De la séparation spatiale à la coopération institutionnelle ? Etude de l'interface ville-port à Haïphong - Urbanistes du Monde
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Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 De la séparation spatiale à la coopération institutionnelle ? Etude de l’interface ville-port à Haïphong Résumé La ville d’Haïphong abrite le deuxième port du Vietnam. Commanditée par l’ONG Urbanistes du Monde, en partenariat avec l’Association Internationale des Villes Portuaires (AIVP), cette étude a pour objectif, par le biais d’observations et d’entretiens, de poser les enjeux présents et futurs de l’interface ville-port à Haïphong. Il apparaît ainsi que les relations entre la ville et le port se sont modifiées au fil de l’implantation de nouveaux terminaux portuaires, de plus en plus coupés des zones urbaines. Cette dynamique de divorce entre la ville et le port s’illustre de plus par le choix de l’implantation d’un port moderne en eaux profondes en dehors de la ville, à Lach Huyen. Enfin, ce déplacement du port pose de nombreuses questions en matière de protection du patrimoine tant naturel que culturel, dans la mesure où les terminaux seront proches de milieux naturels classés par l’UNESCO et fréquentés en tant que tels par de nombreux touristes chaque année. Pour s’emparer de cette problématique transversale, un “contrat de baie” tente d’être mis en œuvre, malgré des difficultés politiques. Abstract Haiphong city hosts the second largest port of Vietnam. This study, supported by the NGO Urbanistes du Monde and the International Network of Port Cities (AIVP), aimed at identifying the present and future issues of the city-port interface in Haiphong. Observing the sites and interviewing actors, we have noticed that the relationships between the city and its port have changed as new port terminuses were implanted, getting progressively further and more disconnected from the city. Illustrating this divorce dynamic, a deep water port should see the light of day outside the city, in Lach Huyen. Eventually, this translation of the port raises issues regarding the protection of natural and cultural heritage, as infrastructures should be close to UNESCO World Heritage’s sites in Cat Ba Island. To address this issue and protect the touristic and environmental potential of this area, a “bay contract” is to be implemented, despite political difficulties. 1
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Introduction “L’importance des intérêts engagés est très considérable, trop considérable pour que l’on puisse envisager le principal port du Tonkin ailleurs qu’à Haïphong, véritable centre de rayonnement”1. Dès la période coloniale, la ville de Haïphong est considérée par les géographes comme une ville portuaire au riche potentiel. Choisi comme lieu clé du commerce maritime colonial, le port de Haiphong s’est depuis lors nourri de son positionnement stratégique pour faire valoir aujourd’hui son rôle de second port du Vietnam, après celui de Ho Chi Minh Ville. Situé à près de 120 kilomètres de la capitale du pays Hanoï, il y est relié, non par le fleuve Cua Cam au bord duquel il se dresse, mais par un réseau de voies rapides, notamment la future autoroute Hanoï-Haïphong, dont l’ouverture est prévue à la fin de l’année 2015. Haïphong est par ailleurs le lieu de départ de croisières touristiques à destination de l’Île de Cat Ba, classée Réserve de Biosphère par l’UNESCO en 2004. Haïphong fait ainsi partie de la Région Économique Clé du Nord Vietnam, affichant de fortes ambitions en matière de développement économique. Le Plan économique de 2004 prévoyait à ce titre de diminuer la part de l’agriculture dans le PIB régional, par l’implantation de zones industrielles tel que le parc industriel Vietnam-Singapour dans la province de Bac Ninh. Dans ce schéma de développement, le port de Haïphong s’est vu attribuer le rôle de point nodal du transport des marchandises produites localement. Ainsi, le volume de fret total transitant par le port est passé de 13,9 à 18,1 millions de tonnes (metric ton) entre 2008 et 2012. D’importants investissements provenant du gouvernement central et d’entreprises étrangères affectent d’ores et déjà, tant le paysage urbain et portuaire, que les rapports entre la ville et son port. Ainsi, en avril 2013 a été adopté le projet de construction du port en eaux profondes de Lach Huyen, à quinze kilomètres du port actuel. L’objet de cette étude est ainsi l’interface entre la ville de Haïphong et son port, entendue comme l’ensemble des relations, tant physiques, que logistiques, 1 André Choveaux “Le port de Haïphong”, Annales de Géographie, vol. 32, n°180, 1923, p. 570. 2
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 sociales ou environnementales qu’entretiennent la ville et le port. Il s’agit donc d’établir quels sont les enjeux et les dynamiques qui lient leurs développements respectifs au vu des ambitions économiques affichées. Cette étude a été commanditée par l’ONG Urbanistes du Monde, en partenariat avec l’Association Internationale des Villes Portuaires (AIVP). Séances d’observation et entretiens, au nombre de onze, avec des acteurs aux prises avec ces enjeux nous ont permis de distinguer trois enjeux du développement de ce territoire. Il apparaît ainsi que les relations entre la ville et le port se sont modifiées au fil de l’implantation de nouveaux terminaux portuaires, de plus en plus coupés des zones urbaines (partie I.). Cette dynamique de divorce entre la ville et le port s’illustre de plus par le choix de l’implantation d’un port moderne en eaux profondes en dehors de la ville, à Lach Huyen (partie II.). Enfin, cette translation vers l’Est du port pose de nombreuses questions en matière de protection du patrimoine tant naturel que culturel, dans la mesure où les terminaux se rapprochent progressivement de milieux naturels classés par l’UNESCO et fréquentés en tant que tels par de nombreux touristes chaque année. Pour s’emparer de cette problématique transversale, un “contrat de baie” tente d’être mis en œuvre (partie III.). Fig. 1. Carte du Vietnam, source : http://carnet-des-vadrouilleuses.wifeo.com/ 3
