L'ECOLE AU MALI HIER ET AUJOURD'HUI - LAURA STERN Sous la direction de Mme M. Asper Novembre 2009
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TM 2009 n°6 : « Apprendre à lire, à écrire, à compter… L’école d’ailleurs et d’autrefois » L’ECOLE AU MALI HIER ET AUJOURD’HUI Travail de maturité 2009 LAURA STERN Sous la direction de Mme M. Asper Novembre 2009 Gymnase Auguste Piccard 3M1
Résumé Selon le Larousse 2009, l’école est un établissement où est dispensé un enseignement collectif général aux enfants d’âge scolaire et préscolaire. C’est aussi, au jour d’aujourd’hui, une institution primordiale, nécessaire au bon fonctionnement d’une société. En effet, il est souvent dit qu’un enfant qui ne va pas ou n’est pas allé à l’école n’a aucune chance de s’en sortir convenablement au niveau professionnel. D’ailleurs, pourrions-nous imaginer notre vie aujourd’hui sans l’école ? Cela est peu probable. Car c’est elle qui rythme notre vie, nous permet de nous intégrer dans la société, de rencontrer des gens, etc. Elle nous apporte des connaissances et savoir nécessaires à notre développement et pour notre futur (professionnel). De plus, c’est aussi en grande partie grâce à elle que nous apprenons à vivre en société et à se comporter comme il se doit face à autrui. Et cela, en Suisse en tout cas, dès notre plus jeune âge. Mais les école se ressemblent-elles? Le thème de mon travail de maturité, comme vous l’aurez sans doute compris, est l’école et s’intitule « Apprendre à lire, à écrire, à compter… L’école d’ailleurs et d’autrefois ». J’ai choisi pour sujet L’école au Mali hier et aujourd’hui. Mais pourquoi l’école au Mali ? Depuis longtemps, le cas de l’école en Afrique et de la sous scolarisation de ses élèves m’a beaucoup intéressé. De plus, le Mali est un pays à dominance musulmane, il est donc plus qu’intéressant de voir comment plusieurs ethnie différentes réussissent à cohabiter. J’ai commencé par étudier l’histoire du Mali, sa période précoloniale, coloniale et son accès à l’indépendance jusqu’à aujourd’hui. Ensuite, je me suis intéressée à l’existence d’une école dans le Mali précolonial. J’ai découvert qu’à cette époque, ils existaient déjà des écoles coraniques mais aussi une éducation traditionnelle africaine qui, avec ses caractéristiques et son mode de fonctionnement a tout pour être considérée comme une véritable école. Par la suite, j’ai continué mon travail en étudiant plus en détail les écoles musulmanes, autant avant la colonisation, pendant et aujourd’hui. Ces institutions, plus vieilles que toutes les autres en Afrique et d’une richesse impressionnante, ont réussi à subsister même lors de la colonisation française. Puis je me suis intéressée à l’école durant la colonisation, l’apport qu’ont ameneé les français et la manière dont ils ont mis en place une structure scolaire. Trop souvent d’ailleurs sans s’intéresser et ni même prendre en compte les populations qui vivaient alors au Mali ! Ce que je trouve déplorable. Puis, le dernier chapitre de mon travail concerne l’école malienne depuis son accès à l’indépendance en 1960 jusqu’à aujourd’hui. J’ai découvert que malgré la réforme scolaire et l’envie de s’en séparer le plus possible, de nombreuses influences de la colonisation existent toujours. De plus, l’Etat malien peine à s’occuper du problème scolaire car il est déjà occupé avec pleins d’autres difficultés qu’il se doit de gérer. Heureusement, l’aide humanitaire et les organisations internationales se sont et deviennent de plus en plus investies dans le problème de l’éducation. De nombreux projets sont mis en œuvre et prévus, afin d’améliorer la scolarité des jeunes maliens. L’école malienne, après en avoir vu de toutes les couleurs, se dirige donc aujourd’hui vers un système éducatif meilleur, lui correspondant mieux mais pas sans rencontrer certaines difficultés.
