RESPONSABILITÉ RE VUE DE FOR M ATION SUR LE RISQUE MÉDIC AL - MACSF
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SOMMAIRE VIE PROFESSIONNELLE VIE PROFESSIONNELLE P2 P 13 P 17 RESPONSABILITÉ JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19 R E V U E D E F O R M AT I O N S U R L E R I S Q U E M É D I C A L DOSSIER P8 Régulation médicale et responsabilité
SOMMAIRE POINT DE VUE 4/7 Le développement professionnel continu : pour une éthique des pratiques DOSSIER 8 / 12 Régulation médicale et responsabilité VIE PROFESSIONNELLE 13 / 16 La surveillance du patient sous lithium 17 / 19 Vers une installation en milieu rural 20 Campagne 1 patient 1 équipe PROTECTION JURIDIQUE 21 Pas d’honoraires pour un rendez-vous manqué et non annulé REGARD INTERNATIONAL 22 / 24 Optimiser le travail et l’accouchement pour la sécurité maternelle et néonatale 25 / 26 Optimizing labor and delivery for maternal and neonatal safety © ADOBE STOCK RETROUVEZ les articles de RESPONSABILITÉ sur macsf-exerciceprofessionnel.fr JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
3 RESPONSABILITÉ R E V U E D E F O R M AT I O N S U R L E R I S Q U E M É D I C A L COMITÉ DE PARRAINAGE Pr René Amalberti Pierre Joly Pr André Vacheron Médecin expert gestion des risques, MACSF Président de la Fondation pour la recherche Ancien président de l’Académie de médecine, médicale président du Conseil médical du Sou Médical Pr Bernard Guiraud-Chaumeil Ancien membre du collège Dr Jacques Pouletty Gérard Vincent de la Haute Autorité de santé Président d’honneur du Sou Médical Délégué général de la Fédération hospitalière de France Pr Roger Henrion Jerry Sainte-Rose Membre de l’Académie de médecine Avocat général à la Cour de Cassation CONSEIL DE RÉDACTION PRÉSIDENT Pr Brigitte Feuillet Pr Guy Nicolas Professeur à la Faculté de droit et de sciences Membre de l’Académie de médecine Dr Jacques Lucas politiques de Rennes Vice-président du Conseil National Me Catherine Paley-Vincent de l’Ordre des médecins, délégué général Dr Pierre-Yves Gallard Avocat à la Cour aux systèmes d’information Président d'honneur du Sou Médical Pr Fabrice Pierre Dr Jean-François Gérard-Varet Professeur de gynécologie-obstétrique, MEMBRES Président d’honneur du Sou Médical CHU de Poitiers Dr François Baumann Dr Thierry Houselstein Pr Claude Piva Fondateur de la Société de formation Directeur médical, MACSF Professeur de médecine légale thérapeutique du généraliste Dr Xavier Laqueille à l’université de Limoges Pr Dominique Bertrand Président d’honneur de MACSF assurances Suzanne Rameix Professeur en économie de la santé Yves-Henri Leleu Philosophe, département Éthique médicale Université Paris 7 Denis Diderot Professeur de droit à l’université de Liège de l’université Paris-XII Dr Pierre-François Cambon Dr Catherine Letouzey Pr Virginie Scolan Chirurgien-dentiste, président d’honneur Médecin interniste Professeur de médecine légale et droit de MACSF épargne retraite et MACSF de la santé, CHU de Grenoble financement Marguerite Merger-Pélier Magistrat honoraire, présidente adjointe des CCI, Pr Claude Sureau Pr Anne-Claude Crémieux vice-présidente du Comité d’indemnisation Ancien président de l’Académie de médecine, Professeur de maladies infectieuses, des victimes des essais nucléaires français membre du Comité consultatif national Hôpital Raymond Poincaré d’éthique Pr Paul-Michel Mertès Pr Claudine Esper Professeur d’anesthésie réanimation Stéphanie Tamburini Professeur de droit à l’université Paris-V à l’hôpital universitaire de Strasbourg Juriste MACSF RÉDACTION ÉDITEUR Directeur de la publication Revue trimestrielle éditée par MACSF, Nicolas Gombault société d’assurance mutuelle 10, cours du Triangle de l’Arche Rédacteur en chef 92919 La Défense Cedex Germain Decroix Tél. : 01 71 23 80 80 macsf.fr Assistante de rédaction Dépôt légal : juin 2019 Sandrine Layani ISSN : 2491-4657 Conception et réalisation Studio PAO MACSF Les opinions émises dans les articles publiés dans cette revue n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs. CRÉDIT ILLUSTRATION : JIMMY PÉRÉ. JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
4 Point de vue La prise en charge du patient selon les données actualisées de la science médicale est un impératif. L’obsolescence des connaissances est une réalité, soit continue et progressive, soit brutale car liée à une révolution diagnostique, technique ou thérapeutique. La compétence est donc fragile, remise en cause par l’évolution des connaissances, ou par une pratique déficiente. Pour faire face à cette obsolescence, le Code de déontologie (art. R.4127-11 du CSP) dispose que « tout médecin entretient et perfectionne ses connaissances dans le respect de son obligation de Développement Professionnel Continu (DPC) ». Le DPC, prévu par l’article L.4021-1 du CSP, est une démarche qui a pour objectif le « maintien et l’actualisation des connaissances, des compétences ainsi que l’amélioration des pratiques » selon un principe de réflexivité. Le développement professionnel continu : pour une éthique des pratiques DOMINIQUE BERTRAND, PROFESSEUR EN SANTÉ PUBLIQUE, UNIVERSITÉ PARIS VII DR JEAN-MICHEL KLEIN, PRÉSIDENT DE LA COMMISSION SCIENTIFIQUE INDÉPENDANTE DE L’ANDPC, PRÉSIDENT DU CNP D’ORL, CMF les formations individuelles (e-lear- de pairs…), les analyses de pratique « Le DPC est une ning, revue bibliographique, lectures (patient traceur…), les analyses d’évé- démarche qui a pour médicales) ; nements indésirables, le suivi d’indi- • les actions relatives à la pratique médi- cateurs qualité et de sécurité des soins, objectif le ”maintien cale avec, d’une part, l’évaluation, l’amé- ou encore la simulation en santé. et l’actualisation lioration des pratiques et, d’autre part, des connaissances, la gestion des risques. On retrouve dans • Les voies de validation du DPC cette catégorie