LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020

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LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
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       EXPOSITION CONÇUE PAR LE FONDS RÉGIONAL D’ART CONTEMPORAIN NORMANDIE ROUEN

       LA BONNE ÉDUCATION
       REGARDS CONTEMPORAINS SUR L’ÉCOLE
       21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
LE MUSÉE NATIONAL DE L’ÉDUCATION
CENTRE D’EXPOSITIONS – 185, RUE EAU-DE-ROBEC – ROUEN
Plus d’informations sur munae.fr
 @MuseeEducation #expoBonneEducation
 Musée national de l’Éducation – Canopé
LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
L’EXPOSITION : ARTISTES
ET COLLECTIFS INVITÉS
Avec : Anderson Alice – Ardouvin Pierre – Bächli Silvia – Bafoil Ivan – Barbier Gilles
– Barnet S.E - Baxter Glen – Bérard Stéphane – Bertran Berrenger – Berthier Julien –
Boltanski Christian – Breer Robert – Briand Denis – Bunn David – Cathala Laurence
– Cauvard Marianne – Chaimowicz Marc-Camile – Chardon Nicolas – Closky Claude
– Collin-Thiébaut Gérard – Cragg Tony – Davrinche Gaël – Dean Tacita – Delaunay
Rodolphe – Desjardin Arnaud – Dibbets Jan – Dion Mark – Discrit Julien – Dolla Noël –
Dubosc Sophie – Duchêne Gérard – Dupeyrat Jérôme – Duprat Hubert – Duyckaerts
Éric – Dzama Marcel – Eisenreich Uta – Ellena Véronique – Erek Cevdet – Etienne-
Martin – Floc’h Nicolas – Froment Aurélien - Gansterer Nikolaus – Gondinho Marco
– Gronon Philippe – Guillaud Jean – Guilleminot Marie-Ange – Heidsieck Bernard –
Hervé Louise – Huber Thomas – Janot Guillaume – Jones Gareth – Joumard
Véronique – Kannisto Sanna – Kruger Barbara – Lefebvre Antoine – Lemonnier
Guy – Liaudet David – Loiseur Yveline – Maillet Chloé – Martin Bevis – Messager
Annette – Meuris Wesley – Milhé Nicolas - Morel Claire – Morfill Sally - Morgan
John – Motti Gianni – Mougas Samir – Nicaise Simon – Noury Aurélie – Odermatt
Arnold – Picandet Lucie – Pien Ed – Pluvinage Raphaël – Polansky Lois – Pressager
Étienne – Prévieux Julien – Pujol Noëlle – Rullier Jean-Jacques – Salomone Yvan –
Saussier Gilles – Schabus Hans – Selz Dorothée – Sérandour Yann – Saussier Gilles
– Schabus Hans – Selz Dorothée – Sérandour Yann – Sévère Olivier – Sfar Laurent
– Shrigley David – Streichardt Thorsten – Thurston Nick – Urquhart Donald – Villeglé
Jacques – Youle Charlie.

REMERCIEMENTS
Au FRAC Normandie Rouen, implanté à Sotteville-lès-Rouen, association culturelle subventionnée
par le ministère de la Culture/DRAC Normandie et la région Normandie, destinée à soutenir et diffuser
l’art contemporain grâce à un fonds d’œuvres (plus de 2 600) regroupant des artistes phares
et signifiants de la création contemporaine.
Aux nombreux prêteurs outre le FRAC Normandie Rouen : le Centre national des arts plastiques,
le FRAC Normandie Caen, le FRAC Bretagne, Des mondes dessinés – FRAC Picardie, le FRAC -
artothèque du Limousin, 49 Nord 6 Est - FRAC Lorraine, le FRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur,
le FRAC Franche-Comté, l’Institut d’art contemporain de Villeurbanne, la galerie Art : Concept,
la galerie Anne-Sarah Bénichou, la galerie In Situ - Fabienne Leclerc, la galerie Georges-Philippe
et Nathalie Vallois, la galerie Isabelle Gounod, la galerie Marcelle Alix.
LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
PARCOURS DE L’EXPOSITION
Comment le processus                        l’art du xixe siècle est économe de
d’apprentissage, de transmission            scènes collectives scolaires, thème
de savoirs a-t-il été matérialisé par       assez peu choisi par les chefs
les artistes à travers les temps ?          de file des renouveaux artistiques
Ces représentations témoignent de           de ce temps ; curieux oubli, à une
la place que les sociétés accordent         époque où cette généralisation de
à l’École et de l’importance du savoir      l’enseignement représentait un espoir
dans nos choix de citoyens éclairés.        fondamental pour la société post-
                                            révolutionnaire. Il faut attendre l’école
L’acte d’instruire et d’éduquer             de Ferry et Buisson pour que l’École
s’incarne pendant de nombreux               soit assimilée à l’ère nouvelle
siècles de l’histoire de l’art occidental   de la modernité.
à travers les figures emblématiques
de sainte Anne instruisant la Vierge        La démocratisation scolaire du
Marie, ou des pères de l’Église             xxe siècle a-t-elle modifié le regard
associés au Livre ou bien de portraits      sur l’école, sur les apprentissages
de maîtres à penser. Le couple              et sur la valeur du savoir ? Les artistes
maître-élève est aussi questionné au        contemporains participent-ils de ce
fil des représentations, tantôt rapport     changement de regard ? C’est ce que
de force, voire de conflit, tantôt objet    tente d’observer « La bonne éducation »
d’échanges. L’enjeu du savoir est           qui, à travers une sélection d’œuvres,
symbolisé par des objets choisis avec       principalement issues des collections
soin dans une nature morte, ou sur          publiques françaises, cherche à mettre
un portrait en majesté d’un puissant,       en lumière la manière dont les artistes,
d’un philosophe ou d’un scientifique.       de différentes générations, de Boltanski
Dans cette représentation du savoir,        à Julien Prévieux, de Noël Dolla à
la question du champ disciplinaire          Martin & Youle, s’emparent volontiers
importe dans la mise en scène. Ainsi,       de l’école, de son esthétique, son
les objets de physique ou d’optique         imaginaire, ses codes, ses méthodes
accompagnent l’homme des                    pédagogiques, afin de lui conférer
Lumières au xviiie siècle, tandis que       une autre sens, une autre vision.
la littérature et plus encore les textes
moraux trouvent leur place auprès           Pour donner corps à cette observation,
de la femme qu’il faut instruire.           le FRAC a imaginé un parcours
                                            scindé en deux axes : l’un s’inscrivant
À partir de 1792, l’instruction publique    dans une histoire matérielle de
est considérée comme un enjeu               l’enseignement, l’autre dans une
fondamental, qui tarde pourtant             logique plus pédagogique. Il en résulte
à advenir. Force est d’admettre que         une première partie qui, se déployant

                                                                                        >3<
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sur l’ensemble du deuxième étage                   L’autre partie, présentée au troisième
      du musée, met avant l’appropriation                étage, s’éloigne de la représentation
      par les artistes non seulement des                 pour s’emparer de la question des
      outils (trousse, cahier, cartable,                 méthodes et principes pédagogiques
      règle, compas, etc.), du mobilier                  liés à l’éducation interrogeant, par là
      (table, tableau noir) mais également               même, le lien qu’entretient celle-ci
      des domaines (littérature, histoire,               avec le jeu, dans un mouvement
      sciences naturelles, etc.) tels                    de pensée qui remonte à Aristote,
      qu’enseignés communément à l’école.                Comenius, Rousseau…

      Delphine Campagnolle, Véronique Souben, Coralie Dupinet.