Tables des matières PRÉFACE ..........................................................................................................................................................................2 CHAPITRE 1. L’HISTOIRE DU MALI ....................................................................................................... 3 1.1 PRÉCOLONIALE .......................................................................................................................................................3 1.2. COLONIALE FRANÇAISE........................................................................................................................................5 1.3 POSTCOLONIALE, DEPUIS 1960 .........................................................................................................................7 CHAPITRE 2. L’ÉDUCATION TRADITIONNELLE AFRICAINE ....................................................... 8 2.1 QU’EST‐CE QUE L’ÉCOLE EN AFRIQUE PRÉCOLONIALE ? ..............................................................................8 2.2 L’ÉDUCATION TRADITIONNELLE AFRICAINE....................................................................................................8 2.3. LES JEUX ...............................................................................................................................................................12 2.4. L’INITIATION .......................................................................................................................................................13 CHAPITRE 3. L’ISLAMISATION DU MALI ET SES CONSÉQUENCES ......................................... 16 3.1 L’ARRIVÉE DE L’ISLAM AU MALI ......................................................................................................................16 3.2 L’ÉCOLE ISLAMIQUE PRÉCOLONIALE ..............................................................................................................16 3.3. RENCONTRE ENTRE ÉDUCATION ISLAMIQUE ET ÉDUCATION COLONIALE ............................................18 3.4. ECOLE CORANIQUE ET MEDERSAS AUJOURD’HUI ........................................................................................20 CHAPITRE 4. L’ENSEIGNEMENT COLONIAL FRANÇAIS .............................................................. 23 4.1 LES ÉCOLES MISSIONNAIRES .............................................................................................................................23 4.2 STRUCTURE DE L’ENSEIGNEMENT OFFICIEL .................................................................................................24 4.3. UNE ÉCOLE POUR QUI ?.....................................................................................................................................27 4.4 PROGRAMMES ET MATIÈRES ............................................................................................................................28 4.5. PERSONNEL ENSEIGNANT ET OBJECTIFS DE L’ENSEIGNEMENT ...............................................................30 CHAPITRE 5. AU MALI DÈS 1960 ........................................................................................................ 32 5.1. RÉFORME DE L’ENSEIGNEMENT .....................................................................................................................32 5.2. ECOLE TOUJOURS SOUS L’INFLUENCE COLONIALE ?...................................................................................33 5.3. ECOLE FRANÇAISE ..............................................................................................................................................34 5.4. L’ÉCOLE DE BASE ................................................................................................................................................35 5.5. PROJETS ET AIDES HUMANITAIRE AU MALI AUJOURD’HUI .......................................................................37 CONCLUSION ................................................................................................................................................................41 BIBLIOGRAPHIE ...........................................................................................................................................................42 Livres ...................................................................................................................................................................... 42 Sites ......................................................................................................................................................................... 43 Articles ................................................................................................................................................................... 44
Préface L’école, selon la définition du Larousse 2004 est « un établissement où est dispensé un enseignement collectif général aux enfants d’âge scolaire et préscolaire ». Le Mali est un pays d’Afrique occidentale se situant au Sud de l’Algérie. Sa superficie est de 1 240 000 kilomètres2. Sa population était en 2005 de 13,52 millions d’habitants1. A cette même époque, 71% de la population vivait en milieu rural. 