CAP SUR L'INNOVATION DOSSIER - ENJEUX STRATEGIE AMERICAINE EN AFRIQUE - IRSEM
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ADA N° 381 // JUIN 2013 www.defense.gouv.fr ENJEUX STRATEGIE AMERICAINE EN AFRIQUE DOSSIER CAP SUR L’INNOVATION
So m m a i r e N° 381 FORCES EN ACTION 4 8 D’un avion à l’autre Dans la peau d’un marin « COMBAT PROVEN » Ce numéro est consacré à l’innovation, à ÉDITO l’occasion du salon du Bourget. Le ministère 12 Portrait : David est Goliath de la Défense y sera présent avec un pavillon consacré aux solutions innovantes pour le 14 Portfolio long terme, sous la forme de maquettes représentant des systèmes projetés ou mis 16 Les opérations en bref au point par des groupes industriels et des PME. Mais l’innovation ne concerne pas que ENJEUX l’avenir lointain, c’est aussi le présent des D.R. 18 Stratégie américaine en Afrique équipements déjà en service. Le stand du ministère expose en effet, parmi les systèmes d’armes majeurs, des MODERNISATION avions de combat et des hélicoptères de nouvelle génération dont la plupart sont déjà « combat proven », ayant fait leurs preuves sur les 20 Le point sur les fonds théâtres d’opérations les plus récents. En Afghanistan, en Libye et au de prévoyance du ministère Mali, le Rafale, sous différentes configurations, a démontré son apti- FOCUS DEFENSE tude à être un appareil de combat multimission. Le Tigre, également engagé sur ces trois théâtres dans sa version héli- 22 Mali, le désengagement coptère appui protection, est l’hélicoptère de combat le plus performant en ordre de marche dans sa catégorie. Il vient d’être rejoint dans l’aviation légère de l’armée de Terre par la version hélicoptère d’appui destruction, capable d’atteindre 26 À l’école des lions un char à 8 000 mètres. Dans la catégorie des hélicoptères de manœuvre, le Caïman est en dotation dans l’armée de Terre et dans la Marine qui a 30 Aviation : frapper fort et loin reçu ses premiers exemplaires. Dans la panoplie des armements présentés avec ces plates-formes, les 32 Groupement aéromobile : pods électroniques et les missiles offrent le meilleur de la technologie et un appui sans faille du savoir-faire français, depuis le missile de croisière Scalp jusqu’à la muni- tion guidée AASM (armement air-sol modulaire) récemment utilisée dans 36 Bourget 2013 : le stand Défense le cadre de l’opération Serval. Enfin le missile sol-air moyenne portée/Terre Mamba, présenté sur son lanceur, constitue une capacité, proposée par la 38 Des hommes et des aéronefs France, qui ouvre l’accès à la défense anti-missile balistique. Tous ces systèmes d’armes novateurs seront présentés par leurs équipages 40 Retour dans les règles sanitaires et servants, dont ceux qui reviennent des théâtres d’opération pourront livrer un témoignage unique des compétences françaises : l’innovation n’est pas 44 Repères qu’une affaire de technologie. Elle est aussi une histoire d’hommes. DOSSIER Pierre Bayle, directeur de la Délégation à l’information et à la communication de la Défense 46 Innovation : l’avenir des forces ARMÉES D’AUJOURD’HUI. Directeur de la publication : Pierre Bayle. Directeur de la rédaction : colonel (terre) Alban des Courtils. Chef du bureau de la rédaction : lieutenant-colonel (air) Bruno DÉTOURS CULTURE Cunat. Rédacteur en chef : lieutenant-colonel (terre) Philippe Dupas. Rédacteur en chef adjoint : commandant (terre) Xave Gaspard (01 44 42 48 01). Conception graphique : Daniel Kell. 60 Mathurin Méheut : Secrétaire générale de rédaction : Sybile Prenel. Secrétariat de rédaction : Juliette Démoutiez, guerre et mer Yves Le Guludec. Chef des reportages : adjudant (air) Lionel Gioda (53 52). Rédaction : capitaine (terre) Flora Cantin (33 18), Diane Chalmel (stagiaire), enseigne de vaisseau Grégoire Chaumeil (40 04), Paul Hessenbruch (55 05), Samantha Lille (47 27), Nelly Moussu (46 29), capitaine (air) Lætitia Perier (45 83), Loïc PERSPECTIVES Picard (stagiaire), aspirant (marine) Margaux Thuriot (48 11). Prestations extérieures : Hervé Drevillon, Jean- Claude Jaeger, Maya Kandel. Service photo : CC1 (terre) Jean-Jacques Chatard (46 98), sergent (air) Rémi Connan 64 Histoire (54 01). Service icono : Christophe Deyres (48 35), Carole Vennin (45 09). Chef de fabrication : Thierry Lepsch : 01 44 42 32 42. Photogravure : Open Graphic Media. Impression : Imaye Graphic. Routage : EDIACA. Dépôt KIOSQUE légal : février 2003. Dicod – École militaire – 1, place Joffre – 75007 Paris. N° ISSN : 0338 - 3520. Abonnement payant (ECPAD) : 01 49 60 52 44. routage-abonnement@ecpad.fr. Diffusion - abonnement gratuit : sergent-chef (air) Céline Butaud : 01 44 42 40 07. celine.butaud@dicod.defense.gouv.fr ; Contact publicité (ECPAD) : Christelle 66 Sélection Touzet : 01 49 60 58 56 / regie-publicitaire@ecpad.fr. Couverture : Démonstrateur Neuron - P. Stroppa©Dassault Aviation
FORCES EN ACTION D’un avion à l’autre Mirage, Alphajet, TBM 700… Seuls membres de l’armée de l’Air habilités à voler sur les différents appareils en service, les sept pilotes de l’escadron de convoyage de Châteaudun acheminent des avions de chasse ou de transport entre les unités de l’armée de l’Air, les ateliers industriels de l’aéronautique et les constructeurs… P A R S A M A N T H A L I L L E / P H O T O S : J E A N - J A C Q U E S C H A T A R D / D I C O D Un Alphajet de l’École de transformation opérationnelle de Cazaux et un Mirage 2000 récupéré à Mont-de-Marsan sont convoyés par les « chasseurs » à l’Atelier industriel de l’aéronautique de Clermont-Ferrand.
