Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes - Collection Rapports de réunions du WSSCC
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Collection Rapports de réunions du WSSCC Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
Sommaire Avant-propos 3 Secteur WASH et droits de la personne 5 Regard sur les droits des femmes 6 Dignité et autonomisation en Inde 8 Respect et égalité au Népal 10 Comprendre le contexte culturel au Sénégal 12 Prolonger le succès de l’an passé : Hommage à la femme 14 L’évolution du cadre normatif : les femmes, le secteur WASH et les normes internationales 17 Conclusions 18 Documents complémentaires – Programme 20 – Échos sur les réseaux sociaux 21 – Délégués 22 – Présentateurs des études de cas 24 – Chronologie des conquêtes des droits de l’homme 25 Les observations et les contributions apportées par le WSSCC et le HCDH sont grandement appréciées. Toutefois, toute erreur ou omission relève de la seule responsabilité de ses auteurs. Ce rapport fait suite à la réunion « Inspiring Change to Promote Women’s Rights and Dignity » (Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes) organisée à Genève le 7 mars 2014 par le WSSCC et le HCDH. ©2014 : Conseil de concertation pour l’approvisionnement en eau et l’assainissement, Haut-Commissariat aux droits de l’homme Conception : Column Communications Ltd et ACW Ltd Impression : Gonnet Imprimeur Photos : WSSCC et WSSCC/Pierre Virot En savoir plus : www.wsscc.org www.facebook.com/#!/WatSanCollabCouncil www.youtube.com/user/sanitationforall www.twitter.com/#!/WatSanCollabCou www.linkedin.com/groups?mostPopular=&gid=1238187 2 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
Avant-propos Hommage au féminin : commençons par l’essentiel ! Pour chaque femme qui n’a pas peur et chaque fille qui peut rêver, Au Sénégal, les mutilations génitales féminines sont pratiquées des millions d’autres restent méconnues et anonymes, enfermées sur les filles prépubères par une guérisseuse traditionnelle ou une dans un sombre quotidien de labeur et de traumatismes. circonciseuse, généralement sans anesthésie et au moyen d’un rasoir ou d’un couteau. En visant le clitoris, l’excision entend priver la femme Condamnées dès la naissance à devenir des assistantes, des d’une grande partie du plaisir sexuel. Considérée comme un rite de productrices,des reproductrices, des porteuses d’eau, des gardes- passage et une étape vers l’âge adulte et la vie de femme, de mère malades, des femmes de ménage ou des maîtresses de maison, les et de membre respecté de la société, cette pratique persiste dans femmes et les filles de nombreuses sociétés savent bien ce que le certains pays du nord-est de l’Afrique et de la région subsaharienne. monde doit encore reconnaître et valoriser. Le déni d’installations sanitaires élémentaires les enferme dans un cercle de silence, de La Déclaration universelle des droits de l’homme et d’autres textes honte et d’opportunités manquées. majeurs reconnaissent la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine, ainsi que leurs droits égaux et inaliénables. Tous les La journée du 8 mars nous rappelle que bien des luttes restent êtres humains aspirent à faire entendre leur voix, mais pour la moitié à mener, même si nous pouvons nous réjouir des progrès accomplis. de l’humanité, voire plus, ces droits simples et inviolables relèvent de Certes, les parlements et les conseils d’administration comptent la fiction et ne sont que chimère. de plus en plus de femmes. Certes, de plus en plus d’hommes participent aux tâches ménagères et soutiennent leurs filles, épouses Le plein exercice des droits de la personne passe par une et mères dans leurs aspirations. Malheureusement, ces avancées ne reconnaissance absolue de la différence et de la diversité. signifient pas que l’on s’approche de la parité dans le monde des Les menstruations (ou règles) sont un mécanisme biologique naturel affaires, de la finance ou de la politique. Plus grave encore, les droits qui se produit tous les mois chez les adolescentes et les femmes fondamentaux continuent d’être bafoués. Nous entrons dans une adultes non ménopausées en bonne santé. Ce phénomène représente ère où une plus grande liberté de circulation de l’information et des environ 3 000 jours dans la vie d’une femme. Le manque d’intérêt capitaux génère une profusion d’opportunités. Or, les populations pour les menstruations et leurs conséquences sur la dignité, la santé sans voix et sans pouvoir sont encore plus reléguées au second et la sécurité des femmes est considérable. plan dans un monde qui les prive de leur droit élémentaire à vivre décemment et dignement. Pourquoi les différentes conventions et leurs plans d’action abordent-ils les droits reproductifs et sexuels des femmes sans relever Cette année, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, explicitement que les menstruations sont parmi les constructions le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) et le Conseil de sociales les plus stigmatisées et les plus taboues, et que cette concertation pour l’approvisionnement en eau et l’assainissement situation dessert un tiers de la population du monde développé (WSSCC) ont rendu hommage aux femmes anonymes, et rappelé et en développement ? à toutes les personnes présentes l’égale valeur de chaque être humain ainsi que notre obligation collective comme individuelle de Rendre hommage aux femmes, c’est honorer tous les êtres humains combattre la stigmatisation, la discrimination et l’inégalité. en respectant les