Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management

La page est créée Grégory Guillon
 
CONTINUER À LIRE
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Juin 2019

                                        RBC GESTION DE PATRIMOINE

 Perspectives                                                              mondiales
    Perspectives du Comité des Ser vices-conseils en gestion mondiale de portefeuille

                                                                               Les armes
                                                                               de la guerre
                                                                               commerciale
                                                                               Alors que Beijing et Washington
                                                                               campent sur leurs positions,
                                                                               nous faisons le point sur la
                                                                               guerre commerciale et nous nous
                                                                               penchons sur les raisons qui
                                                                               poussent les États-Unis à cibler les
                                                                               compétences de la Chine en haute
                                                                               technologie.

                                                                               Eric Lascelles | Page 4

 Article de fond                 Actions mondiales              Titres mondiaux à revenu fixe   Devises
 Inflation mondiale :            En douceur                     Le « bonhomme derrière          Euro : En mode attentiste
 la cible n’a jamais été                                        le rideau » à la Fed
 aussi difficile à atteindre
Voir les déclarations importantes et obligatoires sur les analystes qui ne sont pas américains à la page 26.
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Perspectives mondiales
                 Juin 2019

                                             Table des matières
                                             4       Les armes de la guerre commerciale
                                             L’économiste en chef de RBC Gestion mondiale d’actifs se penche sur l’évolution de la
                                             guerre commerciale. Il signale l’escalade possible dans le secteur technologique comme un
                                             aspect essentiel à surveiller, alors que les États-Unis ciblent les compétences de la Chine en
                                             haute technologie.

                                             9       Inflation mondiale : la cible n’a jamais été aussi difficile à atteindre
                                             L’inflation reste résolument inférieure à la cible de la Fed, malgré la robustesse de la
                                             croissance et le taux de chômage aux États-Unis, qui s’établit à un creux record. Cette
                                             situation confond à la fois les marchés et les autorités. La Fed cherche toutefois une
                                             solution, qui pourrait maintenant se profiler à l’horizon.

                                             13 Actions mondiales : En douceur
                                             Tandis que de nombreux vents contraires freinent la croissance, les économies mondiale et
                                             américaine bénéficient au moins d’un facteur très important : la politique monétaire et les
                                             conditions du crédit demeurent extrêmement favorables. À notre avis, la correction actuelle
                                             ne durera pas et les marchés boursiers reprendront leur ascension.

                                             17 	Titres mondiaux à revenu fixe : Le « bonhomme derrière le rideau »
                                                     à la Fed
                                             Malgré les projections de resserrement supplémentaire du marché de l’emploi, les
                                             économistes de la Fed estiment que l’inflation tombera légèrement sous la barre des 2 % à
                                             moyen terme, levant ainsi le rideau sur la devise d’inflation « transitoire » des responsables
                                             de la politique. Nous croyons donc que les jours du penchant neutre de la Fed sont comptés.

                                             Les coulisses des marchés
                                             3       Position de RBC en matière de placements

                                             13      Actions mondiales

                                             17      Titres mondiaux à revenu fixe

                                             21      Devises

                                             22      Marchandises

                                             23      Principales prévisions

                                             24      Feuille de pointage du marché

                                             Toutes les valeurs sont en dollars américains et établies au 31 mai 2019, à la clôture du marché (sauf indication contraire).

    2   Perspectives mondiales | Juin 2019
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Aperçu mondial des
   catégories d’actif

                                                 Position de RBC en matière
Opinions sur les actifs
                                                 de placements
mondiaux
Catégorie Opinion                                Actions
d’actif                                          • L’optimisme désinvolte des premiers mois de l’année a brusquement fait place à des
               —            =          +           inquiétudes en mai. Confrontés à l’intensification du conflit commercial entre les
Actions                                            États‑Unis et la Chine, tous les marchés boursiers développés se sont repliés et ont
                                                   abaissé leurs prévisions de croissance au cours du mois. Cela dit, au terme d’une reprise
                                                   aussi forte que celle du premier trimestre de 2019, il n’est pas rare de voir les cours
Titres à
revenu                                             baisser de 4 % à 10 %.
fixe                                             • Nous conservons une pondération neutre en actions. Étant donné que la plupart des
                                                   principaux marchés sont en situation de survente et que les cours sont devenus plus
           Rendement            Rendement          intéressants, nous croyons que cette conjoncture finira par déboucher sur une nouvelle
           anticipé             anticipé           phase ascendante. Une détérioration des pourparlers commerciaux pourrait toutefois
           inférieur à la       supérieur à la
           moyenne              moyenne            reporter la reprise des marchés boursiers et les faire reculer davantage. Nous croyons que
                                                   les politiques monétaires demeureront accommodantes dans la plupart des régions et
                                                   soutiendront la vigueur des conditions économiques sous-jacentes. Par conséquent, et
Voir la section « Explication des                  comme nous l’avions fait dans nos Perspectives mondiales de mai, nous recommandons
opinions » pour plus de détails                    fortement aux investisseurs d’ajouter des placements défensifs à leurs portefeuilles.
Source : RBC Gestion de patrimoine               Titres à revenu fixe
                                                 • Même si les décideurs de la Réserve fédérale américaine ont un penchant pour la
                                                   neutralité, les marchés sont d’un autre avis. Ils anticipent deux baisses de taux d’ici la fin de
                                                   l’année, et nous sommes d’accord avec eux. L’élément décisif dans ce débat pourrait être la
                                                   faiblesse de l’inflation, que la Fed considère comme « transitoire ». Nous croyons plutôt que
                                                   la faiblesse de l’inflation est fermement ancrée et pour cette raison, nous partageons l’avis
                                                   des marchés. La réunion du Comité fédéral de l’open market tenue en juin devrait donner
                                                   des éclaircissements à ce sujet. L’impasse des pourparlers commerciaux et l’éventualité
                                                   d’un assouplissement de politique de la part de la Fed ou d’une croissance timide au
                                                   deuxième trimestre devraient maintenir les taux à leurs faibles niveaux.
                                                 • Sur le plan mondial, nous maintenons une pondération neutre des titres à revenu fixe
                                                   et continuons de recommander aux investisseurs de se tourner vers les obligations de
                                                   sociétés de bonne qualité à l’approche des étapes finales du cycle de crédit. Compte
                                                   tenu de la persistance du risque de réinvestissement, les investisseurs américains auront
                                                   intérêt à accroître la duration de leurs portefeuilles.

                                                 Explication des opinions
                                                 (+/=/–) représente l’opinion du Comité des Services-conseils en gestion mondiale de portefeuille
                                                 pour un horizon de placement de 12 mois.

