Compte rendu du séminaire de José Bico Capillary Origami - Emeric Bron et Paul Hobeika 14 Octobre 2008

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Compte rendu du séminaire de José Bico Capillary Origami - Emeric Bron et Paul Hobeika 14 Octobre 2008
Compte rendu du séminaire de José Bico
          Capillary Origami
         Emeric Bron et Paul Hobeika
              14 Octobre 2008

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Compte rendu du séminaire de José Bico Capillary Origami - Emeric Bron et Paul Hobeika 14 Octobre 2008
1    Matériaux super-hydrophobes
    Lorsque l’on pose une goutte d’eau sur un plan incliné, elle commence en gé-
néral par s’étaler puis s’arête de glisser. L’utilisation du mercure fait apparaître
un comportement très différent : la goutte roule sans glisser sur le plan incliné.
On dit que l’eau mouille la surface, le mercure très peu.
    Il existe un certain nombre de matériaux particuliers appelés super hydro-
phobes qui sont peu mouillés par l’eau. C’est le cas par exemple des feuilles de
magnolia, ou des plumes de canard. L’analyse au microscope de ces matériaux
révèle leur point commun : des textures à l’échelle de la dizaine de microns leur
confèrent une grande rugosité.
    Lorsque le matériau est suffisamment hydrophobe, la goutte d’eau repose
sur le sommet de ses aspérités comme un fakir sur un tapis clouté. L’angle que
fait la goutte avec la surface est donné par la loi de Cassie :

                           cos θ∗ = φS cos θ − (1 − φS )

où θ est l’angle que ferait la goutte avec la surface si celle-ci était lisse, et φS
la fraction de la surface occupée par le sommet des créneaux. On peut de cette
manière atteindre des angles θ∗ > 170 ◦ .

      Figure 1 – La goutte repose au sommet des aspérités de la surface

    Ainsi, on peut imaginer qu’une surface artificielle constituée d’une « forêt de
nanotubes de carbone » a les propriétés physiques nécessaires pour être super-
hydrophobe. Cependant, lors de la réalisation de l’expérience, on observe l’effet
inverse : la surface de nanotubes est extrêmement bien mouillée. Le carbone
est en effet légèrement hydrophile, et la structure très rugueuse a tendance à
exacerber l’hydrophilie de carbone.

2    Modification de la structure après évaporation
    On peut effectuer cette expérience avec un point de vue différent et étudier
l’influence du mouillage et de l’évaporation de l’eau sur la structure de la surface.
On observe alors que les nanotubes ont tendance à se regrouper en paquets, ce
qui modifie de manière irréversible la structure initiale. Ce phénomène est en
fait facilement observable à l’échelle macroscopique, par exemple en examinant
le poil mouillé d’un chien qui s’organise en touffes.

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Compte rendu du séminaire de José Bico Capillary Origami - Emeric Bron et Paul Hobeika 14 Octobre 2008
Figure 2 – Forêt de nanotubes endomagée par le mouillage

    Pour étudier ce phénomène de manière plus quantitative, une première idée
est de se ramener à un problème unidimensionnel. On considère ensuite seule-
ment deux lamelles, disposées à une distance d et de longueur Ltotal , qu’on
trempe dans un liquide mouillant.
    Les lamelles se collent jusqu’à ce qu’il y ait un équilibre entre l’énergie d’in-
terface gagnée grâce au mouillage et l’énergie fournie pour déformer les lamelles.
En exprimant ce critère, on obtient une relation entre Lstick et d :
                                          !
                                 Lstick = LEC d
            "
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où LEC = Eh     γ est la longueur élasto-capillaire, et constitue une distance ca-
ractéristique dans les problèmes où il existe un équilibre entre capillarité et
élasticité. E est le module d’Young des lamelles et γ le coefficient de tension
superficielle de l’eau. Les mesures effectuées sont en bon accord avec ce modèle.

