Elle veut casser les GAFAM vraiment ? - Framablog
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Elle veut casser les GAFAM… vraiment ? Le rejet des GAFAM fait son chemin y compris dans leur fief, aux U.S.A, pourrait-on se réjouir en constatant par exemple que Google est mis à nu (article en anglais) par le Comité judiciaire du Sénat des États-Unis. Il est même question à la fin de cet article de protéger par des lois et d’encadrer plus strictement les usages numériques des mineurs. Quelque chose serait-il en train de changer au pays de la libre-entreprise ? On pourrait de même se réjouir de voir Elizabeth Warren, une candidate démocrate à la présidence et farouche opposante de Trump, publier un appel récent au titre ravageur et programmatique : « Voici comment nous pouvons briser les Big tech ». Cependant, comme va l’exposer de façon documentée Christophe Masutti ci-dessous, il y a loin de la critique des GAFAM qu’elle articule à la remise en question du système libéral qui pourrait en être la conséquence logique… Casser les GAFAM… et recommencer par Christophe Masutti Dans les années 1970, l’économiste américaine Susan Strange théorisait l’économie politique des États-Unis relativement aux intérêts de marché. Elle démontrait dans ses travaux comment la stabilité économique des États-Unis ne dépendait pas du seul pilier des intérêts territoriaux assurés par leur puissance militaro-financière.
Les jeux se jouaient à la fois sur les marchés intérieurs et extérieurs : conditions d’accès aux marchés, production de produits financiers, investissements et firmes multinationales. Elle identifiait plusieurs couches structurelles sur lesquelles devait reposer toute velléité impérialiste, c’est-à-dire la construction de plusieurs types d’hégémonies. La plupart d’entre elles dépendaient à la fois de grandes entreprises et de l’organisation des créneaux économiques que le pouvoir politique américain était capable de dessiner (imposer) sur le globe. Aujourd’hui, nous connaissons bien évidemment nombre de ces structures et en particulier les structures de la connaissance, celles qui reposent pour l’essentiel sur les technologies de l’information et de la communication et qui sont maîtrisées en grande partie, voire en totalité, par des firmes américaines. Pour ce qui concerne Internet : Google- Alphabet, Amazon, AT&T, Microsoft, etc. (du côté chinois, le même jeu est en train de se dérouler et il importe de ne pas le perdre de vue). Les processus qui ont permis l’émergence de ces firmes hégémoniques ne se résument pas uniquement aux pratiques de ces dernières. Leur manque d’éthique, l’organisation savante du vol de nos données personnelles, les implications de cette industrie de la data sur nos libertés d’expression, nos vies privées et la démocratie, ne sont pas la recette unique de leur position dominatrice. On pourrait éternellement disserter sur ces pratiques, démontrer à quel point elles sont néfastes. Il n’en demeure pas moins que si la situation est telle, c’est parce que des stratégies structurelles sont à l’œuvre. Il s’agit de plusieurs pouvoirs : l’état de guerre permanent orchestré par les États-Unis depuis la fin de la Guerre du Vietnam, la transformation ultra-technologique de l’économie financière, les contraintes de marché imposées aux peuples (et pas seulement ceux des pays défavorisés) par des accords iniques,
et enfin les technologies de l’information (depuis au moins l’histoire naissante des communications câblées, et à travers tout le XX e siècle). Ces éléments constituent ce que le sociologue et économiste John B. Foster et l’historien des médias Robert W. McChesney appellent le capitalisme de surveillance 1 , c’est à dire le résultat de ces stratégies hégémoniques et dont la puissance de surveillance (et donc de contrôle) est assurée par les GAFAM (mais pas seulement). Il reste néanmoins un point crucial : la question des monopoles. Lorsqu’une économie a tendance à se retrouver sclérosée par quelques monopoles qui assurent à eux seuls de multiples secteurs d’activité (rappelons la multiplicité des activités de Google-Alphabet), et couvrent une grande part des capitaux financiers disponibles au détriment de la dynamique 2 économique , le problème de ces monopoles… c’est que l’économie politique à l’œuvre commence à se voir un peu trop bien. Quels que soient les partis au pouvoir aux États-Unis, c’est cette politique qui a toujours primé. L’effet de ce conditionnement se fait sentir y compris chez les plus audacieux intellectuels. Les plus prompts à critiquer les pratiques sournoises des GAFAM le feront toujours au nom des libertés des individus, au nom de la vie privée, au nom du droit, mais très peu d’entre eux finissent par reconnaître que, finalement, c’est une critique du capitalisme qu’il faut faire. Y compris, et surtout, une critique des principes politiques qui encouragent les stratégies hégémoniques. Lorsque le capitalisme et le libéralisme sont considérés comme les seuls systèmes capables de sauvegarder la démocratie, on en vient à des poncifs. Il me revient par exemple ce refrain stupide du milieu des années 1990, où l’on répétait à l’envi que là où McDonald s’installait, la paix s’installait. La démocratie a peu à peu été réduite à la somme des libertés que chacun peut exercer dans un marché capitaliste, c’est-à-dire un marché où les biens finissent toujours par être détenus par
quelques-uns, détenteurs de fait du pouvoir politique. Cette difficulté à penser la démocratie autrement qu’à travers le prisme libéral, est parfaitement illustrée par le récent ouvrage de Shoshana Zuboff3. Cette dernière démontre avec brio comment les stratégies des Gafam et consorts se révèlent être un hold-up sur nos vies et donc sur la démocratie. Elle décortique de manière méthodique la manière dont ces pratiques modifient nos comportements, modèlent le marché et nous privent de notre autonomie. Comprendre aussi : notre autonomie en tant qu’agents économiques, nos libertés de choix et de positionnement qui font le lit d’une certaine conception d’un marché redistributif fondé sur la concurrence et l’échange. En somme les monopoles cassent ce marché, brisent le contrat social (celui d’Adam Smith plus que celui de Rousseau) et brisent aussi l’équilibre libéral sur lequel est censé reposer un capitalisme qui dure, celui fondé sur la propriété privée, etc. Peu importent finalement les solutions alternatives, y compris libérales, que l’on puisse opposer à ces modèles : si S. 4 Zuboff ne parvient pas à aller au bout de sa démonstration , c’est qu’elle ne critique que les mécanismes économiques et techniques du capitalisme de surveillance et se refuse à admettre qu’il s’agit d’une économie politique dont il faudrait analyser les principes et les remplacer. Toutes ces considérations pourraient en rester au stade du débat d’idées. Ce n’est pas le cas. Les conceptions politiques qui ont permis justement l’émergence des monopoles américains du Web et leur hégémonie semblent avoir la peau bien plus dure qu’on ne le pensait. Cela alors même que leurs effets sur les libertés sont pointés du doigt. Tout se passe comme si la seule cause à défendre n’était qu’un credo libéral et pas n’importe lequel. La candidate du parti démocrate , résolument opposée à D.