      PRODUCTION DE L’EXPOSITION
      Commissariat : Véronique Souben, directrice du FRAC, assistée de Coralie Dupinet (FRAC)
      Coordination : Delphine Campagnolle, directrice du Munaé
      Régie des œuvres : Vincent Poulain (FRAC) ; Franck Renou et Fanny Jacquinet (Munaé)
      Administration & logistique : Christine Morice (FRAC) ; Sophie Lebret et Philippe Pain (Munaé)
      Communication : Chloé Palau (FRAC), Isabelle Arnoux (Munaé)
      Montage/scénographie : Pascal Foulon, David Jouin (FRAC) ; Christiane Deltour, Corinne Flament,
      Florian Bouelle et Christophe Leroux (Munaé)
      Actions pour les publics : Julie Debeer (FRAC) ; Saadia Dahmani, Léa Goyer, Julie Guimont,
      Paul-Erwan Bonsens (Munaé) et Arnaud Caquelard (conférencier & plasticien)

                                                         Barbara Kruger, né en 1945
                                                         à Newark (États-Unis)
                                                         Sans titre, 1989
                                                         Commande à l’artiste en 1989
                                                         dans le cadre de la manifestation
                                                         « Estampes et Révolution,
                                                         200 ans après »
                                                         Centre national des arts plastiques
                                                         (CNAP)

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LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
1RE PARTIE : OBJETS DE L’ÉCOLE,
OBJETS D’UN IMAGINAIRE COLLECTIF

2e étage                                 Salle 1 : univers scolaire
Tantôt bonnet d’âne ou professeur,       Les artistes exposés dans la première
les artistes détournent les outils       partie de l’exposition jouent avec
de l’écolier, du compas au tableau       les objets, images et supports
noir, rejouent l’alphabet comme          les plus usuels mais aussi les plus
l’atlas et développent des approches     emblématiques et symboliques
à la fois ludiques et interactives       de l’école. Que ce soient la photographie
de l’éducation. Se compose alors,        de classe de Véronique Ellena, les
dans cette exposition, un nouveau        coloriages de Claude Closky, les dessins
récit d’apprentissage où savoir rime     d’enfants de David Shrigley, les rébus
avec pouvoir. Le premier espace          de Gérard Collin-Thiébaut, les cahiers
de cette exposition est consacré         d’écoliers de Dorothée Selz,
au mobilier scolaire et aux outils       Yann Sérandour et Alice Anderson,
à la fois de l’élève et du professeur.   les jeux de mots et d’écriture de Bertran
                                         Berrenger, les règles à mesurer de
Les artistes contemporains               Cevdet Erek, tout ce vocabulaire et ces
s’ingénient à détourner cahiers,         rituels d’apprentissage, qui font écho
sacs à dos, pupitres et livres pour      aux écoliers de tout temps, sont ici
en restituer des visions parfois         réinterprétés. Élément récurrent de
politiques, sociales mais aussi          l’accrochage, figure le tableau noir qui
récréatives. L’univers de l’école,       se décline en de multiples et complexes
de l’étude devient l’élément moteur      façons chez Dolla, Saussier, Boltanski,
pour des expérimentations formelles,     Joumard ou encore Gronon.
narratives et conceptuelles.

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Philippe Gronon, né en 1964                    Gilles Saussier, né en 1965 à Suresnes
      à Rochefort-sur-Mer                            180 kilomètres avant la mer, tableaux
      Tableau noir-Amphi Sciences P, 1996            de classe I & II, 2016
      Épreuve sur papier baryté fixé sur aluminium   Installation-impression pigmentaire sur Canson
      CNAP                                           platine Rag, contrecollée sur aluminium
                                                     FRAC Normandie Rouen
      Le tableau – apparu dans les salles
      de classe dès le xviie siècle, puis            Dans l’œuvre de Gilles Saussier,
      encouragé par les pouvoirs publics             le tableau vert de la classe de
      dans l’agencement et l’organisation            l’ancienne école primaire George-
      de la classe au xixe siècle, sous la           Sand de Pont-Audemer est un des
      forme de tableau noir– devient chez            multiples jalons sur ces 180 km
      Philippe Gronon le sujet, l’œuvre d’art.       entre Paris et la Manche, le long
                                                     d’un tracé en ligne droite, fruit d’une
      L’auteur Vincent Zonca parle ainsi             commande passée par l’Institut
      de son travail : « [Philippe Gronon]           géographique national en 2008 à
      développe une pratique minimale                l’artiste. Le FRAC Normandie Rouen
      de la photographie qui, combinant              résume sa démarche : « Il explore
      les acquis des techniques argentiques          l’ensemble des lieux et des activités
      et numériques, consiste à montrer              situés sur ce tracé et organise
      les objets tels quels, frontalement,           des observatoires informels avec
      sans effet, sans fragmentation                 des établissements scolaires,
      ni agrandissement (à l’échelle 1-,             des associations, des centres
      celle de la réalité sensible), chaque          d’art. À chaque étape de cet atlas
      photographie est le portrait d’un              documentaire, toute une histoire
      objet et d’un seul, qui est alors              locale, poétique et émouvante
      institué comme le sujet principal              ressurgit grâce au matériau
      de la représentation photographique.           collecté (récits, photographies,
      Sa technique photographique inspire            objets et documents trouvés) et à
      le mode de production, à savoir                sa mise en espace le plus souvent
      des séries d’un même objet. [Ses]              in situ. Au fil des 180 km, Gilles
      Tableaux noirs sont vierges de toute           Saussier engage des rencontres
      écriture, photographiés au sein de             entre les habitants et les usagers
      grands amphithéâtres universitaires.           du territoire. L’enjeu est à chaque
      Les traces constituent l’expression            fois de « recouvrer des histoires
      linguistique didactique […] ; les objets       refoulées, d’évoquer des espaces
      sont pris comme par surprise au                culturels perdus, de proposer une
      dépourvu, en dehors de leur usage              contre-mémoire historique ». Au sein
      habituel, quand ils n’expriment plus           de l’école primaire désaffectée,
      si ce n’est le silence ou autre chose,         il réalise, en 2016, des installations
      ce que le spectateur ou le passant             photographiques intégrant des
      n’est pas censé lire. »                        tableaux de classe et des écritures