différentes étapes de la vie de chacun, de l’enfance au troisième âge en passant par la puberté, la parentalité Les participants ont écouté et tiré les enseignements de cette journée. et la maladie. Nous avons abordé la question des droits de la personne sous l’angle de l’assainissement et de l’hygiène dans les pays les plus pauvres du Comment pouvons-nous continuer d’accepter que des gouvernements monde, et écouté le récit des combats et des victoires en faveur des et des institutions négligent systématiquement de représenter la femmes et des communautés au Népal, en Inde et au Sénégal. moitié de l’humanité ? Au Népal, les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres Aujourd’hui, nous avons discuté de longs combats et de points et intersexuées (LGBTI) subissent des discriminations, des de bascule. Nous avons entendu des voix émergentes et avons persécutions et des violences alors qu’elles ne font qu’exprimer passé en revue les cadres juridiques et de protection des droits de qui elles sont et qui elles ont choisi d’aimer. Criminalisées par la l’homme tout en communiquant sur les actions menées et les progrès loi, rejetées par leurs communautés et leurs propres familles, les accomplis. Cependant, beaucoup reste à faire. Qui le fera, et personnes LGBTI sont punies pour ce qu’elles sont. Elles ne rentrent comment ? Comment chacun de nous peut-il faire en sorte que tous dans la liste des ‘parties prenantes’ dont nous tenons compte dans les jours les femmes et les filles puissent garder la tête haute, rêver la planification de nos services, nos budgets ou nos réussites. et exprimer tout leur potentiel ? En Inde, comme dans d’autres pays, les travailleuses du sexe vivent et La réponse se trouve peut-être dans cette citation de Gloria Steinem : exercent leur métier dans des espaces fréquentés uniquement pour le « L’histoire de la lutte des femmes pour l’égalité ne dépend pas plaisir ou le vol, mais complètement ignorés quand il s’agit de services d’une seule féministe ni d’une seule organisation, mais des efforts fondamentaux pour la dignité et la santé. Le combat qu’elles mènent conjugués de tous ceux qui se soucient des droits de la personne ». pour leur identité, leurs droits professionnels et leurs revenus ne leur laisse que peu de temps pour exiger et s’assurer que leurs besoins du Mme Archana Patkar quotidien, tels que l’eau, l’assainissement et l’hygiène, sont satisfaits. Cheffe de programme, WSSCC Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 3
Déclarations fondamentales Déclaration Convention universelle relative aux 1948 des droits de l’homme1 1989 droits de l’enfant2 Conférence Quatrième mondiale sur Conférence 1993 les droits de l’homme 3 1995 mondiale sur les femmes des Déclaration et Nations Unies4 Programme d’action La Plate-forme de Vienne d’action 1 www.un.org/fr/documents/udhr/ 2 www.ohchr.org/fr/professionalinterest/pages/crc.aspx 3 http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G93/142/34/PDF/G9314234.pdf?OpenElement 4 www.un.org/womenwatch/daw/beijing/platform/plat1.htm (page en anglais) « En ne reconnaissant ni respectant la différence [entre les hommes et les femmes], sommes-nous coupables de soutenir la discrimination et d’y prendre part ? Voilà une question que nous devons absolument et fondamentalement nous poser lors de la Journée internationale de la femme, et tous les autres jours ». Archana Patkar, WSSCC 4 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
Secteur WASH et droits de la personne Pour être en bonne santé et vivre L’eau, l’assainissement et l’hygiène comptent parmi les besoins humains les plus fondamentaux. L’amélioration des installations dignement, chaque être humain sanitaires contribue à la réduction des inégalités sociales et doit pouvoir satisfaire ses besoins à l’amélioration des taux de réussite scolaire. De plus, elle est fondamentaux et jouir de certains droits essentielle à la bonne santé de la population. Il ne fait par ailleurs aucun doute que les plus démunis, les jeunes et les personnes âgées, essentiels. Sa survie dépend de l’accès les groupes marginalisés, les femmes et les filles sont les plus affectés à l’eau et à l’assainissement, un droit lorsque ces installations font défaut. garanti par des conventions majeures « En vertu de leurs droits fondamentaux, les femmes ont droit inscrites dans le cadre normatif du à un accès universel à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène, sans discrimination. Pourtant [...], dans le monde entier, elles doivent droit international relatif aux droits de surmonter des obstacles considérables pour exercer leurs droits », l’homme. Les États sont tenus de respecter, a expliqué Craig Mokhiber, chargé du Service des questions de protéger et de satisfaire ces droits pour économiques et sociales et du développement auprès du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. tous les individus, sans discrimination. L’étude de la situation des femmes en matière d’accès à l’eau, Lutter contre cette inégalité dont les formes sont si variées et à l’assainissement et à l’hygiène prouve la stigmatisation et la nombreuses à travers le monde est une tâche ardue. L’observer discrimination dont elles sont continuellement victimes. Pour trouver à travers le prisme du secteur WASH (eau, assainissement et des solutions, nous devons regarder en face la réalité à laquelle hygiène) nous donne des indications précieuses sur le manque elles sont confrontées et les obstacles qu’elles doivent surmonter d’autonomie et de dignité ainsi que sur les obligations culturelles au quotidien pour satisfaire certains de leurs besoins les que subissent les femmes parmi les plus marginalisées au monde. plus fondamentaux. Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 5