49% de la population avait moins de quinze ans et seuls 54% des enfants étaient scolarisés. Carte du Mali2 J’ai choisi de faire mon Travail de Maturité sur L’école au Mali hier et aujourd’hui pour plusieurs raisons différentes. Premièrement, je pense que l’école est un des éléments les plus importants dans la vie des individus et la société d’aujourd’hui. Elle est la base de tous développements et améliorations, qu’ils soient techniques, théoriques, scientifiques, etc. Je pense donc qu’il est nécessaire d’en parler, afin que les gens se rendent mieux compte de son importance. Secondement, j’ai toujours porté un certain intérêt à l’Afrique et à son développement. J’ai toujours voulu faire un voyage humanitaire en Afrique et aujourd’hui ce désir s’est accentué. Par ce présent travail, j’ai pour objectif de présenter un pays d’Afrique, le Mali, et l’évolution de son système d’éducation. J’ai décidé de partir de la période précoloniale afin de montrer que la civilisation malienne existe depuis bien longtemps et de découvrir si des écoles existaient déjà à cette époque. L’étude de la période coloniale me permettra de mieux comprendre ce qu’est la colonisation et quelle place avait l’école dans son système. Enfin, ce que représente l’école aujourd’hui, dans un pays en voie de développement comme le Mali. Qui concerne-t-elle ? Apporte-t-elle des connaissances digne de celles qu’on nous enseigne en Suisse, par exemple ? Ces questions actuelles m’intéressent beaucoup. 1 Source ONU 2005 2 Image provenant du site : http://stages.alternatives.ca.edu/IMG/jpg/Carte_Mali.jpg 2
Chapitre 1. L’histoire du Mali 1.1 Précoloniale L’histoire du Mali est connue depuis sa période préhistorique. Cependant un certain nombre d’informations restent floues, vu l’incertitude de leurs sources. Le plus souvent l’Histoire est racontée oralement de génération en génération. Sa période antique nous est peu connue mais nous savons cependant que le Mali entretenait déjà des relations avec le nord de l’Afrique et avec les pays du bassin méditerranéen. Par la suite, différents royaumes et empires se sont succédés sur le territoire du Mali. Le premier est l’empire du Ghana, aussi connu sous le nom de l’empire du Wagadou Ghana (signifiant « ville des troupeaux »). Son origine demeure toutefois incertaine, l’histoire provenant de la tradition orale ouest-africaine. Deux thèses ont été évoquées, un homme, Dinga Cissé, venu de l’est aurait crée cette ville au IIIème siècle avant J.C. L’autre hypothèse avancerait que ce royaume serait l’ouvrage des Soninkés, peuple animiste habitant au sud du Sahara. Comme nous pouvons le voir sur cette image, l’empire du Ghana s’étendait du moyen Sénégal jusqu’à l’actuelle région de Tombouctou. Koumbi Sahel en était sa capitale (sud de la Mauritanie actuelle). Cet empire était également connu sous le nom de « Pays de l’Or » car il incluait la région aurifère de Bambouk. Empire du Ghana3 On date de cette époque le début de l’islamisation de l’Afrique noire occidentale. Les relations commerciales avec les pays musulmans, basées sur l’échange d’or et d’ivoire étaient fréquentes. L’Islam a commencé à se répandre à travers l’empire. L’apogée de l’empire du Ghana se situe entre le IXème et le XIème siècle. C’est à cette époque que les échanges avec les pays musulmans sont le plus important, tant au niveau commercial que culturel. Le pays est alors richissime. Les musulmans et les Soninkés cohabitent sans difficultés. Affaibli par les attaques des Almoravides, qui voulaient s’emparer de l’empire et victime de fortes sécheresses, l’empire a décliné progressivement. Les Soninkés se sont dispersés à travers l’ouest africain. 3 Image tirée du site : http://www.amoeba.com/dynamic-images/blog/Eric_B/Ghana-Empire.png 3
Suite à cela, le roi Sosso, souverain de la région de Kouliko (au nord-est de Bamako) a tenté de s’emparer de l’empire mais a été stoppé et vaincu par Soundiata Keïta, qui intégrera son royaume au futur empire du Mali. Soundiata Keïta a conquis les différents royaumes du Manden et les a réunifiés, créant ainsi l’empire du Mali. Il s’étendait du Sahara à la forêt équatoriale et de l’Océan atlantique à la boucle du Niger. Cet empire était beaucoup plus vaste que celui du Ghana. Sa capitale était la ville de Nyani ou Niani, orthographiée différemment selon les régions. Le règne de Soundiata Keïta a apporté paix et prospérité au royaume. Empire du Mali4 Puis l’empire du Mali a vécu son apogée sous le règne de Kankou Moussa, appelé également Kango Moussa ou Mansa Moussa, au XIVème siècle. Il est considéré comme l’empereur qui a le plus contribué à l’émergence de la culture islamique en Afrique noire. Il a fait un pèlerinage à la Mecque en 1324, accompagné de plus de quinze milles serviteurs, esclaves, chevaux et soldat. Un très grand nombre de savants musulmans l’ont accompagné lors de son retour. La carte ci-contre, dessinée par les portugais au XVème siècle, représente l’empereur Kankou Moussa. Cela peut signifier que les portugais ont probablement dû le rencontré, soit lors de son pèlerinage, soit lors de son règne. 5 Carte des découvertes portugaises avec en son centre Kankou Moussa. Le fait qu’il soit dessiné très grand doit vouloir signifier qu’il avait une grande importance à cette époque, que c’était un grand roi. De plus, la couronne et le sceptre sont des représentations du pouvoir pour les Européens, d’où l’origine portugaise de cette carte. 4 Image tirée du site : http://www.amoeba.com/dynamic-images/blog/Eric_B/mali-empire.PNG 5 Image prise du site : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Mansamusa.jpg 4
