », Du
    Du Fay est un maître de la texture musicale :                                                                reflètent la volonté de Du Fay de faire ressortir      Fay compose de longs mélismes qui étendent
 il manipule avec soin la conduite de chaque                                                                     un maximun de couleurs sonores différentes à           le matériel «triadique» de la chanson à un
                                                                                  ***
 voix, attentif à la façon dont celles-ci sont                                                                   partir d’un même texte – ce qu’Emily Zazulia           contexte à quatre voix (1/3/7’27, 1/4/7’16). La
 reliées les unes aux autres, afin de créer une                                                                  a appelé à juste titre « l’esthétique de la fixité     conclusion du Credo peut être vue comme
 variété infinie. Il y a beaucoup trop de com-                                                                   notationnelle ».                                       une suite de la fin du Gloria, plus intense

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Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
encore, avec les voix libres montant résolument                                                                renvoient à l’univers sonore du début du XVe
 vers le sommet de leurs tessitures. Dans ces                                                                   siècle, atteignent probablement leur sommet
 deux passages, d’un côté la messe ressemble                                                                    dans le “Et incarnatus est”, où l’imitation en
 temporairement à la chanson – chose inhabi-                                                                    strette à l’octave entre les voix supérieures
 tuelle pour un genre qui consiste à faire de neuf                                                              conduit à différentes présentations de la même
 avec du vieux. D’un autre côté, la texture plus                                                                mélodie dans une succession rapprochée
 dense de la messe assure qu’aucun auditeur                                                                     (1/9/4’58).
 ne puisse jamais confondre les deux œuvres.
 En effet aussi bien dans ce passage que dans                                                                      Le passage antérieur du Credo n’est pas
 l’intégralité de la messe, Du Fay court-circuite                                                               moins audacieux et intéressera les passionnés
 la cadence finale de la chanson, s’éloignant                                                                   de musique contemporaine. Dans ce qui est
 rapidement du do pour arriver sur un fa.                                                                       probablement conçu comme une représen-
                                                                                                                tation du « par Lui tout a été fait » (“per quem
   Malgré ces changements harmoniques                                                                           omnia facta sunt”), Du Fay place brièvement
 ludiques, la Missa Se la face ay pale est                                                                      chaque voix dans une mesure distincte
 presque « classique » en regard de l’autre                                                                     (1/9/3’24). Pour décrire le passage en utilisant
 messe du CD 1. La Missa L’homme armé est                                                                       la terminologie moderne : le ténor reste en ¾
 imposante, audacieuse et d’une texture dense.                                                                  ; la basse passe en 6/8 ; le cantus, également
 La plupart des interprètes modernes n’ont pas                                                                  en 3/4, chante des triolets tous les deux temps
 réussi à rendre pleinement la plus irrésistible de                                                             de la mesure ; et le contreténor, avec des
 ses caractéristiques (et la moins ambiguë, du                                                                  barres de mesures identiques à celles des voix
 point de vue historique) : alors que toutes les                                                                inférieures, se meut dans un 2/4 subdivisé. C’est
 voix sont cantonées dans le mode de sol, le                                                                    le chaos – et pourtant le contrepoint est si bien
 cantus ne donne toutefois pas à entendre le si                                                                 composé que rien ne choque. En effet, lorsque
 bémol qui est cependant entonné par les trois                                                                  la musique est correctement interprétée, sa
 voix inférieures. Cela occasionne de fréquents                                                                 complexité en devient presque imperceptible.
 frottemment entre le cantus en si et le si bémol,
 ce que l’on peut entendre notamment dès la                                                                       Le final de cette messe permet d’envisager
 phrase d’ouverture (notez le changement à            2. Chanson Se la face ay pale, Chansonnier Laborde,       l’Agnus Dei III comme un climax musical. Du
 1/7/0’11). Ces juxtapositions inattendues, qui                          fol. 64v-65r [© Library of Congress]   Fay y détourne la mélodie L’homme armé de

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Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
maîtresse façon, le ténor la chantant d’abord            Comme le suggère son titre prolixe, la Missa      rythmique pour privilégier la musicalité. Ce         solution à la fois ici et dans l’autre messe du CD
 à rebours en augmentation, puis dans sa forme          Ecce ancilla domini/Beata es Maria est basée        n’est que dans le duo suivant (3’46), où deux        2, où les deux voix inférieures chantent le texte
 originelle à la vitesse normale. Cette instruction     non pas sur une seule mélodie de ténor, mais        cadences rapprochées introduisent les autres         de la célèbre antienne mariale Ave regina
 n’était pas notée, mais plutôt suggérée par une        sur deux : une paire d’antiennes pour l’office de   voix, qu’il commence la montée en puissance          celorum. Celle-ci est atypique en ce qu’elle
 phrase subtile : «le crabe sort entier, mais revient   la Vierge. Cette pièce est si axée sur la Vierge    jusqu’au «Amen».                                     divise le texte en une série de courtes phrases.