Regard sur les droits des femmes La place de la femme dans la société « Pourquoi faut-il que tout ce qui concerne le affecte jusqu’à ses besoins physiques les corps de la femme soit aussi méprisé ? Comme si plus primaires. les problèmes d’inégalité ne suffisaient pas… » Dans les zones rurales d’un grand nombre de pays les plus pauvres, la défécation à l’air libre est une pratique fréquente. Or, l’impossibilité Adebisi Adebayo, Comité interafricain sur les de faire ses besoins dans l’intimité est bien plus problématique pour pratiques traditionnelles les femmes, car cela les expose à un risque d’humiliation physique, d’acte violent, voire d’agression sexuelle. Uriner et gérer l’hygiène menstruelle posent également de nombreux problèmes et peuvent Bien que la maternité soit glorifiée comme une réussite majeure dans entraîner un risque pour la santé en particulier lorsque les toilettes, la vie d’une femme, tout ce qui permet d’arriver à cette prouesse de l’intimité ou les équipements pour se laver les mains font défaut. la nature est considéré comme tabou et honteux. Les menstruations De plus, on enseigne souvent aux femmes que ces gestes sont doivent être cachées et, dans de nombreuses sociétés, les femmes honteux ce qui les contraint à se cacher. sont ostracisées pendant cette période de leur cycle. La ménopause, qui marque la fin de l’âge où une femme peut procréer, est un sujet « La manière dont la société pousse les femmes à endosser leur rôle dont on évite de parler. En outre, on n’aborde pas les complications de mère, de soignante et de membre passive de la communauté de la grossesse telles que les fistules, qui peuvent entraîner des explique le comportement qu’elles adoptent lorsqu’elles ont leurs fuites d’urine ou de matières fécales. L’acte sexuel qui donne vie règles ou lorsqu’elles doivent déféquer ou même uriner », explique à un enfant nécessite la participation d’un homme et d’une femme. Lucinda O’Hanlon du service des droits des femmes et des questions Pourtant, les femmes qui vendent des services sexuels ou qui de genre du HCDH. semblent apprécier le sexe sont méprisées. 6 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
Dans certaines sociétés, les jeunes filles subissent une ablation du clitoris qui vise à les rendre chastes et à contrôler leur sexualité en les privant de tout plaisir sexuel. Les femmes qui transgressent leurs rôles d’épouse et de mère ou qui ne s’y conforment pas, par exemple les lesbiennes et les transgenres, se voient privées des plaisirs ou des droits les plus modestes dont bénéficient les autres femmes. Afin de briser le tabou qui entoure ces questions, le Conseil de concertation pour l’approvisionnement en eau et l’assainissement (WSSCC) et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) ont organisé au Palais des Nations à Genève une journée intitulée « Inspiring Change to Promote Women’s Rights and Dignity » (Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes). Programmée la veille de la Journée internationale de la femme, la rencontre a mis l’accent sur trois études de cas qui illustrent certains aspects de la vie des femmes et saluent des progrès réels et positifs qu’elles ont accomplis. Des militants de terrain ont décrit leur travail de promotion de la dignité des travailleuses du sexe en Inde, la sensibilisation sur les questions lesbiennes et transgenres au Népal et le combat contre les mutilations génitales féminines au Sénégal. Ils ont livré des témoignages directs de discrimination, d’indignité et d’injustice, mais aussi des récits encourageants sur des changements positifs et durables. Ces exposés fascinants ont été suivis d’une discussion animée entre plus de 70 militants, représentants d’entreprises, défenseurs des droits de l’homme et experts du secteur WASH qui ont pris part à l’événement. Une diversité voulue pour favoriser le débat et les échanges. « Notre objectif était de réunir dans une même pièce des personnes Tous les témoignages et les débats qui se sont succédé au cours qui ne se rencontreraient pas autrement », a expliqué Archana Patkar, de cette journée ont convaincu les participants du lien étroit cheffe de programme pour le WSSCC. « Nous voulions leur donner entre les questions de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène l’occasion d’étudier la question de la dignité et des droits des femmes et les droits de l’homme en général. L’accès ou l’absence d’accès dans le contexte de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène, et leur à l’assainissement reflète bien le climat de discrimination, de permettre ensuite d’en discuter librement et en toute franchise. préjugé et de honte qui enferme des millions de personnes Et surtout, nous souhaitions donner la parole à celles qui ne l’ont dans un cercle de silence et d’opportunités manquées. En nous habituellement pas dans un tel forum international, à savoir les attaquant à ces besoins les plus fondamentaux, nous pouvons personnes exclues socialement telles que les lesbiennes, les mettre en lumière une foule de problèmes qui entravent les transgenres et les travailleuses du sexe. » droits des femmes et les privent de leur dignité. « Cet événement constitue une étape importante dans le renforcement de notre partenariat avec le WSSCC et dans la lutte que nous menons pour garantir les droits et l’égalité des femmes dans tous les secteurs et notamment dans le domaine de l’accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène. » Jyoti Sanghera, HCDH Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 7