les analyses de cas Concrètement, trois voies s’offrent au pra- des compétences ainsi (revues de morbi-mortalité, groupes ticien pour valider son DPC. que l’amélioration des pratiques” selon un principe de réflexivité. » ÀÀ Organisation du DPC • Principes Le DPC est une obligation pour le prati- cien qui doit justifier de son accomplis- sement tous les trois ans. Actuellement se termine la période 2017-2019 ; une nouvelle séquence interviendra entre 2020 et 2022. • Types d’action de DPC La HAS a établi des méthodes devant être suivies par le praticien pour accomplir ses obligations de DPC. On distingue plusieurs catégories d’actions : • les actions de formation qui ont pour but l’acquisition ou la mise à jour de connaissances. Parmi elles, on retrouve © ADOBE STOCK les actions diplômantes (master, DU…), les formations présentielles (congrès, séminaires, séances de simulation), JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
5 Point de vue Le financement même du DPC est variable LES VOIES DE VALIDATION DU DPC et dépend du mode d’exercice. Il est déter- miné pour les médecins libéraux dans OBLIGATION le cadre d’accords conventionnels avec TRIENNALE l’Assurance Maladie ou du Fonds d’Action DE DPC Formation du Personnel Médical (FAF-PM). Le FAF-PM a pour mission de gérer des fonds issus de diverses origines, destinés à la formation continue des médecins Engagement exerçant à titre libéral. Il est habilité Réalisation Réalisation dans une démarche pour mobiliser les fonds de la formation d’un parcours d’un parcours d’accréditation professionnelle continue collectés en début de DPC recommandé de DPC « libre » (pratiques à risques d’année par l’URSSAF. Le FAF-PM est par le CNP uniquement) exclusivement réservé aux médecins exerçant à titre libéral ou à leur rempla- çant, qui se sont acquittés de la Cotisation Seuil plancher : Conformité aux pour la Formation Professionnelle (CFP) • au moins 2 actions recommandations auprès de leur URSSAF. • ces actions du CNP (élaboration doivent être en cours) de types différents Pour les salariés des centres de santé, il est assuré par un prélèvement dédié Il peut au choix : Nationale du Développement Profession- • s’engager dans une démarche d’accré- nel Continu (ANDPC). « Le financement ditation (pour les pratiques à risque) ; même du DPC est variable • réaliser un parcours « libre » comprenant • Rôle de l’ANDPC au moins deux actions de type distinct L’ANDPC est un groupement d’intérêt et dépend du mode conformes aux recommandations métho- public crée par convention entre l’État d’exercice. Il est déterminé dologiques de la HAS ; et l’Assurance Maladie. L’agence a pour pour les médecins libéraux • ou enfin suivre le parcours recommandé principales missions : et conçu par le Conseil National Profes- • d’assurer le pilotage du dispositif de DPC dans le cadre d’accords sionnel (CNP) de sa spécialité, respectant des professionnels de santé (plus large conventionnels avec les orientations prioritaires triennales fixées donc que les seuls médecins) quels que par le Ministère de la Santé, par les CNP soient leur statut ou leurs conditions l’Assurance Maladie et par le service de santé des armées. d’exercice ; ou du Fonds d’Action • d’évaluer les organismes et structures qui Formation du Personnel • Définition et missions des CNP souhaitent présenter des actions de DPC ; Des Conseils Nationaux Professionnels • de contribuer au financement des actions Médical (FAF-PM). » assurent pour chaque spécialité la repré- prioritaires pour les médecins libéraux sentation des praticiens, indépendamment et salariés des centres de santé. Ces actions, sur salaire. Enfin, pour les médecins hos- de leur mode d’exercice. après échantillonnage, sont évaluées par pitaliers, un prélèvement destiné à la for- la Commission Scientifique Indépendante mation permet de financer le dispositif Les CNP ont pour principales missions : (CSI) de l’ANDPC. Le médecin doit, pour sur la base de la masse salariale brute hors • de participer à la définition des orienta- être indemnisé, créer un compte sur le site charge de 0,5 % pour les CHU et de 0,75 % tions prioritaires pluriannuelles de DPC de l’ANDPC et bénéficie alors de 21 heures pour les CH. (à côté des orientations nationales) ; annuelles de formations financées. • de construire le parcours pluriannuel Les sommes destinées au financement des de DPC de leur spécialité ; ÀÀ Réflexions autour du dispositif de DPC actions sont variables : près de 3 000 euros • de proposer un document de traçabilité • Quel financement ? par an pour les libéraux, beaucoup moins permettant à chaque professionnel de re- Actuellement, seuls les médecins libéraux pour les hospitaliers. Cette différence entre tracer les actions de DPC réalisées dans et salariés dans des centres de santé peuvent l’hôpital et le libéral provient peut-être le cadre de son obligation triennale ; participer à des actions de formations in- de l’organisation plus facile et moins • de réfléchir à une éventuelle évolution demnisées. Les hospitaliers bénéficient coûteuse d’actions appliquant de la même du dispositif aux côtés de l’Agence d’autres formes de prise en charge. façon les recommandations de la HAS. JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