FORCES EN ACTION « Notre record de convoyage : huit avions pris en charge en 24 heures. » En bas : début de matinée, Châteaudun. Après le briefing météo, les pilotes montent à bord du TBM 700 modernisé, l’unique avion de l’escadron de convoyage. Ci-dessus : pour la première mission de la journée, le TBM 700 met le cap sur Cazaux. En bas à droite : midi. Un Mirage 2000 D vole vers l’atelier industriel de l’aéronautique de Clermont-Ferrand qui assure la maintenance opérationnelle d’aéronefs des trois armées. Ci-contre : milieu d’après-midi, Salon-de-Provence. Deux pilotes de l’unité s’apprêtent à prendre en charge un Alphajet de la Patrouille de France.
h 15. « Ce matin, un peu de brume 8 10 h 10. L’avion blanc s’envole pour Mont- sur la région. » Le briefing météo de-Marsan afin de récupérer un deuxième est rapide. Le ciel ne devrait pas aéronef. Il atterrit une demi-heure plus tard, être trop capricieux. Une bonne nou- déposant son deuxième pilote de chasse et velle pour les pilotes de l’escadron un des pilotes du TBM 700 qui s’installera en de convoyage 00.070 Châteaudun, implanté place arrière du Mirage 2000 D dans le rôle de sur la base du même nom en Eure-et-Loir. À « l’officier système d’armes ». Pour occuper ce leur manière, ils sont des spécialistes du Tour poste, il a suivi une formation qui lui permet de France. Mais tandis que certains changent notamment de gérer la centrale à inertie, c’est- de vélos, ces hommes parcourent le ciel fran- à-dire l’appareil principal de navigation. çais dans différents aéronefs. Ils appartiennent à une unité de 13 personnes, dont 7 pilotes 11 h 30. TBM 700 et Mirage décollent de la (4 « transporteurs » et 3 « chasseurs »), ratta- base landaise. chée à la Baac, la Brigade aérienne de l’aviation de chasse. Leur mission : assurer les mouve- 12 h 20. « Ce sera la piste 26. Vent du sud, 5 à ments des avions de chasse et TBM 700 entre 10 nœuds », annonce la radio dans le cockpit différentes entités : unités de l’armée de l’Air, du TBM 700. Celui-ci est en approche de l’AIA escadrons ou entrepôts, ateliers industriels de auvergnat, l’un des sites sur lequel s’appuie le l’aéronautique (AIA) ou constructeurs. Service industriel de l’aéronautique pour assu- rer la maintenance lourde des cellules et des 8 h 40. Le TBM 700 quitte le parking. Seul équipements des aéronefs des trois armées appareil appartenant à l’unité, cet avion blanc ainsi que leur modernisation et leur transforma- monomoteur modernisé compte quatre pilotes tion. Sur le tarmac, il retrouve le Mirage 2000 à son bord. Deux sont aux commandes, les et l’Alphajet, qui s’apprêtent à rentrer en grande deux autres profitent de leur bref statut de pas- visite de maintenance. sagers « Notre objectif est de réaliser dans la journée le maximum de convoyages d’aéronefs 13 h 45. Une fois la documentation déchargée, en minimisant le nombre de trajets du TBM 700. l’équipage de convoyage à nouveau au complet Notre record : huit avions pris en charge en quitte le sommet enneigé du Puy-de-Dôme, 24 heures. Aujourd’hui, nous en avons trois à direction Salon-de-Provence. Cet après-midi, aller chercher, c’est une journée bien remplie », les « chasseurs » vont convoyer un Alphajet aux confie le lieutenant-colonel Perret, commandant couleurs tricolores. La Patrouille de France doit l’escadron. Un homme à l’image de son unité : envoyer un de ses avions à l’AIA. polyvalent. Mirage 2000 D, Mirage 2000 C ou Alphajet de l’École de transformation opération- 15 h 10. À peine le temps de profiter de la dou- nelle (ETO), au fil de sa carrière, il a pu apprécier ceur du Sud que les deux appareils rejoignent les particularités de chacun de ces appareils et une nouvelle fois Clermont-Ferrand. passe de l’un à l’autre. « Dans l’armée de l’Air, nous sommes les seuls pilotes habilités à voler 16 h 25. L’escale est brève, le temps que sur plusieurs types de chasseurs. Nous ne les deux pilotes de chasse remontent à convoyons que des machines sans armement bord du TBM. « En moyenne, nous assu- et nous n’effectuons jamais de missions opéra- rons des convoyages d’avions trois fois par tionnelles. En revanche, nous pouvons jouer les semaine. Et lorsque notre emploi du temps plastrons lors d’entraînements. » est moins dense, nous pouvons transpor- ter des autorités », livre le capitaine Chain- 9 h 50. Après avoir survolé le bassin d’Arca- treuil, pilote du TBM 700. chon, l’aéronef atterrit à Cazaux. Le lieutenant- colonel enfile son pantalon anti-G puis s’ins- 17 h 15. L’avion de l’escadron rejoint le bercail. talle dans le cockpit d’un Alphajet de l’ETO Les quatre hommes auront parcouru 2 300 kilo- qu’il doit emmener en maintenance à l’AIA mètres dans la journée. En 2012, l’unité a effec- de Clermont-Ferrand. Pendant ce temps, les tué 310 convoyages totalisant 600 heures de pilotes du TBM 700 chargent la documenta- TBM 700, 150 heures de Mirage 2000, 120 d’Al- tion de référence de l’avion nécessaire pour phajet et 30 de Mirage F1. Et, depuis le début sa mise en service, soit 80 kilos de papiers. du mois de mars, l’escadron a ajouté un avion à « Chaque pièce d’un appareil est suivie », son parc, le Rafale ; un de leurs pilotes ayant précise le capitaine Pechabadens, pilote du obtenu sa qualification pour voler sur le fleuron TBM 700, en fixant les caisses. de l’aviation de chasse française. 7
FORCES EN ACTION R. CONNAN©DICOD Dans la peau d’u PA R M A R G A U X T H U R I O T / P H O T O S : J . - J . C H ATA R D – R . C O N N A N / D I C O D
un marin À Brest, durant une semaine, vingt-quatre jeunes bourguignons se sont frottés à la réalité de la Marine nationale dans le cadre de leur préparation militaire.