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qui symbolisent le territoire qu’il   le fait d’utiliser mes expositions en
dévoile. La craie sur le tableau      tant qu’espaces performatifs, au
évoque les coteaux crayeux de la      sens de les performer par la parole
vallée de la Seine mais témoigne      et l’activité (écrire, donner des
aussi de processus immatériels        lectures, créer des rencontres…),
d’apprentissage, transmis par         de les recomposer en cours
la parole, aujourd’hui envolée,       d’expositions, d’y réaliser
de cours donnés et appris. À          des prises de vues qui ne sont
propos de ses installations, Gilles   pas de la documentation d’artiste,
Saussier témoigne : « Réfléchir       mais la forme photographique
à des dispositifs d’exposition ou     même du projet en cours. »
à des installations photographiques
hors de lieux institutionnels m’a
toujours intéressé. Tout comme

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du quotidien scolaire, non sans humour,
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                                                   de celui-ci et par trois séquences vidéo,
                                                   une hypothèse d’une main autrefois
                                                   à six doigts et munie de deux pouces.
                                                   One forearm hypothesis permet à
                                                   l’artiste de revenir sur son entreprise de
                                                   reconstitution d’une « archéologie de l’art
                                                   de peindre ». Dans sa vidéo, sa théorie
                                                   est affirmée dans une position d’autorité
                                                   qui entraîne pour l’auditeur une écoute
                                                   d’adhésion plus qu’une écoute critique.
                                                   Cette histoire de l’évolution de la main
                                                   se base sur des analyses scientifiques
                                                   de paléontologie mettant en exergue
                                                   la spécificité de l’espèce humaine,
                                                   mais la rhétorique est mise ici au service
                                                   de l’absurde. Avec des mots savants,
                                                   des références historiques, le recours
                                                   au latin ou à l’anglais, des schémas
                                                   anatomiques etc., l’auditeur est alors
                                                   sous emprise et doit faire preuve d’un
                                                   libre arbitre certain, pour mettre en doute
                                                   les pseudo-évidences énoncées par
                                                   le conférencier. Par ses conférences-
      Éric Duyckaerts (Liège, 1953-Bordeaux,       performances, Éric Duyckaerts met
      2019), One forearm Hypothesis, 1994          en doute les discours des « sachants »,
      Installation et vidéo                        ou des « chercheurs-cherchant »,
      FRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur              avides de garder pour un milieu
                                                   d’initiés le résultat de leurs recherches.
      Artiste belge, diplômé en droit et en        Ses développements ne sont pas
      philosophie, disciplines qui requièrent      dénués d’un sens du comique, un des
      l’art de l’éloquence, il commence dans       ressorts de la transmission orale. L’artiste
      les années 1980 à recourir à l’art de        disait de ses vidéos en 2007 à la galerie
      la conférence, pour créer une œuvre          Emmanuel Perrotin : « Elles seront
      qui questionne les savoirs et leur           axées sur un personnage. On pourrait
      vulgarisation.                               l’appeler Éric D. C’est un personnage
                                                   qui navigue entre le professeur et
      Le squelette de la salle de classe,          le savant fou. Il a beaucoup d’idées
      du cours d’anatomie, est ancré dans          à faire partager. Son enthousiasme n’est
      l’imaginaire collectif des poncifs de        pas feint. Il fonce dans ces sphères
      l’école. Éric Duyckaerts utilise cet objet   de connaissance où il se sent bien. »

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LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
À découvrir également                     Salle 1 : suite
 Nikolaus Gansterer, Configuration III ;
 Véronique Joumard, Tableautin ;           Christian Boltanski,
 Julien Discrit, Terra incognitae-         né en 1944 à Paris
 Haute-Mana.                               L’École, 1977
                                           Tirage photographique couleur monté
Vitrine 1 : jeux de mots                   sur aggloméré
Bertran Berranger, Tout 26 cartes          Institut d’art contemporain, Villeurbanne
postales ; Gérard Collin-Thiébaut,
Rébus-Lautréamont.                         Christian Boltanski confie à Suzanne
                                           Pagé, en 1981, à propos de sa création
Vitrine 2 : dessins et coloriages          L’École : « Les éléments qui rentrent
David Shrigley, Untitled (Help Me;         dans mes Compositions sont choisis
The life+work of Mr X) ; Dorothée          pour leur valeur émotionnelle.
Selz, Cahier d’écolier de Dorothée         Les jouets m’intéressent en tant
Selz ; Claude Closky, Coloriage,           qu’ils sont représentation culturelle
colorie comme tu veux, dessine             du réel. Le fond noir est destiné
et écris ce que tu veux ; Alice            à supprimer l’espace naturaliste,
Anderson, My Friends, my Ennemies ;        à placer les objets hors perspective.
Yvan Salomone, Strasbourg 266.             Mais, plus profondément, je désire
                                           que mes Compositions tiennent pour
                                           le spectateur un peu le même rôle que
                                           le jouet pour l’enfant : images codifiées
                                           et collectives de la réalité, elles sont
                                           aussi, chez chacun, déclencheurs
                                           d’histoires particulières. »
                                           Imprégné toute sa jeunesse par
                                           l’histoire de la Shoah transmise par ses
                                           parents, survivants de cette tragédie,
                                           il quitte l’école à 14 ans. Autodidacte,
                                           il s’adonne tout d’abord à la peinture
                                           mais ouvre rapidement sa pratique
                                           à la photographie et aux installations.
                                           L’ensemble de son œuvre sera
                                           marquée par l’idée de présence/
                                           absence. Il écrit une histoire réelle
                                           ou imaginaire personnelle et toutes
                                           ses œuvres véhiculent à la fois
                                           une portée de mémoire individuelle
                                           et de mémoire collective.

