HARCELEMENTS devant le Conseil de Prud'hommes Quel régime de la preuve ? Quel office du juge ? - C. Morin (IRT.CDS)

 
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HARCELEMENTS devant le Conseil de Prud’hommes
  Quel régime de la preuve ? Quel office du juge ?
                    C. Morin (IRT.CDS)
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Le harcèlement : de plus en plus invoqué
devant le CPH
                                         « contourner »
                                            le barème
                                             Macron
                          Prise en
                       conscience du
                       comportement
                         harcelant

                            Mais difficulté à la preuve !
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Aménagement de la preuve
           « Lorsque survient un litige relatif à l’application des
           articles L. 1152-1 à L. 1152-3 [harcèlement moral] et
           L. 1153-1 à L. 1153-4 [harcèlement sexuel], le
           candidat à un emploi, à un stage ou à une période
           de formation en entreprise ou le salarié présente
           des éléments de fait laissant supposer
           l’existence d’un harcèlement.

           Au vu de ces éléments, il incombe à la partie
           défenderesse de prouver que ces agissements
           ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et
           que sa décision est justifiée par des éléments
           objectifs étrangers à tout harcèlement.

           Le juge forme sa conviction après avoir ordonné,
           en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction
           qu’il estime utiles. »
           C. trav., art. L. 1154-1
           (loi n°2002-73 du 17 janv. 2002 de modernisation sociale)
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            Remarques préalables

Régime de la preuve énoncé à l’art. L. 1154-1
à devant le Conseil de prud’hommes
à mais pas devant la juridiction pénale

Faits relevant à la fois du harcèlement moral et du harcèlement
sexuel à mention expresse et séparée des griefs devant le juge
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Plan de l’exposé

     I – La charge de la preuve par les parties
            A – Pour le demandeur (salarié) : produire des éléments
                de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement
            B – Pour le défendeur (employeur) : établir des faits
                objectifs étrangers à tout harcèlement

     II – L’office du juge
             A – Ordonner des mesures d’instruction
             B – Apprécier les faits dans leur ensemble
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      I
 La charge de
la preuve par
  les parties
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Eléments de fait produits par le demandeurs jugés suffisants

              à FAISCEAU D’INDICES
        laissant supposer l’existence d’un
                   harcèlement
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           Impact de la loi « Travail » sur l’article L 1154-1

     Avant la loi « Travail »                Après la loi « Travail »
« Lorsque survient un litige relatif    « Lorsque survient un litige relatif
à l’application des articles L. 1152-   à l’application des articles L. 1152-
1 à L. 1152-3 [harcèlement moral]       1 à L. 1152-3 [harcèlement moral]
et L. 1153-1 à L. 1153-4                et L. 1153-1 à L. 1153-4
                                        [harcèlement sexuel], le candidat
[harcèlement sexuel], le candidat
                                        à un emploi, à un stage ou à une
à un emploi, à un stage ou à une        période de formation en entreprise
période de formation en entreprise      ou le salarié présente des
ou le salarié établit des faits qui     éléments de fait laissant sup-
permettent de présumer l’exis-          poser l’existence d’un harcè-
tence d’un harcèlement. »               lement. »
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Eléments de fait produits par le demandeurs jugés suffisants

     à Preuve par tout moyen
     témoignages, documents internes, courriels, sms, PV CSE, etc.

     à Eléments précis, objectifs, concordants et matériellement vérifiables

     à Exclusion des simples allégations, des ressentis, des perceptions

  Faire naître le soupçon de harcèlement dans l’esprit du juge !
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      Eléments de fait produits par le demandeurs jugés suffisants
               Harcèlement moral                                             Harcèlement sexuel
-   échanges de courriers avec l’employeur + des                     - fait, pour l’employeur, de multiplier les
    certificats médicaux dans lesquels les praticiens         cadeaux, les appels et messages téléphoniques, de
    reprenaient les dires de leur patiente sur les origine    se rendre au domicile de la salariée et de
    des troubles (Soc. 24 sept. 2009, n° 06-45579)            s’introduire dans sa vie privée dans le but de la
                                                              convaincre à céder à ses avances (Soc. 3 mars 2009
-   retrait arbitraire du statut de cadre, stagnation de la   n°07-44.082.) ;
    rémunération, suppression de primes et d'éléments                - envoi de plusieurs SMS par un supérieur
    de salaire, détérioration progressive des conditions      hiérarchique, contenant des propos tels que « je te
    de travail de la salariée (Soc. 24 sept. 2009, n° 06-     souhaite une douce journée avec plein de baisers sur tes
    45579) ;                                                  lèvres de velours » (Soc. 12 fév. 2014 n°12-26.652.) ;
-   le fait pour une salariée de ne pas solliciter                   - envoi d’emails d’un salarié, exprimant de façon
    l’annulation des avertissements et des mises à pied       répétée par des propos à connotation sexuelle son
    dont elle a fait l’objet à ce qui ne suffit pas à         désir explicite d’avoir une relation d’ordre sexuel avec
    écarter la présomption d’un harcèlement moral en          sa collègue, en dehors de tout contexte de plaisanterie
                                                              ou de familiarité et en dépit des refus réitérés de cette
    présence d’autres agissements (Soc. 6 mars 2019,          dernière (Soc. 18 nov. 2019, n°19-81790)
    n°17-28025)
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  Eléments de fait produits par le demandeurs jugés insuffisants