6 Point de vue La durée des formations proposées par l’ANDPC est de 21 heures par an pour les libéraux. Les hospitaliers peuvent quant à eux bénéficier de 15 jours de formation par an, prévus dans leur statut. Pour l’hôpital, la somme globale attribuée au DPC des médecins, pharmaciens, et odon- tologistes est répartie par une commission dédiée entre les différents praticiens. Cette somme, restreinte, doit être partagée entre tous les médecins faisant une demande de financement d’une action de formation. Un arbitrage est effectué en fonction du coût de l’action, de son intérêt et des crédits disponibles (des formations déjà financées). Actuellement, tous les médecins, aussi bien en libéral qu’à l’hôpital, participent au DPC sur une période triennale. L’ANDPC indique que le taux de participation augmente chaque année (32 420 en 2018 contre 29 642 inscrits en 2017) sans que l’ensemble des médecins ne participe au dispositif. © ADOBE STOCK • Quel choix de thématiques ? Les orientations nationales, celles des CNP, permettent déjà un choix assez large d’ac- de façon à ne pas faire perdre de chance Comme indiqué précédemment, les théma- « La durée des formations au patient ? De plus, les connaissances tiques actuelles sont proposées par les orien- proposées par l’ANDPC connexes à son exercice personnel mais tations nationales et celles établies par n’appartenant pas à sa propre spécialité chaque CNP. est de 21 heures par an peuvent être source d’une meilleure prise pour les libéraux. Les en charge globale d’une pathologie. Mais est-on certain que d’autres formes hospitaliers peuvent quant Les actions indemnisées sont actuellement de DPC ne seraient pas susceptibles d’apporter autant dans l’actualisation à eux bénéficier de 15 jours presque toutes mono-professionnelles alors des connaissances, l’amélioration de son de formation par an, que, dans le même temps, les collaborations propre exercice et la diminution du risque sont encouragées par l’État et cela à tous de mauvaises pratiques ? L’Union Europé- prévus dans leur statut. » les niveaux : groupements hospitaliers de enne des Médecins Spécialistes propose tions de DPC. Les orientations proposées territoire, communautés pluri-profession- d’autres pistes de réflexion permettant par les CNP correspondent à des théma- nelles territoriales de santé… La colla- de valider le DPC : tiques ciblées, complémentaires des orien- boration à différents niveaux, où chaque • la publication de contenus scientifiques tations nationales : l’évolution générale professionnel apporte sa compétence, est et éducatifs ; de la spécialité (innovations, progrès nécessaire pour améliorer la prise en charge • l’évaluation de contenus scientifiques techniques), les urgences… de façon du patient. Peut-on envisager que le pluri- et éducatifs, c’est-à-dire l’analyse de la assez générale et ne se concentrent que professionnel thématique soit priorisé pour pertinence du périmètre et des méthodes rarement sur la prise en charge d’une répondre à ce mouvement de regroupement utilisées ; pathologie déterminée. Chaque praticien des professionnels de santé ? • l’apprentissage par l’enseignement, peut ainsi trouver dans le libellé ce qui c’est-à-dire une préparation rigoureuse correspond à son exercice personnel. • Vers un élargissement des thématiques permettant à la fois une compréhension Peut-on envisager que chaque praticien de DPC ? parfaite par les apprenants en leur don- ait connaissance des principales évolutions L’objectif est de permettre de valoriser, nant les concepts éventuels sous-tendus de sa spécialité, y compris de celles qui pour chaque médecin, l’effort fait pour mais aussi la présentation de difficultés n’entrent pas dans sa pratique actuelle, rester performant dans ses activités. exceptionnelles et leur résolution ; JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
7 Point de vue • l e tutorat, utilisé notamment en méde- « Seuls les CNP sont intégrées et seulement pour les libéraux cine générale, permettant un enrichis- sement réciproque. en mesure de savoir et certains salariés. quelles actions sont utiles Peut-on envisager alors que l’Ordre des Le futur pourrait comprendre : à la validation du DPC médecins propose sur un site de complé- • la participation active dans la création ter ce qui existe ? Chaque médecin, libé- d’enseignements ou d’outils éducatifs de sa spécialité. Eux seuls ral, salarié ou hospitalier, pourrait alors en ligne ; sont également en mesure remplir à titre personnel l’ensemble des • la préparation de directives cliniques éléments attestant de son engagement et documents de consensus ; d’attester de la validité dans une démarche de DPC, au-delà des • l’évaluation de projets de recherche, des actions et du parcours actions suivies dans le cadre du parcours de publications scientifiques ; accomplis sur demande financé. • la direction effective de thèse ; • l’adhésion active à des sociétés savantes ; du professionnel de santé Ainsi conçu, le DPC constitue la pierre • la mise en place d’un contrôle qualité en secteur libéral et en angulaire de la formation tout au long dans une structure de soins ; de la vie professionnelle ponctuée • la collaboration avec d’autres profession- établissement de santé. » des points d’étapes de la certification nels de santé ; de conception et de validation pour l’en- périodique. Il répond aux enjeux d’une • l’évolution des pratiques par les tech- semble des spécialités, tout en permettant politique nationale de santé solidaire, nologies numériques… une certaine liberté dans des cas parti- qualitative et humaniste. En stimulant culiers ou pour des spécialités très hété- l’évolution des connaissances et des pra- Cet élargissement à d’autres modalités, rogènes. Seuls les CNP sont en mesure tiques, il garantira l’équité territoriale plus axé enseignement-recherche, doit de savoir quelles actions sont utiles à la de la qualité des soins prodigués aux tenir compte du niveau de participation validation du DPC de sa spécialité. Eux patients, tout en respectant la spécificité et être individualisé afin de retranscrire seuls sont également en mesure d’attester des pratiques de chaque professionnel l’investissement réel du praticien. L’amé- de la validité des actions et du parcours de santé. En cela, il constitue un enjeu lioration de la qualité des soins s’avère accomplis sur demande du professionnel fondamental. ■ indispensable à