                                                                                       >9<
LA BONNE ÉDUCATION REGARDS CONTEMPORAINS SUR L'ÉCOLE 21 SEPTEMBRE 2019 - 2 FÉVRIER 2020
Ce grand format, tirage unique,             Noël Dolla, né en 1945 à Nice
       appartient aux grandes Compositions         Tableau d’école, 1995
       de l’artiste. Celui-ci aime mettre          Peinture, craie et tarlatane contrecollée sur bois
       en scène différents éléments dont           FRAC Bretagne
       certains, très modestes, deviennent
       reliques par l’art de sa mise en scène.     Le tableau d’école est aussi un objet
       Cette œuvre mixte mêle différents           totem, porteur d’une mémoire,
       matériaux : supports photos, objets,        réinterprété par Noël Dolla. Étudiant
       panneau noir symbole de la surface          à Nice, il rencontre Claude Viallat,
       issue d’une longue tradition picturale      Ben, et participe, en 1968, à la création
       dont Boltanski se sent l’héritier.          du groupe Supports/Surfaces. Il explore
       Chacun peut se souvenir des objets          de nombreuses techniques et utilise
       mis en scène par l’artiste, la carte        l’objet quotidien comme un peintre
       de France en plastique dont on              utilise un pinceau ; il se revendique
       dessinait les contours, le taille-          d’ailleurs aussi comme peintre. La
       crayon « mappemonde » ou l’ardoise.         tarlatane, ce chiffon qui sert au graveur
       Ces objets racontent son histoire,          à faire pénétrer l’encre dans les stries
       mais aussi une histoire universelle         de la plaque gravée, devient une
       de l’enfance. Vestiges de moments           matière et une forme première : elle
       passés sur les bancs de l’école, ils        devient ligne. Il parle ainsi de sa série
       sont des jalons d’un art qui ne rejette     Tableaux d’école : « J’ai étiré la bande
       pas l’élément affectif, voire nostalgique   de tarlatane d’un mur sur l’autre et
       dans l’œuvre. Époux d’Annette               je me suis mis à tisser l’espace avec
       Messager (présente également dans           un dessin qui s’est étendu sur 20 m2.
       l’exposition avec son œuvre Mot pour        C’est une ligne qui se développe
       mot Oubli), le recours à des éléments       dans l’espace et qui, au lieu de
       autobiographiques parcourt les              rester sur un seul plan, a occupé la
       œuvres de ces deux artistes, éléments       troisième dimension. » Ces Tableaux
       devenant un matériau de création.           d’école, réalisés entre 1991-1999,
                                                   utilisent l’espace comme un élément
                                                   du médium sur lequel l’œuvre se
                                                   construit. Du mur au plafond, sur
                                                   le panneau et en dehors de celui-ci,
                                                   la tarlatane forme des lignes qui
                                                   deviennent maison, étoile… Une autre
                                                   manière de dessiner, tel un contour
                                                   d’un dessin d’enfant…

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sont imprimées à partir du décalque,
 À découvrir également                             réalisé à main levée par des enfants,
 Stéphane Bérard, Étude pour                       d’un gabarit reproduisant les doubles
 une transmission patrimoniale                     lignes des cahiers d’apprentissage
 non autoritaire ; Wesley Meuris,                  de l’écriture. Conçues comme un
 Examples of genetic Engineering.                  insert dans une chaîne industrielle,
                                                   les couvertures des cahiers sont
                                                   fournies par le papetier Clairefontaine,
Vitrine 3 : outils de l’écolier                    partenaire du projet.
Silvia Bächli, Sans titre ; Nicolas
Floc’h, Le Grand Troc ; Simon                      Vitrine 5 : punitions
Nicaise, (48+(12ln(x)/5,93) +67,4n) /              Gianni Motti, Autoportrait ;
(1+2,5)/2,4x+5yn = 02 ; Cevdet Erek,               Sophie Dubosc, Bras cassé.
Ruler Now-End ; Ruler O-Now.
                                                   Vitrine 6 : portrait d’écolier
Vitrine 4 : cahiers                                Nicolas Milhé, Vladimir ; David Shrigley,
Jean-Jacques Rullier, Le Rêve                      Untitled ; Olivier Sévère, En mains
de la fuite dans la forêt qui s’écroule ;          propres ; Marie-Ange Guilleminot,
Alice Anderson, Cahier d’écolière ;                Cauris.
Sally Morfill, SE Barnet, Arnaud
Desjardin (The Every Day Press),
Drawing and Other Writing.

Yann Sérandour, né en 1974
Cahiers Clairefontaine, 2006
Ensemble sous plastique de 5 cahiers d’écolier,
impression offset couleur, couverture pelliculée
FRAC Normandie Rouen

Yann Sérandour explore, à travers des
corpus de publications et d’imprimés,
une matière qui peut être source d’une
nouvelle histoire. Son cheminement
intellectuel l’amène à relire des œuvres
ou à utiliser des artefacts, comme
cette série de Cahiers Clairefontaine.
S’inscrivant dans un mouvement
de l’art issu de l’art conceptuel des              Olivier Sévère
années 1960 et 1970 qui n’hésite pas               En mains propres, 2007
à remettre en cause l’œuvre et sa                  Marbre blanc, laiton chromé
production, Yann Sérandour sème                    Collection Frac Normandie Rouen,
le trouble. Les pages de ces cahiers               © Adagp, Paris

                                                                                               >11<
Salle 2 : contenus, modes                   à l’occasion de la xie Biennale de
       et disciplines scolaires                    Paris/musée d’art moderne, par la
                                                   création d’un lieu de transmission,
       Mais le savoir est multiple. L’histoire     une école des signes et du sens, en
       de l’enseignement nous rappelle             favorisant la rencontre avec un large
       combien les savoirs se modifient            public. Ces travaux fondateurs vont
       avec les siècles. Certaines matières        donner lieu à beaucoup d’autres,
       considérées comme les voies                 interrogeant tour à tour le corps,
       royales du succès scolaire ne le            ses traces, le paysage, la fabrique,
       demeurent pas toujours, comme               pour ensuite s’intéresser à l’énergie,
       en témoigne le regard évolutif porté        entre physique et métaphysique.
       sur les humanités et les sciences           En 1990, il fonde le Conservatoire
       ou aujourd’hui sur l’économie.              nominal des arts et métiers (double
       L’exposition se poursuit donc en            du Conservatoire national des arts et
       explorant les matières qui composent        métiers), lieu de travail et de stockage,
       le savoir : lettres, sciences naturelles,   lieu d’exposition et sujet d’une réflexion
       géographie, etc. Chaque vitrine ou          sur la fonction et l’usage des médiums
       espace présente des œuvres en               en rapport avec la chose nommée ».
       référence à une discipline scolaire
       dont elles semblent rejouer, détourner      Guy Lemonnier propose à travers
       ou dépasser les enjeux.                     cette installation une vision plus
                                                   générale et scolaire de l’atelier
       L’ATELIER, UN LIEU POUR APPRENDRE           comme lieu d’apprentissage, lieu
                                                   de travail et d’étude où les outils de
       Guy Lemonnier, né en 1957                   l’archive et de la documentation,
       D’un inventaire, l’autre ou le vertige      tels les classeurs, la tour de CD ou
       zététique, 2012                             encore le tampon encreur, organisent
       Installation et vidéo                       l’espace. Conçue à l’issue d’une
       FRAC Normandie Rouen                        performance en regard du projet
                                                   de l’Inventaire entrepris au FRAC de
       Le FRAC de Normandie nous présente          Rouen depuis 2011, cette installation
       l’artiste installé sur le territoire        se joue des effets propres à la liste,
       rouennais, enseignant aux Beaux-Arts        entre absurdité et poésie. L’artiste
       de Rouen puis à l’ESADHaR, site de          nous propose de nous perdre avec
       Rouen, depuis 1984. Guy Lemonnier,          délice dans l’absurde et nous renvoie
       « artiste plasticien, engage, à partir      à la définition de la zététique (selon
       de 1980, ses travaux sur l’invention        Wikipédia) : « Étude rationnelle des
       et la création de signes dans l’espace.     phénomènes présentés comme
       Il édite en 1979 une encyclopédie,          paranormaux, des pseudosciences
       réécriture cryptée de l’histoire            et des thérapies étranges. La
       des arts plastiques. Il développe           zététique est destinée aux théories
       cette expérience l’année suivante           scientifiquement réfutables […].

