La fidélité coopérative : point d'aboutissement des relations inter-organisationnelles

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            La fidélité coopérative :
            point d’aboutissement des relations
            inter-organisationnelles

            Naouel MAKAOUI
            Enseignante-chercheuse à l’Ecole de Management de Normandie
            makaoui.n@hotmail.fr

            Cet article vise à approfondir la compréhension de la notion de la fidélité et tout
            particulièrement dans sa conception relationnelle dans le domaine industriel.
            Nous avons essayé d’identifier la nature des liens qui unissent les variables
            relationnelles de la relation acheteur-fournisseur. Nous avons posé comme
            hypothèse que les différentes dimensions de la confiance et de l’engagement sont
            positivement reliés à la construction de la fidélité de l’acheteur envers son
            fournisseur. Puis nous avons tenté de valider ces hypothèses à l’aide d’un modèle
            d’équations structurelles.
            Les résultats de notre recherche confirment notre hypothèse principale : la
            confiance et l’engagement sont étroitement liés à la fidélité coopérative dans les
            relations inter-organisationnelles. La contribution du modèle explicatif nous
            conduit toutefois à privilégier l’étude de l’engagement à celle de la confiance
            comme élément fondateur de la fidélité.

            Mots clés : relation inter-organisationnelle, confiance, engagement, fidélité,
            acheteur-fournisseur.

            Introduction                                       ce qui est consommé ». Fournier déclenche
                                                               ainsi un véritable renouveau de la recherche
            L’approche classique de la fidélité l’ap-          en adoptant une vision relationnelle.
            préhende dans une logique transactionnelle.
            Cette conception a été largement critiquée par     La fidélité est donc moins motivée par l’éva-
            plusieurs auteurs et en particulier par Fournier   luation ponctuelle d’une transaction ou d’un
            (1998) qui lui reproche de ne pas intégrer sa      produit mais plutôt par une relation durable
            dimension relationnelle. Selon elle, les nuan-     que le client a construite avec un fournisseur
            ces de la fidélité ont été occultées dans la       tout au long de ses expériences de consomma-
            recherche traditionnelle. Elle trouve que l’ap-    tion. Certains auteurs relient les attitudes aux
            proche comportementale reflète davantage           intentions de réachat dans le cas d’une rela-
            une notion d’inertie que de fidélité, et à la      tion permanente, et ce, par l’intermédiaire des
            suite, l’approche composite réduit le proces-      variables relationnelles (Morgan et Hunt,
            sus de fidélité à une « prise de décision uni-     1994 ; Gabarino et Johnson, 1999). Il est ainsi
            quement cognitive et utilitaire » et donc ne       nécessaire aujourd’hui d’envisager la notion
            permet pas de capturer les « relations talisma-    de « fidélité » en milieu industriel à la manière
            niques que les consommateurs forment avec          dont se structure l’échange et qu’elle soit mise

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                                           en perspective des échanges de type                  Ce dernier fournit un cadre théorique de la
                                           relationnel et coopératif.                           fidélité semblable à celui du Dick et Basu
                                                                                                (1994). En revanche, il s’en écarte dans la
                                           L’objectif de cette communication est d’iden-
                                                                                                mesure où il considère que le consommateur
                                           tifier les déterminants de la fidélité de l’ache-
                                                                                                pourrait devenir fidèle à chaque phase de
                                           teur envers son fournisseur en milieu
                                                                                                développement de l’attitude. La fidélité selon
                                           industriel. Autrement dit, nous avons à
                                                                                                Oliver (1999), se développe de manière
                                           répondre à la question suivante Qu’est ce que
                                                                                                séquentielle, progressive et cumulative. On
                                           l’on entend par « fidélité coopérative » en
                                                                                                obtient ainsi quatre phases : le consommateur
                                           milieu industriel? Quels sont les termes de
                                                                                                devient fidèle dans un sens cognitif d’abord,
                                           son évolution ?
                                                                                                puis dans un sens affectif, plus tard d’une
                                                                                                façon conative, et finalement d’une façon
                                           Fondement théorique                                  comportementale, ce qui est décrit en tant que
                                                                                                fidélité action.
                                           Qu’est ce que la véritable fidélité en milieu
                                           industriel ?                                         La phase « action » représente pour Oliver la
                                                                                                « vraie » fidélité. Elle reflète ainsi « un enga-
                                           Day (1969) fut l’un des premiers auteurs à dif-      gement profond qui conduit le consommateur
                                           férencier la vraie fidélité de la fausse fidélité.   à racheter le même produit, à tel point qu’il
                                           Selon lui, les achats qui ne sont pas motivés        guidera ses habitudes d’achat » (Oliver,
                                           par de fortes attitudes favorables ne sont que       1997). La fidélité « action » est plus proche de
                                           de la fausse fidélité. Dick et Basu (1994)           la fidélité relationnelle que d’une simple
                                           reprennent cette idée et développent un              inertie achat (Frisou, 2000).
                                           modèle conceptuel global de la fidélité. Dans
                                           ce modèle, ils considèrent la fidélité comme         Cette conception de la fidélité comme un pro-
                                           un concept qui relève à la fois de l’attitude, et    cessus multi-phases fournit un cadre
                                           du comportement. En croisant ces deux                théorique de la fidélité relationnelle qui la
                                           dimensions, Dick et Basu distinguent quatre          considère non pas comme un état figé mais
                                           formes de « fidélité » : la véritable fidélité, la   une succession d’états qui se construisent
                                           fausse fidélité, la fidélité latente et aucune       séquentiellement (Frisou, 2004).
                                           fidélité.
                                                                                                Dans cette nouvelle approche relationnelle,
                                           Si Dick et Basu (1994) identifient clairement        selon le cycle de vie de la relation, nous pou-
                                           ce que représente la véritable fidélité, ils ne      vons distinguer plusieurs niveaux de la
                                           prennent pas en compte ce qu’elle serait à long      fidélité au fournisseur. Ces diffreénts niveaux
                                           terme. En effet, selon N’goala (2000) pour           se replacent sur un continuum tout au long de
                                           que la fidélité dure dans le temps, elle doit        la relation allant des concepts cognitifs et
                                           reposer sur l’engagement affectif considéré          comportementaux pour arriver un concept
                                           comme « un stabilisateur de la relation au fil       multidimensionnel : fidélité relationnelle,
                                           des transactions ». Un achat répété qui n’est        qualifiée d’ « exclusive » par Crié (1999) et de
                                           pas motivé par un réel engagement ne reflète         « coopérative » par Costabile et al (2002).
                                           alors que de l’inertie ou la fausse fidélité         Dans ce contexte, parler de la fidélité de l’a-
                                           (Bloemer et Kasper, 1995).                           cheteur envers son fournisseur en milieu
                                                                                                industriel implique un lien intense entre les
                                           A l’instar de N’Goala (2000), nous pouvons
                                                                                                deux acteurs de l’échange. Elle est définie
                                           par conséquent conclure que la fidélité ne se
                                                                                                ainsi comme la forme la plus forte de la rela-
                                           réduit pas à une succession de transactions
                                                                                                tion entre l’acheteur et son fournisseur.
                                           discrètes. Elle est davantage l’expression de la
                                           relation continue. Donc la fidélité du consom-       La démarche relationnelle suppose une acti-
                                           mateur doit être conceptualisée et mesurée           vité chez le fournisseur et chez l’acheteur et
                                           dans un cadre d’analyse élargi, celui du mar-        une relation personnalisée entre les deux. Elle
                                           keting relationnel. Ainsi se pose la question        est donc bi-directionnelle et prend également
                                           suivante : la « véritable fidélité » en milieu       en compte la fidélité du fournisseur à l’ache-
                                           industriel ne serait-elle pas la fidélité            teur. La notion de réciprocité est par
                                           relationnelle ?                                      conséquent fondamentale dans la fidélité rela-
                                                                                                tionnelle. Cette idée de réciprocité est reflétée
                                           Nécessité d’introduire un processus
                                                                                                par la coopération. En effet, la coopération est
                                           relationnel et coopératif
                                                                                                un mode de management bilatéral (Ford,
                                           Parmi les premiers chercheurs qui ont intégré        1980 ; Hakansson, 1982, Salmond et Spek-
                                           la notion de l’engagement dans la définition         man, 1986 ; Hallen et al., 1987; Palmatier et
                                           de la fidélité, nous retrouvons Oliver (1999).       al., 2007b) où les deux parties engagent des

