CAMEROUN INVESTIR AU - Investir au Cameroun
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INVESTIR AU GRANDS CHANTIERS Décembre 2014/Janvier 2015 - N° 32-33 AGRICULTURE CAMEROUN ENERGIE MINES INDUSTRIE SERVICES FINANCE AGRICULTURE Cap sur la transformation Promote 2014 : Claude Altermatt : « Le 1000 exposants Cameroun dispose d’une 31 pays stabilité politique mais 150 000 visiteurs aussi macro-économique »
Yasmine Bahri-Domon, directrice de la publication 2015, l’année des défis économiques au Cameroun L es pages du calendrier se referment Partout, le Cameroun bouge, signe évident sur l’année 2014 dans un contexte très de sa vitalité dans la mise en œuvre des pro- particulier pour le Cameroun. Le pays jets structurants. 2014 a permis au Cameroun a commémoré le Cinquantenaire de la de sortir de la léthargie de 4,8% de croissance Réunification au pied du Mont-Cameroun, à économique observée fin 2013, pour projeter Buea, tout en se fixant le défi de rester un Etat une hausse indicielle de plus de 6% en 2015. fort, uni et souverain. On l’aura compris, 2015 sera l’année de l’accélé- Au plan économique, le Cameroun, en 2014, a ration de la croissance si le pays veut respecter été une destination prisée par les investisseurs le rendez-vous de l’émergence en 2035. C’est étrangers qui gardent confiance dans ce pays au le sens du Conseil ministériel présidé le 9 dé- sous-sol riche et en friche, une nation au po- cembre 2014 par le chef de l’Etat. Son objectif : tentiel humain qualifié, un patronat actif et dy- mettre en place un plan d’urgence pour boos- namique, des opérateurs économiques proac- ter la croissance. Or, qui dit appel à la crois- tifs et ouverts… Le Cameroun a offert mille sance dit mobilisation du secteur privé et un opportunités aux investissements au cours de clin d’œil aux investisseurs étrangers à partici- l’année qui fuit sans se retourner. Comment per à la relance économique du havre de paix saurait-il en être autrement ? Le climat des et de stabilité qu’est le Cameroun. 2015 sera affaires simplifié est propice aux investisse- une année charnière et déterminante pour le ments. Le pays est en chantier du nord au sud et boom économique du pays. Le plan d’urgence de l’est à l’ouest, partout les grues sont en rota- pour la croissance va intégrer les ressources tion, des pelleteuses creusent, des bétonneuses issues de l’emprunt obligataire de 150 mil- broient la pierre, tournent le ciment, tandis que liards FCFA que vient de lancer le gouverne- les édifices sortent progressivement de terre ment, et renforcer le budget 2015 qui s’équilibre à Lom Pangar, Memeve’ele et Mekin pour en recettes et en dépenses à 3746,6 milliards ce qui concerne la construction simultanée des FCFA, contre 3312 milliards FCFA en 2014. La barrages hydroélectriques. Douala aussi est en relance économique d’urgence attend les inves- chantier avec les travaux du deuxième pont sur tisseurs… Welcome to Cameroon ! En attendant le Wouri. Mballam est en mouvement avec le de vous retrouver en février 2015, nous vous début effectif du chantier du fer, le port en eaux souhaitons de bonnes fêtes de fin d’année et une profondes de Kribi est quasi opérationnel… bonne année 2015 ! INVESTIR AU CAMEROUN Editeur Opérateur almassimb@yahoo.fr Mediamania Sàrl Médiamania Sàrl Tel : 00 237 94 66 94 59 ou 6, rue du Léman www.mediamania.pro 00 237 77 75 13 98 1201Genève - Suisse Maquette : Jérémie FLAUX, Directrice de la publication Réalisation web : Christian ZANARDI, Impression Yasmine BAHRI-DOMON Corrections : Xavier MICHEL Rotimpres, Aiguaviva, Espagne Distribution Cameroun Rédaction Régie publicitaire Albert MASSIMB Beaugas-Orain DJOYUM, Ayissi LE BEAU, regiepub@investiraucameroun.com almassimb@yahoo.fr Mamadou CISSÉ, Muriel EDJO, Au Cameroun Tel : 00 237 94 66 94 59 ou Brice R. MBODIAM. Albert MASSIMB 00 237 77 75 13 98 Gratuit – Ne peut être vendu info@investiraucameroun.com - www.investiraucameroun.com Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -3-
AU SOMMAIRE 08 • A ccords de partenariat économique : 26 • L e printemps de la transformation des toujours des avis bien partagés produits agricoles locaux 09 • D ieudonné Essomba : « La question de la 28 • E n rupture avec Justin Sugar Mills, le compétitivité n’est pas le vrai problème » Cameroun recherche un investisseur privé 10 • B abissakana : « La signature des APE entre pour le projet de complexe sucrier de le Cameroun et l’UE n’est pas viable » Batouri 11 • F lorent Etoundi Ayissi : « Les APE bien 30 • 5 0 milliards FCFA de la Banque mondiale négociés seront un stimulant pour pour produire des matières premières l’économie camerounaise » destinées aux agro-industriels 32 • N estlé ambitionne de réduire ses importations de matières premières de 70% 32 • D u Nescafé produit à base de café camerounais 12 • C laude Altermatt : « Inutile de rappeler 33 • G uinness injecte 3 milliards FCFA dans que le Cameroun dispose d’une stabilité un projet de production du sorgho politique, mais aussi macroéconomique » 33 • U n montage public-privé pour 16 • C &K Mining cède ses actifs sur le diamant approvisionner Guinness Cameroon de Mobilong à un investisseur sino- en maïs, sorgho et manioc américain 34 • Q uatre nouvelles usines pour augmenter 18 • D avid Koechlin : « La direction de la de 20 000 tonnes la production d’huile Douane a trouvé notre offre super de palme intéressante » 34 • L e Cameroun inaugure une usine 20 • P romote 2014, le Salon de l’entreprise, s’est de transformation de 18 000 tonnes ouvert le 6 décembre à Yaoundé avec plus de soja par an de 1000 exposants 35 • 4 000 ha de manioc à planter pour 20 • L es PME en vitrine grâce au soutien des approvisionner la Sotramas, qui grandes entreprises et institutions spécialisées transformera 120 tonnes par jour 22 • C hristophe Eken, président de la Chambre 35 • L a Sodecoton veut accroître