Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamique - Etude de cas - Resumen ejecutivo

 
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Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamique - Etude de cas - Resumen ejecutivo
Le quinoa, un aliment de base des Andes
dans un marché dynamique
Etude de cas

Resumen ejecutivo
Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamique - Etude de cas - Resumen ejecutivo
2   responsAbility | Etude de cas: le quinoa
Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamique - Etude de cas - Resumen ejecutivo
Note de synthèse

Nourriture de base depuis des millénaires dans                    Ces producteurs ont confirmé l’engagement d’Irupana
les Andes, le quinoa a enregistré une forte hausse de             envers des pratiques agricoles durables. Ils ont aussi
sa consommation aux Etats-Unis et en Europe. La                   affirmé que la confiance qu’ils avaient envers Irupana
demande est telle qu’elle a provoqué une augmenta-                était un point fort de leur relation commerciale avec
tion rapide des prix et des volumes de production.                elle.

Cette flambée des prix du quinoa a bénéficié aux                  Irupana est capable d’offrir un bon prix aux produc-
cultivateurs de Bolivie. Cependant, elle a aussi créé             teurs et de les payer rapidement, grâce au finance-
un climat commercial plus compétitif, qui s’est                   ment que lui accordent des partenaires comme
traduit par la propagation de pratiques agricoles non             responsAbility. Par conséquent, cette organisation
durables menaçant la viabilité à long terme de                    peut garantir un revenu plus élevé et plus prévisible
cette culture.                                                    aux paysans. Ces facteurs sont essentiels pour la
                                                                  continuité de cette relation de confiance qu’elle
Les parties prenantes de Bolivie ont réalisé des                  entretient avec ses producteurs. Irupana bénéficie
progrès en encourageant une diffusion plus large                  aussi de la souplesse de responsAbility en matière
d’une approche durable. En outre, un certain nombre               de garanties et de son expérience du marché
d’entreprises demeurent engagées envers de saines                 pour combler d’éventuelles lacunes de liquidités.
pratiques agricoles, servant de modèles à ce secteur.

Irupana Andean Organic Foods, une entreprise dans                       Le quinoa: un superaliment
laquelle responsAbility investit depuis 2013, compte
plus de 200 petits paysans affiliés. Son objectif est                   Le quinoa contient beaucoup plus de protéines, de
d’abord de booster la consommation de grains récoltés                   calcium, de magnésium, de potassium, de fer et
dans les Andes, ensuite d’accroître la production de                    de zinc ainsi que de vitamines A et E que le blé, le
produits bios et à forte valeur ajoutée pour que les                    maïs, l’orge, le riz et l’avoine. En outre, le quinoa
producteurs puissent accéder à des marchés prêts à                      n’a pas de gluten et est la seule plante comestible
                                                                        connue à fournir les principaux acides aminés.
payer plus et promouvoir la durabilité à long terme de
ce secteur par un engagement envers des pratiques
organiques et durables.

responsAbility a rencontré des producteurs qui
travaillent avec Irupana afin de comprendre l’impact
que cette organisation a sur leurs conditions de vie.

                                           responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                             3
Le quinoa, un aliment de base des Andes dans un marché dynamique - Etude de cas - Resumen ejecutivo
Sommaire

Note de synthèse                                                         3

Editorial                                                                5

Le quinoa, de mère de tous les grains
à superaliment                                                           6

Irupana: engagée envers la durabilité                                    9

Nouvelles perspectives pour les producteurs
de quinoa                                                                12

Le rôle du partenaire financier                                          16

4                              responsAbility | Etude de cas: le quinoa
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Cher lecteur,

Depuis son lancement en 2011, le fonds de                       les questions que nous devons nous poser.
responsAbility dédié aux petites exploitations agri­-           Ces questions ont amené notre équipe de recherche
coles a financé plus de 90 organisations enga­-                 à réaliser une étude en profondeur du marché
gées envers des pratiques durables tout au long de              mondial du quinoa. Leur recherche a été complétée
la chaîne de valeur agricole. Au début, les inves­              par des entretiens effectués sur place avec des
tissements se concentraient sur le café, puis ils se            producteurs affiliés à Irupana Andean Organic Foods
sont progressivement étendus à d’autres matières                (Irupana), une organisation bolivienne exportatrice
premières agricoles. C’est ainsi que, depuis 2012,              de quinoa, avec laquelle responsAbility collabore
le fonds a plus que doublé, en termes relatifs,                 depuis 2013.
ses investissement dans les grains et les semences,
qui s’élèvent désormais à 21,5% de ses actifs                   Cette étude de cas vise à montrer comment le
sous gestion. En fait, la croissance de la demande              modèle d’affaires d’Irupana profite aux producteurs
de financement par des organisations du quinoa                  tout en s’opposant activement à certains effets
en Bolivie et au Pérou a été un moteur important de             négatifs du boom du quinoa. En même temps, cette
cette tendance.                                                 étude démontre pourquoi l’accès à des facilités
                                                                de financement offertes par des partenaires comme
responsAbility souhaite établir des partenariats avec           responsAbility est la clé du succès d’entreprises
de telles organisations pour répondre à leur besoin             telles qu’Irupana.
grandissant de financement, en particulier parce que
le boom de la consommation de quinoa crée des                   L’investissement de responsAbility dans Irupana
opportunités pour la production durable. Toutefois,             reflète notre engagement plus vaste envers l’encoura-
des rapports suggèrent que la hausse de la demande              gement à des modèles d’affaires novateurs qui
mondiale pourrait également avoir certains effets               combinent la durabilité financière avec des objectifs
négatifs.                                                       sociaux et/ou environnementaux.