Trump pour les prochaines élections présidentielles de 2020, publiait récemment par l’intermédiaire de son équipe sur la plateforme Medium.com un article au titre apparemment incisif : « Here’s how we can break up Big Tech« 5 (« Voici comment nous pouvons briser les Big tech »). La guerre au capitalisme de surveillance est-elle officiellement déclarée aux plus hauts niveaux des partis politiques ? Cette ancienne conseillère de B. Obama, dont les positions publiques et acerbes à l’encontre des requins de la finance mondiale lui ont valu une certaine renommée, a-t-elle trouvé le moyen de lutter contre les inégalités sociales et financières que créent les modèles économiques des Big Tech ? En fait, non. Son texte est l’illustration des principes énoncés ci-dessus même si le constat a le mérite d’être lucide : Les grandes entreprises technologiques d’aujourd’hui ont trop de pouvoir – trop de pouvoir sur notre économie, notre société et notre démocratie. Elles ont écrasé la concurrence, utilisé nos renseignements personnels à des fins lucratives et faussé les règles du jeu contre tout le monde. Ce faisant, elles ont nui aux petites entreprises et étouffé l’innovation. À lire Elizabeth Warren, les outils de régulation économique se résument en fait à l’organisation d’un espace concurrentiel libre et non faussé. Son argumentation est intéressante : si les grands monopoles en sont arrivés là, c’est parce, profitant d’un manque de régulation, ils ont roulé les consommateurs. Ces derniers seraient les dindons de la farce, et se retrouvent après tant d’années les instruments involontaires du pouvoir des GAFAM.
Elizabeth Warren, qui semble trop agressive au milliardaire Warren Buffet, veut-elle vraiment en finir avec les GAFAM ? Photo Edward Kimmel (CC BY-SA 2.0) La posture d’E. Warren est alors très confortable : elle réfute d’emblée l’idée que l’apparition de ces monopoles est le fruit d’une politique hégémonique (celle qui favorisait justement l’apparition de monopoles américains à l’échelle du globe) menée tant par les démocrates que par les conservateurs. Au contraire : c’est sur les individus uniquement, et à leur détriment, que se seraient bâti ces monopoles. Dès lors c’est en libérateur que le parti démocrate pourra intervenir, avec E. Warren à sa tête, pour défaire les liens des individus et leur rendre leur vie privée, leurs droits et, carrément, une vraie démocratie. Cela dit, comme nous l’avons vu, cette démocratie ne s’exerce
que dans un certain cadre, celui d’une concurrence maîtrisée et juste. Pour E. Warren, il est alors temps de « démanteler Amazon, Facebook et Google », d’une part en durcissant les règles anti-trust (en souvenir d’un âge d’or de la régulation contre les conglomérats) et, d’autre part, en distinguant l’utilitaire des plate-formes (les conditions techniques d’accès, les structures) et les services aux utilisateurs. Les entreprises qui posséderaient l’utilitaire (par exemple un fournisseur d’accès Internet) seraient alors réputées accomplir un service public (qui, au besoin, pourrait très bien être régulé à coup de subventions) et ne pourraient pas posséder les deux faces du modèle économique. Inversement, les entreprises qui assurent des services ne pourraient pas « coincer » les utilisateurs sur leur système. Il y a deux conclusions que l’on tire de cette proposition de E. Warren. La première, c’est qu’il est désormais acté que les entreprises de la Tech sont à même d’accomplir du service d’intérêt public : loin d’être nationalisées, au contraire, de nombreuses solutions pourront toujours être externalisées par les États en toute confiance (tout comme Kaa hypnotise le jeune Mowgli) puisque, en théorie, cela ne risquera plus de créer de distorsion de concurrence. L’autre conclusion est que ces nouvelles dispositions n’interviennent évidemment que sur le territoire des États-Unis : on joue là encore sur la régulation des multinationales sur le marché intérieur et dont les effets se feront sentir sur le marché extérieur. Ici il s’agit de multiplier les acteurs, créer des « petits » Gafam qui auront alors l’avantage de se présenter auprès de l’Europe comme des acteurs économiques si différents et à chaque fois pleinement compatibles avec les lois européennes ressenties comme protectionnistes. Il restera cependant que les technologies, elles, demeureront des émanations de l’American tech. Certes l’innovation sera moins bridée par les monopoles actuels, mais ces mini-gafam continueront d’assurer l’hégémonie tout en s’inscrivant de manière moins frontale sur les marchés mondiaux face à (ou avec) d’autres géants chinois.
