Mélina Martin 3MS2 D'Athènes à Olympie, La route des JO antiques - Maître responsable : Mme Marie Asper Gymnase Auguste Piccard
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Travail de maturité n°2 : « Les routes qui font rêver… » Mélina Martin 3MS2 D’Athènes à Olympie, La route des JO antiques Maître responsable : Mme Marie Asper Gymnase Auguste Piccard octobre 2011
Résumé Athènes, la cité la plus importante de la Grèce antique. Olympie, territoire sacré, choisi pour y établir les célèbres Jeux olympiques. La route que ce travail veut vous faire découvrir relie ces deux endroits mythiques. Se rendre à Olympie depuis Athènes n’était pas une chose facile, cela demandait de l’endurance et une grande volonté. Qui avait donc envie de parcourir les 200 km pour assister aux fameux Jeux? Les athlètes évidemment mais nombres d’artistes et de philosophes affluaient aussi à Olympie en quête de célébrité... Quels étaient leurs buts, leurs motivations? Car il n’était pas seulement question de récompense matérielle mais surtout d’honneur et de gloire. Par où est‐ce que devaient passer les voyageurs ? Dans ce travail, je tenterai de donner des réponses à ces questions. Par ailleurs, les dimensions religieuses et mythologiques de la route y seront aussi traitées. Car les Jeux étaient avant tout une cérémonie religieuse en faveur du tout puissant Zeus. Enfin, un retour au présent permettra de réfléchir sur l’existence, ou plutôt la forme d’existence, que la route a aujourd’hui. Car bien que les JO n’aient plus lieu à Olympie, nous verrons que la route ne cesse d’avoir un lien avec le présent.
Table des matières Préface…………………………………………………………………………………………………………………………..…………2 Chapitre 1 : Présentation de la route………………………………………………………………………………………..3 1.1 Période……………………………………………………………………………………………………………………..3 1.2 Destination Olympie………………………………………………………………………………………………….4 1.3 D’Athènes à Eleusis, la Voie Sacrée………………………………………………………………………….…5 1.4 D’Eleusis à Corinthe, par la « Méchante Echelle »………………………………………………………9 1.5 D’Elis à Olympie, le dernier parcours………………………………………………………………………..10 Chapitre 2 : Les voyageurs………………………………………………………………………………………………………14 2.1 Artistes et philosophes…………………………………………………………………………………….…….14 2.2 Commerçants…………………………………………………………………………………………………………..15 2.3 Les athlètes………………………………………………………………………………………………………………16 2.4 Les femmes………………………………………………………………………………………………………………17 2.5 Les spectateurs………………………………………………………………………………………………………..18 Chapitre 3 : Pour les dieux…………………………………………………………………………………………….………20 3.1 La Trêve sacrée………………………………………………………………………………………………………..20 3.2 Rêves et buts des voyageurs…………………………………………………………………………………….21 3.3 Plus près des dieux…………………………………………………………………………………………………..23 Chapitre 4 : La route de nos jours…………………………………………………………………………………………..25 4.1 Utilité de la route aujourd’hui………………………………………………………………………………….25 4.2 Renommée de la route…………………………………………………………………………………………….26 4.3 Course actuelle sur l’ancien parcours……………………………………………………………………….26 Conclusion………………………………………………………………………………………………………………………………28 Bibliographie…………………………………………………………………………………………………………………………..29 1
Préface J’ai choisi le thème de mon travail grâce au titre accrocheur Les routes qui font rêver. En effet j’avais bien envie de rêver, de suivre un chemin qui m’était encore inconnu, de découvrir son histoire et les personnes qui l’ont arpenté. Une fois le thème choisi, il fallut alors trouver le sujet, LA route en question. Qu’est‐ce qui me faisait donc bien rêver? J’eus à vrai dire quelques difficultés à trouver ma voie… Puis me vint l’idée d’étudier une route passant par la Grèce, un de mes deux pays d’origine. Ce pays me plaît particulièrement, non seulement du fait que je suis à moitié grecque, mais aussi grâce aux merveilleux paysages qu’il possède et à sa grande richesse archéologique. Par ailleurs, je voyais là une occasion d’enrichir ma culture géographique et historique de ma seconde patrie, la Grèce. J’ai eu envie d’explorer la route qui menait aux Jeux olympiques, car cela me permettait, d’une part de m’intéresser aux valeurs des Grecs anciens, à leurs dieux et ainsi à la mythologie. D’autre part, les Jeux olympiques existent encore de nos jours, ce qui donne à la route un certain lien avec le présent, bien qu’elle fût utilisée il y a de très nombreuses années. Le fait de découvrir le type de personne qui s’aventurait sur la route des JO, outre les athlètes – des personnes que l’on n’imaginerait pas prendre part à ces festivités – m’intéressait également. De plus, j’avais pour but, ou plutôt pour ambition, d’explorer les différentes « expériences de vie » que pouvait apporter ce voyage aux voyageurs de l’époque, telles la peur, l’endurance ou l’atmosphère entre futurs concurrents. Enfin, j’eus envie de m’intéresser au caractère sacré des Jeux antiques. Car le fait que l’on parcourût tant de kilomètres avec pour seule récompense matérielle une couronne d’olivier me surprenait et m’épatait. Je percevais déjà une dimension des Jeux olympiques antiques bien différente de celle des Jeux modernes. Je souhaite remercier Vicky Kalantzopulos, professeure à l’université de Thessalonique et Christian Louedec, professeur au lycée franco hellénique d’Athènes, qui ont répondu patiemment et avec intérêt à mes questions et qui m’ont fourni de précieuses informations et documents de recherche. Arrêtons à présent ce discours et mettons‐nous en route… Bon voyage! 2