>12<
[Elle] se réclame aussi du scepticisme         aux économistes « classiques »
scientifique, et plus généralement de          comme Ricardo et Smith, développe
la démarche de doute cartésien qu’elle         une nouvelle théorie politique,
décrit comme nécessaire en science             économique et sociale, fondée sur
comme en philosophie. » Ce doute               la critique du capitalisme et sur une
cartésien est un des piliers de cette          mise en valeur d’un monde sans
éducation à l’esprit critique que l’École      classes. Julien Prévieux continue
entend transmettre aux élèves.                 d’interroger ces notions de travail (avec
                                               une série consacrée aux Lettres de
SCIENCES ÉCONOMIQUES                           non-motivation) et essaie de décrypter
                                               le sens des textes fondateurs.
Julien Prévieux, né en 1974                    Il associe des séquences, les relie,
à Saint-Martin-d’Hères (Isère)                 celles-ci créant alors des mots cachés.
Boycott Smith, Ricardo et Marx,                Cette constellation de mots-clés donne
de la série « À la recherche du miracle        un sentiment de chaos, interroge
économique », 2007                             le bon fonctionnement de l’économie
Impression jet d’encre et encre sur papier ;   mondiale et les conséquences sur
S.T.D.N.R. G.B sur l’étiquette                 le travail et sur la vie de l’humanité.
FRAC Bretagne
                                               HUMANITÉS
Julien Prévieux cherche à renverser
le rapport de force à l’œuvre dans les         Vitrine 1 : littérature
sociétés. Son œuvre questionne les             Gérard Collin-Thiébaut, Réapprendre
sciences économiques et les théories           à lire ; Gérard Duchêne, Roman
des textes fondateurs d’Adam Smith             Noir ; Aurélie Noury, Pierre Ménard.
(1723-1790), de David Ricardo (1772-1823)      El ingeniosos hidalgo Don Quijote
et de Karl Marx (1818-1883). Le premier,       de la Mancha ; Laurence Cathala,
Adam Smith, philosophe et économiste           La Conversation ; John Morgan & Marc-
écossais, est considéré comme                  Camille Chaimowicz, Madame Bovary ;
le père des sciences économiques               John Morgan & Donald Urquhart,
modernes, un des premiers à affirmer           Vanity Fair (La foire aux vanités) ;
que la richesse des nations provient           John Morgan & Gareth Jones,
du travail des hommes, et donc un des          The Picture of Dorian Gray.
premiers à mettre la valeur travail au
premier plan et la nécessité de diviser        Vitrine 2 : histoire
celui-ci. David Ricardo, économiste            Gaël Davrinche, Portrait de George
libéral anglais, reprend les théories          Washington (d’après George Stuart),
d’Adam Smith et développe la théorie           n° 42 ; Tacita Dean, Fontainebleau is
de la « valeur d’usage » et de la « valeur     in France ; C/o Jolyon ; Nick Thurston,
d’échange ». Il sera aussi parmi les plus      Historia Abscondita.
influents dans les théories du libre-
échange. Karl Marx, qui s’opposa

                                                                                           >13<
GÉOGRAPHIE                                      Vitrine 3 : géographie
                                                       Guillaume Janot, Sans titre ;
       Julien Discrit, né en 1978                      Denis Briand, At last Slata Atsal.
       Terra incognitae-Haute-Mana, 2015               Petit Atlas des irritations du monde ;
       Carte ajourée, 80 x 80 cm                       Hans Schabus, Log book of ballast ;
       Galerie Anne-Sarah Bénichou, Paris              Das Rendezvousproblem ; Mark Dion,
                                                       Néotropic.
       Julien Discrit explore, à travers
       la géographie, le monde et ses                  SCIENCES DE LA NATURE
       représentations. C’est une discipline
       qu’il connaît bien, lui l’ancien étudiant       Les œuvres présentées tissent
       en géographie de l’université de                des liens avec ces bibliothèques
       Reims. Espace réel mais aussi espace            et musées scolaires qui pouvaient
       imaginaire ont toujours composé                 apparaître, selon les époques, comme
       la dialectique de la cartographie, tout         des cabinets de curiosité étranges,
       comme le contrôle des connaissances             proposés au regard de l’élève mais
       des élèves de géographie qui oscille            réservés à la manipulation du maître
       entre le factuel, la distorsion liée à l’acte   ou de la maîtresse. Les artistes tirent,
       de mémorisation et l’imaginaire face            ici, parti de l’étrangeté de ces objets
       à l’oubli. Julien Discrit se joue de ces        scientifiques, artefacts, éléments
       paradoxes et, au contraire, les utilise         collectés dans la nature et de leurs
       dans un processus de recréation d’un            manuels pour mieux en explorer
       territoire. Outre l’espace, le temps            la poésie ou en détourner le sens.
       est un élément du processus créatif
       symbolisant le temps nécessaire                 Vitrine 4 : géologie – minéraux
       au parcours et nécessaire au récit.             et fossiles
                                                       Mark Dion, Blood Coral-Vanitas ; Sophie
       La galerie Anne-Sarah Bénichou                  Dubosc, Os/Bone ; I. I. I. I. (International
       résume cette création : « Ces cartes            Institute for Important Items) Louise
       de la Guyane française ont été                  Hervé & Chloé Maillet, Les Cristaux de
       dressées par l’IGN, leur particularité          Pasteur.
       est de représenter des zones
       blanches, exemptes d’informations               Vitrine 5 : biologie – la faune
       et désignées sur la carte sous                  Mark Dion, The Sturgeon, Field Guide
       l’appellation “nuages”. Ce sont                 to the Wildlife of Madison Square Park,
       ces vides, ces manques qui ont été              Die geöffnete Raritäten und Naturalien
       découpés ici, dessinant en négatif              Kammer, Polar Bear ; Jan Dibbets,
       les cumulus présents lors des prises            Domaine d’un rouge-gorge ; Marcel
       de vues aériennes de la zone. »                 Dzama, Lonesome Creatures of Worried
                                                       World ; Yveline Loiseur, Dix nids.

