Note sur les Cadres Budge taires a Moyen Terme au Mali et au Burkina
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Note sur les Cadres Budgetaires a Moyen Terme au Mali et au Burkina Faso1 Marc Raffinot 1 Cette note fait suite à une mission effectuée au Mali et au Burkina Faso du 4 au 17 septembre 2011, dans le cadre d’une étude coordonnée par Perran Penrose pour la Commission de l’Union Européenne. Je tiens à remercier Perran Penrose pour ses conseils et commentaires sur des versions préalables de cette étude. Je reste seul responsable des erreurs qui pourraient subsister. Ce document ne doit pas être attribuée à la Commission de l’Union Européenne, qui n’est nullement engagée par les vues qui sont exprimées dans ce document. 1
Summary The study shows that MTFFs in Mali and Burkina Faso are inconsistent with the global and sectoral strategies. This is mainly for political economy reasons: Presidents want to post programs that may enhance their image (poverty reduction is hardly popular), and donors want strategies that fit to their preferences (and to their fads). Hence, strategies are seen mainly as a means to attract donors’ money. At the opposite MTFFs are built on the basis of fiscal projections made jointly with IMF, on less optimistic assumptions. Sectoral MTEFs are inconsistent with the MTFF, except for budget preparation (n+1). This inconsistency is acknowledged by the public administration, and IMF too (note that IMF refuses to be involved in MTEFs). Nevertheless, the budget preparation is made out of relatively prudent resources projections, consistent budget appropriations, and results in reasonably good macro management of the Government Financial Operations in comparison to the regional standards (according to the PEFA assessments). MTFFs have been introduced in Mali and Burkina Faso under pressure of the donors at the end of the nineties, in parallel with the launching of Program Budgeting. The two activities are still not merged. The objective was to introduce Program Budgeting very fast (2012 in Burkina Faso, 2013 in Mali), but these dates have been postponed. MTFFs are three year rolling programs, which is rather short term. They should better be labeled Short Term Fiscal Frameworks (STFFs). This short term approach can be justified by high instability (not on taxes and revenue, more on foreign grants and loans, and on expenditure). Moreover, as debt is concessional and very long term, MTFFs and debt projections are run separately, because different assumptions about borrowing do not change the debt service in what is called “Medium” term. It is quite pointless to expect a better fiscal discipline as a result of MTFF implementation. MTFFs are useful in the short run, in order for the Budget Directorates to cope with pressing demands to increase expenditure. The PEFA assessments are rather good for both countries. There is only one indicator directly linked with the multiyear budget programming (PI-12). Mali’s assessment is B (2008), Burkina Faso’s B (2007) and B+ (2010). This sounds a bit strange, as the assessment show, for instance, significant differences between budget appropriations and real disbursements. The reason for this discrepancy is that the PI-12 indicator is a mere assessment of the existence of a MTFF, not of the quality of the MTFF/MTEF process. The problem behind these dysfunctions is that there is actually little at stake in Low Income Countries like Mali and Burkina Faso. Fiscal space is quite small, as a big share of the budget is wage and salaries and a significant part of the capital expenditure is foreign financed. Moreover, numerous constraints are faced when preparing the budget and the MTFFs: IMF conditionality, political commitments, convergence targets set by the regional organizations, sectoral shares of the budget that are set as triggers for budget support, and international commitments. Foreign financing is limited to a few significant public donors, with little flexibility and many constraints. Domestic financing has changed because of the creation of a 2
regional financial market. Nevertheless, the amounts to be borrowed on this market are still small, and costly. As a result, the room of manoeuver for debt management is very small. Technically, the debt sustainability analyses are independent from the MTFFs, as the debt service would not change very much as a result of increasing borrowing during the three-year period of the MTFF. For these reasons, many of our interlocutors wonder if there is some added value in making projections for years n+2 and n+3. In any case, budget management focuses usually on very short term management (actually cash management). In contrast, some plead for an extension of the time frame. Extending the MTFFs to 5-7 years would allow to consider various scenarios, and to take longs term constraints into consideration, like demographics, debt, building up of infrastructure networks, and the link between public expenditure and growth. This would allow a real policy dialogue focusing on crucial issues. Finally, a MTFF is not an end in itself. In order to improve the fiscal discipline in such moving contexts, a MTFF should prepare policies to prevent shocks, or to be implemented in case of shock. In Burkina Faso and Mali, MTFFs make an attempt to identify risks, but do not consider policies to mitigate them. 3