de 50% ses de commerce : « Promote est devenu une capacités de production des huiles de table référence régionale et internationale » 36 • S ic-Cacaos portera ses capacités de 22 • A lain Blaise Batongué, secrétaire exécutif transformation du cacao à 50 000 tonnes du Groupement inter-patronal du Cameroun (GICAM) : « Promote, 36 • U ne 3ème usine de transformation de cacao une occasion formidable de braquer les sera opérationnelle à Douala en 2015 projecteurs sur l’entreprise » 37 • U ne unité de 4,6 milliards FCFA pour 23 • J ean-Paul Bacquet : « Nos priorités, ce sont transformer 5000 tonnes de cacao par an les infrastructures » à Mbalmayo 24 • B owleven compte sur l’amodiation 38 • P aul Biya : « J’attends que le sérieux prévale d’Etindé pour financer ses projets africains lors de l’attribution des contrats aux entreprises » -4- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
48 • 2 06 391 tonnes de bananes exportées 40 • N icolas Crettenand : « Aujourd’hui, nous au 31 octobre 2014 avons des locaux et deux premiers projets 49 • L es prix bord champ du cacao atteignent lancés » un niveau record, en hausse de 30% 42 • L a CEEAC ouvre son marché de 49 • L e Cameroun a exporté 44 085 tonnes 140 millions de consommateurs à treize de cacao en trois mois entreprises camerounaises 50 • V ers la mise en place d’un système national 42 • L ’ex-DG de la Télévision publique de collecte et de stockage de produits vivriers nationale incarcéré 50 • U ne légère hausse de la production caféière 43 • 1 1,8 milliards FCFA de l’AFD pour en vue au terme de la campagne 2013-2014 développer l’agriculture, la santé et l’éducation 51 • L e Cameroun pourrait se lancer dans la culture du coton OGM dans trois ans 43 • L e Cameroun et l’UE signent le 11ème FED d’un montant de 185 milliards FCFA 51 • L a Sodecoton envisage la création d’un fonds de stabilisation des prix aux 44 • L imitation en vue de la main d’œuvre producteurs chinoise et vietnamienne dans le pays 52 • L a production cotonnière nationale projetée à 235 000 tonnes en 2014-2015, en hausse de 7% 52 • L e premier Salon international du machinisme agricole annoncé pour juin 2015 53 • M TN l’emporte sur Orange Cameroun 44 • S tandard & Poor’s confirme la note du au terme des neuf premiers mois Cameroun à « B/B », avec des perspectives de l’année 2014 stables 53 • L ’internet, le nouveau champ de bataille 45 • G râce à l’approche HIMO, des communes des opérateurs ont créé 1200 emplois en trois ans 54 • B loomfield attribue la note BBB 45 • L ’Etat recherche 21 milliards FCFA à à l’opérateur public des télécoms injecter dans cinq entreprises publiques camerounais Camtel 46 • S tartimes Ltd effectuera la réhabilitation 56 • O livier Dicoh : « La mission principale technique de la CRTV pour de Camtel n’est pas la recherche de 110 milliards FCFA la performance financière » 46 • C OTCO rembourse à l’Etat 22 milliards 58 • L e groupe Orange lancera son service FCFA pour l’adaptation du pipeline Afrimarket au Cameroun et au Mali Tchad-Cameroun au projet Lom Pangar en 2015 47 • D es cellules spécialisées créées pour 58 • O range joue la carte de la transparence combattre les trafics illicites dans dans le coût des communications les aéroports 59 • D es plateformes e-commerce, e-banking, 48 • L a Cameroon Tea Estate ambitionne de e-money, e-santé, e-éducation en projet quadrupler sa production de thé 59 • L a numérotation téléphonique est passée à l’horizon 2016-2017 de 8 à 9 chiffres le 21 novembre 2014 Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -5-
60 • U BA commercialisera bientôt la MasterCard au Cameroun 60 • L es transferts d’argent de la diaspora en hausse de 100 milliards FCFA sur quatre ans CASTING TONY SMITH 61 • L ’Etat camerounais lance un emprunt obligataire de 150 milliards FCFA 61 • E n décembre, l’Etat remboursera PDG de Limitless Corporation, une 55,6 milliards FCFA sur son emprunt entreprise spécialisée dans la concep- obligataire 2010-2015 tion de logiciels, de smartphones et de tablettes, Tony Smith, jeune Camerou- 62 • L e Niger hésiterait désormais à faire nais récemment plébiscité dans le clas- transiter son pétrole par le pipeline sement Choiseul des « leaders africains Tchad-Cameroun de demain », se sent visiblement pous- ser des ailes. Pour preuve, cet ancien chef de projet chez le 63 • T radex s’associe à l’Emiratie Tristar pour géant américain Microsoft ambitionne de créer pas moins livrer les produits pétroliers en RCA de 20 000 emplois dans plusieurs industries tout au long de l’année 2015. Une ambition vis-à-vis de laquelle son 63 • L e projet de centrale hydroélectrique à classement dans le Choiseul 2014 n’est certainement pas Natchigal prend progressivement corps étranger. En effet, confesse-t-il, « après la publication de ce rapport, (…) plusieurs entreprises ou investisseurs intéressés par 64 • H ysacam inaugure sa 2ème centrale de les questions de développement en Afrique ont pris contact avec captage et de traitement du biogaz du pays moi pour échanger sur les perspectives de développement techno- logique en Afrique ». Tony Smith a été, cette année, parmi les 64 • L e constructeur chinois du barrage dix Camerounais âgé de 40 ans au plus à avoir figuré dans de Mékin accusé de non-respect de le top 100 des « leaders africains de demain » recensés par l’environnement l’Institut Choiseul. 64 • E neo réduit le coût de l’abonnement de 50% pour recruter 15 000 nouveaux ABDOU NAMBA abonnés à l’électricité La Société de Développement du Co- ton (Sodecoton), le fleuron de l’agro- industrie dans le septentrion camerou- nais, que dirige Abdou Namba, lancera dès l’année 2015 la 2ème phase des re- cherches visant à introduire le coton génétiquement modifié (OGM) au Cameroun. Cette seconde phase durera trois ans, apprend- 65 • L e pétro-gazier chinois Sinopec pourrait on, et pourrait aboutir à la vulgarisation des OGM dans la bientôt produire bitume et lubrifiants au culture du coton dans le pays. Cameroun Contrairement à la première phase, dont les recherches se sont déroulées dans un milieu clos depuis 2012, cette 65 • P roduction en croissance fois-ci, l’agro-industriel du coton expérimentera les OGM 65 • G az du Cameroun peut désormais en milieu ouvert. Telles sont les principales informations ressorties d’un atelier organisé par la Sodecoton du 23 au approvisionner la zone industrielle de 24 octobre 2014 à Garoua, dans la région du Nord, afin de Bonabéri restituer les résultats de la première phase des recherches sur l’introduction des OGM dans la culture du coton au 66 • L e Camerounais Célestin Monga nommé au Cameroun. poste de directeur général adjoint de l’Onudi -6- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
