OPHTALMOLOGIE DISPOSITIFS MÉDICAUX & PROGRÈS EN - LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES - Snitem
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LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES DISPOSITIFS MÉDICAUX & PROGRÈS EN OPHTALMOLOGIE ÉDITION SEPTEMBRE 2016
OPHTALMOLOGIE Sommaire 25 ULTRASONS Traitement du glaucome par ultrasons : garder l’œil intact 3 PRÉFACE 28 SHUNT 4 Dispositif de drainage : évacuer l’humeur aqueuse 30 L’ophtalmologie, ou la plongée au cœur de l’œil 7 PHACOÉMULSIFICATION MICROSCOPE Une révolution pour le traitement de la cataracte 33 Voir mieux pour rendre la vue 9 IMPLANT RÉTINE ARTIFICIELLE L’alternative au cristalin cataracté 36 Rendre la vue à qui l’a perdue 12 ANNEAUX INTRA-CORNÉENS VITRECTOMIE Au service de la cornée 38 Une innovation fulgurante et audacieuse pour la rétine 15 CROSS LINKING OCULOPLASTIE Une révolution pour une pathologie rare 40 Redonner à l’œil son vrai visage 17 GLOSSAIRE GREFFE DE CORNÉE Les mots techniques ou scientifiques expliqués Explorer l’œil pour mieux le soigner sont accompagnés dans le texte du symbole 21 LASER 42 SOURCES ET REMERCIEMENTS Toujours plus rapide, toujours plus précis SNITEM • Maison de la Mécanique - 39, rue Louis Blanc - CS30080 - 92038 La Défense Cedex • Directeur de la publication : Éric Le Roy • Responsable d’édition : François- Régis Moulines • Coordination : Nathalie Jarry • Rédaction : Camille Grelle • Édition déléguée : Presse Infos Plus (www.presse-infosplus.fr) • Maquette : Didier Michon • Crédits photos, tous droits réservés : Laboratoires Alcon SA, Amo France SAS, Carl Zeiss Meditec SAS, Cristalens Industrie, Eye Tech Care, FCI SAS, Horus Pharma, Moria SA, Second Sight • Impression : Imprimerie de l’Étoile 61190 Tourouvre • Septembre 2016 • ISBN : 979-10-93681-11-5
OPHTALMOLOGIE • PRÉFACE Préface La vision en pleine révolution Pr José-Alain SAHEL les déformations de la cornée ou encore le kératocône peuvent être trai- Chef de service au Centre hospitalier national tées avec succès avec des techniques de greffes partielles, des cellules d’ophtalmologie des Quinze-Vingt (Paris), Directeur souches, ou photochimiques. Les pathologies rétiniennes, dont seules de l’Institut de la Vision celles relevant de la microchirurgie étaient traitables, sont en passe de connaître une révolution grâce aux anticorps monoclonaux, à la thérapie Depuis un demi-siècle, l’ophtalmologie connaît une véri- génique, l’injection de cellules souches, les prothèses et l’optogénétique table révolution thérapeutique et technologique fondée sur Ces biotechnologies bénéficieront de la robotisation de la chirurgie et du des avancées scientifiques majeures. Les progrès specta- couplage a des dispositifs implantables (implants rétiniens, délivrance culaires que nous connaissons aujourd’hui sont directe- prolongée de médicaments,) ment le fruit d’une alliance puissante entre science, méde- cine et technologie, en particulier grâce à la miniaturisation des dispositifs Reste, pour les industriels du dispositif médical spécialisés en ophtalmo- et des techniques chirurgicaux. Dans le même temps, grâce à l’utilisation logie, à se rapprocher encore plus de la biomécanique et du fonctionne- du laser, des ultrasons ou encore des implants l’ophtalmologie fait partie ment de l’œil dans sa globalité, en particulier dans le cadre de la conver- des disciplines qui ont quasiment presque totalement basculé dans la gence entre biothérapies et dispositifs. Et là encore, parions que les chirurgie ambulatoire, la plupart des patients pouvant ressortir de l’hôpi- succès à venir seront le fruit d’une collaboration étroite entre chercheurs, tal peu d’heures après l’intervention. praticiens et industriels, comme la plupart de ceux qui sont racontés et décrits dans ce livret qui synthétise le formidable cycle d’innovation que Cataracte ou glaucome (les pathologies de l’œil les plus courantes) nous avons la chance de vivre. Ces innovations trouveront sa place grâce trouvent maintenant sur leur route une armada de techniques d’interven- aux patients qui contribueront à leur validation, parfois au terme d’une tion et de dispositifs médicaux qui font reculer toujours plus le nombre de phase de réhabilitation qui requerra leur pleine cooperation. n cas de patients non traitables. Et de plus en plus de pathologies comme SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 3
OPHTAMOLOGIE Comme cet autre organe considéré comme noble qu’est L’ophtalmologie, le cœur, l’œil a toujours fasciné les hommes. Il a fallu des « Œil pour œil, dent pour dent », « une bonne conscience est l’œil de Dieu », « un bon avis vaut un se concentre sur l’un des organes les plus délicats et précieux du corps humain. Dans les plus millénaires à l’ophtalmologie œil dans la main », « l’honneur est comme l’œil : on anciennes civilisations déjà, l’œil revêt certes un pour gagner ses lettres de ne joue pas avec lui »… Dresser la liste des pro- verbes et citations faisant référence à l’œil et, par caractère particulièrement sacré, voire religieux puisque souvent considéré comme le miroir de noblesse et devenir la discipline extension, à la vue et la vision, serait peine perdue l’âme, mais n’en concentre pas moins l’attention d’excellence qu’elle est tant ils sont nombreux quelles que soient les époques et les cultures. C’est que l’ophtalmologie des plus éminents scientifiques (Inde, Égypte, Grèce, Empire romain etc.). Au-delà du seul mais aujourd’hui. N’est-ce pas, en néanmoins important aspect esthétique, c’est la effet, un défi fou que de rendre question de la vision que se posent déjà les chirur- giens de l’époque ou, plus exactement, de l’altéra- la vue à ceux qui l’ont perdue ? tion de celle-ci. Ainsi, la chirurgie de la cataracte est C’est pourtant celui que considérée comme l’une des plus anciennes puisque le Papyrus de Carlsberg, qui daterait du IIe cherchent à relever les millénaire avant notre ère, en fait déjà mention. Plus professionnels de tard, dans l’Antiquité, plusieurs médecins, parmi lesquels Galien reste l’un des plus illustres, se l’ophtalmologie, médecins penchent sur l’œil, son anatomie et certaines de comme industriels. ses pathologies. C’est également à cette époque que sont menées les premières études sur la réfrac- tion de la lumière, l’un des éléments essentiels à la définition de l’ophtalmologie. VERS UNE RECONNAISSANCE DE LA DISCIPLINE Au Moyen-Âge, l’œil continue de fasciner. La plupart des opérations, réalisées bien entendu sans anes- thésie ni asepsie, sont déléguées aux barbiers. Pour 4 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTAMOLOGIE ou la plongée au cœur de l’œil L’ŒIL : COMPOSITION ET FONCTIONNEMENT L’Académie nationale de médecine définit l’œil comme « l’organe de la vision Rétine constitué par le bulbe de l’œil et les divers milieux qu’il renferme ». Le bulbe de l’œil est « la partie fondamentale de l’appareil de Humeur aqueuse Macula la vision, chargée de la réception et de la transmission des impressions lumineuses ». Schématiquement, l’œil est composé d’une Cristallin partie antérieure qui comprend la cornée, Nerf optique l’humeur aqueuse et le cristallin. Elle Iris permet de focaliser les images sur la rétine. La partie postérieure traite l’information inhérente aux images projetées sur elle et Pupille envoie ces informations au cerveau. Elle est composée de la rétine et du nerf Cornée optique. A noter que 90 % du volume de l’œil est occupé par le corps vitré, une substance transparente et gélatineuse. l’anecdote, cette époque voit également l’élection Corps vitré du pape Jean XXI, médecin de son état et qui publie le « Thesaurus pauperum ». Le huitième chapitre, sorte de traité thérapeutique oculaire, est consacré aux connaissances ophtalmologiques de l’époque. La fin du Moyen-Âge puis la Renaissance SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 5
OPHTAMOLOGIE apportent leur lot d’innovations avec l’invention nés réalisés en matière d’anesthésie et de micros- du microscope (XVIe siècle), le perfectionnement cope favorisent également grandement l’essor de la des techniques de dissection, l’émergence des chirurgie ophtalmologique. Pour autant, les efforts lunettes et, bien entendu, les colossales contribu- se concentrent surtout sur les pathologies les plus tions anatomiques et scientifiques de génies tels visibles, telles celles de la cataracte. A cette époque, que Léonard de Vinci ou Copernic pour ne citer en effet, les techniques d’extraction du cristallin qu’eux. En ophtalmologie, on retient de cette prennent un nouveau tournant en s’appuyant sur les époque les noms de Pierre Franco, dont l’apport travaux effectués notamment par Jacques Daviel au sera essentiel pour appréhender de la vitrectomie, siècle précédent. de Felix Platter ou encore de Jacques Guillemeau. Laser pour la correction des défauts visuels Mais, en France, il faut attendre le XIXe siècle pour À LA POINTE DE LA TECHNOLOGIE que l’ophtalmologie s’émancipe de la chirurgie Mais ce sont incontestablement la deuxième moitié générale et devienne une discipline à part entière du XXe siècle et la première décennie du XXIe qui plus belles illustrations du progrès médical de ces reconnue comme telle. C’est d’ailleurs à cette marquent l’avènement de l’ophtalmologie moderne, dernières années. Ses innovations sont liées à époque (1880) qu’est créée, sous l’impulsion du comme le confirme le Pr Gilles Renard, Directeur celles réalisées en matière d’imagerie et de micro- Docteur Fieuzal et de Léon Gambetta, la Clinique scientifique de la Société française d’ophtalmologie chirurgie », corrobore le Pr Béatrice Cochener, chef des Quinze-Vingts, à Paris, qui devient très vite « le (SFO) : « L’ophtalmologie a été littéralement révolu- du service d’ophtalmologie du CHU de Brest et centre français de soins oculaires le plus important » tionnée au cours des cinquante dernières années. Présidente de l’Académie Française d’Ophtalmolo- (« Les débuts de la clinique ophtalmologique des Dans cette discipline, des dispositifs innovants sont gie. Et d’énumérer les innovations qui ont été déci- Quinze-Vingts », J.