Pour déterminer notre stratégie d’investissement                Bonne lecture,
dans la région, il est nécessaire d’éclaircir nombre
de points importants. Nous avons notamment besoin               Gaëlle Bonnieux
de savoir si la hausse des prix du quinoa a rendu               responsable Agriculture Debt Financing
cet aliment de base inaccessible aux familles à bas
revenu de Bolivie et du Pérou. Cette hausse bé­
néficie-t-elle vraiment aux petits paysans et l’expan-
sion rapide de la production constitue-t-elle une
menace pour l’environnement et la viabilité à long
terme de ce secteur? Telles sont, parmi d’autres,

                                          responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                 5
Quinoa: de mère de tous
les grains à superaliment

«Mère de tous les grains» et plante sacrée pour les Incas, le quinoa a été cultivé                        Quinoa: la «mère des grains» des
depuis des milliers d’années par les populations andines. Ce grain a joué un rôle                         Incas

central dans les pratiques religieuses des sociétés précolombiennes. De nos
jours, il demeure une source majeure d’alimentation pour des millions de gens
en Bolivie, en Equateur, au Pérou et au Chili.

Demande internationale croissante
Le quinoa est resté quasiment inconnu en dehors de la région des Andes                                    Une source alternative de
jusqu’aux années 1970. L’héritage de la colonisation espagnole – qui a margi-                             nourriture pour les pays souffrant
                                                                                                          d’insécurité alimentaire
nalisé sa production au profit du blé et de l’orge – allié à une culture difficile et
aux prix bas à la production a découragé sa culture et sa consommation ailleurs.
Depuis quelques années cependant, le marché mondial du quinoa a été boule-
versé. Ses qualités nutritives exceptionnelles ainsi que sa résistance et son adap-
tabilité à des conditions climatiques et de sol extrêmes ont conduit l’Organisa-
tion des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à promouvoir le
quinoa comme source alternative d’alimentation dans les pays souffrant d’insé-
curité alimentaire aiguë. En même temps, pour répondre à la demande des
consommateurs soucieux de leur santé, les exportations ont quadruplé entre
2007 et 2013, en s’élevant de 12 263 à 53 813 tonnes. Cette hausse a été par-
ticulièrement forte en 2013, décrétée «Année internationale du quinoa» par                                Forte hausse de la demande
l’ONU. Ces chiffres montrent que cette graine est passée du statut d’aliment de                           mondiale de quinoa entre 2007
                                                                                                          et 2013
base amérindien à celui de superaliment omniprésent.

L’envol de la demande profite aux producteurs
Tandis que la demande augmente rapidement aux Etats-Unis, au Canada et en                                 95% de la production de quinoa
Europe, la production reste concentrée sur les sols volcaniques fragiles des hauts                        sont concentrés dans l’Altiplano
                                                                                                          bolivien et péruvien
plateaux de Bolivie et du Pérou. En 2013, ces deux pays fournissaient plus de
95% du quinoa consommé dans le monde. Des projets sont en cours pour étendre
sa culture à d’autres lieux, mais il est peu probable que l’on assiste à une aug-
mentation substantielle dans un proche avenir. Ce déséquilibre structurel entre
production limitée et demande en forte progression provoque une flambée des
prix (voir fig. 1).

En 2009, le prix moyen du quinoa traditionnel se situait à USD 30 par quintal.                            Les prix locaux ont décuplé entre
En décembre 2013, il avait décuplé à plus d’USD 300. Même s’il s’agit vrai-                               2009 et 2013

semblablement d’un plafond – en décembre 2014, le quinoa se négociait à entre
USD 170 et USD 2001 – des prix élevés deviendront la norme à moyen terme.
Les coûts de production ont aussi augmenté dans la foulée, car la compétition
pour les ressources – travail, pesticides, engrais et machines – s’est intensifiée,
mais la production reste profitable.

L’explosion de la demande s’est traduite par une augmentation appréciable des
revenus des producteurs de la région. Près de 70% des habitants de l’Altiplano

1
    Mercadero, «Challapata Market Update», 25 novembre 2014.

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Figure 1 : Essor du quinoa, exportations mondiales et prix
                                                                                                                                                      USD/
          Tonnes                                                                                                                                      tonne

         40 000                                                                                                                                       8000

         35 000                                                                                                                                       7000

         30 000                                                                                                                                       6000

         25 000                                                                                                                                       5000

         20 000                                                                                                                                       4000

         15 000                                                                                                                                       3000

         10 000                                                                                                                                       2000

           5000                                                                                                                                       1000

              0                                                                                                                                       0
                         2007           2008              2009           2010             2011            2012             2013           2014*

               Bolivie          Pérou          Équateur          FOB Arica (USD/t)                                Source: FAO 2014/INE, * état août 2014

Production, exportations et prix se sont envolés sur une courte période

bolivien et péruvien – dont la grande majorité sont des descendants amérindiens                                                   Le fort accroissement de la
– vivent avec moins d’USD 1 par jour. Etant donné que pour la plupart d’entre                                                     demande de quinoa s’est traduit
                                                                                                                                  par une hausse notable des
eux, le quinoa est la première source de revenu,2 la hausse marquée de son prix                                                   revenus pour une grande partie de
a dégagé des augmentations notables de revenu pour une partie importante de                                                       la population
cette population. Nombreux sont les habitants à pouvoir vivre maintenant de ma-
nière plus confortable et plus digne (voir pages 12 ss pour plus de détails).

Modification des habitudes de consommation
Passant de nourriture de base à superaliment, la transition du quinoa a égale-                                                    La transition du quinoa à un
ment modifié les schémas de consommation locaux. Face à la hausse des prix,                                                       superaliment a eu un effet sur la
                                                                                                                                  consommation locale
les foyers à bas revenus n’ont plus pu acheter de quinoa et se sont rabattus sur
le pain et le riz, dont le prix n’a pas augmenté autant. Même les producteurs ont
réduit leur consommation pour profiter des nouveaux prix. Sachant combien le
quinoa est plus nutritif que le blé, le maïs, l’orge et le riz (voir encadré p. 3),
cette évolution a suscité des craintes que la malnutrition ne s’aggrave.