Dignité et autonomisation en Inde En Inde, les travailleuses du sexe se sont Le succès de ce programme en termes de réduction de l’incidence du VIH/sida dans les communautés de travailleuses du sexe en unies pour fonder leurs propres associations, a rapidement fait un modèle que le gouvernement a adopté et défendre leurs droits sur le plan politique, reproduit dans plusieurs États du pays. et répondre à leurs besoins en matière Pendant ce temps, à Sonagachi, les travailleuses du sexe qui d’assainissement et d’hygiène. s’étaient efficacement mobilisées contre le VIH/sida ont commencé à s’intéresser à d’autres questions. En œuvrant ensemble, les Dans une démarche remarquable d’auto-organisation, les femmes ont découvert qu’elles pouvaient aussi initier d’importants prostituées identifient leurs propres besoins et y répondent avec changements et améliorer d’autres aspects de leurs vies. Mousomi le peu de ressources ou de soutien externe dont elles disposent. Mohanti, une des travailleuses du sexe avec lesquelles le Docteur Jana Ainsi, un mouvement qui luttait initialement contre le VIH/sida a travaillé s’engage désormais également pour des causes sociales. au sein d’une communauté s’est transformé en une opportunité de revendiquer des droits, partager des informations, promouvoir Mme Mohanti raconte : « J’ai été recrutée pour sensibiliser mes pairs l’éducation et la sensibilisation et s’autonomiser. aux questions de santé. Je travaillais dans une maison close. Au début, je distribuais des préservatifs gratuits et j’expliquais ce qu’était le Souvent perçues comme des victimes ou des personnes VIH. Après avoir commencé à utiliser les préservatifs, nous avons été « immorales », les travailleuses du sexe sont marginalisées, mises confrontées au problème de leur élimination. » au ban de la société et montrées du doigt. C’était bien la situation qui régnait dans le quartier de Sonagachi à Calcutta, la zone de Mme Mohanti et d’autres femmes ont réfléchi ensemble pour trouver prostitution la plus étendue de l’Inde. Environ 10 000 travailleuses une solution à ce simple problème d’élimination des préservatifs. du sexe exercent dans ce dédale de maisons closes sur plusieurs Tout comme elles s’étaient regroupées pour sensibiliser leurs pairs étages et de rues dans lesquelles elles attendent leurs clients. sur la question du VIH/sida, elles ont uni leurs forces pour collecter des fonds afin de faire construire un bloc sanitaire et ainsi garantir Le monde de Sonagachi a longtemps été ignoré par les programmes l’assainissement et des pratiques hygiéniques. nationaux, voire caché au public. Pendant des années, les politiciens ont feint d’ignorer jusqu’à son existence. On raconte même que les Aujourd’hui, Mme Mohanti représente sa région au sein du policiers visitaient les maisons closes pour soutirer des pots-de-vin Durbar Mahila Samanwya Committee (DMSC), une association de ou des faveurs plutôt que pour appliquer la loi ou protéger les travailleurs du sexe fondée sur trois principes : le respect, la fiabilité résidentes contre les mauvais traitements et le harcèlement. et la reconnaissance. Elle y accomplit une multitude de tâches, Avec l’arrivée du sida au début des années 1990, le quartier de la mobilisation contre les violences policières à l’encontre des a commencé à être considéré comme un dangereux foyer d’incubation travailleurs du sexe jusqu’à la mise en place de coopératives pour d’une maladie potentiellement mortelle. C’est ainsi que Sonagachi collecter des fonds afin de produire des serviettes hygiéniques. est devenu l’objet de l’attention. Lorsque certaines femmes ont commencé à s’inquiéter parce que Le gouvernement et plusieurs organisations non gouvernementales leurs enfants étaient rejetés et privés des opportunités éducatives ont lancé des programmes de prévention du VIH/sida dans le offertes aux autres, le DMSC a de nouveau pris les devants en ouvrant quartier rouge. son propre pensionnat afin de leur assurer un avenir. Plus récemment, les femmes ont donné une dimension nationale à leur cause. Elles ont L’équipe dirigée par l’épidémiologiste Dr Samarajit Jana a eu organisé une manifestation devant le Parlement pour demander la l’excellente idée de recruter des travailleuses du sexe pour modification de la législation sur la prostitution, qu’elles estiment promouvoir l’utilisation des préservatifs auprès des autres préjudiciable à leur égard. prostituées et diffuser de l’information sur le VIH/sida afin d’accroître l’efficacité de la prévention. Les résultats ont été spectaculaires. Le travail mené par le Docteur Jana dans le cadre du projet de Sonagachi lui a permis de comprendre combien il est important de collaborer avec les communautés et de les impliquer dans l’identification des solutions à leurs problèmes et à leurs besoins. « Dans un sens, nous considérions le VIH comme un ami. En effet, les « Lorsque nous considérons le travail du sexe travailleuses du sexe nous disaient que pour la première fois, nous comme immoral, nous fondons notre jugement sur les traitions comme des êtres humains alors qu’avant le VIH, nous ne nous étions jamais adressés à elles », a raconté le Dr Jana. « Le VIH la morale, et non sur le droit. » a créé un espace dans lequel nous avons pu nous engager. » Dr. Smarajit Jana, Institut d’étude et de formation de Sonagachi 8 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