Oui, parfois les libertés individuelles ont bon dos. On peut construire toutes sortes d’argumentations sur cette base, y compris celle qui consiste à rebattre les cartes et recommencer… Si vous voulez vous aussi jouer ce jeu de dupes, signez la pétition de la Team Warren. 1. J o h n B e l l a m y F o s t e r e t R o b e r t W . M c C h e s n e y , « Surveillance Capitalism. Monopoly-Finance Capital, the Military-Industrial Complex, and the Digital Age », Monthly Review, 07/2014, vol. 66.↩ 2. Par exemple, on peut comparer aux États-Unis le nombre de salariés employés par les firmes multinationales de la Silicon Valley, pour des sommets de capitaux financiers jamais atteins jusqu’à présent et le nombre de salariés que l’industrie automobile (plutôt nationale) employait jusqu’à un passé récent. Le résultat n’est n’est pas tant de pointer que les Big tech emploient moins de monde (et il y a tout de même une multitude de sous-traitants) mais qu’en réalité l’organisation de cette économie crée des inégalités salariales radicales où les plus qualifiés dans les nœuds monopolistiques concentrent toute la richesse. Les chômeurs laissés pour compte dans cette transformation de l’économie manufacturière en économie de service constituent un déséquilibre évident pour l’économie américaine et qui s’est traduit récemment en crise financière.↩ 3. S h o s h a n a Zuboff, Das Zeitalter Des ÜberwachungsKapitalismus, Frankfurt, Campus Verlag, 2018 ; Shoshana Zuboff, The Age of Surveillance Capitalism: The Fight for a Human Future at the New Frontier of Power, New York, Public Affairs, 2019.↩ 4. C’est un peu ce que montre Sébastien Broca dans une lecture critique du livre de S. Zuboff. S. Broca, « Surveiller et prédire », La vie des idées,
07/03/2019.↩ 5. Elizabeth Warren, « Here’s how we can break up Big Tech », Medium.com, 08/03/2019.↩ Khrys’presso du 1er avril 2019 Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière. Brave New World Les FAI en Australie ont commencé à censurer Internet, bloquant des sites Web pour avoir hébergé des images de l’attaque terroriste à Christchurch (developpez.com) En Corée du Sud, un passage piéton envoie des notifications aux « zombies du smartphone » (usbeketrica.com) L’épidémie de « smartphone zombies » n’est pas spécifique à la Corée du Sud. En France, par exemple, le nombre d’accidents mortels directement liés à un smartphone est passé de 4 % en 2010 à 17 % en 2015, et 1 Parisien sur 6 traverse la rue en utilisant son téléphone, selon une étude publiée en 2016.
Un aéroport chinois oriente les voyageurs en reconnaissant leur visage : utile ou terrifiant ? (numerama.com) Se trouver réprimandé par le système de crédit social en Chine est « pire qu’une peine de prison » (developpez.com) La Chine a commencé à cloner les chiens policiers pour qu’ils apprennent plus vite le métier (numerama.com) La Russie ordonne aux principaux fournisseurs de VPN de bloquer les sites interdits, continuant sa restriction de l’accès au contenu jugé inacceptable (securite.developpez.com) En Estonie, des robots vont bientôt rendre la justice (usbeketrica.com) En Finlande, des prisonniers dressent des intelligences artificielles (usbeketrica.com) Quels sont les députés européens qui ont le plus changé leurs votes au cours de la législature actuelle du PE ? (votewatch.eu – en anglais) Incompatibilité entre le RGPD et les cookie walls (francoischarlet.ch) Un projet de loi qui rétablirait la neutralité du Net progresse malgré les meilleurs efforts des télécoms pour le supprimer (motherboard.vice.com – en anglais)
« La neutralité d’Internet revient en force », a déclaré Evan Greer, directeur adjoint du groupe de consommateurs Fight for the Future, dans un communiqué. « Les politiciens apprennent peu à peu qu’ils ne peuvent plus s’en tirer en se faisant les larbins des grandes entreprises de télécommunications », a dit M. Greer. « Nous exploitons le pouvoir d’Internet pour le sauver, et tout législateur qui se mettra en travers de notre chemin sera bientôt confronté à la colère de ses électeurs, qui, dans leur grande majorité, veulent que les législateurs rétablissent ces protections fondamentales. La FTC demande aux FAI de divulguer toutes les informations qu’ils recueillent sur les utilisateurs et dans quel but (techcrunch.com – en anglais) La FTC ferme quatre groupes responsables de milliards d’appels illégaux type « robocalls » (cnet.com – en anglais) – cf aussi le Last Week Tonight sur le sujet des robocalls (hbo.com – en anglais) 55 % des Américains approuvent l’utilisation de la reconnaissance faciale à des fins de sécurité publique, mais cette technologie soulève des préoccupations en matière de protection de la vie privée. (bonus.usbeketrica.com – en anglais) Mais aussi étrange que cela puisse paraître, Google, Amazon et Microsoft ont également un intérêt financier à ce que des réglementations plus strictes soient mises en place. Toutes ces entreprises sont suffisamment grandes et célèbres pour faire l’objet d’une surveillance constante de la part du public, des organismes de réglementation et des groupes de défense des droits de la personne. Même en l’absence de réglementation, ils ne pourront jamais faire ce qu’ils veulent avec la reconnaissance faciale, car toute utilisation douteuse de la technologie sera tôt ou tard