HENRI-CLAUDE OYIMA ZACHARIE PÉREVET Le président directeur général (PDG) S’exprimant le 21 octobre 2014 à Doua- du groupe bancaire gabonais BGFI la devant les associations patronales du n’est pas peu fier des performances de Cameroun, dans le cadre de la première sa filiale camerounaise. Au cours de la rencontre thématique de l’Observatoire conférence budgétaire qui a regroupé national de l’emploi et de la formation les dix filiales de ce groupe bancaire professionnelle (Onefop), le ministre du 4 au 8 novembre 2014 à Douala, la de l’Emploi Zacharie Pérevet a révélé capitale économique du Cameroun, Henri-Claude Oyima que 130 000 emplois temporaires ou de long terme ont été a révélé que la filiale camerounaise du premier groupe ban- « identifiés » comme créés dans le pays au 30 juin 2014 depuis caire de la zone Cemac, avec un total bilan de 3023 milliards le début de l’année. Sur la base de cette statistique, il reste à de francs CFA à fin 2013, « est parmi les plus dynamiques du créer au moins 120 000 autres emplois avant la fin de l’année groupe ». Un dynamisme visible dans le résultat de l’exercice 2014 afin d’atteindre le chiffre de 250 000 emplois promis 2013 de BGFI Cameroun qui, a-t-on appris au cours de par le chef de l’Etat camerounais, Paul Biya, au cours de son la rencontre de Douala, a progressé de 50% par rapport à discours à la jeunesse camerounaise le 11 février 2014. Placée l’année 2012. « Nous sommes très satisfaits des résultats de la sous le thème de la « contribution des organisations patronales filiale camerounaise », a commenté le PDG de BGFI, en au suivi de l’emploi », cette première rencontre thématique de ajoutant que le choix de Douala pour la conférence bud- l’Onefop « s’inscrivait dans le cadre des concertations engagées gétaire du groupe BGFI est un signe de « reconnaissance et par le Minefop, à travers l’Onefop, pour la production semes- d’encouragement » pour l’équipe en poste au Cameroun. trielle des résultats des enquêtes sur l’emploi ». EMMANUEL MBIAM KLAUS-LUDWIG KEFERSTEIN Bien que le Cameroun dispose de gi- L’ambassadeur de la République fédé- sements miniers de niveau mondial, à rale d’Allemagne au Cameroun, le Dr l’instar du fer de Mbalam et de Nkout, Klaus-Ludwig Keferstein, a remis au du nickel et du cobalt de Lomié, ou ministre camerounais de la Défense encore du diamant de Mobilong, ce Edgar Alain Mebe Ngo’o un don gigantesque potentiel demeure inex- d’équipements militaires de la Répu- ploité à ce jour, à cause de l’inexistence blique fédérale d’Allemagne à l’armée d’une véritable industrie minière. Pour l’instant, l’activité camerounaise. C’était le 18 novembre 2014 à la base aé- minière dans le pays est largement dominée par l’exploi- rienne de Yaoundé. Il s’agit de 120 véhicules pouvant être tation artisanale (qui contribue à seulement 1% dans la utilisés sur tout type de terrain, et qui, a-t-on appris, « ont formation du PIB du pays), peu génératrice de revenus en fait leurs preuves sur des théâtres d’opérations militaires comme comparaison avec le potentiel existant. l’Afghanistan ». Constitué de 60 jeeps WOLF de marque Selon la Fédération minière du Cameroun, un regroupe- Mercedes et de 60 camions UNIMOG, a précisé le mi- ment d’opérateurs locaux récemment constitué et dirigé nistre Mebe Ngo’o, « cet important don intervient dans le par l’avocat Emmanuel Mbiam, la transition de l’artisanat cadre de l’appui à la lutte contre la secte islamiste Boko Haram, minier à l’exploitation minière industrielle pourrait pas- et de la participation des forces de défense camerounaises à la ser par la création par le gouvernement d’un « fonds de Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour développement de la mine industrielle ». Cette fédération est la stabilité de la République Centrafricaine (Minusca) ». allée faire cette proposition au ministre camerounais des Mines, Emmanuel Bondé, au cours d’une audience que ce membre du gouvernement a accordé à ses responsables le 11 novembre 2014 à Yaoundé. Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -7-
L’ENQUÊTE Accords de partenariat économique : toujours des avis bien partagés Après la signature d’un accord vue ont retenu notre attention et au-delà des frontières nationales per- intérimaire par le Cameroun, des ont suscité de longs échanges dans met d’accroître sa compétitivité et de opérateurs économiques, intellec- le cadre de la rencontre des parte- poursuivre son expansion, alors qu’il tuels et professionnels des ques- naires sociaux. Au final, on peut est démontré à l’échelle mondiale tions commerciales donnent de la constater que les idées ont forte- que la plupart des créations nettes voix. ment évolué. La question des bar- d’emplois et de richesses sont l’apa- rières tarifaires, qui focalisait les nage des entreprises à forte crois- Depuis octobre 2003, les pays attentions, a glissé au second degré sance », a-t-il expliqué. Cependant, d’Afrique centrale (AC) et l’Union pour laisser la place à des argu- il a aussi été admis que les