FORCES EN ACTION « On apprend à compter sur les autres, on développe notre esprit de cohésion et de discipline. » Ci-dessus : les stagiaires embarquent à bord d’un vieux gréement de 12 mètres, La Grande Hermine. Ci-contre : sur la base aéronautique navale de Lanvéoc-Poulmic, les apprentis marins découvrent les hélicoptères Alouette 3. En bas à gauche : dans la salle d’honneur du Centre d’instruction naval de Brest, un stagiaire teste des jumelles de navire. En bas à droite : véritable casse-tête pour les novices, l’apprentissage des nœuds marins.
« P MM rassemblée, à vos ordres com- gine pas tout de suite les forces de l’aviation mandant ! », annonce fièrement navale », témoignent les jeunes présents. Les Dylan, l’élève de jour. Malgré l’heure plus audacieux songent même à une carrière matinale, les 24 jeunes bourguignons de sous-marinier. Un autre groupe a embarqué sont motivés. Ils ne sont pas mili- sur La Grande Hermine, un vieux gréement de taires, mais leur rigueur au garde-à-vous n’a la Marine. Au retour à quai, les apprentis marins rien à envier à celle des « pros ». Durant une sont ravis d’avoir pu participer aux manœuvres semaine de vacances scolaires, à Brest, ils vont et… affamés après une longue matinée en mer. découvrir in situ le monde de la Marine natio- nale. Ici, grâce à des visites et des ateliers, ils Sauvetage en direct mettent en pratique ce qu’ils ont étudié depuis Au fil de leurs visites, les 24 jeunes sont octobre dernier. confrontés à de multiples aspects de l’activité À Dijon, cette année, ils sont une trentaine, de la Marine. Lorsqu’ils arrivent au Cross Cor- âgés de 16 à 23 ans, à suivre une préparation sen, le centre régional opérationnel de surveil- militaire marine (PMM). Dans toute la France, lance et de sauvetage, l’équipe est en train de près de 1 800 jeunes suivent un tel stage. coordonner une opération pour deux hommes Objectif : découvrir les armées à travers la à la mer au large de l’île de Bréhat. « Ils sont Marine. Le cycle de formation s’étale sur une allés très vite, on a suivi le feu de l’action et année scolaire, un samedi sur deux, et com- c’était impressionnant », témoigne un garçon. porte deux périodes bloquées, l’une à Brest, Ces jeunes ont opté pour la Marine, un choix l’autre à Toulon. À la fin du cycle dijonnais, un qui n’est pas le plus évident lorsque l’on vit en week-end de cohésion est également orga- Bourgogne. « J’ai assisté à une conférence nisé. Un samedi sur deux donc, Dylan, Chloé, qui s’est tenue dans mon lycée et cela m’a Lionel et les autres enfilent leur tenue de marin. donné envie de tenter l’aventure de la PMM », « Nous leur enseignons les fondamentaux du explique Chloé, 19 ans. Beaucoup apprennent monde militaire, les grades, les enjeux et les l’existence de ce stage de cette façon. moyens de la Défense, le matelotage, la naviga- D’autres, parce qu’un frère, une sœur ou un tion. Nous leur prodiguons une instruction géné- proche a suivi une telle formation. Pour tous, rale au tir et ils passent les épreuves de préven- un aspect particulier les a poussés à choisir la tion et secours civiques de niveau 1 », explique Marine : « Personnellement, la notion d’équi- le capitaine de corvette Christophe Vanhelst, page dans ce monde des marins m’a toujours réserviste, chef de centre de la PMM de Dijon. captivée », témoigne Margot. Au Centre d’instruction naval de Brest, qui Première expérience à la godille abrite l’École des mousses et l’École de mais- Dès les premières heures, le ton est donné. trance, la visite rend les participants rêveurs. Quelques stagiaires traversent la rade de Brest « Le cadre est magnifique, j’aimerais beaucoup pour rejoindre Lanvéoc. Au programme, visite pouvoir intégrer maistrance, mais je serai bien- de la base aéronavale, mais aussi, pour cer- tôt trop âgée pour y entrer », commente tains, une première expérience à la godille dans Jessica. Lionel, 16 ans, envisage quant à lui la marina de l’École navale. l’École des mousses. Car la PMM, même si Jessica, la doyenne de la promotion 2013 de la elle n’est pas un point de passage obligé pour PMM, est pompier volontaire. Entre ses acti- entrer dans l’active, constitue un excellent vités et son âge limite, il s’en est fallu de peu moyen d’acquérir des références concrètes sur pour qu’elle ne puisse passer ces quelques le milieu militaire et de valider une éventuelle jours à Brest. Elle exulte : « J’aime mon travail, vocation. Mais quels que soient les choix d’ave- mais je suis fascinée par la Marine, je suis vrai- nir de ces jeunes, la PMM leur offre une expé- ment très heureuse d’être ici. » rience qu’ils estiment enrichissante. « On Sur la base aéronautique navale (BAN) de apprend vraiment à compter sur les autres, on Lanvéoc-Poulmic, les participants semblent développe notre esprit de cohésion et de disci- impressionnés, un peu gauches dans cet uni- pline. On touche du doigt les valeurs pratiquées vers à la fois très réel et si loin de leur quoti- dans la Marine. Ça ne peut que nous aider pour PHOTOS : J.-J. CHATARD©DICOD dien. Après la visite du Centre d’entraînement à l’avenir », résume Chloé. En attendant de ren- la survie et au sauvetage en mer et des hangars trer à Dijon, où pour certains le bac approche, qui abritent les hélicoptères et les avions de la les jeunes stagiaires se fabriquent des souve- BAN, les langues se délient un peu. « Nous, nirs et évoquent cet univers qu’ils espèrent ce qu’on veut, c’est embarquer, être sur les rejoindre un jour. « Et marin, prend la barre, vire bateaux. Quand on pense à la Marine, on n’ima- au vent et largue les ris… » 11