Chapitre 1 : Présentation de la route 1.1 Période Pour découvrir la route qu’empruntaient les Athéniens voulant se rendre à Olympie lors des fameux Jeux, il nous faut tout d’abord plonger dans l’Antiquité. C’est en effet dans cette période, en 776 av J‐C que se déroulèrent les premiers Jeux olympiques officiels. D’autres jeux avaient bel et bien été organisés en Grèce avant cette date, mais ils gardaient un caractère local et n’ont pas pu être datés précisément. C’est le sophiste Hippias d’Elis qui a déclaré que l’année ‐776 serait la première à partir de laquelle on commencerait à compter les Jeux, après avoir étudié les archives du sanctuaire se trouvant à Olympie. Il établit d’ailleurs la première table des Olympiades, qui est la base de la chronologie de la Grèce antique. Une olympiade étant une période de quatre ans qui s’écoule entre deux Jeux olympiques, les Grecs de l’Antiquité comptaient donc leurs années en Olympiades, et chacune d’elles portait le nom du dernier vainqueur olympique de la course à pied. Ainsi à partir de ‐776, les noms des vainqueurs ont commencé à être consignés dans un registre public. Pendant près de douze siècles, les Jeux olympiques eurent lieu tous les quatre ans en Grèce, mais ils finirent par être interdits par l’empereur romain Théodose Ier en 393 apr. J‐C. Ce dernier les supprima à la demande de l’évêque Ambroise, par le fait qu’ils étaient accusés de diffuser le paganisme1. Ce décret ne fut cependant pas une grande surprise, car les Jeux avaient déjà été fortement dénaturés par la domination romaine. Premièrement, une tendance au professionnalisme avait commencé à s’installer ; les athlètes étaient choisis avec minutie, rigoureusement entraînés et très surveillés notamment dans leur régime alimentaire. De plus, la récompense des Jeux olympiques, qui avait été pendant longtemps uniquement la gloire et l’honneur, était devenue une récompense appréciable. Les vainqueurs se voyaient attribuer une pension dans leur cité d’origine, se faisaient nommer entraîneurs à vie ou recevaient une grande somme d’argent. De ce fait les Jeux olympiques rapportaient bien et demandaient beaucoup d’entraînement, ce qui donna naissance à une catégorie d’athlètes professionnels. Bien que ce phénomène eût des aspects positifs, tels les grands progrès dans la médecine du sport qui ont pu être réalisés, ces « nouveaux athlètes » étaient très critiqués et les Jeux olympiques perdirent de leur authenticité et surtout leur caractère sacré. 1 Paganisme : Ensemble des religions polythéiste de l’Antiquité, dont celle de la Grèce fait partie. 3
1.2 Destination Olympie Les Jeux olympiques n’étaient pas les seuls Jeux panhélleniques de l’Antiquité. Il existait au contraire trois autres grandes fêtes solennelles et sportives, qui sont les Jeux de Delphes, de Némée et d’Isthme. Quelques autres Jeux à caractère local étaient également organisés dans différentes villes de la Grèce, comme par exemple à Mégare, Rhodes, Argos, Epidaure ou Athènes. Cependant, l’on constate que les Jeux Olympiques avaient une grande notoriété qui les rendait plus importants que les autres Jeux de la Grèce antique. « L’or étincelant de la flamme qui s’allume à Olympie efface tous les trésors de la fière opulence… n’espère pas célébrer une lice1 plus glorieuse qu’à Olympie. » 2 Mais comment comprendre cette célébrité? Pourquoi est‐ce donc cet endroit précis – Olympie – qui avait été choisi pour établir les Jeux ? Plusieurs facteurs peuvent nous permettre de le comprendre. Premièrement, les Jeux panhélleniques avaient une source sacrée (nous élargirons davantage ce thème dans un prochain chapitre), ce qui demande que les fêtes sportives se déroulent dans un lieu sacré, tel un sanctuaire. Or à Olympie se trouvait le majestueux temple de Zeus, le roi des Dieux dans la mythologie grecque, dont subsistent encore des ruines. En outre, nous pouvons également préciser qu’Olympie était considéré comme l’un des plus beaux endroits du pays. Le site se trouvant à la fois entre un fleuve, l’Alphée et une montagne, le mont Kronion, il possédait de considérables avantages géographiques, en plus de son charme rendu par son appartenance mythologique. Site d’Olympie Bordé par les pins du mont Kronion (à gauche) et par la rivière Alphée (à droite), Olympie offre un magnifique paysage à ses visiteurs.3 1 Une lice est une compétition 2 Citation tirée du livre Douze siècles de jeux à Olympie, p. 37, Oly. V.1.11 3 Image trouvée sur le site internet : http://maxmick.pagesperso‐orange.fr 4