Liste des sigles et abréviations AID Association Internationale pour le développement (Banque Mondiale) CBMT Cadre budgétaire à moyen terme CID Circuit Informatisé de la Dépense (Burkina Faso) CIFE Circuit intégré des Financements extérieur (Burkina Faso) CEDEAO Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest CPIA Country Policy and Institutional Assessment (Evaluation des politiques et des institutions du pays) CSLP Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté CDMT Cadre de dépenses à moyen terme CVD Cadre de viabilité de la dette (DSF, FMI AID) DNPD Direction Nationale de la Planification du Développement (Mali) DNSI Direction Nationale de Statistiques et d’Informatique (Mali) IADM Initiative d’Allégement de la Dette Multilatérale IAP Instrument Automatisé de Prévision (Burkina Faso) IBW Institutions de Bretton Woods FBCF Formation Brute de Capital Fixe FEC Facilité Elargie de Crédit (FMI) FMI Fonds Monétaire International FRPC Facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance (FMI) MEF Ministère de l’économie et des finances OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement PAGAM Plan d’action gouvernemental pour l’Amélioration et la Modernisation de la Gestion des Finances Publiques (PAGAM/GFP) (Mali) PAGEDD Programme d'actions du gouvernement pour l'émergence et le développement durable (Burkina Faso) PEFA Public Expenditure and Financial Accountability, Dépenses publiques et responsabilité financière. PIB Produit intérieur brut PPTE Pays pauvre très endetté PRECAGED Programme de Renforcement des Capacités Nationales pour une Gestion Stratégique du Développement (Mali) PTF Partenaires Techniques et Financiers SCADD Stratégie de croissance accélérée et de développement durable SP-PPF Secrétariat Permanent pour le Suivi des Politiques et Programmes Financiers (Burkina Faso) TOFE Tableau des Opérations Financières de l’Etat UE Union Européenne UEMOA Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine 4
1 INTRODUCTION La présente note est un élément d’une étude plus vaste, portant sur les cadres budgétaires à moyen terme (CBMT, MTFF d’après le sigle anglais). L’étude commandée par la Commission Européenne porte sur les CBMT en tant que pièce centrale dans le processus d’ensemble décrit dans la Figure 1. L’étude ne porte donc pas sur l’ensemble de la gestion des finances publiques. Les termes CBMT, CDMT (Cadres de dépenses à Moyen Terme) sont employés dans des sens différents. On peut distinguer le CBMT au sens étroit, qui est une projection des recettes et des dépenses de l’Etat (une projection du tableau des opérations financières de l’Etat ou TOFE), le CBMT au sens large (comprenant aussi une décomposition des dépenses entre les ministères sectoriels ou les programmes) aussi baptisé CDMT global, et les CDMT sectoriels qui comprennent une description détaillée des dépenses de chaque secteur. Nous réserverons ici le terme CDMT pour désigner les projections relatives à un secteur. L’étude porte sur plusieurs pays, tant francophones (Burkina Faso et Mali) qu’anglophones, dans une optique comparative. Le présent rapport porte sur les deux pays francophones, car la comparaison entre les deux est instructive. Figure 1: Processus de programmation et d'exécution budgétaire Source: P. Penrose, MTFF Study, Inception report, 2011. Cette note présente les principaux enseignements de la mission au Mali et au Burkina Faso (4 au 17 septembre 2011) concernant la programmation budgétaire à moyen terme. La note suit le lien théorique qui devrait partir des stratégies (globales et sectorielles) pour en chiffrer les 5
coûts, les traduire en cadres budgétaires à moyen terme (CBMT) et en budgets annuels, pour enfin être répartis entre les différents ministères (ou programmes) sous forme de cadres de dépenses à moyen terme (CDMT). 2 CONTEXTE Le Mali et le Burkina Faso présentent des caractéristiques communes : Ce sont des pays sahéliens enclavés Ils sont parmi les pays les plus pauvres du monde, qui bénéficient du financement concessionnel du FMI et de l’AID. Les deux pays ont bénéficié de réductions de dette (en fait d’une quasi-annulation) au titre de réductions de dette bilatérales, de l’initiative pays pauvres très endettés (PPTE) et de l’initiative d’allègement de la dette multilatérale (IADM). Le Burkina Faso est entré dans l’initiative PPTE en juillet 2000, le Mali en septembre 2000. Le point d’achèvement a été atteint par le Burkina Faso en avril 2002, et par le Mali en mars 2003. Le Burkina Faso a bénéficié au total de 2,1 milliards de dollars de réductions de dette, le Mali de 2,9. Les deux pays affichent des performances assez satisfaisantes aux évaluations PEFA, du moins en comparaison avec les pays de la sous-région (voir Annexe 3). Ils bénéficient de Contrats OMD de l’UE, après avoir bénéficié de son aide budgétaire, mais de manière très inégale (350 millions d’euros pour le Burkina et 148 pour le Mali) – alors que la population est pratiquement identique (16,5 millions pour le Burkina Faso et 15,4 pour le Mali), ainsi que le PIB (8,8 milliards de dollars en 2010 pour le Burkina Faso, 9,3 pour le Mali). Ils font partie de la zone franc, ce qui leur permet de maintenir une inflation généralement modérée. Ils font partie de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). De plus en plus, ces organisations – surtout l’UEMOA - ont pris des initiatives en matière de gestion des finances publiques. Dans les deux pays, les ministères des Finances et du Plan sont actuellement réunis (après de nombreuses péripéties de séparation et de réunification). Toutefois, le dualisme budgétaire persiste, les dépenses publiques courantes et les dépenses en capital largement financées par les partenaires techniques et financiers (PTF) étant traitées par des procédures et des entités différentes. La principale différence est que le Mali a réussi deux élections présidentielles concurrentielles, et que le président Alpha Konaré a laissé le pouvoir au bout de ses deux mandats (le président Amadou Toumani Touré s’apprêtant à faire de même en 2012 à l’issue de ses deux mandats). Au Burkina en revanche, le même président est au pouvoir depuis 24 ans – ce qui rend encore plus curieuse la différence de montant entre l’aide budgétaire accordée aux deux pays. 6