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 I. VILLE ET PORT, DES LIENS DE PLUS EN PLUS DISTENDUS Au sein du delta du Fleuve Rouge, il n’y a, semble-t-il « pas de port structuré comme on l’entend : les quais ne sont souvent que des terrassements. C’est plutôt un ensemble de terminaux gérés séparément » 2. Ce postulat de départ en dit long sur la gestion de l’implantation des terminaux, qui sont, à Haïphong, répartis le long du fleuve Cua Cam. Ainsi, au fil des extensions du port, ses relations avec la ville ont évolué passant d’une imbrication de la ville et du port à l’époque coloniale, à un port sans ville au niveau des terminaux de Dinh Vu. Fig. 2. Une interface ville-port différenciée 2 Entretien avec deux chargés de mission à l’IAU-ÎdF. 4
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 1. La ville et le port, liés par l’histoire Lorsqu’il est concédé aux Français par les Annamites en 1874, le terrain où se situe désormais le centre ville de Haïphong, n’abrite qu’un village marécageux et impraticable. La ville est assainie et aménagée par les Français, à tel point que selon l’Atlas Colonial de 1915 « la transformation topographique et urbaine de la ville, œuvre de l'administration française, a la valeur d'une véritable création » 3. À la même époque, le nombre d’habitants de la ville atteint 16 000 et dès 1900 le port est considéré comme « le principal centre de transit » 4. La ville se développe donc en rapport étroit avec son port, selon le modèle français de ville portuaire. Les quais donnent directement sur les manufactures et les commerces urbains. Fig. 3. Carte du centre ville de Haïphong, Guide Madrolle, 1928. Aujourd’hui, les quais le long de la rivière Song Tam Bach ont disparu, mais ce qu’il reste du port historique se trouve le long de la rivière Cua Cam (1 sur la carte ci-dessus). Le transport de fret est ici devenu minoritaire, remplacé par les flux de 3 Atlas Colonial, publié vers 1915 4 Robert Dubois, Le Tonkin vers 1900, Paris : Société Française d’Editions d’Art, ouvrage paru à l’occasion de l’Exposition Universelle de Paris, 1900. 5
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 touristes en direction de l’île de Cat Ba. Le port est donc ouvert sur la ville permettant aux voyageurs de s’y rendre aisément, bien que les transports en commun (notamment en provenance de Hanoï) ne desservent pas cette zone. Des rabatteurs tentent d’attirer les quelques touristes qui rôdent afin qu’ils embarquent en direction de Cat Ba. Les petits commerces de rue et les cafés subsistent toutefois le long de la rue Cu Chinh Lan menant au port. Notons cependant que peu de touristes s’orientent vers le port de Haiphong pour rejoindre la baie d’Halong ou Cat Ba. La plupart d’entre eux optent pour des formules incluant le transport depuis Hanoï. Les alentours du port touristique ne sont donc pas le centre névralgique de l’activité commerciale, situé plus au Sud. Ainsi, la ville et le port semble s’être développés de concert à l’époque coloniale, et en gardent des traces, du moins en ce qui concerne une partie restreinte du port actuel. Fig. 4. Le port historique ouvert sur la ville. 6
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 2. Un port séparé de la ville En dépassant le port touristique à l’Est, une rupture s’opère soudain, au delà de laquelle se trouvent les premiers terminaux de marchandises du port : Hoang Dieu, Doan Xa, etc (2). Gardes et barrières empêchent l’accès aux portiques et autres infrastructures qui s’étalent ainsi sur près de cinq kilomètres. Face à cette limite semble-t-il infranchissable, une zone concentre des commerces de proximité plus ou moins formels, aux portes du port. Il s’agit en majorité de petits commerces, le plus souvent des cantines de rue et de la vente à la sauvette. Cet état de fait, qui ne semble pas lié à l’activité du port, s’étiole à mesure que l’on s’éloigne vers l’Est. Les autorités assurent, quant à elles, que les activités développées dans les quartiers alentours du port sont complémentaires à celles de ce dernier. L’unique route qui dessert le port d’Ouest en Est est empruntée par un flot très dense de camions poids lourds. En dépit d’une largeur limitée (par endroits à peine suffisante pour que deux voitures ne se croisent) et de la présence d’habitations en bordure de voirie, aucun aménagement ne semble à l’ordre du jour. Cela entraîne de nombreux désagréments pour les habitants de ce territoire (bruits, poussière, circulation). Fig. 5. Rue Ngo Quyen, longeant le port. 7
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 De fait, cette nette rupture s’expliquerait par le passage d’un terminal de passagers, à des terminaux de marchandises qui requiert une ouverture sur la ville moins importante : 1000 personnes travaillent directement sur le port chaque jour. 3. Un port sans ville Les terminaux situés les plus à l’Est (3), sont les plus récents et modernes. Ils tirent partie du tirant d’eau plus important à l’embouchure du fleuve afin d’accueillir des navires de plus grands tonnages (jusqu’à 20 000 tpl à Dinh Vu). Au fil de l’extension du port, les terminaux sont ainsi de plus en plus éloignés du centre ville, voire de tout tissu urbain. Si les zones en face de Green Port, Chau Ve et Hai An sont en cours de développement, il semblerait que le port de Dinh Vu soit la première partie du port à s’affranchir du contact avec la ville. Là, les superficies des zones de stockage de containers ainsi que les larges routes rendent le territoire difficilement praticable et appropriable aux personnes habitant les alentours. Fig. 6. Hai An, Haiphong Au fil de la construction de terminaux toujours plus modernes, le port semble s’affranchir de la ville. Il s’éloigne des populations qu’il desservait jadis en produits venus d’ailleurs, et s’implante au gré de la construction de nouvelles infrastructures routières, qu’il encourage largement. À ce titre, les travaux du pont reliant Dinh Vu à 8