un moment où le rapport de santé en secteur libéral et en établis- de Jean-Marc Aubert Modes de financement sement de santé. TEXTES et de régulation envisage des rémunéra- •A rticle L.4021-1 et suivants tions à l’épisode de soins, sur des objectifs Chaque médecin doit également effectuer du Code de la Santé Publique de qualité nécessitant l’adhésion de pro- un DPC conforme à son exercice. fessionnels différents autour d’indicateurs • Décret n° 2016-942 du 8 juillet 2016 relatif à l’organisation du qualité pour le suivi du patient. Le rôle des CNP est de définir l’ensemble développement professionnel des actions pouvant être retenues dans continu des professionnels • Quelle traçabilité ? le cadre actuel, imaginer celles qui pour- de santé L’ANDPC conserve les preuves des actions ront l’être dans un avenir proche et qui • Décret n° 2019-17 du 9 janvier de DPC indemnisées dans Mon compte DPC pourront être inscrites dans le document 2019 relatif aux missions, mais le périmètre de ce recueil ne corres- de traçabilité. à la composition et au pond ni à la totalité des actions indem- fonctionnement des Conseils nisées entreprises par un médecin, ni au Qui héberge le document de traçabilité Nationaux Professionnels médecin hors champ des actions indem- final ? des professions de santé nisées, essentiellement les hospitaliers. Il est personnel, actualisé par le profes- •A rrêté du 8 décembre 2015 sionnel de santé, comprenant les preuves fixant la liste des orientations Deux problèmes se posent. des différentes actions définies par les nationales du développement textes règlementaires et les CNP. professionnel de santé pour Le champ à retenir pour le DPC les années 2016-2018 Ce sont les CNP qui vont définir les actions L’article L.4021-5 du CSP précise que • Arrêté du 28 juillet 2016 portant composant le DPC indemnisé et le parcours le document de traçabilité est établi par approbation de la modification professionnel pluriannuel d’amélioration les CNP et mis à disposition des pro- de la convention constitutive des pratiques. fessionnels de santé, quel que soit leur du groupement d’intérêt statut ou leur mode d’exercice sur le site public Agence Nationale du Ces actions devront être établies avec de l’ANDPC. Mais ce n’est pas le cas : Développement Professionnel une certaine homogénéité d’exigence, seules les formations indemnisées sont Continu JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
8 DOSSIER Les équipes du Centre 15 sont confrontées au quotidien à diverses problématiques de régulation. Germain Decroix, Juriste et Rédacteur en chef de la revue Responsabilité, a rencontré l’équipe du Samu 91 pour répondre à ses questions sous un angle juridique. Quels sont les différents niveaux de responsabilité ? Peut-on transmettre l’enregistrement d’une régulation à un patient ? À quel moment peut-on considérer qu’une régulation est terminée ?… Régulation médicale et responsabilité GERMAIN DECROIX, JURISTE, MACSF ÀÀQuelles sont les responsabilités de chacun « Depuis la loi n° 83-634 au sein du Samu ? Tout d’abord, il faut savoir que 90 % des plaintes du 13 juillet 1983, débouchent sur des procédures de demandes la collectivité publique doit, de réparation des dommages subis et seulement 10 % relèvent de la demande de sanction. sauf en cas de faute personnelle détachable Depuis la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, la collectivité de l’exercice de ses fonctions, publique doit, sauf en cas de faute personnelle détachable de l’exercice de ses fonctions, couvrir le fonctionnaire couvrir le fonctionnaire des condamnations civiles prononcées contre lui. des condamnations civiles Les fautes intentionnelles, ou détachables de la fonc- prononcées contre lui. » tion publique relèvent quant à elles de la responsa- bilité personnelle de l’agent. Un patient pour lequel vousne provoquez pas un secours peut tout à fait engager une action pour Parmi ces dernières, figure la non-assistance à personne non-assistance à personne en péril, et ce même si en péril énoncée dans l’article 223-6 du Code pénal. la situation n’a finalement généré aucun dommage JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
9 DOSSIER pour lui. C’est pourquoi le comportement doit tou- Samu 91 Qu’en est-il de la responsabilité jours être adapté. Peu importe qu’une autre solution en cas d’erreur de diagnostic ? ait finalement été trouvée s’il y avait un caractère de gravité. Germain DECROIX Il faut pouvoir prouver que tous les moyens nécessaires ont été mis en œuvre, que les Sur le plan de la responsabilité, il est toujours bonnes questions ont été posées afin d’éliminer les préférable d’envoyer à tort un effecteur lourd plutôt pathologies qui auraient nécessité l’envoi d’un Service qu’un effecteur insuffisant, voire ne pas provoquer Mobile d’Urgence et de Réanimation (SMUR). de secours du tout. ÀÀ Le traitement des appels Samu 91 Notre responsabilité peut-elle être mise Depuis le début de l’année 2019, le Samu 91 dispose en cause pour l’envoi d’une équipe incomplète de la téléphonie avancée avec des salles d’attente vir- (composée d’un médecin, d’un infirmier et d’un tuelles. Les Assistants de Régulation Médicale (ARM) ambulancier) ? transmettent les appels dans les salles d’attente des médecins régulateurs qui sont déjà en ligne. Un Germain DECROIX Les juges, qui ne sont pas spé- logiciel de régulation permet de faire apparaître un cialisés dans les questions de santé, vont dans un pre- dossier à l’écran comportant différentes informations mier temps s’assurer que la réglementation a été selon la typologie de l’appel. respectée. Samu 91 Qu’en est-il des appels raccrochés Le rôle des avocats des différentes parties sera dans la salle d’attente téléphonique d’un médecin de rappeler aux juges la réglementation inhérente régulateur ? à la profession concer- née afin