    22                                                                                                                             Vol. 18 – N°2, 2010

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            investissements ainsi que des actions coor-         mique conduisant le client à l’état de fidélité
            données et complémentaires afin d’atteindre         relationnelle considérée comme le point d’a-                                   Figu
            ensemble des objectifs communs ou indivi-           boutissement d’un processus relationnel : la
            duels. La coopération permet de créer plus de       fidélité comportementale, la fidélité mentale
            valeur que ne pourrait le faire chacun des par-     et la fidélité coopérative.
            tenaires séparément. Mais comme il arrive
            souvent qu’une des parties reçoive sa part de       Dans cette perspective relationnelle, la
            valeur plus tôt, il faut que l’autre partie ait     confiance rend possible une coopération
            assez confiance dans la relation pour attendre      durable avec les consommateurs et l’engage-
            sa part à venir (Bettencourt, 1997 ; Palmatier      ment, plus que la simple attitude générale,
            et al., 2007).                                      devient la clé de la stabilité de la relation.

            La coopération résulte d’une démarche               Le rôle de la confiance dans l’établissement
            volontaire, informelle et intentionnelle entre      de la fidélité a été étudié principalement dans
            deux partenaires de l’échange (Morgan et            les travaux de Sidershmukh et Sing (2000).
            Hunt, 1994 ; Wagner, 1995). D’ailleurs, c’est       Dans leurs recherches, ils ont montré les
            ce qui différencie la fidélité de la dépendance     influences de la confiance sur la fidélité au tra-
            (Des Garets et al., 2003).                          vers de deux processus différents. La
                                                                confiance influence favorablement les inten-                                   Sour
            La fidélité correspond à un processus volon-        tions futures de comportement des consom-
            taire, un choix libre et réfléchi, de la part des   mateurs puisqu’elle permet de réduire le
            différents intervenants du centre d’achat           risque perçu (Morgan et Hunt, 1994, Geys-
            d’établir une relation durable avec un four-        kens et al., 1996; Garbarino et Johnson,
            nisseur donné. La fidélité représente un lien       1999). Selon Sidershmukh et al. (2002),
            qui conduit l’acheteur à maintenir durable-         lorsque le fournisseur se comporte de manière
            ment un comportement coopératif et favo-            à réduire le risque perçu et en particulier le
            rable envers son fournisseur en dépit des           risque relationnel, les consommateurs ont ten-
            circonstances qu’il rencontre.                      dance à agir d’une façon coopérative envers
                                                                leur fournisseur pour maintenir cette relation
            La confiance et l’engagement :                      à travers un comportement de fidélité (Gas-
            les déterminants de la fidélité en milieu           senheimer et al., 1998).
            industriel
                                                                Le deuxième processus réside dans la percep-
            Pour conceptualiser la fidélité dans son            tion du consommateur à partager les mêmes
            approche relationnelle, plusieurs chercheurs        valeurs avec le fournisseur (Gassenheimer et
            se sont attachés à trouver des variables per-       al., 1998). Le fait de percevoir une similitude
            mettant de la caractériser. Différents modèles      des valeurs entre l’entreprise et le consomma-
            ont été avancés parmi lesquels nous retrou-         teur permet de promouvoir la réciprocité, de
            vons celui de Aurier et al. (2001) appelé la        contribuer à l’engagement relationnel de ce
            chaîne relationnelle. L’idée principale de ce       dernier et de favoriser ainsi la fidélité (Gwin-
            modèle est de faire apparaître un ensemble de       ner et al.,1998).
            concepts susceptible d’expliquer la fidélité
            relationnelle.                                      C’est ainsi que plusieurs travaux de recherche
                                                                sur la fidélité font fréquemment référence à la
            C’est aussi dans cette perspective relation-        notion d’engagement et considèrent ce cons-
            nelle que s’inscrit Costabile (2000). Il analyse    truit comme une variable indispensable à l’ap-
            la fidélité en terme de valeur dyadique qui         parition de la « véritable » fidliété (Day, 1969 ;
            résulte d’une comparaison des bénéfices et          Dick et Basu, 1994 ; Bloemer et Kasper, 1995 ;
            des sacrifices attachés à l’achat de la marque      Amine, 1998). L’engagement permet de mieux
            (valeur monadique) avec les coûts et les reve-      identifier et évaluer la volonté de développer
            nus que la marque est censée réaliser du point      une relation à long terme avec la marque (Four-
            de vue du client. Lorsque le client perçoit de      nier, 1998 ; Uncles et al., 1997). Ce facteur joue
            l’équité dans l’échange, que la valeur offerte      un rôle central dans la compréhension de la for-
            par la marque lui paraît équilibrée, le client se   mation de la fidélité et apparaît dans la littéra-
            sent alors lié à elle par la raison, par les com-   ture comme une condition nécessaire au
            portements, mais aussi par sa croyance dans         développement de la fidélité.
            l’équilibre de l’échange « une telle croyance
            basée sur le principe de réciprocité, conduit à     D’autres auteurs trouvent que l’impact de l’en-
            l’adoption des attitudes et de comportements        gagement sur la fidélité est différent selon ses
            coopératifs » (Costabile, 2000). Il distingue       dimensions. En effet, l’engagement est un
            ainsi plusieurs étapes dans le processus dyna-      concept multidimensionnel. Selon Amine

