Elle veut casser les GAFAM vraiment ? - Framablog

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Elle veut casser les GAFAM vraiment ? - Framablog
Elle veut casser les GAFAM…
vraiment ?
Le rejet des GAFAM fait son chemin y compris dans leur fief,
aux U.S.A, pourrait-on se réjouir en constatant par exemple
que Google est mis à nu (article en anglais) par le Comité
judiciaire du Sénat des États-Unis.

Il est même question à la fin de cet article de protéger par
des lois et d’encadrer plus strictement les usages numériques
des mineurs. Quelque chose serait-il en train de changer au
pays de la libre-entreprise ?

On pourrait de même se réjouir de voir Elizabeth Warren, une
candidate démocrate à la présidence et farouche opposante de
Trump, publier un appel récent au titre ravageur et
programmatique : « Voici comment nous pouvons briser les Big
tech ».

Cependant, comme va l’exposer de façon documentée Christophe
Masutti ci-dessous, il y a loin de la critique des GAFAM
qu’elle articule à la remise en question du système libéral
qui pourrait en être la conséquence logique…

Casser les GAFAM… et recommencer
par Christophe Masutti
Dans les années 1970, l’économiste américaine Susan Strange
théorisait l’économie politique des États-Unis relativement
aux intérêts de marché. Elle démontrait dans ses travaux
comment la stabilité économique des États-Unis ne dépendait
pas du seul pilier des intérêts territoriaux assurés par leur
puissance militaro-financière.
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Les jeux se jouaient à la fois sur les marchés intérieurs et
extérieurs : conditions d’accès aux marchés, production de
produits     financiers,     investissements     et   firmes
multinationales. Elle identifiait plusieurs couches
structurelles sur lesquelles devait reposer toute velléité
impérialiste, c’est-à-dire la construction de plusieurs types
d’hégémonies. La plupart d’entre elles dépendaient à la fois
de grandes entreprises et de l’organisation des créneaux
économiques que le pouvoir politique américain était capable
de dessiner (imposer) sur le globe.

Aujourd’hui, nous connaissons bien évidemment nombre de ces
structures et en particulier les structures de la
connaissance, celles qui reposent pour l’essentiel sur les
technologies de l’information et de la communication et qui
sont maîtrisées en grande partie, voire en totalité, par des
firmes américaines. Pour ce qui concerne Internet : Google-
Alphabet, Amazon, AT&T, Microsoft, etc. (du côté chinois, le
même jeu est en train de se dérouler et il importe de ne pas
le perdre de vue).

Les processus qui ont permis l’émergence de ces firmes
hégémoniques ne se résument pas uniquement aux pratiques de
ces dernières. Leur manque d’éthique, l’organisation savante
du vol de nos données personnelles, les implications de cette
industrie de la data sur nos libertés d’expression, nos vies
privées et la démocratie, ne sont pas la recette unique de
leur position dominatrice.

On pourrait éternellement disserter sur ces pratiques,
démontrer à quel point elles sont néfastes. Il n’en demeure
pas moins que si la situation est telle, c’est parce que des
stratégies structurelles sont à l’œuvre. Il s’agit de
plusieurs pouvoirs : l’état de guerre permanent orchestré par
les États-Unis depuis la fin de la Guerre du Vietnam, la
transformation ultra-technologique de l’économie financière,
les contraintes de marché imposées aux peuples (et pas
seulement ceux des pays défavorisés) par des accords iniques,
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et enfin les technologies de l’information (depuis au moins
l’histoire naissante des communications câblées, et à travers

tout le XX e siècle). Ces éléments constituent ce que le
sociologue et économiste John B. Foster et l’historien des
médias Robert W. McChesney appellent le capitalisme de

surveillance 1 , c’est à dire le résultat de ces stratégies
hégémoniques et dont la puissance de surveillance (et donc de
contrôle) est assurée par les GAFAM (mais pas seulement).

Il reste néanmoins un point crucial : la question des
monopoles. Lorsqu’une économie a tendance à se retrouver
sclérosée par quelques monopoles qui assurent à eux seuls de
multiples secteurs d’activité (rappelons la multiplicité des
activités de Google-Alphabet), et couvrent une grande part des
capitaux financiers disponibles au détriment de la dynamique
          2
économique , le problème de ces monopoles… c’est que l’économie
politique à l’œuvre commence à se voir un peu trop bien.