de détermi- Germain DECROIX ner si le dommage « La solution aux appels raccrochés Comme vous le faites subi a un lien avec est de tenter de rappeler déjà, la solution est bien une éventuelle insuf- évidemment de tenter fisance de la composi- la personne et de laisser de rappeler la personne tion de l’équipe qui est un message sur son répondeur. et de laisser un message intervenue. Avec la technologie actuelle, sur son répondeur. Avec la technologie actuelle, il est Le rôle de l’assureur serail est facile de tracer facile de tracer un appel un appel et de prouver quant à lui de faire assis- et de prouver que vous ter son sociétaire par avez effectivement tenté le médecin qui lui que vous avez effectivement de rappeler. paraît le plus compé- tenté de rappeler. » tent afin que les bonnes Samu 91 Que faire questions soient posées et que les bons éléments quand un centre est submergé soient pris en compte. d’appels et que les équipes ont l’impression de ne plus pouvoir remplir leurs missions ? Samu 91 Les juges sont-ils sensibles à la charge réelle de travail ? Germain DECROIX Le rôle du responsable est d’éva- luer le fonctionnement de sa structure et ses besoins. Germain DECROIX Il est tout à fait possible de sou- mettre cet argument à l’appréciation souveraine du juge S’il lui semble nécessaire d’obtenir des moyens supplé- lorsqu’un pic d’activité affecte le bon déroulement mentaires afin de pouvoir effectuer la totalité de sa de la mission de régulation. Dans une récente décision mission, il doit alors alerter l’ARS en produisant des (Cour d’appel de Toulouse du 5 mars 2018), les juges données objectives : flux d’appels, flux de non-décro- ont pris en compte le pic d’activité dans une mater- chés, flux d’appels perdus… La responsabilité du chef nité pour exclure toute responsabilité. de centre se concentre sur la bonne utilisation des JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
10 DOSSIER moyens disponibles et les demandes de moyens Samu 91 Qu’en est-il de la régulation lorsque supplémentaires selon les besoins qu’il aura évalués. nous avons affaire à un intermédiaire ? Samu 91 Si un appel n’est pas décroché Germain DECROIX Lorsque vous avez un proche en cas de surcharge d’activité, par exemple, ou un voisin en ligne, il faut être d’autant plus pru- qu’en est-il ? dent car le recueil des données est alors plus pauvre et ne permet parfois pas d’éliminer un diagnostic Germain DECROIX La responsabilité en incombera grave. Dans ce cas, il est préférable d’être plus prudent à la personne morale, voire à l’ARS si elle a été destina- dans le choix de l’effecteur. taire d’une alerte en ce sens et qu’elle n’a pas mis en place les mesures nécessaires. Samu 91 Quid des appels de demandes de numéros de médecins ou de pharmacies Samu 91 Que faire lorsqu’un médecin appelle de garde, ou bien de simples conseils médicaux ? le Centre 15 pour demander une équipe SMUR et que le médecin régulateur considère que l’envoi Germain DECROIX Rien n’empêche l’ARM de com- d’un secours plus léger est suffisant ? muniquer le numéro du médecin, du dentiste ou de la pharmacie de garde. Germain DECROIX Cette décision appartient plutôt au médecin qui a vu le patient et qui dispose du maxi- S’agissant des conseils médicaux, l’ARM doit consulter mum d’éléments. le médecin régulateur pour qu’un conseil soit délivré. © ADOBE STOCK JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
11 DOSSIER Cependant, la mission du régulateur n’est pas de soigner Le régulateur a été pénalement condamné au motif mais de réguler et il ne faudrait pas que cela se fasse qu’il ne s’était pas enquis du bilan de l’effecteur. au détriment des autres appels. La responsabilité du régulateur et celle du Centre 15 peuvent donc être recherchées du fait de l’absence Samu 91 Quid des personnes qui appellent de recherche de la réalisation de l’intervention pour dire qu’un de leurs parents se trouvant de l’effecteur. à l’étranger ne va pas bien ? La régulation est donc Germain DECROIX « Dans une affaire jugée en 1995, aboutie lorsqu’il a été Quand cela est possible, un régulateur a été pénalement confirmé au régulateur ce sont vos collègues des que l’effecteur est bien sociétés d’assistance qui condamné au motif qu’il ne s’était intervenu. Ce dernier doivent prendre le relais. pas enquis du bilan de l’effecteur. étant bien évidemment Ils ont l’avantage d’avoir La responsabilité du régulateur seul responsable des un réseau dans le monde actes et décisions qu’il entier pour faire délivrer et celle du Centre 15 peuvent donc a prises sur place ainsi les soins appropriés. être recherchées du fait de l’absence que du contenu du bilan qu’il a adressé. Samu 91 Peut-on de recherche de la réalisation conseiller à un patient de l’intervention de l’effecteur. » de se faire accompagner aux urgences par un parent ou un proche ÀÀ Un service d’urgences peut-il refuser un patient lorsque l’on considère que l’appel ne justifie que le Samu lui adresse ? pas l’envoi d’un secours ? Si le service d’urgences contacté fait partie du service public, il ne pourra pas refuser un patient. Une clinique Germain DECROIX L’envoi d’un effecteur n’est pas peut cependant refuser un patient qui se présente une obligation. Si vous estimez qu’une consultation spontanément dans sa structure si elle ne comporte n’est pas urgente et qu’il n’y aura aucun tort pour pas de Service d’Accueil et de traitement des Urgences le patient à ne pas avoir organisé de secours, vous (SAU). Néanmoins, elle devra correctement orienter pouvez effectivement le diriger vers son médecin le patient. traitant ou vers un service d’urgences hospitalier où il se rendra de préférence accompagné par un proche. ÀÀ De quels moyens disposent les plaignants pour se défendre ? ÀÀÀ quel moment peut-on considérer Le plaignant a la possibilité d’engager une procédure