    Vol. 18 – N°2, 2010                                                                                                                  23

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mardi 22 mars 2011 13:37:22
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    Logistique & Management

                                           (1999), l’engagement affectif induit une fidé-             comme les principaux déterminants de l’exis-
                                           lité plus durable et stable alors qu’un engage-            tence d’une relation stable et durable entre
                                           ment calculé entraîne une fidélité opportuniste            acheteur et fournisseur manifestée en terme de
                                           susceptible de disparaître dès que le bénéfice             fidélité. En effet, le développement d’un com-
                                           perçu devient inférieur au coût de changement.             portement ou d’une attitude de fidélité coopé-
                                                                                                      rative n’est possible que si l’acheteur a
                                           Nous pensons comme Costabile 2000 ; Bena-                  confiance en son fournisseur et se sent engagé
                                           vent 1998… que l’engagement de l’acheteur                  dans la relation.
                                           envers son fournisseur favorise plusieurs com-
                                           portements (coopération, intention d’achat,                La majorité des études ne fait pas la distinction
                                           dépendance…) dont la fidélité comportemen-                 entre les dimensions de l’engagement et
                                           tale (Bettencourt, 1997). Ainsi nous considé-              évoque plutôt l’impact de la confiance sur l’en-
                                           rons que l’engagement est un antécédent de la              gagement « global ». Les mesures reflètent
                                           fidélité et non une dimension attitudinale de la           principalement la dimension affective de l’en-
                                           fidélité.                                                  gagement. A notre tour, nous proposons que la
                                                                                                      confiance a un impact positif direct sur l’enga-
                                                                                                      gement affectif et temporel.
                                           Modèle conceptuel et hypothèses                                      La confiance a un impact positif sur
                                                                                                         H1
                                           de recherche                                                         l’engagement affectif
                                                                                                                La confiance a un impact positif sur
                                           Pour être testé empiriquement, notre schéma                   H2
                                                                                                                l’engagement temporel
                                           conceptuel doit prendre la forme d’un modèle
                                           structurel en tenant compte des relations entre            Certaines études ont montré cet effet négatif
                                           les variables sur lesquelles portent les hypothè-          de la confiance sur l’engagement calculé
                                           ses de recherche. La figure ci-dessous présente            (Geyskens et al. 1996 ; Wetzels et al. 1998 ;
                                           notre proposition de modèle structurel testable            Wetzels et al. 2000 ; Ruyter et Wetzels 1999 ;
                                           dérivé de la spécification des variables de notre          Ruyter et Semeijn 2002 ; Ruyter et al. 2001).
                                           modèle conceptuel du rôle central de la                    Ils trouvent que si un acheteur a confiance en
                                           confiance et l’engagement dans la relation.                son partenaire, il se sent impliqué dans la rela-
                                                                                                      tion et par conséquent il devient moins « cal-
                                           Nos recherches précédentes nous amènent à                  culateur ». A l’instar des ces auteurs, nous
                                           considérer la confiance et l’engagement                    postulons les hypothèses suivantes :