oppor- européenne (UE) sont engagés ments bien plus complexes. tunités qu’offrent ces accords ne dans la négociation d’un accord de peuvent pas occulter les menaces partenariat économique (APE) en PLUS D’OPPORTUNITÉS À liées notamment à la perte des vue d’instituer un nouveau régime SAISIR, MAIS AUSSI DES ALÉAS recettes douanières, au risque de commercial devant remplacer le À REDOUTER fragiliser le processus d’intégration, système de préférences commer- Le gouvernement camerounais, qui et à la concurrence plus accrue des ciales non réciproques en vigueur prône un accord à l’échelle régio- produits en provenance de l’UE. dans le cadre de l’accord d’inté- nale, défend la signature des APE « La vision à court terme, qui met gration préférentiel de Cotonou1. intérimaires. Dieudonné Bondoma, en avant les pertes relatives à la fis- Après plusieurs années de négocia- directeur général au Ministère de calité de porte, occulte les effets posi- tions, l’UE et les pays d’Afrique cen- l’économie, a expliqué qu’en cas tifs que pourrait tirer le Cameroun à trale ne sont pas encore parvenus à un consensus pour les questions techniques, sur la base desquelles La question des barrières tarifaires, qui focalisait les attentions, a glissé au second degré pour laisser la le texte de l’accord devrait être ré- digé. Au Cameroun, où un accord intérimaire a été signé puis ratifié par le Parlement, les débats sont place à des arguments bien plus complexes. ouverts. Jusque-là une bonne partie de l’opinion redoutait les impacts de ratification les APE devraient long terme si les entreprises prenaient économiques négatifs des APE et la induire plus d’opportunités et l’option de se mettre résolument à déstabilisation que pourrait entraî- d’échanges avec l’UE, par la création l’école de la compétitivité et de la ner la mise en œuvre d’un APE pre- de nouveaux marchés et l’accrois- mise à niveau », se défend le gouver- nant insuffisamment en compte les sement de la production par une nement. préoccupations de développement. meilleure spécialisation, ainsi que Au final, il a été admis que la ques- Totalement consacrée à la question, l’accroissement des revenus par une tion des APE mérite d’être abordée la troisième édition des universités croissance des exportations dans la avec mesure, car ces accords ne sont du GICAM (Groupement Inter- zone et vers le reste du monde. sans doute pas une panacée. Les Patronal du Cameroun) a permis Sans directement parler des APE, réflexions développées sont arrivées il y a quelque temps aux différents certains intervenants de cette uni- à la conclusion qu’avec ou sans leur leaders du secteur économique ca- versité du GICAM, comme Felix ratification, l’important pour le Ca- merounais de partager leurs points Zogning de l’Université du Qué- meroun reste les réformes d’adap- de vue et expériences sur cette bec, au Canada, ont défendu les tation aux exigences changeantes question, décisive pour l’Afrique vertus de l’ouverture des marchés. de l’environnement économique centrale en général et le Cameroun « L’expansion géographique de l’ac- mondial. en particulier. Quelques points de tivité économique d’une entreprise Idriss Linge -8- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
L’ENQUÊTE Ils ont dit Dieudonné Essomba : « La question de la compétitivité n’est pas le vrai problème » L’ingénieur statisticien estime qu’on ne peut parler de compéti- tivité de l’économie camerounaise tant que son système productif doit concurrencer les produits de brocante. Selon cet ingénieur statisticien en service au Ministère camerounais de l’économie, axer les enjeux d’une négociation avec le partenaire euro- péen sur les questions de compétiti- vité est une approche parcellaire du problème. M. Essomba estime que la démarche actuelle visant à ren- forcer la capacité de notre secteur privé face aux APE n’aborde qu’une « La grande partie du problème. « En fait, au discrétion des produits regard de certains facteurs propres au manufac- Cameroun (faibles infrastructures, turés du mauvaise gouvernance, étroitesse du Cameroun sur les marché, etc.), la réussite d’un tel pro- marchés ne gramme de mise à niveau ne pourrait peut être exclusi- que porter sur quelques secteurs très vement marginaux dans lesquels le Came- imputée à roun disposerait de marges d’action notre faible compétiti- particulièrement favorables. Mais vité, mais cette surspécialisation même empê- surtout par cherait d’élargir la base productive et le fait d’une compétition ne ferait qu’aggraver les rapports de liée à des dépendance », explique-t-il. formes d’approvi- Un sérieux revers pour les princi- sionnement paux négociateurs de cet accord non conven- pour le compte du Cameroun, qui tionnelles. » n’ont pas manqué de présenter et selon des indicateurs qualitatifs des formes d’approvisionnement non l’octroi par l’Union européenne et quantitatifs précis. Il estime ainsi conventionnelles. Et tout le monde d’un fonds de 6 milliards de francs que le grand danger dans les APE ne conviendra que la brocante n’est CFA pour la mise à niveau des saurait se trouver dans le risque de pas la production d’une entreprise entreprises camerounaises comme voir des produits européens envahir étrangère qui serait en compétition une victoire. Dans son analyse, le marché camerounais. « La grande avec les entreprises camerounaises, Dieudonné Essomba explique que discrétion des produits manufacturés mais une autre réalité obéissant à des la compétitivité d’un système pro- du Cameroun sur les marchés ne peut mécanismes totalement différents, et ductif n’est évoquée que lorsque ce être exclusivement imputée à notre requérant un traitement technique, produit se trouve en concurrence faible compétitivité, mais surtout théorique et thérapeutique auto- avec des pays d’un marché précis, par le fait d’une compétition liée à nome », explique-t-il. Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -9-