>14<
Vitrine 6 : biologie – la flore                  à partir duquel ils conçoivent un jeu,
Sanna Kannisto, Dictyophora                      sorte de kit du parfait petit chimiste.
Indusiata ; Loïs Polansky, Apgaris               Cette boîte permettra aux enfants
Geber Plant Analysis ; Alice Anderson            et aux adultes de créer des formes
Collection ; Ivan Bafoil, Edirne,                en gelée, mais chaque forme sera
sur un texte de Luis Porquet.                    productrice d’un son électronique
                                                 lorsque celle-ci sera touchée par
Vitrine 7 : entomologie                          la main de l’homme.
Mark Dion, Hommage à Jean-Henri
Fabre (Necophorus giganteus) ;                   L’utilisateur retrouve le geste appris
Hubert Duprat, Sans titre.                       en cours de sciences : sélection et
                                                 manipulation de substances – eau
SCIENCES ET TECHNIQUES                           et poudres – mélangées dans les
                                                 éprouvettes et gobelets d’une verrerie
Vitrine 8 : chimie                               de laboratoire puis transformées
                                                 au moyen de moules et de colorants.
Raphaël Pluvinage, né en 1986                    Les formes démoulées sont posées
et Marianne Cauvard (1987-2014)                  sur une plaque munie d’une carte
Noisy Jelly, Études test pour Noisy Jelly,       électronique, une enceinte est alors
Maquettes d’étude pour Noisy Jelly,              branchée sur la boîte. La gelée est un
Tests d’étude pour Noisy Jelly                   matériau qui non seulement permet
Installation-boîte en contreplaqué de bouleau-   de mettre l’eau en forme, mais qui
découpe laser, bois collé sur une plaque en      permet aussi d’être manipulée,
métal conductrice, moules en PET thermoformé,    reprise, cassée, recollée, produisant
système Ardvino, Mac mini et programme           autant de signaux sons que de
Max/MSP. Prototype autoédition                   formes réinventées. Cette œuvre
CNAP                                             participative évoque aussi la magie de
                                                 l’expérimentation du cours de chimie,
Designers de formation, diplômés de              où sans en connaître l’effet final,
l’ENSCI – Les ateliers (École nationale          l’expérimentateur produit des sons
supérieure de création industrielle),            grâce à chacune de ces formes qui
Raphaël Pluvinage et Marianne                    génèrent leur propre interaction.
Cauvard s’y rencontrent et s’associent
pour l’œuvre Noisy Jelly. Ce projet est          Ce plaisir du jeu, ce goût de
mené dans le cadre de leurs études,              l’interactivité avec les publics
le sujet étant « contours flous ». Tandis        où l’électronique est utilisée comme
que Raphaël Pluvinage s’intéresse                un moyen d’expérimentation de
aux contrôleurs, aux interrupteurs               phénomènes scientifiques se poursuit
tactiles, Marianne Cauvard, de retour            aujourd’hui dans le travail de Raphaël
de Londres, s’inspire des formes floues          Pluvinage, associé désormais à Marion
du pudding anglais, la jelly. Les deux           Pinaffo, suite au décès prématuré
artistes ont trouvé leur matériau                de Marianne Cauvard.

                                                                                           >15<
où il expose régulièrement. Vers 1970,
        À découvrir également                              il invente une forme de dessins
        Tony Cragg, Test tubes II ;                        légendés dont il fait par la suite
        Noëlle Pujol, Sans titre.                          sa forme d’expression usuelle :
                                                           « J’ai trouvé ma propre voie, dit-il,
                                                           en détournant l’imagerie des livres
       Vitrine 9 : mathématiques                           pour adolescents des années 1930… »
       Thorsten Streichardt, XXBOXXX ;                     Des cow-boys confrontés à l’art
       Thomas Huber, Hängung Aushub                        moderne, des collégiens anglais qui
       Hängung Proportionen (15.05.2012).                  « transforment les repas de cantine
                                                           scolaire en authentique nourriture »,
       Vitrine 10 : technologie                            des parodies de couverture de
       Bernard Hiedsieck, Circuits intégrés.               « Que sais-je ? » dont les sujets sont
                                                           « l’ennui », « l’anarchie », « l’étude
       Vitrine 11 : les manuels                            de la condensation », tels sont les
                                                           thèmes de prédilection de Glen Baxter.
       Glen Baxter, né en 1944, à Londres                  Défilent ainsi tous les héros de la
       Que sais-je ? Les pellicules ; Que                  mythologie enfantine. Mais c’est aux
       sais-je ? La géographie ; Que sais-je ?             adultes avant tout que Glen Baxter
       Les Anglais                                         destine ses images qui font appel
       Dessin à l’encre et aux crayons de couleur sur      à notre inconscient. Agrémentant ses
       papier/encre de chine et crayons gras sur papier    dessins old fashion de commentaires
       vélin volontairement détruit par le feu et doublé   délirants, il obtient d’inénarrables
       sur papier                                          effets de décalage. Dans ses
       FRAC Normandie Rouen et Galerie Isabelle Gounod     interviews, Glen Baxter cite volontiers
                                                           ses sources : Lewis Carroll, le livre
       Glen Baxter découvre le surréalisme                 What a Life considéré par Raymond
       qui lui donnera le goût du non-sens,                Queneau comme pionnier du
       de l’incongru. Il aime associer le                  surréalisme, Buffalo Bill, Tom Mix,
       texte et l’image dans des livres qui                George Herriman créateur de Krazy
       soudain bouleversent le rapport sacré               Kat et ceux qu’il admire le plus : Jarry,
       du lecteur avec le média livre, tant les            Queneau, Raymond Roussel, Magritte,
       rapprochements ont de quoi dérouter                 Chirico, Desnos, Man Ray…
       ce dernier.

