Nos enfants et petits-enfants auront-ils 100 ans ? - Forum ...
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Volume 40 - Numéro 8 Hebdomadaire d’information 17 octobre 2005 www.umontreal.ca GÉOGRAPHIE La rouille du soya sous la loupe de Paul Comtois. PAGE 7 cette Nos enfants et petits- semaine enfants auront-ils 100 ans ? VIE ÉTUDIANTE La FAECUM lance un sondage sur les conditions financières des étudiants. PAGE 3 Nos enfants célèbreront-ils un jour leur 100e anniversaire ? BIOLOGIE Des guêpes pour « Ils ont d’excellentes chances faire la lutte aux pucerons. statistiques d’y arriver. Bien meilleures que les nôtres. Sur- PAGE 5 tout les filles », répond Robert Bourbeau, directeur du Dé- NEUROPSYCHOLOGIE partement de démographie et chercheur spécialisé en matiè- Réédition d’un ouvrage re de longévité humaine. majeur et hommage à Actuellement, l’espérance Mihai Botez. PAGE 6 de vie à la naissance des Qué- bécoises est de 82 ans, non loin des championnes en titre, les Japonaises (85 ans), et encore plus près des Françaises (83 ans). Mais ce chiffre étant Les antioxydants une moyenne, le Québec comp- durant la grossesse te beaucoup plus de centenaires qu’autrefois. On note même feraient des une augmentation de ce que les miracles spécialistes appellent des « su- percentenaires », soit des per- sonnes qui dépassent le cap des Les femmes qui consomment pen- 110 ans. Par exemple, le 16 sep- dant leur grossesse des antioxydants, tembre dernier, à Montréal, Ju- plus particulièrement des supplé- lie Winnefred Bertrand fêtait ments de vitamines C et E, pour- son 114e anniversaire, devenant raient être protégées contre la pré- la cinquième personne la plus éclampsie et prévenir chez leurs âgée dans le monde. futurs enfants les maladies cardio- Il s’agit d’un cas authenti- vasculaires chroniques et le diabète fié par les chercheurs. C’est im- de type 2. portant de le mentionner, car C’est en tout cas l’hypothèse que dans ce domaine on se heurte tentera de confirmer une équipe de souvent aux lacunes de la mé- chercheurs en obstétrique, épidé- thodologie. Or, grâce aux re- miologie, physiologie et nutrition gistres paroissiaux et aux don- sous la direction du Dr William Fra- nées de l’état civil, l’équipe ser, directeur du Département d’obs- montréalaise peut déterminer tétrique-gynécologie de la Faculté avec exactitude les dates de de médecine, grâce à une subven- naissance et de décès des cen- tion de 1,6 M$ des Instituts de re- tenaires et supercentenaires et cherche en santé du Canada (IRSC). asseoir ainsi l’étude du phéno- « Nous savons que le fœtus est for- mène sur des bases rigoureuses, tement influencé par l’environne- ce que très peu de pays ou de ment intra-utérin dès les premiers régions sont en mesure de faire. stades de son développement, com- Quand le démographe ex- mente le Dr Fraser. Un de nos ob- hibe la courbe des décès des jectifs, dans cette recherche, est de centenaires sur un graphique, vérifier si les indices du stress oxy- on est frappé par leur hausse datif, mesurés sur le sang du cordon, constante au Québec. Alors ont un effet sur cette “programma- qu’on comptait moins de 20 dé- tion” foetale. » cès de centenaires annuelle- Ce que le chercheur entend par ment avant les années 60, on « stress oxydatif », c’est la carence en dénombrait environ une en antioxydants, ces substances centaine en 1980 et plus de (principalement les vitamines C et 300 en 2004. Au dernier re- E, les caroténoïdes et le sélénium) censement canadien, en 2001, Statistique Canada rapportait Suite en page 2 près de 3800 centenaires au pays, dont environ 800 au Qué- bec. « C’est un nombre peut- être excessif, nuance Robert Bourbeau, car le recensement se base sur l’autodéclaration. Mais il traduit une vérité indis- Nous vivons de plus en plus longtemps et, si la santé est au rendez-vous, la joie de vivre l’est aussi. cutable. » Le Québec n’est pas une exception. Selon un article pa- gularité déconcertante : trois les femmes japonaises depuis pourrait ralentir ou s’inverser. ru dans Science en 2002 et si- mois par année en moyenne. À 2001», mentionne M. Bourbeau. Rien... ou presque. « La vague gné par Jim Oeppen et James ce rythme, l’espérance de vie Contestée, la projection de d’obésité dans plusieurs pays Vaupel, respectivement de pourrait atteindre 95 ans dans Oeppen et Vaupel ne se base pourrait causer des surprises, si- l’Université de Cambridge et certains pays en 2040. Et au pas moins sur des données dé- gnale M. Bourbeau. Aux États- du Max Planck Institute for De- diable tous ceux qui affirment, mographiques solides. En pla- Unis et même au Canada, on mographic Research, l’accrois- documents à l’appui, que la vie çant sur une courbe les trouve une proportion crois- sement de l’espérance de vie humaine a une limite biolo- moyennes des pays les plus per- sante d’adolescents et même est un phénomène constant de- gique ! « Un chercheur très res- formants pour ce qui est de la d’enfants obèses. Formeront-ils puis... 160 ans. Dès 1840, la vie pecté dans le milieu, S. Jay Ol- longévité, ils excluent sciem- la première génération à mourir humaine a commencé à s’al- shansky, a annoncé en 1990 ment les collectivités ravagées plus jeunes que leurs parents ? longer, tant pour les femmes qu’il était fort peu probable que par les guerres ou les catas- Ce n’est pas impossible. » que pour les hommes, et cette l’espérance de vie dépasse les trophes naturelles. Mais rien ne augmentation a été d’une ré- 85 ans. C’est chose faite pour laisse croire que la tendance Suite en page 2 Le Dr William Fraser