-P. Bailliart). Les progrès simulta- inventés tous les deux ans ! Depuis les années sives : « Laser dont les indications (cataracte, soixante-dix, en effet, nous sommes entrés dans réfraction, cornée) et les fonctionnalités (imagerie et 15-20 l’ère du microscopique. Nous avons réussi à péné- topographie, aberromètre ) sont toujours plus trer et à soigner le plus petit organe du corps vastes ; implants notamment multifocaux humain. » Grâce aux progrès réalisés en matière de aujourd’hui ; phacoémulsification ; ultrasons ; ima- dispositifs et de techniques, il est en effet possible gerie intraoculaire avec l’OCT… C’est la conjugaison L’hôpital des Quinze-Vingts doit son nom… à sa capacité de soigner de plus en plus de pathologies oculaires de tous ces progrès qui permet à notre spécialité d’accueil ! En effet, créé par le roi Saint-Louis, l’établissement de manière mini-invasive, voire sans ouvrir l’œil d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Reste, demain, à hébergeait alors quinze fois vingt personnes au sein d’une (laser, ultrasons), là où il fallait autrefois l’inciser sur pouvoir encore mieux prédire et simuler de façon à congrégation nommée « la Maison des pauvres aveugles toute sa largeur ou même l’extraire. Plus encore, les affiner toujours plus l’arbre décisionnel en matière de Paris ». Le système numérique de l’époque voulait en effet que l’on compte par vingtaine. interventions ne nécessitent plus, désormais, l’im- de choix de chirurgie tout en se rapprochant tou- (Source : Hôpital des Quinze-Vingts) mobilisation du patient durant plusieurs semaines jours plus de la biomécanique et du fonctionnement ou plusieurs jours. « L’ophtalmologie est l’une des intrinsèque de l’œil. » n 6 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTALMOLOGIE • MICROSCOPE MICROSCOPE À QUOI ÇA SERT ? Le biomicroscope (ou lampe à fente) est un micros- cope binoculaire présentant plusieurs grossisse- Voir mieux pour Les microscopes ophtalmiques permettent de pro- céder aux examens dits de routine et de diagnosti- ments. Il est doté d’un système d’éclairage particulier constitué d’une fente lumineuse (dont on peut varier rendre la vue quer d’éventuelles anomalies comme celles de la l’orientation et la dimension) et qui permet d’effectuer cornée. On parle alors de biomicroscope ou, plus une coupe optique des différentes structures du seg- souvent de lampe à fente. D’autres, plus perfection- ment antérieur. On peut également réaliser un exa- nés, sont dits opératoires et sont utilisés lors des men du fond d’œil à l’aide de la lampe à fente en Loin d’être un dispositif différentes chirurgies que l’on pratique sur un œil utilisant une lentille ou un verre spécifique : cela per- anecdotique, le microscope malade (rétine, cornée etc.). met de mener une analyse très fine des détails du fond d’œil. Comme dans beaucoup d’autres spécia- est l’outil qui a rendu possibles lités médicales, les microscopes opératoires utilisés tous les progrès en COMMENT ÇA MARCHE ? en ophtalmologie disposent, en outre de leur capa- cité grossissante, de fonctionnalités permettant de ophtalmologie en permettant Littéralement, selon la définition du Centre national répondre aux exigences de l’intervention : lumière, de mieux voir et donc de ressources textuelles et lexiacles (CNRTL), le maniabilité, précision, ergonomie voire imagerie etc. microscope est « un instrument d’optique à très fort de mieux connaître l’œil. grossissement qui permet d’observer des éléments, objets, organismes invisibles à l’œil nu, composé UNE HISTOIRE D’INNOVATIONS d’un tube renfermant plusieurs lentilles donnant l’image virtuelle d’un objet éclairé par transparence ». On attribue l’invention du premier dispositif à un fabricant de lunettes néerlandais à la fin du XVIe siècle. Cette innovation ne doit rien au hasard XVIe puisque c’est également à cette époque que le port FIN DES ANNÉES ANNÉES des lunettes commença à se répandre, entraînant SIÈCLE 1980 2000 un vif intérêt pour l’optique et ses dispositifs, comme le rappelle la Société américaine de physique (American Physical Society). Le microscope en question était toutefois très sommaire. Divers cher- cheurs s’appliquèrent, dans les siècles suivants, à Invention du microscope. Intégration de l’éclairage Microscopes intégrant faire évoluer le dispositif pour le rendre plus précis, coaxial. la réalité augmentée. plus maniable et plus performant. SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 7
OPHTALMOLOGIE • MICROSCOPE ÉCLAIRAGE OPTIMAL ET FONCTIONNALITÉS AUGMENTÉES LES INSTRUMENTS DE DIAGNOSTIC, À LA BASE DE TOUTE DÉCISION En ophtalmologie, « si les microscopes modernes Les instruments permettant de procéder au optique (OCT, de son nom anglais) a connu, existent depuis plus d’un siècle, ils ne connurent diagnostic ophtalmologique sont ces dernières années, d’importantes pas vraiment d’évolution majeure pendant long- extrêmement variés selon le type d’examen : évolutions, notamment en matière de temps. Mais certaines innovations les ont réelle- mesure de l’acuité visuelle et de la force des rapidité du balayage des ondes, puisque l’on ment perfectionnés au cours des trente dernières verres de lunettes, mesure de la pression peut même aujourd’hui reconstituer le flux années. Il s’agit des efforts portés sur la lumière, intraoculaire (tonomètre ), examen du sanguin rétinien ! Non invasive, elle se notamment avec l’éclairage coaxial », constate le Pr champ visuel (important pour détecter un pratique désormais en cabinet (sans besoin Gilles Renard, Directeur scientifique de la Société glaucome ), biométrie (sorte de prise de la compléter parfois par une injection de française d’ophtalmologie. Cet éclairage, qui pro- d’identité de l’œil qui est importante fluorescéine comme auparavant) et ne jette la lumière dans l’axe d’observation de l’opéra- notamment dans la chirurgie de la cataracte présente aucun risque pour le patient. Toutes teur, fut mis au point il y a une vingtaine d’années. Il puisqu’elle va déterminer la taille de ces innovations ont