FORCES EN ACTION David est Goliath Blessé par une mine en 2009, l’adjudant David Travadon s’est ensuite lancé avec passion dans la course à pied et le vélo. Multimédaillé en duathlon, il s’entraîne également au triathlon pour les Jeux paralympiques de 2016. J e ne regrette rien. Ni mon gration au régiment en septembre 2010, progression dans l’eau, ce qui est très « engagement, ni ma carrière en où il trouve un poste au bureau opération encourageant dans la perspective de compagnie de combat, ni mon instruction. « Je suis devenu responsable qualification pour Rio. » accident, ni même ma bles- de la formation des cadres, mais ma hié- Mais avant cela, quelques rendez-vous sure. Si c’était à recommencer, rarchie est assez souple et me laisse des intermédiaires attendent David. Le pre- je ferais les mêmes choix », assure l’adju- créneaux pour m’entraîner. Je me sens mier, le championnat de France de duath- dant David Travadon en retraçant les très soutenu par toute l’armée de Terre. » lon à Besançon, revêt une importance trente-cinq années de sa vie. Amateur de course à pied et de vélo avant particulière puisque le sportif est à la fois Durant seize ans, ce sapeur-démineur son accident, il se tourne naturellement investi dans l’organisation et participant. chevronné a bourlingué sur les théâtres vers le duathlon, qui combine ces deux Viendra ensuite la 2e édition des Ren- d’opérations avant qu’un accident ne disciplines. Et, dès 2012, il rafle le titre de contres militaires blessures et sports. Un donne à sa vie une nouvelle orientation. vice-champion du monde ; en 2013, celui rendez-vous également très symbolique, En novembre 2009, lors d’une mission de de champion d’Europe. Il impressionne car il s’agit de « mon autre famille, glisse- déminage avec sa compagnie du 13e régi- ses pairs. « David possède une force de t-il. Tous les participants sont très liés les ment du génie (13e RG) à la frontière caractère très au-dessus de la moyenne uns aux autres. Collectivement, on arrive israélo-libanaise, il perd son avant-bras et il est extrêmement talentueux », à se tirer vers le haut. C’est très positif ». droit et est lourdement touché à la tête. résume Fabien Lacan, son entraîneur de Puis, cet été, direction le Canada pour les « Si je suis encore en vie, c’est grâce à course à pied et de cyclisme. championnats du monde de duathlon, où mes camarades qui m’ont tout de suite David décide aussi de concourir en il espère prendre sa revanche sur l’Autri- prodigué les premiers soins », explique-t- triathlon. À Auckland, il se classe 6e au chien qui l’a battu l’année dernière. il. Évacué vers l’hôpital militaire Percy, un nouveau combat débute pour lui : retrou- ver une aptitude physique. En parallèle de « David possède une force de caractère très au-dessus sa reconstruction, un défi le porte : faire une carrière de haut niveau en handis- de la moyenne et il est extrêmement talentueux. » port. « J’ai tout de suite su que mon salut viendrait par le sport. Je suis Breton, donc championnat du monde de 2012. Un « ll devrait être assez surpris de ma pro- un peu têtu, et j’aime la compétition. Je choix de discipline qui n’est pas anodin : gression. Je suis meilleur cette année », veux toujours donner le meilleur de moi- elle est inscrite aux Jeux paralympiques estime l’adjudant. Mais l’ambition de même. » Dans sa chambre de Percy, de Rio de Janeiro en 2016. « J’aurai David ne se cantonne pas à la compéti- comme leitmotiv, il inscrit sur un tableau : 38 ans, la concurrence sera rude, mais tion : en tant que porte-fanion de Terre « La douleur est passagère, l’abandon est tout reste ouvert pour que je puisse être Fraternité, l’association d’assistance aux irrévocable. » Le ton est donné. sélectionné. » Depuis six mois, chaque soldats blessés, il a endossé un rôle de Après six mois d’hospitalisation et une mercredi, il nage ainsi avec Dimitri Huard, « grand frère » pour ses jeunes cama- dizaine d’opérations chirurgicales qui lui l’entraîneur du club de Besançon. « On rades blessés au combat. « Je leur donne permettent de retrouver la vue, il rentre mène un travail un peu spécifique compte des conseils pour gérer leurs nouvelles chez lui, à Besançon. Dès le lendemain tenu de son handicap, mais il nage aussi vies. J’ai été tellement bien entouré que matin, le voilà déjà sur la piste, prêt à avec les valides. Pour moi, David est j’estime normal d’aider les autres dès que courir. Son épouse, Solène, lui lace pour avant tout un sportif de haut niveau, je le je le peux. » Grand frère donc, il deviendra la première fois ses chaussures. « Elle prépare en conséquence. » aussi papa cet été et espère pouvoir ©PHILIPPE LANG a été incroyablement forte durant cette Avec un avant-bras en moins, il lui emmener son enfant et sa femme à Rio période. C’est aussi grâce à elle que je a fallu réapprendre l’équilibre, la flottai- en 2016. Le rendez-vous est pris. progresse si vite. » Puis vient la réinté- son. « Il a encore une bonne marge de Paul Hessenbruch 12 ARMÉES D’AUJOURD’HUI • NUMÉRO 381 • JUIN 2013
> rencontre Vice-champion du monde de duathlon en 2012, champion d’Europe en 2013, David participera cet été aux championnats du monde qui auront lieu au Canada.