2 FORUM S e m a i n e d u 1 7 o c t o b r e 2 0 0 5 Nos enfants Les antioxydants durant la grossesse Fraser est convaincu qu’on peut faire de l’excellente recherche en santé au Canada, même si les et petits- feraient des miracles budgets ne sont pas toujours aus- si mirobolants que chez nos voi- enfants... Suite de la page 1 ne au cours de précédents tra- vaux. « Nous pouvons compter qui a des volets fondamentaux et cliniques. Plusieurs étudiants aux sins du Sud. « En vertu de nos va- leurs et de notre système de santé Suite de la page 1 capables de neutraliser ou de ré- sur un échantillon très large et cycles supérieurs profiteront de public, c’est plus facile de consti- duire les dommages causés par c’est ce qui fait notre force. Dans l’occasion pour entamer une mai- tuer ici des échantillons repré- Comme Oeppen et Vaupel, les radicaux libres dans l’orga- le domaine de la périnatalité, les trise ou un doctorat. sentatifs pour la recherche cli- qualifiés d’optimistes, M. Bour- nisme. Les radicaux libres « oxy- recherches sont souvent effec- Quatre axes principaux se- nique, affirme-t-il. Le Canada n’a beau et la plupart de ses collègues dent » les cellules et jouent donc tuées chez un petit nombre de pa- ront suivis. Le premier concerne pas encore atteint le niveau de fi- pensent que, du point de vue de un rôle important dans le vieillis- tientes », signale le professeur Fra- les facteurs génétiques, nutri- nancement de la recherche que la santé publique, les progrès mé- sement. ser. À titre d’exemple, certains de tionnels et environnementaux liés je souhaiterais, mais il faut re- dicaux procureront plus de bien- Le programme dirigé par le ses plus récents résultats s’ap- à des problèmes de santé chez la connaitre que des efforts majeurs faits qu’ils ne causeront d’incon- Dr Fraser comporte deux com- puyaient sur des données re- mère, surtout la prééclampsie, et ont été déployés pour remédier à vénients. « Ce matin encore, on posantes majeures. La première, cueillies auprès de 2000 patientes les retards de croissance chez le la situation depuis une dizaine annonçait dans le journal un vac- appelée International Trial of An- suivies dans 56 centres de 13 pays. fœtus. Le deuxième tentera de d’années. » cin contre le cancer du col de tioxidants in the Prevention of Plusieurs milliers de femmes préciser les bienfaits des supplé- Avec la plus récente subven- l’utérus. Je crois que la limite bio- Preeclampisa (INTAPP), est une enceintes seront conviées à par- ments d’antioxydants chez la mè- tion des IRSC, qui s’ajoute aux logique de la vie humaine n’est recherche clinique menée auprès ticiper à ce projet de recherche re en matière de programmation 4,8 M$ obtenus du même orga- pas encore prévisible. » de 12 500 femmes enceintes qui qui s’étendra de la 13e semaine de désordres cardiovasculaires et nisme en 2002 pour le projet Quand on parle de la longé- prennent des vitamines C et E de grossesse jusqu’à un an après métaboliques. Le troisième es- INTAPP et à une initiative stra- vité, une chose surprend toujours : ou un placébo. La seconde a l’accouchement. Pour le Dr Fra- saiera d’établir un modèle de pré- tégique de formation en re- la surreprésentation des femmes. été nommée Maternal-Infant ser et son équipe, la subvention vention pour la prééclampsie à cherche de 1,8 M$, le Dr Fraser fi- Aussi loin qu’on remonte dans le Research on Oxidative Stress arrive à un bon moment puisqu’ils partir de signes précliniques. Un gure en tout cas dans le peloton temps, c’est un fait avéré : les (MIROS) et se penche directement disposent de nouveaux labora- quatrième axe de recherche sur de tête des chercheurs canadiens femmes meurent plus vieilles que sur le stress oxydatif. Plus de toires d’une superficie de 2500 pi2 des modèles animaux s’ajoute à en périnatalité. « Ce qui me rend les hommes. Au Québec, l’écart 20 chercheurs y sont associés. Les juxtaposés à l’unité d’obstétrique ces travaux. surtout fier, c’est d’avoir compo- dans l’espérance de vie à la nais- participantes au premier volet sont et de gynécologie de l’Hôpital Pour la plupart des femmes sé une équipe d’hommes et de sance est actuellement de cinq an- invitées à prendre part au second. Sainte-Justine. enceintes qui prendront part à femmes capables de rivaliser avec nées. Même lorsqu’une grande La faisabilité des études MIROS, deux rencontres avec un les meilleurs du monde », tient-il proportion d’entre elles mouraient MIROS et INTAPP repose sur le Collaboration membre de l’équipe de recherche à mentionner. L’appui de l’Uni- en accouchant, elles avaient tout réseau que le Dr Fraser a établi interdisciplinaire suffiront, avant et après l’accou- versité et de l’Hopital Sainte- de même une avance de près de au Canada, au Mexique et en Chi- Vingt-deux personnes, dont chement. On demandera à envi- Justine a été déterminant. deux ans. Depuis, elles demeu- plusieurs Canadiens mais aussi ron 3000 femmes au Canada d’y Après avoir fait ses études rent les reines de la longévité. des chercheurs en provenance collaborer. médicales à l’Université Dal- Cet écart entre les sexes s’ex- d’Europe et d’Asie, sont engagées « Cette recherche interdisci- housie, à Halifax, le Dr Fraser plique par des facteurs biolo- « Ce qui me rend surtout dans MIROS. Résolument inter- plinaire va créer une synergie sans s’est spécialisé en gynécologie- giques et socioculturels. Sur le disciplinaire, le projet rassemble précédent et nous permettre de obstétrique à l’Université McGill. plan biologique, les femmes au- fier, c’est d’avoir composé notamment des épidémiologistes préciser le rôle des antioxydants Il a ensuite obtenu une maitrise raient un avantage lié à la pré- (Zhong Cheng Luo, François Au- dans la prééclampsie et possible- en épidémiologie et fait une surs- sence de leurs deux chromo- une équipe d’hommes dibert, Alexandre Dumont), des ment dans la programmation fœ- pécialité en médecine maternel- somes X ; elles jouiraient aussi pédiatres (Anne Monique Nuyt, tale », se réjouit le Dr Fraser. le et fœtale à l’Université de Cal- d’une protection hormonale na- et de