Quels que soient les partis au pouvoir aux États-Unis, c’est
cette politique qui a toujours primé. L’effet de ce
conditionnement se fait sentir y compris chez les plus
audacieux intellectuels. Les plus prompts à critiquer les
pratiques sournoises des GAFAM le feront toujours au nom des
libertés des individus, au nom de la vie privée, au nom du
droit, mais très peu d’entre eux finissent par reconnaître
que, finalement, c’est une critique du capitalisme qu’il faut
faire. Y compris, et surtout, une critique des principes
politiques qui encouragent les stratégies hégémoniques.

Lorsque le capitalisme et le libéralisme sont considérés comme
les seuls systèmes capables de sauvegarder la démocratie, on
en vient à des poncifs. Il me revient par exemple ce refrain
stupide du milieu des années 1990, où l’on répétait à l’envi
que là où McDonald s’installait, la paix s’installait. La
démocratie a peu à peu été réduite à la somme des libertés que
chacun peut exercer dans un marché capitaliste, c’est-à-dire
un marché où les biens finissent toujours par être détenus par
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quelques-uns, détenteurs de fait du pouvoir politique.

Cette difficulté à penser la démocratie autrement qu’à travers
le prisme libéral, est parfaitement illustrée par le récent

ouvrage de Shoshana Zuboff3. Cette dernière démontre avec brio
comment les stratégies des Gafam et consorts se révèlent être
un hold-up sur nos vies et donc sur la démocratie. Elle
décortique de manière méthodique la manière dont ces pratiques
modifient nos comportements, modèlent le marché et nous
privent de notre autonomie. Comprendre aussi : notre autonomie
en tant qu’agents économiques, nos libertés de choix et de
positionnement qui font le lit d’une certaine conception d’un
marché redistributif fondé sur la concurrence et l’échange. En
somme les monopoles cassent ce marché, brisent le contrat
social (celui d’Adam Smith plus que celui de Rousseau) et
brisent aussi l’équilibre libéral sur lequel est censé reposer
un capitalisme qui dure, celui fondé sur la propriété privée,
etc.

Peu importent finalement les solutions alternatives, y compris
libérales, que l’on puisse opposer à ces modèles : si S.
                                                            4
Zuboff ne parvient pas à aller au bout de sa démonstration ,
c’est qu’elle ne critique que les mécanismes économiques et
techniques du capitalisme de surveillance et se refuse à
admettre qu’il s’agit d’une économie politique dont il
faudrait analyser les principes et les remplacer.

Toutes ces considérations pourraient en rester au stade du
débat d’idées. Ce n’est pas le cas. Les conceptions politiques
qui ont permis justement l’émergence des monopoles américains
du Web et leur hégémonie semblent avoir la peau bien plus dure
qu’on ne le pensait. Cela alors même que leurs effets sur les
libertés sont pointés du doigt. Tout se passe comme si la
seule cause à défendre n’était qu’un credo libéral et pas
n’importe lequel.

La candidate du parti démocrate , résolument opposée à D.
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Trump pour les prochaines élections présidentielles de 2020,
publiait récemment par l’intermédiaire de son équipe sur la
plateforme Medium.com un article au titre apparemment

incisif : « Here’s how we can break up Big Tech« 5 (« Voici
comment nous pouvons briser les Big tech »). La guerre au
capitalisme de surveillance est-elle officiellement déclarée
aux plus hauts niveaux des partis politiques ? Cette ancienne
conseillère de B. Obama, dont les positions publiques et
acerbes à l’encontre des requins de la finance mondiale lui
ont valu une certaine renommée, a-t-elle trouvé le moyen de
lutter contre les inégalités sociales et financières que
créent les modèles économiques des Big Tech ?

En fait, non. Son texte est l’illustration des principes
énoncés ci-dessus même si le constat a le mérite d’être
lucide :

 Les grandes entreprises technologiques d’aujourd’hui ont trop
 de pouvoir – trop de pouvoir sur notre économie, notre
 société et notre démocratie. Elles ont écrasé la concurrence,
 utilisé nos renseignements personnels à des fins lucratives
 et faussé les règles du jeu contre tout le monde. Ce faisant,
 elles ont nui     aux   petites   entreprises   et   étouffé
 l’innovation.

