LE NOUVEL HORIZON DE LA TRANSFORMATION DIGITALE
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LE NOUVEL HORIZON DE LA TRANSFORMATION DIGITALE
Pejman Gohari Nouamane Cherkaoui Jean Barrère LE NOUVEL HORIZON DE LA TRANSFORMATION DIGITALE 9 piliers pour développer une stratégie data-driven
Couverture : Studio Dunod Mise en page : PCA © Dunod, 2022 11 rue Paul Bert, 92240 Malakoff www.dunod.com ISBN : 978-2-10-083078-7 Pour protéger les concepts et les schémas développés dans le livre par les auteurs, un dépôt de brevet a été effectué auprès de l’INPI pour valoir ce que de droit. Pejman Gohari - Nouamane Cherkaoui - Jean Barrère p001-200_9782100830787.indd 4 07/12/2021 16:27
SOMMAIRE INTRODUCTION 9 DIAGNOSTIC #1 Pourquoi devenir data-driven est une urgence 15 Nouveaux rapports de force et nationalisme technologique 18 L’accélération du capitalisme numérique 21 La mutation des comportements ou quand PARTIE 1 Narcisse se digitalise 24 La permanence des crises ENJEUX ET dans un monde incertain 25 PATHOLOGIES DES DIAGNOSTIC #2 TRANSFORMATIONS Les pathologies de la transformation La transformation digitale, 27 DATA-DRIVEN c’est changer deux fois 29 Un révélateur des pathologies de la transformation 31 Ce qui bloque : les barrières structurelles 32 Ce qui exaspère : les barrières d’ordre organisationnel 34 Ce qui aveugle : les barrières comportementales 37
PILIER #1 Une culture d’entreprise mise en récit 45 Des valeurs et principes d’or non négociables 47 Culture data, la quête du Graal 49 PILIER #2 Des makers aux commandes 51 Makers iconiques du secteur numérique 54 Des makers partout 55 PILIER #3 Des talents sur les épaules des géants 57 Des talents au mindset data 59 La gestion de la diversité comme source de valeur 59 Une gestion des talents favorisant la rétention 61 PARTIE 2 PILIER #4 Une stratégie tournée vers l’innovation 63 LES 9 PILIERS De l’art d’améliorer, d’anticiper et de disrupter 65 DES ORGANISATIONS L’innovation, meilleure alliée des entreprises traditionnelles 68 DATA-DRIVEN PILIER #5 Le capital en données, principal facteur de croissance 71 Un actif essentiel gouverné et sécurisé 73 Un actif stratégique partagé et monétisé 74 PILIER #6 L’obsession du client 77 Modèle relationnel et approche expérientielle 79 L’A/B testing pour améliorer l’expérience en continu 81 L’exploitation des données comportementales 83
PILIER #7 Des prises de décision éclairées par la data et l’IA 85 Trois types de modèle de décision 87 Les quatre types d’intelligence artificielle 88 PILIER #8 La technologie comme catalyseur de la valeur 91 Un système d’information exponentiel 93 Cybersécurité, l’enjeu de la confiance 95 PILIER #9 Vélocité, au-delà de l’agilité et de la résilience 97 Du time to market au speed to market 99 La vélocité de transformation 100 La simplification à l’extrême 101 PHASE #1 Incarner et fédérer PARTIE 3 (culture, makers, talents) 105 Favoriser l’adoption de comportements LA TRANSFORMATION et pratiques essentiels à la transformation 108 EN ACTION(S) Faire émerger des makers capables de mener à bien votre transformation 113 Aligner votre promesse employeur et vos pratiques sur l’accélération du monde 117
PHASE #2 Décider et agir (innovation, centricité client, data et IA) 127 Déployer une stratégie orientée vers l’innovation digitale 131 Recentrer vos efforts sur la création de valeur pour vos clients, vos partenaires et votre écosystème 139 Sécuriser, piloter et valoriser votre capital informationnel 145 PHASE #3 Transformer de manière itérative (technologies, décision, vélocité) 159 Déployer une architecture IT urbanisée, ouverte, évolutive et résiliente 162 Mettre le potentiel des solutions analytiques et de l’Intelligence Artificielle au cœur de vos processus de décision 169 Rendre votre organisation véloce en conjuguant agilité, simplification et confiance 174 ET APRÈS ? 181 GLOSSAIRE TECHNIQUE 185 INDEX DES ENTREPRISES 191 BIBLIOGRAPHIE 193 REMERCIEMENTS 197