repérée et générera de mauvaises relations publiques. Mais les plus petites entreprises pourraient tranquillement pousser leur propre logiciel de reconnaissance faciale et obtenir les accords lucratifs du gouvernement pendant qu’Amazon, Google et Microsoft en sont empêchés. Un cadre réglementaire garantirait que tout le monde doit respecter les mêmes règles et protégerait ces grandes entreprises de la concurrence déloyale. Le cofondateur de MoviePass utilise la reconnaissance faciale pour vous obtenir des billets de cinéma « Gratuits » mais à une condition : il faut regarder de la publicité pendant 20 minutes, en étant observé par son téléphone (indiewire.com – en anglais) Airbnb a un problème de caméra cachée (theatlantic.com – en anglais) Quand les robots de livraison envahiront les trottoirs (usbeketrica.com) Spécial directive Copyright Le Parlement européen se soumet aux lobbys des ayants droit (laquadrature.net) Copyright Directive : l’UE sauve les logiciels libres à
la dernière minute (fsfe.org) Le Parlement européen adopte la directive sur le droit d’auteur à l’heure du numérique (nextinpact.com) Les partisans de la directive Droit d’auteur, un lobbying jusqu’à saturation (nextinpact.com) Directive Droit d’auteur : 13 eurodéputés affirment s’être trompés lors du vote (nextinpact.com) – voir aussi : Les eurodéputés français se trompent souvent de vote au Parlement européen (lemonde.fr) Adoption de la directive droit d’auteur et de l’article 13 : et maintenant ? (numerama.com) Après le vote européen, la France veut rapidement intégrer la directive droit d’auteur dans la loi (numerama.com) Filtrage : l’article 13 redouté arrivera en France via la loi audiovisuelle dès cet été (numerama.com)
Spécial France La couverture 4G du territoire atteint 65% en 2018 selon l’Arcep (zdnet.fr) Pourquoi des téléviseurs avec box SFR s’allument par défaut sur BFM TV (selon Altice) (numerama.com) Les panneaux de pub du métro tracent-ils les téléphones des usagers ? (liberation.fr) 648 piscines olympiques de déchets nucléaires en France (liberation.fr) Publications scientifiques : la justice française ordonne aux FAI de bloquer Sci-Hub et LibGen à la demande des éditeurs Elsevier et Springer Nature (developpez.com) Le tribunal estime que s’ils ne sont pas responsables du contenu auquel ils donnent accès, « les FAI et les hébergeurs sont tenus de contribuer à la lutte contre les contenus illicites, et plus particulièrement, contre la contrefaçon de droits d’auteur et droits voisins, dès lors qu’ils sont les mieux à même de mettre fin à ces atteintes ». Le TGI précise également qu’aucun texte ne s’oppose à ce que les mesures à mettre en oeuvre pour mettre fin à ces violations soient supportées par les intermédiaires techniques, c’est-à-dire ici les FAI, quand bien même ces mesures sont susceptibles de représenter pour eux un coût important. Donc le coût de la mise en oeuvre des mesures nécessaires restera à la charge des FAI. […] La réalité est qu’après de tels blocages, il y a toujours des sites miroirs qui réapparaissent. Conscients de cela, les deux éditeurs avaient demandé que les FAI surveillent la réapparition de sites miroirs et les bloquent systématiquement ; une demande que le tribunal ne leur a pas accordée. Cela veut dire que si, après avoir été bloqués, Sci-Hub et LibGen réapparaissent sous d’autres domaines, les éditeurs
devront à nouveau se rendre au tribunal pour actualiser leur liste de domaines à bloquer. Ce qui prendra du temps et permettra aux sites ciblés de rester en ligne presque sans interruption. Voir aussi : Les paywalls bloquent le progrès scientifique. La recherche devrait être ouverte à tous (theguardian.com – en anglais) «Pourquoi ne tiennent-ils pas compte de ce qu’on dit, nous les profs ?» (liberation.fr) La future loi «cyberhaine» fait tiquer le Conseil national du numérique (liberation.fr) Le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire contre lundimatin (lundi.am) Le gouvernement mobilise la lutte anti-terroriste contre les activistes du climat (reporterre.net) Le rapport annuel de la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté se demande si la France ne serait pas prise d’une frénésie d’enfermement (lemonde.fr) Spécial Gilets Jaunes Acte XIX : est-il vrai que les amendes de 135 euros dressées contre les manifestants ne sont pas légales ? (liberation.fr) A Nice, une manifestante blessée de son plein gré (telerama.fr) Droit de manifester : le gouvernement persiste dans la logique de l’escalade (amnesty.fr) Quiétude Emmanuel Macron ? (affordance.info) Armées : quand la communication politique abîme le moral des troupes (et celui des Français) (theconversation.com)
Spécial GAFAM « Entre les GAFA, la confrontation prend de plus en plus d’ampleur » (lemonde.fr) En bannissant les publicités de VPN en Chine, Google s’assure un avenir (plus) radieux dans l’Empire du Milieu (cyberguerre.numerama.com) Apple scénarise son entrée en force dans les contenus (liberation.fr) Des documents internes montrent qu’Apple est capable de mettre en œuvre la législation sur le droit à la réparation (motherboard.vice.com – en anglais) Facebook a secrètement exploré la possibilité de construire des drones de la taille d’un oiseau pour transporter les données vers des personnes ayant de mauvaises connexions Internet. (businessinsider.com – en anglais)
Facebook en lutte contre l’interdiction belge de traquer les utilisateurs (et même les non-utilisateurs) (bloomberg.com – en anglais) Zuckerberg détient plus de données sur les activités en ligne des gens que n’importe qui d’autre dans le monde, selon un ex-cadre de Facebook (developpez.com) Facebook déploie son dispositif anti-ingérence pour les élections européennes (letemps.ch) Pourquoi Microsoft est pour une augmentation majeure des taxes la concernant – ainsi qu’Amazon (geekwire.com – en anglais) Attentat en Nouvelle-Zélande : Microsoft appelle les géants du web à collaborer pour censurer la violence (numerama.com) Les autres lectures de la semaine Au nom de la lutte anti-terroriste, l’Europe menace de censurer Internet (reporterre.net) Désinformation, le rapport – 3 (framablog.org) Comment Internet est devenu un espace politique en dispute (lvsl.fr) Câbles sous-marins d’Internet : « Les risques de tension