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 l’île de Cat Hai ont débuté, avec pour objectif de desservir le futur port de Lach Huyen. 9
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 II. UN PORT SANS VILLE : LE PROJET DE PORT EN EAUX PROFONDES DE LACH H UYEN La construction d’un nouveau port à Haïphong a longtemps été envisagée par le gouvernement. Après plusieurs projets, c’est finalement celui de Lach Huyen qui a été retenu. Mi-avril 2013, une cérémonie, tenue en présence du Premier Ministre vietnamien, a entériné le lancement de ces gigantesques travaux. Evalués à près d’un 1,2 milliards de dollars, ils ont pour but de doter Haïphong d’un port en eaux profondes capable de recevoir des navires transportant jusqu’à 100 000 tonnes de marchandises. Ce nouveau port se situera à une quinzaine de kilomètre de l’actuel port et du centre ville (cf. fig. 7). 10
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Fig. 7. Le projet Lach Huyen 1. Lach Huyen, un projet portuaire phare : les enjeux du déplacement de la fonction portuaire. Ce projet est d’une grande importance pour le Vietnam. Il figure en bonne place dans la stratégie de développement de l’économie portuaire à l’horizon 2020 que l’Etat a programmée. Cette importance se mesure d’ailleurs par la présence du Premier Ministre lors de la cérémonie. Le port de Lach Huyen est en effet pensé comme devant servir de moteur du développement économique du Nord du pays. Il s’agit pour l’Etat d’éviter qu’une différence trop importante entre le Sud et le Nord du 11
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 pays ne se crée. C’est donc bien du gouvernement central qu’émane en premier lieu cette volonté de construire un port moderne. Les ports modernes doivent accueillir des bateaux ayant des tirants d’eau de plus en plus importants. Pour cela, le nouveau port est situé à l’extérieur de la ville et non sur les rives du fleuve Cam comme c’est actuellement le cas (cf. fig. 7). On observe donc, à l’instar de nombreuses villes portuaires, un divorce entre la ville et le port : le port est rejeté à l’écart de la ville. Comme l’explique un universitaire ayant travaillé sur les ports : « En Asie, le port est vu comme un outil technique avec des quais très longs, automatisés et robotisés qui ne peuvent accueillir des fonctions urbaines » 5. Cette séparation des activités urbaines et portuaires était nécessaire pour permettre au port d’Haïphong d’attirer des flux de marchandises plus importants. Elle répond aussi à la volonté d’éviter les problèmes logistiques que connait actuellement la ville. Comme expliqué précédemment, de nombreux camions traversent des axes pourtant étroits et situés en plein cœur de quartiers densément habités. Pour éviter que ce trafic ne passe dans les zones habitées, l’Etat et la ville d’Haïphong ont compris qu’il était important de fournir un effort sur la qualité des infrastructures. Une nouvelle autoroute doit ainsi faire le lien entre Hanoï, la capitale, et le nouveau port en contournant la ville d’Haïphong. Les relations entre la ville et le port sont donc essentiellement pensées en termes d’infrastructures : ces deux entités ont assimilé « qu’un port ne vit que de sa capacité à gérer l’hinterland » 6. La construction de ce nouveau port est également un acte fort sur le plan géopolitique. En effet, les ports du Sud de la Chine arrivent à saturation ; ce nouveau port permettrait donc de desservir le marché chinois en attendant le développement du marché intérieur. Sur un plan de géopolitique intérieure, Lach Huyen va conférer à la ville d’Haïphong un statut particulier. Comme le soulignent certains urbanistes, il existe une compétition entre la capitale et Haïphong. Ce nouvel atout peut ainsi influer sur les rapports qu’entretiennent les deux villes, donnant une importance accrue à la ville portuaire. La construction de ce nouveau port, menée sous l’impulsion étatique, englobe de multiples enjeux. Il est évident que la ville, bien que le port soit bientôt éloigné de celle-ci, sera touchée par un certain nombre de transformations liées à ce projet. Ces transformations ne sont pas sans soulever de multiples questions quant à l’avenir d’Haïphong. 5 Entretien avec un professeur des universités spécialiste des questions portuaires. 6 Entretien avec un professeur des universités spécialiste des questions portuaires. 12
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 2. Les conséquences de l’implantation d’un nouveau port sur l’urbain et les écosystèmes environnants Même si ce projet soulève toute une série de questions, nous avons choisi de nous concentrer sur trois enjeux qui nous paraissent particulièrement cruciaux. Tout d’abord, avec le déplacement du port, l’espace qui l’abrite aujourd’hui n’aura plus la même fonction. Il faudra alors le reconvertir et ainsi, se poser la question du réinvestissement de cet espace. Cependant l’Etat étant le décideur majeur, il est le seul à pouvoir orienter l’avenir de ces futures friches. La ville n’a en effet que peu de pouvoir. Ainsi, aucun scénario n’est actuellement clairement mis en avant. Comme l’explique un des chargés de mission du port, la valeur des terrains proches de la côte et du centre ville a sensiblement augmenté ces dernières années. Pour lui, ces futurs terrains pourraient donc abriter des logements ou des centres commerciaux qui engendreraient des recettes fiscales à la ville. L’interrogation demeure donc. Il est cependant à craindre qu’avec la libération de ces espaces - et leur réhabilitation -, la pression foncière s’accentue fortement sur les espaces à proximité au cœur desquels vivent actuellement une population assez pauvre. Ceci pourrait conduire à chasser la population actuelle et à les éloigner du centre de la ville. Par