9 INTRODUCTION INTRoDUCTIoN Pourquoi écrire encore sur la transformation digitale, la data et l’intelligence artifi- cielle ? Tout n’a-t-il pas été déjà dit, écrit, filmé, twitté, posté, webcasté, partagé, relayé, liké et même théorisé ? Et pourtant… retour au réel, celui des organisations. Avec le nez dans le guidon et le court terme pour horizon. Résultat : en matière de transfor- mation par la data, de bascule vers le digital, d’innovation avec l’IA, le constat est sans appel : transformation 0, statu quo 1. Les auteurs de ce livre le savent bien, eux qui sont en première ligne pour opérer la transformation systémique des organisations. Quelles sont les pathologies chroniques qui empêchent la transformation d’advenir ? Le dire n’est pas le faire, et la puissance performative de la théorie digitale s’arrête en général à son nombre de followers. Remisez au placard ces sémillants pitcheurs TedX, oubliez ces retours d’expérience lisses et sans saveur, zappez les grilles d’analyse sans fin, haro sur ce flux de communication insensé ! Aucun savoir, aucune connaissance, aucune pratique à en espérer. Certes notre mémoire n’est pas encore celle d’un poisson rouge, mais elle est loin des capacités de celle de Mnémosyne, déesse de la mémoire vénérée par les Grecs ! Le dire n’est pas le faire, et le faire, c’est d’abord poser la question du « pouvoir faire » : la transformation n’est pas une somme de briques à agencer, mais bien un système en interaction. Il faut apprendre à penser et agir comme Tesla ou Amazon, et comprendre les lames de fond politico- économiques dans lesquelles ces mutations s’inscrivent : accélération perpétuelle, technologies exponentielles, innovation darwinienne, constitution d’oligopoles, souveraineté numérique et concurrence entre États, monnaies virtuelles, économie de l’attention, individualisme, incertitude et permanence des crises. Quel est l’ADN des organisations qui ont su s’inventer, s’adapter, muter, se métamor- phoser, jusqu’à impulser la cadence de l’économie numérique ? De quels instruments de navigation se doter pour garder le cap à la fois de l’urgence et du long terme ? Quel est l’impact de l’IA sur la stratégie, les opérations, la concurrence ? Comment repenser la place du client ? Comment conjuguer révolution des comportements avec révolution par la technologie ? Répondre à ces questions démarre par une suggestion : retomber en enfance. Les yeux frais, ouverts au monde tel qu’il va, nos biais cognitifs en pause, retrouvons notre capacité d’étonnement. Voici la partition pour une nouvelle musique ! Premier roulement de tambour, le soutien à l’innovation. Plus précisément, un contexte politico-socio-culturel avec des structures étatiques qui soutiennent massivement l’innovation technologique par le jeu de la commande publique, par le truchement des fonds d’investissement, par une multitude de dispositifs pour stimuler la recherche et le développement d’applications industrielles. À l’ère du
10 capitalisme numérique, quelle place pour l’Europe ? Les lois de protection des LE NoUvEL hoRIZoN DE LA TRANSFoRmATIoN DIgITALE données ne constituent-elles pas un frein puissant à l’innovation, voire de manière plus insidieuse, un alibi pour justifier un immobilisme anachronique ? Les géants de la Silicon Valley n’ont-ils pas, dans leur jeunesse, été biberonnés à la commande publique américaine ? Leurs pendants asiatiques, les BATX1, qui relèvent d’abord de l’art de la copie chinoise, n’ont-ils pas été abondamment accélérés par les fonds publics, avant d’être férocement repris en main par le parti unique, dans un climat de guerre froide qui ne dit pas son nom ? Deuxième roulement de tambour, un maker. Au poste de commandement, il ne faut pas seulement un dirigeant ou un décideur, mais un individu habité par une vision, porté par une imagination débordante, et empreint d’une forte dose d’habileté et de pragmatisme pour transformer le réel. Les pieds dans la glaise et la tête dans les étoiles. Habité, dans sa capacité à produire un « story-making », par un impératif caté- gorique kantien : « je peux parce que je dois », comme une sorte de transcendance