Selon la légende la plus répandue, le fondateur des Jeux olympiques ne serait autre qu’Héraclès, le héros le plus vénéré de la Grèce antique. Etant donné que ce « demi‐ dieu » était adoré par les tous Grecs, les jeux d’Olympie avaient une importance particulière. Une autre raison pour laquelle les Jeux olympiques étaient les plus célèbres jeux de Grèce, est que ces derniers avaient une très forte valeur symbolique de renaissance. En effet, les jeux commençaient avec l’arrivée dans le stade des garçons nus, qui devaient, pour y accéder, passer par un tunnel, tels des spermatozoïdes rejoignant l’utérus. Puis, le combat entre les jeunes représentait à son tour la sélection et la fécondation. Enfin, l’unique vainqueur, l’élu, permettait la renaissance. 1.3 D’Athènes à Eleusis, la Voie Sacrée Carte de la Grèce Elle nous montre le parcours d’Athènes à la ville d’Eleusis, tout en nous aidant à nous situer dans le pays.1 Nous voilà en route pour parcourir les plus de 200 km qui séparent Athènes d’Olympie. La première étape consistait à passer par la Porte Sacrée (en grec : Iera Pili), l’une des nombreuses portes qui donnaient accès à la ville. Car dans l’Antiquité, Athènes – l’actuelle capitale du pays – était entourée d’une muraille qui servait à protéger les habitants des envahisseurs. Cette porte qui se trouvait à l’ouest de la ville emmenait les voyageurs jusqu’à Eleusis. Elle se trouvait par ailleurs à proximité d’une autre porte, le Dipylon (la « double porte »), considérée comme la plus majestueuse et la plus officielle des portes, qui elle rejoignait la région d’Akademia Platonos (l’Ecole de Platon). Il existe encore aujourd’hui des ruines de cette porte, sur le site de Kerameikos à Athènes! On a également pu établir une reconstitution du site. 1 Carte trouvée sur le site internet suivant : http://trefaucube.free.fr/index.php?id=55 5
Le Dipylon et la Porte Sacrée Nous pouvons observer sur cette image la porte nommée Dipylon (à droite) et la Porte Sacrée (à gauche) par laquelle devaient passer les Athéniens voulant se rendre à Eleusis, puis Olympie. Photo prise sur le site même Site de Keramikos Les ruines de la Porte Sacrée se trouvent au milieu de la photo. Photo personnelle prise sur le site même Imaginons maintenant un Grec ancien venant de franchir la porte, se retournant pour faire un dernier adieu à sa ville. Voici ce qu’il verrait : L’Acropole (le monument en haut au milieu) était visible depuis la Porte Sacrée. Photo personnelle prise sur le site même Photo prise sur le site même Photo personnelle prise sur le site même 6
Une fois la porte passée, nous nous engagions sur une route d’environ 25 km qui menait jusqu’à Eleusis, la « Voie Sacrée ». La Voie Sacrée, d’Athènes à Eleusis Sur cette carte nous pouvons voir le chemin tracé en rose.1 Dans l’Antiquité, plus ou moins chaque ville grecque possédait sa « Voie Sacrée », c'est‐à‐dire une route qui menait à un lieu sacré, tel un sanctuaire. A Eleusis c’est le sanctuaire de Déméter, déesse de l’agriculture, qui attirait les pèlerins. Déméter avait une grande importance dans la mythologie, car étant la «Terre Mère » (« Dé » vient du mot « γη » voulant dire « terre » et « méter » vient du mot « μήτερ » voulant dire « mère »), elle avait une grande influence sur les récoltes. De plus, les populations dépendaient énormément de l’agriculture, étant donné que leur alimentation était directement issue de ce que la terre produisait. La déesse était donc très vénérée et le sanctuaire très visité. La Voie Sacrée est l’une des plus vielles routes d’Europe. Son importance était considérable, car elle était la seule route qui reliait Athènes à la Grèce du Nord et au Péloponnèse. Elle permettait donc un important accès, mais était aussi utilisée à des fins religieuses (grâce au sanctuaire de Déméter), économiques et politiques. 1 Carte trouvée sur le site internet : http://www.mediterranees.net/geographie/pausanias/livre1g.html 7
En outre, l’endroit était connu pour être, en ce temps‐là, le plus important cimetière d’Athènes. On a en effet retrouvé une quantité de tombeaux de part et d’autre de la route, dont quelques‐uns appartenant à des personnalités. Nous pouvons citer par exemple celui du fameux homme politique Thémistocle. Des ruines de la voie (sur une longueur de 27 mètres) ont été elles aussi retrouvées dans la région de Egaléo. On a ainsi pu apprendre que deux petits murs en pierre bordaient alors la route, et que cette dernière avait déjà subi cinq revêtements de chaussée consécutifs. Ils étaient faits soit de pierres lissées, de petites pierres, de terre battue ou de gravier. Le premier revêtement aurait été quant à lui construit avec de la roche, et des traces de chars d’environ 1,4 mètres de largeur ont pu être observées lors de la découverte des ruines. Par ailleurs, de grosses pierres faisant office d’indicateur de direction étaient présentes le long de la route. Indicateur de direction Nous pouvons y lire «H Οδός της Ελευσίνας » ce qui veut 1 dire « La route d’Eleusis ». Sur cette photo contemporaine nous pouvons lire le nom de la route qui est « IERA ODOS » c'est‐à‐dire « Voie Sacrée ».2 Lorsque je me suis rendue sur place, dans la région de Keramikos, afin de visiter les ruines de la Porte Sacrée, je me suis aperçue que la route partant du site et menant à Eleusis porte toujours le nom de « Voie Sacrée »! 1 Image trouvée sur le site internet suivant : http://el.wikipedia.org/wiki/%CE%99%CE%B5%CF%81%CE%AC_%CE%9F%CE%B4%CF%8C%CF%82 2 Photo personnelle prise au début de la rue « Voie Sacrée » à Athènes 8