ailleurs, l’ouverture de Lach Huyen va aussi perturber les activités de la population. D’un côté, sur le plan des trajets domicile-travail, l’éloignement du port augmentera la distance que les employés devront parcourir pour se rendre à leur travail chaque matin. “Le port est un lieu urbain ne serait-ce que parce qu’il y a des travailleurs qui s’y rendent tous les jours » 7 : il s’agira donc pour la mairie de parvenir à organiser les déplacements des travailleurs afin de ne pas recréer les problèmes de circulation qui étaient caractéristiques du centre ville. La construction de l’autoroute n°5 permettrait une augmentation du trafic et une amélioration des conditions de circulation si le transit restait identique, cependant celui-ci devrait s’accroitre fortement avec l’arrivée de plus de navires. Par ailleurs, sur le plan des activités, il est à noter que la pêche sera réduite par la présence du port. Ainsi certains villages de pêcheurs flottants situés dans la baie ont déjà été déplacés. La diminution de cette activité aura donc des conséquences sur la situation économique d’une partie de la population de la ville. 7 Entretien avec un professeur des universités spécialiste des questions portuaires. 13
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Mais l’interrogation majeure concerne l’impact écologique de cet important projet. En effet, on est en droit de se demander s’il est possible d’articuler le développement de ce port, activité par essence polluante, et la préservation de l’île de Cat Ba, réserve de biosphère de l’UNESCO depuis 2004. Fig. 8 -Trafic maritime à proximité de l’île de Cat Ba Cette question est essentielle pour la ville d’Haïphong mais aussi pour le pays. Le développement économique porté par l’industrie est aujourd’hui prioritaire par rapport aux considérations écologiques, or il ne faut pas oublier que l’île attire aussi de nombreux touristes. Le Vietnam a établi sur l’île son premier parc national. Si l’on considère que la demande de croisière en mer de Chine explosera dans les années à venir, l’île est un atout considérable pour attirer les touristes chinois. Il s’agit donc de préserver un atout naturel qui peut également être une source de revenus. Mais aujourd’hui, il existe plutôt « un conflit d'usage entre écosystème fragilisé et développement économique » 8 . En effet, les scientifiques ont souligné à plusieurs reprises que les travaux provoqueraient d’importantes perturbations pour l’écosystème puisque 40 millions de mètres cubes de boue qui seront dragués puis rejetés dans l’océan. Les activités portuaires et industrielles risquent de représenter une menace supplémentaire pour cet espace protégé. L’UNESCO a déjà menacé, 8 Entretien avec un chargé de mission à l’AFD 14
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 avant la mise en œuvre des travaux, de déclasser l’île à cause de la pollution. Ce déclassement serait alors catastrophique à la fois pour l’image du pays, de la baie d’Halong ainsi que pour celle du port. Ce conflit d’usage n’est cependant que peu pris en compte. Nous avons observé que les secteurs et services associés étaient très cloisonnés. Cette séparation influe de manière négative sur la prise en compte de ce problème. La construction du nouveau port est donc un changement majeur à la fois pour la ville et le pays. Ce port se veut être un témoignage aux yeux du monde de la modernité et du développement du Vietnam. Les changements apportés seront cependant particulièrement importants, et d’autant plus difficile à gérer que c’est le cloisonnement des secteurs qui prime. Pour surmonter ces probables difficultés, il semble essentiel d’intégrer toutes les problématiques au sein d’une même réflexion. C’est ce qui est proposé dans la démarche du contrat de baie. 15
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 III. DU CLOISONNEMENT AU DIALOGUE ? TENTATIVE DE MISE EN ŒUVRE D ’UN « CONTRAT DE BAIE » Un « contrat de baie » est un outil utilisé pour mettre en place une gestion intégrée des zones côtières. Celui-ci a notamment été mis en œuvre à Brest à partir de 1998. Aujourd’hui, la communauté urbaine Brest Métropole Océane s’est associée à la ville d’Haïphong pour tenter de lui transmettre cette méthode et ainsi parvenir à dépasser les difficultés évoquées précédemment. 1. Un outil au service de l’établissement d’un diagnostic partagé : le contrat de baie Depuis 2007, une action de coopération décentralisée est donc conduite entre les deux villes. Comme le soulignent à la fois des acteurs français et vietnamiens, il existe des similarités entre les deux villes : elles ont une forte activité portuaire, un site naturel intéressant, des instituts de recherche… Bien que les différences soient importantes au regard d’autres domaines, il s’agit alors pour Brest Métropole Océane, en partenariat avec l’AFD, de transmettre sa méthode. Dans un premier temps, il faut opérer un diagnostic assez poussé de l'état de la baie tant sur le plan physique, halieutique que sur le recensement des acteurs ayant un impact sur l'écosystème. Cette étape a permis de produire des données sur Haïphong, données qui étaient soit absentes soit obsolètes. Par la suite, il s’agit de créer des comités de pilotage à l'échelle de la province qui regrouperaient des acteurs politiques, du monde de la recherche, économiques mais aussi de la société civile et, plus particulièrement des associations. Le but affiché de cette démarche est de faire prendre conscience des enjeux, partager un diagnostic et établir un plan d'action pour les différents acteurs. Cette démarche de gestion horizontale n’est pas courante au Vietnam. Ce processus s’avère important puisque que plusieurs chercheurs ont montré qu’il existe « un conflit en formation » 9 autour de la conciliation de l’enjeu environnemental et du développement portuaire. Ce contrat de baie est d’autant plus important que la ville d’Haïphong se positionne comme une « green port city ». Ceci relève pour l’instant plus de l’affichage que d’une réelle action politique, c’est pourquoi le contrat pourrait donner corps à ce slogan. 9 Tran Dinh Lan and al., “Assessing Environmental Conflicts in Vietnam: Case Studies of Hai Phong and Nha Trang City" 16