Cette tendance mérite d’être surveillée de près, pourtant, les recherches indiquent                                               Depuis 2008, la consommation
que cet effet négatif a pu être exagéré. Tout d’abord, il convient de ne pas grossir                                              du quinoa par habitant de Bolivie
                                                                                                                                  a presque sextuplé
l’importance du quinoa dans l’alimentation de la Bolivie en général. En effet, se-
lon la FAO, Oruro est la seule province de ce pays à tenir compte de ce grain dans
l’indice des prix à la consommation (IPC), ce qui signifie que d’une manière gé-
nérale, la consommation de quinoa en dehors des régions productrices est très
basse.3 Ensuite, la consommation de quinoa par habitant de la Bolivie a en fait
augmenté ces six dernières années de 0,35 kg en 2008 à 2,00 kg en 2014.4 Cette
progression s’explique par le fait que comme seule une partie de la production sa-
tisfait aux exigences de l’exportation, l’accroissement de la production a rendu ce
grain plus disponible à la consommation locale. Enfin, s’il est vrai que, vendant
plus, les producteurs consomment moins de leur propre récolte, leur choix est par-
faitement rationnel en reflétant les nouvelles réalités économiques. Tous les pro-
ducteurs interrogés ont déclaré qu’ils pouvaient désormais acheter plus de viande
et de légumes et même s’offrir parfois des produits de luxe.

2
     igler, B. «Poverty, Inequality and Human Development of Indigenous Peoples of Bolivia», Georgetown Center
    G
    for Latin American Studies, 2009.
3
    FAO (2013) «Food Outlook: Biannual Report on Global Food Markets», juillet 2013, pp. 63 – 64.
4
    Instituto Boliviano de Comercio Exterior (INE data), 2013.

                                                                  responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                                        7
Diffusion de pratiques agricoles non durables
Comme le nombre de paysans et d’entreprises privées qui se battent pour gagner
des parts de marché a augmenté, le boom du quinoa a aussi entraîné un climat
commercial plus compétitif et plus incertain. Ce développement a accéléré la dif-
fusion de pratiques agricoles peu respectueuses de l’environnement et suscep-
tibles de mettre en danger la productivité à long terme de l’écosystème.

La culture du quinoa dans l’Altiplano bolivien s’étend très rapidement, passant de                                    La culture du quinoa s’est
51 000 hectares en 2009 à 120 000 en 2014. La production s’est déplacée des                                           étendue rapidement en se
                                                                                                                      mécanisant plus
versants des Andes vers les plaines, qui contiennent moins d’argile, de matières
organiques et d’éléments fertilisants. Des périodes de jachère de six à huit ans ont
fait place à une production presque continue et l’utilisation de charrues à disques
et de lourdes machines – qui sont inadaptées aux sols fragiles, volcaniques et sa-
blonneux de la région – a augmenté5. Ces tendances ont été malencontreusement
aggravées par le gouvernement, qui s’est fortement focalisé sur l’industrialisation
dans le cadre de son Plan national de développement du quinoa.

En outre, la culture du quinoa est restée une activité largement pastorale jusque                                     L’accroissement des cultures
dans les années 1980. Depuis, les familles ont commencé à vendre leurs lamas                                          risque d’avoir un impact
                                                                                                                      préjudiciable à la fertilité à long
et leurs moutons pour acheter des équipements et étendre la production aux pâ-                                        terme des sols
turages. Cette tendance s’est accélérée ces dernières années, provoquant une
chute brutale de la disponibilité d’engrais naturels, qui a nécessité de recourir
plus à des solutions alternatives de moindre qualité. L’ensemble de ces pratiques
a suscité des craintes quant à leur impact à long terme sur la fertilité du sol, met-
tant directement en péril la durabilité de ce secteur.6 Comme le quinoa représente
la principale source de revenus pour ces cultivateurs, cette évolution pourrait avoir
de sérieuses conséquences pour les populations locales.

Malgré ces difficultés, plusieurs raisons incitent à demeurer optimiste. Tout                                         Des parties prenantes encou-
d’abord, la Bolivie a lancé des recherches en matière de technologies et de pra-                                      ragent des pratiques et technolo-
                                                                                                                      gies durables pour aider à la
tiques, afin de pouvoir accroître l’efficacité des cultures tout en réduisant leur im-                                transformation du secteur local
pact sur l’environnement. Plusieurs parties prenantes – incluant des coopératives
de paysans, des prêteurs internationaux, le Centro de Tecnologías Sostenibles et
des sociétés privées – collaborent pour transformer les méthodes de culture. Elles
espèrent préserver les revenus supplémentaires engendrés par les petits cultiva-
teurs de quinoa bio, tout en diminuant, voire inversant, l’impact sur l’environne-
ment.7 Ensuite, un certain nombre d’entreprises restent engagées envers des pra-
tiques agricoles saines, servant ainsi de modèle à l’ensemble du secteur. Irupana
– qui bénéficie des investissements de responsAbility depuis 2013 – en offre un
bon exemple.

5
    Kerssen, T. «Food Sovereignty and the Quinoa Boom in Bolivia», Journal of Peasant Studies, septembre 2013.
6
    Antonio, K. «The Challenges of Developing a Sustainable Agro-Industry in Bolivia: the Quinoa Market»,
     Duke University, 2011.
7
     IDB et FOMIN. «Bolivia: Non-reimbursable Technical Cooperation Funding for the Sustainable Organic Production
      in the Bolivian Highlands project», 24 juin 2014.

8                                                                 responsAbility | Etude de cas: le quinoa
Irupana: engagée envers
la durabilité

Irupana Andean Organic Foods a été fondée en 1985 par Javier Hurtado, un ac-             Irupana Andean Organic Food
tiviste politique et un pionnier des méthodes organiques de culture. Il cherchait        développe de nouveaux marchés
                                                                                         pour les produits agricoles
à donner le pouvoir aux communautés indigènes de sa Bolivie natale, tout en
restaurant leur fierté dans la production alimentaire locale. Javier Hurtado s’est
efforcé de développer de nouveaux marchés pour les produits agricoles en gé-
nérant, dans la foulée, des opportunités économiques pour les producteurs. Il a
été rejoint, en 1990, par Martha Cordero, une professeure et spécialiste en nu-
trition, qui supervise, aujourd’hui, les activités de l’entreprise.

Cette organisation, qui a démarré comme une petite entreprise d’achat direct
de café, est devenue l’une des principales sociétés du pays spécialisées dans la
nourriture bio et naturelle. Elle fournit à la fois les marchés locaux et internatio-
naux avec un large assortiment d’aliments andins, tels que le quinoa, l’ama-
rante, le cañahua et le tarhui.