 à moitié» (“cancer eat plenus sed redeat               Marie, qu’elle était probablement destinée à                                                             En réponse à cette structure fragmentée, Du
 medius”). Beaucoup de choses ont été écrites           une célébration mariale pour le temps pascal.         Chaque messe de ce double CD fait usage            Fay construit le motet Ave regina celorum III
 sur le symbolisme possible de ce procédé. Tout         À cette période, il est difficile d’associer un     d’un «motif de tête», soit un court passage          en quatre sections complètes. Dans le Kyrie de
 aussi intéressante (et non sans rapport) est la        sujet comme «Marie» à un style compositionnel       répété au début de chaque mouvement.                 la messe, il pousse cette approche plus avant
 façon dont les autres voix s’entremêlent avec          en particulier – mais peut-être n’est-ce pas un     Dans Ecce ancilla, le motif de tête subit une        : reconnaissant que la musique de la première
 le ténor. Vers la fin de l’exposition rétrograde du    hasard si cette messe profondément intimiste        transformation particulièrement élégante.            demi-phrase du chant («Ave regina celorum»)
                                                        est dominée par une écriture à deux voix. Des       La phrase que nous entendons au début du             est répétée à l’identique dans la seconde
 ténor (1/11/4’25), Du Fay ralentit le mouvement
                                                        duos apparaissent même là où on ne les attend       Kyrie est étendue au Gloria, où elle donne           («Ave domina angelorum»), il les traite toutes
 vers l’avant, se tourne brièvement vers une
                                                        pas, comme lorsqu’ils viennent interrompre lon-     naissance à un duo inaugural beaucoup plus           les deux comme des sections indépendantes
 sonorité brillante de do, puis s’ancre ferme-
                                                        guement la texture à quatre voix au milieu du       long ; le Credo commence comme le Gloria,            (1+1). De là, il compose une section distincte
 ment sur le sol ; tout cela permet de mettre en
                                                        Kyrie I (0’33).                                     mais le duo initial continue à être développé.       pour chaque nouvelle phrase de chant (+3),
 exergue le retour du ténor vers la mélodie origi-
                                                                                                            Le moment charnière survient dans le Sanctus,        et intercale encore deux sections sans cantus
 nelle (4’38). À partir de là, la musique demeure
                                                                                                            qui s’ouvre avec la musique du Kyrie, soutenue       firmus (+2), pour arriver à un total de sept sec-
 dans un climax jusqu’à la fin, avec une écriture         Tout au long de la messe, Du Fay use de
                                                                                                            désormais par une vigoureuse ligne de basse.         tions. Il adopte une approche similaire dans
 dense dans les voix libres et une très rapide          changements de texture pour gérer le temps
                                                                                                            Dans ce contexte, cette riche texture à trois        le Gloria, qui se divise en cinq sections (ou six,
 exposition du cantus firmus qui vient comme            sur de longs espaces. Le “Qui tollis” en est un
                                                                                                            voix est une musicalisation intensifiée du texte     selon la façon dont on compte) alors qu’il se
 une récapitulation de la fin du Kyrie (1/7/3’25).      exemple de premier ordre (2/2/2’43). Après
                                                                                                            (“Saint, saint, saint”). L’Agnus Dei revient à la    divise habituellement en deux ou trois sections.
 Si l’on s’éloigne un peu de ces détails, ce qui        un doux duo des voix supérieures qui s’arrête
                                                        net avant «suscipe», la basse entre comme           musique simple du Kyrie I ; le seul changement
 intrigue peut-être le plus dans cette stratégie                                                            étant l’ajout d’une « excroissance » qui permet
                                                        cantus et le contreténor se lance dans son                                                                 Cette approche fragmentée de la forme est
 de composition est que Du Fay n’a plus jamais                                                              une transition en douceur vers la texture pleine.
                                                        imitation – d’abord sur des rythmes identiques,                                                          remarquable. Mais Du Fay l’abandonne plus ou
 réitéré le procédé : aucune autre conclusion
                                                        puis, sur «deprecationem nostram», avec de                                                               moins dans le reste de la messe : le Credo est
 des ordinaires de ses messes n’est aussi délibé-
                                                        nombreuses syncopes. Tout ceci prépare à              Les sources de la Missa Ecce ancilla domini        divisé en quatre sections, tandis que, comme
 rément éblouissante.
                                                        l’entrée du ténor (3’29). Mais plutôt que de        suggèrent que le ténor devait chanter les textes     le veut l’usage, le Sanctus est scindé en cinq
                                                        traiter celle-ci comme un moment fort, Du Fay       du cantus firmus plutôt que les paroles de l’ordi-   sections et l’Agnus Dei en trois sections. Tout
                          ***                           fait marche arrière en matière de comlexité         naire de la messe. Nous avons opté pour cette        ceci ne nous permet pas d’avaliser l’interpréta-

16                                                                                                                                                                                                               17
Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
3. Guillaume Du Fay, Missa Se la       tion selon laquelle la Missa Ave regina celorum      que la musique alors posée sur «Du Fay» porte
face ay pale, Kyrie, Capp. Sist. 14,
fol. 27v [© Biblioteca Apostolica      marquerait la fin de l’unité musicale parfaite.      ici sur «[misere]re nobis» (“aie pitié de nous” ;
Vaticana                               Au contraire, si cette messe nous apprend            2/12/3’03). Cette transformation textuelle nous
                                       une chose, c’est que Du Fay s’est adonné à           dit beaucoup sur ce que cela signifiait d’être
                                       des expérimentations jusqu’à la fin de sa vie.       un chrétien croyant à la fin du Moyen Âge : la
                                       Parmi les autres expériences, on notera un duo
                                                                                            supplication personnelle de Du Fay a été sub-
                                       jumelé à la fin du Gloria qui est répété à l’iden-
                                                                                            sumée dans la supplication collective.
                                       tique à la fin du Credo (2/9/5’41 et 2/10/8’14)
                                       ; le recours au figuralisme dans «Et ascendit in
                                       celum» (“et Il est monté au ciel”) qui anticipe                                               Jesse RODIN
                                       le madrigal italien d’un demi-siècle (2/10/5’00)                                   Traduction : Jérôme Gierkens
                                       ; ou l’introduction inattendue de si bémol, mi
                                       bémol, et même la bémol au milieu du Credo           Remarque sur la chronologie :
                                       (2/10/6’15), suivis par un duo gigantesque dans      On sait que la musique du milieu du XVe siècle est
                                       lequel le ténor mène la chasse au cantus (6’52       difficile à dater, notamment parce que beaucoup
                                       et 7’17).                                            d’œuvres n’ont survécu que dans une seule copie
                                                                                            manuscrite. Avec les pièces présentées ici, on peut
                                                                                            faire un peu mieux que de coutume. L’intégralité ou
                                         Bien que cette musique ne puisse être              des parties de ces messes sont conservées dans deux
                                       considérée ni comme traditionnelle ni comme          (Ecce ancilla domini), trois (Se la face), voire quatre
                                       totalement novatrice, elle est profondément          sources (L’homme armé et Ave regina celorum).