                                                 + Surpondération laisse entendre un potentiel de rendement supérieur à la moyenne pour la
                                                 catégorie d’actif ou la région par rapport aux autres catégories d’actif ou régions.

                                                 = Pondération neutre laisse entendre un potentiel de rendement moyen pour la catégorie d’actif
                                                 ou la région par rapport aux autres catégories d’actif ou régions.

                                                 – Sous-pondération laisse entendre un potentiel de rendement inférieur à la moyenne pour la
                                                 catégorie d’actif ou la région par rapport aux autres catégories d’actif ou régions.

       3    Perspectives mondiales | Juin 2019
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Article
                    de fond

                                                 Les armes de la guerre
                                                 commerciale
                                                 Alors que les États-Unis et la Chine campent sur leurs positions,
                                                 l’économiste en chef de RBC Gestion mondiale d’actifs surveille
                                                 l’évolution de la guerre commerciale et les répercussions éventuelles de
                                                 l’accroissement des divergences sur la croissance économique. Il signale
                  Eric Lascelles
                                                 l’escalade possible dans le secteur technologique comme un aspect
                  Toronto, Canada
          Eric.Lascelles@rbc.com                 essentiel à surveiller, alors que les États-Unis ciblent les compétences
                                                 de la Chine en haute technologie.

  Eric Lascelles est économiste                  Les marchés ont reculé récemment en raison de la détérioration des négociations
            en chef à RBC Gestion                commerciales entre les États-Unis et la Chine. Les Américains ont déjà imposé quelques
  mondiale d’actifs Inc. Il met à                séries de tarifs douaniers sur les importations de biens chinois ; la Chine a réagi en
jour les prévisions de la société
                                                 imposant des tarifs de même ampleur, frappant les exportateurs américains et ciblant
   pour l’économie mondiale et
                                                 certains secteurs de façon stratégique.
     conseille ses gestionnaires
         de portefeuille à propos                Le populisme anti-commerce a été un élément central de la plateforme électorale du
       des thèmes et des risques
                                                 président Trump, ce qui explique en partie les efforts déployés par la Maison-Blanche pour
        principaux. Par ailleurs, il
                                                 renégocier les relations commerciales du pays avec le reste du monde.
     livre fréquemment dans les
  médias des commentaires sur                    Il faut reconnaître que les Américains ont quelques bonnes raisons d’être mécontents.
    les tendances économiques
                                                 Comme le montre le graphique ci-dessous, les entreprises américaines ont payé en
         et financières à l’échelle
  mondiale, notamment sur les                    moyenne des droits de douane plus élevés lorsqu’elles vendaient leurs marchandises à
   réseaux CNBC et Bloomberg.                    l’étranger que les entreprises étrangères qui avaient accès au marché américain.

                                                 Écart de taux tarifaires entre les États-Unis et les pays
                                                 partenaires (en points de pourcentage)

                                                             Écart supérieur à zéro : Les É.-U. paient des tarifs plus élevés
                                                      12
                                                                    Produits agricoles               10,6
                                                      10            Produits non agricoles                                           Les États-Unis ont raison
                                                                                                                                     de vouloir de meilleurs
                                                       8                                                                             accords commerciaux
                                                                                         6,1                                         avec leurs partenaires.
                                                       6
                                                                          4,0 3,6
                                                       4
                                                                                                                   2,5
                                                       2
                                                                    0,0                        0,0
                                                       0
                                                             -0,2                                                        -0,2
                                                      -2                                                    -1,2
                                                              Écart inférieur à zéro : Les É.-U. paient des tarifs moindres
                                                      -4
                                                            Mexique        Chine       Canada         Japon          UE

                                                 Sources : RBC Gestion mondiale d’actifs ; OMC/CCI/CNUCED, Profils tarifaires dans
                                                 le monde 2018.

      4     Perspectives mondiales | Juin 2019
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Les armes
        de la guerre
       commerciale
                                         Un autre facteur, moins plaisant, mais tout aussi valide, qui a motivé la renégociation des
                                         accords commerciaux est le suivant : à l’instar d’autres grands pays, les États-Unis sont
                                         bien placés pour profiter indûment de leur force et obtenir des accords avantageux en
                                         contrepartie d’un accès à la plus importante économie au monde. Les États-Unis peuvent
                                         donc raisonnablement espérer mieux qu’un accord strictement « équitable ».

                                         En revanche, certains aspects de la logique qui sous-tend la volonté de renégocier les
                                         accords sont moins solides. Par exemple, dans le secteur manufacturier des États-Unis,
                                         beaucoup plus d’emplois ont été perdus en raison de l’automatisation que du transfert
                                         à des usines à l’étranger. Par conséquent, malgré la conclusion de nouvelles ententes
                                         commerciales, la majorité des emplois « perdus » dans ce secteur ne seront pas récupérés.

                                         Pressions politiques
                                         Les pressions exercées par les États-Unis visaient à forcer la Chine à entreprendre des
                                         réformes économiques afin de rendre la relation commerciale entre les deux pays plus
                                         symétrique, non seulement en équilibrant les volumes échangés entre eux, mais surtout
                                         en élargissant mutuellement l’accès à leurs marchés. Plus précisément, les États-Unis
                                         veulent que la Chine réduise le contrôle des capitaux, mette fin aux transferts obligatoires
                                         de technologies des sociétés occidentales à leurs partenaires chinois, et limite les avantages
                                         spéciaux dont jouissent de nombreuses sociétés d’État.

                                         Il y a un mois, l’issue de ces négociations commençait à paraître prometteuse. Aujourd’hui,
                                         tous les signes encourageants ont disparu, les deux pays étant de nouveau à couteaux tirés.
                                         Les États-Unis affirment que la Chine avait initialement accepté d’adopter un large éventail
                                         de réformes économiques, mais qu’elle a fait marche arrière à bien des égards en modifiant
                                         le projet d’accord.

                                         Depuis toujours, nous sommes d’avis que tout accord serait largement superficiel et ne
                                         réglerait pas les différends sous-jacents entre les deux superpuissances économiques.
                                         Toutefois, nous croyons maintenant que même un demi-succès sera difficile à obtenir.