       Glen Baxter est un artiste anglais.                  À découvrir également
       Peintre et dessinateur, c’est surtout                Claire Morel, Sans titre-Que sais-
       son œuvre graphique qui l’a fait                     je ? ; Sans titre-Que sais-je sur
       connaître aux États-Unis d’abord, puis               la relativité surface encrage ;
       en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas,                    Antoine Lefebvre, La Bibliothèque
       dans les pays nordiques, en Australie,               fantastique, Que Sais-Je ?
       au Japon et, bien sûr, en France

>16<
Étienne Pressager,
 À découvrir également                       né en 1958 à Lunéville
 dans la salle 2                             L’alphabet turbulent, 26 dessins
 Rodolphe Delaunay, Cyclope                  Graphite et lavis de gouache sur papier
 Panoramic ; David Bunn, Secret              Des mondes dessinés – FRAC Picardie
 Societies ; Samir Mougas,
 Programme #4 ; Marco Gondinho,              Enseignant à l’École nationale
 Le monde nomade#1 ; Lucie                   supérieure d’arts de Nancy, cet artiste
 Picandet, « Aïôn », Emophone n° 1,          utilise la lettre et recherche également
 Poème Seconde Hampe – Mithridate,           la mise en regard de l’image au
 recueil Detterrissages – Celui que je       texte. Mais il aime à perturber notre
 suis ; Julien Berthier, Le mouvement        regard tant la lettre n’est pas toujours
 perpétuel.                                  aisément identifiable ; ses lettres,
                                             traces et matières noires sur le blanc
                                             du papier s’assemblent et deviennent
Salle 3 : les abécédaires                    le sujet principal de l’œuvre. Étienne
Premier manuel de l’enfant pour              Pressager appartient à une tradition
apprendre à lire et à écrire ses lettres,    où les techniques ancestrales de
l’abécédaire ne se limite pas à l’objet-     l’art de peindre sont parfaitement
livre. Utilisé dès le Moyen Âge, il doit     maîtrisées : la perspective illusionniste,
donner à l’enfant le goût du mot et          la palette des nuances de couleur
de la lecture. S’il symbolise l’entrée       aboutissant à une variété de gris/noirs.
dans la culture de l’écrit, l’image reste    Réalisée en 1994, cette série témoigne
pourtant essentielle, susceptible            de l’intérêt de l’artiste pour le graphisme
de porter le désir de l’enfant vers          de la lettre, pour sa force plastique,
un monde de mots. Les œuvres                 voire sculpturale, comme si la deuxième
présentées dans cette salle s’inscrivent     dimension de la feuille réussissait
dans cette tradition et la détournent.       à suggérer les trois dimensions de
Comme le rappelait Ségolène Le Men,          la forme. Ces lettres ne se résument
« l’alphabet ne sert pas seulement           plus seulement à un phonème en
à lire ; c’est aussi une machine à           devenir, mais à un signe, à un symbole
acquérir de nouvelles connaissances »        et à une matière pure. L’artiste nous
(Les Abécédaires : lettres, mots,            propose de regarder ces lettres
images, Éd. Scérén, 2012). Pour les          d’un nouvel œil, d’y voir chez une, la
artistes, il s’agit avant tout d’envisager   souplesse et le potentiel de lien, sur une
de nouvelles manières d’aborder              autre, le symbole d’un enfermement,
l’esthétique du lettrage comme chez          etc. Le geste est calligraphe et pictural :
Pressager, Messager et Villeglé. Il est      une ligne produite grâce au crayon
aussi question de revisiter la logique       de graphite, un plein produit par le
même de l’alphabet à travers le principe     pinceau du lavis. Il y a sans conteste
du dictionnaire (Barbier et Liaudet)         le plaisir du geste, peut-être à l’image
ou du flipbook (Breer).                      du plaisir du premier alphabet récité

                                                                                           >17<
par l’enfant qui perçoit le potentiel de    c’est qu’une image parfaite là, en haut,
       possibles d’un monde de sons, de mots       dans la boîte crânienne, ne passe
       et d’idées qui s’ouvre à lui. L’intérêt     pas par le bras puis par la main. Alors
       et l’amour des lettres provoquent           qu’il s’agit du même corps. Il y a des
       l’intérêt et l’amour des mots.              refus d’obtempérer qui sont irritants. »
                                                   David Liaudet utilise très largement
       Ses recherches se poursuivent au cours      la technique de la lithographie,
       des décennies, les lettres composent        un des arts qu’il enseigne d’ailleurs
       des mots et peuvent se dissocier sur        aux Beaux-Arts du Mans où il est
       plusieurs lignes ou plans, ainsi l’espace   professeur depuis 1997.
       entre les lettres, le « entre », ce vide
       aura tout autant de puissance que la        En 2018, il décide d’abandonner
       pause ou le silence entre deux notes.       la lithographie, qui peut lui demander
       On a aussi rapproché Étienne Pressager      jusqu’à vingt-cinq passages sous
       du surréalisme ou de l’art conceptuel ;     presse pour obtenir toutes les teintes
       le goût de l’absurde, tout comme le         souhaitées. Ses planches peuvent
       goût du poème visuel se retrouvent,         aussi être rehaussées d’aquarelle
       tel chez René Magritte ou chez Marcel       comme celles du FRAC Normandie
       Broodthaers.                                Rouen. Ces dernières années, il utilise
                                                   uniquement le dessin, technique
       David Liaudet, né en 1967                   qui lui apporte une nouvelle liberté
       Complément d’illustrations                  et un nouveau rapport à l’objet
       au dictionnaire Larousse, 1994              dessiné : « J’ai choisi un papier avec
       Estampe, planche dessinée en couleur-       un peu de grain, un peu rêche, sévère,
       lithographie aquarellée                     qui semble se refuser à la plume.
       FRAC Normandie Rouen                        Autre nouveauté : les outils de dessin.
                                                   Par tradition, j’ai gardé les craies
       Depuis 1994, David Liaudet s’est            et l’encre à lavis de lithographie mais
       donné pour tâche de « réaliser              j’ai opté pour des feutres de différents
       un complément aux illustrations             calibres, tous remplis de véritable
       du dictionnaire Larousse de (son)           encre de Chine. Je veux que mes noirs
       enfance », édition de 1967. À chaque        soient noirs. Chose qui m’étonne :
       mot, un dessin créé par l’artiste,          le format des papiers m’autorise
       compose un abécédaire inédit.               à tourner dans tous les sens mon
       En 2007, il écrit à propos de cette         support, ce que je ne pouvais
       nécessaire imagination : « Je m’étonne      vraiment pas faire avec mes pierres
       de l’imagination qui permet, presque        lithographiques. C’est amusant cette
       toujours, de tracer des lignes. Je sens     ergonomie du dessin. »
       bien parfois que cela patine, qu’il y a
       des redites voire des resucées mais,        Au fur et à mesure, l’artiste
       dans l’ensemble, le cerveau produit.        avance dans sa tâche, et cherche
       Ce qui m’étonne aussi toujours,             parallèlement à la documenter. Le blog