                                           Tableau - La structure et la définition des variables du modèle conceptuel
                                             Variables Définitions/dimensions
                                                         La confiance est l’ensemble de croyances et d’attentes de l’acheteur que le fournisseur va agir
                                                         dans le meilleur intérêt de la relation.
                                                         Crédibilité concerne l’attente que l’acheteur puisse compter sur ce qui dit ou écrit son
                                             Confiance   fournisseur. Elle regroupe ainsi les attributions de compétence et d’honnêteté concernant la
                                                         capacité et la volonté d’un fournisseur de tenir ses promesses.
                                                         Bienveillance correspond aux bonnes intentions du partenaire à sa détermination perçue de
                                                         faire attention aux besoins et au bien- être de l’autre.
                                                       Le désir de l’acheteur de continuer avec son fournisseur une relation jugée importante avec sa
                                                       bonne volonté d’investir pour la maintenir
                                                       Engagement affectif est un sentiment positif de l’acheteur envers son partenaire d’échange. Il
                                                       repose sur l’attachement émotionnel qui se développe au cours de cette relation.
                                            Engagement
                                                       Engagement calculé est la perception d’un partenaire de maintenir la relation, en raison de
                                                       l’importance des coûts de transfert qu’engendrerait une rupture.
                                                       Engagement temporel est le désir de continuer une relation auquel s’ajoute l’intention de faire
                                                       des efforts pour la maintenir dans le temps.
                                                         La fidélité est un processus volontaire, un choix libre et réfléchi, de la part de l’acheteur
                                                         d’établir une relation durable avec un fournisseur donné. Elle représente un lien qui conduit
                                                         l’acheteur à maintenir durablement un comportement favorable envers son fournisseur en dépit
                                                         des circonstances qu’il rencontre.
                                                         Fidélité attitudinale correspond à une attitude favorable développée par l’acheteur envers son
                                                         fournisseur. Elle détermine la faculté d’une attitude « forte » à résister aux pressions extérieures
                                              Fidélité   et particulièrement aux actions de la concurrence.
                                                         Fidélité comportementale représente le désir, le souhait, la détermination ou la volonté à
                                                         émettre un comportement et permet ainsi de prédire le comportement. Plus l’intention est forte,
                                                         plus la probabilité d’induire un comportement effectif est grande.
                                                         Fidélité coopérative consiste alors à mettre en place des normes de comportement
                                                         relationnelles, c’est-à-dire que le comportement attendu est basé sur l’attente d’intérêts mutuels
                                                         pour améliorer à long terme le bien-être de la relation dans son ensemble .

    24                                                                                                                                        Vol. 18 – N°2, 2010

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                     La confiance a un impact négatif sur               La confiance a un impact positif sur la
               H3
                     l’engagement calculé.                         H6   fidélité par l’intermédiaire de
                                                                        l’engagement.
            Dans une étude longitudinale sur l’évolution
            de « l’intention de fidélité » (loyalty inten-
            tion), Johnson et al. (2006) ont montré que          Méthodologie de la recherche
            l’engagement affectif favorise la fidélité atti-     et échelles de mesure
            tudinale contrairement à la dimension cal-
            culée. Ce qui explique la suggestion de              Méthodologie de la recherche
            Rauyruen et Miller (2007) qui prône l’idée           La population de notre étude est constituée
            d’établir un climat agréable et chaleureux           des acheteurs qui appartiennent à des entre-
            avec le client si l’entreprise veut gagner sa        prises industrielles françaises possédant au
            fidélité. Cependant, les résultats ne soutien-       moins 20 salariés. En se basant principale-
            nent pas l’impact de l’engagement calculé            ment1 sur le « Guide 2008 des Décideurs            1 - Nous avons envoyé
            sur la fidélité attitudinale et comportemen-         Achats des Grandes Entreprises »2 que nous         également des questionnaires à
            tale.                                                avons établie une liste d’entreprises à contac-    « l’association acheteurs du
                                                                                                                    limousin » et au groupe yahoo
                     L’engagement affectif a un impact positif
                                                                 ter. Pour constituer la base de sondage à par-     « emploi achat »
               H4                                                tir de cette population, la procédure à choix
                     sur la fidélité                                                                                2 - Le guide 2008 des Décideurs
                     L’engagement calculé a un impact positif    raisonné s’impose en raison du manque de           Achats des Grandes
               H5
                     sur la fidélité.                            base de sondage disponible. Cette méthode          Entreprises : 5300 décideurs,
                                                                 nous paraît ainsi la mieux adaptée.                2000 sociétés, 550 grandes
            L’engagement temporel est considéré par                                                                 groupes, Point d’entrée, 6e
            plusieurs auteurs comme la composante la             L’échantillon final de notre recherche est         édition, ISBN :
            plus importante (Gundlach et al., 1995). Il          composé de 176 répondants (un taux de              978-2-9519844-5-6.
                                                                                                                    Sur les 5300 nous avons effectué
            est le désir de continuer une relation auquel        24,3%), majoritairement de grandes entrepri-       une première sélection en
            s’ajoute l’intention de faire des efforts pour       ses (plus 500 salariés) comme le montre la         éliminant les entreprises qui
            la maintenir dans le temps.                          figure ci-dessous. Compte tenu de la difficulté    n’appartiennent pas au secteur
                                                                 d’accès de notre terrain de recherche, ce taux     industriel pour réduire le
            Fullerton (2003) et Evanschitsky et al.                                                                 nombre de contacts à 800 (avec
                                                                 semble supérieur à ce qu’il est possible d’es-     une bonne représentation de
            (2006) ont montré en effet, l’impact positif
                                                                 pérer dans une enquête de ce type. Mais le         l’ensemble des secteurs
            de l’engagement temporel sur les deux
                                                                 nombre de questionnaires associés n’a pas          d’activité).
            dimensions de la fidélité à savoir attitudinale
            et comportementale. En revanche, ils trou-
            vent que l’impact de cette dimension de l’en-        Figure 1 - Le modèle « enrichi » de notre recherche
            gagement sur la fidélité est moins important
            que celui de la dimension affective.
                     L’engagement temporel a un impact
               H5
                     positif sur la fidélité.

            En milieu industriel, la confiance a été consi-
            dérée comme étant un construit central dans
            la relation d’échange (Dwyer et al., 1987;
            Moorman et al., 1993; Morgan et Hunt
            1994…). Elle résulte d’un processus anté-
            rieur à l’échange au cours duquel l’acheteur
            va évaluer la crédibilité et la bienveillance du
            fournisseur avant de lui accorder éventuelle-
            ment sa confiance. Le consommateur fidèle
            devrait ainsi montrer un niveau de confiance
            envers un fournisseur supérieur à celui des          Figure 2 - Taille des entreprises par tranche d’effectifs
            autres (Bozzo et al., 2003).
            Tout comme Chaudhuri et Holbrook (2001),
            nous postulons que la confiance a une
            influence positive sur la continuité de la rela-
            tion et ainsi les trois dimensions de la fidélité
            du partenaire de l’échange. Cependant, cet
            impact positif est également indirect par l’in-
            termédiaire de l’engagement (Zeithaml,
            1988 ; Sidershmukh et al., 2002 ; Ruyter et
            al., 2001).