sont extrêmement réels » (usbeketrica.com) J’ai toujours regretté que l’Europe n’ait pas mis en place une politique de localisation des données sur son territoire, en matière de souveraineté d’une part et de sécurité de l’autre, cela aurait du sens. En France, 80% du trafic Internet qui est généré part aux Etats- Unis, c’est considérable. L’économie européenne est dépendante de ces flux. Ce n’est pas seulement l’usage de la vidéo, ce sont les données de toutes nos entreprises, stockées dans le cloud. Si demain nous perdons le lien avec les Etats-Unis, c’est l’accès à toutes ces données qui serait compromis.[…] aujourd’hui ce sont les GAFA qui investissent. Sur l’Atlantique, il y a 3 ans la part de marché des GAFA était de 5 %. Aujourd’hui, elle est supérieure à 50 %, et on pense que d’ici 3 ans elle sera de 90 %. Pour les GAFA, c’est le jackpot. D’abord parce que les câbles ne sont pas régulés. La neutralité du net ne s’applique pas aux câbles sous-marins, elle ne s’applique pas aux réseaux internationaux. L’autorité européenne de régulation pourrait cependant décider que les câbles européens qui arrivent en Europe doivent respecter un certain nombre de règles, mais ce n’est pas à l’ordre du jour. « Nos » informations personnelles ne parlent pas de nous, mais de nos relations aux autres (theconversation.com) Face aux panneaux publicitaires numériques, nous devons affirmer la dimension collective des données personnelles (maisouvaleweb.fr) Les logiques algorithmiques de la rencontre en ligne sont moins sophistiquées que les logiques sociales (internetactu.net) Benoît Thieulin : « Les plates-formes numériques se pensent comme de nouveaux Etats » (alternatives- economiques.fr)
Casser les GAFAM… et recommencer (golb.statium.link) Rencontre avec Paula Berman, une « hacktiviste » brésilienne qui cherche à réinventer les règles de la vie démocratique en faisant le lien entre cryptographie et civic tech (usbeketrica.com) Sans les femmes, il n’y aurait pas d’Internet (et on ne le sait pas assez) (telerama.fr) Quand Charles Babbage jouait aux échecs avec le Turc Mécanique (spectrum.ieee.org – en anglais) Les BDs/graphiques/photos de la semaine Sagesse Fragile Pull Expérimentation Consommation Privatisation Che Possible Code contents Brain areas Upload filter & torrent file Vilain petit canard (cereales.lapin.org) Les vidéos/podcasts de la semaine Benjamin Sonntag sur France Info à propos du vote sur la directive droit d’auteur (video.lqdn.fr) Lionel Maurel : « Les industries culturelles demandent les miettes de la surveillance de masse des Européens » (video.lqdn.fr) cf aussi : Droits d’auteur : ce qui change avec la nouvelle directive européenne (franceculture.fr) L’impact spatial et énergétique des data-centers (video.passageenseine.fr, par les personnes qui ont
dirigé le rapport (iau-idf.fr) dont parlait TV5Monde la semaine dernière ) Stéphane Bortzmeyer – DNS (2018) (peertube.parleur.net) Juan Branco explose tout le Système Macron (2019) (lien YouTube) Les français aspirent à une dictature… (franceculture.fr) The Expert (Short Comedy Sketch) (peertube.social) Les autres trucs chouettes de la semaine L’utilisation de logiciels libres, un critère du label « numérique inclusif » (zdnet.fr) Un positionnement clair de l’association Framasoft (framablog.org) Le projet Les sans pagEs est né du besoin de combler le fossé des genres sur Wikipedia : en octobre 2018, Wikipédia en français compte 547 599 biographies d’hommes, contre 94 021 de femmes, soit seulement 17,3%. Lancement de l’Observatoire de la publicité sexiste (antipub.org) Comment illustrer une publication ou un site portant sur la technologie, la science ou le business de manière inclusive ? (numerama.com) Après « Faire Ensemble », des Métacartes « Degooglisons Internet » (metacartes.cc) Caliopen : l’heure de la version bêta a sonné (toolinux.com) Les Furtifs : Alain Damasio à l’assaut de la société de surveillance (usbeketrica.com) Contemplez votre mortalité devant l’ultime panorama martien d’Opportunity (motherboard.vice.com) Wikimedia Commons dévoile ses plus belles photos de 2018 (numerama.com)
Avec de nouveau un gros merci à Goofy pour son coup de patte au niveau des illustrations !!! Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog. Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys). Désinformation, le rapport – 3 La traduction suivante est la suite et la continuation du travail entamé la semaine dernière sur le long rapport final élaboré par le comité « Digital, Culture, Media and Sport » du Parlement britannique, publié le 14 février dernier, sur la désinformation et la mésinformation. Maintenant que le décor est posé, on aborde les questions
réglementaires. Après avoir clairement défini ce qu’est une fake news, que nous avons traduit par « infox » et que les auteurs regroupent sous le terme plus précis de « désinformation », il est question de définir une nouvelle catégorie de fournisseurs de service pour caractériser leur responsabilité dans les préjudices faits à la société ainsi que des solutions pour protéger le public et financer l’action des structures de contrôle. Le groupe Framalang a en effet entrepris de vous communiquer l’intégralité du rapport en feuilleton suivant l’avancement de la traduction. Vous trouverez le texte intégral en suivant ce lien vers le PDF original (3,8 Mo). La traduction est effectuée par le groupe Framalang, avec l’aide de toutes celles et ceux qui veulent bien participer et pour cet opus : Traducteurs : Khrys, Lumibd, Maestox, simon, Fabrice, serici, Barbara, Angie, Fabrice, simon La réglementation, le rôle, la définition et la responsabilité juridique des entreprises de technologie Définitions 11. Dans notre rapport intermédiaire, nous avons désavoué le terme d’« infox » puisqu’il a « pris de nombreux sens, notamment une description de toute affirmation qui n’est pas appréciée ou en accord avec l’opinion du lecteur » et nous avons recommandé à la place les termes de « mésinformation » ou de « désinformation ». Avec ces termes viennent « des