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Pour parvenir à susciter cette prise de conscience, plusieurs responsables de la ville d’Haïphong mais aussi des chercheurs appartenant à l’IMER (Institute of Marine and Environmental Ressources) sont venus en France pour observer ce dispositif. Ces voyages semblent avoir porté leurs fruits puisqu’il semble y avoir une réelle prise de conscience. La réflexion est donc entamée du côté des services de la ville mais le contrat de baie n’est encore à ce jour pas finalisé. 2. Un dialogue encore difficile à établir Malgré cette volonté, force est de constater que cette initiative se heurte à plusieurs obstacles. Tout d’abord, alors que Brest Métropole Océane souhaitait traiter de municipalité à municipalité, l’AFD a insisté pour que le contrat de baie soit étendu à toute la baie d’Halong. S’il est vrai que la ville d’Haïphong est située au cœur de cette baie qui forme un tout cohérent, il est à redouter que l’extension de la superficie couverte entraîne une efficacité moindre. Cette démarche horizontale, intégrant divers acteurs, est déjà inhabituelle au Vietnam ; or prendre en charge toute la baie d’Halong revient à multiplier le nombre d’acteurs et donc potentiellement à compliquer l’établissement d’un diagnostic partagé. Il semble ainsi plus difficile d’établir un consensus. Par ailleurs, ce type de démarche se heurte également d’une part aux attentes formulées par les Vietnamiens et d’autre part à la nature même du régime politique du pays. Concernant les attentes, un écart se fait sentir entre ce que veulent chacune des parties : alors que la France voudrait partager une « méthode », les Vietnamiens aimeraient obtenir plus de financements. Il n’y a donc pas les mêmes attentes des deux côtés. Par ailleurs, l’instauration d’une réflexion horizontale est parfois jugée comme antinomique avec le parti communiste . En effet, le régime politique est caractérisé par une grande verticalité. Il n’est donc pas facile de faire de la place aux autres acteurs pour qu’ils puissent s’exprimer pleinement. La volonté de travailler à la mise en œuvre d’un contrat de baie témoigne de la part de la ville d’une envie d’associer développement économique et protection de l’environnement. Cependant, cette démarche se heurte à plusieurs obstacles. Malgré les efforts entrepris, beaucoup reste encore à faire sur le plan de la gouvernance 17
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 pour permettre d’aborder des problématiques aussi transversales que la gestion d’une baie. Conclusion “Haïphong, c’est à la fois le passé et l’avenir.” 10 Si le passé est toujours présent dans les rues de l’ancien port, la modernité du futur port aura de lourdes conséquences sur la ville. Cette dernière devra elle-même suivre ce mouvement de modernisation, sur le plan des infrastructures, du transport et de la reconversion des espaces actuellement dédiés à l’activité portuaire… Plus fondamentalement, les différents acteurs de la ville et du port devront établir un dialogue transversal pour gérer une situation complexe. C’est donc un nouveau mode de réflexion et d’action qui doit émerger pour allier développement économique et protection des atouts naturels. Le contrat de baie semble être une démarche intéressante pour établir une coopération horizontale, mais il reste encore à lui donner corps. Cette réconciliation entre soucis économique et écologique pourrait s’opérer autour de la valorisation touristique du quartier colonial historique et du vieux port. En effet, le développement d’un tourisme urbain et balnéaire autour de l’ancien port pourrait redonner vie aux espaces portuaires. Cependant, si ce développement implique la création d’un terminal de croisière supplémentaire, il est à craindre que la pression déjà forte sur l’île de Cat Ba s’accroisse davantage. 10 Entretien avec un professeur des universités spécialiste des questions portuaires. 18
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Bibliographie : CHOVEAUX André “Le port de Haïphong”, Annales de Géographie, vol. 32, n°180, 1923, pp. 568-570. DUBOIS Robert, Le Tonkin vers 1900, Paris : Société Française d’Editions d’Art, ouvrage paru à l’occasion de l’Exposition Universelle de Paris, 1900. TRAN Dinh Lan; CAO Thi Thu Trang; DUONG Thanh Nghi; DO Thi Thu Huon,"Assessing Environmental Conflicts in Vietnam: Case Studies of Hai Phong and Nha Trang City". In: Ahmed Z. Khan, Le Xuan Quynh, Frank Canters, Eric Corijn (ed.), Environmental Conflicts in Coastal Urban Areas: Towards a Strategic Assessment Framework for Sustainable Development. Cap. 9. SECOA FP7 Research Project, Vol. 4. Rome: Sapienza Università Editrice, 2013. http://digilabepub. uniroma1.it. DOI: 10.13133/978-88-98533- 00-8. Web. 12 July 2013. ITALIA, Agenzia per la promozione all’estero e l’internazionalizzazione delle imprese italiane, « Vietnam’s Provinces, Regions and Key Economic Zones », August 2012, Dernière consultation le 4 septembre 2014, URL : http://www.ice.gov.it/paesi/asia/vietnam/upload/198/provinces.pdf Article, “Haïphong, développement de l’économie maritime”, Nhandan, 24/04/14 Article “Cat Ba’s environment threatened by port development”, DTINews, 26/04/12, accessible à l’adresse : http://www.dtinews.vn/en/news/021/22251/cat-ba-s-environment-threatened- by-port-development.html Rapport IUCN, IUCN Technical evaluation of Cat Ba Archipelago, avril 2014 19