                                       personnelle. Dans le motet, Du Fay insère            On peut dater de façon assez assurée la messe Se
                                       des tropes dans le texte du chant, par deux          la face ay pale aux années 1450 (probablement au
                                       fois en référence à lui-même : “Aie pitié de         début de la décennie), la messe L’homme armé aux
                                       ton laborieux Du Fay” et “Du Fay implore ta          environs de 1460, la messe Ecce ancilla domini à 1464
                                                                                            ou juste avant, et la messe Ave regina celorum à
                                       miséricorde”. Pour le second de ces textes,
                                                                                            l’année 1472 environ. La chanson Se la face ay pale,
                                       Du Fay interrompt un passage animé par               qui est conservée en entier dans douze sources (en
                                       une musique sombre et poignante qui attire           différentes versions), est beaucoup plus ancienne : elle
                                       l’attention sur son propre nom (2/7/3’50). Fait      date des années 1430 ; le motet Ave regina celorum III
                                       révélateur, cette même musique fait son retour       fut quant à lui probablement composé au début des
                                       dans la messe, à la fin de l’Agnus Dei II – sauf     années 1460.

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Guillaume Du Fay les messes à teneur - Cut Circle Jesse Rodin - direction
Guillaume Du Fay
                                                     end the mass was the prestige genre of the        rial in long note values. And yet there are many        Still more adventurous are rhythmically active
                                                     day –and Du Fay was undoubtedly aware of his      places where the lower voices take center             passages (1/8/2:26, 2/7/5:45, 2/9/3:24), exotic
                                                     status as “elder statesman” in an arena replete   stage, as when the tenor speeds up, allowing          uses of triplets (1/9/6:42, 1/11/0:44, 2/10/5:33),
                                                     with younger talent. Moreover, the Missa Se la                                                          extended sequences (2/4/3:08), and uses of
                          Les Messes à teneur        face ay pale was probably composed while
                                                                                                       the pre-existing material to be heard (e.g.,
                                                                                                       CD1/Tr4/6:28 ff., 1/7/3:26), or the bassus rises in   dissonance that would make a composer of
                                                     Du Fay was at the Court of Savoy, whereas the                                                           the next generation blush (1/9/1:45). Subtler
                                                                                                       pitch (1/9/9:36) or even sings alone (1/10/3:40).
   What did it mean for Guillaume Du Fay (ca.        other masses date from his last years in Cam-                                                           touches include written-out ritards (1/9/10:16,
                                                     brai. Thus in contrast to Haydn and Beethoven,    The contra typically occupies a range about
 1397-1474), chameleon-like expert in every                                                                                                                  2/10/3:32) and hemiolas in which the voices
 musical genre of his day, to compose four set-      Du Fay didn’t conceive these works in relation    a fifth below the highest voice, but in some          emphasize the second beat of a three-beat
 tings of the Mass Ordinary toward the end of        to one another, nor did he compose them           passages it soars above the cantus (1/3/4:55,         “measure” (1/2/0:53–56, 2/12/4:26). The pas-
 his life? Looking back from the vantage point       under similar circumstances. And of course Du     1/9/1:59). Elsewhere the cantus drops out,            sages identified here are the tip of an iceberg:
 of the next generation, when the polyphonic         Fay’s settings were intended not for concert      giving the contra room to sing some of its most       this is music that repays close listening. [To follow
 mass reigned supreme, it might be tempting          performance, but for the liturgy. Nonetheless,    magical music (1/5/1:55, 2/5/3:21, 2/10/1:43).        along with a modern score, visit http://josquin.
 to interpret these works as a self-conscious        experiencing the tenor masses as a unit offers                                                          stanford.edu.]
                                                                                                       Our performances aim to capture the energy
 summa of Du Fay’s career – an achieve-              a special opportunity. In these works we can
                                                                                                       and intensity of these passages, in which the
 ment akin to Haydn’s London Symphonies or           track changes in musical style over a roughly
                                                     twenty-year period, watch a genre develop         composer is clearly strutting his stuff.                                        ***
 Beethoven’s late string quartets. On a purely
 musical level these comparisons are apt. Each       into the most important of its day, and observe
 mass stakes out unique musical terrain; they        how the leading composer of his age assem-          Du Fay is a master of musical texture, which is        The lush harmonies and stunning melodic
 are often strikingly experimental; and the entire   bled short polyphonic sections into compelling    to say that he carefully manipulates the com-         writing of the Missa Se la face ay pale conceal
 set is shimmeringly beautiful from beginning to     large-scale forms.                                                                                      something important: this work is a watershed in
                                                                                                       ings and goings of each voice, and how the
 end, revealing a composer at the height of his                                                                                                              the history of music notation. It is the first mass in
                                                                                                       voices relate to one another, to create seem-
 powers.                                               These masses are full of surprises – and so                                                           which the entire tenor part is performed from a
                                                                                                       ingly endless variety. There are far too many
                                                     before approaching each in turn, it is worth                                                            single line of music, in this case the tenor of Du
                                                                                                       combinations to catalogue here, but listen in
  The analogy has its limits. Du Fay’s tenor         getting a sense for what makes them tick. As a                                                          Fay’s song Se la face ay pale. Now this does
                                                                                                       particular for several imitative duos (2/3/2:06,      not mean that the mass tenor always sounds
 masses were composed not in a clump, but            rule the upper voices are far more active than
 over a wide chronological range, from the           the lower: the cantus and contra carry most       2/10/1:07), including some in which the imita-        like the song; on the contrary, a series of verbal
 1450s to the 1470s. At the beginning of this        of the rhythmic and melodic interest while the    tion is very close (1/8/4:09); and for striking       instructions causes the tenor to manipulate the
 period the cyclic mass was still a young genre      tenor and bassus provide support underneath,      entrances of the lower voices after extended          duration of each written note. Most of the time
 whose conventions were emergent; by the             with the tenor “holding” the pre-existing mate-   upper-voice duets (1/3/0:32, 2/1/1:09).               the tenor sings at half speed, augmenting the

20                                                                                                                                                                                                               21
4. Guillaume Du Fay, Missa          written note values by a factor of two (“crescit        end of each movement—but it is the conclu-
L’homme armé, Kyrie, Capp.