Le déclin de l’empire du Mali commença approximativement au XVème siècle, suite à de nombreuses guerres de successions ou des révoltes religieuses. C’est ensuite l’empire Songhoy ou Songhay qui lui a succédé. Cet empire était le plus grand que le Soudan occidental ait jamais connu. Il s’étendait sur le territoire du Mali et du Niger actuels et jusqu’à la côte sénégalaise. Soni Ali Ber, de la dynastie des Si, y a régné de 1464 à sa mort en 1492. Il a préservé la culture africaine de son royaume en combattant les Touaregs, les Peuls et les Musulmans. A sa mort, son fils a été détrôné par un général de l’armée de son père, Sarakollé Mohammed Touré, fondateur de la dynastie des Askias (dynastie islamisée originaire de Tekour). Il a gouverné de 1493 à 1528 et l’empire a connu une nouvelle apogée grâce à la diffusion de l’Islam et de la culture arabo- islamique. C’est à cette époque que les villes de Gao, sa capitale, Tombouctou et Djenné ont été reconnues comme centres culturels. E m Empire Songhoy6 Puis l’empire a connu un nouveau déclin lorsque les marocains, qui convoitaient ses richesses, ont détruit les villes de Tombouctou, Gao et Djenne en s’emparant de tous les biens. L’empire Songhoy a succombé, l’économie a dépéri suite à l’insécurité et aux catastrophes naturelles. Depuis cette époque, divers royaumes se sont succédés. La période a été traversée par de nombreuses guerres, notamment religieuses et l’esclavagisme a fait son apparition. 1.2. Coloniale française Vers 1820, René Caillé a été le premier français à visiter le Mali dans la forme qu’il avait à cette époque. Il a appris l’arabe et s’est converti à l’Islam. Il est rentré en France, riche de ses cahiers de voyage qui ont procuré d’innombrables informations aux Français et aux Européens. Durant la deuxième moitié du XIXème siècle, les premiers colonisateurs français sont arrivés au Soudan occidental. Les français désiraient créer une voie commerciale par le fleuve du Sénégal qui relierait l’océan atlantique au bassin du Niger. Ils ont donc pénétré le territoire du Soudan occidental. Au fur et à mesure de leur progression, ils se sont heurtés à différents chefs d’empire qui s’opposaient à leur invasion. 6 Image prise sur le site : http://pds3.egloos.com/pds/200706/28/15/d0015015_05065896.png 5
Les colonisateurs ont rencontré une forte opposition avec El Hadj Omar Tall, marabout et grand fervent de l’islam, souverain du peuple toucouleurs, qui entreprenait la création d’un empire théocratique en faisant une guerre sainte. La guerre a éclaté entre les Français et les Toucouleurs. Après avoir envahi le territoire du roi Amadou Amadou qui s’étendait de Macina jusqu’à Tombouctou. El hadj Omar Tall a dirigé cet état jusqu’à ce que le peuple se révolte et le force à s’enfuir. Dès 1890 les Français ont pris Ségou et c’était la fin de l’empire toucouleurs. Dessin représentant El Hadj Omar Tall7 Entre 1885 et 1889, les Français rencontrèrent d’autres oppositions, notamment avec l’empire Wasalu ou Wassoulou et son souverain, Samori Touré. Ce dernier s’opposait vivement à la pénétration française sur ses terres. Et c’est finalement en 1898 que Samori a été capturé et a dû s’incliner face aux colonisateurs. Toujours à cette époque, ils ont rencontré encore une forte opposition face au royaume de Kénédougou. Puis, ils ont assiégé la ville de Sikasso, capitale du Kénédougou en mai 1898. Il existait des guerres civiles au sein du territoire et il a été dit que si tous les rois des régions africaines s’étaient unis à la lutte contre la colonisation française au lieu de se combattre entre eux, les Français n’auraient pas réussi à s’implanter sur l’ensemble du territoire. Par ailleurs, dès 1891, la colonie a été nommée Soudan français et les Français ont implanté leur système administratif et ont divisé le pays en cercles et subdivisons. Subdivisons qui étaient divisées en cantons et ces cantons comportaient des villages. En 1892 Kayes a été désignée comme capitale et le Soudan intégré à l’Afrique Occidentale Française (AOF, fédération regroupant les diverses colonies françaises d’Afrique et dont le but était de coordonner l’autorité entre les colonies). En 1899, Bamako est devenue la capitale du Soudan. Dans leur colonie, les Français pratiquaient la politique de l’indigénat, c’est-à- dire qu’ils avaient tous les droits sur les autochtones soudanais, qui eux devaient obéir sans opposer de résistance et étaient astreints au travail forcé dans les conditions les plus médiocres. L’économie du pays durant la colonisation fluctua énormément, surtout vers le bas. En effet la politique coloniale était de produire des produits rapportant beaucoup, (coton et arachide) au détriment des cultures alimentaires dont le pays avait besoin pour vivre. 7 Tiré du site : http://aduna.free.fr/aduna.blog/photos/08_10_08/oumar_tall.jpg 6
Les autochtones ont décidé de réagir, prenant conscience de la situation, et des changements considérables ont eu lieu après la deuxième guerre mondiale. 1.3 Postcoloniale, depuis 1960 En 1959, la République du Mali, qui était connue à l’époque de la colonisation française sous le nom de Soudan français, forme, avec le Sénégal, la Fédération du Mali. Elle proclame son indépendance le 20 juin 1960. Mais, suite à des différends politiques, le Sénégal se retire deux mois plus tard de la Fédération et proclame son indépendance. C’est le 22 septembre 1960 que le Mali déclare son indépendance et devient la République du Mali sous la présidence de Modibo Keïta (premier Président de la nouvelle République du Mali) qui s’oriente vers le socialisme. En 1968, Modibo Keïta est renversé par un coup d’Etat militaire dirigé par Moussa Traoré (lieutenant de l’armée) qui prend le pouvoir et instaure un régime politique autoritaire. Cela ne résoudra en rien les problèmes économiques du pays, qui sera touché par de graves famines entre 1970 et 1985. Le régime en place est à nouveau renversé par un coup d’Etat en mars 1991, mené par le général Amadou Toumani Touré. Un gouvernement provisoire est alors crée et la démocratie sera restaurée grâce à la instauration d’une nouvelle Constitution. Alpha Oumar Konaré est élu Président lors des premières élections libres depuis l’indépendance (en 1960). Il est réélu en 1997. Il est important de connaître ces faits historiques afin de mieux comprendre les changements et les différentes réformes de l’enseignement qui ont eu lieu à cette époque. En effet, dès que le Mali obtient son indépendance, son nouveau président Mobido Keïta instaure une politique pour assurer le développement de l’éducation au Mali et entreprend une réforme en 1962. Mais cet élan du développement de l’enseignement est stoppé lors du coup d’Etat de 1968, car le régime politique autoritaire de Moussa Traoré se souciait peu des problèmes d’éducation dans le pays. Ce changement fait redescendre le taux de scolarisation à 21,46% alors qu’il avait atteint 29% avec la politique de Modibo Keïta. Le deuxième coup d’Etat marquant la fin du régime politique de Moussa Traoré met fin à cette décroissance et le nouveau président, Alpha Oumar Konaré s’engage à son tour dans une politique de fort développement de l’éducation. 7