Les niveaux de recettes fiscales sont analogues, comme le montre le Tableau 1, ainsi que les niveaux de dépenses2. Pourtant, le déficit base engagement (dons compris) est pratiquement le double au Burkina Faso, et le solde de base y est négatif, alors qu’il est positif au Mali. De plus, en 2010, le financement extérieur ne représente que 30 % des recettes fiscales au Mali, contre 62 % au Burkina Faso. Dans les deux pays, les recettes fiscales suffisent pour couvrir les dépenses courantes, mais les taux de couverture (le ratio dépenses courantes sur recettes fiscales) est proche de 90 %, ce qui laisse peu de marge de manœuvre pour financer les investissements. Les recettes fiscales sont insuffisantes, dans les deux pays, pour financer les dépenses courantes et les dépenses en capital financées sur le budget national (ces dépenses dépassent de 14 % les recettes fiscales au Mali et de 52 % au Burkina Faso), ces dépenses étant donc partiellement financées par l’aide budgétaire (au moins de manière implicite). C’est surtout au niveau des dépenses en capital que se manifeste la dépendance à l’aide : 51 % des dépenses en capital sont financées par l’aide au Mali, contre 38 % au Burkina Faso. Tableau 1 : TOFE 2010, Mali et Burkina Faso, principaux postes (milliards de Fcfa) Mali Burkina Faso Recettes et dons 940 880 Recette fiscales 682 566 Dons 134 199 Dont dons programme 77 148 Dépenses et prêts nets 1061 1124 dt dépenses courantes 601 531 dt dépenses courantes primaires 582 510 dt dépenses en capital 367 531 dt dépenses en capital sur le budget national 179 327 Déficit base engagements -121 -244 Solde de base* 26 -177 Financement intérieur 131 44 Financement extérieur 72 151 Var arriérés et ajustement -82 49 Ratios Dons + financement ext/recettes fiscales 30% 62% Dépenses en capital sur fin ext/ dépenses en capital 51% 38% Pression fiscale 14,7% 13% Source : FMI. * le solde de base est calculé ici comme la somme des recettes budgétaires moins les dépenses courantes, moins les dépenses en capital sur le budget national. Cette façon de calculer pose un problème pour des pays qui reçoivent de l’aide budgétaire, puisqu’une partie des dépenses inscrites au budget national sont en fait financées par l’extérieur. 2 Dans les deux pays, les TOFE sont présentés de manière classique. Ils devraient être présentés selon l’approche des droits constatés à partir de 2012 ou 2013, selon l’UEMOA. Ceci améliorerait certainement l’analyse de l’accumulation des actifs financiers et non financiers. 7
2.1 Stratégies Théoriquement, le processus d’élaboration des CBMT commence par l’élaboration de stratégies, qui sont ensuite traduites en termes de programmation budgétaire à moyen terme. Depuis 1999, les institutions de Bretton Woods (IBW) ont demandé aux pays bénéficiaires des réductions de dette au titre de l’initiative PPTE, et, ultérieurement de leurs financements de présenter leurs stratégies sous forme d’une Stratégie de Réduction de la Pauvreté. 2.2 Stratégie globale La stratégie de référence est donc en théorie une stratégie de lutte contre la pauvreté (Cadres Stratégiques de lutte contre la pauvreté ou CSLP). Au Mali, deux CSLP ont été mis en œuvre : 2002-2006 et 2007-2011. Au Burkina Faso, deux CSLP également ont été mis en œuvre : 2001-2003 et 2004-2006 (adopté en janvier 2004, il chiffre le coût additionnel des programmes3 pour la période 2004-2006). Le Tableau 2 présente leurs principales hypothèses sur les plans économiques et financiers. Tableau 2 : Principales caractéristiques des Cadres Stratégiques de lutte contre la pauvreté Burkina Burkina Faso Mali Mali Faso CSLP 2004- CSLP CSLP CSLP 2006 2002- 2007- 2001-2003 2006 2011 (1) Taux de croissance annuel moyen du PIB en volume 7,7 % 6,5 % 6,7 % 7% Taux d’inflation annuel moyen/ déflateur PIB 0,9-1,5% (2) 1,8 % 0,1 % Taux de croissance annuel moyen du PIB en valeur 10 % 8.6 % 7,1 % Taux de croissance annuel moyen des recettes fiscales 12 % 15 % 12,3 % 10,3 % Taux de croissance annuel moyen des dépenses totales 9,4 % 9.6 % 9% 7,1 % et prêts nets (1) La présentation du TOFE dans ce document n’est pas standard et difficile à interpréter. Les recettes fiscales comprennent les exonérations au titre des projets d’investissement public, et le CSLP chiffre les dépenses additionnelles liées au CSLP. (2) Le document comprend deux estimations différentes de l’inflation projetée Les CSLP de première génération avaient été rédigés rapidement pour pouvoir bénéficier des réductions de dette. 3 Notons en passant que chiffrer le coût des programmes liés au CSLP est une demande des PTF discutable. Ce qui importe est la vision d’ensemble obtenue en considérant l’ensemble des dépenses publiques. 8
Les CSLP de seconde génération ont internalisé les objectifs du millénaire pour le développement (OMD), qui n’étaient pas encore élaborés lors de l’élaboration des CSLP de première génération. C’est une des raisons pour lesquelles on a pu noter une certaine « standardisation » des CSLP. Les OMD ont contribué à mettre très fortement l’accent sur les secteurs sociaux comme principaux instruments pour la réduction de la pauvreté. La volonté affichée d’atteindre les OMD pousse les gouvernements à retenir des scénarios dits « volontaristes » qui essaient de présenter un cadre macroéconomique favorable à l’atteinte de ces objectifs. Ces documents sont surtout un ensemble de déclarations d’intention. Des programmes plus opérationnels en ont été tirés à la demande des PTF. Par exemple, au Burkina Faso, le CSLP a été traduit sous forme d’un Programme d’Actions Plus récemment, les PTF ont souhaité que l’accent soit mis sur la croissance et, de ce fait sur les secteurs productifs (développement rural et infrastructures). Les deux pays se sont attelés à la rédaction d’un document de Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable (SCADD). Cette stratégie a été élaborée et rendue publique au Burkina Faso, elle est en cours d’achèvement au Mali (validation prévue fin décembre 