femmes capables Grant Mitchell), une nutrition- gary. Avant que l’Université de turelle, due à la sécrétion de fol- niste (Bryna Shatenstein), des Dundee, Halifax, Calgary, Montréal lui offre la Chaire de liculine, contre les maladies car- de rivaliser avec les chercheurs fondamentalistes (Mi- Québec, Montréal recherche du Canada en épi- diovasculaires, les plus grands chelle Brochu et Blandine Comp- Très attaché au Québec, où il démiologie périnatale, en 2003, il tueurs des sociétés modernes. Sur meilleurs du monde. » te), une sociologue (Denise Avard) possède des racines familiales de était professeur à l’Université Laval. le plan socioculturel, les femmes et une juriste (Emmanuelle Lé- presque deux siècles à Dundee, ont tendance à mieux prévenir vesque). Il s’agit d’une recherche au sud-ouest de Montréal, William Mathieu-Robert Sauvé les problèmes de santé. Le cas des propres parents de M. Bourbeau en témoigne. Son père est mort prématuré- ment, à 50 ans, tandis que sa mè- Derrière les pavillons, des personnes re, âgée de 94 ans, pourrait de- Dans une série de 14 capsules préparées par la Division des archives (www.archiv.umontreal.ca), Forum venir centenaire. vous présente les personnalités qui ont donné leur nom à des pavillons de l’Université. Mais si l’on vit plus vieux, vit-on plus en santé ? « Ça, ad- met le démographe, c’est une hors campus, le Bureau des étu- ve a été dévoilée à cet effet au autre question. » Qui était J.-A. DeSève ? diants internationaux et celui de printemps 1992 en présence du Mathieu-Robert Sauvé l’aide financière, une garderie et président de la Succession, Roland Joseph-Alexandre DeSève est né cembre 1968 en mémoire du fon- une pouponnière, les deux grandes Giguère, et du recteur Gilles Clou- le 14 septembre 1896 à Montréal. dateur de TVA, décédé le 3 sep- associations étudiantes que sont tier. La Succession versa une contri- Comptable de profession et hom- tembre de la même année. l’AGEEFEP et la FAECUM, ainsi que bution de cinq millions de dollars me d’affaires averti, il s’est surtout Sur le campus, on construit en le Registrariat. Le pavillon est aus- à la campagne de financement de L’Assemblée fait connaitre comme propriétai- 1957 un pavillon consacré aux ser- si un lieu de divertissements avec l’établissement et de ses écoles af- re du théâtre Saint-Denis et de la vices aux étudiants qui portera suc- les projections de Ciné-campus, la filiées. M. DeSève créa sa fondation universitaire compagnie de distribution de films cessivement les noms de Centre so- radio étudiante CISM, le centre en 1966 et institua une fiducie par France-Film, devenant à ce mo- cial des étudiants et de Centre d’exposition de la Galerie du SAC volonté testamentaire en 1968 dans du 17 octobre ment distributeur et producteur communautaire pour finalement de- et ses locaux spécialisés pour la te- le but de collaborer au développe- des longs métrages La petite Au- venir le pavillon J.-A.-DeSève en 1991. nue d’une variété d’activités cul- ment et au soutien de la société. est annulée rore : l’enfant martyre et Tit-Coq, Malgré ces changements de turelles (théâtre, photo, vidéo, dan- entre autres. M. DeSève présidera désignation, la vocation du pa- se, salle de répétition). Sources : Le recteur Luc Vinet devait la Tele-International Corporation villon, elle, ne variera jamais. Situé En donnant au pavillon le nom Forum, édition du 8 juin 1992, vol. 26, no 33. s’adresser à la communauté en 1954 et la Télé-Métropole Cor- au 2332, boulevard Édouard- de l’homme d’affaires, l’Universi- universitaire ce lundi 17 octobre poration en 1960. La Ville de Montpetit, le pavillon J.-A.-DeSève té de Montréal a voulu témoigner Forum, édition du 15 octobre 2001, vol. 36, no 7. afin de présenter les premiers Montréal modifia le nom de la rue abrite la direction des Services aux sa reconnaissance à la Succession éléments d’une planification in- De Maisonneuve pour celui de rue étudiants, le Service universitaire J.-A.-DeSève pour ses généreux Forum, édition du 10 juin 2002, vol. 36, tégrée et pluriannuelle qui mè- Alexandre-DeSève le 19 dé- de l’emploi, le Service du logement dons. Une plaque commémorati- no 30. nera à l’adoption du plan d’ac- Jean Cournoyer, La mémoire du Québec, tion UdeM 2010. p. 404. Cette allocution se voulait www.jadeseve.com/ le coup d’envoi d’un vaste pro- www.umontreal.ca/plancampus/index.html cessus consultatif devant se poursuivre au cours des pro- chains mois et mobiliser toutes les composantes de la com- munauté universitaire. Une telle démarche repo- se de manière importante sur la participation du corps profes- soral. C’est pourquoi, compte tenu du climat actuel des né- gociations avec le Syndicat gé- néral des professeurs et pro- fesseures de l’UdeM (SGPUM), il a été jugé préférable d’annu- ler cette rencontre et de repor- ter l’allocution du recteur à une date ultérieure. Le pavillon J.-A.-DeSève Joseph-Alexandre DeSève Hebdomadaire d’information de Directrice des publications et rédactrice en chef de Forum : Paule des Rivières pour nous joindre l’Université de Montréal Rédaction : Daniel Baril, Dominique Nancy, Rédaction www.iforum.umontreal.ca Mathieu-Robert Sauvé Téléphone : (514) 343-6550 Publicité Publié par la Direction des communications Photographie : Claude Lacasse Télécopieur : (514) 343-5976 Représentant publicitaire : et du recrutement (DCR) Secrétaire de rédaction : Brigitte Daversin Courriel : forum@umontreal.ca Accès-Média 3744, rue Jean-Brillant Révision : Sophie Cazanave Calendrier : calendrier@umontreal.ca Téléphone : (514) 524-1182 Bureau 490, Montréal Graphisme : Cyclone Design Communications Courrier : C.P. 6128, succursale Centre-ville Annonceurs de l’UdeM : Directeur général : Bernard Motulsky Impression : Payette & Simms Montréal (Québec) H3C 3J7 Nancy Freeman, poste 8875