Chapitre 2. L’éducation traditionnelle africaine 2.1 Qu’est-ce que l’école en Afrique précoloniale ? Il est important, dès le départ, de faire une distinction entre les populations musulmanes, animistes et polythéistes d’Afrique. De même, il est important de distinguer les grandes villes comme Gao, Tombouctou ou Djenné (grands centres culturels) des petits villages où les habitants avaient encore un niveau de vie très précaire. En effet, les populations musulmanes d’Afrique avaient déjà, à cette époque, des connaissances et un savoir supérieurs aux autres peuples. Cette différence, dû à la lecture du Coran, a permis à de nombreux intellectuels de se lancer dans la traduction de textes de l’Antiquité concernant les mathématiques, la physique, l’astronomie et même la médecine. Les musulmans pratiquaient quotidiennement l’écriture, la lecture, les mathématiques et diverses autres sciences. Il a d’ailleurs souvent été dit que c’est l’islam qui a urbanisé et participé au développement culturel de l’Afrique noire et saharienne. Il existait donc déjà à cette époque, des écoles coraniques pour les peuples musulmans. Les peuples africains non islamisés ne possédaient pas d’école dans le sens que nous comprenons aujourd’hui. Pour eux, l’éducation traditionnelle faisait office d’école, c’était « l’école de la vie »8. 2.2 L’éducation traditionnelle africaine Pour la plupart des historiens, « l’éducation traditionnelle africaine ne séparait jamais l’éducation (au sens large et actuel du terme) de l’instruction ou de l’enseignement (au sens précis et restreint) »9. Je pense donc que même si pour certains, l’éducation traditionnelles africaine n’est pas une école à proprement parler et n’a donc rien à faire dans ce travail, il est important d’en parler, de l’expliquer et de l’étudier. L’école d’aujourd’hui a pour but de former les élèves afin qu’ils répondent aux exigences économiques, sociales et politiques de la société. Les élèves apprennent ce qu’ils ont besoin afin de s’intégrer dans la société et participer à sa constante évolution. 8 Tiré du livre : L’éducation en Afrique, de Abdou Moumouni, p.23 et 32 9 Tiré du livre : L’éducation en Afrique, de Abdou Moumouni, p. 32 8
Or c’est exactement ce qui se passait en Afrique à cette époque. La différence réside au fait que le mode de vie était très différent de celui que nous avons aujourd’hui et que les attentes envers l’éducation n’étaient pas les mêmes. La société n’était pas en évolution perpétuelle et les connaissances intellectuelles n’étaient pas aussi poussées. Les métiers étaient presque exclusivement manuels, il fallait donc former des jeunes gens capables de répondre aux conditions de cette société. Voilà pourquoi je trouve primordial d’insérer, dans ce travail, un chapitre sur l’éducation traditionnelle africaine et que je la considère comme une école à part entière. Bien entendu, il n’y a pas une éducation traditionnelle africaine spécifique, cette dernière varie selon les pays et le mode de vie de ses habitants. Cependant, un certain nombre de traits généraux et communs se retrouvent dans cette éducation, ce qui démontre l’existence d’une culture africaine à proprement parler. « Elle est caractérisée par : • La grande importance qui lui est accordée et son caractère politique et social. • Son lien intime avec la vie sociale sur le double plan matériel et spirituel. • Son caractère polyvalent aussi bien en ce qui concerne les objectifs visés que les moyens employés. • Sa réalisation progressive et graduelle, conformément aux étapes successives de l’évolution physique, psychique et mentale de l’enfant. »10 Je trouve important de relever que ces caractéristiques pourraient très bien être celles d’une école en Suisse aujourd’hui. En effet, l’école est aujourd’hui considérée comme plus qu’importante, je dirais même qu’elle est primordiale. Elle influence énormément, et est aussi influencée par, l’évolution politique et sociale de notre société. De plus, notre parcours scolaire se fait lui aussi graduellement, en fonction de l’âge, des capacités physiques, psychiques et mentales de chaque enfant. L’éducation traditionnelle africaine se fait graduellement, par différentes phases. Ces phases sont constituées de classes d’âge (les classes d’âge sont considérées comme un élément de très grande importance dans de nombreuses cultures africaines). 10 Tiré du livre « L’éducation en Afrique » p.17 9
Nous retrouvons toujours trois classes principales : La première classe d’âge correspond à la première enfance, c’est-à-dire des enfants âgés de zéro (dès la naissance) à six ou huit ans (dans certains peuples jusqu’à dix ou douze ans !). Lors de la première enfance, c’est la mère qui est responsable de l’enfant. Elle lui prodigue tous les soins nécessaires, le nourrit, le berce… C’est également elle qui sera présente lorsque l’enfant commencera à marcher et prononcera ses premiers mots. Elle lui apprendra à se déplacer et aussi le nom des objets qui l’entourent. La deuxième classe d’âge commence à partir de six ans ou plus, c’est-à-dire de l’âge où l’enfant commence à pouvoir se déplacer seul et interagir avec le monde qui l’entoure. A partir de cet âge survient une différenciation au niveau du sexe. Le petit garçon sera à la charge du père et la petite fille à celle de la