2011). Dans les deux pays, les SCADD sont « volontaristes », elles mettent d’accent sur l’accélération de la croissance. Elles marquent ainsi une inflexion par rapport aux stratégies antérieures (retracées par les CSLP), qui étaient centrées sur l’accroissement des dépenses sociales comme moyen essentiel de lutte contre la pauvreté. Les deux stratégies affichent des taux de croissance élevés (7 % au Mali), ou très élevés (10 % au Burkina Faso), et sont plus ou moins en ligne avec les OMD. L’IDA et le FMI ont validé ces stratégies, même s’ils émettent des réserves. Les SCADD sont d’ailleurs contraintes par les priorités affichées par les PTF et leurs engagements de financement (à titre d’exemple, la SCADD du Burkina Faso est presque financée pour moitié sur financement extérieur). Les SCADD sont généralement considérées par les cadres locaux comme des documents de discussion avec les PTF, élaborées suivant une logique technocratique et destinées à faire apparaître des gaps de financement. Elles sont généralement présentées comme des documents de plaidoyer, destinés à être présentés aux bailleurs de fonds pour rechercher de nouveaux financements. Les cadrages macroéconomiques et budgétaires dans ces documents sont très limités. Les Présidents ont cependant souhaité présenter des programme plus mobilisateurs, qui ont été considérés comme des engagements politiques lors de leur réélection : Programme de développement économique et social (PDES 2007-2012) au Mali, Progrès continu pour une société d’espérance (2005), et Bâtir, ensemble, un Burkina émergent (2010-2015), puis Programme d'actions du gouvernement pour l'émergence et le développement durable (PAGEDD, 2011-2015) au Burkina Faso. Ces programmes présidentiels visent l’émergence, la croissance, plutôt que la réduction de la pauvreté. Au Burkina Faso, le Programme Présidentiel a été opérationnalisé dans un PAGEDD, qui est censé faire une sorte de synthèse entre la SCADD et le programme présidentiel. Le PAGEDD est beaucoup plus détaillé que la SCADD et a mobilisé beaucoup plus les services que la SCADD. Ce PAGEDD n’a pas été officiellement transmis aux PTF et les autorités burkinabè 9
n’ont pas souhaité en faire le cadre de référence pour la fixation des indicateurs et déclencheurs de l’aide budgétaire. Il existe de plus dans les deux pays des analyses à plus long terme (« visions 2025 » et stratégies d’aménagement du territoire). Formellement, les « visions 2025 » sont prises en compte, mais elles sont trop peu opérationnelles pour pouvoir être vraiment utile. Les stratégies d’aménagement sont peu mobilisées, ce qui est dommage car elles présentent souvent des analyses intéressantes, notamment en termes de localisation de la population et de constitution des réseaux d’infrastructures. Ces stratégies devraient être la base des CBMT et de l’élaboration des budgets annuels. Cependant, leur élaboration n’est pas toujours en ligne avec le calendrier d’élaboration des CBMT, ni avec le calendrier budgétaire. Au Burkina Faso depuis 2008, il n’y a plus de CSLP explicite. Il a été admis que les priorités du dernier CLSP sont reconduites. Même dans le cas où une stratégie a été élaborée, elle n’a pas toujours été disponible en temps utile pour l’élaboration du budget. C’est ce qui se passe actuellement au Mali, où le budget a été préparé avant que la SCADD ne soit disponible, et au Burkina Faso, où ni la SCADD ni le PAGEDD n’étaient disponibles au moment de la préparation du budget 2012. Pourtant, la SCADD devrait marquer une inflexion assez sensible par rapport aux priorités antérieures. Jusqu’ici, les secteurs sociaux ont été mis en avant, mais la SCADD devrait mettre l’accent sur les secteurs porteurs de croissance, et notamment sur l’agriculture (jusqu’ici, au Burkina Faso, l’agriculture est presqu’entièrement financée par l’extérieur). 2.3 Stratégies sectorielles Certains secteurs disposent depuis longtemps de stratégies. C’est notamment le cas des secteurs sociaux, qui fonctionnent depuis la fin des années 90 sur la base de stratégies décennales. Pour les autres secteurs, la situation varie, et dans certains cas aucune stratégie n’est disponible (Justice, par exemple, au Burkina Faso). La qualité de ces stratégies varie également. A part certaines brillantes exceptions, la capacité des secteurs à élaborer leurs stratégies est généralement considérée comme assez faible. Un des raisons de cette faiblesse est que les fonctions de gestion stratégique, de programmation et de budgétisation sont partagées au sein des ministères sectoriels entre deux entités : les directions de l’administration et des finances (DAF)(qui préparent en général le budget du département) et les entités qui étaient chargées de la planification (en relation avec le ministère du plan quand ceux-ci jouaient encore un rôle important) : Cellules de Planification et des Statistiques (CPS), au Mali et Directions des Etudes et de la Programmation (DEP) au Burkina Faso. Dans certains ministères sectoriels, il existe une bonne coordination entre les deux entités, mais ce n’est pas toujours le cas. Cela peut conduire à des divergences entre la préparation du budget et la préparation des stratégies, ainsi qu’avec la programmation à moyen terme. Plus profondément, il est difficile de concevoir des stratégies du fait des multiples projets qui sont en activités dans la plupart des secteurs. Il existe par exemple au Mali plus de 300 projets dans le secteur de l’agriculture (et rien dans les sous-secteurs de l’élevage et de l’agro- alimentaire), qui ne sont pas tous suivis régulièrement par le Ministère. De plus, du fait de 10