                                         Volatilité de l’indice S&P 500 selon l’évolution des échanges
                                         commerciaux et des tarifs douaniers
                                                    Progression régulière des        Préoccupations         Retour des
                                                        actions en 2017           entourant les taux, la craintes liées
                                         3 000                                    croissance et les tarifs au commerce

                                         2 900
                                                                                                                           Si la querelle
                                         2 800                                                                             commerciale
                                                                                                                           s’envenimait, les marchés
                                         2 700                                                                             boursiers pourraient
                                                                                                                           encore reculer.
                                         2 600

                                         2 500

                                         2 400

                                         2 300                         Adoucissement du ton des banques centrales,
                                                                   atténuation des craintes liées au commerce, bons
                                                                         bénéfices des sociétés au premier trimestre
                                         2 200
                                            janv. 2017           oct. 2017           juill. 2018
                                                                                      juil. 2018           avr. 2019

                                         Sources : RBC Gestion mondiale d’actifs, RBC Gestion de patrimoine, Wall Street
                                         Journal, Haver Analytics ; données prises en compte jusqu’au 28 mai 2019.

5   Perspectives mondiales | Juin 2019
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Les armes
        de la guerre
       commerciale
                                         Les États-Unis ont mis à exécution la menace qu’ils reportaient depuis longtemps, soit celle
                                         d’augmenter à 25 % les droits tarifaires de 10 % visant des produits chinois initialement
                                         ciblés d’une valeur de 200 G$. Ils ont également menacé d’imposer une nouvelle vague de
                                         tarifs douaniers (à un taux s’établissant entre 10 % et 25 %) sur 300 G$ d’importations de
                                         biens chinois, ce qui pourrait de nouveau faire doubler l’incidence nette.

                                         La Chine a riposté en appliquant de nouveaux tarifs douaniers sur 60 G$ d’importations de
                                         produits américains (également à un taux s’établissant entre 10 % et 25 %).

                                         Les marchés financiers traversent naturellement une période difficile, compte tenu de toute
                                         cette instabilité. Rappelons que le redressement des marchés boursiers depuis le début
                                         de 2019 est attribuable à trois principaux facteurs macroéconomiques : les taux d’intérêt ont
                                         cessé d’augmenter, la croissance économique a commencé à se stabiliser et les problèmes
                                         causés par le protectionnisme se sont atténués. Comme cette dernière raison ne s’applique
                                         plus, le réajustement du marché n’est pas surprenant.

                                         Protectionnisme et mécontentement
                                         Le protectionnisme a tendance à être un facteur économique négatif pour diverses raisons.
                                         La plus importante d’entre elles est sans contredit l’augmentation du coût de la vie, en
                                         partie attribuable au fait que les importateurs doivent payer leurs marchandises plus cher,
                                         et que les fabricants nationaux ont moins de concurrents et en profitent pour majorer leurs
                                         prix. Cette réalité ne suffit pas à expliquer entièrement les maux du protectionnisme, mais il
                                         s’agit de son élément principal.

                                         Parmi les aspects positifs, le gouvernement perçoit des recettes fiscales auprès des
                                         entreprises étrangères, et certaines entreprises nationales prospèrent quand la pression de
                                         la concurrence étrangère diminue.

                                         RBC Gestion mondiale d’actifs – probabilité de scénarios liés au
                                         commerce et répercussions possibles sur l’économie
                                               Scénario Probabilité         Détails         Répercussions économiques
                                                                                     É.-U. : -2,1 %
                                                                           Guerre
                                                  Pire         15 %                  Chine : -2,5 %                          Les scénarios relatifs au
                                                                         commerciale
                                                                                     Canada : -2,0 %                         commerce se détériorent.
                                                                                                                             Selon nos estimations,
                                                                             Tarifs  É.-U. : -0,3 % à -0,6 %
                                                                                                                             si le scénario
                                                Négatif       40 %         douaniers Chine : -0,4 % à -0,8 %                 « négatif » l’emporte,
                                                                          importants Canada : -0,2 % à -0,4 %                les répercussions
                                                                                        É.-U. : -0,1 % à -0,2 %              sur l’économie
                                                 Un peu                  Faibles tarifs                                      seront deux fois plus
                                                               25 %                     Chine : -0,2 % à -0,5 %
                                                 négatif                  douaniers                                          importantes que celles
                                                                                        Canada : -0,1 %                      que nous aurions
                                                                          Abandon des       É.-U. : 0 %                      prévues si les tarifs
                                                               10 %      tarifs douaniers                                    n’avaient pas augmenté
                                                 Neutre                    du président
                                                                                            Chine : 0 %
                                                                                                                             récemment.
                                                                               Trump        Canada : 0 %
                                                                          Effondrement      É.-U. : Positives
                                                                          des barrières
                                                Meilleur       10 %      étrangères sous
                                                                                            Chine : ?
                                                                            la pression     Canada : ?

                                              Headline - RBC Global Asset Management trade scenario probabilities and potential economic i
                                         Source : RBC Gestion mondiale d’actifs, probabilités en date du 27 mai 2019.
                                              Source: RBC Global Asset Management; probabilities as of 5/27/19
                                              Blurb: Trade scenarios tilt toward "Negative." Our estimate for the economic hit under this scena
                                         Mais dans l’ensemble, les facteurs négatifs l’emportent habituellement sur les facteurs
                                         positifs, et c’est presque toujours ce qui se produit lorsque les pays étrangers contre-
                                              Latest RBCGAM
                                         attaquent             version
                                                     en imposant       in #MacroMemo
                                                                     leurs           email de
                                                                           propres droits  5/27/19
                                                                                              douane.

6   Perspectives mondiales | Juin 2019
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Les armes
        de la guerre
       commerciale
                                         Le tableau précédent donne une approximation de la probabilité de différents scénarios
                                         et de leurs répercussions économiques. Cette analyse n’est pas très précise et la cible est
                                         instable, car les deux pays se renvoient la balle en ce qui concerne les menaces d’imposition
                                         de tarifs. De plus, même si un certain tarif est appliqué, la véritable question est de savoir
                                         s’il est en vigueur pendant cinq semaines ou pendant cinq ans.

                                         Après un bref intermède d’optimisme, il semble que le scénario « négatif » soit le plus
                                         probable. Ce scénario laisse entrevoir des dommages économiques de l’ordre de 0,3 %
                                         à 0,6 % du PIB des États-Unis si les tarifs persistent, ainsi qu’un effet négatif de 0,4 % à
                                         0,8 % sur l’économie chinoise, en supposant qu’aucun droit tarifaire n’est imposé sur les
                                         automobiles. À titre de comparaison, ces répercussions sont deux fois plus importantes que
                                         celles que nous aurions prévues si les tarifs n’avaient pas augmenté récemment. À l’inverse,
                                         ces répercussions sont deux fois moins importantes que celles prévues si les États-Unis
                                         mettaient à exécution leur menace d’imposer une nouvelle vague de tarifs douaniers sur
                                         300 G$ d’importations de produits chinois.