>18<
est un nouveau moyen pour conserver          Vitrine
ce cheminement de création mais              Jacques Villeglé, Alphabet ; Étienne
aussi de doutes qui peuvent étreindre        Martin, Abécédaire et autres lieux ;
l’artiste. Il livre ses dessins et confie    Annette Messager, Mot pour mot Oubli.
par ses commentaires l’étendue de
son travail : « 24 décembre 2018 – C’est
toujours heureux dans ce projet de
passer une lettre et d’en entamer une
autre. Voilà que c’en est fini des F. Fini
des F, j’aime bien. Voilà que le G arrive.
Le G c’est un oiseau, c’est le plaisir.
C’est les garçons. Alors je vous laisse
regarder ces nouvelles planches.
Remarquerez-vous que les dessins
gagnent en taille ? »

En 2016, il écrit : « En art, je ne crois
pas au projet, je ne crois qu’en la
pratique. Je ne crois pas aux chimères,
je ne crois qu’à la présence dans le
réel. Faire est le moyen de voir. »
Vertigineuse pratique qui l’amène
depuis 25 ans à poursuivre ; sur sa
première planche en 1994, son premier
mot est « abandon » ; en juillet 2019,
le mot « gaspillage » devient une sorte
de constellation planétaire.

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 Robert Breer, vidéo : ATOZ.                 Jacques Villeglé
                                             Alphabet, 2000
                                             Collection FRAC Bretagne © ADAGP, Paris 2019.
                                             Crédit Photographique : Hervé Beurel

                                                                                             >19<
1er étage : exposition                               Arrivé dans le sud-est de la France
                                                            à 20 ans, il étudie à Aix-en-Provence
       permanente                                           puis à Marseille où il vit et travaille
       Gilles Barbier, né en 1965 au Vanuatu                toujours, au sein de la Friche la Belle
       (Nouvelles-Hébrides)                                 de Mai, fabrique artistique et espace
       De « Exploiter » à « Floculation »                   culturel. Artiste multiple, il diversifie
       et ses trois errata, 2018                            ses techniques de création : dessins,
       Encre et gouache sur papier                          sculpture, installation. Il se fait
       Galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois, Paris   connaître notamment pour des grandes
                                                            planches copiant des pages de
                                                            dictionnaires qu’il reprend, associant
                                                            images et textes, dialogue visuel

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et graphique, comme dans l’art de
la bande dessinée qu’il affectionne
depuis son enfance. Mais il recompose
ces pages symboles de la synthèse
de la connaissance, par un changement
d’échelle. Car elles deviennent
monumentales (2,10 m), tandis que
les personnages de ses installations
deviennent homme-dé et homme-
pion (Dice man), petits personnages
avançant de manière aléatoire, comme
des pions sur des cases de damier.

Son rapport au texte est omniprésent
dans ses dessins, aime-t-il à rappeler,
et la forme est tout aussi fondamentale.
« Je peux même dire que ce qui est
produit (et là je parle de l’ensemble
de ma production) n’est au fond que
l’illustration du texte. Ou peut-être,
plus justement, par une manière
de retournement bizarre, que le texte
en serait l’enluminure. » Au cœur de
sa création, demeurent donc le texte
et le dessin, dessins aux formats
et aux techniques particulières, mais
aussi aux vitesses particulières ;
certains sont très lents, et très travaillés,
tandis que « d’autres seront plus jetés »
pour reprendre le terme de l’artiste.

Son œuvre oscille donc entre contrainte
et aléatoire. En effet, depuis 1993,
Gilles Barbier recopie le dictionnaire,
page par page, les dimanches, arrivant
en 25 ans à un quart de la tâche
réalisée. Parallèlement, ses installations
renferment des énoncés placés sous la
case d’un damier. Par les mots, l’artiste
ouvre alors un champ des possibles.
D’une consigne claire, l’œuvre,
quelquefois multiple, prend corps.

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2E PARTIE : MÉTHODES PÉDAGOGIQUES,
       APPROCHES LUDIQUES

       3e étage                                  Salle 5
       L’exposition se poursuit à l’étage        Bevis Martin et Charlie Youle,
       supérieur avec une deuxième partie        nés en 1975 à Londres et 1977
       relative à l’enseignement et plus         à Sheffield
       précisément au jeu comme méthode          First notions C (Solids and cupcake)/
       et support de transmission du savoir,     First notions D (boxes, coins, lettuce,
       enjeux qui passionnent penseurs           cake divided into 7)
       et philosophes depuis le xviiie siècle,   Faïence émaillée, bois, médium, peinture
       de Jean-Jacques Rousseau et               FRAC Normandie Caen
       Johann Pestalozzi à Friedrich Fröbel,
       John Dewey en passant par Marie           Passionnés d’art brut et de surréalisme
       Pape-Carpantier, Ovide Decroly,           tout autant que d’objets trouvés, ce
       Maria Montessori et Célestin Freinet.     duo d’artistes anglais installés à Nantes
                                                 depuis 2003 part souvent d’une image
       Les artistes présentés dans cet           ou d’un livre d’écolier ou d’une notion
       espace revisitent les classiques          apprise à l’école, comprise ou non,
       des jeux pédagogiques et méthodes         devenant la source de leur création.
       ludiques d’enseignement pour              Ils questionnent aussi cette difficulté
       en détourner souvent le dessein           de la transmission de la connaissance
       ou les enjeux dans une nouvelle           et, de fait, s’intéressent aux objets
       compréhension, parfois amusée             pédagogiques qui sont censés atténuer
       (Martin & Youle, Chardon), analytique     cette difficulté et jouer leur rôle
       (Froment), critique (Prévieux),           de passeur.
       culturelle (Guilleminot) et souvent
       poétique (Pien).                          Ils décrivent ainsi leur démarche
                                                 et leur œuvre : « Notre projet en
                                                 cours est une investigation plus ou
                                                 moins dépourvue de directions sur la
                                                 connaissance humaine, une recherche
                                                 approximative et manuelle portant sur
                                                 les structures mentales. Nous partons
                                                 d’un point reclus de la pensée où se
                                                 trouvent réunis les divers accessoires
                                                 et les objets qui, à un moment donné
                                                 de notre vie, ont été convoqués
                                                 pour nous transmettre les notions

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