qui permet dans l’organisation le primat du collectif sur l’individu et le dépassement de cette dialectique. Troisième roulement de tambour, le capital en données. Au-delà du capital matériel et financier, le capital en données devient le facteur primordial de la croissance des organisations. Affirmons-le haut et fort : «la donnée, c’est comme le sang, c’est vital et il faut que ça circule2 » pour servir un usage, améliorer une pratique, prendre une décision, faire émerger du nouveau, gagner des parts de marché, conserver un temps d’avance. Un avantage informationnel, c’est un avantage concurrentiel. Aussi faut-il s’employer à sécuriser, gérer, valoriser, et pourquoi pas partager et monétiser ce patrimoine. Quatrième roulement de tambour, le système d’information*. Si le capital de données est le facteur de croissance des organisations, alors le système d’information est précisément le principal levier d’accumulation de ce capital. Alors, étonnons-nous qu’autant de dirigeants sautent sur leur chaise comme des cabris, clamant haut et fort « intelligence artificielle ! », « digital ! », « data ! », « business intelligence ! », tout en disposant de systèmes d’information antédiluviens et en allouant des budgets SI qui, sans être dérisoires ni ridicules, ne sont pas à la mesure des enjeux. Enfin, de l’humilité avant toute chose. Si pour se transformer, se réinventer, se perfec- tionner, se dépasser, il faut aller vite, alors il faut aussi accepter les échecs. Accepter d’avoir mal. Ne nous y trompons pas, une transformation, ça secoue l’organisation, ses hommes, ses processus, ses systèmes. Autrement dit, si ça ne fait pas mal, c’est que ça ne se transforme pas ! Embrasser la dialectique du changement suppose de donner du sens au collectif et à l’individu : une signification, une direction et de la saveur. Et puisque le vent souffle fort, il faut se donner un cap et le tenir. 1. BATX désigne les quatre géants chinois : Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi. Ils sont spécialisés respecti- vement dans les moteurs de recherche, l’e-commerce, les réseaux sociaux et les télécommunications. 2. Arnaud Caudoux, directeur-général adjoint : discours aux collaborateurs, Bpifrance, janvier 2021. * Les termes techniques suivis d’un astérisque sont définis dans le glossaire en fin d’ouvrage.
11 «REGARDE-MOI INTRoDUCTIoN BEAU CIEL, VRAI CIEL, QUI CHANGE ! APRÈS TANT D’ORGUEIL, APRÈS TANT D’ÉTRANGE OISIVETÉ, MAIS PLEINE DE POUVOIR, JE M’ABANDONNE À CE BRILLANT ESPACE […] LE VENT SE LÈVE !… IL FAUT TENTER DE VIVRE !3 » Paul Valéry 3. ValÉrY P., (1933), « Le Cimetière marin », in Œuvres de Paul Valéry, Le Sagittaire, éditions du Sagittaire, 3, p. 157-163.
PARTIE I ENJEUX ET PATHOLOGIES DES TRANSFORMATIONS DATA-DRIVEN
Au milieu de la foule, l’échine courbée, l’œil rivé à son smartphone. Dans son entre-soi, la grande estime de soi. Au milieu d’un océan de data, son petit îlot de sécurité cognitive, de garantie affective, de singularité toute artificielle. L’Homme nouveau est arrivé : connecté, auto-centré, pixélisé, tout bébé hébété qu’il est dans son désir insatiable de possession et de satisfaction immédiate. N’est-il pas temps, comme les anciens, de lever les yeux et contempler le ciel ? Des étoiles. Des questions. Une quête. Vient le monde et viennent les faits. Des vertiges. Des ruptures. Vertige démographique. Rupture écologique. Vertige géopolitique. Rupture Technologique1. On relie et on relit : le devenir data-driven des organisations relève d’un caractère vital. Pas d’avenir sans transformation radicale. Or, si nombreuses ont été les tentatives, et si déceptifs les résultats. Osez le regard dans le rétroviseur. Connaître son passé pour façonner son avenir, tel est le mantra de tous les révolutionnaires. Nous vous invitons en bon généalogiste à identifier les causes racines des pathologies des transformations digitales. 1. Inspiré des quatre vertiges recensés par Edouard Philippe lors de son discours prononcé pour la création de son parti « Horizons » le 9 octobre 2021.