                                         Nous avons des raisons de penser que les modèles actuels pourraient ne pas rendre
                                         compte de l’étendue des dommages. Par exemple, la perte de prospérité des ménages et
                                         des entreprises pourrait être supérieure à l’incidence économique négative cumulée, étant
                                         donné que le secteur public est souvent favorisé par les recettes fiscales supplémentaires
                                         qu’il peut percevoir grâce aux tarifs douaniers. Par conséquent, d’autres secteurs de
                                         l’économie accusent un retard encore plus grand.

                                         Par ailleurs, la réaction des marchés boursiers à ce genre de choc est habituellement
                                         plusieurs fois supérieure aux répercussions sur l’ensemble de l’économie. Il serait donc
                                         normal de prévoir une fluctuation du marché boursier de plusieurs points de pourcentage
                                         pour un choc protectionniste qui ne ferait que soustraire un demi-point de pourcentage à la
                                         croissance économique.

                                         Attaques contre des entreprises
                                         Parmi les armes non tarifaires dans la querelle commerciale entre les États-Unis et la
                                         Chine, les attaques contre des sociétés représentent la manifestation la plus évidente
                                         d’antagonisme transfrontalier.

                                         Huawei monopolise particulièrement l’attention contre son gré. Sa directrice des finances
                                         a été accusée de fraude par les autorités américaines et la mise en place de ses produits 5G
                                         a été bloquée par les États-Unis et d’autres pays développés. De plus, les entreprises
                                         américaines doivent désormais obtenir l’approbation du gouvernement avant de faire
                                         affaire avec cette société, ce qui compromet la poursuite des activités commerciales.
                                         Huawei est vraisemblablement visée pour plusieurs raisons :

                                         • La société est à l’avant-garde de la vague 5G et n’a pas de concurrent aux États-Unis. Par
                                           conséquent, les efforts des Américains visent peut-être simplement en partie à réduire
                                           l’ampleur des avancées technologiques des Chinois.
                                         • Huawei est accusée d’avoir acquis par des moyens douteux une part appréciable de sa
                                           propriété intellectuelle de base, souvent au détriment de chefs de file de l’extérieur de
                                           la Chine.
                                         • Les Américains l’accusent de ne pas respecter les sanctions imposées par les États-Unis
                                           contre l’Iran, ce que Huawei dément.
                                         • Les Américains craignent que la proximité de Huawei et des autorités chinoises puisse
                                           faciliter l’espionnage contre les pays qui mettraient les produits 5G de la société au cœur
                                           de leurs réseaux de télécommunications.

7   Perspectives mondiales | Juin 2019
Les armes de la guerre commerciale - RBC Wealth Management
Les armes
        de la guerre
       commerciale
                                         Les obstacles auxquels Huawei est confrontée pourraient bien être réduits ou éliminés par
                                         la conclusion d’un accord commercial entre les deux pays. Les restrictions imposées par
                                         les Américains à ZTE avaient finalement été allégées pour plaire au président de la Chine.
                                         Il s’agissait d’une décision sans précédent motivée uniquement par des considérations
                                         politiques plutôt que juridiques.

                                         Les mesures prises par les Américains à l’encontre de Huawei pourraient se retourner
                                         contre eux si elles sont mises en œuvre trop longtemps ; plus longtemps les Chinois
                                         n’auront pas accès aux technologies américaines, plus il est probable qu’ils reproduiront ces
                                         technologies. De même, toute perte d’accès au système de compensation en dollars devrait
                                         accélérer la mise sur pied d’un système chinois rival, de sorte que les Américains seraient
                                         moins en mesure d’exercer la même influence dans l’avenir.

                                         La Chine possède aussi la capacité de frapper les États-Unis en adoptant des mesures non
                                         tarifaires, par exemple en vendant des titres du Trésor américain, en restreignant la vente
                                         de téléphones iPhone ou d’autres produits de prestige fabriqués en Chine, ou même en
                                         interrompant ses exportations d’éléments des terres rares (dont elle a le quasi-monopole),
                                         nécessaires à la fabrication d’appareils électroniques modernes.

                                         L’avenir est incertain
                                         À moins que la raison l’emporte, le fléchissement de la production économique imputable
                                         à l’imposition de nouveaux tarifs élevés et à des mesures non tarifaires musclées pourrait
                                         entraver les signes de reprise observés récemment dans les économies chinoise et
                                         américaine. En revanche, il importe de répéter qu’aucun des effets négatifs décrits dans
                                         le présent document ne serait suffisant à lui seul pour plonger les États-Unis ou la Chine
                                         en récession ; les dommages seront étalés sur plusieurs années au lieu de se produire d’un
                                         seul coup.

                                         Par ailleurs, l’administration Trump s’empressera de favoriser la croissance économique
                                         à l’approche de l’élection de 2020. Il en sera de même pour la Chine, compte tenu des
                                         mesures de relance budgétaire récemment adoptées dans le but de stabiliser la croissance.
                                         Ces motivations inciteront peut-être les deux pays à conclure une entente après tout.

                                         La possibilité que les présidents Trump et Xi se rencontrent au sommet du G20, prévu pour
                                         la fin de juin à Osaka, nous donne une lueur d’espoir. Cependant, notre scénario de base
                                         table maintenant sur le maintien de la dernière ronde de tarifs.

                                         Au final, la résolution des différends entre les États-Unis et la Chine dépendra peut-être
                                         du temps pendant lequel les deux pays pourront supporter les effets négatifs des tarifs sur
                                         leur économie.

8   Perspectives mondiales | Juin 2019
Article
              de fond

                                           Inflation mondiale : la cible
                                           n’a jamais été aussi difficile
                                           à atteindre
                                           Dans un contexte de fluctuations des craintes d’une guerre commerciale et
                                           de volatilité récente sur les marchés, l’inflation reste résolument inférieure
      Tom Garretson, CFA
     Minneapolis, États-Unis
                                           à sa cible, malgré la robustesse de la croissance et le taux de chômage aux
    tom.garretson@rbc.com                  États-Unis, qui s’établit à un creux record. Cette situation confond à la fois
                                           les marchés et les autorités. La Réserve fédérale américaine (Fed) cherche
                                           toutefois une solution, qui pourrait maintenant se profiler à l’horizon.

                                           Il peut sembler difficile de croire qu’après quelque dix ans d’expansion économique dans la
                                           foulée de la crise financière mondiale, la diminution du taux de chômage aux États-Unis à
                                           son creux des 50 dernières années, à 3,6 %, et les milliers de milliards de dollars de mesures
                                           de relance mises en place par les banques centrales à l’échelle mondiale, nous en soyons
                                           encore à tenter d’expliquer le mystère de la faiblesse de l’inflation. C’est pourtant le cas.