leur importance stratégique, le secteur cotonnier est directement suivi par la Primature et le Ministère des Finances, alors que l’Office du Niger (riz irrigué) est directement suivi par la Primature. Enfin, le rôle clé du Ministère des Finances (notamment dans le dispositif de l’aide budgétaire) le conduit parfois à s’immiscer dans l’élaboration des politiques sectorielles, sans toujours bien maîtriser les paramètres techniques du secteur. C’est en particulier le cas pour les indicateurs sectoriels qui sont retenus pour la matrice de suivi de l’aide budgétaire. Mais, plus profondément, certains de nos interlocuteurs dénoncent le fait que les ministères des Finances, sous couvert d’arbitrages techniques, réalisent en fait les véritables choix stratégiques à la place du gouvernement, dans une logique de réduction des dépenses. Ceci d’autant plus que le CBMT reste fondamentalement un processus top-down, la composante bottom-up étant très limitée dans la pratique à la fois par manque de compétence et par peur de s’exprimer. Les stratégies sectorielles ne sont pas forcément en ligne avec le CBMT, notamment parce qu’elles sont aussi considérées comme des instruments de plaidoyer. Elles aussi visent à rechercher des financements auprès des PTF, du moins de ceux qui ont un intérêt particulier pour le secteur considéré. 2.4 Les stratégies et les CBMT Il résulte de ce qui vient d’être dit que les stratégies qui sont censées servir de référence pour le cadrage budgétaire sont en réalité en décalage important avec des prévisions budgétaires prudentes (telles qu’elles sont établies avec le FMI), et peuvent difficilement être utilisées pour la programmation budgétaire. Cette incohérence est due à des considérations d’économie politique (présenter des programmes mobilisateurs lors des élections) et à la forte dépendance à l’aide. Elle est reconnue par les cadres nationaux, et par le FMI, qui gèrent donc un système qui fonctionne sur plusieurs plans à la fois. Les stratégies de référence ont été établies à la demande des PTF, qui ont aussi insisté pour des durées assez réduites : trois ans au début, avec un passage progressif à cinq ans. De plus, bizarrement, les PTF ont insisté pour que les stratégies de références ne soient pas glissantes, créant ainsi un décalage avec le processus budgétaire, croissant au fur et à mesure que la stratégie est mise en œuvre. Cela pose un problème dans des pays où les évolutions sont lentes du fait de nombreuses rigidités, et où de multiples chocs sont susceptibles de frapper l’économie. Pour une stratégie, une période de trois ans est vraiment très courte. La plupart des projets qui sont mis en œuvre pendant une telle période sont des projets déjà engagés. Les marges de manœuvre sont très faibles, surtout si l’on devait prendre au sérieux la constitution de réserves non préaffectées) pour faire face à des chocs contingents. Au Mali, le TOFE prévisionnel comprend des montants non affectés à un ministère particulier, mais il n’est pas clair dans quelle mesure cela pourrait servir à faire face à des imprévus. Au Burkina Faso, des montants non ventilés 11
sont prévus pour faire face i) à des actions conjoncturelles ii) au surcoût des investissements. Des réserves de précaution sont prévues, mais elles n’apparaissent pas en tant que telles, elles sont ventilées par la DGB dans diverses lignes de manière à limiter les pressions politiques. 3 CADRE BUDGETAIRE A MOYEN TERME L’élaboration des CBMT doit tenir compte de multiples contraintes, en particulier les contraintes imposées par le FMI et les PTF, notamment dans le cadre de l’aide budgétaire. D’autres contraintes résultent des programmes de convergence au sein des ensembles sous- régionaux, notamment au sein de l’UEMOA, qui produit de nombreuses normes. Ces contraintes apparaissent tant au niveau des ressources que des dépenses. C’est la négociation avec le FMI dans le cadre des revues des programmes qui fixe vraiment les contraintes budgétaires. La programmation des dépenses doit tenir compte des règles destinées à encadrer les déficits, mais aussi de normes et de priorités. D’autres normes indirectes découlent du fait que les possibilités de financement extérieur sont maintenant encadrées par le cadre de viabilité de la dette (CVD, DSF d’après le sigle anglais). D’après ce cadre, les possibilités d’emprunt sont liées au Country Policy and Institutional Assessment (CPIA), qui est lui-même fonction de certains aspects de la gestion budgétaire. La mise en place de structures administratives spécifiques chargées de gérer cet ensemble de contraintes témoigne de la difficulté de l’exercice. Au Burkina Faso, le Secrétariat Permanent pour le Suivi des Politiques et Programmes Financiers (SP-PPF) joue ce rôle d’interface entre l’administration et les PTF, .héritant de fonctions qui avaient été créées dans le cadre de l’ajustement structurel pour gérer l’interface avec les institutions de Bretton Woods (STP- PAS). Il faut noter par ailleurs que le calendrier d’élaboration des CBMT est défini en principe, mais qu’en pratique il dérive souvent, ce qui fait que l’élaboration des CBMT est réalisée très rapidement (une semaine environ), dans l’urgence, et sans prendre le temps nécessaire pour avoir un retour des ministères sectoriels. 3.1 Projection du TOFE La base du CBMT est la projection du Tableau des Opérations Financières de l’Etat (TOFE). Les TOFE actuels sont établis suivant une norme mixte entre l’ancienne norme comptable (1986) et la nouvelle norme dite en termes de droits constatés (2001). L’UEMOA cherche à organiser le passage à la nouvelle norme à partir du 1er janvier 2012. Malgré les normes générales du FMI et les directives de l’UEMOA, les TOFE utilisés en pratique ne présentent pas une information complète sur les risques encourus. En particulier, ils ne sont pas accompagnés de documents présentant la situation projetée des sociétés publiques, ou des sociétés qui peuvent accéder à des subventions publiques. C’est 12