    Vol. 18 – N°2, 2010                                                                                                                          25

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    Logistique & Management

                                           permis d’obtenir un nombre de questionnaires          n’ont pas permis de valider la dimension
                                           exploitable plus important. Ainsi nous devons         comportementale de cette échelle qui s’est
                                           être très prudents lors de l’analyse des résul-       avérée difficilement applicable au contexte
                                           tats. En effet, sans qu’il soit réellement pos-       particulier du milieu industriel.
                                           sible de s’assurer de la validité externe de nos
                                           résultats, nous sommes en mesure de consi-          En définitive, la majorité des variables de
                                           dérer de la validité interne de cette recherche.    notre modèle sont multidimensionnelles. La
                                                                                               prise en compte des différentes dimensions de
                                           I - Mesures des différentes variables,              ces variables nous permettra d’appréhender
                                           vérification de la validité et de la fiabilité      les fondements motivationnels de l’acheteur
                                           des échelles                                        dans sa relation avec son fournisseur.
                                           Notre recherche nécessite le développement          Nous pouvons maintenant vérifier la validité
                                           et la validation de plusieurs instruments de        de nos hypothèses de recherche et tester notre
                                           mesure. Dans cette perspective, le paradigme        modèle conceptuel.
                                           de Churchill (1979) est utilisé, ainsi que ses
                                           mises à jour proposées par Gerbing et Ander-
                                           son (1988) et Gerbing et Hamilton (1996).           Présentation et discussions
                                           Ces auteurs montrent la nécessité de commen-
                                           cer la purification par une analyse factorielle     des résultats
                                           exploratoire, puis de la compléter par une          Dans ce paragraphe, nous voulons tester les
                                           analyse confirmatoire.                              liens entre les variables clés de la relation
                                           Les résultats (Annexe) ainsi précisés attestent     acheteur-fournisseur en milieu industriel à
                                           des bonnes qualités psychométriques de              savoir la confiance, l’engagement et la
                                           l’échelle de mesure des variables utilisées         fidélité. Comme nous l’avons évoqué, des tra-
                                           dans notre modèle que nous pouvons ainsi            vaux antérieurs ont déjà validé ces liens.
                                           résumer :                                           Cependant la majorité des études ne fait pas la
                                           • La confiance : Plusieurs chercheurs dési-         distinction entre les dimensions de ces varia-
                                              gnent les dimensions de la confiance             bles. Pour la validation de nos hypothèses,
                                              comme la crédibilité et la bienveillance         nous avons fait le choix de travailler avec les
                                              bien que conceptuellement distinctes mais        modèles d’équations structurelles qui présen-
                                              opérationnellement inséparables (Morgan          tent plusieurs avantages.
                                              et Hunt 1994, Fournier 1994, Geyskens et
                                                                                               Présentation des résultats
                                              al., 1996 ; Kumar et al.,1995a/1995b…).
                                              Nos résultats confirment bien cette conclu-      Conformément aux recherches antérieures à
                                              sion et nous mesurons donc la confiance          notre hypothèse, la confiance a un impact
                                              avec une échelle globale.                        significatif et négatif sur l’engagement cal-
                                           • L’engagement en milieu industriel est bien        culé (λ=-0,250) de l’acheteur envers son four-
                                              un concept multidimensionnel dont les            nisseur. En milieu industriel, la confiance
                                              trois dimensions sont l’engagement calcu-        repose avant tout sur la qualité des relations
                                              lé, affectif et temporel. La troisième dimen-    interpersonnelles développées par l’acheteur
                                              sion de l’engagement qui mesure                  avec son fournisseur ce qui réduirait l’engage-
                                              l’uniformité et la stabilité de la relation      ment calculé. Ainsi, plus la confiance de l’a-
                                              dans le temps a été utilisée et par              cheteur est élevée, plus l’engagement calculé
                                              conséquent validée seulement par quelques        est faible. La confiance encourage l’acheteur
                                              travaux anglo-saxones (Gundlach et al.,          à investir dans la relation en augmentant l’en-
                                              1995 ; Fournier 1998 ) mais jamais dans des      gagement temporel (λ=0,146). En revanche,
                                              travaux français. L’analyse de la fiabilité et   le résultat obtenu quant à l’effet de la
                                              la validité de cette dimension indiquent des     confiance sur l’engagement affectif est non
                                              résultats satisfaisants.                         significatif.
                                           • La fidélité : Nous avons mesuré la fidélité
                                              par une échelle multidimensionnelle avec         Les résultats (annexe 2) montrent que les trois
                                              une dimension attitudinale, comportemen-         composantes de l’engagement, calculée,
                                              tale et une troisième coopérative. En vali-      affective et temporelle affectent la fidélité de
                                              dant la dimension coopérative que nous           l’acheteur envers son fournisseur de manière
                                              avons considérée comme spécifique au mi-         très différente. Conformément à notre hypo-
                                              lieu industriel, la fidélité acheteur-fournis-   thèse, l’engagement affectif augmente la
                                              seur apparaît ainsi relationnelle et             fidélité attitudinale de l’acheteur envers son
                                              coopérative. En revanche, les tests réalisés     fournisseur (l=,887).