- un salarié se borne à inviter une collègue à déjeuner (Soc. 8 juill.
  2020, n°18-24320) ;

- retrait arbitraire du statut de cadre, stagnation de la rémunération,
  suppression de primes et d'éléments de salaire, détérioration
  progressive des conditions de travail de la salariée (CA Dijon 4
  avril 2013, n°12-00737)
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     Eléments de fait produits par le défendeur

à Preuve par tout moyen
témoignages, documents internes, courriels, sms, PV CSE, etc.

à Eléments précis, objectifs, concordants et matériellement vérifiables

à Exclusion des simples allégations, des ressentis, des perceptions

           Démontrer l’absence de harcèlement !
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Eléments de fait produits par le défendeur jugés insuffisants

       - proximité physique constituant un « jeu » entre lui et son salarié (CA Chambéry
 (ch. soc.) 27 fév. 2020, n° 19/00089) ;

      - « la notion d’humour » à propos de gestes, propos et regards déplacés, « sans
 démontrer que les agissements du [salarié, son subordonné] ne sont pas constitutifs
 d’un harcèlement sexuel [à l’égard d’un autre subordonné] et sans démontrer que les
 comportements et propos de ce dernier sont justifiés par des éléments objectifs
 étrangers à tout harcèlement ». L’humour ne suffit pas à contester l’existence du
 harcèlement (CA Riom (ch. soc.) 26 mai 2020, n° 19/00744)
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     Rapport d’enquête interne produit par le défendeur

      - Une enquête effectuée au sein d’une entreprise à la suite de la dénonciation de
faits de harcèlement moral n’est pas soumise aux dispositions de l’article L 1222-4 du
Code du travail [i.e. n’est pas assimilée à une collecte d’informations personnelles à
≠ dispositif de contrôle clandestin et à ce titre déloyal]
      - Un employeur peut externaliser l’enquête
 Soc. 17 mars 2021, n°18-25597 et n° 19-18149

  à Si rapport ayant conclu à l’inexistence d’un harcèlement à le juge n’est pas lié
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    II
L’office du
   juge
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                         Office du juge

   Le juge doit :

   1. Vérifier si les faits sont établis ;

    2. Décider si ces faits laissent présumer des agissements de
harcèlement et si ce point est vérifié ;

    3. Exiger de l’employeur qu’il démontre que ces faits sont
étrangers à tout acte de harcèlement.
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                Mesures d’instructions ordonnées par le juge
« Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction
qu’il estime utiles. »
C. trav., art. L 1154-1
                                                                    CPC, art. 10
à pourvoir d’investigation du juge                                  C. trav., art. L 1154-1
                                                                    C. trav, art. R 1454-14

à plusieurs hypothèses de recours aux mesures d’instruction
Avant le procès                   Pendant le procès                 Pendant le procès
(procédure référé)                A l’initiative du juge            A la requête de l’une des parties

Conserver ou établir la preuve de Recueillir des informations       Accéder à un élément de preuve
faits dont pourrait dépendre la   complémentaires servant à         détenu par la partie adverse
solution d’un litige              établir l’hypothèse de
                                  harcèlement
CPC, art. 145                        CPC, art. 10                   CPC, art. 11
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             Examen des faits dans leur ensemble

   Le juge doit apprécier tous les éléments de fait qui lui sont
soumis dans leur ensemble.

à Impossibilité de procéder à une appréciation séparée de chaque
  élément soumis à son analyse

à Impossibilité d’en écarter certains

Soc. 10 mars 2021, n°19-24487
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