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 From spatial disconnection to institutional cooperation? Study on Haiphong city-port interface Abstract Haiphong city hosts the second largest port of Vietnam. This study, supported by the NGO Urbanistes du Monde and the International Network of Port Cities (AIVP), aimed at identifying the present and future issues of the city-port interface in Haiphong. Observing the sites and interviewing actors, we have noticed that the relationships between the city and its port have changed as new port terminuses were implanted, getting progressively further and more disconnected from the city. Illustrating this divorce dynamic, a deep water port should see the light of day outside the city, in Lach Huyen. Eventually, this translation of the port raises issues regarding the protection of natural and cultural heritage, as infrastructures should be close to UNESCO World Heritage’s sites in Cat Ba Island. To address this issue and protect the touristic and environmental potential of this area, a “bay contract” is to be implemented, despite political difficulties. Résumé La ville d’Haïphong abrite le deuxième port du Vietnam. Commanditée par l’ONG Urbanistes du Monde, en partenariat avec l’Association Internationale des Villes Portuaires (AIVP), cette étude a pour objectif, par le biais d’observations et d’entretiens, de poser les enjeux présents et futurs de l’interface ville-port à Haïphong. Il apparaît ainsi que les relations entre la ville et le port se sont modifiées au fil de l’implantation de nouveaux terminaux portuaires, de plus en plus coupés des zones urbaines. Cette dynamique de divorce entre la ville et le port s’illustre de plus par le choix de l’implantation d’un port moderne en eaux profondes en dehors de la ville, à Lach Huyen. Enfin, ce déplacement du port pose de nombreuses questions en matière de protection du patrimoine tant naturel que culturel, dans la mesure où les terminaux seront proches de milieux naturels classés par l’UNESCO et fréquentés en tant que tels par de nombreux touristes chaque année. Pour s’emparer de cette problématique transversale, un “contrat de baie” tente d’être mis en œuvre, malgré des difficultés politiques. 20
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Introduction “The importance of the interests involved is very significant, too significant for us, to imagine the main port of the Tonkin region elsewhere than in Haiphong, which is a real diffusion centre” 11. During the colonial era, geographers have already considered Haiphong as a port city endowed with a rich potential. Known as a key element for colonial maritime trade, Haiphong port has since then been using its strategic location to affirm nowadays its role as the second port of Vietnam, coming after Ho Chi Minh City’s one. Located approximately 120 kilometres from the capital city Hanoi, Haiphong stands at the mouth of the Cam River, but most of the flows coming from Hanoi go through land routes. Indeed, Haiphong is connected to the capital by a dense high speed road network, which includes the forthcoming highway between the cities, due to open in late 2015. Moreover, several touristic cruises leave from the Haiphong port to the Cat Ba Island Biosphere Reserve, recognized by the UNESCO in 2004. Thus, Haiphong is part of Northern Key Economic Region of Vietnam. As such, it has strong ambitions in terms of economic development in the near future. The 2004 Economic Plan intended to reduce the share of agriculture in the regional GDP and to implement industrial zones, such as the Vietnam-Singapore industrial park in Bac Ninh. In such a context, the Haiphong port has been considered as a nodal point of transportation for the locally manufactured goods. Thereby, the cargo volume passing through the port went from 13,9 to 18,1 metric tons between 2008 and 2012. Sizeable investments from the national government and from foreign companies have already altered the cityscape, the port infrastructures and the relationships between the city and its port. During the study we focused on the interface between Haiphong city and its port. An interface is made up of all the physical, logistical, social and 11 André Choveaux “Le port de Haïphong”, Annales de Géographie, vol. 32, n°180, 1923, p. 570. 21
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 environmental relationships set up between these two parties. Therefore, our objective was to find what are the dynamics and issues affecting the simultaneous development of both parts given their economic ambitions. This mission has been initiated by the French NGO Urbanistes du Monde, in partnership with the International Network of Port Cities (AIVP). After a month spent observing and interviewing on site, we have been able to pick out three issues regarding the development of this territory. First, the relationships between the city and its port seem to be stronger for the oldest terminals than for the most recent ones (Part I.). This divorce can be further illustrated by the choice to set up the new Lach Huyen deep water port fifteen kilometres outside the city centre (Part II.). Eventually, translating the port raises questions in terms of protection of the local natural and cultural heritage. As the terminals get closer from UNESCO World Heritage sites, this project stirs an issue on how to reconcile it with the thousands of tourists coming every year on the Cat Ba Island. A “bay contrat” is thus being implemented to help solving these problems (Part III.). Illustration 1. Map of Vietnam, source : http://carnet-des-vadrouilleuses.wifeo.com/ 22
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 I. THE CITY AND THE PORT : A LOOSENING OF RELATIONSHIPS In the Red River Delta region, there seems to be “no structured port as we understand it: most of the platforms are only flattened pieces of land. Truly speaking, it is rather a series of terminals managed separately” 12. This starting point gives us a clue about the building management of new terminals. In Haiphong, all the terminals are established on the Cua River banks. The older the terminal, the further it is upstream. This layout mechanically implies that older parts of the port are more integrated in the city, whereas most recent ones seem more independent from the city. Illustration 2. A differentiated city-port interface 12 Interview with a project manager at the IAU-ÎdF 23