optimisé les flux et s’agit d’une innovation majeure pour certaines l’implant) etc. Un autre dispositif permet de gagné en sécurité, en prédictibilité et en chirurgies, dont celles de la cataracte ou de la procéder à un scanner de la rétine pour en temps. Autant d’exigences fondamentales rétine, comme l’explique le Pr Ramin Tadayoni, chef analyser la structure et repérer les éventuels aujourd’hui tant en établissement qu’en du service ophtalmologie de l’Hôpital Lariboisière, à défauts. Cette tomographie par cohérence cabinet. Paris : « Dans les années quatre-vingt et quatre- avancées, ajoutées à la miniaturisation des disposi- vingt-dix, une évolution importante a été de per- tifs, ont permis l’entrée de l’ophtalmologie dans l’ère mettre d’accéder au fond de l’œil, et plus seulement de la microchirurgie. Enfin, une dernière révolution au segment antérieur. » La gestion de la lumière est l’émergence de la réalité augmentée, laquelle a (qualité, source, intensité, stabilité, précision) a en permis d’intégrer des données techniques supplé- effet concentré les efforts ces dernières décennies, mentaires au microscope. L’idée est de concentrer passant d’une source extérieure (lampe à fente) à toutes les données du patient dans l’assistant opé- des sources intégrées aux machines. Leur nature a ratoire qu’est le microscope. Certains microscopes également évolué, le xénon ayant succédé à l’ha- proposent aussi des outils de diagnostic intégrés logène avant de laisser de plus en plus place au LED telles que la tomographie en cohérence optique afin de d’augmenter la durabilité, maitriser le (OCT) ou des systèmes d’imagerie numérique cen- Microscope pour les chirurgies de la cataracte spectre, réduire au maximum la phototoxicité et sés élargir le champ des informations à la disposi- et de la rétine avec intégration des accessoires préserver les rétines du patient et du chirurgien. Ces tion du chirurgien. n 8 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTALMOLOGIE • RÉTINE ARTIFICIELLE RÉTINE À QUOI ÇA SERT ? penser cette perte. Toutefois, le nerf optique doit être actif : « La prothèse rétinienne ne peut rendre la vue ARTIFICIELLE La rétine est une « fine membrane tapissant la sur- qu’aux patients qui ont perdu leurs photorécepteurs face interne du globe oculaire. C’est un tissu neuro- mais chez qui il reste des neurones rétiniens », Rendre la vue sensoriel. Il est capable de capter les rayons lumineux confirme Serge Picaud, neurobiologiste à l’Institut de et de transmettre les informations visuelles au sys- la Vision, qui mène les recherches en France sur la tème nerveux central. Issue des neuroblastes , c’est rétine artificielle avec le Pr José-Alain Sahel. Par à qui l’a perdue une structure nerveuse constituée de neurones et de cellules gliales (…). Elle est caractérisée par la pré- sence de cellules hautement spécialisées, les photo- conséquent, selon les dispositifs et les patients, le degré de récupération peut varier. récepteurs qui réagissent aux signaux lumineux » Rendre la vue à un aveugle… (définition de la Formation nantaise et recherche en COMMENT ÇA MARCHE ? ophtalmologie, FNRO). Avec l’âge (Dégénérescence La proposition ressemble à un maculaire liée à l’âge, DMLA) ou en raison d’un fac- L’idée est de réactiver la rétine résiduelle grâce à un miracle et relevait de l’utopie teur génétique (rétinite pigmentaire), la rétine peut dispositif implantable et actif qui provoque une neu- être altérée, entraînant une baisse de la perception rostimulation à la surface de la rétine pour restaurer il y a encore quelques années. visuelle avec des zones aveugles. Elle peut aboutir, à les sensations visuelles. Il existe aujourd’hui deux Depuis, sous certaines terme, à une perte complète de la vue. La prothèse types d’implants d’égale efficacité. « Le premier est un rétinienne – ou rétine artificielle – a pour but de com- implant placé à la surface de la rétine en contact avec conditions très précises, les cellules ganglionnaires, décrit Serge Picaud. Il notamment physiologiques, interagit avec une caméra fixée à une paire de lunettes qui transmet les images à un processeur placé dans c’est devenu une réalité plus que la poche ou à la ceinture du patient. Ce boîtier conver- jamais envisageable. tit les signaux lumineux en signaux électriques, les traite puis les transmet à un récepteur placé sur l’œil. Enfin, celui-ci les communique grâce à un fil à l’im- plant composé de 60 voire de 150 électrodes. » L’autre dispositif comporte 1 500 électrodes (et autant de diodes sensibles à la lumière) et est placé sous la rétine à la place des cellules photoréceptrices. Les diodes activent directement les électrodes sans pas- Prothèse rétinienne ser par un dispositif intermédiaire. SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 9