La connaissance approfondie que Javier Hurtado et Martha Cordero ont de l’éco-
logie du pays, leur capacité de construire une relation de confiance avec les pro-
ducteurs et leur engagement envers des produits bios de qualité irréprochable
ont été les fondements de la réussite de l’entreprise.

Depuis 2013-2014, Irupana s’approvisionne en quinoa de grande qualité au-                Un quinoa de grande qualité
près d’un noyau de plus de 200 producteurs affiliés. La plupart sont de petits           provient de plus de 200 petits
                                                                                         producteurs affiliés
paysans qui cultivent chacun moins de deux hectares de terrain. En témoignage
de son effet considérable et persistant sur la vie de ces producteurs, Irupana a
été désignée, en 2002, comme l’une des principales entreprises sociales du
monde par la Schwab Foundation for Social Entrepreneurship, une émanation
du World Economic Forum.

    Irupana Andean Organic Food

    Fondation: 1985
    Siège: El Alto, Bolivie
    Producteurs affiliés: 200+ (quinoa)
    Produits de base: quinoa, amarante, cañahua et tarhui
    Magasins locaux: 17
    Distinction: Schwab Foundation, Social Entrepreneurship, 2002

Améliorer la sécurité alimentaire
Au fil des ans, Irupana a prouvé son engagement envers l’amélioration de la sé-          Irupana est impliquée dans
curité alimentaire locale, comme en témoigne sa participation à plusieurs pro-           plusieurs programmes gouverne-
                                                                                         mentaux de sensibilisation à
grammes de sensibilisation du public à l’importance de l’alimentation, élaborés          l’alimentation
par le gouvernement bolivien. En 2002, l’entreprise a développé une recette de
pain enrichi aux céréales et légumes andins, qui est devenue un modèle de pe-
tit-déjeuner dans le cadre du programme gouvernemental en faveur des cantines

                                              responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                    9
scolaires. Comme cette recette a été choisie par les écoliers eux-mêmes, elle a
représenté une étape importante dans les efforts accomplis par Irupana en vue
de rendre les ingrédients locaux appréciés par la population.

En 2007, Irupana a été sélectionnée pour produire de barres de céréales et des                     Des mesures sont prises pour
préparations favorisant l’allaitement maternel dans le cadre d’une extension des                   lutter contre la baisse de la
                                                                                                   consommation de quinoa par la
programmes gouvernementaux à l’alimentation scolaire et à la santé maternelle.                     population locale
En lien avec ces programmes, Irupana produit aujourd’hui 160 000 à 180 000
barres et 60 000 portions de préparations par mois, contribuant ainsi à lutter
contre la baisse de la consommation locale de quinoa parmi les couches défa-
vorisées de la population.

Transformer la perception du quinoa
Ces activités ne sont pas seulement sensées au point de vue commercial, mais                       Irupana défie la discrimination
elles sont aussi au cœur de la mission d’Irupana qui consiste à contrer la discri-                 entourant la consommation de
                                                                                                   produits locaux en Bolivie
mination qui entoure la consommation de produits locaux. «En Bolivie, certaines
personnes qualifient le quinoa de «comida de indios» (nourriture pour Indiens)
pour le dénigrer,» explique Martha Cordero. «Associer l’identité indigène à un
grave préjugé est un gros problème et nous nous employons jour après jour à
changer cette perception. Nous cherchons à donner une nouvelle image au
quinoa de manière à rendre les Boliviens fiers de leur héritage national.»

En plus de ces programmes nationaux, Irupana possède 17 magasins locaux qui                        Des produits à valeur ajoutée sont
vendent des produits à valeur ajoutée comme des barres de céréales, du lait et                     distribués par 17 magasins locaux

de la farine. Ces magasins donnent à Irupana une vaste présence pour combattre
les stéréotypes négatifs associés au quinoa, tout en assurant la stabilité du mar-
ché de ses produits. Pour garantir que ses produits correspondent bien au goût
local, le directeur de la société voyage régulièrement sur l’Altiplano pour ren-
contrer ses habitants et échanger des idées pour de nouvelles préparations. Si
les exportations de quinoa représentent maintenant la majorité de ses revenus,
Irupana tient à ce que la nourriture traditionnelle du pays soit aussi appréciée
localement.

Un producteur sur le marché de Challapata tient une poignée de quinoa. Alors que ce grain tend à
être associé aux consommateurs occidentaux relativement riches et conscients de leur santé, sa
consommation en Bolivie est souvent victime d’un préjugé.

Concentrée sur des pratiques bios et durables
Dès le début, Irupana s’est engagée envers la production durable et organique,                     Un engagement envers une
considérant que celle-ci est partie intégrante de sa philosophie et essentielle au                 production organique et durable
                                                                                                   fait partie intégrante de la
succès à long terme de son modèle d’affaires. Hormis sa participation aux pro-                     philosophie d’Irupana

10                                                    responsAbility | Etude de cas: le quinoa
grammes gouvernementaux précités, Irupana adhère aux principes écologiques
dans l’ensemble de sa chaîne de valeur. Comme l’affirme Martha Cordero: «Nous
sommes persuadés que toute la production agricole peut et doit reposer sur des
principes organiques et durables et sur le concept que la relation entre l’homme et
la nature devrait être basée sur la réciprocité. C’est pourquoi nous nous engageons
pleinement envers la production bio, en collaborant étroitement avec nos produc-
teurs de manière à s’assurer que nos activités améliorent à terme la sécurité ali-
mentaire des populations indigènes.»8