inde Mousomi Mohanti est une travailleuse du sexe et leader communautaire à Sonagachi. C’est mon métier. Je ne veux pas être obligée de le quitter, car je perdrais alors mon revenu et l’argent avec lequel je fais vivre ma famille. Ce que je veux, c’est du respect et de la dignité pour ce que je fais. Je viens d’une famille pauvre. Mes frères et mes sœurs survivaient à peine. J’ai choisi ce métier pour les soutenir, ainsi que mes parents. J’ai dû faire face à de nombreux problèmes. Sortir du quartier de Sonagachi pour acheter des préservatifs ou des serviettes hygiéniques était délicat. Les femmes ne quittent généralement pas le quartier, car elles font l’objet de nombreux regards malveillants et d’insultes. Faire nos ablutions aussi était difficile. Nous devions les faire dehors et les gens nous regardaient en faisant des commentaires. C’est ainsi que les femmes se sont réunies pour récolter des fonds et construire des toilettes. L’achat des préservatifs ne pose pas de problème, car ils sont subventionnés par l’État. En revanche, les serviettes hygiéniques sont très chères. C’est pourquoi nous avons décidé de nous réunir pour les produire nous-mêmes. Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 9
Respect et égalité au Népal Au Népal, être une femme n’est déjà pas facile, surtout si l’on est pauvre et marginalisée. Mais, être une femme lesbienne ou transgenre est encore plus compliqué. Pour les femmes népalaises, les services essentiels en matière d’eau, d’assainissement et de santé sont peu accessibles. Pour les femmes « Le silence ne s’arrête pas aux menstruations, marginalisées, comme les membres de la communauté lesbienne ou transsexuelle, ils sont souvent hors de portée. il affecte de nombreux aspects de la sexualité féminine. » Dans une grande partie du monde en développement, y compris au Népal, les femmes ont moins de chances que les hommes de Lucinda O’Hanlon, HCDH terminer l’école, d’avoir accès aux soins de santé et de jouir d’autres droits économiques, sociaux et politiques. Mais qu’en est-il des femmes qui ne se conforment pas aux normes établies par la société ? Quel statut ont-elles (si tant est qu’elles en aient un) dans les communautés où les femmes sont définies par leur rôle de fille, d’épouse et de mère ? « Au Népal, les femmes sont traitées comme des citoyens de « Je suis allée chez le médecin, car j’avais des douleurs abdominales seconde classe. Les lesbiennes et les transgenres, quant à elles, pendant mes règles », a-t-elle raconté. « Il m’a demandé si j’étais sont encore moins bien considérées », a expliqué Shyra Karki, une mariée. Je lui ai répondu que j’étais en couple avec une femme et militante lesbienne de Katmandou. Dans ce pays, les lesbiennes que nous avions des relations sexuelles. Le médecin m’a rétorqué et les transgenres sont généralement invisibles et cachent leur qu’il était impossible d’avoir ce type de douleur sans être mariée orientation sexuelle par peur d’être rejetées par leur famille ou de à un homme. » perdre leur travail. Les préjugés, l’intolérance et le mépris poussent de nombreuses Cette stigmatisation sociale a de lourdes répercussions au quotidien lesbiennes et femmes transgenres à se soigner avec des médicaments sur les besoins et les droits fondamentaux de ces femmes. vendus sans ordonnance afin d’éviter le jugement des médecins. Par exemple, se rendre à la pharmacie ou chez le médecin pose de Souvent au détriment de leur santé. multiples difficultés. Les transgenres, particulièrement les femmes habillées comme des hommes, sont trop mal à l’aise pour oser Toutefois, la situation évolue. C’est ce qu’a affirmé Mme Karki qui entrer dans un magasin afin d’acheter des serviettes hygiéniques, travaille pour Mitini Nepal, un groupe qui lutte pour l’égalité, ou aller à l’hôpital pour recevoir des soins ou faire des examens la dignité et les droits des lesbiennes et des transgenres au Népal. gynécologiques. Mme Karki connaît ces difficultés. Fondé en 2005 par un couple de lesbiennes qui ont déclenché un véritable scandale en annonçant dans la presse leur orientation sexuelle et leur relation amoureuse, Mitini Nepal a joué un rôle clé dans l’organisation de la Gay Pride annuelle de Katmandou. Les actions de Mitini Nepal entraînent parfois des réactions violentes. Mme Karki et ses collègues ont dû éviter les bureaux de leur association pendant plusieurs semaines par crainte d’une attaque. Toutefois, leurs efforts portent également leurs fruits. Le Népal est ainsi l’un des rares pays asiatiques qui reconnaissent officiellement les droits des transgenres et des lesbiennes, même si celles-ci ne sont pas encore complètement acceptées par la société dans son ensemble. L’année dernière, quelque 1’000 membres et sympathisants de la communauté gay, lesbienne, bisexuelle et transgenre ont participé au défilé de la Gay Pride dans les rues de Katmandou et revendiqué l’égalité des droits pour tous, sans discrimination liée à l’orientation ou les pratiques sexuelles. 10 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