À lire Elizabeth Warren, les outils de régulation économique
se résument en fait à l’organisation d’un espace concurrentiel
libre et non faussé. Son argumentation est intéressante : si
les grands monopoles en sont arrivés là, c’est parce,
profitant d’un manque de régulation, ils ont roulé les
consommateurs. Ces derniers seraient les dindons de la farce,
et se retrouvent après tant d’années les instruments
involontaires du pouvoir des GAFAM.
Elizabeth   Warren,   qui   semble   trop   agressive   au
   milliardaire Warren Buffet, veut-elle vraiment en finir
   avec les GAFAM ? Photo Edward Kimmel (CC BY-SA 2.0)

La posture d’E. Warren est alors très confortable : elle
réfute d’emblée l’idée que l’apparition de ces monopoles est
le fruit d’une politique hégémonique (celle qui favorisait
justement l’apparition de monopoles américains à l’échelle du
globe) menée tant par les démocrates que par les
conservateurs. Au contraire : c’est sur les individus
uniquement, et à leur détriment, que se seraient bâti ces
monopoles. Dès lors c’est en libérateur que le parti démocrate
pourra intervenir, avec E. Warren à sa tête, pour défaire les
liens des individus et leur rendre leur vie privée, leurs
droits et, carrément, une vraie démocratie.

Cela dit, comme nous l’avons vu, cette démocratie ne s’exerce
que dans un certain cadre, celui d’une concurrence maîtrisée
et juste. Pour E. Warren, il est alors temps de « démanteler
Amazon, Facebook et Google », d’une part en durcissant les
règles anti-trust (en souvenir d’un âge d’or de la régulation
contre les conglomérats) et, d’autre part, en distinguant
l’utilitaire des plate-formes (les conditions techniques
d’accès, les structures) et les services aux utilisateurs. Les
entreprises qui posséderaient l’utilitaire (par exemple un
fournisseur d’accès Internet) seraient alors réputées
accomplir un service public (qui, au besoin, pourrait très
bien être régulé à coup de subventions) et ne pourraient pas
posséder les deux faces du modèle économique. Inversement, les
entreprises qui assurent des services ne pourraient pas «
coincer » les utilisateurs sur leur système.

Il y a deux conclusions que l’on tire de cette proposition de
E. Warren. La première, c’est qu’il est désormais acté que les
entreprises de la Tech sont à même d’accomplir du service
d’intérêt public : loin d’être nationalisées, au contraire, de
nombreuses solutions pourront toujours être externalisées par
les États en toute confiance (tout comme Kaa hypnotise le
jeune Mowgli) puisque, en théorie, cela ne risquera plus de
créer de distorsion de concurrence. L’autre conclusion est que
ces nouvelles dispositions n’interviennent évidemment que sur
le territoire des États-Unis : on joue là encore sur la
régulation des multinationales sur le marché intérieur et dont
les effets se feront sentir sur le marché extérieur. Ici il
s’agit de multiplier les acteurs, créer des « petits » Gafam
qui auront alors l’avantage de se présenter auprès de l’Europe
comme des acteurs économiques si différents et à chaque fois
pleinement compatibles avec les lois européennes ressenties
comme protectionnistes. Il restera cependant que les
technologies, elles, demeureront des émanations de l’American
tech. Certes l’innovation sera moins bridée par les monopoles
actuels, mais ces mini-gafam continueront d’assurer
l’hégémonie tout en s’inscrivant de manière moins frontale sur
les marchés mondiaux face à (ou avec) d’autres géants chinois.
Oui, parfois les libertés individuelles ont bon dos. On peut
construire toutes sortes d’argumentations sur cette base, y
compris celle qui consiste à rebattre les cartes et
recommencer… Si vous voulez vous aussi jouer ce jeu de dupes,
signez la pétition de la Team Warren.