Persuader les producteurs de continuer d’adhérer aux méthodes bios peut cepen-                         Une stratégie à trois volets pour
dant s’avérer difficile dans le contexte actuel où les prix du quinoa conventionnel                    promouvoir la production bio
                                                                                                       parmi les fournisseurs
sont élevés. Ce qui signifie que la prime pour le quinoa bio, dont le coût de produc-
tion est beaucoup plus élevé, est faible. Irupana a adopté une stratégie à trois vo-
lets pour encourager ses fournisseurs à cultiver bio. Premièrement, l’organisation
subventionne l’achat de produits phytosanitaires et d’engrais organiques ainsi que
de machines agricoles. Deuxièmement, elle fournit une assistance technique
­importante en organisant, trois fois par an, des séminaires sur la production orga-
 nique pour chacun de ses groupes de producteurs. Troisièmement, elle paie tous
 les coûts de la procédure d’obtention de la certification bio pour tous ses produc-
 teurs; ce qui représente un investissement conséquent car cette procédure prend
 au moins trois ans. Selon Primo, un agronome employé par Irupana, le calendrier
 pour convertir son champ à la production organique est le suivant:

        Calendrier de la conversion de la production conventionnelle
        à la production bio

        AN 1      Changer d’intrants et nettoyer le terrain des résidus conventionnels
        AN 2      Maintenir le terrain exempt de produits chimiques et autres impuretés
        AN 3      Achever la transition, maintenir le terrain exempt de résidus chimiques
        AN 3      Faire évaluer le terrain pour obtenir la certification bio
        Source: Irupana 2014

Outre qu’elle réduit l’impact de la production sur l’environnement, la certification                   En agissant en tant que
bio donne aux producteurs accès à des marchés plus stables et payant des prix plus                     partenaire de long terme des
                                                                                                       producteurs, Irupana inspire
élevés. Freddy, un producteur local qui travaille depuis près de vingt ans avec Iru-                   confiance dans les pratiques
pana, affirme: «Les producteurs savent ce qu’ils font. Il est normal qu’ils s’efforcent                durables
de pousser la production au maximum en ce moment. C’est là où Irupana inter-
vient. Elle les persuade en effet de l’intérêt à avoir une vision à longue échéance,
en les convaincant qu’ils s’en sortiront mieux en s’engageant envers des pratiques
plus durables. Car ils ont en Irupana un partenaire qui les accompagnera long-
temps.»

Freddy a gagné une connaissance approfondie des méthodes de production bio                             Une assistance technique sur les
quand il était employé d’Irupana. Aujourd’hui, il n’est pas seulement l’un des pro-                    méthodes de production bio
                                                                                                       profite aux associations de culture
ducteurs les plus fiables de la société, mais encore il gère une organisation dénom-                   du quinoa
mée AYNI qui fournit une assistance technique à cinq associations différentes de
culture du quinoa, qui comptent chacune plus de trente producteurs. «Presque
tout ce que je sais de la production organique, je l’ai appris d’Irupana et de son
fondateur Javier Hurtado.»

8
    Mission et vision, Irupana (voir www.irupanabio.com).

                                                            responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                  11
Nouvelles perspectives pour
les producteurs de quinoa

Comme indiqué plus haut, Irupana s’approvisionne en quinoa de grande qualité                                                       Les petits cultivateurs de quinoa
auprès d’un groupe de base de 200 producteurs affiliés, dont la plupart sont de                                                    profitent directement de leur
                                                                                                                                   coopération avec Irupana
petits paysans cultivant moins de deux hectares de terrain. Cette section étudie
l’effet du boom du quinoa sur leurs revenus, soulignant pourquoi les producteurs
d’Irupana sont particulièrement bien placés.

La hausse de la demande de quinoa a eu un impact fort et direct sur les reve-                                                      Les producteurs ont vu leurs
nus des producteurs. Sur la base des prix et des coûts de production actuels,                                                      revenus croître de manière
                                                                                                                                   significative à la suite de la
un petit paysan possédant un hectare de terrain peut générer un profit net                                                         hausse de la demande
d’USD 1470 à 2780 par an.9 Ce qui signifie qu’avec deux hectares, il peut ga-
gner près d’une fois et demie le salaire annule minimum du pays, qui a été re-
levé à USD 2500 en avril 2014. En outre, les prix devraient chuter à USD 80
par quintal pour que la production ne soit plus rentable. Plusieurs études10
ainsi que des entretiens menés par l’auteur montrent que les revenus nets des
producteurs sont aujourd’hui nettement plus élevés que dans les années écou-
lées (voir fig. 2).

      Figure 2: Profitabilité de la culture du quinoa (par hectare), aux prix de 2014*

       5000                                                                                                                                          3500

       4500

                                                                                                                                                            Gain net (Revenu-coûts de production)
       4000                                                                                                                                          2800

       3500

       3000                                                                                                                                          2100

       2500

       2000                                                                                                                                          1400

       1500

       1000                                                                                                                                          700

        500

          0                                                                                                                                          0
                 USD 170         USD 185        USD 200         US 215         USD 230        USD 245          USD 260       USD 275     USD 290

                                                          Prix de vente à Challapata, en USD (par quintal)**

              Revenu           Coûts de production            Gain net (axe de dr.)

       Source: Irupana 2014
       * Hypothèse: production de16 quintaux par hectare (moyenne nationale); estimation des coûts de production du quinoa bio dans la partie
       haute de la fourchette, comprenant: travail, intrants, machines et transport.
       ** Peuvent être considérés comme représentatifs du prix à la production.

Aux prix de 2014, un petit paysan avec 2 hectares de terrain peut gagner 1,5 fois le salaire minimum.

9
    Cela correspond à une étude réalisée en 2011 par Katherine Antonio qui a estimé le gain net à USD 1137 par hec-
      tare au prix de vente d’USD 95 par quintal. Antonio, K. «The Challenges of Developing a Sustainable Agro-Industry in
      Bolivia: the Quinoa Market», Duke University (2011), pp. 23 – 25.
10   
      Les exemples comprennent: E. Avitabile, «Impact of the Quinoa Boom on Bolivian Family Farmers», FAO, 2013.