Il est amusant de constater la différence qu’il existe entre le cadre actuel (mur de couleur intense, présence de graffitis) et la notion religieuse qui se cache réellement derrière le nom de la route (du fait du mot « sacrée »). 1.4 D’Eleusis à Corinthe et au‐delà La Voie Sacrée rejoignait donc la ville d’Eleusis. De là, nos voyageurs devaient atteindre Corinthe1, qui se situe un peu plus à l’Est, en passant par Mégare. Ce parcours d’Eleusis à Corinthe était connu pour être particulièrement périlleux, du fait de son relief très rocailleux et du grand nombre de voleurs et malfaiteurs qui y rôdaient. Les Grecs devaient passer notamment par un endroit appelé « la méchante échelle » (Η Κακιά Σκάλα), qui se situe en pleine montage et qui porte encore son nom aujourd’hui. Elle demeure toujours une route redoutablement dangereuse. La route de « la méchante échelle » contemporaine Des tunnels (non visibles sur cette image) ont même 2 dû être construits pour faciliter l’accès. La légende raconte que c’est l’Athénien Thésée (fils d’Egée, roi d’Athènes, et d’Ethra) qui a rendu l’accès possible, en exterminant tous les bandits qui se trouvaient le long du chemin. Les plus fameux brigands étaient Sinis, habitant à Corinthe, Skiron de la région de la Méchante Echelle et le terrible Procuste, qui demeurait dans les hauteurs de la Voie Sacrée. Ce dernier, paraît‐il, attachait les voyageurs à qui il avait offert son 1 Cf. carte p. 5 2 Image tirée du site internet suivant : http://www.digital‐ camera.gr/index.php?option=photos&action=view&photo_id=17973 9
hospitalité à un lit avant de couper ce qui y dépassait ou d’étirer les trop petits afin qu’ils atteignent les bords du lit. Thésée et Procuste Cette image représente Thésée (à droite) s’apprêtant à faire subir à Procuste (à gauche) le même sort qu’à ses victimes.1 Puis nos voyageurs devaient sans doute traverser les monts du Péloponnèse, où régnait le dieu Pan2, avant de longer la rivière Bouraikos. Ils passaient ensuite probablement par la vallée d’Aoranios, enchaînaient avec celle de Ladonas pour enfin rejoindre la rivière d’Alphée. Rappelons que ces chemins étaient empruntés depuis le VIIIe siècle av. JC et l’ont été pendant plus de mille ans. L’itinéraire exact ne peut par conséquent pas être connu avec grande précision. Mais nous disposons d’assez d’informations pour émettre des hypothèses sûrement très proches de la réalité. De plus, en regardant la carte de la Grèce, le parcours décrit ci‐dessus paraît être le plus adéquat. 1.5 D’Elis à Olympie, le dernier parcours Bien que, comme nous le reverrons dans le prochain chapitre, les athlètes n’étaient pas les seuls à emprunter cette route, nous nous attarderons spécialement à un certain détour qu’il leur était nécessaire d’effectuer avant de rejoindre Olympie. Car les futurs concurrents devaient arriver, un mois avant le commencement des Jeux, à Elis. Cette ville, qui était la capitale de l’Elide, était chargée de l’organisation des Jeux, étant donné qu’Olympie se trouvait sur son territoire. Durant ce mois précédant les festivités avaient lieu les dernières qualifications des athlètes. Ces derniers s’entraînaient en commun et étaient jugés non seulement sur 1 Photographie d’un kylix (type de coupe à boire) attique à figures rouges de 440 à 430 av. J‐C., trouvée sur le site : http://s2.e‐monsite.com/2010/05/29/12/Procuste.jpg 2 Pan était, dans la Grèce antique, le dieu de « la totalité » (Pan venant d’un mot grec voulant dire le tout), de la Nature toute entière. Cette divinité avait une apparence mi‐homme, mi‐bouc. 10
leurs qualités physiques mais aussi sur leur sens moral et leur esprit. Ceci montre bien l’importance spirituelle qu’accordaient les Grecs anciens à leurs Jeux. Il était permis aux entraîneurs d’être présents durant les entraînements, mais ils n’étaient cependant pas autorisés à intervenir ; c’étaient aux Hellanodices (les juges des Jeux olympiques) qu’était réservé le droit d’évaluer les futurs champions. Lorsque les dernières sélections étaient terminées, on formait un cortège qui quittait la ville d’Elis pour enfin rejoindre Olympie. Cette dernière route, qui était empruntée par tous les athlètes, était longue d’environ 57 km et portait elle aussi le nom de Voie Sacrée. Mais elle était bien moins connue que la voie dont il a été question ci‐dessus, car bien moins souvent utilisée. Sur cette carte est tracé le chemin que devait emprunter le cortège. 1 Le cortège, dirigé par les Hellanodices, faisait une halte à une source sacrée appelée Pièra, où l’on pratiquait des rites purificatoires en s’aspergeant de sang de porc avant de se laver dans de l’eau douce. Puis, la dernière nuit avant le commencement des Jeux tant attendus était passée à Létrine. Le deuxième jour – considéré officiellement comme le premier jour des Jeux olympiques, puisque c’est en ce jour qu’avaient lieu les cérémonies d’ouverture – la 1 Carte tirée du livre : Douze siècles de Jeux à Olympie, p. 64 11