directives claires à suivre pour les compagnies, organisations et le Gouvernement » liées à « une cohérence partagée de la définition sur les plateformes, qui peuvent être utilisées comme la base de la régulation et de l’application de la loi »1. 12. Nous avons eu le plaisir de voir que le Gouvernement a accepté notre point de vue sur le fait que le terme « infox » soit trompeur, et ait essayé à la place d’employer les termes de « désinformation » et de « mésinformation ». Dans sa réponse, le gouvernement a affirmé : Dans notre travail, nous avons défini le mot « désinformation » comme la création et le partage délibérés d’informations fausses et/ou manipulées dans le but de tromper et d’induire en erreur le public, peu importe que ce soit pour porter préjudice, ou pour des raisons politiques, personnelles ou financières. La « mésinformation » se réfère au partage par inadvertance de 2 fausses informations . 13. Nous avons aussi recommandé une nouvelle catégorie d’entreprises de réseaux sociaux, qui resserrent les responsabilités des entreprises de technologie et qui ne sont pas forcément « une plateforme » ou un « éditeur ». le gouvernement n’a pas du tout répondu à cette recommandation, mais Sharon White, Pdg de Of.com a qualifié cette catégorie de « très soignée » car les « plateformes ont vraiment des responsabilités, même si elles ne génèrent pas les contenus, concernant ce qu’elles hébergent et promeuvent sur leur site ».3. 14. Les entreprises de réseaux sociaux ne peuvent se cacher derrière le fait qu’elles seraient simplement une plateforme, et maintenir qu’elles n’ont elles-mêmes aucune responsabilité sur la régulation du contenu de leurs sites. Nous répétons la recommandation de notre rapport provisoire, qui stipule qu’une
nouvelle catégorie d’entreprises technologiques doit être définie qui renforcera les responsabilités des entreprises technologiques et qui ne sont pas forcément « une plateforme » ou un « éditeur ». Cette approche voudrait que les entreprises de technologie prennent leur responsabilité en cas de contenu identifié comme étant abusif après qu’il a été posté par des utilisateurs. Nous demandons au gouvernement de prendre en compte cette nouvelle catégorie de compagnies technologiques dans son livre blanc qui va paraître prochainement. Préjudices et réglementation en ligne 15. Plus tôt dans le cadre de notre enquête, nous avons écouté le témoignage de Sandy Parakilas et Tristan Harris, qui étaient tous deux à l’époque impliqués dans le Center for Human Technology, situé aux États-Unis. Le centre a compilé un « Recueil de Préjudices » qui résume les « impacts négatifs de la technologie qui n’apparaissent pas dans les bilans des entreprises, mais dans le bilan de la société ».4 Le Recueil de Préjudices contient les impacts négatifs de la technologie, notamment la perte d’attention, les problèmes de santé mentale, les confusions sur les relations personnelles, les risques qui pèsent sur nos démocraties et les problèmes qui touchent les enfants.5. 16. La prolifération des préjudices en ligne est rendu plus dangereuse si on axe des messages spécifiques sur des individus suite à des « messages micro-ciblés », qui jouent souvent sur les opinions négatives qu’ont les gens d’eux-mêmes et des autres et en les déformant. Cette déformation est rendue encore plus extrême par l’utilisation de « deepfakes » 6 audio et vidéos qui sonnent et ressemblent à une personne existante tenant des propos qui ne lui appartiennent pas. 7 Comme nous l’avons dit dans notre rapport intermédiaire, la détection de ces exemples ne deviendra que plus complexe et plus difficile à démasquer au fur et à mesure de la
8 sophistication des logiciels . 17. Le ministre de la santé, le député Hon Matthew Hancock, a récemment mis en garde les sociétés informatiques, notamment Facebook, Google et Twitter, qu’elles étaient en charge de la suppression des contenus inappropriés, blessants suite à la mort de Molly Russel, qui à 14 ans s’est suicidée en novembre 2017. Son compte Instagram contenait du contenu en lien avec la dépression, l’auto-mutilation et le suicide. Facebook, propriétaire d’Instagram, s’est déclaré profondément désolé de l’affaire.9 Le directeur d’Instagram, Adam Mosseri, a rencontré le secrétaire de la Santé début février 2019 et déclaré qu’Instagram n’était pas « dans une situation où il était nécessaire de traiter le problème de l’auto-mutilation et du suicide » et que cela revenait à arbitrer entre « agir 10 maintenant et agir de manière responsable » 18. Nous relevons également que dans son discours du 5 février 2019, la députée Margot James, ministre du numérique dans le département du numérique, de la culture, des médias et du sport a exprimé ses craintes : La réponse des principales plateformes est depuis trop longtemps inefficace. Il y a eu moins de 15 chartes de bonne conduite mises en place volontairement depuis 2008. Il faut maintenant remettre absolument en cause un système qui n’a jamais été suffisamment encadré par la loi. Le livre blanc, que le DCMS produit en collaboration avec le ministère de l’intérieur sera suivi d’une consultation durant l’été et débouchera sur des mesures législatives permettant de s’assurer que les plateformes supprimeront les contenus illégaux et privilégieront la protection des utilisateurs, particulièrement des enfants, adolescents et 11 adultes vulnérables.