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            Suivant à ce qui est postulé à travers notre         Deuxièmement, la présence de l’engagement
            hypothèse, l’engagement calculé a un impact          affectif, calculé ou temporel dans la relation
            positif sur la fidélité attitudinale (λ=,661). Par   permet son amélioration en favorisant la
            ailleurs, l’impact de cette variable est non         fidélité attitudinale de l’acheteur. En effet,
            validé sur la fidélité coopérative.                  comme l’a montré Amine (1999), dans le
                                                                 milieu de grande consommation, l’engage-
            Quant à l’engagement temporel, il augmente           ment affectif du client conduit à une fidélité
            aussi bien la fidélité coopérative qu’attitudi-      plus durable et stable qu’un engagement cal-
            nale mais dans une moindre mesure. L’ache-           culé qui entraîne une fidélité opportuniste sus-
            teur qui implique davantage son fournisseur          ceptible de disparaître dès que le bénéfice
            dans ses activités et ses décisions, serait plus     perçu devient inférieur au coût de change-
            disposé à coopérer durablement avec lui. Il          ment. En milieu industriel, même si l’acheteur
            faut signaler que l’impact de cette dimension        s’engage avec son fournisseur principalement
            sur la fidélité est moins important que celui de     pour des raisons économiques, il lui restera
            l’engagement affectif.                               fidèle en tolérant quelques insatisfactions pas-
                                                                 sagères en raison des coûts élevés de change-
            Afin de mesurer l’effet médiateur de l’enga-         ment du fournisseur. Ce résultat est conforme
            gement, la démarche à trois étapes de Baron et       à celui de Ruyter et al. (2001).
            Kenny (1986) décrite dans la section
            précédente a été suivie en utilisant la tech-        Nous avons trouvé que seul l’engagement
            nique des équations structurelles.                   temporel favorise aussi bien la fidélité coo-
                                                                 pérative qu’attitudinale. L’engagement tem-
            Les résultats indiquent que seule la dimension       porel comme nous l’avons défini est le désir
            temporelle de l’engagement exerce un effet           de continuer une relation auquel s’ajoute l’in-
            médiateur sur la fidélité. Cette dimension           tention de faire des efforts pour la maintenir
            exerce une médiation partielle liant la              dans le temps. Il fournit une base pour le déve-
            confiance à la dimension coopérative de la           loppement des normes sociales et, par
            fidélité. En d’autres termes, la confiance           conséquent, la fidélité attitudinale. Il permet
            exerce sur la fidélité coopérative un effet          également de régler les échanges à long terme
            direct et un effet indirect légèrement plus          et favorise ainsi la fidélité coopérative.
            important via l’engagement temporel. La
            confiance du fournisseur peut encourager l’a-        Ce résultat confirme d’une part, l’importance
            cheteur à coopérer davantage avec le fournis-        de cette dimension dans le maintien de la rela-
            seur et cela passe par sa perception de              tion et ainsi la fidélité de l’acheteur et d’autre
            maintenir la relation dans le temps.                 part, la pertinence de sa présence dans la défi-
                                                                 nition de l’engagement. D’ailleurs, elle est
            Discussion des résultats                             considérée par plusieurs auteurs comme la
                                                                 plus importante, « l’engagement n’a de sens
            Premièrement, en milieu industriel la                uniquement sur le long terme » (Moorman et
            confiance, qui repose avant tout sur la qualité      al., 1992).
            des relations interpersonnelles développées
            par l’acheteur avec son fournisseur, permet de       Troisièmement, l’engagement joue également
            réduire l’engagement calculé. Si un acheteur a       un rôle médiateur par sa dimension tempo-
            confiance en son partenaire, il se sent impli-       relle. Cette dimension exerce une médiation
            qué dans la relation et par conséquent moins         partielle reliant la confiance à la fidélité coo-
            « calculateur ». Ainsi, plus la confiance de l’a-    pérative. En d’autres termes, la confiance
            cheteur est élevée, plus l’engagement calculé        exerce un effet direct sur la fidélité coopéra-
            est faible. Ces résultats confirment largement       tive et également un effet indirect via l’enga-
            ceux de Geyskens et al. (1996) ; Wetzels et al.      gement temporel. En effet, en milieu
            (1998) et Ruyter et al.( 2001) qui ont établi        industriel, la confiance a été considérée
            également un lien négatif entre la confiance et      comme étant un construit central dans la rela-
            l’engagement calculé. Par ailleurs, contraire-       tion. Elle résulte d’un processus antérieur à
            ment à ces chercheurs nous n’avons pas pu            l’échange au cours duquel l’acheteur va éva-
            valider les hypothèses liées à l’impact positif      luer la crédibilité et la bienveillance du four-
            de la confiance sur l’engagement affectif.           nisseur avant de lui accorder éventuellement
            Nous pensons qu’un lien affectif existe entre        sa confiance. Le consommateur fidèle devrait
            l’acheteur et son fournisseur mais ce lien est       ainsi montrer un niveau de confiance envers
            davantage expliqué par des variables liées aux       un fournisseur supérieur à celui des autres
            traits de personnalité du fournisseur que par        (Bozzo et al., 2003). Ce résultat est conforme
            l’entreprise qu’il le représente.                    à celui de Chaudhuri et Holbrook (2001) qui

    Vol. 18 – N°2, 2010                                                                                                                   27