FORCES EN ACTION PORTFOLIO 1 2 14 ARMÉES D’AUJOURD’HUI • NUMÉRO 381 • JUIN 2013
> instantanés 1 – États-Unis Une jeune femme du corps des Marines travaille le déplacement tactique 3 lors d’un entraînement au camp E. ABRAMOVITCH©AFP IMAGEFORUM Lejeune, Caroline du Nord. 2 – SNLE Un sous- marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) retrouve S. OLSON©AFP IMAGEFORUM la base de l’île Longue après une patrouille. 3 – Colombie Défilé de 4 soldats D. KOSTYUKOV©AFP IMAGEFORUM colombiens s’apprêtant à rejoindre la Force multi- nationale d’observa- teurs au Sinaï. 4 – Rafale Un avion Rafale fait son show lors du salon de l’air et de l’espace de Moscou. 5 – Afghanistan 5 Un soldat A. MONOT©MARINE NATIONALE afghan vérifie M. KIRAN©AFP IMAGEFORUM l’âme d’un canon 122 D30 pendant un entretien. 15
FORCES EN ACTION PAYS BALTES 09/05 11/05 MALI RÉARTICULATION DE SERVAL PREMIERS arallèlement à la DESSERREMENTS P montée en puissance des forces africaines au Mali, le désengagement FRANÇAIS D éployé sous mandat de l’Otan dans les français se poursuit. Sur le terrain, les équipes se pays baltes depuis fin relayent. La 3e brigade avril dans le cadre de mécanisée a quitté le théâtre l’opération Baltic 2013, des opérations, relevée le détachement aérien par la 6e brigade légère français a effectué ses blindée, basée à Nîmes. premières missions Le général Barrera a transféré de desserrement début le commandement de la mai. Il s’agit pour brigade Serval, implantée les pilotes français sur la base opérationnelle de Gao, au général Kolodziej. La réarticulation complète d’infanterie, d’autres unités Des actions d’assistance à du dispositif Serval a de la brigade et de la la population ont également été effectuée au cours douzaine d’hélicoptères du été menées, notamment du mois de mai autour groupement aéromobile. à Tassiga, dans l’est du d’un seul groupement Parallèlement, les opérations pays : un pont préfabriqué tactique interarmes, au françaises de patrouille portatif a été installé sur lieu de trois au plus fort et de reconnaissance se l’axe routier reliant le Niger ©ARMÉE DE TERRE – L. BERNARD©ARMÉE DE L’AIR – SCH LECLERE©ARMÉE DE L’AIR – J. BARDENET©ARMÉE DE TERRE – S. DESCHAMPS©MARINE NATIONALE des opérations. Implanté à prolongent et ont permis au Nord-Mali, permettant Gao avec l’état-major, il se ce mois-ci la découverte et ainsi le rétablissement de la compose principalement la destruction d’importants circulation et des échanges du 2e régiment étranger stocks de munitions. commerciaux. 15-17/05 TCHAD EXERCICE DE TIR POUR ÉPERVIER de repérer leurs zones aérien de la force Épervier de vol et les différents ont pu s’exercer au combat. aéroports en capacité Outre l’entraînement à la de les recevoir. C’est coordination interarmées, ainsi que deux équipages cette manœuvre a de Mirage F1 CR permis à une section du accompagnés d’une 110e régiment d’infanterie dizaine d’hommes du et à la batterie du Service des essences 8e régiment d’artillerie de des armées ont réalisé travailler la complémentarité un état des lieux des armes légères et des de l’aéroport de Kaunas, mortiers de 120 mm. en Lituanie. Les 950 militaires engagés Affecté à la base de en permanence au Tchad Šiauliai, au centre ont pour mission d’apporter du pays, pour une un soutien logistique durée de quatre mois, et un appui renseignement le détachement de fin de maintenir la sur le champ de tir de A capacité opérationnelle des forces françaises Tchigchika, à proximité de la frontière avec le aux forces armées et de sécurité tchadiennes, 90 militaires effectuera des missions de police du ciel et d’assistance mais aussi de protéger stationnées au Tchad, Soudan. Pendant trois les intérêts français dans l’espace aérien un exercice grandeur jours, les militaires des et d’assurer la sécurité de la Lituanie, de la nature a été effectué groupements terrestre et de nos ressortissants. Lettonie et de l’Estonie. 16 ARMÉES D’AUJOURD’HUI • NUMÉRO 381 • JUIN 2013
> Les opérations en bref LOÏC PICARD GUYANE 14-23/05 29/05 AFGHANISTAN NOUVEAUX DÉPARTS OPÉRATION MORPHO de l’armée et de la police RÉUSSIE afghanes est arrivée au n groupe de légionnaires terme de sa mission. U des Forces armées en Guyane appartenant Dernièrement, le groupement de transport opérationnel, au 3e régiment étranger basé à Douchanbé, au d’infanterie ainsi que des Tadjikistan, a quitté le gendarmes ont conduit théâtre des opérations après l’opération Morpho sur le 10 800 missions et près de site aurifère de Pédral, dans 22 000 heures de vol. la région de Saint-Élie, à Fin mai, avec la dissolution 100 kilomètres au sud-ouest du bataillon logistique de Kourou. Elle avait pour transformé en détachement objectif le démantèlement multifonctions, 930 militaires du site d’orpaillage illégal. Du restaient engagés. Ils ont matériel lourd d’extraction, pour tâche de poursuivre le de l’armement, des moyens désengagement logistique, la de transport rapides et de formation de l’armée afghane communication ont été e désengagement des d’État-Major des armées. et l’appui médical. L’essentiel saisis. La Société minière de Saint-Élie, opérateur légal devrait récupérer une partie L forces françaises se poursuit sur le sol afghan, conformément au calendrier Au cours du mois d’avril, la plus grande partie du détachement français de des forces françaises se trouve désormais regroupé sur l’aéroport international de la zone d’exploitation. mis en place par le chef formation des officiers de Kaboul. 