notamment le cas des sociétés cotonnières, qui ont par le passé mis en péril l’équilibre budgétaire (et/ou le système bancaire, puisque les campagnes agricoles sont financées par prêts bancaires). L’importance de la menace potentielle n’est plus à démontrer. Dans son dernier rapport sur le Burkina, le FMI s’est intéressé plus particulièrement à la société des hydrocarbures (SONHABY). Les données elles-mêmes ne sont pas toujours conformes à l’esprit de l’élaboration du TOFE. Ceci est particulièrement clair en ce qui concerne les dépenses en capital, qui devraient en principe reprendre les dépenses publiques en termes de Formation Brute de Capital Fixe (FBCF). Au Burkina Faso, l’ensemble des décaissements sur les projets est considéré comme des dépenses en capital, alors qu’il est généralement admis qu’une partie sans doute importante de ces dépenses est en fait constituée de dépenses de fonctionnement. Au Mali, les dépenses en capital financées par l’extérieur sont constituées des dons et des prêts pour projets, mais aussi d’une partie de l’aide budgétaire. Par contre, au niveau des comptes nationaux, une partie seulement des dépenses en capital est enregistrée comme de la FBCF. Dans un autre domaine, au Mali, le FMI a demandé que les crédits de TVA (non reversés en pratique) soient exclus du montant des recettes (en conséquence la pression fiscale a baissé de 14,8 à 14,4 %), ainsi que certaines exonérations. Le FMI voulait ainsi faire pression sur le gouvernement pour que les crédits de TVA (particulièrement importants pour les sociétés minières exportatrices) soient effectivement reversés. D’autre part, les missions du FMI adaptent parfois les règles d’élaboration du TOFE pour présenter l’information de manière à inciter à la prudence. Au Mali, le FMI a demandé à ce que les recettes de la privatisation de la SOTELMA soient budgétisées sur plusieurs années, ce qui ne facilite pas la lecture et l’interprétation du TOFE malien. Il semble par ailleurs que l’ensemble des arriérés intérieurs n’aient pas toujours été comptabilisés ces dernières années. Le périmètre de l’Etat a été modifié dans le passé, et sa stabilité ne semble pas assurée. Un risque important pour le futur concerne les pensions, car les fonctions publiques sont vieillissantes. Les données à ce sujet ne sont pas clairement introduites dans les CBMT. La bonne inscription des départs à la retraite et des recrutements qui en résultent éventuellement est un problème récurrent. Au Burkina Faso, la fusion des logiciels de la Solde et de la Fonction Publique traîne depuis une vingtaine d’années. Il semble qu’elle deviendra effective à la fin de 2010. Tous les financements extérieurs ne sont pas pris en compte dans le budget, et semble-t-il, pas dans les TOFE non plus. Par exemple, au Burkina Faso, les financements du Fonds Mondial ne sont pas intégrés au budget. Ceux de la Global Alliance for Vaccine and Immunization (GAVI) ne le sont pas systématiquement. Notons enfin que les projections des TOFE ne font pratiquement pas référence à des analyses macro-économiques, telles que des politiques anticycliques. L’idée est plutôt d’essayer de faire face aux besoins les plus pressants en termes de dépenses publiques, et de trouver pour 13
cela les ressources nécessaires. La réflexion sur les économies possibles est extrêmement limitée. 3.2 Prévision des ressources 3.2.1 Prévision des ressources intérieures Deux processus parallèles aboutissent à la détermination des ressources intérieures. D’une part, on utilise des modèles et de l’autre on demande aux régies financières (Douane, Impôts, Trésor) de procéder à leurs propres prévisions. Il existe dans les deux pays un modèle macroéconomique général et un modèle plus spécialisé de prévision des recettes. au Burkina Faso, un modèle macroéconomique fondé sur un Tableau Ressources Emplois (TRE) est géré par la Direction générale de l’économie et de la planification (DGEP/DPAM). Ce modèle a été utilisé depuis 1991 pour préparer les cadrages macroéconomiques du budget (Budgets économiques, réalisés trois fois par an en février, juillet et en fin d’année). Récemment, un modèle spécialisé de prévision des recettes a été mis en place à la Direction des Etudes et de la Programmation (DEP), afin d’obtenir un plus grand détail dans les prévisions de recettes. Au Mali, le modèle macroéconomique MME est géré par la DNPD en collaboration avec la BCEAO4, au sein d’un comité technique. Le modèle est analogue au modèle standard du FMI (seul le secteur tertiaire est endogène). Un second modèle spécialisé sur les prévisions budgétaires et l’élaboration du CBMT est installé à la direction générale du budget, ce qui assure une bonne maîtrise de la DGB sur les prévisions budgétaires. Les prévisions macroéconomiques utilisées à ce niveau ne sont pas forcément celles du modèle MME, qui traduisent plus les stratégies nationales que les projections prudentes des programmes FMI. Le modèle CBMT fournit actuellement des projections pour trois années, mais il est prévu de l’étendre pour pouvoir projeter une année supplémentaire. Ces projections sont très détaillées tant en termes de ressources que de dépenses par ministères. La prévision macroéconomique des recettes publiques est effectuée en appliquant aux prévisions de PIB ou à d’autres agrégats macro-économiques des taux de pression fiscale projetés. Les postes principaux sont assez bien liés avec le PIB (au Mali, la DGB utilise aussi le PIB hors agriculture pour caler ses projections), mais la plupart des modèles courants ne permettent pas de lier vraiment les prévisions de recettes publiques à des assiettes « de substitution » véritablement pertinentes. Les vraies assiettes des recettes sont en général trop spécifiques pour être valablement projetées dans des modèles macro-économiques (par exemple, la TVA porte seulement sur certains produits, difficiles à isoler dans un modèle macroéconomique). 4 Pour le cadrage macroéconomique du second CSLP, la Fondation Carter avait mis à disposition des autorités maliennes un modèle baptisé T 21, qui présente la particularité d’essayer de tenir comptes des interrelations entre économie, environnement, démographie et capital humain. Ce modèle devrait devenir le modèle standard au sein de la CEDEAO. Une description du modèle est disponible à : http://www.millennium- institute.org/integrated_planning/tools/T21/ 14