Sist. 14, fol. 101v [© Biblioteca   in duplo”). In the Gloria and Credo, Du Fay opts        sions to the Gloria and Credo that stand out.
Apostolica Vaticana]                for a more complex procedure: the first section         As hinted at above, these movements are
                                    of each movement is to be sung in threefold             closely linked: because of their shared tenor
                                    augmentation, the second in twofold, the third          treatment, they are precisely the same length,
                                    “as it lies” (i.e., at normal speed). The Et in terra   and both conclude with a short, climactic
                                    pax and Patrem, in threefold augmentation,              section (Cum sancto spiritu/Confiteor). At the
                                    are particularly intriguing, since tripling the value   “Amen,” (1/3/7:27, 1/4/7:16), Du Fay composes
                                    of each note causes the tenor to be metri-              extended melismas that expand the “triadic”
                                    cally out of sync with the other voices (e.g.,          material from the song into a four-voice con-
                                    1/3/1:27). All these techniques reflect Du Fay’s        text. The conclusion to the Credo can be heard
                                    interest in squeezing multiple sounds out of an         as an intensifying sequel to that of the Gloria,
                                    unchanging text – what Emily Zazulia has aptly          with the free voices now moving assertively
                                    called “the aesthetic of notational fixity.”            upwards toward the top of their ranges. In both
                                                                                            these passages, the mass on the one hand
                                                                                            sounds temporarily like the song – an unusual
                                      Notation aside, there is much to admire in
                                                                                            circumstance in a genre where the point is to
                                    Du Fay’s writing. Perhaps most impressive is
                                                                                            make something new out of something old.
                                    how the mass elaborates the parent song.
                                                                                            On the other hand, the denser texture ensures
                                    Because the ballade Se la face ay pale is
                                                                                            that no listener would ever confuse the two
                                    (exceptionally) strophic, listeners have three
                                                                                            works. And indeed both here and throughout
                                    chances to hear its very strange conclusion. At
                                                                                            the mass, Du Fay short-circuits the song’s final
                                    the refrain text (“Sans elle ne puis”; 1/1/0:40),
                                                                                            cadence, swerving away from C to arrive on F.
                                    all three voices participate in an extended
                                    melisma that features what we today might
                                    call “triadic imitation”: they dart from g’ to e’         Notwithstanding these playful harmonic shifts,
                                    to c’, then, after a rest, from to g’ to e’ to g’       the Missa Se la face ay pale is practically “clas-
                                    (0:44). Like a game of leapfrog, the singers            sical” compared to the other mass on Disc 1.
                                    rapidly overtake one another, building steadily         L’homme armé is imposing, densely textured,
                                    toward the final cadence. In the mass, Du Fay           and audacious. Most modern performers have
                                    reworks this material five times, once at the           failed to engage fully with one of its most com-

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pelling (and, from the perspective of the his-      awry. Indeed when correctly performed, the             As the verbose title used here suggests, the             Every mass on the album makes use of a
 torical evidence, unambiguous) features: while      complexity is almost inaudible.                      Missa Ecce ancilla domini/Beata es Maria is              “head motive” – a short passage repeated at
 all the voices are rooted in G, the cantus lacks                                                         based on not one tenor melody, but two: a                the start of each movement. In Ecce ancilla
 the B-flat signature carried by the three lower                                                          pair of antiphons for the office of the Virgin. This     the head motive undergoes an especially
                                                        The conclusion to this mass helped initiate a
 voices. Thus cantus B-naturals regularly brush up                                                        piece is very much about the Virgin Mary, and            elegant transformation. The phrase we hear
                                                     trend of treating the Agnus Dei III as a musical
 against B-flats elsewhere – something one can                                                            was probably intended for a Marian celebra-              at the beginning of the Kyrie is expanded in
                                                     climax. Du Fay famously turns the L’homme
 hear even in the opening phrase (notice the                                                              tion during Eastertide. In this period it is difficult   the Gloria, where it gives rise to a much longer
                                                     armé melody around, having the tenor sing it
 turn at 1/7/0:11). These unexpected juxtaposi-                                                           to associate a subject such as “Mary” with any           opening duo; the Credo begins like the Gloria,
                                                     first backwards in augmentation, then forwards
 tions, which hark back to an early fifteenth-cen-                                                        particular compositional style – but perhaps it is       but the opening duo expands still further. A
                                                     at full speed. This instruction wasn’t written
 tury sound world, arguably reach their height in                                                         not an accident that this deeply intimate mass           pivotal moment comes in the Sanctus, which
                                                     out, but rather indicated with a clever phrase:
 the Et incarnatus est, where stretto imitation at                                                        features an abundance of two-voice writing.              opens with the music of the Kyrie, only now but-
                                                     “the crab goes out full but comes back half”
                                                                                                          Duets appear even where we don’t expect                  tressed by a lively bassus line. Heard in context,
 the octave between the upper voices leads           (cancer eat plenus sed redeat medius). Much
                                                                                                          them, such as the very long break from full tex-         this rich, three-voice texture is a heightened
 to different realizations of the same melody in     has been written about the possible symbolism
                                                                                                          ture in the middle of the Kyrie I (0:33).                setting of the text (“Holy, holy, holy”). The Agnus
 close succession (1/9/4:58).                        behind this procedure. Equally interesting (and
                                                                                                                                                                   Dei returns to the simple music of the Kyrie I; the
                                                     not unrelated) is how the other voices interlock
                                                                                                                                                                   only change is an added “tail” that makes for a
                                                     with the tenor. Toward the end of the tenor’s           Throughout the mass Du Fay uses changes
    No less audacious is a passage earlier in the                                                                                                                  smoother transition to full texture.