Semaine du 17 octobre 2005 FORUM 3 Vie étudiante Semaine des dictionnaires La FAECUM enquête sur les conditions économiques Orthographe rectifiée : des étudiants gets des organismes subvention- que faire en attendant Le but ultime est de contrer le naires, ce qui a eu une influence sur les bourses, souligne-t-il. De nouvelles bourses ont par ailleurs été créées. Mais un fait demeure : le consensus ? décrochage aux les étudiants ne sont pas riches ! » cycles supérieurs Contrer le décrochage L’attentisme Dans le présent sondage, l’ac- domine chez les cent est mis sur les cycles supé- La Fédération des associations étudiantes du campus de l’Uni- rieurs parce qu’on veut y contrer le décrochage. Un étudiant sur langagiers en proie versité de Montréal (FAECUM) trois abandonne sa scolarité à la à l’insécurité amorce cette semaine un vaste maitrise et un sur deux au docto- sondage auprès de ses quelque rat. « Les principales causes de 8000 membres des 2e et 3e cycles décrochage sont le sous-finance- À l’occasion de la Semaine des pour être davantage informée sur ment et le manque d’encadre- dictionnaires, le Département de leurs conditions économiques. ment, précise Mathieu Moreau, linguistique et de traduction or- « Notre objectif est de viser coordonnateur des activités de ganisait, le 7 octobre, un débat un meilleur financement aux recherche à la FAECUM. Ces sur les modifications orthogra- cycles supérieurs et, pour mieux deux éléments sont liés puisque le phiques appelées tantôt « nou- défendre les étudiants, il faut mieux sous-financement entraine un velle orthographe », tantôt « or- connaitre les conditions dans les- manque d’encadrement. » thographe rectifiée ». quelles ils étudient », explique Oli- Dans le courant de la semai- Rappelons que l’Académie vier Sylvestre, coordonnateur des ne, tous les étudiants qui ont été française de même que l’Office affaires académiques des cycles su- inscrits à l’un ou l’autre des pro- québécois de la langue française périeurs à la FAECUM. grammes des cycles supérieurs (OQLF) ainsi que les organismes De gauche à droite, Yves Garnier, Annie Desnoyers, Noëlle Guilloton, Marie-Éva L’opération qu’il coordonne entre le 1er septembre 2004 et le équivalents en Belgique et en de Villers et Nathan Ménard, professeur titulaire au Département de linguis- représente la plus vaste étude sur 31 aout 2005 recevront par cour- Suisse approuvaient, en 1991, une tique et de traduction et animateur de la discussion le sujet depuis celle pilotée par riel l’information nécessaire pour série de modifications destinées à Arnaud Sales, professeur au Dé- répondre au sondage, mis en ligne simplifier certaines règles ortho- dépassent les faibles avantages partement de sociologie, en 1996. sur le site Internet de la Fédéra- graphiques et à éliminer quelques qu’elles procurent », affirme la lin- L’Office statue que les Plus de 8000 étudiants des 2e et tion. Cette invitation sera appuyée exceptions. Peu de publications guiste. Elle signale également 3e cycles sont concernés et les res- par de l’affichage sur les babillards ont adopté ces rectifications, mais qu’une réforme de l’orthographe nouvelles et les anciennes ponsables espèrent un taux de et par des kiosques d’information Forum, le journal de l’UdeM, les en Allemagne, qui devait être obli- participation de 50 %. dans les principaux pavillons pen- applique. gatoire dès septembre 2005, est graphies sont acceptées « Cet objectif est élevé, dant la semaine de relâche du pre- Le débat a permis de consta- sous le coup d’un moratoire. convient le coordonnateur, mais mier cycle. Les répondants cour- ter que les langagiers semblent en La position de Mme de Vil- et qu’aucune n’est il est essentiel que les étudiants ront la chance de gagner, en guise attente d’un consensus alors que, lers parait quelque peu ambigüe répondent aux questions du son- de prix de participation, un ordi- du côté des usagers, personne ne puisque celle-ci accepte certaines donc fautive. dage afin que nous ayons le ta- nateur portable. soulève de problèmes sérieux rectifications, comme fusionner bleau le plus juste possible de la Selon les responsables étu- quant à l’adoption des modifica- les mots composés et appliquer situation. Même ceux qui ont diants, il y aurait moyen, à tions proposées. les normes du français aux mots sent de l’insécurité aux langagiers abandonné leurs études doivent y l’UdeM, de mieux organiser la dis- Annie Desnoyers, responsable étrangers, tout en semblant reje- et qu’il est difficile pour le public participer parce qu’il est impor- tribution du soutien financier par du soutien en français au Centre de ter la réforme en bloc parce qu’el- de s’y retrouver. tant que nous connaissions les des mesures semblables à celles formation initiale des maitres à la le ne va pas assez loin ou ne s’at- Selon la conseillère, les modi- causes de l’abandon. » qu’ont adoptées l’Université d’Ot- Faculté des sciences de l’éduca- taque pas aux vrais problèmes. À fications de l’orthographe ne sem- Depuis l’étude d’Arnaud tawa et l’Université Laval. « L’ai- tion, a exposé les raisons pour les- son avis, il aurait mieux valu sim- blent pas répondre à un besoin pré- Sales, la Fédération des étudiants de financière à l’Université de quelles elle appuie la mise en ap- plifier l’accord du participe passé, cis de la société, contrairement aux universitaires du Québec a effec- Montréal est hétéroclite, affirme plication de l’orthographe rectifiée. voire le rendre invariable comme attentes et aux demandes quant à la tué, en 2001, un sondage sur la Olivier Sylvestre. Les sciences hu- D’une part, les modifications on l’a fait avec le participe présent. féminisation des titres de fonctions. situation économique de ses maines, par exemple, sont moins lui apparaissent de nature à faci- Même si ce sujet demeure l’objet membres. Ce