Ces difficultés techniques ne sont toutefois pas déterminantes. L’utilisation de modèles macroéconomiques est beaucoup plus handicapée par le fait que les résultats (notamment le taux de croissance du PIB) est finalement négocié par les autorités, ce qui implique que les modèles sont finalement être utilisés pour trouver des résultats connus à l’avance – une situation très démotivante pour les techniciens en charge des projections. Aucun de ces deux pays cependant ne laisse la prévision des recettes aux seuls macro- économistes. Les prévisions issues des modèles sont comparées avec les prévisions de recettes des régies financières (Impôts, Douane et Trésor) – ce qui suppose que les projections des modèles macroéconomiques puissent être éclatées par régie financière, et pas seulement par nature de recettes comme le veut la nomenclature standard du TOFE. Les prévisions des Douanes et des Impôts sont élaborées au Burkina Faso à partir du prolongement des tendances (y compris une projection pour l’année en cours sur la base des recouvrements déjà constatés), en tenant compte des modifications du dispositif institutionnel qui sont anticipées par les régies au moment de la projection. L’élaboration de ces prévisions implique en général les unités de recouvrement et les directions régionales. Les prévisions des recettes non fiscales réalisées par la DG Trésor, sont beaucoup plus difficiles. Il faut tenir compte des tendances passées, mais aussi des changements intervenus ou qui risquent d’avoir des conséquences dans le futur. Au Burkina Faso, par exemple, les prévisions du Trésor ont tenu compte du changement de tarification (prix des visas, par exemple) et des phénomènes d’anticipation (un grand nombre de personnes sont venues refaire leur passeport en 2010 avant l’augmentation du prix, on peut sur cette base prévoir les renouvellements au bout de cinq ans.) Un problème récurrent est que les projections dépendent aussi de l’effort fait par les régies financières (Douanes, Impôts et Trésor), et donc du système d’incitation de celles-ci. Pour cette raison, la relation entre les variables macroéconomiques et les recettes budgétaires est quelque peu élastique. Par exemple, en 2011, au Burkina Faso, les recettes seront probablement supérieures aux prévision, malgré la basse conjoncture résultant des troubles. Les prévisions faites par les régies ont donc aussi un caractère d’engagement de leur part à collecter les montants indiqués. Au Mali, les régies financières ont tendance à sous-estimer les recettes futures. Au Burkina Faso, l’engagement des régies a été formalisé par de véritables contrats signés entre le ministre des finances et les régies. Le ministre s’engage à mettre certains moyens additionnels à la disposition des régies, en échange d’un engagement en termes de collecte de ressources. Ces contrats n’ont pas été faciles à mettre en place, car les régies avaient beaucoup de mal à faire un lien entre leurs moyens et les résultats en terme de collecte. Les contrats signés prévoient des incitation en partie symbolique (lettre de félicitation du ministre), mais aussi financières. Il existe par ailleurs un problème de mémoire des organisations. Au Burkina Faso, par exemple, la budgétisation des licences téléphoniques avait été oubliée en 2010, car elle ne tombe que tous les dix ans (mais pour un montant très significatif). 15
3.2.2 Négociations avec le FMI Quelque soit la qualité des projections de recettes, elles ne sont jamais opérationnelles tant que le FMI ne les a pas validées pour en faire le scénario de référence du programme. Au Mali, par exemple, il a été souligné qu’il n’est pas utile que le Parlement vote le budget avant le passage de la mission du FMI. Dans le cas contraire, une Loi de Finances rectificative est généralement nécessaire. Les prévisions de recettes et de dépenses qui résultent des négociations sont fondées sur des hypothèses macroéconomiques inférieures à celles des documents de référence. Les prévisions de recettes et de dépenses sont effectuées par le FMI à des horizons variables. Ces prévisions sont modifiées régulièrement tout au long du programme en fonction des nouvelles analyses et informations disponibles. La section suivante présente une analyse de ces projections, tant pour les ressources que pour les dépenses. Prévisions des principaux postes du TOFE au Burkina Faso L’Annexe 1 présente à titre d’illustration les prévisions budgétaires dans les documents successifs du FMI pour le Burkina Faso. Les prévisions ont été reprises des différents rapports élaborés par le FMI lors de la mise en place du programme, et au cours de son exécution. Les Graphique 1 etGraphique 2 présentent l’évolution des projections pour l’année 2009 et 2010 respectivement pour un certain nombre de postes des TOFE. Pour chaque poste, le premier point représente les prévisions faites en mai 20075, et le dernier chiffre la réalisation. Les données sont traduites en indice sur la base 100 pour les réalisations. Chaque courbe relie les points correspondant à la prévision du même poste à différentes dates, de plus en plus rapprochées de l’année sur laquelle porte la prévision. Ainsi, par exemple, sur le Graphique 1, la première valeur (122) signifie que la prévision des recettes totales était surévaluée de 22 % par rapport à la valeur effectivement enregistrée pour l’année 2009. (qui apparaît dans les rapports du FMI en 2010 et postérieurs). Dans les Graphique 1 et 3, les deux derniers chiffres sont en principe identiques, puisque l’année 2009 appartient désormais au passé. Seul le chiffre du financement intérieur est encore modifié, ce qui montre la faible fiabilité des données à ce niveau, mais il n’est pas reporté sur le graphique, car les prévisions sont trop instables (elles sont disponibles en annexe). Dans le Graphique 2, seul le dernier chiffre représente les réalisations (du moins telles qu’elles sont enregistrées dans le TOFE final sur lequel le FMI et le gouvernement se sont mis d’accord). 5 Il s’agissait du rapport sur la demande d’une facilité de réduction de la pauvreté et de croissance pour les trois ans suivants. 16