   1. J o h n B e l l a m y F o s t e r e t R o b e r t W . M c C h e s n e y ,
      « Surveillance Capitalism. Monopoly-Finance Capital, the
      Military-Industrial Complex, and the Digital Age »,
      Monthly Review, 07/2014, vol. 66.↩
   2. Par exemple, on peut comparer aux États-Unis le nombre
      de salariés employés par les firmes multinationales de
      la Silicon Valley, pour des sommets de capitaux
      financiers jamais atteins jusqu’à présent et le nombre
      de salariés que l’industrie automobile (plutôt
      nationale) employait jusqu’à un passé récent. Le
      résultat n’est n’est pas tant de pointer que les Big
      tech emploient moins de monde (et il y a tout de même
      une multitude de sous-traitants) mais qu’en réalité
      l’organisation de cette économie crée des inégalités
      salariales radicales où les plus qualifiés dans les
      nœuds monopolistiques concentrent toute la richesse. Les
      chômeurs laissés pour compte dans cette transformation
      de l’économie manufacturière en économie de service
      constituent un déséquilibre évident pour l’économie
      américaine et qui s’est traduit récemment en crise
      financière.↩
   3. S h o s h a n a Zuboff,     Das      Zeitalter      Des
      ÜberwachungsKapitalismus, Frankfurt, Campus Verlag, 2018
      ; Shoshana Zuboff, The Age of Surveillance Capitalism:
      The Fight for a Human Future at the New Frontier of
      Power, New York, Public Affairs, 2019.↩
   4. C’est un peu ce que montre Sébastien Broca dans une
      lecture critique du livre de S. Zuboff. S. Broca,
      « Surveiller et prédire », La vie des idées,
07/03/2019.↩
   5. Elizabeth Warren, « Here’s how we can break up Big
      Tech », Medium.com, 08/03/2019.↩

Khrys’presso                  du      1er        avril
2019
Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour
découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la
semaine dernière.

Brave New World
     Les FAI en Australie ont commencé à censurer Internet,
     bloquant des sites Web pour avoir hébergé des images de
     l’attaque terroriste à Christchurch (developpez.com)
     En Corée du Sud, un passage piéton envoie des
     notifications aux « zombies du smartphone »
     (usbeketrica.com)
       L’épidémie de « smartphone zombies » n’est pas
       spécifique à la Corée du Sud. En France, par exemple,
       le nombre d’accidents mortels directement liés à un
       smartphone est passé de 4 % en 2010 à 17 % en 2015, et
       1 Parisien sur 6 traverse la rue en utilisant son
       téléphone, selon une étude publiée en 2016.
Un aéroport chinois oriente les voyageurs en
reconnaissant leur visage : utile ou terrifiant ?
(numerama.com)
Se trouver réprimandé par le système de crédit social en
Chine est « pire       qu’une    peine   de   prison   »
(developpez.com)
La Chine a commencé à cloner les chiens policiers pour
qu’ils apprennent plus vite le métier (numerama.com)
La Russie ordonne aux principaux fournisseurs de VPN de
bloquer les sites interdits, continuant sa restriction
de   l’accès      au   contenu    jugé    inacceptable
(securite.developpez.com)
En Estonie, des robots vont bientôt rendre la justice
(usbeketrica.com)
En Finlande, des prisonniers dressent des intelligences
artificielles (usbeketrica.com)
Quels sont les députés européens qui ont le plus changé
leurs votes au cours de la législature actuelle du PE ?
(votewatch.eu – en anglais)
Incompatibilité entre le RGPD et les cookie walls
(francoischarlet.ch)
Un projet de loi qui rétablirait la neutralité du Net
progresse malgré les meilleurs efforts des télécoms pour
le supprimer (motherboard.vice.com – en anglais)
« La neutralité d’Internet revient en force », a
 déclaré Evan Greer, directeur adjoint du groupe de
 consommateurs Fight for the Future, dans un communiqué.
 « Les politiciens apprennent peu à peu qu’ils ne
 peuvent plus s’en tirer en se faisant les larbins des
 grandes entreprises de télécommunications », a dit M.
 Greer. « Nous exploitons le pouvoir d’Internet pour le
 sauver, et tout législateur qui se mettra en travers de
 notre chemin sera bientôt confronté à la colère de ses
 électeurs, qui, dans leur grande majorité, veulent que
 les législateurs rétablissent ces protections
 fondamentales.