qu’une régulation est terminée ? pour faire une demande en réparation et/ou une Cette question a été abordée lors d’une célèbre affaire demande de sanction. Il dispose d’un délai de 10 ans jugée en 1995, qui a déclenché l’inquiétude chez les à compter de la consolidation de son dommage pour régulateurs. mettre en place une procédure indemnitaire. Il s’agit d’un dossier dans lequel un régulateur a contacté Au pénal, la prescription est de 6 ans à compter de la la secrétaire du médecin de garde pour se rendre auprès commission de l’infraction, avec un report possible d’un patient. Sans urgence immédiate, la secrétaire si la victime était mineure au moment des faits. confirme que le docteur passera dans la matinée. Cependant, ne voyant pas les secours arriver, l’épouse Elle peut prendre un avocat ou demander à son assu- du patient rappelle le 15. Le régulateur contacte alors reur de Protection Juridique de l’assister dans ses la secrétaire du médecin pour connaître le délai démarches. Elle a également la possibilité de faire d’intervention mais le médecin arrive finalement trop appel à une association de victimes. tard et le patient décédera peu de temps après son arrivée aux urgences du centre hospitalier (volvulus Si, à la suite d’un acte thérapeutique, de prévention gastrique perforé). ou de diagnostic (donc hors chirurgie esthétique), JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
12 DOSSIER un patient est victime d’un accident médical aux bande avec le patient afin de pouvoir répondre à ses conséquences graves, il a la possibilité de faire appel questions. à la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI), créée en 2002 par la loi Kouchner. Samu 91 Peut-on adresser une simple retranscription de l’enregistrement au patient Il s’agit d’une procédure amiable, très encadrée, lors qui en demande la transmission ? de laquelle un expert est nommé pour établir si le dommage relève d’une faute, d’un aléa théra- Germain DECROIX Dans un premier temps, il est tout peutique ou d’une évolution médicale normale de à fait possible d’adresser une retranscription. Cependant, la pathologie. si l’enregistrement lui-même est réclamé, il faudra alors le communiquer. • La faute Si l’expert établit qu’il y a faute du professionnel de san- Samu 91 Est-il légal de diffuser un enregistrement té, c’est l’assureur de celui-ci qui devra interve- de régulation sur les réseaux sociaux ? nir. Pour le régulateur, son statut de collaborateur du service public permettra d’orienter la demande Germain DECROIX La diffusion des enregistrements indemnitaire vers l’hôpital. est interdite car il s’agit d’une atteinte à la personne puisque nous sommes dans le cadre d’une conver- • L’aléa thérapeutique sation privée. S’il s’agit d’un aléa thérapeutique aux conséquences graves, aucune responsabilité ne peut être retenue Il est donc important de préciser lors de la communica- et c’est un fonds de solidarité (Office National tion de l’enregistrement que, hors du cadre de la saisie d’Indemnisation des Accidents Médicaux[ONIAM]) judiciaire, aucune diffusion n’est possible. qui prendra en charge le dossier. Samu 91 Un patient peut-il demander • L’évolution médicale normale de la pathologie la communication d’un échange entre deux Dans ce cas, le plaignant ne disposera d’aucune indem- médecins sur son dossier ? nisation. Germain DECROIX Depuis la loi Kouchner, les échan- ÀÀ La transmission des enregistrements de régulation ges entre médecins ne sont plus couverts par le secret L’écoute a posteriori des enregistrements est souvent de la correspondance et le patient peut faire jouer défavorable au régulateur. C’est pourquoi il est son droit d’accès à son dossier, et demander la copie important d’avoir une réelle démarche scientifique des courriers, des mails… Samu 91 Que peut-on transmettre « Il est important d’avoir à un ayant-droit qui réclame le dossier médical d’un patient décédé ? une réelle démarche scientifique derrière chaque appel. Tout Germain DECROIX L’accès de l’ayant-droit aux données de santé du défunt est limité. comme pour un examen clinique, il faut établir une procédure Il ne pourra faire valoir ce droit que dans trois dans le déroulé de l’appel. » situations : • connaître la cause de la mort ; • nécessité de préserver la mémoire du défunt ; derrière chaque appel. Tout comme pour un examen • faire valoir ses droits auprès de structures telles clinique, il faut établir une procédure dans le déroulé que les compagnies d’assurances. de l’appel. Dans ce cadre, il ne pourra pas avoir accès à la totalité Au Samu 91, dans la procédure d’accès à un enregis- du dossier médical du défunt mais aux seuls éléments trement, il est proposé une première audition de la relatifs à l’objet de sa demande. n JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
13 Vie professionnelle Les sels de lithium constituent actuellement le traitement de référence des troubles bipolaires. Le lithium fait l’objet de règles pour une utilisation sans danger dans la prévention des rechutes dépressives et maniaques au long cours1. Ces règles permettent de prévenir et prendre en charge les toxicités aiguës et chroniques qui peuvent mettre en jeu la responsabilité du médecin. Rappel des précautions d’emploi afin de prévenir les accidents et les toxicités. La surveillance du patient sous lithium DR XAVIER LAQUEILLE, CHEF DU SERVICE D’ADDICTOLOGIE DU CH SAINTE-ANNE, RESPONSABLE D’ENSEIGNEMENT UNIVERSITÉ PARIS DESCARTES DR CHLOÉ LUCET, SERVICE D’ADDICTOLOGIE DU DR LAQUEILLE – CH SAINTE-ANNE, CHARGÉE DE COURS DR OUSSAMA KEBIR, SERVICE D’ADDICTOLOGIE DU DR LAQUEILLE – CH SAINTE-ANNE, CHARGÉ DE COURS © ADOBE STOCK ÀÀ Historique et indications d’emploi. La faible marge entre effets bipolaire de type 1 (épisodes maniaques • Historique thérapeutiques et toxicité du lithium et épisodes