sondage avait mon- financées que les sciences pures. liter l’apprentissage de l’ortho- Y a-t-il une demande ? de controverses et connait de nom- tré que 40 % des étudiants vivent Certains étudiants ont des reve- graphe, ce qui permet, notamment Le directeur du département breux adversaires, l’OQLF n’a pas sous le seuil de pauvreté, c’est- nus pour la totalité de leurs études aux allophones, de consacrer plus des encyclopédies chez Larous- craint d’exprimer son leadership à-dire avec un revenu de moins alors que d’autres doivent tra- de temps et d’énergie à la maitri- se, Yves Garnier, a pour sa part dans ce domaine. Par contre, l’or- de 18 300 $ par année. vailler à l’extérieur de l’universi- se de la langue comme telle. Elle souligné la complexité de la tâche ganisme prend soin d’éviter que les Selon Olivier Sylvestre, la si- té et en dehors de leur champ se dit par ailleurs d’accord par d’adapter un ouvrage comme Le textes choisis pour la Dictée des tuation a changé depuis. « Il y a eu d’études. On pourrait diminuer principe avec tout changement Larousse aux changements pro- Amériques comprennent des mots des compressions dans les bud- les écarts de financement par une qui rend l’orthographe française posés. visés par la réforme. politique intégrée misant sur les plus conforme à l’usage d’aujour- «Le Petit Larousse compte fonds consolidés. » d’hui. Il faudrait suivre, à son avis, 15 millions de signes, précise-t-il. Besoin d’informer « Notre objectif est de L’Université ayant fait de la l’exemple de l’espagnol, qui a Inclure les rectifications ne se li- L’organisatrice de l’activité, lutte au décrochage une de ses connu de fréquents ajustements mite pas à ajouter une variante à Monique Cormier, professeure viser un meilleur priorités, la direction apporte son et qui présente aujourd’hui une un mot : il faudrait aussi que le au Département de linguistique appui à ce sondage de diverses seule graphie pour un même son. dictionnaire les adopte dans l’usa- et de traduction, a mentionné financement aux cycles façons, notamment en mettant « Il faut dépasser le niveau du ge, ce qui nécessiterait de refaire que, si l’Office est prudent, « c’est des ordinateurs à la disposition “j’aime / je n’aime pas” ou “est-ce l’ouvrage au complet alors qu’il qu’il n’y a pas de consensus so- supérieurs et, pour mieux des étudiants au cours des acti- joli ou non ?” et appliquer les n’y a pas de sentiment d’urgen- cial et qu’il faut continuer d’in- vités de sensibilisation, en impri- rectifications suggérées même si ce. Cela se fera s’il y a un usage former la population ». défendre les étudiants, mant et distribuant un feuillet leur portée est limitée », estime important des modifications. » Dans l’auditoire, les interve- d’information, en fournissant Mme Desnoyers. Mais l’usage peut-il devancer les nants se sont montrés plutôt fa- il faut mieux connaitre le prix de participation et en ouvrages de référence ? vorables à la réforme, soulignant payant le cout d’impression des Trop peu mais insécurisant Le directeur ajoute qu’il doit notamment qu’il existe déjà de les conditions dans 150 exemplaires du rapport qui L’auteure bien connue du aussi tenir compte de ce qui se pas- nombreuses exceptions dans devrait être publié en avril 2006. Multidictionnaire de la langue se ailleurs dans la francophonie. l’usage et que le maintien de cer- lesquelles ils étudient. » Daniel Baril française, Marie-Éva de Villers, De plus, les Français sont friands taines d’entre elles ou encore la directrice de la qualité de la com- de dictées, un sport national qu’ils coexistence de deux formes gra- munication à HEC Montréal, est craindraient de perdre si l’ortho- phiques ne constituaient pas des plutôt réfractaire aux modifica- graphe devenait trop facile ! facteurs d’insécurité. tions proposées. « La réforme a La quatrième intervenante, Chantal Contant, professeu- reçu l’aval de l’Académie françai- Noëlle Guilloton, conseillère en re au Département de linguistique se qui l’a par la suite torpillée, ce communication à l’OQLF, a rap- et de didactique des langues qui fait qu’elle est restée lettre mor- pelé la position « qui n’est pas de l’UQAM et coordonnatrice te en France », a-t-elle souligné. avant-gardiste mais modérée » de du Groupe québécois pour la À son avis, les changements l’organisme qu’elle représente. modernisation de la norme du présentés ne sont pas systéma- Après un avis favorable donné à français, a signalé que plusieurs tiques – de nombreuses excep- la réforme en 1990, l’OQLF a pré- dictionnaires et correcteurs in- tions étant maintenues –, man- conisé d’en suspendre l’applica- formatiques avaient intégré la plu- quent de pragmatisme et ne tion en attendant un consensus part, sinon la totalité des rectifi- facilitent pas l’apprentissage. « Ce dans le monde francophone. cations. « S’il y a insécurité dans sont surtout les accords plutôt Entretemps, l’Office statue la population, dit-elle, c’est par que la transcription des sons qui que les nouvelles et les anciennes manque d’information. » posent problème en français et graphies sont acceptées et qu’au- L’information dissiperait les accords sont très peu touchés cune n’est donc fautive. Il re- donc l’insécurité chez les usagers par la réforme. » commande de plus la fusion des et faciliterait l’établissement du La réforme projetée compli- mots composés dans la création consensus. Fait étonnant, les lan- querait la vie aux spécialistes et de néologismes et l’application gagiers sont en attente de ce leur apporterait « incertitude et des normes françaises pour les consensus, mais ne semblent pas insécurité » en plus de compor- mots étrangers. se percevoir comme des acteurs ter un cout non négligeable. « Les Mme Guilloton considère el- de sa mise en forme. Olivier Sylvestre et Mathieu Moreau inconvénients des rectifications le aussi que les rectifications cau- Daniel Baril