mère. Ils commenceront tous les deux à participer activités de production de la famille (cultures, récoltes, élevage de petits animaux, etc.) mais toujours en rapport avec leurs capacités. Le père et la mère sont considérés comme les « maîtres » de l’enfant et commencent à le mettre en contact avec la vie sociale. Le père initie le jeune garçon à son futur métier et la mère, la jeune fille au rôle que doit avoir la femme au sein de la famille et de la société. Les jeunes enfants, filles comme garçons, commencent à accomplir de petites tâches faciles, aidant l’économie familiale. Le petit garçon par exemple, suit son père aux champs, lui porte sa gourde, aide à nourrir et à surveiller l’animal de la famille. La petite fille commence, elle, avec des tâches plutôt ménagères comme accompagner sa mère au marché et l’aider à ramener les achats, s’occuper du petit frère ou de la petite sœur, nettoyer la case et piler certains condiments faciles. Petite fille du Mali11 L’image ci-dessus, bien qu’elle soit récente, montre très bien que les petites filles, à partir d’environ sept ans, étaient et sont toujours responsables de leurs petits frères et sœurs. 11 Photo trouvée sur le site : http://www.flickr.com/photos/harmonizetheworld/3843133663/ 10
Je trouve d’ailleurs intéressant de relever qu’une telle responsabilité ne serait jamais donnée à des petites filles de si bas âge dans les familles européennes. Effectivement je connais très peu de parents qui laisseraient leur petite fille de sept ans s’occuper de leur bébé âgé de quelques mois seulement. Alors qu’en Afrique, il habituel de voir des petites filles porter leur petit frère ou petite sœur sur leur dos. Elles sont d’ailleurs souvent plus nombreuses que les mères ! Je trouve donc important de relever aussi les différences qui existent entre nos deux sociétés afin de pouvoir établir une comparaison la plus complète possible. Par la suite, lorsque l’enfant grandit, de nouvelles tâches lui son attribuées. Il ne collabore plus uniquement pour la bonne marche de l’économie familiale mais aussi pour celle de la collectivité toute entière. Le petit garçon obtient son propre petit bout de terrain dont il doit être capable de s’occuper seul. Laboures, chasse et récoltes rythme ces journées. La petite fille apprend à confectionner différents objets de vannerie ou de broderie sur cuir qu’elle vendra pour son propre compte ou celui de sa famille. Elle commence à cuisiner et part vendre ou acheter divers objets au marché. Il ne faut pas croire pour autant que les jeunes enfants passent leur temps à travailler pour les parents et que ce sont leurs « esclaves » comme il a souvent été dit par des historiens, sociologues ou ethnologues. Les enfants, au contraire, passent une bonne partie de leur journée à jouer ou participent à des activités en commun avec des camarades de la même classe d’âge. La troisième classe d’âge débute à partir de dix ans et se termine en général vers quinze ans. A partir de cet âge, qui est considéré par les Africains comme l’adolescence, les jeunes garçons et les jeunes filles participent à presque tous les travaux de la vie de quotidienne au sein de la communauté. Ils acquièrent de plus en plus de responsabilités et sont la plupart du temps autonomes. Ils sont intégrés dans l’intimité de leurs parents et des autres adultes et commencent donc à être confrontés à la réalité de la vie et aux problèmes qui l’accompagnent. Ils sont alors autorisés, filles comme garçons, à participer aux manifestations publiques afin de voir comment se règle certains problèmes et de mieux comprendre la société. Leurs rapports avec les jeunes de la même classe d’âge s’intensifient, ils deviennent solidaires et de vraies amitiés se créent. Par ailleurs, ils continuent, surtout pour les jeunes garçons, à apprendre leur futur métier auprès de l’adulte responsable de leur formation. Ceci jusqu’à ce qu’ils soient prêts pour leur initiation. (cf pt 2.4.). 11
2.3. Les jeux Les jeux sont considérés comme primordiaux dans l’éducation traditionnelle africaine. Ils développent considérablement les qualités intellectuelles et physiques de l’enfant. Ils sont nombreux et ont tous pour but d’initier l’enfant à quelque chose de nouveau. Par exemple, les enfants s’amusent à imiter la vie sociale de leurs parents ou des adultes, soit en imitant un travail comme paysan, artisan, pêcheur, ménagère et bien d’autres, soit en imitant un acte physique comme le grimpeur, le sauteur, le coureur. Ce type de jeux est considéré dans l’éducation africaine comme une préparation à la vie future dans la société et c’est par là que l’enfant apprend à se comporter en conformité avec les attentes de sa communauté (c’est-à-dire, par exemple, respecter les anciens et les autres membres de la collectivité, être apte à régler des problèmes plus ou moins importants, ou participer aux récoltes saisonnières). Plusieurs autres types de jeux sont pratiqués par les enfants, et peuvent aller de jeux simples comme une promenade, des courses, des constructions, à des jeux de règles comme des jeux de balles, cache-cache, ou d’adresse comme la chasse aux oiseaux avec des lance-pierres, ou de force comme la lutte. Tous ces types de jeux apportent à l’enfant la capacité de mieux s’intégrer au sein de la société. Les jeux d’équipe, par exemple, lui apprennent à se comporter convenablement avec les autres enfants et au final avec les autres habitants en général. L’enfant apprend comment se comporter face à autrui. Comme l’écrit le professeur Abdou Moumouni, « l’enfant y apprend à vivre avec ses semblables, à tenir un rôle déterminé, à apprécier et estimer ses camarades, à juger dans la pratique ses capacités et celles des autres, à travailler en équipe, etc. »12 E Enfants maliens jouant au football13 12 Tiré du livre : L’éducation en Afrique, de Abdou Moumouni, p.23 13 Photo prise sur le site : http://www.flickr.com/photos/vinhlecao/2435576477/in/set- 72157604702825368/ 12