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                                           constatent dans leur étude que la confiance           Contributions méthodologiques
                                           influence positivement la continuité de la rela-
                                           tion et ainsi les dimensions de la fidélité du        Les contributions méthodologiques de cette
                                           partenaire de l’échange.                              recherche concernent le développement des
                                                                                                 échelles de mesures des variables relationnel-
                                                                                                 les en particulier la fidélité coopérative.
                                           Apports, limites et voies futures                     En marketing, les premières opérationnalisa-
                                           de recherche                                          tions de la confiance, l’engagement et la
                                                                                                 fidélité reposent généralement sur des échel-
                                           Les contributions théoriques,
                                                                                                 les de mesure «globales». Dans notre étude,
                                           méthodologiques et managériales
                                                                                                 nous avons volontairement fait le choix, con-
                                           Les contributions de cette recherche à trois          trairement à la majorité des travaux français,
                                           niveaux : théorique, méthodologique et mana-          de ne pas retenir une échelle globale pour la
                                           gérial.                                               mesure des différentes variables du modèle.
                                                                                                 L’utilisation d’une échelle globale peut créer
                                           Contributions théoriques                              la confusion dans l’interprétation des
                                                                                                 théories, des modèles et des résultats empiri-
                                           Cette recherche nous a permis ainsi de propo-         ques qui traitent ces variables. L’utilisation
                                           ser et de valider en partie, de manière empi-         des mesures globales d’engagement par
                                           rique un modèle conceptuel intégrateur pour           exemple sans prendre en considération les
                                           expliquer l’évolution de la relation ache-            motivations de l’acheteur à s’engager dans la
                                           teur-fournisseur en milieu industriel. Il sup-        relation pourrait masquer des différences
                                           pose une relation de type relationnel entre           (Geyskens et al. 1996).
                                           l’acheteur industriel et son fournisseur et il
                                           pourra servir de cadre d’analyse pour expli-          Contribution managériale
                                           quer d’autres épisodes de la vie des relations
                                                                                                 Cette recherche a une portée managériale sur
                                           inter-organisationnelles.
                                                                                                 deux points fondamentaux : la confirmation
                                           A travers nos résultats, nous avons pu montrer        de la pertinence d’une stratégie de marketing
                                           également l’importance du rôle de la dimen-           relationnel dans la relation de l’acheteur avec
                                           sion temporelle dans le développement de la           son fournisseur en insistant sur le rôle de la
                                           fidélité de l’engagement, dimension jamais            fidélité coopérative comme le point d’abou-
                                           intégrée dans les travaux de recherche en             tissement de ce processus, et la compréhen-
                                           France, La prise en compte des différentes            sion du comportement de l’acheteur envers
                                           dimensions des variables relationnelles               Internet et la prise en considération des évolu-
                                           présente un très large intérêt à la fois théorique    tions de comportement de l’acheteur.
                                           et managérial. Il pourrait, en effet, permettre
                                                                                                 Pour les acheteurs et pour les fournisseurs,
                                           une analyse plus pertinente et plus réaliste du
                                                                                                 cette recherche confirme qu’ils ont intérêt à
                                           comportement d’achat de long terme en
                                                                                                 développer de bonnes relations avec leur par-
                                           milieu industriel et laissant également entre-
                                                                                                 tenaire, puisque ces bonnes relations seront
                                           voir de nouvelles possibilités de développe-
                                                                                                 synonymes de meilleure adéquation d’une
                                           ment dans ces domaines.
                                                                                                 stabilité de la relation que cela diminuera le
                                           Cette recherche constitue également une pre-          risque perçu. C’est l’une des caractéristiques
                                           mière tentative d’intégration du facteur coo-         les plus intéressantes des marchés industriels.
                                           pératif dans l’étude de la fidélité en milieu         On observe que les acheteurs industriels, con-
                                           industriel. Le terme de la fidélité doit tenir        trairement aux individus, cherchent à stabili-
                                           compte de la notion de réciprocité de la rela-        ser leurs achats chez un fournisseur à partir du
                                           tion, notion absente dans les autres dimen-           moment où ils sont satisfaits de ses services.
                                           sions de la fidélité, qui caractérise les relations   Alors que l’individu a tendance à chercher
                                           interentreprises.                                     régulièrement la variété et la nouveauté dans
                                                                                                 sa consommation, le professionnel cherche la
                                           Nous avons alors pu établir l’existence de la         sécurité et la garantie d’un bon achat. Il est
                                           dimension coopérative de la fidélité en nous          donc fréquent de voir des partenaires indus-
                                           appuyant sur la littérature de comportement           triels travailler ensemble pendant plusieurs
                                           d’achat industriel et le marketing relationnel.       années. Cela ne signifie pas cependant, que
                                           Cette dimension était donc présente dans la           les relations sont figées. Les acheteurs indus-
                                           littérature, mais son intégration dans la défini-     triels sont tout à fait capables de changer de
                                           tion de la fidélité n’avait pas encore été            fournisseur, mais ils essaient de limiter les
                                           effectuée.                                            occasions de le faire.