12/05FRANCE LE SERVICE DE SANTÉ 23/05 FRANCE SAUVETAGE EN MER DES ARMÉES CONTRE LE CORONAVIRUS lors qu’une douzaine présents sur la zone et ans le cadre de la crise en place par l’Institut de veille A de bâtiments et leurs moyens héliportés, D sanitaire déclenchée par la contamination au coronavirus sanitaire. Celle-ci est chargée de contacter quotidiennement aéronefs de la force navale franco-allemande ainsi que plusieurs unités civiles de sauvetage en mer. participaient à l’exercice Après une heure et demie de plusieurs personnes les 200 personnes ayant été de lutte anti-sous-marine de recherches, la frégate dans le nord de la France, le potentiellement en rapport Spontex au large des côtes allemande Bremen a repéré médecin principal Bédubourg, avec le virus afin de détecter finistériennes, le Centre le naufragé et a envoyé épidémiologiste du SSA, a l’apparition éventuelle de régional opérationnel une embarcation pour rejoint la cellule de crise mise symptômes. de surveillance et de le récupérer. Une équipe sauvetage (Cross) du Service de santé des de Corsen a été averti armées a été hélitreuillée 14/05OCÉAN INDIEN FIN DE MISSION POUR qu’un plaisancier à bord du bâtiment afin LE TONNERRE ET LE GEORGES LEYGUES britannique était tombé de prendre en charge à la mer au large de l’Île le rescapé en hypothermie près plus d’un mois de l’Afrique et dans l’espace A de mer, le bâtiment de projection et de maritime des Seychelles où ils ont notamment recueilli d’Ouessant. Le Cross a mobilisé tous les navires et de le transporter à l’hôpital de Brest. commandement Tonnerre d’importantes informations et la frégate anti-sous- sur les activités de marine Georges Leygues piraterie au large des côtes ont achevé leur participation somaliennes. La frégate à l’opération européenne de surveillance Nivôse et la Atalante chargée de la lutte frégate de type La Fayette contre la piraterie au large Guépratte poursuivent des côtes est-africaines. la mission, appuyées par Les bâtiments français ont un avion de surveillance patrouillé le long de la Corne maritime Falcon 50. PLUS D’INFOS SUR : WWW.DEFENSE.GOUV.FR/EMA 17
ENJEUX POINT DE VUE Maya Kandel, chargée d’études à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (Irsem) Stratégie américaine en Afrique, une présence discrète mais qui s’affirme L ’Afrique subsaharienne est long- quelques petits avions de tourisme truf- programme américain IMET (Internatio- temps restée absente, ou bonne fés d’électronique. Ces nouveaux avant- nal Military Education and Training) forme dernière, des priorités stratégiques postes de la présence américaine globale les militaires des pays partenaires dans américaines. Il faut attendre les ont été baptisés lily-pads, – nénuphars –, les académies américaines : le Mali en attentats de 1998 contre les am- par le Pentagone. Un doux nom qui en dit a bénéficié, y compris l’auteur du coup bassades américaines au Kenya et en long si l’on songe que l’on trouve toujours d’État de l’an passé, le capitaine Amadou Tanzanie, puis surtout les attentats du les nénuphars en grand nombre et qu’ils Sanogo, fait abondamment commenté 11 septembre 2001 aux États-Unis, pour finissent par tout recouvrir. dans les médias. voir l’Afrique figurer parmi les intérêts La mission principale du Pentagone en Washington est l’un des plus impor- américains en devenant un front de la Afrique est la lutte contre les groupes ter- tants donateurs d’aide bilatérale au « guerre globale contre la terreur ». Cette roristes islamistes de la Corne de l’Afrique Mali, notamment (mais pas seulement) évolution est entérinée en 2007 avec la (Somalie) et de la péninsule arabique militaire, assistance interrompue depuis création d’un commandement militaire (Yémen), à travers deux types d’actions : le putsch de mars 2012 en vertu d’une pour l’Afrique, Africom, pour la première formation et entraînement des forces loi du Congrès (247 millions de dollars fois dans l’histoire américaine. africaines locales et actions directes d’assistance bilatérale américaine au Le positionnement militaire américain en des forces américaines par l’emploi des Mali suspendus, 119 millions d’aide Afrique repose sur la coopération avec les drones armés et des forces spéciales. humanitaire versés). Officiellement, pays partenaires (la quasi-totalité des États Le Sahel est également un enjeu depuis toute assistance militaire américaine africains), à travers des à Bamako a cessé programmes régionaux depuis. Mais, pen- et des accords bilaté- dant l’été 2012, un raux. L’objectif principal accident sur le fleuve est d’aider les armées Niger a provoqué la locales à développer mort de trois mili- leurs capacités. Les taires américains au effectifs américains profil très « forces MANDEL NGAN©AFP IMAGEFORUM déployés en Afrique spéciales » et dont représentent environ la présence au Mali 5 000 hommes, avec n’a pas réellement des variations en fonc- été expliquée par tion des opérations Washington. Toujours en cours. L’essentiel pendant l’été, une de ces moyens est frappe – peut-être déployé à Djibouti Passation de pouvoir à l’Africom en 2011. Créé en 2007, le Commandement des États-Unis pour de drones – aurait au Camp Lemonnier l’Afrique coordonne toutes les activités militaires et sécuritaires américaines sur ce continent. provoqué la mort de (2 500 hommes), éga- plusieurs djihadistes lement la principale dans le nord du pays. base de drones américains (une autre a 2002 : le Trans-Sahara Counterterrorism Une réunion secrète a d’ailleurs eu lieu été installée récemment aux Seychelles). Partnership, sous la bannière de l’opéra- à la Maison-Blanche à l’automne 2012 Mais le continent africain est également tion Enduring Freedom, vise à combattre pour envisager des frappes contre Aqmi parsemé de « mini-bases » que l’on et défaire les organisations terroristes au Nord-Mali, alors qu’au même moment retrouve dans un grand nombre d’États opérant au Maghreb et au Sahel, en Susan Rice qualifiait de « foutaises » les africains, en particulier dans la zone qui partenariat avec une dizaine de pays de propositions françaises pour le Mali à va du golfe de Guinée à la Corne de la région (Mali, Tchad, Niger, Mauritanie, l’ONU. l’Afrique. Emblématiques du change- Algérie, Burkina Faso, Maroc, Nigeria, Au début de l’opération Serval (François ment d’époque, d’adversaire et de conflit Sénégal, Tunisie), pour un budget annuel Hollande a informé Barack Obama la que nous vivons actuellement, elles se d’environ 100 millions de dollars ; le Mali veille du début des opérations), le sou- résument le plus souvent à un hangar constituait jusqu’en 2012 une pièce maî- tien américain a d’abord été qualifié de quelconque, une poignée de soldats et tresse de ce dispositif. Par ailleurs, le « minimal » des deux côtés. Certes, le 18 ARMÉES D’AUJOURD’HUI • NUMÉRO 381 • JUIN 2013