NÉPAL Shyra Karki est une militante lesbienne qui défend l’égalité et la dignité. Je viens d’une famille progressiste, mais la société népalaise repose sur un système patriarcal. Lorsque mon frère rentre tard d’une sortie avec ses amis, mon père est content de le voir et demande à ce qu’on lui prépare à manger. Quand je rentre chez moi après avoir travaillé tard au bureau, mon père regarde sa montre et me dit : « Tu as vu l’heure ? » Les membres de ma famille sont fiers et heureux que je m’exprime ici devant les Nations Unies. Ils savent que je suis lesbienne et que je participe à des campagnes militantes. Toutefois, ils m’ont demandé d’utiliser un pseudonyme dans le cadre de mes activités, car ils disent que cela les pénalise lorsque les gens savent qui je suis. Lorsque je participe à des événements, j’ai donc décidé de m’appeler Shyra. Mais mon vrai prénom, celui que m’a donné ma famille, c’est Sita. Vous pouvez le voir ici en petites lettres sur mon badge. C’est ma façon de revendiquer qui je suis. Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 11
Comprendre le contexte culturel au Sénégal Les sociétés et les communautés peuvent changer, surtout si ce sont leurs propres membres qui en prennent l’initiative. « La politique et les lois ne suffisent pas. Il faut L’ONG africaine Tostan travaille étroitement avec les communautés les mettre en pratique et donner aux populations du Sénégal pour comprendre le contexte culturel qui sous-tend la pratique séculaire de l’excision féminine. Bon nombre de ces l’éducation et le pouvoir de prendre conscience de communautés prêtent désormais attention à d’autres aspects de leurs droits. C’est alors qu’elles peuvent apporter leur vie qu’elles veulent modifier, comme abolir le mariage des changements radicaux. » précoce, renforcer les droits civiques et promouvoir l’autonomisation économique. Marilena Viviani, UNICEF Environ deux millions de filles sont excisées chaque année dans le monde. Aussi appelée mutilation génitale féminine (MGF), l’excision est répandue dans de nombreux pays du nord-est et de la région subsaharienne de l’Afrique. Cette pratique consiste à retirer ou M. Sy et son équipe ont dû revoir leur approche. Ils ont choisi de mutiler les organes génitaux externes des femmes. Elle peut inclure considérer la question sous l’angle des droits de la personne et l’excision de la totalité ou d’une partie du clitoris et du capuchon d’encourager les communautés à prendre elles-mêmes la décision clitoridien, l’ablation des lèvres ou des chairs souples qui entourent de mettre fin à la mutilation génitale féminine. « Nous discutions le vagin et, dans sa forme la plus extrême appelée l’infibulation, d’abord des principes ancrés dans la communauté, de ses l’ablation des petites et grandes lèvres ainsi que la fermeture du traditions qui prônent l’harmonie et le respect. Ensuite, nous leur vagin. Cette intervention est généralement réalisée sur les filles demandions si l’excision était vraiment en phase avec ces valeurs », prépubères par une guérisseuse traditionnelle ou une circonciseuse, a raconté M. Sy. sans anesthésie et au moyen d’un rasoir ou d’un couteau. Tostan a identifié cinquante hommes et femmes influents et les Vue de l’extérieur, cette coutume peut paraître brutale sur bien des a formés afin qu’ils encouragent leurs pairs à se demander si plans. L’intervention est sanglante et douloureuse. Elle peut avoir l’excision était bien dans l’intérêt de leur communauté, de ses des effets négatifs à long terme sur la santé des femmes excisées. femmes et de ses filles. Ainsi, de plus en plus de personnes ont En visant le clitoris, la source principale de leur plaisir sexuel, elle commencé à remettre cette coutume en question. À ce jour, 5 800 les prive également d’une grande partie de la jouissance sexuelle. communautés sénégalaises ont cessé de la pratiquer. Pourtant, dans les communautés où elle est pratiquée, l’excision est « Depuis que les communautés ont décidé par elles-mêmes de un rite de passage, une étape vers l’âge adulte et la vie de femme, mettre fin à l’excision, il est difficile de la pratiquer [au Sénégal], de mère et de membre respecté de la société. L’approche qui car elle n’est plus acceptable d’un point de vue social », a expliqué consiste à faire pression sur les sociétés pour qu’elles abandonnent M. Sy. Le gouvernement a certes officiellement interdit les mutilations de telles coutumes n’est pas appropriée. Tostan travaille donc génitales féminines en 1999, mais « ce sont les communautés directement auprès des communautés rurales pour favoriser leur elles-mêmes qui poussent l’État à mettre en place des mécanismes propre développement et les encourager à mettre un terme à cette de surveillance », ajoute-t-il. pratique de leur propre gré. Ces succès que les communautés ont remportés contre les « Lorsqu’une communauté perpétue une tradition séculaire, on ne mutilations génitales féminines ont amené de nombreux citoyens peut pas juste lui dire d’arrêter », a expliqué Khalidou Sy, coordinateur à remettre en question d’autres pratiques traditionnelles, en se social de Tostan au Sénégal. Quand l’équipe de Tostan s’est rendue demandant si elles étaient toujours bénéfiques pour la communauté. pour la première fois dans des communautés rurales du nord du D’après Tostan, certains villageois prennent désormais en main des pays où la tradition de l’excision restait fortement ancrée, des questions comme les droits civiques, les soins de santé, la protection protestataires ont encerclé l’hôtel qui l’hébergeait, mis le feu à des de l’environnement, le mariage précoce et l’autonomisation pneus et causé une multitude de problèmes. économique, suscitant l’espoir d’autres changements durables. 12 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