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            Limites et voies futures de recherche                 Dans ce contexte, il serait intéressant de pou-
                                                                  voir étudier la problématique sous un horizon
            Malgré ses intérêts théoriques, méthodologi-          à long terme. Le temps structure l’évolution
            ques et managériaux, ce travail de recherche          des comportements de l’acheteur industriel et
            comporte certaines limites qui tiennent prin-         sa prise en compte s’impose.
            cipalement à l’approche que nous avons
            choisie. Nous présentons également des pro-           Les autres variables explicatives de la rela-
            positions de recherches afin de corriger ces          tion acheteur-fournisseur
            limites.
                                                                  Dans notre modèle, nous n’avons pu intro-
            Un contexte particulier                               duire qu’un nombre réduit de variables rela-
                                                                  tionnelles. Il serait intéressant d’étudier
            Nous avons mené notre recherche dans un
                                                                  l’influence d’autres variables relationnelles
            seul contexte : celui des acheteurs en milieu
                                                                  (le pouvoir, le risque perçu) ainsi que des
            industriel. Or dans ce milieu, un grand
                                                                  variables situationnelles, individuelles et
            nombre de décisions d’achat ne passe pas
                                                                  contextuelles. Ces variables ne sont pas à
            directement par un acheteur « professionnel »
                                                                  négliger puisqu’elles peuvent changer la
            dont c’est la fonction exclusive. De plus, il
                                                                  nature de la relation et influencer son dévelop-
            arrive que le rôle de l’acheteur soit réduit à la
                                                                  pement.
            négociation des conditions commerciales et
            qu’il ne soit pas maître de la décision d’achat.
            C’est pour cette raison qu’il est indispensable       Bibliographie
            de rappeler que la particularité de notre             Amine A., (1999), Le Comportement du
            contexte d’étude nous interdit toute générali-        consommateur face aux variables d’action
            sation hâtive des résultats. Afin de confirmer        marketing, Eds. Management et Société,
            nos hypothèses de recherche et notre modèle           ISBN 2-912647-18-5.
            conceptuel, il convient que ceux-ci soient
            appliqués avec succès dans d’autres secteurs          Aurier P., Benavent C. et N’Goala G., (2001),
            d’activités.                                          Validité discriminante et prédictive des com-
                                                                  posantes de la relation à la marque, Actes du
            Une relation particulière
                                                                  17ème Congrès de l’Association Française du
            Nous avons posé comme postulat de départ la           Marketing, Beauville, Université de Caen,
            stabilité et de la relation acheteur-fournisseur.     pp. 156-159.
            Par conséquent, les acheteurs interrogés
                                                                  Baron R.M. et Kenny D.A., (1986), The
            devaient sélectionner des fournisseurs avec
                                                                  moderator-mediator variable distinction in
            lesquels ils ont une relation durable et stable
                                                                  social psychological research: conceptual,
            pour décrire leurs relations avec eux. L’une
                                                                  strategic and statistical considerations, Jour-
            des extensions possibles de cette recherche
                                                                  nal of Personality and Social Psychology,
            serait d’interroger l’acheteur sur l’ensemble
                                                                  vol 51, n°6, pp 1173-1182.
            de ses fournisseurs. On pourrait alors, par
            exemple, comparer les clients fidèles et les          Benavent C., (2002), Site web, http://chris-
            clients recherchant la variété et identifier les      tophe.benavent.free.fr
            déterminants de ces deux types de
            comportements.                                        Bettencourt L.A., (1997), Customer volun-
                                                                  tary performance: customers as partners in
            La ponctualité de l’étude                             service delivery, Journal of Retailing, vol 7
            Le cadre de notre étude nous a contraint de           n°3, pp 383-406.
            mener une enquête en coupe instantanée bien           Bloemer J. et Kasper H., (1995), The complex
            que les enquêtes longitudinales et dynami-            relationship between consumer satisfaction
            ques soient plus appropriées au contexte de           and brand loyalty, Journal of Economic Psy-
            notre recherche, étant donné que les notions          chology, vol 16 n°3, pp. 11-29;
            utilisées dans notre modèle.
                                                                  Bozzo C, Merunka D. Et Moulins J-L, (2003),
            Une perspective instantanée a limité la               Fidélité et comportement d’achat: ne pas se
            connaissance de l’impact à long terme des             fier aux apparences; Décisions Marketing,
            facteurs de notre modèle. Or, sans connaître ni       vol 32, pp. 9-17.
            le marché, ni l’acheteur et ni l’histoire de la
            relation il est délicat de juger de la stabilité de   Chaudhuri A et Holbrook M.B., (2001), The
            la relation de l’acheteur avec son fournisseur        chain of effects from brand trust and brand
            au moment de l’enquête.                               affect to brand performance: the role of brand

    Vol. 18 – N°2, 2010                                                                                                                  29

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                                           loyalty, Journal of Marketing, vol 65, April,      Frisou J., (2004), le contrôle du comporte-
                                           pp. 81-93.                                         ment de fidélité: premier jalons pour une
                                                                                              théorie dynamique et éclectique, thèse de doc-
                                           Costabile M., (2000), A Dynamic Model of           torat, sous la direction de Benavent C, Univer-
                                           Customer loyalty, paper presented at the com-      sité de Pau et des pays de l’Adour.
                                           petitive 16th Annual IMP Conference Sep-
                                           tember 7 th 9th..                                  Fullerton G., (2003), When does commitment
                                                                                              lead to loyalty? Journal of Service Research,
                                           Costabile M; Raimondo M.A et Miceli G.,            vol 5 n°4, pp. 333-344.
                                           (2002); A dynamic model of customer
                                           loyalty: Some empirical evidences supporting       Garbarino E. et Johnson M.S., (1999), the dif-
                                           a customer buying behavior model; American         ferent roles of satisfaction, trust, and commit-
                                           Marketing      Association.      Conference        ment in customer relationships, Journal of
                                           Proceedings                                        Marketing, April, pp. 70-86.
                                           Crié D., (1999), Les produits fidélisants dans     Gassenheimer, J.B., Houston F.S. et Davis
                                           la relation client-fournisseur: Identification,    C.J., (1998), The Role of Economic Value,
                                           analyse des effets et implications pour la         Social Value, and Perceptions of Fairness in
                                           prévision de l’évolution de la relation; Thèse     Interorganizational Relationship Retention
                                           pour le Doctorat en Sciences de Gestion,           Decisions, Joumal of the Academy of Marke-
                                           IAE/Université des Sciences et Technologies        ting Science, vol 26 n°4, pp. 322-337.
                                           de Lille.
                                                                                              Geyskens I., Steenkamp J.B.E.M., Scheer
                                           Day G., (1969); A two-Dimensional Concept          L.K. et Kumar N., (1996), The effects of trust
                                           of Brand Loyalty; Journal of Advertising           and interdependence on relationship commit-
                                           Research, vol 9, pp. 29-36.                        ment: a transatlantic study, International
                                                                                              Journal of Research in Marketing, vol 13,
                                           Des Garets V, Lamarque E. et Plichon V.,           pp. 303-17.
                                           (2003), La relation entreprises-clients: de la
                                           fidélité à la dépendance, Revue française de       Gundlach G., Achrol, R.S., et Mentzer J.T.,
                                           gestion, vol 3 n°144, pp. 23-41.                   (1995), The structure of commitment in
                                                                                              exchange, Journal of Marketing, vol 59
                                           Dick A.S. et Basu K., (1994), Customer             January, pp. 78-92.
                                           Loyalty: Toward an Integrated Conceptual
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Vol18_N2_2010_Print.ps                                                          30
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mardi 22 mars 2011 13:37:24
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