12                                                                responsAbility | Etude de cas: le quinoa
De surcroît, les producteurs d’Irupana sont dans une position particulièrement                                                 Pour chaque quintal de quinoa,
bonne. Tout d’abord, Irupana paie à ses producteurs une prime de fidélité d’USD                                                Irupana paie une prime de fidélité
                                                                                                                               à ses producteurs affiliés
7 à USD 15 par quintal. Ce qui signifie qu’ils gagnent un supplément d’USD
110 à USD 240 par hectare (dans l’hypothèse où ils produisent 16 quintaux par
hectare, correspondant à la moyenne nationale). Ensuite, Irupana les aide à dé-
gager un revenu supplémentaire dans la mesure où le quinoa bio se vend à un
prix plus élevé que le quinoa conventionnel. Puis, grâce à ses équipements der-
nier cri de lavage, de séchage et de tri – conçus et construits en Bolivie par le
Centro de Producción de Tecnologías Sostenibles – Irupana peut traiter de plus
grandes quantités de quinoa bio pour l’exportation. Ces équipements permettent
ainsi aux producteurs de vendre une plus grande partie de leur récolte à des prix
plus élevés. Enfin, les étroites relations qu’Irupana entretient avec des acheteurs
internationaux fournissent à ses producteurs un accès stable au marché, ren-
dant possible une planification à long terme.

Le boom du quinoa, l’expérience d’un producteur
Max (27 ans) est un producteur de quinoa de Challapata en Bolivie. Aussi loin                                                  Le boom du quinoa a transformé
qu’il s’en souvienne, il a planté et récolté du quinoa, comme ses parents et ses                                               la vie des producteurs, qui
                                                                                                                               disposent désormais de plus de
grands-parents avant lui. Assis dans l’échoppe que sa famille possède mainte-                                                  revenus après la récolte
nant dans le centre de Challapata. Max explique comment la flambée récente
des prix du quinoa a changé sa vie.

«Dans ma vie de producteur de quinoa, il y a clairement un avant et un après.
Quand j’étais jeune, nous avions de la peine à joindre les deux bouts par la vente
du quinoa uniquement. Je me rappelle avoir vendu de l’eau à la gare routière
d’Oruro pour gagner quelques sous. En grandissant, j’ai vu beaucoup de mes
amis et membres de ma famille se rendre à La Paz pour y trouver du travail. Pour-
tant, je suis resté avec mes parents et nous avons finalement réussi.

Depuis lors, Challapata a été transformé. Il y a plus de voitures et de camions,
et nous pouvons nous payer certains luxes, comme des vacances sur les rives du
lac Titicaca. Même si les coûts de production du quinoa ont augmenté ces der-
nières années – le prix des engrais organiques ont décuplé, par exemple – il nous
reste plus d’agent après la récolte qu’autrefois. J’ai ainsi pu m’acheter récem-
ment une remorque pour aider à transporter mon quinoa des champs au marché
et notre échoppe marche bien.

Cependant, cette flambée des prix a également apporté son lot de problèmes.                                                    La flambée des prix a également
Tout d’abord, bon nombre de personnes, qui ont quitté la région quand j’étais                                                  apporté son lot de problèmes

jeune, reviennent, revendiquant le droit de cultiver la terre. Certes, nous n’al-
lons pas lutter là contre, mais cela provoque un ressentiment parmi ceux d’entre
nous qui sont restés et il y a eu des conflits. A cela s’ajoute le fait que la contre-
bande de quinoa en provenance du Pérou ne cesse d’augmenter, provoquant une
chute des prix à Challapata.11 Enfin, de nouvelles sociétés s’établissent que nous
ne connaissons pas ou en qui nous n’avons pas confiance.

Dans ce climat toujours plus incertain, notre relation avec Irupana prend d’au-                                                La relation avec Irupana est plus
tant plus d’importance. Cela fait maintenant plus de treize ans que je vends du                                                importante que jamais dans un
                                                                                                                               climat toujours plus incertain
quinoa à Martha Cordero. Elle nous connaît moi et ma famille et je la connais.
Nous connaissons également Primo (l’agronome de la société) et Nikode (res-
ponsable de l’approvisionnement), qui tous deux vivent ici à Challapata. Je sais
que si je leur livre mon produit, je serai bien payé et à temps.»

11
      ’est une question très controversée, les autorités péruviennes et boliviennes s’accusant mutuellement de contrebande.
     C
     Cependant, des rapports récents sur le marché de Challapata semblent confirmer les dires de Max. En effet, les prix
     du quinoa ont chuté ces derniers mois à cause de la contrebande de produits provenant du Pérou. Pour en savoir plus:
     Valdez, C. «Influx of cheap Peruvian quinoa riles Bolivia», Associated Press, 21 novembre 2014, et d’autres articles.

                                                                     responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                                 13
A g. Un champ de quinoa. A dr. Culture du quinoa, un superaliment, sur l’Altiplano bolivien

Accès à du financement avant la récolte
Outre ces avantages, Irupana demeure la seule source de financement avant la                                  Les banques ont accru leurs
récolte pour la plupart de ses producteurs. Malgré un décret12 demandant au                                   crédits aux grandes sociétés
                                                                                                              agricoles, laissant les petits
secteur financier d’accroître ses prêts à l’agriculture, ce n’est pas demain que                              paysans en plan
les petits et moyens cultivateurs seront intégrés dans le système. Le secteur du
quinoa demeure trop artisanal, fragmenté et volatil pour attirer les institutions
financières classiques. Etant donné le peu d’importance des emprunts deman-
dés par les petits paysans et les coûts très élevés de leur traitement (nécessitant
souvent de longs voyages vers les zones rurales pour vérifier les activités géné-
ratrices de revenus et les garanties), le risque est trop important et non rentable.
Par conséquent, les banques ont augmenté leurs crédits aux grandes sociétés
et organisations agricoles, laissant les petits producteurs en plan. Ce désavan-
tage est d’autant plus grave que les petits cultivateurs ont désespérément be-
soin de plus de financement avant la récolte pour améliorer sa qualité et son ren-
dement.

Irupana investit un temps et des ressources considérables pour aider ses produc-                              En octroyant du financement
teurs à remplir les formulaires de demande de prêt, à réunir les documents re-                                avant la récolte, Irupana bénéficie
                                                                                                              d’un approvisionnement plus
quis et à les accompagner à la banque. Comme l’explique Martha Cordero: «Outre                                fiable en produits de grande
notre intérêt personnel à aider les gens dont nous prenons soin, notre société bé-                            qualité
néficie également du meilleur accès de nos producteurs à du préfinancement. En
effet, cela nous rassure que nous aurons suffisamment de produits de grande
qualité pour satisfaire aux contrats préétablis avec nos acheteurs.» Tant que ces
difficultés empêcheront les banques de soutenir plus directement les produc-
teurs de quinoa, Irupana restera la seule source de préfinancement pour la plu-
part de ses adhérents à court et à moyen terme.