SÉNÉGAL Mariéme Bamba a fait évoluer les perceptions. Elle a ainsi permis à sa petite-fille d’échapper à l’excision et de suivre un enseignement secondaire. Née dans une région rurale du Sénégal, Mariéme Bamba n’est jamais allée à l’école. Elle a subi une mutilation génitale avant la puberté, a été mariée à 14 ans et a eu son premier enfant à 15 ans. Comme elle, sa fille a été excisée mais elle est décédée peu de temps après, très probablement des suites de l’intervention. Mariéme a eu une seconde fille, qui a elle aussi subi une excision, et qui est elle aussi décédée peu après. Des années plus tard, Mariéme a fait partie des personnes formées par Tostan. Elle a joué un rôle important en encourageant sa communauté à mettre fin à la pratique des mutilations génitales féminines. La petite-fille de Mariéme a échappé à l’excision, et c’est aujourd’hui l’une des rares filles du village à avoir suivi un enseignement secondaire qui l’a amenée jusqu’au baccalauréat. Mariéme elle aussi a pris le chemin de l’école. Grâce à l’ONG indienne Barefoot College, elle a suivi à plus de 50 ans une formation d’ingénieur en énergie solaire. Mariéme a installé les panneaux solaires qui alimentent pour la première fois son village en électricité, et c’est elle qui en assure l’entretien. Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 13
Prolonger le succès de l’an passé : Hommage à la femme En 2014, la journée « Inspiring Change « Plus encore, cette stigmatisation affecte non seulement le droit to Promote Women’s Rights and Dignity » des femmes à la dignité, mais aussi le droit à la non-discrimination, à l’égalité, à l’intégrité physique, à la santé, à l’intimité, ainsi que le (Insuffler le changement pour promouvoir droit de ne pas être soumis à un traitement inhumain ou dégradant. » la dignité et les droits des femmes) s’appuie « Les menstruations sont une fonction essentielle du corps [des sur les progrès réalisés lors de l’événement femmes], et les préjugés qui les accompagnent constituent une organisé en 2013 par le WSSCC pour la Journée violation grave et flagrante des droits de la personne. Un long chemin internationale de la femme : « Hommage à la reste à parcourir pour y mettre un terme », a ajouté Mme Sanghera. femme : la gestion de l’hygiène menstruelle ». Comme en 2013, les intervenants ont prêté une attention particulière aux questions d’hygiène menstruelle. Ils ont écouté comment les L’année dernière, les participants se sont penchés sur un sujet femmes de Sonagachi avaient uni leurs forces pour produire leurs tabou : la gestion de l’hygiène menstruelle (GHM). Tout a été abordé : propres serviettes hygiéniques et construire des toilettes, et entendu depuis les détails pratiques pour que les installations d’hygiène les obstacles considérables que doivent surmonter les femmes soient appropriées et l’élimination des produits d’hygiène féminine de la communauté LGBTI au Népal pour avoir accès à des services jusqu’aux perceptions des femmes et superstitions, les préjugés et sanitaires. Dans ce pays, la souffrance des femmes transsexuelles qui le silence qui entourent les saignements mensuels. n’osent pas se rendre dans une pharmacie pour acheter des produits d’hygiène féminine reste particulièrement poignante. Les organisateurs et les participants de cet événement ont conclu à l’unanimité que l’hygiène menstruelle, en plus d’être une question M. Khalidou Sy, coordinateur national de l’association sénégalaise de santé, relevait également du domaine des droits de la personne. Tostan, a précisé qu’au Sénégal, en plus des difficultés rencontrées Ainsi est né le thème central de l’année 2014 : la dignité et les pour trouver et acheter des produits d’hygiène féminine, les droits des femmes dans le contexte de l’eau, de l’assainissement femmes en savent peu sur la manière de les utiliser. Elles ne savent et de l’hygiène. pas toujours à quelle fréquence changer de serviettes hygiéniques ou comment les éliminer proprement. Selon lui, il est essentiel de « L’année dernière, de nombreux participants et moi-même avions ne pas traiter la question de l’hygiène menstruelle de façon isolée, fait remarquer que la stigmatisation des menstruations et de l’hygiène mais au contraire de l’intégrer dans le cadre plus large des menstruelle était une violation de plusieurs droits fondamentaux », problématiques sanitaires. a rappelé Jyoti Sanghera, responsable des questions relatives aux droits de l’homme et des questions économiques et sociales auprès « Nous mettons en œuvre des programmes qui vont au-delà de la du HCDH. question de l’hygiène menstruelle ou de l’excision », a expliqué M. Sy. « Nous accordons également une grande importance à l’hygiène personnelle, car nous estimons que toutes ces questions sont étroitement liées les unes aux autres. » « Ce qu’il y a de plus remarquable dans l’histoire M. Gib Bulloch, directeur exécutif d’Accenture Development des avancées féministes, c’est la détermination Partnerships, a rappelé qu’il est important d’adopter une approche des femmes. Imaginez ce que 600 millions de holistique. D’après lui, la question de la gestion de l’hygiène femmes indiennes sont capables d’accomplir. » menstruelle doit être incluse dans les programmes sur les droits de l’homme, la santé et l’éducation. Il a aussi recommandé de créer Gloria Gangte, Mission permanente de l’Inde une plate-forme de savoirs afin de partager les bonnes pratiques, auprès de l’ONU à Genève et ajouté que la collaboration avec les milieux économiques permet d’apporter des changements à grande échelle. 14 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