Graphique 1 : Burkina Faso : évolution des prévisions 2009 dans les différents documents du FMI (indice base 100= réalisation) 200,0 180,0 160,0 140,0 120,0 Recettes fiscales 100,0 Recettes totales 80,0 Dépenses et prêts nets 60,0 Dons 40,0 Fin ext 20,0 0,0 sept.-07 sept.-08 sept.-09 sept.-10 janv.-11 janv.-08 janv.-09 janv.-10 mai-07 mai-08 mai-09 mai-10 mai-11 Source : FMI, divers rapports sur le Burkina Faso Comme on le voit, les prévisions de recettes et de dépenses ont tendance à être assez optimistes au début du programme. Elles deviennent plus conservatrices ensuite, avant de croître en n-1 et en n (un phénomène particulièrement net en ce qui concerne les dépenses de 2010). Ce phénomène fait dire à certains interlocuteurs que le FMI avalise parfois des budgets dont le financement est difficile à réunir. Les dons par contre ont tendance à être de plus en plus surestimés au fur et à mesure que l’on s’approche de l’année de décaissement, mais les réalisations sont inférieures aux prévisions. Les prévisions des financements extérieurs nets (prêts moins remboursements), au contraire, on tendance à diminuer régulièrement. Enfin, les prévisions de financement intérieur sont instables, il s’agit d’une variable d’ajustement. Certains postes se modifient encore après l’année sur laquelle ils portent, ce qui est notamment le cas du financement intérieur dans les deux graphiques. Le Graphique 2 est plus inquiétant, qui retrace de sensibles modifications des données pour l’année 2010 entre juillet 2010 et juillet 2011. A la mi-2010, les recettes totales de 2010 étaient encore sous-évaluées de 14 %, alors que les dons étaient surestimés de 33 %. 17
Graphique 2 : Burkina Faso : évolution des prévisions 2010 dans les différents documents du FMI (indice base 100= réalisation) 140,0 120,0 100,0 80,0 Recettes fiscales Recettes totales 60,0 Dépenses et prêts nets Dons 40,0 Fin ext 20,0 0,0 sept.-07 sept.-08 sept.-09 sept.-10 janv.-08 janv.-09 janv.-10 janv.-11 mai-07 mai-08 mai-09 mai-10 mai-11 Source : FMI, divers rapports sur le Burkina Faso Prévisions des principaux postes du TOFE au Mali Les Graphique 3 et Graphique 4 présentent la même analyse pour le Mali. Dans ce cas aussi, on note un certain dérapage des dépenses réalisées par rapport aux prévisions, et le même type de courbes en V. Pour le Mali également, il est difficile de faire figurer sur le même graphique le financement intérieur. Les prévisions à ce niveau sont tellement erratiques qu’elles rendent difficilement lisibles les autres évolutions, mais elles peuvent également se lire en annexe. Graphique 3 : Mali : évolution des prévisions 2009 dans les différents documents du FMI (indice base 100= réalisation) 18
120,0 100,0 2009 Recettes fiscales 80,0 2009 Recettes totales 60,0 2009 Dépenses et prêts 40,0 nets 2009 Dons 20,0 2009 Fin ext 0,0 sept.-09 sept.-10 mars-09 déc.-09 mars-10 mars-11 déc.-08 juin-09 juin-10 déc.-10 juin-11 Source : FMI, divers rapports sur le Mali Un élément peu intuitif dans ces graphiques est la relativement faible amplitude de la variation des prévisions concernant les recettes publiques. Celles-ci sont relativement bien prévues trois ans en avance, malgré l’instabilité générale. Comme il paraît peu vraisemblable que ceci soit le résultat d’une technique de prévision particulièrement efficace, l’hypothèse que les recettes soient en fait des objectifs que les régies financières sont chargées de réaliser se trouve renforcée. En revanche, on note à nouveau que la plus grande instabilité est due aux financements extérieurs, dons et surtout prêts. Ceci est un peu surprenant, dans la mesure où beaucoup de PTF ont fait des efforts pour rendre leurs financements plus prévisibles. Les financements de l’AID, par exemple, sont prévisibles sur 3 à 4 ans (ils ont toutefois tendance à être revus à la hausse du fait des financements affectés à des pays en conflit ou post-conflit qui ne peuvent absorber les montants programmés). Le fait que les montants alloués soient liés au Country Policy and Institutional Assessment (CPIA) pourrait introduire une certaine instabilité, mais il semble que la gestion du CPIA soit organisée de sorte à minimiser ces effets pervers. Par exemple, dans le cas de la crise de 2011 au Burkina Faso, le CPIA n’a pas été modifié, la réaction du gouvernement ayant été jugée adéquate. Le Secrétariat à l’Harmonisation de l’Aide (SHA) du Mali a tenté d’améliorer la visibilité des financements extérieurs en élaborant un cadre de ressources qui reprend les engagements des PTF (http://www.mali-apd.org/IMG/). Le résultat est décevant, car les montants relevés chutent rapidement entre 2011 et 2013 (ils se montent respectivement à 589 milliards, 434 et 222 en 2011, 2012 et 2013), car les PTF répugnent à s’engager longtemps à l’avance. En termes de prévision, il ne suffit pas toutefois de s’en tenir aux engagements des PTF. La vraie difficulté est de prévoir correctement les décaissements, qui dépendent notamment de la rapidité de l’administration publique et de celle des PTF, des conditions mises aux décaissements et de l’avancée des projets sur le terrain. Les taux d’exécution sont particulièrement faibles et assez erratiques, d’où une grande difficulté d’anticipation. Dans 19
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