                                           Les querelles commerciales, les craintes concernant la croissance et les épisodes de
                                           volatilité sur les marchés ont incité les banques centrales à suspendre le relèvement des
                                           taux d’intérêt pour l’instant. Cependant, les attentes d’un assouplissement de la politique
                                           monétaire sont justifiées par le courant sous-jacent de tensions inflationnistes faibles, voire
                                           nulles. À l’heure actuelle, les marchés américains tablent sur pas moins de trois baisses de
                                           taux par la Fed d’ici à la fin de 2020.

                                           Comme l’illustre le graphique, les mesures de l’inflation que privilégient la Fed et la Banque
                                           centrale européenne (BCE) n’ont que rarement atteint leur cible au cours du cycle actuel. En
                                           fait, l’inflation aux États-Unis n’a atteint sa cible que 5 % du temps depuis la fin de la crise
                                           financière, en 2009, et environ 25 % du temps lors des 20 dernières années.

                                           L’inflation a été inférieure aux cibles pendant la plus grande
                                           partie du cycle

                                            3,0 %

                                            2,0 %                                                                          L’inflation s’est
                                                                                                                           récemment approchée
                                            1,0 %                                                                          de sa cible de 2 %,
                                                                                                                           mais on craint de
                                                                                                                           plus en plus qu’elle
                                            0,0 %
                                                                                                                           s’établisse de nouveau
                                                                                                                           en deçà des objectifs
                                           -1,0 %                                                                          des banques centrales.
                                                 2009         2011         2013       2015         2017         2019
                                                       Inflation de base aux É.-U.           Inflation dans la zone euro
                                                       Cible de 2 %

                                           Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg.

9     Perspectives mondiales | Juin 2019
Inflation
        mondiale
                                          La Fed continue de prévoir un taux d’inflation annuel de 2 % jusqu’en 2021, mais certains
                                          responsables ont récemment fait part de leurs préoccupations à l’égard de la faiblesse de
                                          l’inflation. En Europe, le taux d’inflation s’est récemment approché de 2 %, mais la BCE
                                          continue d’entrevoir une inflation de tout juste 1,2 % en moyenne cette année, de 1,5 %
                                          en 2020 et de seulement 1,6 % en 2021. Pour sa part, la Banque du Japon a bel et bien
                                          renoncé à sa cible de 2 % au cours de sa période de prévision, puisque l’inflation a été de
                                          seulement 0,4 % en moyenne durant la présente décennie, entravée par des tendances
                                          démographiques défavorables.

                                          Quelles sont les causes fondamentales de la faiblesse de l’inflation, et comment les banques
                                          centrales pourraient-elles rajuster leurs méthodes pour atteindre leurs objectifs à cet égard ?

                                          Les ratés des moteurs d’inflation traditionnels
                                          Ces dernières années, l’aplatissement de la courbe de Phillips, soit le cadre utilisé par la Fed
                                          pour prévoir l’inflation, qui décrit simplement la relation habituellement forte entre le recul
                                          du chômage et la hausse de l’inflation, a été au cœur du problème. Mais même si le taux de
                                          chômage frôle un creux de 50 ans aux États-Unis, la croissance des salaires a été modeste, à
                                          l’instar des grandes mesures d’inflation au cours du présent cycle.

                                          Malgré de nombreuses tentatives pour expliquer la rupture de cette relation, la raison en
                                          est peut-être simplement qu’on ne compare plus des éléments comparables. Au cours des
                                          40 dernières années, l’inflation – ou l’absence d’inflation – est devenue un phénomène
                                          mondial en raison des changements ayant touché les échanges commerciaux et la
                                          production dans le monde. La Fed ou toute autre banque centrale a peut-être perdu la
                                          maîtrise de la situation, et ce, même si le taux de chômage dans les pays développés reste
                                          en grande partie tributaire de la politique monétaire de la banque centrale en question.
                                          Pour illustrer cette dynamique, précisions qu’aux États-Unis, l’inflation de base s’est établie
                                          en moyenne à seulement 1,3 % par année lors des cinq dernières années. Un examen
                                          approfondi révèle toutefois que les prix d’un panier de services (70 % des dépenses) – qui
                                          représente essentiellement un facteur intérieur – ont augmenté de 2,4 %, soit plus que la
                                          moyenne, alors que les prix des biens (30 % des dépenses) que les Américains importent en
                                          grande partie ont reculé en moyenne de 2,1 % chaque année.

                                          Les décisions de politique monétaire fondées sur la courbe de Phillips, en prévision d’une
                                          inflation qui ne se concrétise jamais, ne font qu’accroître le risque d’erreurs de politique.

                                          Les prévisions d’inflation sont fondées sur les données passées
                                          Une autre raison, peut-être plus importante, expliquant la faiblesse de l’inflation est que les
                                          attentes inflationnistes sont peu élevées. Même les analyses de la Fed révèlent que les attentes
                                          inflationnistes sont souvent fondées sur les données passées concernant l’inflation réelle.

                                          Comme l’illustre le graphique suivant, les attentes inflationnistes à long terme des
                                          consommateurs ont diminué de façon constante au cours du cycle actuel, ayant atteint
                                          leur plus faible niveau depuis que la question à ce sujet a été intégrée au sondage de
                                          l’Université du Michigan, en 1979. Cette situation explique pourquoi l’inflation risque de
                                          s’établir constamment en deçà des cibles d’inflation des banques centrales, et pourquoi
                                          l’inflation est souhaitable en premier lieu : les consommateurs qui s’attendent à une
                                          baisse des prix pourraient retarder leurs dépenses, ce qui pèserait sur la croissance, tandis
                                          que les entreprises seront réticentes à augmenter les prix et à effectuer de nouveaux
                                          investissements. Dans le meilleur des cas, nous nous retrouverions ainsi dans un cycle de
                                          faible inflation susceptible de compromettre la crédibilité des banques centrales, et dans le
                                          pire des cas, dans une spirale déflationniste.

                                          Maintenant que les taux réels et prévus d’inflation semblent diverger des cibles, les banques
                                          centrales sont-elles sur le point de changer de stratégie ?