OPHTALMOLOGIE • RÉTINE ARTIFICIELLE UNE HISTOIRE D’INNOVATIONS Si les recherches sur la rétine artificielle menées conjointement par plusieurs pays, dont les États-Unis et la France, débutèrent dès 1991, c’est en 2002 que naquit un implant inspiré de l’implant cochléaire, fonc- tionnant avec un dispositif interne et un boîtier externe. « Les patients percevaient des signaux lumineux. Certains étaient même déjà capables de saisir des objets bien que le dispositif ne comportât alors que 16 électrodes », explique Serge Picaud. Les dispositifs proposés étaient multiples puisque certains étaient également posés autour du nerf optique. Une approche très innovante, développée par le Professeur Chow, fut d’intégrer des photorécepteurs électriques (ou photodiodes) dans la puce électro- nique sous la rétine. Malheureusement, lors des pre- miers tests, « le courant sortant de ces photodiodes était insuffisant », rapporte Serge Picaud. Au début des années deux-mille, le Pr Eberhart Zrenner, Directeur de l’Institut de recherche ophtalmique et responsable du Centre d’ophtalmologie de l’Univer- Rétine artifcielle DÉBUT DES ANNÉES 1991 2000 2005 2006 2011 2013 Début des recherches Premiers essais Début de l’essai clinique Mise sur le marché Premier marquage La FDA approuve sur la rétine artificielle. d’implants. de l’implant à 1 500 de l’implant européen. la première prothèse électrodes. à 60 électrodes. rétinienne. 10 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTALMOLOGIE • RÉTINE ARTIFICIELLE 30 000 s’exerçant plusieurs heures par jour. Parallèlement, si l’idée de l’équipe du Professeur Zrenner était de por- PERCEPTION DES COULEURS : À CHACUN LA SIENNE ! ter le nombre d’électrodes à 1 500 dans le but d’aug- menter la perception, des études comparatives entre Tout le monde ne perçoit pas les couleurs de C’est le nombre de patients souffrant de rétinopathie les deux implants ont révélé des résultats similaires, la même manière ! Les informations pigmentaire en France. qu’ils soient dotés de 60 ou 1 500 électrodes. En lumineuses captées par les photorécepteurs (Source : « Rétine artificielle », Inserm, Dossier réalisé en collaboration effet, deux électrodes voisines peuvent se chevau- sont transformées en signal électrique et avec Serge Picaud et Katia Marazova, unité Inserm 968, Institut de la cher et donc activer la même zone. acheminées par le nerf optique jusqu’au vision – décembre 2011) cerveau. C’est lui qui va recréer l’image. Mais, RESTITUER UNE VISION PLUS AIGÜE selon les personnes, les photorécepteurs sité de Tübingen résolvait le problème en amplifiant Il s’agit donc désormais d’augmenter les capacités sont plus ou moins sensibles à la longueur les signaux mais cela impliquait de relier la puce à une des dispositifs. Pour résoudre la question du chevau- d’ondes et à l’intensité de la lumière qui leur batterie. Le premier essai de son implant (qui mesure chement des électrodes, « certains ont proposé parviennent. En outre, la perception du 9 mm2 et dispose de 1 500 électrodes) débuta en d’inclure des électrodes de retour qui entourent les spectre visible de lumière, qui se situe entre 2005. Depuis, le Professeur Palanker, de l’Université électrodes de stimulation. Toutefois, cela nécessite 400 et 700 nanomètres, varie également d’un de Stanford, a développé des puces activées à dis- deux fils pour chaque électrode de stimulation, ce qui individu à l’autre. Une couleur n’est donc pas tance par des infrarouges. est un réel problème quand on met un grand nombre perçue par tout le monde de la même d’électrodes », souligne Serge Picaud. Une autre manière d’autant qu’elle résulte également de l’interaction rayonnement-lumière. Ainsi, EN QUÊTE DE MINIATURISATION piste, explorée notamment par les chercheurs de donc, une couleur est-elle subjective : elle La deuxième moitié des années deux mille dix est l’Institut de la Vision avec le Professeur Palanker, est n’existe que dans le cerveau qui la marquée par un effort colossal de miniaturisation. La l’utilisation d’une grille de retour commune passant représente. chirurgie est devenue moins invasive. Parallèlement, autour de toutes les électrodes de stimulation. Ces une nouvelle version de l’implant a été élaborée en équipes travaillent également sur des implants tridi- 2006. Il est doté de 60 électrodes : « Avec ce dispo- mensionnels présentant des reliefs dans lesquels les sitif, des patients parviennent à se déplacer seul, à neurones rétiniens vont se nicher pour les stimuler. Cette nouvelle génération d’implants est censée per- suivre une ligne au sol, à trouver un objet, à repérer Ces nouvelles configurations devraient améliorer la mettre d’atteindre cet objectif en tapissant le fond une porte ou une fenêtre. Certains arrivent même à résolution des électrodes pour que l’augmentation d’œil de plusieurs implants photovoltaïques sen- lire des mots en gros caractères sur un écran d’ordi- des électrodes accroisse le nombre de pixels des sibles à l’infrarouge. L’avenir consistera ensuite à nateur. Une preuve que cette démarche peut per- images. Des études psychophysiques ont en effet pouvoir recourir à la rétine artificielle directement mettre de revoir », affirme Serge Picaud. A noter démontré que pour reconnaître des figures com- implantée sur le cortex visuel et ce, pour des indi- toutefois que cette technologie produit une nouvelle plexes telles qu’un visage ou lire des textes, il faudrait cations et des patients ne disposant plus de nerf manière de voir qu’il faut apprendre à maîtriser en une résolution comprise entre 600 et 1 000 pixels. optique. Un rêve à portée de vue… n SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 11