procession pénétrait dans le site d’Olympie. L’ordre d’arrivée était bien spécifique : d’abord entraient des joueurs de trompette, puis les prêtres et les Hellanodices suivis des magistrats d’Elis et des villes avoisinantes. Venaient ensuite les athlètes accompagnés d’un parent et de leur entraîneur et enfin les chevaux et les chars. Une fois entré dans le site, le cortège s’arrêtait au Bouleutérion (bâtiment dans lequel se réunissait la haute assemblée d’une cité grecque antique), devant le majestueux autel de Zeus. A cet endroit, les athlètes prêtaient le serment olympique, qui consistait à jurer de se conformer aux règles des Jeux et de se comporter de manière loyale. Il est amusant de relever que les juges devaient eux‐aussi prêter serment, en s’engageant à n’accepter aucun pot‐de‐vin. Puis les jeunes sportifs inscrivaient leur nom sur une liste officielle, afin qu’on procède au tirage au sort et qu’ils puissent découvrir leur futur adversaire. La journée se terminait avec différents sacrifices et le soir, un riche banquet attendait les dignitaires, les prêtres et les juges. Quand aux épreuves sportives, elles commençaient le lendemain. Reconstitutions du site d’Olympie Le « conseil olympique » (au milieu à droite) avait lieu dans le Bouleutérion, devant le temple de Zeus.1 1 Image trouvée sur le site suivant : http://www.google.ch/imgres?q=Olympie+Bouleut 12
Reconstitutions du site d’Olympie Cette image nous montre le Bouleutérion au premier plan (sur la droite) et le temple de Zeus à l’arrière.1 D’après Socrate, qui parcourut la route depuis Athènes, le trajet durait environ six jours. Ce parcours devait donc être assez rude et éprouvant pour nos voyageurs, mais les différents enjeux en valaient la peine. La plupart se déplaçaient à pied, mais les plus riches préféraient parfois faire le chemin à cheval. Les traces de chars qui ont pu être observées sur la Voie Sacrée2 révèlent quand à elles que les Grecs de l’Antiquité utilisaient déjà ces moyens de transports. 1 Image trouvée sur le site suivant : http://ookaboo.com/o/pictures/picture/1946724 2 Cf. 1.3 parcours, p. 6 13
Chapitre 2 : Les voyageurs 2.1 Artistes et philosophes Il est évident que lorsqu’on réfléchit aux personnes qui empruntaient la route menant à Olympie, on pense tout de suite aux athlètes, ainsi qu’à leurs entraîneurs, voire également à leur famille. Mais ils n’étaient pas les seuls, loin de là! Tout d’abord, de nombreux artistes avaient un grand désir de se rendre aux Jeux, car c’était là une magnifique occasion de se faire connaître. Les savants et philosophes y abondaient. Les plus jeunes cherchaient à se faire repérer par des maîtres de philosophie réputés, afin de pouvoir devenir ensuite leurs élèves. D’autres faisaient connaître leurs sages ou éloquentes théories et conceptions au grand public. Nous pouvons mentionner par exemple l’un des plus célèbres sophistes du monde hellénique, le légendaire Gorgias, qui tenta même de soulever l’opinion publique en faveur d’une cause qu’il défendait, comme nous le confirme P. G‐Y.1 : « (En parlant de Gorgias) On cite un discours prononcé sur les degrés du temple d’Olympie pour engager les Grecs à la concorde et à s’unir pour repousser les Mèdes et les Perses ». Il en va de même pour quelques autres célébrités, tels les brillants orateurs Démosthène et Lysias, ainsi que Socrate. Platon s’y rendait paraît‐il également, tout comme Isocrate, un autre illustre sophiste. Nous pouvons imaginer qu’il y avait alors à Olympie de véritable « joutes oratoires ». Les écrivains, poètes et historiens profitaient aussi des grands regroupements d’auditeurs que provoquaient les Jeux olympiques pour aller présenter leurs œuvres. Il en va ainsi de l’historien Hérodote, comme l’affirme Philippe Remacle : « Les grands Jeux d’Olympie approchaient : Hérodote pensa que c’était justement l’occasion qu’il souhaitait si vivement. Aussi, quand il eut remarqué que l’assemblée était au complet, que de toutes parts étaient arrivés les hommes les plus éminents, il s’avança derrière le temple, se donna, non comme un spectateur, mais comme un prétendant aux prix olympiques, lut son histoire, et charma tellement les auditeurs, qu’ils donnèrent le nom d’une muse2 à chacun de ses livres. 1 Citation trouvée sur le site internet suivant : http://books.google.ch 2 Filles de Zeus, les muses représentaient la musique et la littérature et présidaient aux arts libéraux (soit la musique, l’arithmétique, la géométrie et l’astronomie.) 14