                                                     retrograde statement (1/11/4:25), Du Fay             in texture to manage time over long spans. A
 Credo that will appeal to devotees of new
                                                     slows the forward motion, shifts fleetingly to a     prime example is the Qui tollis (2/2/2:43). After
 music. In what is probably intended as a depic-
                                                     bright C sonority, and arrives strongly on G; all    a mellow upper-voice duet that comes to a                   The sources for the Missa Ecce ancilla domini
 tion of “through Him all things were made”          of this highlights the tenor’s subsequent return     full stop before “suscipe”, the bassus enters as         suggest that the tenor should sing the cantus-
 (per quem omnia facta sunt), Du Fay briefly         to forward motion (4:38). From here the music        cantus and contra surge forward in imitation –           firmus texts as opposed to the words of the
 casts each voice in a distinct meter (1/9/3:24).    remains climactic until the end, with busy writing   first in even rhythms, then, at “deprecationem           Mass Ordinary. We have opted for this solution
 To describe the passage using modern termi-         in the free voices and a rapid-fire statement of     nostram” with abundant syncopation. All of               both here and in the other mass on Disc 2,
 nology: the tenor remains in 3/4; the bassus        the cantus firmus that recapitulates the end of      this sets up the entrance of the tenor (3:29).           where both lower voices sing the text of the
 switches to 6/8; the cantus, also in 3/4, sings     the Kyrie (1/7/3:25). Stepping back from these       But rather than treat the tenor entrance as a            parent chant. That chant, the famous Marian
 triplets against every two beats of the measure;    details, what is perhaps most intriguing about       climactic moment, Du Fay extends the musical             antiphon Ave regina celorum, is atypical in
 and the contra, with bar lines identical to those   this compositional strategy is that Du Fay never     argument by pulling back rhythmically. Only in           dividing the text into a series of short phrases.
 of the lower voices, moves into a subdivided        tried it again: none of the other conclusions to     the next duo (3:46), where two closely spaced            Responding to this fragmented structure, Du
 2/4. It’s pandemonium – and yet the counter-        his Mass Ordinary settings are so self-consciously   cadences bring in the other voices, does he              Fay casts the motet Ave regina celorum III into
 point is so well composed that nothing goes         dazzling.                                            begin to ramp up toward the “Amen.”                      fully four sections. In the Kyrie of the mass he

24                                                                                                                                                                                                                  25
takes this approach still further: recognizing that   A-flat in the middle of the Credo (2/10/6:15),      A Note about Chronology :
 the music of the chant’s first half-phrase (“Ave      followed by an eye-popping duo in which the
                                                                                                           Music of the mid-fifteenth century is notoriously hard
 regina celorum”) is repeated exactly in the           tenor chases the cantus up a tree (6:52-7:17).      to date, in part because many pieces survive in only
 second (“Ave domina angelorum”), he treats                                                                one manuscript copy. In the present case we can
 both as self-contained sections (1+1). From                                                               do better than usual. All or portions of these masses
 there he writes a distinct section for each new         While this music may be neither traditional nor
                                                                                                           survive in two (Ecce ancilla domini), three (Se la face),
 chant phrase (+3), and interpolates still two         valedictory, it is deeply personal. In the motet,   or even four sources (L’homme armé and Ave regina
 more sections without cantus firmus (+2), for         Du Fay tropes the chant text, twice referring to
 a total of seven. He takes a similar tack in the      himself: “Have mercy on thy laboring Du Fay”
 Gloria, which divides into five (or, depending        and “Du Fay beseeches thy mercy”. For the
 on how one counts, six) sections rather than the      second of these texts Du Fay interrupts a lively
 more expected two or three.                           passage with dark, poignant music that calls
                                                       attention to his own name (2/7/3:50). Tellingly,
    This fractured approach to form is notable.        this same music returns in the mass, at the end
 But Du Fay more or less drops it in the rest of the   of the Agnus Dei II – except the music formerly
 mass: the Credo is in four sections, the Sanctus      set to “Du Fay” is now “[misere]re nobis” (have
 in the usual five, the Agnus Dei in the usual         mercy on us; 2/12/3:03). This textual transforma-
 three. All of this fails to jibe with a tendency to   tion has much to tell us about what it meant to
 read the Missa Ave regina celorum as a swan-          be a believing Christian in the late middle ages:
 song of perfect musical unity. On the contrary,       Du Fay’s personal plea has been subsumed into
 if this mass tells us anything it’s that Du Fay was   the collective.
 committed to experimentation up until the end
 of his life. Other experiments include a paired
 duo at the end of the Gloria that is repeated                                            Jesse RODIN
 exactly at the end of the Credo (2/9/5:41
 and 2/10/8:14); a use of word painting at “Et
 ascendit in celum” (and He ascended into
 heaven) that anticipates the Italian madrigal
 by half a century (2/10/5:00); and the unex-
 pected introduction of B-flat, E-flat, and even

26                                                                                                                                                                     27
Guillaume Du Fay
                                                     periode was de cyclische mis nog altijd een
                                                     jong genre waarvan de conventies langzaam
                                                     vorm aannamen; tegen het eind van deze
                                                     periode was de mis het prestigieuze genre
                          Les Messes à teneur        van die tijd – en Du Fay was zich ongetwijfeld
                                                     bewust van zijn status van “elder statesman”
    Wat betekende het voor Guillaume Du Fay          in een arena die barstte van jongere talenten.