La photo de la page précédente, bien qu’elle ne date pas de la période précoloniale représente des enfants jouant au football. Cela montre l’importance qu’avaient les jeux, importance qui est toujours d’actualité aujourd’hui. Je pense inutile de préciser que le football n’existait sûrement pas à cette époque, cependant des jeux de balle lui ressemblant beaucoup étaient alors pratiqué par les enfants. Ils confectionnaient leur balle grâce à des brindilles ou d’autres matériaux naturels ! En général, les enfants et adolescents maliens se livrent aux jeux uniquement par classes d’âge. En effet, il est très rare qu’un mélange entre les classes se produise bien qu’il ne soit pas impossible. C’est le cas lorsque des enfants d’une classe d’âge supérieure doivent expliquer les règles ou aider à l’apprentissage d’un jeu car l’adulte responsable ne peut pas le faire. Les enfants plus âgés deviennent alors une sorte de modèle pour les plus jeunes. Mais en règle générale, les enfants sont suivis et guidés dans leurs jeux par des adultes désignés par la communauté. Leur rôle et d’apprendre de nouveaux jeux aux enfants, leur expliquant les règles et veillant à ce qu’elles soient respectées. En ce qui concerne la formation intellectuelle par les jeux, les enfants y sont confrontés depuis tout petit par l’écoute de contes, légendes, récits. Lorsqu’ils entrent dans la troisième enfance, c’est-à-dire vers dix ans, ils sont autorisé à assister aux palabres (« en Afrique : débat coutumier entre les hommes d’une communauté villageoise »)14, comme il a déjà été dit plus haut. . Des exercices de réflexion ou de logique comme des devinettes, des proverbes, des colles et même parfois des exercices considérés aujourd’hui comme de mathématiques avec des petits problèmes d’analyse, de géométrie et de propriétés des nombres viennent compléter l’éducation intellectuelle des enfants. Tout en restant dans le domaine du divertissement, les enfants ne participeront pas à un jeux qui ne les intéresse pas ou qui se révèle trop compliqué. Le but des jeux est justement de donner du plaisir à l’enfant tout en lui apprenant diverses notions intellectuelles ou pratiques afin de faciliter son intégration à la communauté. 2.4. L’initiation L’initiation est l’acte qui marque la fin de l’adolescence et symbolise le passage à la vie d’adulte. C’est une étape de vie très importante dans l’éducation traditionnelle africaine. 14 Tiré du dictionnaire Larousse 2004 13
Le garçon ou la fille ayant passé par cette étape est ensuite considéré comme membre de la collectivité à part entière, donc comme un adulte. Elle se déroule différemment en fonction de la religion ou de l’appartenance tribale. Toutefois, de nombreux points sont semblables. Elle débute le plus souvent par la décision de la date de son exécution qui est prise par les anciens et chefs du village ou de la communauté. Ensuite, vient le choix de l’endroit où les futurs adultes vont passer leur période d’initiation. Les filles et les garçons de la même communauté ne la passent pas toujours ensemble, dans certaines régions ou chez certains peuples, comme les Malinkés15, les filles et les garçons sont séparés tout au long de leur initiation. Le début de cette période commence, en général par la circoncision pour les garçons et l’excision pour les filles. Il est bon de préciser que ces deux pratiques ne sont pas exclusives aux peuples musulmans et que de nombreuses communautés africaines polythéistes s’y livraient aussi. La suite se déroule dans un maison où les futurs adultes vivent reclus. Tout en se rétablissant, ils assimilent le règles élémentaires de la communauté. Ils y acquièrent également des connaissances particulières telles que l’histoire de leur peuple et l’utilisation de plantes médicinales. Ce sont les « anciens » du village ou des adultes désignés pour ce rôle (la plupart du temps, cette tâche est confiée aux adultes du villages qui sont reconnus pour être « sages » et bien pensant) qui guident les futurs adultes tout au long de leur initiation et qui leur enseignent ce qu’ils doivent savoir. Chez certains peuples, comme les Malinkés par exemple, ce sont généralement les femmes qui s’occupent des jeunes filles et les hommes qui prennent en charge les jeunes garçons. Cette image, montre de jeunes Maliens de dix à douze ans, les jours suivants leur circoncision, en train de demander l’aumône dans leur village. Cette pratique est surtout propre à la religion islamique. Enfants maliens durant leur initiation16 15 Informations sur le peuple Malinké trouvé dans le livre Groupe d’âge et éducation chez les Malinkés du sud du Mali, de Tamba Doumbia. 16 Photo prise sur le site : http://www.flickr.com/photos/travelspics/3089980744/ 14
Certaines initiations comportaient et comportent parfois toujours une suite d’épreuves physiques afin que le jeune homme surtout, mais aussi la jeune femme, soient en bonne condition physique et puissent exécuter diverses tâches avec facilité. L’initiation se termine par de grandes cérémonies auxquelles toute la collectivité prend part. Chants et danses célèbrent l’entrée des jeunes gens dans la vie d’adultes. Ainsi se termine le développement de l’enfant dans l’éducation traditionnelle africaine. Il en sort instruit, permettant ainsi de vivre normalement au sein de la société et participer aux activités économiques et politiques de sa communauté. 15