De ce moment, Hérodote fut plus connu que tous les vainqueurs eux‐mêmes : son nom n’était ignoré de personne ; les uns l’avaient entendu à Olympie, les autres le connaissaient par le récit de ceux qui avaient assisté aux Jeux. »1 Rappelons qu’il existait également des concours de trompette, lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux. Les vainqueurs recevaient d’ailleurs eux aussi le titre d’olympionique2. Mais il avait quand‐même fallu attendre les jeux de 396 av. J‐C pour que ce type de concours ait lieu. En effet, avant cette date, l’art occupait une place moins grande que les concours de force physique. D’autres concours artistiques ont vu le jour dès 66 apr. J‐C. Ainsi Olympie a pu accueillir de plus en plus de musiciens (notamment des joueurs lyre, de cithare, de flûte et d’aulos, un ancien instrument à vent), de chanteurs, de poètes et de rhéteurs. Les peintres, eux aussi, venaient exposer leurs œuvres tout comme les sculpteurs auxquels il incombait de tailler les portraits des vainqueurs dans la pierre. En outre, acrobates, clowns et autres artistes du spectacle venaient divertir les foules, créant ainsi une atmosphère de festival sur le site. Un trompettiste Les musiciens devaient sans doute voyager avec leur trompette qui pouvait atteindre jusqu’à 160 cm.3 2.2 Les commerçants Les commerçants aussi avaient avantage à se rendre aux Jeux, car la demande d’objets divers, comme des articles de poterie ou de bois, des statuettes de Zeus ou d’autres divinités d’Olympie, des graines d’encens et des ex‐voto était très forte. Le commerce des marchands de souvenirs prospérait donc à Olympie. 1 Citation trouvée sur le site internet: http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/Lucien/herodote.htm 2 Olympionique vient du mot « Olympie » ainsi que du mot « Nikè » qui luit signifie « victoire ». Olympionique veut donc dire vainqueur à Olympie. 3 Extrait déroulé d’une coupe attribuée au peintre de Scheurleer, musée du Louvres, tiré du livre Douze siècles de jeux à Olympie, p.127 15
De plus, à partir d’un certain temps, les Jeux ont commencé à s’internationaliser, à cause notamment de la domination romaine (cf. Chap.1.1). Etre Grec était toujours une condition primordiale pour pouvoir y participer, mais cette notion sous‐entendait qu’il fallait être né, ou vivre, non pas strictement sur le sol grec, mais aussi dans une colonie. Nombre de Romains purent ainsi « emprunter » la nationalité grecque et prendre part aux festivités. Ce phénomène permit de favoriser grandement les échanges commerciaux ; car les personnes venant de loin amenaient les produits typiques de leur région et souhaitaient aussi découvrir ceux d’ailleurs. Les Jeux olympiques contribuèrent ainsi au développement du commerce international. 2.3 Les athlètes Revenons à présent aux athlètes qui devaient faire ce long voyage pour défier les champions des autres villes grecques. Le règlement officiel des Jeux antiques stipulait que seuls des citoyens hellènes libres avaient le droit de prendre part aux concours. Ceci excluait donc les esclaves, les métèques (étrangers qui, bien que domiciliés dans une cité, n’étaient pas admis à la citoyenneté de celle‐ci), ainsi que les personnes ayant une fois été condamnées par la justice. Nous constatons clairement que les Grecs exigeaient que leurs athlètes – et futurs héros – soient dotés d’un comportement et d’une moralité exemplaires. Images de jeunes athlètes sur leur chemin (reconstitution) 1 Par ailleurs, les concurrents étaient issus, pour la plupart, d’un milieu aristocratique. En effet, participer aux Jeux olympiques demandait de posséder quelques moyens ; il 1 Images tirées du film OLYMPIE, VAINCRE POUR ZEUS, (53 min 55 sec) 16
faillait tout d’abord pouvoir se permettre de prendre le temps de s’entraîner suffisamment, payer les entraîneurs et l’entrée au gymnase ainsi que les offrandes qu’il était nécessaire de faire une fois arrivé à Olympie. Un simple artisan avait donc plus de difficultés à s’engager dans une telle aventure. Mais les athlètes venant d’une classe sociale moins élevée n’étaient toutefois pas exclus des Jeux. Leur participation restait cependant plus difficile, car il leur fallait être dans un premier temps repérés par les dirigeants de leur ville, afin d’obtenir ensuite un soutien matériel de celle‐ci. Il fallait donc qu’un nécessiteux soit particulièrement talentueux pour qu’il puisse prendre part au voyage. Par ailleurs, les athlètes ne voyageaient pas seuls. Ils étaient au minimum accompagnés de leur entraîneur, d’une partie de leur famille, souvent d’un masseur et éventuellement d’un palefrenier. Les voyageurs se déplaçaient ainsi en petits groupes, parfois même en cortège. Notons toutefois que la démocratisation du pays, survenue vers la fin du Ve siècle av. J‐C, provoqua quelques changements dans l’origine sociale de nos champions. Ceci vient du fait que l’éducation, autant intellectuelle que physique, devint plus accessible à la population, ce qui encouragea des jeunes venants de milieux plus modestes à tenter leur chance en tant que sportifs. 