L’ENQUÊTE Ils ont dit Babissakana : « La signature des APE entre le Cameroun et l’UE n’est pas viable » Dans la logique de cet ingénieur tuelle et prévisionnelle du contexte et l’Afrique est déjà faible, et l’est financier, la non-signature des économique mondial en vigueur. d’avantage lorsque la comparaison APE par le Cameroun entraînera Dans sa démonstration, M. Babis- est rapportée au Cameroun. Enfin, des effets certes, mais qui peuvent sakana laisse ressortir qu’aucun de l’ingénieur financier explique, avec être maîtrisables sur le moyen ces critères de convergence n’est les chiffres de l’OCDE à l’appui, terme. effectif pour ce qui est des présentes que les tendances de la croissance discussions. Dans son analyse, il mondiale prévoient une plus forte Du point de vue de Babissakana, démontre que sur le plan du poids progression des indicateurs dans les les paramètres de l’ingénierie éco- des acteurs, le Cameroun, qui a ra- pays émergents d’Asie, notamment nomique standard dégagent quatre tifié un accord intérimaire en solo, la Chine, alors que l’Europe pourrait critères d’analyse de viabilité de la reste bien faible devant l’ensemble à moyen terme être en déclin. Ce qui, signature des APE qui doivent être « Les filières constitué des pays de la Commu- au final, ne rend pas pertinent une concer- pris en compte. Déjà, on devrait nées ne nauté européenne. Une situation négociation avec un tel partenaire. s’assurer que les niveaux de déve- représentent qui ne trouve pas plus de réponse L’ingénieur financier fait aussi loppement économique des par- qu’envi- dans le cadre d’un accord négocié savoir que contrairement à ce que ron 200 tenaires sont comparables. Que milliards de au sein de la Cemac. l’opinion publique pourrait croire, les partenaires en discussion pos- francs CFA Ensuite, il fait remarquer que le les conséquences de la non-signa- sèdent des économies à fort degré de recettes système productif camerounais ture des APE devraient être limi- (dont 42 de concurrence et de spécialisation, milliards ne possède pas suffisamment de tées. « Les filières concernées ne re- que les volumes d’échanges entre pour la biens spécialisés pour s’imposer présentent qu’environ 200 milliards banane), soit les partenaires en discussion soient moins de sur les marchés des pays euro- de francs CFA de recettes (dont 42 conséquents et diversifiés, et enfin 2% du PIB péens. De même, M. Babissakana milliards pour la banane), soit moins que les négociations se déroulent en 2013 » fait remarquer que le volume des de 2% du PIB en 2013 », a-t-il fait en tenant compte de la situation ac- échanges entre l’Union européenne remarquer. -10- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
L’ENQUÊTE Florent Etoundi Ayissi : « Les APE bien négociés seront un stimulant pour l’économie camerounaise » Homme politique aujourd’hui à la le commerce avec l’extérieur, les y découlant », croit savoir Florent tête d’une entreprise de trading, technologies de l’information Etoundi Ayissi. il oppose aux points de vue des et de la communication, et au- Ce dernier fait également savoir experts statisticiens et de l’ingé- jourd’hui dans l’agro-industrie. que la stratégie du Cameroun face nierie financière le point de vue Partant de cette expérience mul- à ces accords ne peut pas être celle de l’expérience des échanges et de tiple, M. Etoundi Ayissi, son pro- de vouloir conquérir tous les seg- l’acteur économique. moteur, milite pour une action ments, et tous les marchés, mais résolument engagée vers le libre- Le groupe Tradimco que dirige échange. « En dépit de légitimes in- M. Ayissi est la toute première quiétudes qu’ils suscitent pour nos « Nous sommes convaincus entreprise à promouvoir des do- échanges, en raison principalement cuments de sécurité (lutte contre de la faiblesse de notre tissu indus- que des APE bien négociés seront un stimulant pour la falsification et la contrefaçon triel, nous sommes convaincus que des documents) depuis près de des APE bien négociés seront un 25 ans au Cameroun. Il emploie aujourd’hui une quarantaine stimulant pour la matérialisation et la mise en forme de nos écono- la matérialisation et la de personnes qui interviennent dans la transformation locale, mies, et permettront une amélio- ration significative des mécanismes mise en forme de nos économies. » celle qui consiste à respecter les règles issues de l’expérience, de la « Cette stra- stratification des marchés et de la tification des production. « Cette stratification des marchés, en parcou- marchés, en parcourant le monde, est rant le irréversible et obéit non seulement à monde, est la règle intangible de l’offre et de la irréversible et obéit non demande qualitative ou quantitative, seulement mais aussi et surtout à la nécessaire à la règle intangible prise en compte du pouvoir d’achat de l’offre des consommateurs », indique-t-il. et de la Il conclut sa réflexion en confiant demande qualitative que « suspendre l’avenir de notre ou quanti- économie à cette indécision qui tative, mais consiste à retarder la ratification des aussi et surtout à la accords de partenariat économique nécessaire ne contribue pas à améliorer son in- prise en compte dispensable lisibilité à court, moyen, du pouvoir et long termes ; même si l’on peut d’achat des comprendre les négociations actuelles consomma- teurs » avec nos partenaires de la Cemac ». Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -11-