Le nouveau Centre pour des algorithmes et des données éthiques 19. Comme nous l’avons écrit dans notre rapport intermédiaire, les sociétés fournissant des réseaux sociaux tout comme celles fournissant des moteurs de recherche utilisent des algorithmes ou des séquences d’instructions pour personnaliser les informations et autres contenus aux utilisateurs. Ces algorithmes sélectionnent le contenu sur la base de facteurs tels que l’activité numérique passée de l’utilisateur, ses connexions sociales et leur localisation. Le modèle de revenus des compagnies d’Internet repose sur les revenus provenant de la vente d’espaces publicitaires et parce qu’il faut faire du profit, toute forme de contenu augmentant celui-ci sera priorisé. C’est pourquoi les histoires négatives seront toujours mises en avant par les algorithmes parce qu’elles sont plus fréquemment partagées que les histoires positives.12 20. Tout autant que les informations sur les compagnies de l’internet, les informations sur leurs algorithmes doivent être plus transparentes. Ils comportent intrinsèquement des travers, inhérents à la façon dont ils ont été développés par les ingénieurs ; ces travers sont ensuite reproduits diffusés et renforcés. Monica Bickert, de Facebook, a admis « que sa compagnie était attentive à toute forme de déviance, sur le genre, la race ou autre qui pourrait affecter les produits de l’entreprise et que cela inclut les algorithmes ». Facebook devrait mettre plus d’ardeur à lutter contre ces défauts dans les algorithmes de ses ingénieurs pour éviter leur propagation. 13 21. Dans le budget de 2017, le Centre des données Ethiques et de l’innovation a été créé par le gouvernement pour conseiller sur « l’usage éthique, respectueux et innovant des données, incluant l’IA ». Le secrétaire d’état a décrit son rôle ainsi:
Le Centre est un composant central de la charte numérique du gouvernement, qui définit des normes et des règles communes pour le monde numérique. Le centre permettra au Royaume-Uni de mener le débat concernant l’usage correct des données et de l’intelligence artificielle.14 22. Le centre agira comme un organisme de recommandation pour le gouvernement et parmi ses fonctions essentielles figurent : l’analyse et l’anticipation des manques en termes de régulation et de gestion; définition et orchestration des bonnes pratiques, codes de conduites et standards d’utilisations de l’Intelligence Artificielle; recommandation au gouvernement sur les règles et actions réglementaires à mettre en place en relation avec l’usage responsable et 15 innovant des données. 23. La réponse du gouvernement à notre rapport intermédiaire a mis en lumière certaines réponses à la consultation telle que la priorité de l’action immédiate du centre, telle que « le monopole sur la donnée, l’utilisation d’algorithme prédictifs dans la police, l’utilisation de l’analyse des données dans les campagnes politiques ainsi que l’éventualité de discrimination automatisée dans les décisions de recrutement ». Nous nous félicitons de la création du Centre et nous nous réjouissons à la perspective d’en recueillir les fruits de ses prochaines travaux. La loi en Allemagne et en France 24. D’autres pays ont légiféré contre le contenu malveillant sur les plateformes numériques. Comme nous l’avons relevé dans notre rapport intermédiaire, les compagnies d’internet en Allemagne ont été contraintes initialement de supprimer les propos haineux en moins de 24 heures. Quand cette auto- régulation s’est montrée inefficace, le gouvernement allemand a voté le Network Enforcement Act, aussi connu sous le nom de NetzDG, qui a été adopté en janvier 2018. Cette loi force les
compagnies technologiques à retirer les propos haineux de leurs sites en moins de 24 heures et les condamne à une amende de 20 millions d’euros si ces contenus ne sont pas retirés16. Par conséquent, un modérateur sur six de Facebook travaille désormais en Allemagne, ce qui prouve bien que la loi peut être efficace.17. 25. Une nouvelle loi en France, adoptée en novembre 2018 permet aux juges d’ordonner le retrait immédiat d’articles en ligne s’ils estiment qu’ils diffusent de la désinformation pendant les campagnes d’élection. La loi stipule que les utilisateurs doivent recevoir « d’informations qui sont justes, claires et transparentes » sur l’utilisation de leurs données personnelles, que les sites doivent divulguer les sommes qu’elles reçoivent pour promouvoir des informations, et la loi autorise le CSA français à pouvoir suspendre des chaînes de télévision contrôlées ou sous influence d’un état étranger, s’il estime que cette chaîne dissémine de manière délibérée des fausses informations qui pourraient affecter l’authenticité du vote. Les sanctions imposées en violation de la loi comprennent un an de prison et une amende de 75000 18 euros . Le Royaume-Uni 26. Comme la Commissaire de l’Information du Royaume-Uni, Elisabeth Denham, nous l’a expliqué en novembre 2018, il y a une tension entre le modèle économique des médias sociaux, centré sur la publicité, et les droits humains tels que la protection de la vie privée. « C’est notre situation actuelle et il s’agit d’une tâche importante à la fois pour les régulateurs et le législateur de s’assurer que les bonnes exigences, la surveillance et sanctions sont en place » 19 . Elle nous a dit que Facebook, par exemple, devrait en faire plus et devrait faire « l’objet d’une régulation et d’une surveillance plus stricte »20. Les activités de Facebook dans