2.4 Les femmes Abordons maintenant la place de la femme dans les Jeux olympiques. Il est vrai qu’il est le plus souvent question de mâles lorsque l’on parle d’athlètes olympiques antiques. Les femmes n’avait‐elle donc pas le droit de se présenter aux Jeux? La réponse est bien évidemment non. Il était formellement interdit à toute femme, mariée ou non, jeune ou âgée, de seulement assister aux Jeux Olympiques. Il est complexe de comprendre les raisons d’une telle décision. Selon certains historiens, le cliché grec montrait la femme comme recluse dans son gynécée (ceci est, dans l’Antiquité, la partie de l’habitation réservée aux femmes) et donc elle n’était pas apte à participer à des Jeux d’une telle renommée. Si une femme tentait de transgresser cette loi stricte, elle risquait de se faire jeter du haut d’une montagne, appelée le Typaeum. C’est dire combien les Grecs tenaient à ce que le règlement soit respecté. Une femme aurait pourtant osé tromper les organisateurs, en s’habillant en homme, pour pouvoir admirer son fils qui était un des occurrents. Ce dernier ayant gagné l’une des compétitions, sa mère ne put se contenir et courut le féliciter. A en croire la légende, cette précipitation lui aurait fait perdre une partie de son vêtement, et aurait 17
ainsi dévoilé sa féminité aux autres. Mais elle n’eut pas à subir le châtiment fatal, du fait qu’elle comptait dans sa famille un grand nombre d’olympioniques. Une seule femme était pourtant présente tout au long du déroulement des Jeux. Ce n’était autre que la prêtresse de Déméter Chamyne, qui s’installait sur un trône face aux juges dès le premier jour des festivités, et qui présidait ainsi les Jeux. Cependant, il arrivait qu’une femme devienne « vainqueur olympique ». Ceci se produisait lors des courses de chars, car le vainqueur n’était pas celui qui conduisait le char, mais le propriétaire de l’attelage. Précisons que les femmes avaient quand‐même leurs propres Jeux athlétiques. Ceux‐ci avaient lieu notamment à Sparte, à Argos et même à Olympie. Mais ils n’avaient toutefois pas du tout la renommée des Jeux des hommes. Nous pouvons constater qu’à cause de cette interdiction, le voyage, d’un peu moins d’une semaine, se faisait entre hommes seulement. Jeune fille athlète Statuette d’une jeune 1 Jeune fille athlète femme spartiate s’entraînant à la course2 2.5 Les spectateurs Pour finir, n’oublions pas le nombre incroyable de spectateurs qui affluaient à Olympie. Ils auraient été de 40 à 50 000 à assister aux Jeux tous les quatre ans! Un réel village de tentes se formait d’ailleurs autour du sanctuaire. 1 Image tirée du livre Olympic Games in ancient Greece, p.58 2 Vers 550‐520 av. J.‐C. British Museum, Londres. Image trouvée sur le site http://enugmis.wordpress.com/2007/08/04/en-construction-enugnis-146-les-femmes-guerrieres- en-grece-ancienne/ 18
De plus, les spectateurs pariaient sur les courses de char, ce qui les rendait fous d’excitation, comme en témoigne l’orateur Dion du Pruse, surnommé Dion Chrysostome (qui en grec veut littéralement dire « bouche d’or »), s’adressant au public : « Aucun de ces chevaux ne courrait moins vite si vous vous teniez correctement […]. Qui peut décrire vos cris, votre émoi et votre angoisse, vos contorsions et vos rugissements, les terribles imprécations que vous proférez ? Si vous n’étiez pas seulement en train de regarder une course de chevaux (et de chevaux qui ont l’habitude de courir), mais en proie aux affres d’une tragédie, vous n’en seriez pas aussi cruellement affectés. » 1 Il est vrai que la puissance de chaque cité grecque se faisait sentir durant les Jeux olympiques. Lorsqu’un Athénien, par exemple, devenait olympionique, on pouvait en déduire que le système sportif d’Athènes était d’un haut niveau. Ceci laissait entendre que le système militaire était lui aussi bien au point. Les dirigeants des cités avaient donc grand intérêt à observer les athlètes olympiques, qui reflétaient en quelque sorte la grandeur de leur territoire, afin de repérer les fortes cités qui pourraient devenir des ennemis potentiels. En outre, il ne faut pas perdre de vue que la Grèce n’était pas encore un pays uni comme de nos jours ; il s’agissait plutôt d’Etats‐cités ou de petites cités autonomes. Or les Jeux olympiques représentaient le plus grand rassemblement des Grecs anciens se déroulant dans une atmosphère pacifique. Ceci permettait aux dirigeants de régler les problèmes qui existaient entre les cités, comme nous le confirment certains auteurs : « Olympie était le centre panhellénique le plus fréquenté et de ce fait les problèmes y étaient plus ou moins directement soulevés. Les champions de l’union de la Grèce contre l’Empire Perse s’y firent entendre. » 2 Fragment d’un vase peint par Sophilos, vers 580‐570 av. J.‐C., sur lequel sont représentés des spectateurs en folie.3 Pour conclure, sportifs, artistes, philosophes, commerçants, hauts dirigeants et toute personne souhaitant atteindre la célébrité empruntaient le chemin menant à Olympie. 1 Cité par M.I Finley et H.W Pleket, 1000 ans de Jeux Olympiques, p.99 2 Citation tirée du livre Les Jeux olympiques dans l’antiquité, p. 71, par Elie Fallu 3 Musée national d’archéologie d’Athènes. Extrait de Ph. De Carbonnières, Olympie, La victoire pour les dieux, 1995. Site : http://www.peplums.info/pepcour40a.htm 19