Une relation basée sur la confiance
Au-delà des avantages en termes de revenu, d’assistance technique et d’accès                                  La relation entre les producteurs
au financement, le facteur que les producteurs ont mentionné comme étant le                                   et Irupana est basée sur la
                                                                                                              confiance
plus important dans leur relation avec Irupana était la confiance. Comme indi-
qué plus haut, l’augmentation du nombre de cultivateurs et d’entreprises pri-
vées soucieux d’accroître leur part de marché a rendu ce commerce plus concur-
rentiel et incertain. Un autre producteur local, Doña Ronaldina, explique: «Il y
a actuellement tellement d’intermédiaires et de sociétés traversant Challapata,
certains sont ici aujourd’hui et disparus demain, nous ne pouvons pas avoir
confiance. L’un de mes amis a été berné de plusieurs quintaux de quinoa par
l’une de ces sociétés. Un acheteur s’est rendu à sa ferme – lui évitant les coûts

12
     Asamblea Legislativa Plurinacional de Bolivia. ‘Ley 393: Ley de Servicios Financieros’, 2013.

14                                                                 responsAbility | Etude de cas: le quinoa
et les tracas du transport jusqu’à Challapata – et lui a proposé un prix plus élevé.
Ensuite, il est revenu la semaine suivante, et la suivante pendant quatre se-
maines d’affilée. A la cinquième semaine, il a chargé son quinoa en promettant
de revenir aussitôt pour le paiement. Mon ami ne l’a jamais revu. C’est pourquoi
la confiance est si importante. Nous vendons notre quinoa à Martha et Nikode
depuis plus de onze ans maintenant et avons toujours été bien payés et dans les
temps.»

Afin de conserver la confiance de ses producteurs, Irupana doit être capable de                                              Irupana s’est engagée à traiter ses
leur verser des avances. Dans leur étude de la chaîne de valeur du quinoa, La-                                               producteurs de manière
                                                                                                                             équitable; ce qui implique de les
guna et al. ont découvert que dans les systèmes de contrat – utilisés par la plu-                                            payer rapidement
part des entreprises privées – les producteurs doivent attendre parfois plusieurs
mois avant d’être intégralement payés. Cette situation montre que l’entreprise
est en position de force pour négocier avec eux, ce qui est souvent très frustrant
pour les producteurs13 Durant les interviews, ces derniers ont fréquemment loué
Irupana de ne pas les faire attendre pour obtenir leur dû. Irupana a confirmé
qu’elle pratique ainsi avec la plupart de ses producteurs. Toutefois, il est diffi-
cile de maintenir les liquidités nécessaires afin de pouvoir les payer à la livrai-
son. C’est pourquoi la relation entre responsAbility et Irupana est d’une impor-
tance capitale.

Superaliment prêt à être expédié: sacs de quinoa blanc ou royal (chenopodium quinoa)

13
      aguna, P. et al. «Del Altiplano Sur Boliviano hasta el Mercado Global: Coordinación y Estructuras de Gobernancia en
     L
     la Cadena de Valor de la Quinua Orgánica y del Comercio Justo», Agroalimentaria N° 22, janvier-juin (2006).

                                                                   responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                                 15
Le rôle du partenaire
financier

L’arrivée d’acteurs disposant de ressources financières importantes et préoccu-         Avant de travailler avec res-
pés uniquement par le rendement a mis la pression sur des sociétés comme Iru-           ponsAbility, Irupana avait de la
                                                                                        peine à payer ses producteurs
pana. Avant de collaborer avec responsAbility, la faible disponibilité de finance-      à l’avance en raison de la
ments locaux faisait qu’Irupana avait des difficultés à payer ses producteurs à         disponibilité limitée de finance-
l’avance. Par conséquent, elle n’avait pas d’autre choix que de les régler qu’après     ment local

avoir été elle-même payée par les importateurs, généralement trois à six mois
plus tard. Cette situation menaçait doublement les objectifs sociaux et finan-
ciers d’Irupana. Premièrement, elle mine le bien-être des cultivateurs dont le
quinoa est, pour la plupart, l’unique source de revenu. Les retards de paiement
perturbent leur vie quotidienne en les empêchant d’investir dans les intrants et
le travail nécessaire à l’amélioration de la productivité de leur champ. Deuxiè-
mement, si la relation entre Irupana et ses producteurs se détériore, la société
a plus de peine à obtenir les produits dont elle a besoin pour remplir ses obliga-
tions locales et internationales.

Pour permettre à Irupana de couvrir ses besoins de liquidités à court terme et
de payer ses producteurs à l’avance, responsAbility lui a octroyé, en août 2013,
un prêt en fonds de roulement s’élevant à 1 million de dollars. Selon Martha Cor-
dero: «Sans le crédit de responsAbility, nous n’aurions pas été en mesure de ré-
gler nos producteurs à temps au prix qu’ils méritent. Comme le marché est de-
venu très compétitif, nous aurions sans doute perdu certains producteurs au
profit de concurrents qui ne partagent pas nos objectifs en matière sociale et en-
vironnementale.»

Exigences de garantie souples pour faciliter un crédit
Martha Cordero a ajouté que la société avait tenté d’obtenir un crédit en fonds         responsAbility a accepté les
de roulement, mais que sa demande avait été rejetée par manque de sûretés ap-           contrats d’exportation en garantie
                                                                                        de son prêt à Irupana, lui donnant
propriées. Comme les prêteurs locaux n’acceptent en garantie que des actifs im-         ainsi un accès important au
mobiliers ou des hypothèques – qu’Irupana avait déjà gagées pour étendre ses            financement
capacités de traitement – elle ne disposait plus d’autres moyens pour assurer le
financement nécessaire. Le prêt de responsAbility, garanti par les contrats conclu
avec des importateurs des Etats-Unis ou d’Europe, est arrivé à point nommé. Il
a permis à Irupana de régler immédiatement ses producteurs, renforçant au pas-
sage leurs relations et s’assurant leurs produits de qualité.