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 1. The city and the port, linked throughout history When the Annamite people conceded this land to the French in 1874, Haiphong was just a small village standing on a boggy and impracticable site. Later on, the city has been sanitized and developed, allowing the Atlas Colonial, published around 1915, to state that “the topographic and urban transformation of the city, operated by the French administration, is worth a real creation” 13. At the same time, the number of inhabitants reached 16 000, and from 1900, the port has already been considered “the main transit point” 14 of the region. As a matter of fact, the city developed a tight relationship with its port, according to the French model of integrated port cities. The wharfs directly face the manufactures and shops. Illustration 3. Map of the Haiphong city centre, Guide Madrolle, 1928. 13 Atlas Colonial, published around 1915 14 Robert Dubois, Le Tonkin vers 1900, Paris : Société Française d’Editions d’Art, ouvrage paru à l’occasion de l’Exposition Universelle de Paris, 1900. 24
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Today, the quays on the Som Tam Bach River have disappeared, but what remains of the historic port stands on the Cam River (see zone 1, illustration. 2). The freight has now become less important than the flows of tourists heading to the Cat Ba Island. Thus, the port remains opened to the city, allowing passengers to enter it easily, even if public transports (especially coming from Hanoi) do not operate in this area. Street vendors try to bring the few tourists to embark on their boats to Cat Ba. Small street shops and cafes survive in the Cu Chinh Lan Street, leading to the port. However, it is noticeable that a quite small number of tourists choose to go through the Haiphong port to go to Cat Ba. Most of them subscribe to all-inclusive formulas, in which operators drive them directly from Hanoi to Halong. Consequently, the surroundings of the port are not the hotspot of commercial and touristic activities, which rather concentrate on big boulevards of the city centre. The city and the port have thus developed simultaneously during the colonial era, and some traces of that history are still observable in a limited part of the port. Illustration 4. The historic port opened on the city 25
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 2. A port separated from its city On the eastern boundary of the touristic port, a spatial division suddenly appears to the walkers. Beyond this limit are the first built freight terminals: Hoang Dieu Terminal, Doan Xa, etc (2). Watchmen and barriers strictly forbid the access to gantries and other infrastructures extending over five kilometres. Directly facing this impassable limit, more or less legal local shops concentrate at the gates of the port. Most of them are small shops, street canteens and petty vendors. This economy, apparently not linked to the port activities, disappears as we continue eastward. Meanwhile, the local authorities assert that the activities developed around the port are consistent with the port’s ones. There is only one route going along the port form West to East. It is saturated by a continuous flow of HGVs. In spite of the narrowness of the road, and of the presence of homes by the wayside, no special improvement is planned. It generates a series of inconveniences for the inhabitants among which are noise, dust and traffic congestion. Illustration 5. Ngo Quyen Street, alongside the port 26
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 Ultimately, this division could be explained by the shift from a passenger terminal to a freight terminal. The latter does not require such a wide opening on the city as a touristic port. Indeed, only 1000 persons work on the cargo port every day. 3. A port without city The terminals located further on the East (3) are the most recent and modern in Haiphong. They benefit from deeper waters at the mouth of the river to accommodate larger cargo vessels (up to 20 000 DWT in Dinh Vu Terminal). As the port extends, the terminals get further from the city. Currently, the areas in front of Green Port, Chau Ve and Hai An Terminals are being developed for housing. However, the Dinh Vu part of the port seems to be the first to have no contact with the urban structure. There, the vast containers storage areas and wide roads make it difficult for dwellers to appropriate the territory. It becomes a transit zone, made up for motorized vehicles and hostile to human beings. Illustration 6. Hai An, Haiphong While the port continues its expansion eastward, it seems to be increasingly independent from the city. It secedes from the population it used to supply with products coming from all over the world. New port 27
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 infrastructures pop up where new roads connect them to the hinterland. It significantly influences the development of roads. As an example, the works of the bridge between Dinh Vu and Cat Hai islands have begun. Its aim is to lead to the future Lach Huyen deep-water port. 28
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 II. A PORT WITH NO CITY: LACH HUYEN DEEP WATER PORT Building a new port in Haiphong was on the government’s agenda for about a decade. Several projects have been considered, but in the end the Lach Huyen project was chosen. The groundbreaking ceremony for Lach Huyen port construction project was held on April 2013 in the presence of the Vietnamese Prime Minister. The project will provide direct access to the port for ships of up to 100,000 dead weight tonnage (DWT). It will be located at approximately 15 kilometres from the current port and the city centre (cf. illustration 7). Illustration 7. Lach Huyen 29