DIAGNOSTIC #1 POURQUOI DEVENIR DATA-DRIVEN EST UNE URGENCE
« LE LOGICIEL DÉVORE LE MONDE » Mark Andreessen, fondateur de Netscape
17 En 2013, le philosophe et sociologue allemand Hartmut Rosa livre un essai magistral1 PoURQUoI DEvENIR DATA-DRIvEN EST UNE URgENCE sur l’accélération technique, l’accélération des transformations sociales et l’accé- lération du rythme de vie. L’accélération est le phénomène expérientiel majeur de notre modernité. La vitesse devient synonyme de liberté et de multiplication des possibles. Ce phénomène contraint les organisations à un rythme de transformation élevé. Car le constat est sans appel, il faut désormais moins de dix ans pour qu’un nouvel acteur d’ampleur mondiale apparaisse et vienne soit « disrupter » un marché existant, soit en créer un nouveau. Si pour les acteurs en place, il n’est plus possible de prévoir, au-delà de quelques années, quel sera l’état de leur marché et quels seront leurs concurrents les plus menaçants, il est fondamental de comprendre les composantes de cette lame de fond. C’est d’abord une dynamique d’ordre technologique : croissance des télécom- munications, puissance de calcul, capacité de stockage, explosion des données, et développement de l’Intelligence Artificielle. Cette dernière revêt un caractère absolument stratégique. Le président russe l’a formulé ainsi devant une assemblée d’étudiants à Iaroslavl : « L’intelligence artificielle est l’avenir, non seulement pour la Russie, mais pour toute l’humanité. Quiconque occupera la place de leader de l’IA deviendra le maître du monde2 ». Comment définir l’IA ? Sans contour ni délimi- tation précise : ce n’est pas un objet physique comme la machine à vapeur, ni une énergie comme l’électricité, ni une discipline comme l’informatique. L’IA recouvre un concept évolutif, une nouvelle manière de combiner diverses sciences et techno- logies : mathématiques, informatique, neurosciences, télécommunications, ordina- teurs quantiques, etc. On prête à l’IA toutes sortes de pouvoirs quasi miraculeux comme : automatiser les processus complexes, identifier les tendances latentes dans un secteur particulier grâce à l’exploitation des données historiques, modéliser des données prédictives de façon à rendre plus rapides et plus sûrs les processus de prise de décision, etc. Les modèles d’IA ont besoin de données et – cela tombe à point – nous en produisons en quantités exponentielles : en 2020, avec la crise sanitaire et le recours massif au télétravail, 64,2 zettaoctets de données ont été créés à l’échelle mondiale. Avec la démocratisation croissante des objets connectés et l’avènement de la technologie 5G*, un seuil astronomique des 2 000 zettaoctets devrait être franchi à l’horizon 20353 (environ 2 500 fois le nombre de grains de sable estimé sur l’ensemble des plages de la planète !). Intelligence artificielle, ordinateurs quantiques, nanotechnologies, monnaies vir- tuelles : l’innovation et la vitesse de transformation des entreprises se jouent désor- mais sur la toile de fond d’un nouveau rapport de force entre les États, dont les rivalités se déplacent sur le plan du nationalisme technologique, après une période de globalisation échevelée. 1. RoSa H., Accélération. Une critique sociale du temps, La Découverte, 2013. 2. PouTine V., président de la Fédération de Russie, 4 septembre 2017. 3. Rapport de Statista « Digital Economy Compass 2019 », 2019.
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