10   Perspectives mondiales | Juin 2019
Inflation
        mondiale
                                          Les attentes inflationnistes des consommateurs américains
                                          atteignent des creux records
                                          5,0 %
                                                                                    Récessions aux É.-U.
                                                                                    Anticipations inflationnistes
                                          4,5 %
                                                                                    Moyenne sur 1 an                     La baisse de l’inflation
                                          4,0 %                                                                          pourrait être
                                                                                                                         attribuable au fait que
                                          3,5 %                                                                          les consommateurs
                                                                                                                         s’attendent à ce que
                                          3,0 %                                                                          l’inflation recule à
                                                                                                                         l’avenir, peut-être
                                          2,5 %                                                                          parce que les cibles
                                                                                                                         d’inflation de la Fed ne
                                          2,0 %                                                                          sont pas atteintes.
                                               1990        1995       2000       2005       2010       2015

                                          Sources : RBC Gestion de patrimoine, enquête de l’Université du Michigan sur
                                          les attentes des consommateurs concernant les prix au cours des cinq ou dix
                                          prochaines années.

                                          Le moment d’opter pour une nouvelle approche est venu
                                          Aux États-Unis, la Fed a entrepris une étude d’un an sur les cibles d’inflation, dont les
                                          résultats seront présentés ce mois-ci lors d’une conférence à Chicago. Ce sera peut-être
                                          le premier pas vers l’adoption d’une nouvelle politique pour la Fed, peut-être dès cette
                                          année. Les deux idées qui ont fait le plus souvent l’objet de discussions sont soit la hausse
                                          de la cible d’inflation au-delà de 2 %, soit l’établissement d’une cible fondée sur le niveau
                                          des prix. Selon nous, une variante de cette seconde approche est de loin l’option la plus
                                          vraisemblable.

                                          En optant pour une cible fondée sur le niveau des prix, on ne pourra plus se contenter
                                          d’« oublier le passé » lorsque les cibles d’inflation ne seront pas atteintes. Il faudra alors que
                                          tout « déficit » d’inflation soit compensé par un taux d’inflation supérieur à sa cible pendant
                                          un certain temps, jusqu’à ce que la hausse des prix revienne à une moyenne annuelle de
                                          2 %. Par exemple, supposons que la Fed cherche à compenser tous les déficits d’inflation
                                          enregistrés depuis 2009 ; pour revenir à la moyenne, elle devrait laisser l’inflation grimper à
                                          environ 2,5 % pendant cinq ans. Certes, il s’agit d’une hausse du taux d’inflation, mais qui
                                          n’est pas très prononcée. Actuellement, la Fed applique simplement sa politique dans le but
                                          de ramener l’inflation de base à 2 % dans un délai d’un an à trois ans.

                                          Cependant, la Fed a passé la plus grande partie des 40 dernières années, soit depuis que
                                          son ancien directeur Paul Volcker a décidé en 1981 de mater l’inflation, à tenter de remplir
                                          la deuxième partie de son double mandat, soit d’assurer la stabilité des prix. Pourquoi
                                          prendrait-elle le risque de faire machine arrière ?

                                          Les banques centrales sont confrontées au problème suivant : la faiblesse de l’inflation
                                          augmente le risque que le taux directeur revienne près de zéro, voire plus bas, comme c’est
                                          le cas pour la BCE et la Banque du Japon, et qu’il y reste plus longtemps en cas de recul de
                                          l’économie. En fait, les autorités cherchent des façons d’obtenir une plus grande marge
                                          de manœuvre pour leurs outils de politique monétaire. La politique appliquée à l’égard de
                                          l’inflation au cours des 40 dernières années pourrait ne pas être celle convenant le mieux
                                          pour les 40 prochaines années. Nous vivons en effet dans un monde où les taux d’intérêt
                                          devraient demeurer constamment peu élevés, principalement en raison des tendances
                                          démographiques que traduit le vieillissement de la population.

11   Perspectives mondiales | Juin 2019
Inflation
        mondiale
                                          Le recul de la croissance de la population en âge de travailler
                                          devrait se poursuivre

                                             2,25 %                                                        États-Unis
                                             1,75 %                                                        Zone euro
                                                                                                           Japon             Les tendances
                                             1,25 %
                                                                                                                             démographiques
                                             0,75 %                                                                          représentent l’un des
                                                                                                                             principaux facteurs
                                             0,25 %
                                                                                                                             susceptibles de limiter
                                            -0,25 %                                                                          l’inflation ; elles
                                            -0,75 %                                                                          rendent nécessaire
                                                                                                                             une modification de la
                                            -1,25 %                                                                          stratégie des banques
                                            -1,75 %                                                                          centrales.
                                                      1970          1990            2010           2030           2050

                                          Sources : RBC Gestion de patrimoine, estimations et prévisions de la Banque
                                          mondiale concernant la croissance annuelle de la population en âge de travailler
                                          (entre 15 et 64 ans).

                                          Mario Draghi, le président de la BCE, a déclaré que la banque centrale ne réexamine pas
                                          pour l’instant son objectif de maintenir l’inflation en deçà de 2 %, mais proche de ce taux,
                                          ajoutant toutefois qu’il attend les résultats de l’étude de la Fed.

                                          Quoi qu’il en soit, la meilleure stratégie pour composer avec la faiblesse persistante de
                                          l’inflation sera vraisemblablement un retour à des taux d’intérêt peu élevés pendant longtemps,
                                          car les banques centrales cherchent à ramener durablement le taux d’inflation à sa cible.

                                          Conséquences pour les portefeuilles
                                          Ce qu’il faut retenir, c’est que les taux d’intérêt devraient diminuer, alors que le taux
                                          d’inflation augmentera légèrement. Pour les investisseurs boursiers, les actions procurent
                                          essentiellement une protection naturelle contre l’inflation. Toutefois, la principale crainte
                                          serait d’observer une accélération de la croissance des salaires attribuable au resserrement
                                          constant des marchés de l’emploi, laquelle grugerait les marges des entreprises. Cela dit,
                                          la rentabilité des entreprises, du moins aux États-Unis, demeure historiquement élevée et
                                          octroie une importante marge de manœuvre.

                                          En ce qui concerne les porteurs de titres à revenu fixe, nous pensons qu’ils doivent s’habituer
                                          à allonger les échéances. Le risque de réinvestissement demeure la plus lourde menace
                                          planant sur le rendement des portefeuilles ; non seulement les taux à court terme devraient-
                                          ils demeurer stables dans le meilleur des cas, mais ils sont susceptibles de diminuer, car les
                                          marchés tablent sur près de trois baisses de taux par la Fed d’ici à la fin de 2020.

                                          Malgré la volatilité récemment observée sur les marchés, nous croyons que l’orientation
                                          expansionniste des politiques monétaires des banques centrales devrait continuer à court
                                          terme de favoriser les actifs risqués, notamment les actions et les obligations de sociétés.
                                          Toutefois, cette stratégie n’est pas sans risque à long terme. Si les banques centrales
                                          décidaient d’abaisser leur taux directeur pour faire grimper l’inflation, nous sommes d’avis
                                          que les risques de formation de bulles d’actifs et d’instabilité financière augmenteraient, de
                                          même que la nécessité pour les investisseurs de faire preuve de vigilance.