> rencontre PABLO MARTINEZ MONSIVAIS©AFP IMAGEFORUM Décembre 2011, Leon Panetta, alors secrétaire américain à la Défense, s’adresse au personnel militaire au Camp Lemonnier, à Djibouti. L’essentiel des moyens américains, dont 2 500 hommes, y est déployé depuis 2002 de façon permanente. secrétaire à la Défense d’alors, Leon l’Amérique dans un nouveau conflit, ditions se sont multipliées au Congrès Panetta, a fermement déclaré dès le alors que le retrait d’Afghanistan est à sur les questions de sécurité africaine. début de l’opération française qu’il était peine engagé (plus de 60 000 soldats L’ex-secrétaire d’État Hillary Clinton a « de la responsabilité américaine de américains sont encore sur place) et ainsi déclaré aux sénateurs américains soutenir la France dans sa lutte contre que le président a déclaré avec force, qu’il « devenait nécessaire d’accorder les islamistes ». Et au Congrès, plu- lors de son discours d’inauguration en beaucoup plus d’attention à Africom et sieurs voix, notamment républicaines janvier 2013, « qu’une décennie de aux capacités en Afrique ». et non des moindres (en l’occurrence guerre allait prendre fin ». Il est évident que Français et Américains les présidents des puissantes commis- La non-visite de Panetta a été compen- ont des objectifs communs au Mali et au sions du renseignement et des affaires sée par la venue du vice-président Joe Sahel. Derrière le flottement initial, il faut étrangères), se sont élevées pour ap- Biden, venu le 3 février à Paris féliciter surtout voir le souci américain de ne pas peler à un sou- apparaître comme tien plus ferme un « cobelligé- de la France et rant » dans le condamner l’atti- Leon Panetta : « Il est de la responsabilité américaine conflit malien. Le tude jugée trop soutien des États- timorée de la pré- de soutenir la France dans sa lutte contre les islamistes. » Unis à la France sidence. Mais le n’en est pas moins frein est venu de conséquent, en la Maison-Blanche avec, en particulier, le président Hollande pour son « action particulier dans le domaine du renseigne- l’absence de Panetta à Paris en jan- décisive » au Mali, et réaffirmer le ment. Les Américains étant avant tout vier, alors même qu’il était en tournée soutien de Washington à l’opération des gens très pragmatiques, ils cherchent en Europe, de peur que ce passage ne Serval (ravitailleurs, carburant, avions maintenant à juger de l’efficacité de la soit interprété comme un soutien amé- espions, renseignement). Depuis, le « French way of war » combinée à leur ricain trop appuyé à la France. Au-delà nouveau secrétaire d’État, John Kerry, propre préférence actuelle pour une ap- de l’argument légal mis en avant par le s’est également rendu deux fois à Paris proche indirecte, minimisant la présence département d’État (en raison du gou- pour évoquer, entre autres sujets, la américaine sur place, dans une crise qui vernement non légitime à Bamako car question du Mali. Entre-temps aussi, la les concerne aussi. En ce sens, le conflit issu d’un coup d’État), la réticence amé- prise d’otages d’In Amenas en Algérie malien ouvre de nouvelles voies de coo- ricaine est celle du président Obama, a conduit à une réévaluation de la me- pération franco-américaine. qui n’entend pas engager militairement nace d’Aqmi outre-Atlantique, et les au- Les propos de cette rubrique n’engagent que leur auteur PLUS D’INFOS SUR : WWW.IRSEM.GOUV.FR 19
MODERNISATION Le point sur les fonds de prévoyance du ministère Le Conseil supérieur de la fonction militaire, qui se réunit à la fin du mois glementation a en outre élargi le champ des bénéficiaires de juin en session plénière, mène une réflexion sur les fonds de prévoyance d’allocations, renforcé la liste militaire et de l’aéronautique. Retour sur les dispositifs existants. des risques opérationnels, re- valorisé les prestations et baissé les taux de cotisation. L e fonds de prévoyance relation avec le service, béné- des ressources humaines et Ainsi, depuis 2008, le montant militaire (FPM) et le ficient d’allocations des fonds de la solde de Nancy. Après des indemnisations a presque fonds de prévoyance selon trois niveaux. En pre- vérification, ce dernier adres- doublé, passant de 12 mil- de l’aéronautique (FPA) mier lieu, les indemnisations sera le dossier à la Caisse lions d’euros à 22,5 millions permettent de cou- pour les risques spécifiques des dépôts et consignations d’euros en 2012. Enfin, le vrir les risques d’invalidité au métier de militaire et pour de Bordeaux qui instruira la souci de qualité du service ou de décès imputables ou les risques aériens entraînant demande et la présentera si rendu a permis de raccourcir en liaison avec le service, en le décès ou l’invalidité avec besoin aux commissions des le délai de traitement des de- complément d’autres aides mise à la retraite ou réforme fonds de prévoyance pour mandes d’indemnisation qui apportées par le ministère, mais également de favoriser l’investissement locatif et de faciliter l’accession à la pro- priété des militaires. Ils sont alimentés par les produits financiers générés par les pla- cements des réserves finan- cières et par des cotisations obligatoires prélevées sur la L. VAN LIESHOUT©AFP IMAGEFORUM rémunération des personnels essentiellement militaires (en- viron 320 000 affiliés cotisent au FPM ; 21 000 au FPA). Afin de protéger ces fonds publics, l’Établissement public des fonds de prévoyance militaire et de l’aéronautique (EPFP) a été créé en 2007. Depuis 2008, le montant des indemnisations a presque doublé, passant de 12 millions à 22,5 millions d’euros. À ce titre, il est le véritable gestionnaire des moyens de financement de ces allocations définitive. Le second niveau proposition d’indemnisation. est passé de 6 à 2 ou 3 mois et participe à la politique du est celui des indemnisations La décision d’attribution en moyenne. Une réflexion logement des militaires. Ces pour événements imputables relève en dernier ressort de est en cours, objet d’un avis fonds s’élèvent