la scène politique sont en augmentation; l’entreprise a récemment lancé un fil d’actualités intitulé « Community Actions » avec une fonctionnalité de pétition pour, par exemple, permettre aux utilisateurs de résoudre des problèmes politiques locaux en créant ou soutenant des pétitions. Il est difficile de comprendre comment Facebook sera capable d’auto- réguler une telle fonctionnalité; plus le problème local va être sujet à controverse et litiges, plus il entrainera de l’engagement sur Facebook et donc de revenus associés grâce 21 aux publicités . Facebook et la loi 27. En dépit de toutes les excuses formulées par Facebook pour ses erreurs passées, il semble encore réticent à être correctement surveillé. Lors de la session de témoignage verbal au « Grand Comité International », Richard Alland, vice-président des solutions politiques de Facebook, a été interrogé à plusieurs reprises sur les opinions de Facebook sur la régulation, et à chaque fois il a déclaré que Facebook était très ouvert au débat sur la régulation, et que travailler ensemble avec les gouvernements seraient la meilleure option possible : « Je suis ravi, personnellement, et l’entreprise est vraiment engagé, de la base jusqu’à notre PDG — il en a parlé en public — à l’idée d’obtenir le bon type de régulation afin que l’on puisse arrêter d’être dans ce mode de confrontation. Cela ne sert ni notre société ni nos utilisateurs. Essayons de trouver le juste milieu, où vous êtes d’accord pour dire que nous faisons un travail suffisamment bon et où vous avez le pouvoir de nous tenir responsable si nous ne le faisons pas, et nous comprenons quel le travail que nous avons à faire. C’est la partie régulation22. » 28. Ashkan Soltani, un chercheur et consultant indépendant, et
ancien Responsable Technologique de la Commission Fédérale du Commerce des USA 23, a questionné la volonté de Facebook à être régulé. À propos de la culture interne de Facebook, il a dit : « Il y a ce mépris — cette capacité à penser que l’entreprise sait mieux que tout le monde et tous les législateurs » 24. Il a discuté de la loi californienne pour la vie privée des 25 consommateurs que Facebook a supporté en public, mais a 26 combattu en coulisses . 29. Facebook ne semble pas vouloir être régulé ou surveillé. C’est considéré comme normal pour les ressortissants étrangers de témoigner devant les comités. En effet, en juin 2011, le 27 Comité pour la Culture, les Médias et le Sport a entendu le témoignage de Rupert Murdoch lors de l’enquête sur le hacking 28 29 téléphonique et le Comité au Trésor a récemment entendu le 30 témoignage de trois ressortissants étrangers . En choisissant de ne pas se présenter devant le Comité et en choisissant de ne pas répondre personnellement à aucune de nos invitations, Mark Zuckerberg a fait preuve de mépris envers à la fois le parlement du Royaume-Uni et le « Grand Comité International », qui compte des représentants de neufs législatures dans le monde. 30. La structure managériale de Facebook est opaque pour les personnes extérieures, et semble conçue pour dissimuler la connaissance et la responsabilité de certaines décisions. Facebook a pour stratégie d’envoyer des témoins dont ils disent qu’ils sont les plus adéquats, mais qui n’ont pas été suffisamment informés sur les points cruciaux, et ne peuvent répondre ou choisissent de ne pas répondre à nombre de nos questions. Ils promettent ensuite d’y répondre par lettre, qui —sans surprise— échouent à répondre à toutes nos questions. Il ne fait pas de doute que cette stratégie est délibérée.
Régulateurs britanniques existants 31. Au Royaume-Uni, les principales autorités compétentes — 31 Ofcom, l’autorité pour les standards publicitaires , le 32 bureau du commissaire à l’information , la commission électorale 33 et l’autorité pour la compétition et le marché 34 — ont des responsabilités spécifiques sur l’utilisation de contenus, données et comportements. Quand Sharon White, responsable de Ofcom, est passé devant le comité en octobre 2018, après la publication de notre rapport intermédiaire, nous lui avons posé la question si leur expérience comme régulateur de diffusion audiovisuelle pourrait être utile pour réguler les contenus en ligne. Elle a répondu : « On a essayé d’identifier quelles synergies seraient possibles. […] On a été frappé de voir qu’il y a deux ou trois domaines qui pourraient être applicable en ligne. […] 35 Le fait que le Parlement ait mis en place des standards, ainsi que des objectifs plutôt ambitieux, nous a semblé très important, mais aussi durable avec des objectifs clés, que ce soit la protection de l’enfance ou les préoccupations autour des agressions et injures. Vous pouvez le voir comme un processus démocratique sur quels sont les maux que l’on croit en tant que société être fréquent en ligne. L’autre chose qui est très importante dans le code de diffusion audiovisuelle est qu’il explicite clairement le fait que ces choses peuvent varier au cours du temps comme la notion d’agression se modifie et les inquiétudes des consommateurs changent. La mise en œuvre est ensuite déléguée à un régulateur indépendant qui traduit en pratique ces objectifs de standards. Il y a aussi la transparence, le fait que l’on publie nos décisions dans le cas d’infractions, et que tout soit accessible au public. Il y a la surveillance de nos 36 décisions et l’indépendance du jugement ».
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