                                          Nous verrons quelle sera la décision de la Fed et si les autres banques centrales lui
                                          emboîtent le pas. Toutefois, les principales banques centrales du monde semblent plus
                                          proches que jamais d’à tout le moins modifier légèrement la façon d’atteindre les objectifs
                                          de leur politique monétaire. La meilleure stratégie sera vraisemblablement un retour à des
                                          taux d’intérêt peu élevés pendant longtemps.

12   Perspectives mondiales | Juin 2019
Actions
       mondiales

                                           En douceur
                                           Les principaux indices ont subi une                Opinions sur les actions
                                           correction, rendant une partie des
                                                                                               Région                                     Actuel
                                           gains enregistrés lors de la progression
                                                                                               Monde                                         =
                                           spectaculaire des marchés boursiers entre
                                           décembre et avril. Les indices américain            États-Unis                                    =
                                           S&P 500 et canadien S&P/TSX ont reculé              Canada                                        =
                                           par rapport à leurs nouveaux sommets                Europe continentale                           =
                                           records atteints en avril. Dans le cas              Royaume-Uni                                   =
                                           des marchés aux prises avec une nuée
                                                                                               Asie (hors Japon)                             =
                                           d’incertitudes politiques et commerciales
                                                                                               Japon                                         +
                                           (le Japon et la plus grande partie de l’Asie, le
                                           Royaume-Uni et l’Europe), le redressement          + Surpondération = Pondération neutre – Sous-pondération
                                                                                              Source : RBC Gestion de patrimoine
                                           a été moins vigoureux et ne s’est pas traduit
                                           par de nouveaux sommets.
                                                                                              banques américaines ont assoupli leurs
                                           Comme d’habitude, nous accordons
                                                                                              critères d’octroi pour presque tous les
                                           notre attention aux perspectives
                                                                                              types de prêts depuis le début de l’année.
                                           du cycle économique mondial, en
                                                                                              Selon la dernière enquête menée auprès
                                           particulier de l’économie américaine.
                                                                                              des petites entreprises, dont les résultats
                                           Les obstacles ne manquent pas : par
                                                                                              ont été dévoilés par la National Federation
                                           exemple, l’accumulation des stocks avant
                                                                                              of Independent Businesses, seulement
                                           l’imposition des tarifs douaniers a stimulé
                                                                                              4 % des répondants (une proportion
                                           la croissance du PIB dans une certaine
                                                                                              historiquement faible) ont fait savoir que
                                           mesure, mais l’écoulement de ces stocks
                                                                                              leurs besoins de financement n’étaient pas
                                           excédentaires aura pour effet de ralentir
                                                                                              tous comblés.
                                           la croissance durant le trimestre en cours.
                                           L’incertitude politique ébranle la confiance       En l’absence d’un resserrement des
                                           des entreprises dans l’ensemble, et la             conditions de crédit, nous pensons que
                                           situation ne devrait pas s’améliorer de sitôt.     les économies américaine et mondiale
                                                                                              continueront d’enregistrer une croissance
                                           Cela dit, il existe au moins un facteur
                                                                                              sur 12 mois, mais à un rythme moins rapide
                                           favorable très important : la politique
                  Jim Allworth                                                                que prévu. Le cas échéant, les bénéfices des
                                           monétaire et les conditions de crédit
             Vancouver, Canada                                                                sociétés devraient aussi croître, de même
                                           demeurent extrêmement souples. La
          jim.allworth@rbc.com                                                                que la valeur des entreprises.
                                           politique des banques centrales est
             Kelly Bogdanova               particulièrement expansionniste et                 À notre avis, la correction/consolidation
      San Francisco, États-Unis            devrait le demeurer. Les écarts de taux,           actuelle ne durera pas et les marchés
     kelly.bogdanova@rbc.com               soit le rendement excédentaire que les             boursiers reprendront leur progression.
       Patrick McAllister, CFA             sociétés doivent verser par rapport aux            Nous conservons une pondération
                Toronto, Canada            obligations d’État, sont extrêmement               neutre à l’égard des actions. Nous
     patrick.mcallister@rbc.com            minces. Par conséquent, la plupart des             recommandons aussi de prêter attention
            Frédérique Carrier             sociétés ont accès à tout le financement           aux déséquilibres au sein des portefeuilles
          Londres, Royaume-Uni             dont elles ont besoin à des conditions             qui ont pu s’intensifier au cours du long
     frederique.carrier@rbc.com            exceptionnellement favorables.                     marché haussier actuel. Il importe aussi
                  Judith Oliver                                                               de rehausser la qualité en misant sur les
                                           La plus récente enquête auprès des
                       Singapour                                                              sociétés qui versent un dividende durable
                                           responsables du crédit, publiée par la
          judith.oliver@rbc.com                                                               et dont le bilan est sain, étant donné que le
                                           Fed en avril, montre que la majorité des
                                                                                              cycle déjà très long se poursuit.