Chapitre 3. L’islamisation du Mali et ses conséquences 3.1 L’arrivée de l’islam au Mali Le Mali, pays d’Afrique occidentale, a été islamisé aux alentours du VIIIème siècle. L’islam a commencé à s’y propager sous le règne de l’empire du Ghana. Des marchands maghrébins musulmans entrèrent en contact avec cet empire et c’est ainsi que l’islamisation a commencé. Depuis cette période, les différents empires et royaumes du Soudan occidental ont toujours côtoyé la culture islamique. Son influence était plus ou moins forte selon les périodes, cela dépendait beaucoup des empereurs et de rois qui y régnaient. 3.2 L’école islamique précoloniale Au tout début de l’islam au Mali, il n’existait pas de véritable école. C’était, le plus souvent, des savants musulmans venant d’autres pays comme l’Égypte ou le Maroc, qui convertirent les rois et les empereurs en leur apprenant à réciter les sourates (chapitres du Coran)17. Cette méthode d’apprentissage était une simple technique de mémorisation et très vite, les élèves (les rois, comme les simples étudiants qui étaient à cette époque les nouveaux convertis musulmans du pays) s’en lassèrent, voulant non pas seulement savoir réciter le Coran mais aussi le comprendre, l’étudier, en parler. Les rois firent alors ouvrir des écoles coraniques dans les quartiers les plus islamisés des grandes villes telles que Gao, Djenné, Walata et Tombouctou. Les premiers professeurs de ces écoles furent Arabo-Berbères. Du VIIIème siècle au XVIIème siècle après J.-C., ils parcoururent les différents empires et royaumes du Mali. Puis, petit à petit, le système éducatif se perfectionna. Les enseignants devinrent principalement des marabouts (guides spirituels de la communauté musulmane qui sont aussi maîtres des écoles coraniques)18 et les mosquées commencèrent à servir de centres universitaires. L’enfant commençait son éducation religieuse à partir de six ou sept ans. Il entrait alors dans le cycle d’étude élémentaire, qui serait pour nous le cycle primaire, où il était confié à un marabout. 17 Définition prise dans le Petit Larousse illustré 2009. 18 Définition trouvée dans le Petit Larousse illustré 2009 16
Le début de son apprentissage consistait surtout à la lecture du Coran, ainsi qu’à la mémorisation de certains versets ou prières et à l’introduction aux pratiques musulmanes. Par la suite, selon la méthode d’enseignement utilisée, l’enfant apprenait partiellement ou presque totalement la langue arabe. Il pouvait aussi étudier en parallèle certaines notions d’histoire, de géographie, des sciences naturelles et parfois même de la philosophie et des mathématiques. Mais ces disciplines étaient surtout propre à l’enseignement supérieur. Les élèves allaient à l’école le matin et le soir, ce qui leur permettait de vaquer à de nombreuses autres activités, dont des tâches ménagères et agricoles de leur marabout. Cet enseignement pouvait, selon la méthode utilisée, durer de trois à cinq ou six ans. Il se terminait par la lecture complète du Coran. Lorsque l’élève avait terminé de lire le livre saint, il était autorisé à porter le turban et à se présenter aux imams des grandes mosquées (par exemple, à Tombouctou ils allaient aux mosquées de Sankoré et Sidi Yaya) afin de recevoir la baraka (bénédiction). Au terme de son cycle d’études élémentaires, l’ancien élève pouvait ouvrir une école, enseigner à son tour ou alors continuer des études supérieures. Il est alors âgé d’en tout cas quatorze ans mais cet âge varie selon la durée des études. 19 Ecole coranique de Tombouctou 19 Photo prise sur le site : http://www.world-travel-photos.com/photos2/mali/7301.jpg 17
La plupart des écoles coraniques étaient privées. Toutefois, Sékou Amadou, roi et fondateur du royaume peul de Macina durant le XIXème siècle, qui voulait islamiser tout son royaume, utilisait les fonds de l’Etat pour permettre aux parents démunis d’envoyer leur enfant à l’école. Il créa, avec le Grand Conseil des quarante marabouts (composé de marabouts, âgés d’une quarantaine d’années et réputés pour leur science et leur conduite), des écoles d’Etat dans chaque chef-lieu de province et de canton. Les élèves y étudiaient gratuitement. Les maîtres recevaient leur salaire des fonds publics. Il a même été dit que ce roi et son Grand Conseil créèrent des écoles pour filles ! Les maîtres qui y enseignaient étaient des femmes d’une grande culture !20 Comme nous pouvons le constater, les écoles musulmanes du Mali de l’époque précoloniale étaient déjà très répandues et très performantes. Des élèves et des maîtres de toute l’Afrique islamique y venaient pour enseigner ou étudier. 3.3. Rencontre entre éducation islamique et éducation coloniale Dès le début de l’extension coloniale, les peuples musulmans et l’islam posèrent de gros problèmes aux Français. En premier lieu car ces peuples islamiques, sous la domination d’un grand chef comme El Hadj Omar Tall ou Samory Touré, se rebellaient et n’acceptaient pas l’avancée française sur leur territoire. En effet, comme il a déjà été dit plus haut, les peuples musulmans avaient déjà une structure et des établissements d’enseignement de l’arabe et de l’islam. Ils s’opposèrent donc au régime et l’établissement de système éducatif colonial. Les Français procédèrent de différentes manières pour arriver à leurs fins, c’est-à-dire s’établir complètement sur le territoire Malien. Au départ, ils n’intervenaient pas dans l’enseignement islamique et le système colonial n’était pas favorable à l’islam. En 1906, lors de la création du « Service des Affaires Musulmanes », les Français tentèrent d’incorporer l’enseignement arabe traditionnel à l’enseignement français. En premier lieu, en contrôlant sérieusement l’enseignement dans les écoles coraniques. Des inspecteurs, généralement français et connaissant les notions de base de l’Islam, étaient mandatés afin d’effectuer des contrôles. Ce fut un échec, dû au manque de personnel compétent pour procéder à cette inspection. 20 Vu que cela peut paraître étonnant, je vous indique la référence : L’enseignement islamique en Afrique Noire, de Seydou Cissé, p.22 18
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