Chapitre 3: Pour les dieux 3.1 La Trêve sacrée La route menant aux Jeux olympiques pouvait se montrer particulièrement dangereuse, par son relief difficile, les mauvaises rencontres que l’on pouvait y faire et la longueur du trajet. Imaginons donc la dureté du parcours si nos voyageurs devaient, en plus de cela, craindre de traverser le territoire d’une cité ennemie. C’est pour éviter ce risque que l’on instaura la Trêve sacrée. Cette Trêve avait comme but de suspendre les hostilités dans toute la Grèce pour qu’athlètes, entraîneurs, artistes et spectateurs puissent atteindre Olympie sans risque d’être attaqués. Ce serait le roi d’Elide, Iphitos, qui aurait le premier instauré cette loi, à la suite d’un oracle de la Pythie de Delphes. Cette dernière aurait en effet déclaré qu’aucune guerre ne devrait exister durant les Jeux. Environ un mois avant le commencement des festivités, des messagers appelés « spondophores » (porteurs de trêve) partaient d’Elis et voyageaient de cité en cité à travers toute le Grèce pour y annoncer la date exacte des Jeux. Ils demandaient également aux dirigeants d’imposer et de respecter la Trêve sacrée et d’inviter leurs athlètes à prendre part aux Jeux d’Olympie. Un « spondophore » 1 Dans les premiers temps, la Trêve ne durait qu’un mois environ. Mais le Grèce ne cessant de s’agrandir grâce à ses conquêtes, il fallu la rallonger jusqu’à trois mois, afin de permettre aux habitants des colonies de se rendre au lieu sacré sans danger, et de retourner dans leur territoire en toute tranquillité. 1 Image d’un vase à fond rouge, trouvée sur le site suivant : http://etwinning.sch.gr/projects/elia/ekexeiria_en.htm 20
Les conditions de ce décret, qui étaient paraît‐il gravées en rond sur un disque très ancien, le disque d’Iphitos, étaient au nombre de quatre. Le premier article demandait à toutes les villes hellènes de cesser les combats pendant une période de un à trois mois. Le deuxième exigeait de ces villes de garantir la sécurité et l’hébergement aux participants et spectateurs qui y passeraient. Le troisième quand à lui déclarait neutre le territoire de l’Elide, interdisant aux troupes militaires armées d’y pénétrer. Le quatrième enfin exigeait l’ajournement de toute condamnation à mort. Remarquons que le troisième point faisait de l’Elide le temple de la paix. Il est intéressant de relever que cette trêve était « sacrée » par le fait que c’était une loi de Zeus. Or, une malédiction divine frappait ceux qui s’aventuraient à désobéir à ce dieu. De plus, une légende affirmerait que ce serait le héros Héraclès qui en aurait été l’interprète auprès des hommes. Il était donc vu comme un sacrilège d’oser violer cette Trêve, qui inspirait crainte et respect à tous les Grecs. Ainsi, les Alytes (sortes de policiers chargés de défendre le territoire d’Olympie) qui avaient le droit de réduire en esclavage les contrevenants ou bien même de les tuer, se voyaient rarement amenés à appliquer de telles sanctions. Car en effet les Grecs, par superstition, étaient découragés d’enfreindre les règles. Une preuve du grand respect de cette Trêve est que l’on n’a jamais dû construire de murailles afin de protéger Olympie. Le troisième article était donc respecté. En somme, nos voyageurs pouvaient entreprendre ce voyage jusqu’au lieu des Jeux olympiques sans craindre de se faire embarquer dans un conflit, et ce grâce à la Trêve sacrée. Nous pouvons relever la belle symbolique de paix que reflète la Trêve ; tous se retrouvent comme Hellènes et marchent ensemble vers le lieu sacré d’Olympie.1 3.2 Rêves et buts des voyageurs Contrairement aux autres concours locaux, les Jeux olympiques avaient une origine religieuse (comme énoncé dans le Chapitre 1). Ils avaient pour but de rendre hommage aux dieux, plus spécialement à Zeus, dont un temple magnifique avait été construit à Olympie. Ils renvoyaient également à des rites funéraires, destinés à glorifier les morts. De plus, les Grecs pensaient que la victoire à Olympie dépendait de la décision des dieux. C’était la divinité Niké (qui veut dire victoire), représentée sous forme de femme 1 Citation tirée du site suivant : http://www.mediterranee‐antique.info/Grece/Schoemann/G_604.htm 21
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