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 1. Lach Huyen, a flagship project : the strategic stakes Lach Huyen is a key national project for the country. The Vietnam 2020 Seaport Development Plan lists the port as one of the priorities in the government’s strategy to become a strong sea nation. The attendance of the Prime Minister at the groundbreaking ceremony reinforces this assertion. According to this plan, Lach Huyen deep water port will become the driving force for the economic development of Northern Vietnam. Indeed, the aim of the government is to avoid an unbalanced development between the South and the North of the country. Therefore, it is important to notice that the central government is playing the leading role in this project. Another important issue is that nowadays modern ports have to be capable of handling always bigger container ships. That is why the new port will be located outside the city and not on the Cam River banks where the current port lies. Like many other port cities, we can notice a divorce between the city and the port: the port is rejected outside the city. A university professor interested in this subject said that “in Asia, the port is seen as a technical tool with very long, automated and robotized wharfs that can’t handle urban functions” 15. This separation between urban and port activities seems necessary to enable the attraction of more important flows of goods. This divorce also highlights the city authorities’ wish to reduce the present logistic issue. As we explained earlier, a huge amount of HGVs runs in the narrow and highly populated streets of the city centre. In order to avoid that the traffic to go through these populated areas, the State and the city authorities have understood that an effort had to be made on the infrastructures leading to Lach Huyen. Therefore, they have decided to build a new highway between Hanoi, the capital city, and Haiphong that will bypass the city centre. For now, the links between the city and the port are mainly thought in terms of infrastructures: both actors have understood that “a port only lives thanks to its capacity to deal with its hinterland” 16. 15 Interview with a university professor. 16 Interview with a project manager in Brest Métropole Océane. 30
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 On geopolitical level, this new port represents a strong strategic act. Indeed, the southern Chinese ports are at a bursting point. Lach Huyen, while waiting for the Vietnamese internal market to develop, will serve the Chinese market. Moreover, in the context of urban competition between Hanoi and Haiphong, Lach Huyen will be an asset for the latter. It will certainly change the cities relationships, increasing the importance of the port city. The building of Lach Huyen, at the instigation of the central government, embraces multiple issues. It is quite obvious that the creation of the new port, even if it will be further from the city, will impact the city. These fourthcoming changes raise several questions concerning Haiphong’s future. 2. Lach Huyen impacts on the city and the surrounding ecosystems Even if along the Lach Huyen construction several issues will emerge, we have decided to focus on three major challenges. First of all, after the move of the port, a new function will have to be found for the area that it currently occupies: this space will have to be reconverted. However the question is who will reconvert it? As it is the decision-maker, the central government has the leading role. The city does not have a lot of power on the future of these soon-to-be brownfields. Thus, there is not any scenario firmly established. However, a manager of the port underlined that the value of these lands, located near the coast, increased a lot during the past decade. According to him, shopping centres and accommodations would be built. Thus, these new buildings will increase the city tax revenue. But it is still the central government that will have the last word. However, one can be concerned that the pressure on land in these central areas will grow. The population presently living next to the port could be chased by the higher land value. Moreover, Lach Huyen port will interfere with the activities of the population. On the one hand, the new port will take away jobs. People will have to commute during a long time. “The port is an urban space at least because workers go there every day”: the city hall will have to organize the journeys in order not to recreate the same traffic problem as in the centre. The 31
Etude de l’interface ville-port à Haïphong (Vietnam) Elise Aubry et Célia Bellange Partenariat UdM et AiVP 2014 new highway will improve the traffic conditions but one has to expect a raise in the number of HGVs (if more ships come) and also of the workers’ motorbikes. So transport will stay a red hot issue. On the other hand, the port will have an impact on other economic activities such as the fishery. Indeed, it is expected that there will be less fishes in the bay. Some fishermen floating villages have already been moved further. The port will have an impact on the way a part of the population earns its living. However, the main issue is about the ecological impact of this important project. Indeed, it is hard to imagine how the port development, a polluting activity, can be reconciled with the Cat Ba Island protection (cf. illustration 7) which was declared UNESCO Biosphere Reserve in 2004. Illustration 8. A ship near Cat Ba Island This issue is important for Haiphong city but also for the whole country. If the economic development is the top-priority, this island -and its unique ecosystem- attracts lots of tourists with high purchasing power. It is all the more important that the demand for cruises in the South China Sea will explode in the years ahead. The island will be a precious asset in order to 32
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