L’AMBASSADEUR DU MOIS Claude Altermatt : « Inutile de rappeler que le Cameroun dispose d’une stabilité politique, mais aussi macroéconomique » Pour l’ambassadeur de la Confé- d’une solution simpliste et extrême Parlement fédéral présidente de la dération suisse au Cameroun, le pour répondre à un défi sérieux, Confédération pour l’année 2015. Cameroun, première puissance et qu’il revenait aux Africains, et Conformément au système poli- de la zone Cemac, dispose en plus surtout aux Africaines, de décider tique suisse, tout en assumant la d’une jeunesse bien formée, et par comment réduire la natalité ici. Au fonction de chef d’Etat pour une ricochet d’un énorme potentiel plan intérieur suisse, nous avons année, la conseillère fédérale Som- de développement économique et une confirmation de plus que la maruga gardera son ministère, celui humain. Entretien. démocratie directe, avec ses nom- de la justice et de la police, égale- breuses votations, fonctionne bien, ment en charge de la migration. Investir au Cameroun : Quelles sont car lorsqu’il y a des propositions Pour la Suisse, pays ouvert, il est les implications pour l’Afrique, simplistes, le bon sens suisse l’em- très important de pouvoir coopé- et le Cameroun en particulier, des porte d’habitude à l’issue du scru- rer avec les autorités d’Etats où il y résultats du référendum du pro- tin, après une vive campagne et des a un grand potentiel d’émigration. jet de loi sur la limite du nombre débats animés. Par cet accord, la coopération mu- de nouveaux immigrants entrant tuelle s’intensifie et se resserre avec en Suisse (0,2% de la population IC : Récemment, Mme Simonetta le Cameroun. C’est une très bonne suisse, soit 16 000 personnes par Sommaruga, la vice-présidente chose. La Suisse continuera à ac- an) ? de la Confédération suisse, était cueillir tous les jeunes de ce pays qui Claude Altermatt : Je voudrais par- au Cameroun où elle a signé des ont l’intention d’y étudier ou d’y tager notre soulagement avec vous accords sur la suppression réci- travailler, d’entente avec leurs par- suite au résultat très net – ¾ de proque de l’obligation de visa pour tenaires suisses et conformément rejets – contre cette initiative popu- les diplomates et les détenteurs de à la loi suisse. Voyez par exemple laire qui aurait eu un impact grave passeports de service. Quelle est ces jeunes joueurs de foot, comme en Suisse, sur son économie, mais l’importance d’un tel accord ? Trois Franck Etoundi ou Breel Embolo, aussi sur son image à l’étranger. mois après la signature de cet ac- qui jouent avec un grand succès en Cette initiative radicale demandait cord, quel bilan faites-vous des flux Suisse. Ou alors ces étudiants ap- également que nous distribuions migratoires entre les diplomates et pliqués et motivés venant parfaire massivement des moyens contra- fonctionnaires suisses en visite au leurs études chez nous, tout en sa- ceptifs dans les pays en développe- Cameroun et vice-versa ? chant qu’ils vont rentrer au bercail, ment, notamment en Afrique sub- CA : D’abord, je tiens à vous si- là où ils seront indispensables. saharienne. Or, une large majorité gnaler que la conseillère fédérale Il est de mon devoir de rendre at- des Suisses a compris qu’il s’agissait Sommaruga vient d’être élue par le tentif d’un danger qui guette celles -12- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
L’AMBASSADEUR DU MOIS et ceux qui ne savent pas ce qui les donc de concert avec les autorités « Pour la lui l’expert des échanges écono- Suisse, pays attendra chez nous. Croyez-moi, camerounaises que nous combat- ouvert, il miques entre la Suisse et le conti- je suis entièrement conscient qu’il tons toute immigration clandestine, est très nent africain. Effectivement, à ma y a, au Cameroun également, un dommageable aux deux pays. important connaissance une quinzaine de ces de pouvoir potentiel d’immigration illégale coopérer quarante entreprises sont présentes vers le Nord de ce globe. Or, l’im- IC : Récemment, Michael Rheineg- avec les ici au Cameroun, dont cinq grandes migration illégale, c’est non seu- ger, le directeur du Swiss African autorités entreprises suisses telles que Glen- d’Etats lement la fausse voie, c’est même Business Circle (SABC), a indiqué à où il y a core, Nestlé, Novartis, Syngenta et très dangereux. En effet, abusés par la Tribune de Genève que 40 des 100 un grand Panalpina. potentiel des trafiquants criminels, abandon- principales entreprises suisses se d’émigra- nés à eux-mêmes, les clandestins sont déjà positionnées en Afrique. tion. » IC : De manière générale, combien tombent souvent très rapidement Parmi ces 40 entreprises, combien d’entreprises suisses (grandes et dans les sphères très proches de mi- sont présentes au Cameroun ? PME) sont actives au Cameroun ? lieux criminels en Europe, ou, pour CA : M. Rheinegger est en effet CA : Un peu moins de 40 entreprises les femmes, dans la prostitution. une personne-clef dans les affaires suisses ou en rapport avec la Suisse Il faut éviter de tels drames. C’est entre la Suisse et l’Afrique. C’est sont recensées exerçant des activi- Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -13-
L’AMBASSADEUR DU MOIS tés au Cameroun. Leur nombre est tations de services incluant l’accès IC : De manière générale, comment en légère augmentation au cours au numérique, le transport mari- ces entreprises suisses jugent-elles des dernières années. Le potentiel time, et de l’autre des machines et le climat des affaires au Came- demeure donc considérable. Il y a des infrastructures énergétiques. Le roun ? du coup encore beaucoup d’efforts commerce de matières premières et CA : Je viens de vous le dire, en à faire par les autorités camerou- le domaine agroalimentaire, dont la Suisse, le climat des affaires se veut naises pour faire venir encore da- production occupe également une libéral et dynamique, le représen- vantage d’entreprises suisses. place importante dans les activités tant de l’Etat se gardera de parler des firmes suisses basées au Came- au nom des entreprises. A cette lu- IC : Quels sont les différents do- roun, tout comme le commerce mière, il faudrait le demander à elles maines de compétences des entre- avec des produits pharmaceutiques directement. prises suisses