4 FORUM S e m a i n e d u 1 7 o c t o b r e 2 0 0 5 Des étudiants particulièrement doués année internationale de la physique La matière dans son quatrième état Le commun des mortels con- presque tous les secteurs in- nait la Lune et les étoiles, a en- dustriels. tendu parler du bigbang, de la On sait que le Soleil n’est relativité et peut-être aussi des pas comparable au tube fluo- supercordes, mais ne sait rien rescent... Il n’existe donc pas des plasmas, ignorant même un, mais plutôt des plasmas, jusqu’à leur existence. Confron- chacun doté de propriétés dif- té à la traditionnelle question férentes, même si certaines sont « Que faites-vous dans la vie ? » communes à la majorité d’entre c’est que ces radicaux peuvent Une brochette d’étudiants de premier le « plasmicien » est souvent eux. Ainsi, la plupart sont émet- être réactifs et interagir chimi- cycle qui ont déjà eu l’occasion de fai- contraint d’expliquer, en accé- teurs de lumière, visible ou non, quement avec la matière. On re leur marque ont reçu, le 5 octobre, léré et sans reprendre son laquelle peut être récupérée parle ici d’une propriété qu’on une des bourses du doyen de la Fa- souffle, les atomes, le rayonne- pour des applications diverses, exploite dans beaucoup d’ap- culté des arts et des sciences. Ce sont, ment, les électrons libres, la for- l’éclairage entre autres. Beau- plications, dont la modification de gauche à droite en commençant ce électromagnétique… et de coup de sources lumineuses de matériaux et leur synthèse Vous faites par la rangée du bas, Marie-Ève Beau- soleil (histoire), la vice-rectrice de préciser que « Non, je ne tra- vaille pas avec le sang ! » À for- sont des plasmas. En plus des traditionnels tubes fluorescents sous forme de couches minces ou de nanoparticules, la des- notre fierté, la FAS, Sylvie Normandeau, et Mi- ce de répéter à l’envi ce refrain, déjà évoqués, c’est le cas en par- truction de gaz à effet de serre chèle Desjardins (physique et ma- il rêve de la popularité média- ticulier de certains types de la- et celle d’agents pathogènes vous pouvez thématiques) ; à la deuxième ran- tique de son collègue astro- sers (les fameux lasers à exci- (comme le prion responsable faire notre gée, Vincent Arel-Bundock (science politique et sciences économiques), physicien dont le domaine passe si bien à la télévision. mère utilisés pour la chirurgie de la myopie) et de lampes. de la maladie de Creutzfeldt- Jakob). Ce sont de telles ave- avenir, Marie-France Doucet (anthropolo- Pourtant, les plasmas accompa- C’est cette propriété qu’on ex- nues de recherche que les pro- gie) et Daniel Fiorilli (mathéma- gnent nos vies de l’aube au cré- ploite aussi dans les écrans té- fesseurs du Groupe de physique tiques) ; à la troisième rangée, puscule et même la nuit, depuis lé à plasma – des moniteurs vi- des plasmas de l’Université de Alexandre Poirier (sciences écono- le Soleil qui nous éclaire jus- suels extraplats de dimensions Montréal suivent depuis des an- Fonds de développement miques et mathématiques), Olivier qu’au tube fluorescent de nos appréciables et libres des pro- nées. Avec leurs collègues de (514) 343-6812 www.fdev@umontreal.ca Breuleux (informatique et recherche cuisines ou de nos bureaux. blèmes d’angle de visionnement l’Institut national de la re- opérationnelle), Rachel Murray (lin- Qu’est-ce donc qu’un plas- que posent les écrans à cristaux cherche scientifique, de l’Uni- guistique et traduction), Emmanuelle ma ? Tout simplement de la ma- liquides. versité McGill et de l’Univer- Hardy-Sénécal (littérature compa- tière portée à un état d’énergie Les plasmas, c’est en outre sité de Sherbrooke, et en rée) et Stéphanie Granger (psy- telle que les atomes ont perdu cette découverte récente qui a collaboration avec des cher- choéducation et psychologie). Le un ou plusieurs électrons. Sous fait la une de la célèbre revue cheurs issus des milieux gou- doyen de la FAS, Joseph Hubert, fi- sa forme la plus simple, le plas- Nature : la génération, par in- vernemental et industriel tra- gure à droite sur notre photo. ma apparait comme une soupe teraction laser-plasma, d’un vaillant dans des secteurs d’ions positifs et d’électrons faisceau d’électrons auquel on divers, ils ont fondé le regrou- libres. La liberté associée à cet a donné le nom de dream beam pement Plasma-Québec, dont état se traduit par l’existence de (« faisceau de rêve »). Il s’agit les buts sont d’agir comme gui- champs électromagnétiques qui d’un faisceau si monoénergé- chet unique vis-à-vis des utili- confèrent à la matière des pro- tique qu’il pourrait être à l’ori- sateurs néophytes de plasmas et priétés spéciales, dites collec- gine d’une véritable révolution de publiciser et promouvoir les tives. Ceci signifie que, si l’on technologique dans la concep- études en physique des plasmas. écarte un électron de sa posi- tion d’accélérateurs de parti- La physique des plasmas, tion par exemple, on perturbe cules dont le cout serait moindre peut-être moins glamour que l’ensemble du système, qui se et la taille beaucoup plus mo- d’autres secteurs de la physique, met alors à osciller pour réta- deste que ceux des accélérateurs est en tout cas bien vivante et a blir l’équilibre. « Très bien, mais classiques. encore le potentiel de révolu- que fait-on avec cela ? » de- Le plasma, enfin, est un mi- tionner la vie quotidienne, et mandera monsieur ou madame lieu hors équilibre dans lequel ce, sans que nous en ayons Tout-le-monde. Beaucoup de les molécules initiales sont par- conscience ! choses en fait, car le plasma est tiellement ou intégralement également le siège de nombreux décomposées pour former des Joëlle Margot phénomènes fort intéressants radicaux, c’est-à-dire des mo- Professeure titulaire au dont les applications sont ex- lécules fractionnées qui n’exis- Département de physique trêmement variées et touchent, tent pas à l’état « normal ». L’in- d’une façon ou d’une autre, à térêt de cette fragmentation, Collaboration spéciale Expansion d’un plasma produit par l’interaction d’un faisceau laser avec un bloc d’aluminium. Le tout se passe en moins d’une microseconde.