dépressifs)2. Ses indications Les propriétés anti-maniaques du lithium impose le contrôle de la lithémie plas- comportent le traitement de la manie ont été mises en évidence en 1949 par matique, qui reste à ce jour le principal aiguë et la prévention des récurrences l’australien John Cade. Cependant, l’absence paramètre de surveillance d’un traite- de toute surveillance plasmatique empêcha ment par lithium. « LA FAIBLE MARGE ENTRE EFFETS son utilisation au vu de la léthalité des THÉRAPEUTIQUES ET TOXICITÉ doses utilisées à l’époque. C’est grâce aux • Indications DU LITHIUM IMPOSE LE CONTRÔLE travaux du danois Morgens Schou dans Le lithium constitue le traitement de réfé- DE LA LITHÉMIE PLASMATIQUE, les années 60 que ce traitement a été plei- rence dans le traitement des troubles QUI RESTE À CE JOUR LE PRINCIPAL nement réhabilité plus tard. La lithémie bipolaires. L’efficacité du lithium a été PARAMÈTRE DE SURVEILLANCE plasmatique apporta une information fortement documentée et apparaît évidente D’UN TRAITEMENT PAR LITHIUM. » précieuse sur l’efficacité et la sécurité chez les patients souffrant de trouble JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
14 Vie professionnelle bipolaires. Outre son effet thymorégu- Ce tableau est une urgence médicale terminale est faiblement augmenté (0,5 % lateur, il possède un effet anti-suicide, et motive la demande d’une lithémie des patients nécessitant une dialyse ou une anti-impulsif et anti-agressif3. plasmatique au moindre signe d’appel transplantation rénale). La prévalence digestif ou neurologique. de l’hypothyroïdie est augmentée par 6 Les mécanismes biologiques de l’effica- avec une élévation moyenne de la TSH cité du lithium ne sont pas bien connus. L’intoxication au lithium, rarement fatale de 4 U/ml. La calcémie est augmentée Ils feraient intervenir les phénomènes (1 % de décès), nécessite une réanimation (de 0,09 mmol/l en moyenne) ainsi que d’excitation et de survie neuronale ainsi intensive et peut entraîner des séquelles le taux de la parathormone (de 7,32 pg/ml que l’expression de gènes impliqués dans neurologiques (atteinte cérébelleuse), en moyenne). Enfin, le risque d’une prise la neuroplasticité et la chronobiologie. troubles cognitifs et atteinte rénale. pondérale est augmenté par 2. ÀÀ La toxicité aiguë ÀÀ Les complications du traitement • Surveillance clinique La toxicité du lithium apparait à des lithé- au long cours Poids ; troubles digestifs (nausées, vomis- mies supérieures à 1,2 mmol/l. La sévé- Les surdosages chroniques, ou aigus sur sements, diarrhées) ; sédation ; goitre thy- rité de l’intoxication dépend de la valeur traitement chronique, sont les plus gra- roïdien ; hypothyroïdie ; sensation de soif ; de la lithémie et de la durée d’exposition ves et souvent prolongés (imprégnation polyurie ; manifestations cutanées. à des lithémies très élevées4. tissulaire). La sévérité peut être légère, moyenne ou sévère en fonction de la lithé- • Surveillance biologique L’atteinte neurologique est au premier mie pratiquée 12 heures après la dernière (une ou deux fois par an) plan et se manifeste par ordre croissant prise (voir le tableau 1). Les signes cliniques Numération sanguine ; ionogramme san- de gravité par les signes suivants : de surdosage peuvent être présents avec une guin ; calcémie, glycémie ; créatinine, • tremor, lithémie sérique peu élevée, d’où l’intérêt urée plasmatique, protéinurie, bilan thy- • apathie, du dosage du lithium intra-érythrocytaire roïdien et parathormone. • somnolence, avec un rapport lithémie érythrocytaire/ • dysarthrie, sérique à 0,40, meilleur reflet de la gravité •S urveillance des interactions • ataxie, de l’intoxication. médicamenteuses (augmentation • nystagmus, de la lithémie) • mouvements choréiformes, Au niveau rénal, il existe une compétition Anti-inflammatoires non stéroïdiens, • hyperréflexie, entre lithium et sodium lors de la réab- carbamazépine, diurétiques, inhibiteurs • myoclonies, sorption au niveau du tubule proximal de l’enzyme de conversion, antagonistes • état confusionnel, qui explique que de grandes variations de l’angiotensine II et antipsychotiques • convulsions, dans l’élimination (majoration de la neurotoxicité). • coma. du sodium pertur- « LORS D’UN RÉGIME DÉSODÉ OU LORS D’UNE PERTE ACCRUE DE NA+ UNE bent la lithémie. Lors ÀÀ La conduite du traitement Au niveau rénal, d’un régime désodé La prescription de sels de lithium AUGMENTATION DE LA RÉABSORPTION la toxicité aiguë du ou lors d’une perte (Téralithe 250®, Téralithe LP 400®, DU LITHIUM EST OBSERVÉE, ENTRAÎNANT lithium peut égale- accrue de Na+ (diu- Neurolithium®) nécessite un bilan pré- UNE AUGMENTATION DE LA LITHÉMIE ment se manifester rétiques, déshydra- thérapeutique comprenant : QUI PEUT ÊTRE À L’ORIGINE D’UNE par une polyurie tation, vomisse- • un contrôle de la fonction rénale (dosage INTOXICATION AIGUË QUI PEUT ÊTRE (perte du pouvoir ments, diarrhée), plasmatique de la créatinine, de l’urée, GRAVE ET LÉTALE. » de concentration une augmentation protéinurie, clairance de la créatinine) ; des urines) et par de la réabsorption • un ECG à la recherche d’une anomalie une insuffisance rénale aiguë (nécrose du lithium est observée, entraînant une cardiaque. Toute anomalie du tracé tubulaire aiguë). augmentation de la lithémie qui peut doit conduire à un avis d’un cardiolo- être à l’origine d’une intoxication aiguë gue. Le lithium est à éviter en cas d’al- Les signes digestifs, sous forme de nau- qui peut être grave et létale. tération de la fonction ventriculaire ; sées, vomissements, douleurs abdomi- • un contrôle du bilan thyroïdien, une cal- nales et diarrhées, sont précoces. Sous un traitement par lithium au long cémie et un dosage de la parathormone ; cours, une méta-analyse5 retrouve que • une glycémie à jeun, un ionogramme san- L’atteinte cardiaque se manifeste par des ano- le débit de la filtration glomérulaire se ré- guin et une numération sanguine doivent malies ECG sous forme de sous-décalages duit (de 6,22 ml/mn en moyenne) et la être prescrits avant l’initiation du traitement. du segment ST, inversions de l’onde T capacité à concentrer les urines baisse et plus rarement par des troubles de la significativement de 15 %. Le risque Chez la femme en âge de procréer, on conduction. de survenue d’une insuffisance rénale doit s’assurer qu’elle n’est pas enceinte JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