M. Bulloch a déclaré : « La gestion de l’hygiène menstruelle relève certes de l’éducation, de la santé et des droits fondamentaux. Toutefois, du point de vue économique, c’est aussi une question de logistique et d’innovation. Plutôt que de la traiter comme une Hommage à la question à part entière, nous lui donnons une plus grande visibilité en l’intégrant dans un agenda plus large ». M. Bulloch a notamment femme Le rapport cité la manière dont Vodafone a diffusé au moyen de son réseau de téléphonie en Tanzanie des informations sur des traitements 2013 est de la santé maternelle, y compris les opérations simples qui permettent de réparer les fistules obstétricales et ainsi d’améliorer disponible sur grandement la vie des femmes concernées. « Les femmes n’avaient pas besoin d’aborder la question. L’accès aux informations depuis www.wsscc.org leur téléphone portable a considérablement renforcé leur autonomie », a expliqué M. Bulloch. Selon Vodafone, ses réseaux téléphoniques permettraient Ces rencontres ont eu lieu dans des zones rurales, conservatrices et à quelque 700 000 femmes dans le monde en développement de patriarcales de cinq États indiens où les menstruations sont un sujet bénéficier du service « Text to Treatment » pour les complications tabou et où les filles ne comprennent pas ce qu’il se passe à l’arrivée liées à la maternité.1 des premières règles. Bien que la campagne soit officiellement terminée, une véritable dynamique de changement s’est répandue « Pourquoi ne pas utiliser les mêmes méthodes pour la gestion de d’un bout à l’autre du pays. L’hygiène menstruelle et son financement l’hygiène menstruelle ? C’est également un sujet dévalorisé, caché sont désormais clairement inclus dans les directives nationales. et tabou. Les innovations et les téléphones mobiles sont parfaits dans ce contexte », a suggéré M. Bulloch. « Aucune organisation ne « Deux de nos bénévoles poursuivent la démarche de leur propre peut y arriver toute seule. [Il faut monter des partenariats]. L’enjeu initiative, sans l’aide financière de qui que ce soit. L’une d’elles finance commercial, la question de la rentabilité et la problématique sociale elle-même un voyage dans le Punjab, un État de plus de 28 millions doivent être considérés comme un ensemble. » d’habitants. Elle entend sensibiliser les cœurs et les esprits sur la nécessité de briser le silence et de corriger cette discrimination Dans une perspective complètement différente, Archana Patkar du ancestrale à l’encontre des femmes », a expliqué Mme Patkar. WSSCC a présenté la démarche du Labo de gestion de l’hygiène menstruelle en Inde. Dans le cadre de ce projet, un groupe de « Elle est convaincue de l’utilité de sa démarche, et moi aussi bénévoles a préparé une campagne itinérante de 51 jours au cours pour être franche », a ajouté Mme Patkar. « Cette action à grande de laquelle ils ont organisé des rencontres individuelles et collectives échelle peut aboutir si chacun de nous apporte sa conviction à ce avec plus de 12 000 femmes et filles. L’objectif était de comprendre mouvement. Certaines des plus grandes transformations sociales les problèmes auxquelles elles sont confrontées et les solutions reposaient au départ sur des idées, et les ressources ne sont venues qu’elles utilisent à la maison, à l’école ou sur leur lieu de travail. que plus tard. » Lors de la Journée des droits de l’homme le 10 décembre 2013, l’Inde a explicitement accordé à l’hygiène menstruelle une place et un budget dans son programme global national d’assainissement Nirmal Bharat Abhiyan. « Le gouvernement indien a modifié sa politique et ses principes directeurs en matière d’assainissement afin d’y intégrer explicitement l’hygiène menstruelle et de l’associer aux budgets qui visent à générer de la demande, à briser le silence, à gérer et éliminer les déchets », a expliqué Gloria Gangte, conseillère politique de la Mission permanente de l’Inde auprès de l’Office des Nations Unies à Genève. « L’Inde est le seul pays à avoir clairement intégré la GHM dans son action publique. » Voici les questions que nous devons nous poser : « Pour qui ces services ont-ils été conçus ? Qui excluent-ils ? Qu’omettent-ils de traiter ? Comment interprétons-nous le cadre normatif ? » 1 Fondation Vodafone. Connected Women: How mobile can support women’s Archana Patkar, WSSCC economic and social empowerment, Fondation Vodafone, mars 2014 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes 15
Déclaration Le Royaume-Uni s’engage à soutenir l’amélioration desoutien à de l’accès durable à l’eau potable et l’événement « Insuffler le à l’assainissement dans les pays pauvres à travers changement en son Département du développement international. faveur de la dignité et des droits Les programmes WASH jouent un rôle manifeste des femmes » dans la prévention de millions de décès évitables, l’amélioration de la santé des populations et la sortie de la pauvreté. Les problèmes d’eau et d’assainissement touchent avant tout les femmes et les filles, car ce sont elles qui sont chargées d’aller chercher l’eau, et car l’absence de toilettes les expose à des dangers physiques. C’est pour ces raisons que le Royaume-Uni encourage vivement le respect de l’égalité entre les sexes dans les programmes WASH et aspire à ce que les femmes participent sur un pied d’égalité aux décisions qui concernent les services d’eau et d’assainissement. Ambassadrice Karen Pierce, représentante permanente du Royaume-Uni auprès des Nations Unies 16 Insuffler le changement pour promouvoir la dignité et les droits des femmes
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