présentes au Came- méritent d’être mentionnés. roun ? IC : Quel est votre avis sur le climat BIO EXPRESS CA : Le représentant officiel que je des affaires au Cameroun, comparé suis d’un petit pays, mais 20ème éco- à des pays comme la Guinée équa- nomie mondiale, ne peut connaître Nom et prénom : ALTERMATT Claude toriale ou la Centrafrique où vous tous les détails et toutes les facettes Âge : 57 êtes également ambassadeur de la des activités économiques des so- Domaines de compétence : Relations Confédération suisse ? ciétés suisses ou en rapport avec intergouvernementales et internationales, CA : Comparaison n’est pas raison. la Suisse au Cameroun. En effet, historien de formation Evidemment, c’est le Cameroun qui eu égard à notre système écono- Date présentation lettre de créance au est le plus grand marché de la zone mique libéral, il ne saurait y avoir Cameroun : 8 novembre 2013 Cemac. L’une des deux autres éco- un contrôle systématique. A ma Qualification : Ambassadeur de la nomies que vous voulez soumettre connaissance, une partie des activi- Confédération suisse au Cameroun, en à une comparaison souffre hélas en- tés économiques concerne les pres- Guinée équatoriale et en Centrafrique core très fortement d’une instabilité -14- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
L’AMBASSADEUR DU MOIS rée au Cameroun. Aujourd’hui, y demeurent très difficiles. Si le Ca- a-t-il une raison fiable pour ces en- meroun produisait moins de diplô- treprises de s’inquiéter à nouveau ? més d’universités, mais davantage CA : Non, absolument pas. D’ail- de jeunes diplômés dans les métiers leurs, je me réjouis du nombre qui sont recherchés par le secteur élevé de participants au Salon PRO- économique privé et bien rémuné- MOTE (à Yaoundé du 6 au 14 dé- rés, tels les électriciens, mécaniciens cembre 2014, ndlr) en provenance en voiture, comptables, agriculteurs « Si le de l’étranger. de haut niveau et j’en passe, je suis Cameroun produisait convaincu que le Cameroun aurait moins de IC : Quels sont les grands chiffres moins de chômage, une économie diplômés de la coopération Suisse-Cameroun plus efficace et, du coup, un taux de d’universi- tés, mais et comment la qualifiez-vous ? croissance économique plus élevé. davantage CA : Il n’y a pas de coopération de la Les entreprises suisses et camerou- de jeunes Confédération suisse - Cameroun, naises devraient donc appliquer le diplômés dans les le Cameroun n’étant pas un pays à système dual suisse de formation métiers qui sont recher- chés par le secteur « Les entreprises suisses et camerounaises économique privé et bien rémunérés, devraient donc appliquer le système dual je suis convaincu suisse de formation professionnelle dans qu’il aurait moins de chômage, leurs entreprises actives sur place » une économie plus efficace très faible revenu. Mais l’un des 26 professionnelle dans leurs entre- et, du coup, cantons suisses, le canton du Jura, prises actives sur place. un taux de croissance lui accorde une aide publique et économique effectue une coopération formelle IC : Généralement, combien de res- plus élevé. » avec le Cameroun. Ce canton de sortissants suisses vivent au Came- politique et de problèmes sécuri- quelque 72 000 habitants a inscrit roun et quels sont leurs domaines taires très graves. A cet égard, inu- cette coopération dans la durée, d’activité ? tile de rappeler que le Cameroun afin de la rendre plus efficace. Les CA : On s’approche des 300. Rap- dispose d’une stabilité politique, engagements sont généralement pelons que les entreprises suisses ou mais aussi macroéconomique, fac- pris pour une période de dix ans. en rapport avec la Suisse engagent teurs importants pour les inves- En profitent l’Institut Agricole dans la plupart des cas des per- tisseurs. De plus, la diversification d’Obala et les projets de santé dans sonnes en provenance d’Etats les de l’économie camerounaise joue le Centre. plus divers. également en sa faveur, comparée à la Guinée équatoriale, pays certes IC : Dans quel secteur conseilleriez- IC : Combien de demandes de visas très aisé qui doit sa prospérité à la vous les entreprises suisses d’inves- des Camerounais sont enregistrées production des hydrocarbures. Plu- tir au Cameroun ? Pourquoi ? chaque jour dans votre ambassade sieurs indices de développement, CA : C’est à l’ambassade du Came- et combien de visas sont attribués que cela soit l’accès électrique ou les roun en Suisse, à Berne, de conseil- par jour ? infrastructures, placent le Came- ler comment investir, alors que mon CA : Il s’agit d’un chiffre précis qui roun en tête des pays de la sous- rôle ici consiste à expliquer, sur n’est pas destiné au public. Je peux région. Enfin, l’endettement est demande, la situation qui prévaut néanmoins vous dire que nous déli- faible, fait dont il faut tenir compte sur place et à indiquer les risques. vrons jusqu’à 1500 visas par an, vu le surendettement qui entrave Tout ceci, si possible, dans l’optique l’obligation de visa diplomatique maintes économies dans certaines suisse. Cela dit, je ne vous cache- et de service étant tombée depuis la parties du globe. rai pas que je ne cesse de rappeler signature, par la conseillère fédérale l’énorme potentiel de développe- Sommaruga, de l’accord y relatif en IC : De nombreuses entreprises eu- ment économique et humain, no- septembre passé. ropéennes craignent encore l’épi- tamment une jeunesse bien formée, Propos recueillis par démie Ebola, qui n’a pas été décla- mais dont les perspectives d’emploi Beaugas-Orain Djoyum Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -15-