15 Vie professionnelle et instaurer une contraception efficace • Toxicité ÀÀ L’information du patient avant la mise sous traitement lorsqu’aucun La toxicité chronique du lithium se manifeste Les patients doivent recevoir une information moyen n’était utilisé. entre 1,2 et 2,0 mmol/l et des concentrations complète sur l’efficacité du traitement, ses ef- supérieures à 2,5 mmol/l peuvent être fatales. fets secondaires, les interactions médicamen- La surveillance d’un traitement par li- teuses, la nécessité d’un apport sodé stable thium au long cours concerne à la fois Pour une même lithémie sérique, le taux et le risque d’arrêt intempestif (avec risque la toxicité et l’efficacité. La dose journalière de lithium dans les de rebond d’une doit être ajustée individuellement en fonc- neurones peut varier éventuelle sympto- « LE PATIENT DOIT RECEVOIR tion des concentrations sériques obtenues selon les individus. matologie mania- UNE INFORMATION COMPLÈTE SUR et de l’évolution clinique. La lithémie sé- Cette variation de dis- que), les signes L’EFFICACITÉ DU TRAITEMENT ET SES rique est très importante à déterminer tribution peut expli- d’une intoxication EFFETS SECONDAIRES. IL EST FORTEMENT sur des prélèvements 12 h (+ ou – une quer l’apparition aiguë et la conduite RECOMMANDÉ DE CONSIGNER LE SUIVI 1/2 h) exactement après la dernière d’effets secondaires à tenir dans cette DES POSOLOGIES ET DES LITHÉNIES prise. Il existe une relation dose-effet malgré une lithémie situation. Il est forte- DANS UN CARNET SPÉCIFIQUE avec le lithium. faible. La lithémie ment recommandé QUI LUI SERA REMIS. » intra-érythrocytaire que le suivi des po- (ou intra-globulaire) sologies et des lithé- « LA SURVEILLANCE D’UN TRAITEMENT représente un témoin indirect de la lithé- mies de contrôle soit consigné dans un car- PAR LITHIUM AU LONG COURS mie intra-neuronale. Son dosage et le calcul net spécifique de suivi remis au patient. CONCERNE À LA FOIS LA TOXICITÉ du rapport lithémie érythrocytaire/sérique ET L’EFFICACITÉ. LA DOSE JOURNALIÈRE (entre 0,3 et 0,4) permettent d’évaluer cette ÀÀ Conclusion DOIT ÊTRE AJUSTÉE INDIVIDUELLEMENT variabilité de distribution et d’optimiser Le lithium est un traitement efficace EN FONCTION DES CONCENTRATIONS la dose journalière. et occupe une place importante dans SÉRIQUES OBTENUES ET DE L’ÉVOLUTION l’arsenal thérapeutique en psychiatrie. CLINIQUE. » Les principaux effets indésirables possi- Sa toxicité est bien connue et facilement bles ainsi que les recommandations pour identifiable cliniquement et biologique- les gérer sont résumés dans le tableau 2. ment. La qualité de l’information du ma- • Épisode maniaque aigu lade concernant le traitement par lithium La dose doit être choisie pour atteindre une ÀÀ Évaluation de l’efficacité est la meilleure garantie de l’innocuité lithémie de l’ordre de 0,6 à 0,8 mmol/l pour L’efficacité thymorégulatrice du lithium de celui-ci. Le médecin doit donc prendre la forme standard et de 0,8 à 1,2 mmol/l s’évalue sur une période de 1 à 2 ans. le temps d’expliquer en détail le traitement, pour la forme retard (LP). Il s’agit de vérifier si le lithium a permis d’énoncer les principales règles et même une diminution de la fréquence et de l’in- de vérifier leur bonne compréhension. n • Traitement au long cours tensité des épisodes thymiques. Le trai- NOTES et prévention tement par lithium doit être poursuivi, 1. LÔO H., OLIE J.P., GAY C., Le déprimé et son lithium, La dose d’entretien doit être choisie pour même s’il y a une rechute, sur une période Masson, 1989. 2. BOWDEN C.L., “Acute and maintenance treatment atteindre une lithémie sérique de l’ordre de 12 à 24 mois afin de se donner suffi- with mood stabilizers“, International Journal of de 0,5 à 0,8 mmol/l. samment de recul pour l’évaluation de son Neuropsychopharmacology - 2003 Sep;6(3):269-75 3. BALDESSARINI R.J., TONDO L., DAVIS P., POMPILI M., efficacité. À l’issue de cette période, une éva- GOODWIN F.K., HENNEN J., “Decreased risk of suicides and • Utilisation concomitante luation soigneuse de la réponse, même attempts during long-term lithium treatment: a meta- analytic review“, Bipolar Disord - 2006 Oct;8(5 Pt 2):625-39. d’antidépresseurs partielle doit être faite : la persistance 4. BAIRD-GUNNING J., LEA-HENRY T., HOEGBERG L.C.G., S., ROBERTS D.M., “Lithium Poisoning“, Journal Le dosage doit être adapté individuel- de fluctuations thymiques, surtout les GOSSELIN of Intensive Care Medicine - 2017 May;32(4):249-263. lement. Certaines études cliniques ont premiers mois est fréquente et ne doit 5. McKNIGHT R.F., ADIDA M., BUDGE K., STOCKTON S., montré que la lithémie efficace dans pas conduire systématiquement à l’arrêt GOODWIN G.M., GEDDES J.R., “Lithium toxicity profile: a systematic and review and meta-analysis“, le traitement des dépressions résistan- du traitement. Une réponse partielle fera dis- Lancet - 2012 Feb 25;379(9817):721-8. 6. GOURION D., «Thymorégulateurs» dans le Manuel tes se situe dans une fourchette de 0,5 cuter l’adjonction d’un deuxième régulateur de psychiatrie de GUELFI J.D. et ROUILLON F., Elsevier à 0,8 mmol/l. d’humeur ou un changement de molécule6. Masson, 2017 (3ème édition). JUIN 2019 / No 74 / VOLUME 19
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