La   FTC   demande   aux   FAI   de   divulguer   toutes   les
informations qu’ils recueillent sur les utilisateurs et
dans quel but (techcrunch.com – en anglais)
La FTC ferme quatre groupes responsables de milliards
d’appels illégaux type « robocalls » (cnet.com – en
anglais) – cf aussi le Last Week Tonight sur le sujet
des robocalls (hbo.com – en anglais)
55 % des Américains approuvent l’utilisation de la
reconnaissance faciale à des fins de sécurité publique,
mais cette technologie soulève des préoccupations en
matière   de   protection    de   la  vie   privée.
(bonus.usbeketrica.com – en anglais)
 Mais aussi étrange que cela puisse paraître, Google,
 Amazon et Microsoft ont également un intérêt financier
 à ce que des réglementations plus strictes soient mises
 en place. Toutes ces entreprises sont suffisamment
 grandes et célèbres pour faire l’objet d’une
 surveillance constante de la part du public, des
 organismes de réglementation et des groupes de défense
 des droits de la personne. Même en l’absence de
 réglementation, ils ne pourront jamais faire ce qu’ils
 veulent avec la reconnaissance faciale, car toute
 utilisation douteuse de la technologie sera tôt ou tard
repérée et générera de mauvaises relations publiques.
    Mais les plus petites entreprises pourraient
    tranquillement pousser leur propre logiciel de
    reconnaissance faciale et obtenir les accords lucratifs
    du gouvernement pendant qu’Amazon, Google et Microsoft
    en sont empêchés. Un cadre réglementaire garantirait
    que tout le monde doit respecter les mêmes règles et
    protégerait ces grandes entreprises de la concurrence
    déloyale.

   Le cofondateur de MoviePass utilise la reconnaissance
   faciale pour vous obtenir des billets de cinéma
   « Gratuits » mais à une condition : il faut regarder de
   la publicité pendant 20 minutes, en étant observé par
   son téléphone (indiewire.com – en anglais)
   Airbnb a un problème de caméra cachée (theatlantic.com –
   en anglais)
   Quand les robots de livraison envahiront les trottoirs
   (usbeketrica.com)

Spécial directive Copyright
   Le Parlement européen se soumet aux lobbys des ayants
   droit (laquadrature.net)
   Copyright Directive : l’UE sauve les logiciels libres à
la dernière minute (fsfe.org)
Le Parlement européen adopte la directive sur le droit
d’auteur à l’heure du numérique (nextinpact.com)
Les partisans de la directive Droit d’auteur, un
lobbying jusqu’à saturation (nextinpact.com)
Directive Droit d’auteur : 13 eurodéputés affirment
s’être trompés lors du vote (nextinpact.com) – voir
aussi : Les eurodéputés français se trompent souvent de
vote au Parlement européen (lemonde.fr)

Adoption de la directive droit d’auteur et de l’article
13 : et maintenant ? (numerama.com)
Après le vote européen, la France veut rapidement
intégrer la directive droit d’auteur dans la loi
(numerama.com)
Filtrage : l’article 13 redouté arrivera en France via
la loi audiovisuelle dès cet été (numerama.com)
Spécial France
   La couverture 4G du territoire atteint 65% en 2018 selon
   l’Arcep (zdnet.fr)
   Pourquoi des téléviseurs avec box SFR s’allument par
   défaut sur BFM TV (selon Altice) (numerama.com)
   Les panneaux de pub du métro tracent-ils les téléphones
   des usagers ? (liberation.fr)
   648 piscines olympiques de déchets nucléaires en France
   (liberation.fr)
   Publications scientifiques    :   la   justice   française
   ordonne aux FAI de bloquer Sci-Hub et LibGen à la
   demande des éditeurs Elsevier et Springer Nature
   (developpez.com)
    Le tribunal estime que s’ils ne sont pas responsables
    du contenu auquel ils donnent accès, « les FAI et les
    hébergeurs sont tenus de contribuer à la lutte contre
    les contenus illicites, et plus particulièrement,
    contre la contrefaçon de droits d’auteur et droits
    voisins, dès lors qu’ils sont les mieux à même de
    mettre fin à ces atteintes ». Le TGI précise également
    qu’aucun texte ne s’oppose à ce que les mesures à
    mettre en oeuvre pour mettre fin à ces violations
    soient supportées par les intermédiaires techniques,
    c’est-à-dire ici les FAI, quand bien même ces mesures
    sont susceptibles de représenter pour eux un coût
    important. Donc le coût de la mise en oeuvre des
    mesures nécessaires restera à la charge des FAI.
    […] La réalité est qu’après de tels blocages, il y a
    toujours des sites miroirs qui réapparaissent.
    Conscients de cela, les deux éditeurs avaient demandé
    que les FAI surveillent la réapparition de sites
    miroirs et les bloquent systématiquement ; une demande
    que le tribunal ne leur a pas accordée. Cela veut dire
    que si, après avoir été bloqués, Sci-Hub et LibGen
    réapparaissent sous d’autres domaines, les éditeurs
devront à nouveau se rendre au tribunal pour actualiser
    leur liste de domaines à bloquer. Ce qui prendra du
    temps et permettra aux sites ciblés de rester en ligne
    presque sans interruption.