 (ca. 1397-1474), kameleonachtige expert             Bovendien werd de Missa Se la face ay pale
 in elk muzikaal genre van zijn tijd, om tegen       waarschijnlijk gecomponeerd toen Du Fay
 het eind van zijn leven vier versies van het        aan het Hof van Savoie verbleef, terwijl de
 ordinarium van mis te componeren? Als we            andere missen uit zijn laatste jaren in Cambrai
 terugkijken vanuit het hogere gezichtspunt van      stammen. In tegenstelling tot Haydn en Beet-
 de volgende generatie, als de polyfonische mis      hoven, vatte Du Fay deze werken dus niet op
 overheersend is, kan het verleidelijk zijn deze     in verband met elkaar en hij componeerde ze
 werken te interpreteren als een soort toppunt
                                                     ook niet onder dezelfde omstandigheden. En
 in de carrière van Du Fay – een voltooiing zoals
                                                     natuurlijk waren de composities van Du Fay
 de London Symfonieën van Haydn of de latere
                                                     niet bestemd voor het concert maar voor de
 strijkkwartetten van Beethoven. Op puur muzi-
                                                     liturgie.
 kaal niveau zijn deze vergelijkingen juist. Elke
 mis stijgt ver uit boven het loutere muzikale; ze
 zijn vaak opvallend experimenteel; en de hele         Toch biedt het idee de tenormissen als een
 set is van het begin tot het einde schitterend en   eenheid uit te werken, een zeer bijzondere
 openbaart een componist die op het toppunt          ervaring. In deze werken kunnen we de veran-
 van zijn kunst is.                                  deringen in de muzikale stijl over een periode
                                                     van ruwweg tweeëntwintig jaar nagaan,
  De analogie heeft zijn grenzen. De tenor-          zien hoe een genre zich ontwikkelt tot het
 missen van Du Fay werden helemaal niet in           belangrijkste van zijn tijd en observeren hoe de
 een korte tijd gecomponeerd, maar verspreid         toonaangevende componist uit die tijd korte
 over een chronologisch lange tijdspanne, van        polyfonische stukken samenbracht in fascine-                        5. Le couronnement de la Vierge,
 de jaren 1450 tot 1470. Aan het begin van deze      rende gehelen op grote schaal.                           extrait de Les Très Riches Heures du duc de
                                                                                                        Berry, Ms. 65, fol. 60v [© Musée Condé, Chantilly]
28                                                                                                                                                    29
Deze missen zitten vol verrassingen – en            Du Fay is een grootmeester van de musikale     volgen, kunt u de site http://josquin.stanford.       drie maal sneller zingen van elke notenwaarde
 daarom is het belangrijk een idee te krijgen van    textuur wat wil zeggen dat hij heel zorgvuldig    edu bekijken.]                                        tot gevolg heeft dat de tenor, op metrisch vlak,
 de manier waarop ze functioneren alvorens           het komen en gaan van elke stem bestudeert                                                              asynchroon wordt in vergelijking met de andere
 elk stuk apart te beluisteren. In het algemeen      en manipuleert en de manier waarop de                                                                   stemmen (e.g., 1/3/1:27). Al deze technieken
                                                                                                                               ***
 zijn de hogere stemmen veel actiever dan de         stemmen tot elkaar verbonden zijn om schijn-                                                            weerspiegelen Du Fay’s interesse om velerlei
 lagere stemmen: de cantus en contratenor zijn       baar eindeloze variaties aan te brengen. Er                                                             klanken uit een ongewijzigde tekst te persen –
                                                     zijn te veel combinaties mogelijk om hier op        De losse harmonieën en de verbazingwek-             wat Emily Zazulia zeer passend “the aesthetic of
 het belangrijkst wat het ritme en de melodie
                                                     te sommen, maar luister in het bijzonder naar     kend melodische schriftuur van de Missa Se la         notational fixity” heeft genoemd.
 betreft, terwijl de tenor en de bas daaronder
                                                     enkele imitatieve duo’s (2/3/2:06, 2/10/1:07),    face ay pale verbergen iets belangrijks: dit werk
 de melodie steunen, waarbij de tenor het
                                                     met sommige waarin de imitatie heel sterk         betekent een wending in de geschiedenis van
 daarvoor aanwezige notenmateriaal in lange                                                                                                                    Behalve de notering valt er nog veel te
                                                     is (1/8/4:09) en naar enkele duo’s met een        de muzieknotatie. Het is de eerste mis waarin
 toonwaarden “aanhoudt”. En toch zijn er vele                                                                                                                bewonderen in de schrijfwijze van Du Fay.
                                                                                                       de hele tenorpartij is gebaseerd op één enkele
 plaatsen waar de lagere stemmen centraal            opvallend begin van de lagere stemmen na                                                                Het meest indrukwekkende is misschien wel
                                                                                                       melodische lijn, in dit geval de melodie van de       de manier waarop de mis de “the parent
 komen te staan, zoals bij voorbeeld wanneer         uitgebreide duetten van de hogere stemmen
                                                                                                       tenorpartij van het lied van Du Fay Se la face        song” uitwerkt. Aangezien de ballade Se la
 de tenor sneller gaat zingen, zodat de eerder       (1/3/0:32, 2/1/1:09).