FOCUS C&K Mining cède ses actifs sur le diamant de Mobilong à un investisseur sino-américain Fragilisée par le scandale de son En avril de 50% » dans le capital de C&K de RFI en Corée. Une embellie dont 2014, estimation controversée du po- l’entreprise Mining, n’en contrôlent plus que avaient profité de hautes personna- tentiel de ce gisement situé dans sud-co- « moins de 10% ». La transaction, lités coréennes et les responsables de la région de l’Est du Cameroun, réenne dont le montant n’a pas été révélé, C&K International, maison-mère C&K le Coréen C&K Mining s’est Mining avait a discrètement eu lieu depuis « fin de C&K Mining, lesquels avaient presque retiré du projet diaman- déjà offi- 2013 ». cédé leurs actifs au prix fort, avant tifère de Mobilong, ne conservant ciellement Cette cession des actifs survient que le cours du titre ne dégringole. commer- que des parts symboliques. cialisé 3500 après le scandale qu’a créé le gise- Après l’interpellation de plusieurs carats de ment de diamant de Mobilong en hauts fonctionnaires coréens soup- diamants La société C&K Mining, détentrice bruts. Corée du Sud en décembre 2010. çonnés d’avoir participé à cette depuis décembre 2010 du permis En effet, cette année-là, C&K Mi- magouille, une action en justice a d’exploitation du gisement de dia- ning, qui explorait ledit gisement été intentée contre les responsables mant de Mobilong, dans la région depuis 2006, a été accusé d’avoir de la junior minière coréenne, de l’Est du Cameroun, a cédé la surévalué son potentiel (736 mil- dont le chairman a été interpellé majorité de ses actifs dans ce projet lions de carats dans un premier puis incarcéré en Corée au mois de minier à un certain M. Yang, mil- temps, soit cinq fois la produc- février 2013. Deuk Gyun Oh n’a été liardaire d’origine chinoise rési- tion mondiale, puis un réajuste- libéré qu’à la fin du mois de sep- dant à Hong-Kong, mais dont cer- ment qui ramènera le potentiel tembre 2014. Ceci, apprend-on de taines sources autorisées affirment final à 420 millions de carats) afin sources proches du dossier, après qu’il détiendrait un passeport de faire de la spéculation sur la une longue audition (de 9h à 19h) américain. Nos sources révèlent Bourse de Séoul. devant la Cour de justice de Séoul, qu’une assemblée générale de C&K le 15 septembre 2014, du Came- Mining s’est tenue le 19 novembre EXPLOSION DU TITRE rounais Paul Ntep Gwet, ancien 2014 à Yaoundé, après un conseil À SÉOUL coordonnateur du Cadre d’appui d’administration tenu à Séoul le 2 De fait, après l’obtention du permis à l’artisanat minier (CAPAM), un novembre dernier, et que M. Yang d’exploitation en décembre 2010, et programme gouvernemental des- est le « nouvel actionnaire majori- fort du potentiel déclaré mais fina- tiné à encadrer les artisans miniers taire » de cette société minière is- lement faux, le titre C&K Mining dans les zones de production. À sue d’une joint-venture entre opé- avait grimpé sur la Bourse de Séoul, en croire nos sources, cet expert rateurs coréens et camerounais. multipliant son cours « par 4,6 en minier camerounais, qui a travaillé Les partenaires coréens, qui étaient seulement 16 jours », avait indiqué sur la quasi-totalité des projets jusqu’ici majoritaires « avec plus Frédéric Ojardias, correspondant miniers en cours dans le pays, a -16- N° 32-33 / Décembre 2014-Janvier 2015
FOCUS été invité à témoigner par la firme tation en décembre 2010. La partie les premiers carats de diamants is- C&K Mining afin de rassurer la conglomératique du gisement de sus de cette partie alluvionnaire de justice coréenne sur l’existence diamant de Mobilong est jugée de Mobilong que, le 16 janvier 2013, réelle d’un gisement diamantifère loin plus importante que la partie C&K Mining a officiellement reçu de niveau mondial dans la loca- alluvionnaire, dont le potentiel to- du ministre de l’Industrie et des lité de Mobilong, dans la région tal n’est estimé qu’à 230 000 carats Mines, Emmanuel Bonde, le pre- de l’Est du Cameroun. Le CAPAM de diamants, soit moins de la pro- mier certificat national de Kimber- est par ailleurs actionnaire à 10% duction annuelle de la République ley du pays, depuis l’admission du dans C&K Mining, entreprise qu’il Cameroun au processus de Kim- a contribué à créer avec des parte- berley en août 2012. En recevant naires coréens et d’autres opéra- Bien que le potentiel du ce certificat, Choung Sung Hee, teurs nationaux. la représentante du chairman de gisement diamantifère de C&K Mining, avait confié : « Au- UN POTENTIEL CONTROVERSÉ, MAIS Mobilong soit controversé, jourd’hui, nous sommes prêts à ex- porter 617 carats de diamants. Mais JAMAIS DÉMENTI Bien que le potentiel du gisement aucune contradiction fiable nous avons les capacités d’exporter 6000 carats par mois. » En avril diamantifère de Mobilong soit controversé, aucune contradiction n’a jusqu’ici été apportée 2014, c’est-à-dire un peu plus d’un an seulement après la réception du fiable n’a jusqu’ici été apportée à la dernière estimation faite par C&K à la dernière estimation certificat du Processus de Kimberly délivré par le gouvernement came- Mining (420 millions de carats). Mais toutes les parties s’accordent faite par C&K Mining rounais, l’entreprise sud-coréenne C&K Mining avait déjà officielle- à dire qu’il s’agit d’un gisement de (420 millions de carats). ment commercialisé 3500 carats niveau mondial. Surtout grâce à de diamants bruts. L’information a sa partie conglomératique encore été révélée au cours d’une concer- non évaluée, évaluation que C&K Centrafricaine, qui atteint souvent tation sous-régionale sur la traça- Mining a été invitée à conduire 400 000 carats. La mise en exploi- bilité des diamants centrafricains pendant trois ans, selon le cahier tation « immédiate » de cette partie organisée à Yaoundé, la capitale des charges fixé par le gouverne- du gisement a été autorisée après camerounaise. ment camerounais au moment de l’obtention du permis en 2010. la délivrance du permis d’exploi- C’est dans le but de commercialiser Brice R. Mbodiam Décembre 2014-Janvier 2015 / N° 32-33 -17-
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