OPHTALMOLOGIE • VITRECTOMIE VITRECTOMIE À QUOI ÇA SERT ? pouvoir injecter un produit destiné à réappliquer la rétine. Elle est souvent la première étape de nom- Une innovation La vitrectomie, qui fait partie de la chirurgie de la rétine, consiste à enlever tout ou partie du gel qui rem- breuses chirurgies de la rétine, créant un espace ou les instruments peuvent mouvoir sans exercer de fulgurante plit l’espace situé entre le cristallin et la rétine, appelé traction dangereuse sur les tissus. vitré, lequel, n’étant pas indispensable pour la vision, et audacieuse peut être ôté. Cette intervention est indiquée dans le COMMENT ÇA MARCHE ? cadre d’un trou maculaire (affection de la macula ), d’une membrane prémaculaire (très mince pellicule L’intervention se déroule en milieu chirurgical stérile, pour la rétine de tissu qui recouvre et plisse la macula), d’une hémorragie dans le vitré ou sous la rétine, d’une réti- nopathie diabétique ou encore d’un décollement de sous anesthésie locorégionale et plus rarement générale. « Du liquide stérile est infusé dans l’œil, au fur et à mesure que le vitré est retiré, afin de mainte- la rétine. En effet, le gel vitréen a notamment nir le volume et la pression oculaires, explique la Longtemps redoutée, la pour fonctions d’amortir les chocs et d’empêcher le Société française d’ophtalmologie (SFO). Suivant la chirurgie de la rétine et vieillissement oculaire. Comme le cristallin, il a ten- raison pour laquelle la vitrectomie est effectuée, dance à se modifier avec l’âge : de gélatineux et d’autres gestes chirurgicaux peuvent lui être asso- particulièrement la vitrectomie flexible à la naissance, il devient plus liquide et peut ciés et, en fin d’intervention, le vitré peut être rem- sont de plus en plus pratiquées se décoller de la rétine. La vitrectomie a donc pour placé par du gaz, parfois de l’huile de silicone ou but de restaurer une fonction optique défaillante d’autres produits. » A noter que, dans le cas d’une au point de permettre, (transparence), de supprimer des tractions du vitré injection de gaz, ce dernier se résorbe dans les aujourd’hui, de traiter des sur la macula ou encore de créer un espace afin de jours ou semaines qui suivent l’intervention. L’huile pathologies auparavant considérées comme ANNÉES ANNÉES incurables. 1969-1970 1980 1990 Mise au point des techniques Avènement des microscopes et mise Élargissement de la vitrectomie de vitrectomie. au point de dispositifs avec des à des pathologies toujours diamètres toujours plus petits. plus diverses. 12 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTALMOLOGIE • VITRECTOMIE de silicone, en revanche, doit être retirée au cours démenti cette idée fausse une bonne fois pour d’une intervention ultérieure et remplacée par du toutes en mettant au point un dispositif miniaturisé sérum. Le délai (jusqu’à plusieurs semaines, voire et motorisé. Dès 1970, il s’associa au Pr Jean-Marie années) et le degré de récupération visuelle Parel pour mettre au point un système de petite guil- dépendent du motif de la vitrectomie. lotine grâce auquel on pouvait aspirer le vitré et le couper pour séparer la partie aspirée du reste sans UNE HISTOIRE D’INNOVATIONS exercer de traction sur certaines fibres solidement attachée à la rétine. Les années soixante-dix virent L’histoire de l’innovation de la chirurgie de la rétine la technique se développer et s’affiner grâce à commence réellement à la fin des années soixante. Conor O’Malley et Ralph Heinz qui mirent au point En effet, la croyance selon laquelle toucher le vitré un appareillage de 20 gauges de diamètre (soit pouvait provoquer une perte totale de la vision a 0,9 mm environ). Parallèlement, « on s’est aperçu longtemps été répandue. C’est Robert Machemer que, pour réaliser une vitrectomie, il fallait certes qui, s’appuyant sur les travaux de David Kasner, a remplacer ce que l’on aspire mais également mieux voir à l’intérieur de l’œil, explique le Pr Ramin Tadayoni, chef du service ophtalmologie de l’Hôpi- Kit pour les injections tal Lariboisière, à Paris. On a donc mis au point un intravitréennes système spécifique pour mieux voir l’intérieur de l’œil à l’aide de l’illumination d’une fibre optique incé- rée via une incision et l’utilisation de microscopes. liorés pour accéder à la partie postérieure de l’œil. C’est ce que l’on nomme la vitrectomie trois voies Vers le milieu des années quatre-vingt-dix, « la tech- qui fut sans cesse améliorée au fil des décennies nique évolue pour la première fois vers la chirurgie suivantes, notamment grâce à la sophistication transconjonctivale, ce qui évite de devoir suturer, croissante des machines, ce qui permit une préci- précise Ramin Tadayoni. En effet, il fallait auparavant sion toujours plus grande notamment pour les flux enlever la muqueuse avant de faire des incisions d’entrée et de sortie, les coupes etc. » La vitrecto- larges à suturer en fin d’intervention. Ce n’est plus le mie moderne était née. cas désormais, le procédé se rapprochant d’une coelioscopie. Par ailleurs, le dispositif a désormais UN CHAMP D’APPLICATION ÉLARGI un diamètre de 25 gauges (0,5 mm). » Mais le dispo- Les années quatre-vingt marquent également l’avè- sitif montra ses limites et les années qui suivirent nement des microscopes, initialement prévus pour virent se développer des instruments de taille Rétinoplastie diabétique observer la partie antérieure de l’œil. Ils furent amé- intermédiaire (23 gauges), puis du 25 gauges SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 13