                                                                                                       ay pale. Nu betekent dat niet dat de tenormis         face ay pale in strofen is opgebouwd wat
 aanwezige noten gehoord kunnen worden                                                                 altijd klinkt als een lied; in tegendeel zelfs: een
 (e.g., CD1/Tr4/6:28, 1/7/3:26), of wanneer                                                                                                                  uitzonderlijk is, hebben de luisteraars drie maal
                                                       Nog avontuurlijker zijn de ritmisch dynami-     serie opgetekende instructies verplicht de
 de bas hoger gaat zingen (1/9/9:36) of zelfs                                                                                                                de gelegenheid het zeer vreemde slot ervan
                                                     sche passages (1/8/2:26, 2/7/5:45, 2/9/3:24),     tenor de duur van elke geschreven noot te             te horen. Bij het refrein (“Sans elle ne puis”;
 alleen zingt (1/10/3:40). De contratenor zingt      het exotische gebruik van triolen (1/9/6:42,      veranderen. De tenor zingt het merendeel              1/1/0:40) zingen de drie stemmen samen in
 heel typerend op een toonhoogte die een             1/11/0:44,    2/10/5:33),  lange     sequenties   van de tijd op halve snelheid en verhoogt de          een uitgebreid melisme in de vorm van wat we
 vijfde onder de hoogste stem ligt, maar in          (2/4/3:08) en gebruik van dissonantie die de      geschreven notenwaarden twee keer (“crescit           tegenwoordig een “driehoeksimitatie” zouden
 sommige passages stijgt hij boven de cantus         componisten van de volgende generatie zou         in duplo”). In het Gloria en het Credo opteert        kunnen noemen: ze gaan van g’ naar e’ naar
 uit. (1/3/4:55, 1/9/1:59). Ergens anders valt de    doen blozen (1/9/1:45). Subtielere aanwijzingen   Du Fay voor een complexere procedure: de              c’ en dan na en kleine pauze, van g’ naar e’
 cantus uit, zodat hij de contratenor de ruimte      bevatten uitgeschreven ritardando’s (1/9/10:16,   eerste sectie van elke beweging moet drie             en weer naar g’ (0:44). Het lijkt op een spel van
 geeft enkele van zijn meest magistrale muziek       2/10/3:32) en hemiola’s waarin de stemmen         keer sneller gezongen worden, de tweede               “haasje-over”, waarbij de zangers snel van
 te zingen (1/5/1:55, 2/5/3:21, 2/10/1:43). Onze     de nadruk leggen op de tweede tel van een         sectie twee maal zo snel en de derde moet             elkaar overnemen en in constante beweging
 opnamen trachten de energie en de intensiteit       driekwartsmaat (1/2/0:53–56, 2/12/4:26). De       gezongen worden zoals het aangegeven staat            naar de finale cadens toewerken Du Fay her-
 van deze passages op te vangen waarin de            hier geïdentificeerde passages vormen de top      (d.w.z. op normale snelheid). Het Et in terra pax     bewerkt in zijn mis het materiaal vijf keer: een
 componist heel duidelijk en heel trots zijn kunst   van de ijsberg: dit is muziek die aandachtig      en Patrem, die drie maal zo snel gezongen             keer aan het einde van elke beweging – maar
 ten toon spreidt.                                   luisteren beloont. [Om een moderne trend te       worden, zijn bijzonder intrigerend, gezien het        het is het slot van het Gloria en het Credo dat

30                                                                                                                                                                                                          31
boven alles uitsteekt. Zoals hierboven al aange-    niet in geslaagd één van de meest verplichte       6. Guillaume Du Fay, Missa L’homme armé,
                                                                                                             Kyrie I, facsimilé, Lucca Codex, fol. 39r
 geven werd, zijn deze bewegingen bijzonder          kenmerken (en vanuit een historisch oogpunt                       [© University of Chicago Press]
 nauw met elkaar verbonden: namelijk door            een ondubbelzinnig kenmerk) volledig uit te
 hun gedeelde identieke behandeling van de           voeren: dat wil zeggen terwijl alle stemmen
 tenorstem, want ze hebben precies dezelfde          in G zijn, mist de cantus het Bes kenmerk dat
 lengte en ze sluiten alle twee af met een korte     de drie lagere stemmen hebben. Daarom
 climax (Cum sancto spiritu/ Confiteor). Bij het     botst de cantus die B na herstellingsteken zingt
 “Amen,” (1/3/7:27, 1/4/7:16) componeert Du          regelmatig op tegen de Bes –wat men zelfs in
 Fay uitgebreide melismen waarin het deel van        de openingszin al kan horen (1/7/0:11). Deze
 de driehoeksimitatie uitgroeit tot een geheel       onverwachte       juxtaposities die teruggaan
 van vierstemmen. Het slot van het Credo kan         tot de vroeg vijftiende eeuwse klankwereld,
 gehoord worden als een versterkt gevolg op          bereiken hun hoogtepunt in het “Et incarnatus
 het Gloria met de vrije stemmen die nu heel         est”, waar de naïeve imitatie in de octaaf
 bewust stijgen naar de top van hun tessituur. In    tussen de hogere stemmen tot verschillende,
 beide passages klinkt de mis enerzijds een tijdje   snel op elkaar volgende realisaties van
 als een lied – wat ongewoon is in een genre dat     dezelfde melodie leidt (1/9/4:58).
 als doel heeft met oud materiaal iets nieuws
 te maken. Anderzijds zorgt de complexere
                                                       Niet minder stoutmoedig is een eerdere
 structuur ervoor dat geen enkele luisteraar de
                                                     passage uit het Credo die de aanhangers
 twee werken ooit met elkaar zou verwisselen.
                                                     van moderne muziek zal bevallen. In wat
 En inderdaad, hier en doorheen de hele mis
                                                     waarschijnlijk bedoeld was als een afbeelding
 verandert Du Fay de slotcadans van het lied
                                                     van “door hem werden alle dingen gemaakt”
 door van C naar uiteindelijk F weg te zwerven.