Irupana étend actuellement ses capacités de traitement, cherchant à tirer pro-
fit de la hausse de la demande de biens à valeur ajoutée provenant des marchés
nationaux et internationaux. Quant à responsAbility, il demeure un partenaire
engagé tandis qu’Irupana subit une métamorphose passionnante.

Une relation exemplaire
La relation que responsAbility entretient avec Irupana témoigne de son engage-
ment plus large d’investir dans des entités qui enregistrent une réussite finan-

16                                           responsAbility | Etude de cas: le quinoa
cière en améliorant l’existence de vastes couches de la population par le biais          responsAbility cherche à investir
de leurs produits et services. L’amélioration de la production, l’accès aux mar-         dans des entités qui enregistrent
                                                                                         une réussite financière en
chés, les relations commerciales et les positions de négociation des petits pro-         améliorant les conditions de vie
ducteurs constituent l’un des côtés de l’approche de responsAbility. Mais de             de vastes couches de la
l’autre, la société dirige ses investissements exclusivement vers des organisa-          population

tions opérant dans des secteurs liés au développement qui s’engagent envers
des pratiques sociales et environnementales responsables. Etant donné la pres-
sion extrême que le boom du quinoa exerce sur le tissu social et environnemen-
tal des communautés de l’Altiplano bolivien, ces critères sont très importants.
Soucieux de la dégradation des sols et de son impact sur la viabilité à long terme
de cette agriculture, responsAbility a défini d’autres critères d’éligibilité qui ex-
cluent tout investissement dans un producteur, transformateur ou exportateur
bolivien de quinoa qui ne s’engage pas envers des pratiques bios et durables.
responsAbility estime qu’il est essentiel de s’assurer que le quinoa reste, à long
terme, une source stable de nourriture et de revenu pour les petits producteurs.

Conclusion
Le quinoa est réputé pour être l’un des aliments les plus nutritifs au monde. Par        La forte demande de quinoa
conséquent, la demande va poursuivre sa progression entraînant un élargisse-             profite aux producteurs mais
                                                                                         recèle certains risques dont il
ment des limites de sa zone de culture. Le quinoa est une plante résistante et           convient de tenir compte pour
adaptable, de sorte que d’autres pays vont développer et commercialiser des va-          assurer le développement durable
riétés adaptées à leurs propres écosystèmes. Mais dans un proche avenir, la pro-         de ce secteur

duction restera concentrée en Bolivie et au Pérou. Pour la culture locale, le bien-
être des producteurs et la durabilité environnementale, cette extension de la
production recèle des risques considérables. Il est dès lors important que les
parties prenantes internationales soutiennent des projets et des modèles d’af-
faires propres à réduire ces risques. En investissant dans des sociétés comme
Irupana, responsAbility défend le développement de conditions de vie durables
pour les cultivateurs de quinoa, tout en améliorant les perspectives à long terme
de ce secteur.

                                              responsAbility | Etude de cas: le quinoa                                  17
A propos de responsAbility

responsAbility Investments AG est, dans l’investissement servant au développe-
ment, l’un des principaux gestionnaires d’actifs au monde, spécialisés dans les
secteurs liés au développement des économies émergentes. Ces secteurs com-
prennent les domaines de la finance, de l’agriculture, de l’énergie, de la santé
et de la formation. responsAbility met du financement sous la forme de dette
ou de prises de participation à la disposition d’entreprises non cotées dont les
modèles d’affaires ciblent les couches à bas revenus de la population. Ce fai-
sant, ces entreprises soutiennent la croissance économique et le progrès social.
responsAbility offre aux investisseurs, tant privés qu’institutionnels, des solu-
tions de placement gérées professionnellement. Fondé en 2003, responsAbility
gère pour USD 2,6 milliards de fonds investis dans plus de 530 entreprises situées
dans plus de 90 pays. La société, dont le siège est à Zurich, possède des bureaux
à Hongkong, Lima, Luxembourg, Mumbai, Nairobi, Oslo et Paris. Parmi ses action-
naires, elle compte de grands noms de la place financière suisse et ses propres col-
laborateurs. responsAbility est soumis à la surveillance de l’Autorité fédérale de
surveillance des marchés financiers FINMA.

Par le biais de son fonds dédié à l’agriculture, responsAbility investit dans toute
la chaîne de valeur agricole, en se concentrant sur les organisations qui mani-
festent un engagement fort envers le négoce et/ou la production durables. Les in-
vestissements sont en majorité réalisés dans des économies en développement et
des marchés émergents. Ils sont diversifiés dans plus de trente matières premières
agricoles. Le fonds gère actuellement plus de 80 millions de dollars, investis dans
76 organisations de 37 pays. Cette forte croissance et cette large diversification
ont été obtenues grâce à une présence accrue de responsables des investissements
sur les différents continents. Parmi les facteurs ayant contribué au succès de cette
expansion, il y a lieu de citer la gestion active du portefeuille et l’efficacité de la
procédure conjointe d’investissement.

Pour en savoir plus
Cette étude ce cas est disponible sur le site www.responsAbility.com/multimedia/
fr, de même que toutes les études, publications et webcasts de responsAbility.

                     A propos de l’auteur
                      David Diaz est analyste en recherche auprès de responsAbility
                      Invest­ments AG. Il est titulaire d’une licence en économie et
                      philosophie de l’Université de Columbia et d’un master de Politi­-
                      ques Publiques (Sécurité et Etudes des conflits) de l’Institut
                      d’Etudes Politiques de Paris (Sciences Po). Il est certifié «Expert
     in Microfinance» par l’Ecole de Finance et Management de Francfort. Avant de
     rejoindre responsAbility en 2013, David Diaz a travaillé comme consultant auprès
     de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et en
     qualité d’assistant juridique auprès de Cleary Gottlieb Steen & Hamilton.

     David Díaz, Research Analyst
     david.diaz@responsAbility.com, +33 1 49 21 26 27

18                                                  responsAbility | Etude de cas: le quinoa
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