Semaine du 17 octobre 2005 FORUM 5 Recherche en études françaises Recherche en biologie La brouillonnologie, Un entomologiste tisse sa toile au Jardin vous connaissez ? botanique Embauché par Le professeur l’IRBV, Jacques Guy Laflèche Brodeur est un s’intéresse à l’étude expert de la lutte scientifique du biologique brouillon Depuis deux ans, les champs de soya du Québec sont infestés par Qu’ont en commun Balzac, Flau- un puceron qui nuit à la qualité bert, Zola, Valéry, Proust et Pon- des récoltes. Que faire ? Répandre ge ? « En prenant soin de leurs ar- des pesticides sur les 160 000 hec- Cette guêpe pourrait sauver nos champs chives, ces auteurs nous ont légué tares de culture ? Impensable. La de soya. de précieux brouillons de leurs solution pourrait plutôt provenir œuvres », souligne Guy Laflèche d’une (Lysiphlebus testaceipes) l’emploie contre les insectes nui- dans une publication intitulée Le guêpe qui pond ses œufs dans le sibles non seulement dans les manuscrit moderne. corps même des ravageurs. champs cultivés et les forêts, mais Publié aux Éditions Guérin, Quand les populations de puce- aussi dans les campagnes pour li- l’ouvrage comprend une foule de rons diminueront, la prospérité miter la propagation des mous- renseignements sur le manuscrit des guêpes diminuera au même tiques et des mouches noires. comme système de communica- rythme. Le BT n’est pas le seul suc- tion et d’information. Un sujet Si les tests actuellement en cès de la lutte biologique. « En qui intéresse le professeur du Dé- cours dans des champs aux États- serre, presque tous les insectes partement d’études françaises de- Unis sont concluants, on pour- peuvent être contrôlés par des puis une dizaine d’années. « Le rait voir cet insecte se lancer à agents biologiques, mentionne le phénomène de la “conservation l’assaut des pucerons québécois spécialiste. Qu’il s’agisse d’es- des brouillons” n’est pas un fait qui font la belle vie, car presque pèces prédatrices, de champi- nouveau, indique-t-il. Depuis la rien ne menace leur existence. gnons ou de virus, il y a moyen fin du 19e siècle, les carnets, notes « Pour désigner les guêpes ca- d’atténuer les effets des ravageurs et esquisses sont collectionnés et, pables d’effectuer cette mission, il sans recourir à l’épandage d’in- donc, se vendent et se payent a fallu étudier les ennemis natu- secticides ou d’herbicides. » cher. » rels du puceron en Chine, au Ja- Les succès sont plus mitigés Mais aussi nobles soient-ils, pon et en Malaisie, explique le ti- à l’air libre, où la monoculture les brouillons des écrivains cé- tulaire de la Chaire de recherche domine. Le recours aux pesticides lèbres font partie d’une industrie, du Canada en biocontrôle et nou- chimiques est alors presque in- estime Guy Laflèche. « L’Institut veau professeur au Département évitable pour l’instant. Toutefois des textes et manuscrits modernes de sciences biologiques, Jacques le milieu agricole, conscient des est en France la combine qui per- Brodeur. Mais soyez tranquille : critiques qu’on lui adresse à ce su- met à l’État d’un côté d’acheter on ne libèrera pas des nuées de jet, est sensible à cette question. ces manuscrits et de l’autre de ré- guêpes exotiques sur nos champs Mais il n’y a pas que de mau- munérer les pseudosavants qui tant que leur innocuité ne sera vaises nouvelles dans nos champs. ont construit leur carrière autour, pas totalement assurée. » Les organismes génétiquement rendant ainsi possible la mise en Selon le professeur Guy Laflèche, le roman Maria Chapdelaine, de Louis Hémon, Le 24 octobre, en présence modifiés (OGM), qui sont sou- place de la critique génétique du n’est pas un brouillon même s’il comporte quelques corrections de la main du ministre du Développement vent dans la mire des écologistes, manuscrit moderne. » de l’auteur puisqu’il a été publié tel quel. Le manuscrit est conservé à la Divi- durable, de l’Environnement et peuvent réduire la pollution agri- C’est en réaction à cette sion des archives de l’Université de Montréal. des Parcs, Thomas Mulcair, cole. « En Arizona, on a créé une science née dans les années 70 Jacques Brodeur prononcera une variété de coton génétiquement que le professeur Laflèche a pro- l’expression dans le sens de la mé- conférence inaugurale au cours modifié pour intégrer le BT, ra- posé un nouveau champ pour la tonymie du langage familier, c’est de laquelle il donnera plusieurs conte le chercheur. Du coup, on recherche littéraire : la brouillon- encore ignorer l’étape essentielle exemples de ce type afin d’illustrer a cessé complètement les épan- nologie. « Il s’agit de l’étude scien- de la mise au net dans la rédac- les espoirs suscités par ce secteur dages de pesticides. On en faisait tifique du brouillon », explique le tion, mais c’est surtout confondre scientifique en plein essor qu’on jusqu’à sept par saison jusque-là. chercheur. L’idée lui en est ve- la mise au point d’un texte avec le appelle la lutte biologique ou bio- Au Québec, on a beaucoup de maïs nue à la suite de la parution dans pomponnage pompier d’une rhé- contrôle. « Les agents biologiques BT, qui fait un peu la même chose. Le Devoir, en 1997, d’un texte torique archaïque. » sont de plus en plus disponibles, C’est une solution intéressante. » teinté d’humour mais dont le pro- En entrevue, Guy Laflèche efficaces et même économique- Par contre, M. Brodeur s’in- pos était sérieux. Dans cette cri- élargit le propos : « Les adeptes ment avantageux par rapport aux