OPHTALMOLOGIE • VITRECTOMIE amélioré et même, plus récemment, des Cette dernière fut rendue possible grâce à l’idée de dispositifs de 27 gauges (encore plus fins). séparer complétement le vitré de la rétine puis de Parallèlement, les applications de la chirurgie de la remplacer le vitré. » Enfin, on vit arriver des colo- « UNE SPÉCIALITÉ DE HAUTE rétine elles-mêmes évoluent : « Si la chirurgie de la rants permettant de mieux distinguer les tissus et TECHNICITÉ » rétine fut, dans un premier temps, appliquée au trai- ainsi d’augmenter encore la précision de la Pr Ramin Tadayoni, tement de maladies comme des hémorragies et les chirurgie. chef du service ophtalmologie opacités du vitré, elle a ensuite été adaptée au de l’Hôpital Lariboisière (Paris) décollement de la rétine puis aux proliférations qui PRÉCISION ET SÉCURITÉ ACCRUES peuvent se développer sur la surface de la rétine Les microscopes furent encore perfectionnés au « L’avancée des technologies notamment dans le cas de rétinopathie diabétique, cours des années deux mille avec l’inclusion de cer- (électronique) et l’amélioration des poursuit le Professeur Tadayoni. Par la suite, elle a tains examens comme l’OCT (tomographie par dispositifs (miniaturisation) ont également été prescrite dans le cas de maladies cohérence optique) qui permet d’observer les diffé- énormément bénéficié aux patients qui considérées comme incurables telles que la mem- rents composants de l’œil et donc de visualiser la doivent bénéficier d’une vitrectomie. Bien brane épimaculaire (une maladie injustement forme et l’épaisseur des couches cellulaires de la que l’intervention doive toujours se faire méconnue car c’est aujourd’hui la première indica- rétine ainsi que la tête du nerf optique. Quant dans un environnement stérile, elle peut tion de chirurgie de la rétine) ou les trous maculaires. au futur ? Un important défi concerne le fond d’œil. désormais se faire en ambulatoire, ce qui Des efforts portent sur le perfectionnement des était inenvisageable auparavant où il fallait machines de vitrectomie et la mise en place d’une longtemps pour se remettre. Maintenant, technologie qui supprime toute forme de traction. il n’y a souvent pas de trace visible de la La quête d’une précision et d’un niveau de sécurité chirurgie. Tout s’est donc joué ces trente toujours plus grands est aussi à l’ordre du jour. Avec dernières années car il nous fallait la démocratisation de la vitrectomie, il est à parier attendre d’avoir ces biotechnologies qu’il sera encore plus aisé de la pratiquer tout en sophistiquées à notre disposition : cela contrôlant tous les effets secondaires. En revanche, tient à la complexité de l’œil lui-même. la robotisation totale de la procédure n’est pas for- C’est également la raison pour laquelle la cément souhaitable, comme l’explique le Professeur chirurgie de la rétine est une discipline à Tadayoni : « Au-delà de la question du coût par rap- haute technicité, longue à apprendre et port aux bénéfices réels, la main du chirurgien peut qui nécessite un matériel dédié mais qui être assistée du robot mais que le patient, opéré peut changer littéralement la vie des sous anesthésie locale, réalise forcément des mou- patients. » Autostable vements, un phénomène que ne peut encore bien contrôler le robot. » n 14 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTALMOLOGIE • OCULOPLASTIE OCULOPLASTIE À QUOI ÇA SERT ? UNE HISTOIRE D’INNOVATIONS Redonner à l’œil L’oculoplastie désigne à la fois la pathologie et la « En France, jusqu’aux années soixante-dix, les oph- chirurgie de la région périoculaire, c'est-à-dire de talmologistes s’intéressaient surtout à l’œil et très son vrai visage l’orbite, des paupières et des voies lacrymales. Son peu à ses annexes » explique le Dr Serge Morax qui but est de rendre sa structure anatomique, sa fonc- a développé l’une des premières unités spécialisées tion et son apparence esthétique à un œil et/ou un en oculoplastique en France, à partir de 1976. Si le regard abîmés. En effet, certains problèmes concer- plasticien britannique Jack Mustardé s’intéressa à L’oculoplastie, ou chirurgie nant cette région dite frontière nécessitent de la chirurgie de l’œil dans les années soixante et rédi- recourir à la chirurgie : ptosis , réparation des pau- gea les premiers écrits sur cette question, c’est le oculoplastique, désigne la pières (traumatismes, brûlures), désobstruction des Français Paul Tessier, considéré comme le père de chirurgie de la région conduits lacrymaux, tumeurs oculaires etc. C’est la chirurgie crânio-orbito-faciale mondiale, qui a une chirurgie essentiellement fonctionnelle mais qui créé les premiers liens entre cette spécialité et les périoculaire. Longtemps peut avoir une visée esthétique le cas échéant. ophtalmologistes français, notamment pour traiter négligée, elle a peu à peu acquis les grandes malformations congénitales. Cette col- laboration favorisa le développement de la chirurgie sa légitimité pour être aujourd’hui autour de l’œil dans les années soixante-dix. Ainsi, une discipline à part entière. dès 1980, les premiers services hospitaliers d’ocu- loplastie virent le jour avec le développement d’un enseignement post-universitaire, la création de sociétés savantes dès 1983 dont la Société euro- péenne d’oculoplastique (ESOPRS). DES DISPOSITIFS MOINS INVASIFS… La prise en charge des reconstructions orbitaires aussi bien en traumatologie qu’en chirurgie plas- tique reconstructive a bénéficié, ces dernières années, d’améliorations importantes grâce à l’utili- sation de nouveaux biomatériaux, exemple caracté- ristique de la recherche clinique. Dans la chirurgie des cavités orbitaires Prothèse palpérable platine (énucléation, exentération ), les implants SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 15