           Figure 3 – Lamelles trempées dans un liquide mouillant

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Figure 4 – Résultats des mesures effectuées avec deux lamelles

   Si l’on considère ensuite le même système, mais constitué de N lamelles
identiques, la relation devient :

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      Figure 5 – Résultats des expériences effectuées avec N lamelles

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3    Tige immergée
    C’est lors de l’évaporation de l’eau que les rugosités des matériaux étudiés
se regroupent. C’est pourquoi on s’intéresse maintenant à une tige immergée
dans un liquide qui s’évapore. Qu’advient-il au moment où la pointe atteint la
surface du liquide ? La tige perce-t-elle la surface ou bien se plie-t-elle ?

           Figure 6 – La tige peut soit plier, soit percer la surface

    Lorsque la surface du liquide est au niveau de l’extrémité de la tige, elle
exerce sur celle-ci une force : F = 2πbγ, où b est le rayon de la tige. Or la force
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critique de flambage de la tige est Fc = πLEI 2 , où I est le moment quadratique

de la tige. I étant proportionnel à b4 , on obtient une longueur critique :
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                                            Eb3
                                   Lc =
                                              γ

soit la longueur élasto-capillaire LEC .
    On peut observer un exemple biologique d’un tel phénomène : certaines
moisissures dont les ramifications doivent percer la surface de l’eau pour pouvoir
libérer les spores dans l’air diminuent chimiquement la tension de surface de
l’eau afin que les tiges puissent traverser plus facilement.

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4    Déformation d’une surface par un liquide
    On commence par étudier un élastique flottant à la surface de l’eau (cas
d’une "surface" à une dimension). L’élastique a au départ la forme d’un cercle.
On ajoute du savon a l’extérieur de l’élastique ce qui diminue la tension de
surface de l’eau extérieure seulement (dans un premier temps le savon reste à la
surface de l’eau). Dans quel cas l’élastique change-t-il de forme ? Le cas limite
s’écrit énergétiquement :
               Eb2                                                     2/3
     ∆γR2 ∼        R      ce qui donne un rayon critique       Rc ∼ LEC b1/3
               R2
                                                                             3
   Si l’on trace expérimentalement l’aire intérieure en fonction de ∆γR   Eb4 (qui
vaut 1 dans le cas limite), on observe effectivement un seuil pour la valeur limite.

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 Figure 7 – Variation de l’aire de l’élastique en fonction du paramètre       Eb4

    On s’intéresse ensuite à des feuilles fines. Comment se déforment-t-elles au
contact d’un liquide ?
    Pour des dimensions suffisamment grandes devant LEC on obtient un replie-
ment de la feuille, qui se referme autour de la goutte. Par exemple un triangle
a tendance à former une pyramide lorsque la goutte s’évapore. La longueur cri-
tique pour laquelle la feuille se replie est en fait proportionnelle à LEC , et le
coefficient de proportionnalité dépend de la forme.
    On peut essayer de déplier la surface en utilsant un générateur de tension : la
surface et son support agissent alors comme un condensateur, et sont attirés par
la force électrostatique. Il faut en pratique des tensions de l’ordre de la centaine
de volts pour parvenir à s’opposer aux forces de surface et ouvrir la forme.
    Pour étudier plus précisément la géométrie de la surface déformée, on peut
s’intéresser également à une feuille initialement plane collée par mouillage sur
une demi sphère solide. La feuille se plisse autour d’un réseau conique de zones
de contact.

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Figure 8 – Variation de Lcrit en fonction de la forme de la surface et de LEC

   Le plissement des surfaces est aussi un phénomène qui intervient lorsque un
substrat sur lequel est collé une surface se déforme. Par exemple, un morceau
de scotch sur un materiau flexible se plisse lorsqu’on plie ce materiau. Dans
d’autres situations, la géométrie de la surface plissée peut devenir beaucoup
plus complexe.

Figure 9 – Plissements d’un substrat lorsqu’on contraint la forme de la surface

5    Conclusion
    On voit ainsi se manifester dans tous ces phénomènes mettant en jeu à la
fois capillarité et élasticité une longueur caractéristique du problème appelée
longueur élasto-capillaire. L’étude du comportement des surfaces ouvre tou-
tefois vers des problème plus complexes de géométrie de plissement et rejoint
d’autres types de plissements comme le dernier exemple où l’adhérence remplace
la capillarité.

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