aujourd’hui à au service générant les l’EPFP. du Conseil supérieur de la 852 millions d’euros qui com- mêmes conséquences. En- fonction militaire qui sera pré- prennent entre autres une fin, il existe des indemnisa- Où en est-on aujourd’hui ? senté au ministre lors de la réserve de précaution, des tions pour les accidents en Depuis 2007, dans un contexte session plénière de fin juin, et réserves financières mais relation avec le service. de croissance financière pour pourrait conduire notamment aussi des moyens réservés au En cas d’accident, il convient l’établissement, la part consa- à une revalorisation des in- volet logement. d’effectuer une demande crée au volet logement a été demnisations, à des aides aux d’indemnisation auprès du renforcée : plus de 7 000 prêts blessés, à des secours élargis Quelles sont les aides et qui commandant de formation d’accession à la propriété ont et éventuellement à d’autres concernent-elles ? administrative. Il transmettra été financés et un investisse- actions qui seront définies Les cotisants, victimes d’un le dossier au bureau d’aide ment a été effectué dans dans les prochains mois. accident en service ou en aux familles du Centre expert 600 logements locatifs. La ré- La rédaction PLUS D’INFOS SUR : HTTP://bit.ly/12YwtYE
G. CHAUMEIL©DICOD FOCUS DEFENSE LE DÉSENGAGEMENT EN ORD La France a entamé son retrait et passe le relais aux soldats de et de la rigueur du climat. Après trois mois, les corps sont fati- la Mission internationale de soutien au Mali. Ce départ se fait de gués et les esprits réclament manière progressive et en fonction de la situation sur le terrain. du repos. Bientôt nous serons auprès de nos familles », livre Jérôme. Comme lui, de nom- S ur le tarmac de l’aéroport de Bamako, Jérôme S. breux engagés au Mali quittent progressivement le terri- attend, les traits tirés. Dans quelques heures, toire. Au plus fort de l’opération Serval, les effectifs fran- ce jeune lieutenant et les vingt-neuf soldats çais approchaient les 4 500 hommes. de sa section de combat du 6e régiment du Le chef des armées, François Hollande, a fixé pour objectif génie vont prendre l’avion qui les ramènera en de ramener ce contingent à 2 000 soldats à la fin de l’été France. Ces militaires ont investi le sanctuaire des ter- et à un millier d’ici la fin de l’année, déclarant au mois roristes de l’Adrar des Ifoghas. « Les conditions étaient d’avril : « Dès lors que nous avons libéré l’ensemble du rudes compte tenu du caractère nomade de la mission territoire, sécurisé la totalité des villes, nous n’avons plus 22 ARMÉES D’AUJOURD’HUI • NUMÉRO 381 • JUIN 2013
MALI françaises ont entamé leur retrait partiel. Les premiers allégements du dispositif militaire ont commencé seule- Aéroport de ment trois mois après la projection initiale des hommes, Bamako. Un Puma du groupement en janvier. Conformément au calendrier annoncé, une cen- aéromobile de Gao taine de soldats du 1er régiment de chasseurs parachu- est chargé à bord tistes a retrouvé la région toulousaine le 11 avril, donnant d’un Antonov 124. le coup d’envoi du retrait progressif. Quelques jours plus tard, le reste du groupement tactique interarmes (GTIA) TAP (troupes aéroportées), quelque 500 personnes, quit- « La fréquence tait le Mali à son tour. Peu après, un autre GTIA, com- des départs posé essentiellement des 1er et 2e régiments d’infanterie est presque de marine, a pris le départ. Dans le même temps, le aussi élevée parc des avions de chasse que lors a lui aussi été réduit de cinq appareils, puis le groupement de la projection aéromobile s’est séparé de six hélicoptères. Enfin, cou- des troupes rant juin, le GTIA 2, articulé autour du 92e régiment d’in- en janvier. » fanterie, doit être relevé. Un rythme qui ne laisse que peu de répit au bataillon logistique, chargé de la mise en œuvre des opérations de désengagement. « La fréquence des départs est presque aussi élevée que lors de la projection des troupes en jan- vier, constate son commandant, le colonel Jean-Louis Velut. Et ces manœuvres exigent une planification et une coordination sans faille. » RE DE MARCHE Il faut compter trois semaines à un mois pour le désengage- ment des effectifs du volume d’un bataillon. Un délai natu- rellement lié aux moyens d’acheminement stratégiques. Pour le lieutenant-colonel Jean-Michel Meunier, du grou- pement de soutien interarmées de théâtre à Bamako, « le désengagement doit être orchestré comme une partition de à avoir la même présence ». Le chef de l’État annonçait musique avec un véritable tempo qui prend en compte les ainsi un retrait « progressif » et « en fonction de la situa- distances à effectuer et les vecteurs de transports ». Dans tion ». Sur le terrain, les forces de Serval passent déjà le un premier temps, hommes, véhicules et matériels venus relais de certaines positions du nord du pays aux soldats de tout le pays transitent par Bamako. Ensuite, les hommes de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma), sont pris en charge par l’escadron de transport Esterel de sous conduite africaine. Mais tout en continuant le désen- l’armée de l’Air. Les matériels, individuels et collectifs, sont gagement de ses troupes, l’armée française poursuit placés en conteneurs et transportés par voie ferrée jusqu’à ses opérations aériennes et terrestres de sécurisation et Dakar tandis que les véhicules sont regroupés en convois de recherche des derniers éléments terroristes, dans la et escortés jusqu’à Abidjan. Le capitaine Laetitia B., du 121e région de Gao notamment. Car la France veut s’assurer régiment du train, détaille : « Il faut compter trois jours et que le terrorisme ne ressurgira pas au Mali. 1 400 kilomètres de pistes pour rallier la Côte-d’Ivoire. Une Les objectifs de l’opération Serval atteints avec la libéra- fois à Abidjan, il est nécessaire de remettre en condition tion des principales villes du Nord-Mali et une opération le matériel et de prendre les mesures d’hygiène indispen- de maintien de la paix décidée par l’ONU, les troupes sables au transit maritime. » 23
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