OPHTALMOLOGIE • OCULOPLASTIE poreux (hydroxy-apatite, synthétiques de type biocéramique ou alumine, voire polyéthylène DE MOINS EN MOINS DE CHIRURGIE poreux) sont de plus en plus utilisés aux dépens des TRAUMATIQUE DE L’ORBITE implants non poreux (silicone principalement). Dans les exentérations indiquées en chirurgie carci- En France, les traumatismes, les plaies nologiques, plutôt que de proposer des reconstruc- graves de l’œil et leurs complications ont diminué de manière significative depuis 1983, tions faciales complexes, il est aujourd’hui possible date à laquelle les pare-brise feuilletés ont été de placer des implants magnétiques sur vis en rendus obligatoires. D’une manière générale, titane permettant l’adaptation d’une épithèse les changements successifs en matière de moulée (technique dérivée des implants de Code de la route (port de la ceinture Branemark en chirurgie dentaire). obligatoire, limitation de vitesse etc.) ont L’imagerie a elle aussi permis des avancées consi- permis de faire baisser le nombre de Cathéter à ballonet voies dérables dans le diagnostic, le pronostic et l’indica- chirurgies traumatiques de l’orbite. Mais lacrymales oculoplastie tion opératoire des tumeurs orbitaires et des d’autres évolutions sociétales récentes fractures orbitaires. (évolutions des critères dits de beauté, notamment) ont en revanche augmenté le … ET TOUJOURS PLUS COMPATIBLES tique. Les progrès sont liés à la technologie, à l’utili- nombre d’interventions à visée esthétique. Les recherches menées ces dernières années et sation du microscope opératoire, à des voies celles à venir portent essentiellement sur les maté- d’abord beaucoup plus petites évitant des cica- riaux. Comme le précise Serge Morax, « beaucoup trices disgracieuses. Pour ce qui est des perspec- égard, il convient d’évoquer l’intérêt diagnostique de de progrès ont déjà été faits en matière d’oculoplas- tives, le travail portera essentiellement sur la la dacryocystographie associée au scanner ou à biotolérance avec des matériaux toujours plus l’IRM, la micro-endoscopie des voies lacrymales ANNÉES ANNÉES adaptés à l’organisme et sont capables de rempla- ainsi que l’endoscopie lacrymale transcanaliculaire. 1960 2010 cer l’os et les tissus des paupières. » Ainsi un travail Il faut aussi et surtout évoquer l’intérêt des sondes est-il mené, à l’heure actuelle, pour mettre au point d’intubation mono ou bicanaliculaires de mieux en un silicone non plus hydrophobe mais hydrophile en mieux tolérées. Enfin, un progrès important ces der- le recouvrant d’un matériau afin d’en améliorer le nières années a consisté à prendre en charge les pouvoir mouillant. Ce produit permet ainsi aux larmoiements chroniques considérés comme non larmes de mieux couler sur le matériau. traitables. Pour cela, depuis quelques années, on Travaux du plasticien Travail sur le silicone Britannique Jack hydrophile. La pathologie lacrymale a elle aussi bénéficié d’une recourt à la dilatation via un ballonnet dans les voies Mustardé sur la chirurgie amélioration aussi bien des méthodes d’exploration lacrymales, une opération qui s’effectue très rapide- orbito-palpébrale. que des différents traitements proposés. À cet ment et qui présente un taux de réussite de 70 %. n 16 • SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES
OPHTALMOLOGIE • GREFFE DE CORNÉE GREFFE À QUOI ÇA SERT ? DE CORNÉE La greffe de cornée intervient pour corriger « une Explorer anomalie de la cornée à l’origine de […] troubles visuels », explique la Société française d’ophtalmo- logie (SFO). La cornée peut être altérée par diverses l’œil pour mieux pathologies : anomalie de développement, dystro- phie héréditaire, opacité, œdème, traumatisme ou le soigner anomalie d’épaisseur dont le kératocône qui repré- sente environ un tiers des greffes de cornée selon l’Association Kératocône. Le but de la greffe de cor- née est « de restituer la transparence et favoriser la Ultime recours en cas de grave transmission de la lumière dans de bonnes condi- anomalie de la cornée pouvant tions. La vision sera alors améliorée si les autres Keratoplastie transfixiante structures oculaires le permettent », explique la conduire à la cécité, la greffe de SFO. - La kératoplastie transfixiante : « Préconisée cornée est devenue aujourd’hui lorsque la pathologie touche à la fois l’endothélium et le stroma », elle « consiste à remplacer la cornée la greffe la plus répandue en COMMENT ÇA MARCHE ? sur toute son épaisseur et sur un diamètre de 7 à France. 9 mm », explique le Pr Marc Muraine, chef du service Il existe aujourd’hui trois types de greffe de cornée. ophtalmologie du CHU de Rouen. Dans le cadre de Chacune est préconisée selon des cas spécifiques cette intervention, le matériel permet la trépanation et nécessite une instrumentation adaptée. (découpe circulaire) des cornées du donneur 1789 1905 ANNÉES 2010 Première kératoprothèse. Première kératoplastie Développement de techniques pour transfixiante couronnée de préparer des greffons lamellaires succès. plus précis. SNITEM • LES INNOVATIONS TECHNOLOGIQUES MÉDICALES • 17
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