quiète de la multiplication de se- PHOTO : BERNARD LAMBERT. tique parodique intitulée « Un ex- de cette approche travaillent à pesticides de synthèse », signale- mences génétiquement modifiées ploit de la génétique littéraire : l’envers. Le brouillon ne peut pas t-il à Forum en vue de sa premiè- à l’herbicide Roundup, de Mon- quand le brouillon manquant de nous aider à mieux comprendre re présentation publique à titre santo, qui a l’effet contraire. Dans Phèdre permet de mieux com- l’œuvre, c’est impossible ! Il de professeur de l’Université de ce cas, on encourage l’utilisation prendre Jean Racine », Guy La- n’existe aucun rapport entre le Montréal (il est en poste depuis massive d’un produit puissant qui flèche démontre qu’on ne peut net et le brouillon. Qu’une lettre juin dernier, après avoir travaillé détruit toute herbe, sauf celle qui pas viser la connaissance des procède ou non d’un brouillon, 13 ans à l’Université Laval). intéresse le cultivateur. Les OGM œuvres par l’étude des brouillons. cela ne change absolument rien deviennent alors les complices de En revanche, les brouillons ai- du point de vue du résultat. On Guy Laflèche Bons et mauvais coups cette pollution. dent parfois à rétablir la lettre du écrit de bonnes et belles lettres Si l’histoire de la lutte biolo- texte et permettent d’étudier l’au- sans brouillon et des torchons nateur sont des brouillons ! « Cer- gique a été assombrie par des ca- 13 étudiants des cycles teur et ses conceptions littéraires. après 36 brouillons. Même chose tainement, dit le professeur, puis- tastrophes récentes (on pense à supérieurs « Le pamphlet s’adressait aux pour les romans. » qu’ils sont corrigés par la suite. la coccinelle asiatique, importée Premier entomologiste de savants, mais, parce qu’il avait pa- À son avis, la CGMM est D’ailleurs, différentes versions du aux États-Unis pour lutter contre l’UdeM au service des plantes, ru dans le quotidien montréalais, « une sinistre imposture intellec- même document sont souvent les parasites agricoles et qui a Jacques Brodeur déménagera à les revues scientifiques ont refusé tuelle » qui ne saurait résister à la conservées. » À son avis, depuis conquis nos latitudes depuis), ce Montréal sous peu. Après avoir de le publier, raconte-t-il. Furieux, polémique du brouillonnologue l’invention de l’imprimerie, il s’est domaine est prometteur sur le suivi ses cours d’entomologie aux j’ai inventé la brouillonnologie ! » ni même affronter la douce cri- créé une véritable mythologie du plan de la recherche tant fonda- Pays-Bas, il a été professeur au tique du spécialiste des études lit- mot de sorte que plusieurs croient mentale qu’appliquée. « La lutte Département de phytologie de Critique de la critique téraires. encore qu’un brouillon est pro- biologique s’étend de l’agricultu- l’Université Laval de 1992 à 2005. génétique duit à la main et comprend plein re à la foresterie et à la santé hu- La Chaire de recherche du Ca- Le temps passe, la colère s’es- Une véritable mythologie de ratures. « Ce n’est pas toujours maine, prétend M. Brodeur. Elle nada en biocontrôle lui offrira tompe, mais l’intérêt à l’égard de du mot le cas, ajoute-t-il. Quelques au- compte de retentissants succès d’excellentes conditions pour fai- ce domaine de recherche de- Mais qu’est-ce qu’un brouil- teurs, par exemple Aragon, écri- partout dans le monde, y compris re de la recherche. « Je suis em- meure. Le site Internet consacré lon ? Le Petit Robert définit le vaient au fil de la plume, sans fai- au Québec. Par exemple, la lutte ballé », résume-t-il. au sujet (www.mapageweb.umon brouillon comme une « première re de corrections. L’écrivain aux lépidoptères nuisibles com- En transférant son labora- treal.ca/lafleche/br/), que le pro- rédaction d’une lettre, d’un écrit Victor-Lévy Beaulieu procède lui me la tordeuse des bourgeons et toire de Québec à Montréal – non fesseur Laflèche a lancé en sep- scolaire ou didactique, qu’on se aussi de la même façon. » la livrée des forêts doit beaucoup sans un pincement au cœur, tient- tembre 1997, ne cesse de se dé- propose de mettre au net par la Le professeur d’études litté- à l’existence du BT. » il à souligner –, Jacques Brodeur velopper depuis. Son souci est suite ». N’en déplaise au diction- raires précise que les écrivains ne Le BT, abréviation de Bacil- amènera avec lui quelques-uns maintenant de susciter un débat naire, le brouillon n’est pas que sont pas différents des autres ré- lus thuringiensis, est assurément des 13 étudiants à la maitrise et au sérieux sur la critique génétique cela, selon Guy Laflèche. « Il exis- dacteurs et que pour tous le un des fleurons de la lutte biolo- doctorat actuellement sous sa di- du manuscrit moderne (CGMM). te deux grands types de brouil- brouillon est généralement un gique. Fabriqué à partir d’une bac- rection. « Accepter l’offre de Dans son ouvrage Le ma- lons : les premiers jets, destinés à « instrument », rien de plus. térie trouvée en Israël à l’état na- l’Université de Montréal n’a pas nuscrit moderne, il écrit : être mis au propre mais restés au « C’est Boileau qui disait “Vingt turel en 1976, le BT est utilisé en été une décision facile à prendre, « Confondre les brouillons et les brouillon, et les ouvrages écrits au fois sur le métier…”, commente génie génétique autant que dans dit-il. Mais je ne pouvais pas lais- manuscrits des auteurs sous le brouillon et destinés à le rester. » Guy Laflèche. Alors, voilà le secteur de l’épandage sous une ser passer une telle chance pro- nom de “manuscrit moderne”, Suivant cette logique, la ma- 20 brouillons ! » forme plus traditionnelle. Le BT fessionnelle. » c’est non seulement employer jorité des textes rédigés à l’ordi- Dominique Nancy a une forte activité larvicide ; on Mathieu-Robert Sauvé
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