13    Perspectives mondiales | Juin 2019
Actions
      mondiales
                                          Faits saillants par région                                   de l’année, RBC Marchés des Capitaux
                                                                                                       prévoit toujours un bénéfice par action
                                          États-Unis                                                   de 171 $ pour les sociétés de l’indice
                                          • Après avoir enregistré des gains pendant                   S&P 500, mais souligne que le BPA
                                            quatre mois d’affilée, le marché boursier                  pourrait diminuer à 166 $ en cas de faible
                                            américain a fait une pause dont il                         croissance économique, et à 160 $ en cas
                                            avait bien besoin. Après avoir atteint                     de légère récession. Il ne s’agit cependant
                                            un sommet record à la fin d’avril,                         pas de son scénario de base.
                                            l’indice S&P 500 a reculé de 6,6 % à
                                                                                                    • À nos yeux, la querelle avec la Chine
                                            cause de l’aggravation de la querelle
                                                                                                      est plus qu’une guerre commerciale
                                            commerciale entre les États-Unis et la
                                                                                                      ou technologique. Elle s’inscrit dans
                                            Chine. L’imposition de part et d’autre de
                                                                                                      une bataille géopolitique globale entre
                                            nouveaux tarifs et les nouvelles sanctions
                                                                                                      le cadre unipolaire dominé par les
                                            de Washington à l’égard des principales
                                                                                                      États-Unis depuis la fin de la Guerre
                                            sociétés technologiques chinoises
                                                                                                      froide, et la transition, inévitable selon
                                            ont soulevé des doutes à propos de la
                                                                                                      la Chine et d’autres pays, vers un
                                            croissance mondiale et des secteurs du
                                                                                                      ordre mondial multipolaire mené par
                                            marché boursier américain qui sont
                                                                                                      diverses puissances.
                                            liés à la Chine, par exemple les produits
                                            industriels et le matériel informatique.                • En ce qui concerne les placements
                                            Par ailleurs, l’annonce de tarifs douaniers               en actions, nous restons d’avis que
                                            sur toutes les importations de biens                      les portefeuilles pourraient profiter
                                            mexicains a fait chuter les marchés à                     d’une position quelque peu défensive.
                                            la fin de mai. Malgré ce recul, l’indice                  Nous recommandons de bonifier les
                                            S&P 500 reste en hausse de 9,8 % depuis                   portefeuilles d’actions américaines en
                                            le début de l’année.                                      misant sur les actions à dividendes et en
                                                                                                      améliorant la qualité des placements en
                                          • Juste avant que les tensions s’intensifient
                                                                                                      général. La vigilance reste de rigueur.
                                            avec la Chine et le Mexique, les sociétés
                                            de l’indice S&P 500 avaient fait état de                Canada
                                            l’apaisement des inquiétudes suscitées
                                                                                                    • Le 18 juin, nous devrions savoir si le
                                            par les obstacles commerciaux. Si les
                                                                                                      gouvernement fédéral a décidé de
                                            conflits persistent, elles changeront
                                                                                                      donner suite au projet d’expansion
                                            probablement d’opinion au cours de
                                                                                                      du pipeline Trans Mountain. Puisque
                                            la période d’annonce des résultats du
                                                                                                      le gouvernement fédéral a fait
                                            deuxième trimestre. Pour l’ensemble

                                          Rendements du S&P 500 en 2019

                                                                            17,5 %                                       Le marché boursier
                                                                                                                         américain a bien
                                                                                                                         progressé jusqu’à la fin
                                                     9,8 %                                                               d’avril, mais les choses
                                                                                                                         ont changé en mai.

                                                                                                   -6,6 %
                                                       CA               Janvier - avril              Mai

                                          Sources : RBC Gestion de patrimoine, FactSet ; données prises en compte
                                          jusqu’au 31 mai 2019.

14   Perspectives mondiales | Juin 2019
Actions
      mondiales
                                            l’acquisition du pipeline actuel et du          Europe continentale et Royaume-Uni
                                            projet d’expansion pour 4,5 G$ CA               • Les statistiques macroéconomiques de
                                            il y a tout juste un an, nous croyons             l’Europe ont récemment donné des signes
                                            qu’il ira fort probablement de l’avant.           de stabilisation ; malheureusement,
                                            Cependant, étant donné l’approche                 cette tendance se manifeste dans un
                                            d’une élection fédérale à l’automne, il est       contexte d’intensification des tensions
                                            plus difficile de déterminer le moment            géopolitiques et commerciales. À moins
                                            où la construction commencera. Nous               que ces tensions s’estompent, les
                                            croyons que les investisseurs accordent           perspectives pourraient de nouveau se
                                            plus d’importance à la construction               dégrader, étant donné que l’économie
                                            qu’aux annonces, compte tenu des                  européenne, tributaire des exportations,
                                            retards persistants dans la mise en œuvre         est particulièrement sensible à l’évolution
                                            des pipelines.                                    de la Chine. La dépréciation de l’euro
                                          • Parmi les secteurs de l’économie                  favorise les sociétés exportatrices, mais
                                            canadienne, nous sommes optimistes                ne suffira pas à contrebalancer les
                                            à l’égard des produits industriels.               maux causés par le ralentissement de
                                            Cette opinion pourrait devoir être                l’économie mondiale.
                                            réévaluée, étant donné que l’expansion          • Les valorisations des actions
                                            économique semble se trouver à une                européennes, qui s’établissent à 13 fois
                                            étape avancée ; en outre, en raison de            les bénéfices prévisionnels pour 2020,
                                            l’inversion récente de la courbe des              pourraient être vulnérables à une issue
                                            taux, la prudence est de mise en ce qui           négative des conflits commerciaux en
                                            concerne les perspectives. Nous pensons           cours. Nous conservons une pondération
                                            que l’expansion économique pourrait               neutre à l’égard des actions européennes
                                            se poursuivre. Par conséquent, nous               et porterons attention au sommet du
                                            n’avons aucune objection à conserver              G20 en juin pour y repérer des indices
                                            une surpondération, mais surveillons              concernant l’avenir du commerce.
                                            les occasions de réaliser des profits dans
                                                                                            • Nous recommandons aux investisseurs
                                            le secteur des produits industriels à des
                                                                                              de continuer à privilégier les sociétés
                                            cours intéressants.
                                                                                              européennes qui ont une portée
                                          • Compte tenu de ce que nous percevons              mondiale, un modèle d’affaires robuste
                                            comme un pessimisme soutenu à                     et une forte production de flux de
                                            l’endroit des actions canadiennes, nous           trésorerie : les titres de bon nombre
                                            pensons qu’il serait utile d’examiner             d’entre elles sont bon marché par rapport
                                            le marché sous un angle différent. Le             à ceux de sociétés semblables à l’échelle
                                            marché canadien n’offre pas les mêmes             internationale. Nous croyons qu’il existe
                                            occasions de croissance à long terme que          des occasions intéressantes parmi les
                                            le marché américain, mais il regorge de           sociétés des soins de santé et des produits
                                            sociétés sur des marchés oligopolistiques         industriels qui tirent profit de tendances
                                            qui partagent un certain nombre de                à long terme, et les sociétés de biens
                                            caractéristiques attrayantes. Les banques,        de consommation et de services qui
                                            les sociétés ferroviaires, les entreprises de     occupent une position dominante sur
                                            télécommunications et les épiceries ont           le marché et qui possèdent des marques
                                            établi des barrières à l’entrée, montré leur      bien établies.
                                            capacité de fixation des prix et obtenu des
                                                                                            • Au Royaume-Uni, la récente démission
                                            rendements élevés des capitaux propres.
                                                                                              de la première ministre Theresa May ne
                                            Ensemble, ces sociétés représentent
                                                                                              dissipera pas l’incertitude concernant
                                            environ 35 % de l’indice de référence et
                                                                                              l’impasse du Brexit. Pendant la course
                                            offrent selon nous d’excellentes occasions
                                                                                              à la chefferie qui aura lieu chez les
                                            de placement.
                                                                                              conservateurs, le ton devrait se durcir en
                                                                                              ce qui concerne le Brexit. Les évaluations

15   Perspectives mondiales | Juin 2019
Vous pouvez aussi lire