                                                     (per quem omnia facta sunt), zet Du Fay
                                                     elke stem heel kort in een afzonderlijke maat
    Ondanks deze harmonische verschuivingen          (1/9/3:24). Laten we deze passage met een
 is de Missa Se la face ay pale bijna “klassiek”     moderne terminologie beschrijven: de tenor
 vergeleken met de andere mis op de CD 1.            blijft in 3/4-maat zingen. De bas gaat over naar
 De Missa L’homme armé is indrukwekkkend,            6/8-maat; de cantus zingt ook in 3/4-maat en
 met een complexe en heel stoutmoedige con-          zingt tripletten tegen elke twee tellen van de
 structie. De meeste moderne uitvoerders zijn er     maat en de contratenor die een melodielijn

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gelijkaardig aan die van de lagere stemmen        en de cantus firmus als in een vuurwerk een          Door de hele mis heen gebruikt Du Fay            maar die nu echter gesteund wordt door een
 heeft, gaat over naar een 2/4-maat. Het is een    slotscène zingt die het einde van het Kyrie        veranderingen in de compositiestijl om de tijd     levendige baslijn. In deze context gehoord is
 pandemonium – en toch is het contrapunt zo        samenvat (1/7/3:25). Als we wat afstand            over een brede tijdspanne te beheersen. Een        deze rijke compositie voor drie stemmen een
 goed gecomponeerd dat niets verkeerd loopt.       nemen van deze details is het meest opval-         eerste voorbeeld is de Qui tollis (2/2/2:43). Na   versterkte setting van de tekst (“Heilig, heilig,
 Wanneer dit goed uitgevoerd wordt is de com-                                                         een zacht duet van de hoge stemmen dat             heilig”). Het Agnus Dei keert terug naar de
                                                   lende van deze compositiestrategie dat Du Fay
 plexiteit bijna niet te horen.                                                                       helemaal eindigt voor “suscipe” komt de bas        eenvoudige muziek van het Kyrie I. De enige
                                                   het nooit meer probeerde. Geen enkele van
                                                                                                      op die zingt als cantus en de contratenor gaat     verandering is een toegevoegde “staart” die
                                                   de andere slotscènes van zijn ordinarium van       verder in imitatie—aanvankelijk in gelijk ritme    de overgang naar de oorspronkelijke schriftuur
   Het slot van deze mis was de aanzet tot een     mis zijn zo zelfbewust verblindend.                en daarna in “deprecationem nostram” met           soepeler maakt.
 trend om het Agnus Dei III als een muzikale
                                                                                                      overvloedige syncopes. Dit dient allemaal om
 climax te bewerken. Du Fay draait meesterlijk
                                                                          ***                         de entree van de tenor aan te kondigen (3:29).
 rond de melodie van L’homme armé, waarbij                                                                                                                  De bronnen van de Missa Ecce ancilla domini
                                                                                                      Maar in plaats van de entree van de tenor als
 hij de tenor eerst achteruit laat zingen in                                                                                                             suggereren dat de tenor de tekst van de
                                                                                                      een climax te behandelen, vergroot Du Fay het
 augmentatie en daarna vooruit in normale            Zoals de breedsprakige titel hier doet                                                              cantus firmus zou zingen als tegengesteld aan
                                                                                                      muzikale element door het ritme te vertragen.
 snelheid. Deze instructie was niet echt opge-                                                                                                           de woorden van het ordinarium. We hebben
                                                   veronderstellen, is de Missa Ecce ancilla          Pas in het volgende duo (3:46) waar de andere
 schreven maar eerder aangegeven in een                                                                                                                  zowel hier als voor de andere mis op CD 2 voor
                                                   domini/Beata es Maria gebaseerd op twee            stemmen in nauw verbonden ritmes worden
 knappe zin: “de krab vertrekt compleet maar                                                                                                             deze oplossing gekozen, waar de twee lagere
                                                   tenormelodieën in plaats van één: een paar         opgevoerd, begint hij op te klimmen naar het
 komt half terug” (cancer eat plenus sed redeat                                                                                                          stemmen de tekst van het oorspronkelijke lied
                                                   antifonen voor de dienst van de Maagd. Dit         “Amen.”
 medius). Men heeft veel geschreven over de                                                                                                              zingen. Dit lied, het beroemde Maria antifoon
 mogelijke symboliek achter deze procedure.        stuk gaat vooral over de Maagd Maria en was                                                           Ave regina celorum, is atypisch door het
 Het is ook interessant (en niet zonder verband)   waarschijnlijk gecomponeerd voor een Maria-          Elke mis in dit album maakt gebruik van een      opdelen van de tekst in een reeks korte zinnen.
 te zien hoe de andere stemmen op de tenor         dienst op Pasen. In deze periode is het moeilijk   “hoofdmotief” – een korte passage die aan het      In antwoord op deze gefragmenteerde struc-
 reageren. Tegen het einde van de passage die      “Maria” met een bijzondere compositiestijl te      begin van elke beweging wordt herhaald. In         tuur, giet Du Fay het motet Ave regina celorum
 de tenor retrograde zingt (1/11/4:25) vertraagt   associëren – maar misschien is het geen toeval     Ecce ancilla tondergaat het hoofdmotief een        III in vier aparte delen. In het Kyrie van de mis
 Du Fay het tempo, gaat vloeiend over naar                                                            bijzonder elegante transformatie. De zin die we    gaat hij hierin zelfs verder: omdat hij merkt dat
                                                   dat deze zeer intieme mis een overvloedige
 een heldere C klank en komt tenslotte heel                                                           aan het begin van het Kyrie horen, wordt uitge-    de muziek van de eerste halve zin van het lied
                                                   compositie voor twee stemmen bevat. Duetten
 sterk op G. Al deze elementen onderstrepen                                                           breid in het Gloria waar het aanleiding geeft      (“Ave regina celorum”) precies herhaald wordt
 de komende terugkeer van de tenor naar de         verschijnen zelfs op plaatsen waar we ze niet      tot een veel langer openingsduo; het Credo         in het tweede lied (“Ave domina angelorum”),
 normale voorwaartse gang (4:38). Vanaf dit        zouden verwachten, zoals bij voorbeeld in de       begint als het Gloria maar het openingsduo         behandelt hij de twee als identieke delen (1+1).
 moment tot het einde blijft de muziek in een      zeer lange breuk in het midden van het Kyrie I     gaat veel verder. Een spilmoment komt in het       Vanaf dat punt schrijft hij een aparte sectie
 climax waarbij de vrije stemmen druk zingen       (0:33).                                            Sanctus dat begint met de muziek van het Kyrie     voor elke nieuwe zin van elk lied (+3) en hij

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