   Voir aussi : Les paywalls bloquent le progrès
   scientifique. La recherche devrait être ouverte à tous
   (theguardian.com – en anglais)

   «Pourquoi ne tiennent-ils pas compte de ce qu’on dit,
   nous les profs ?» (liberation.fr)
   La future loi «cyberhaine» fait tiquer le Conseil
   national du numérique (liberation.fr)
   Le parquet de Paris ouvre une enquête préliminaire
   contre lundimatin (lundi.am)
   Le gouvernement mobilise la lutte anti-terroriste contre
   les activistes du climat (reporterre.net)
   Le rapport annuel de la contrôleuse générale des lieux
   de privation de liberté se demande si la France ne
   serait pas prise      d’une   frénésie   d’enfermement
   (lemonde.fr)

Spécial Gilets Jaunes
   Acte XIX : est-il vrai que les amendes de 135 euros
   dressées contre les manifestants ne sont pas légales ?
   (liberation.fr)
   A Nice, une manifestante blessée de son plein gré
   (telerama.fr)
   Droit de manifester : le gouvernement persiste dans la
   logique de l’escalade (amnesty.fr)
   Quiétude Emmanuel Macron ? (affordance.info)
   Armées : quand la communication politique abîme le moral
   des     troupes     (et     celui     des    Français)
   (theconversation.com)
Spécial GAFAM
   « Entre les GAFA, la confrontation prend de plus en plus
   d’ampleur » (lemonde.fr)

   En bannissant les publicités de VPN en Chine, Google
   s’assure un avenir (plus) radieux dans l’Empire du
   Milieu (cyberguerre.numerama.com)
   Apple scénarise son entrée en force dans les contenus
   (liberation.fr)
   Des documents internes montrent qu’Apple est capable de
   mettre en œuvre la législation sur le droit à la
   réparation (motherboard.vice.com – en anglais)
   Facebook a secrètement exploré la possibilité de
   construire des drones de la taille d’un oiseau pour
   transporter les données vers des personnes ayant de
   mauvaises connexions Internet. (businessinsider.com – en
   anglais)
Facebook en lutte contre l’interdiction belge de traquer
   les utilisateurs (et même les non-utilisateurs)
   (bloomberg.com – en anglais)
   Zuckerberg détient plus de données sur les activités en
   ligne des gens que n’importe qui d’autre dans le monde,
   selon un ex-cadre de Facebook (developpez.com)
   Facebook déploie son dispositif anti-ingérence pour les
   élections européennes (letemps.ch)
   Pourquoi Microsoft est pour une augmentation majeure des
   taxes la concernant – ainsi qu’Amazon (geekwire.com – en
   anglais)
   Attentat en Nouvelle-Zélande : Microsoft appelle les
   géants du web à collaborer pour censurer la violence
   (numerama.com)

Les autres lectures de la semaine
   Au nom de la lutte anti-terroriste, l’Europe menace de
   censurer Internet (reporterre.net)
   Désinformation, le rapport – 3 (framablog.org)
   Comment Internet est devenu un espace politique en
   dispute (lvsl.fr)
   Câbles sous-marins d’Internet : « Les risques de tension
sont extrêmement réels » (usbeketrica.com)
  J’ai toujours regretté que l’Europe n’ait pas mis en
  place une politique de localisation des données sur son
  territoire, en matière de souveraineté d’une part et de
  sécurité de l’autre, cela aurait du sens. En France,
  80% du trafic Internet qui est généré part aux Etats-
  Unis, c’est considérable. L’économie européenne est
  dépendante de ces flux. Ce n’est pas seulement l’usage
  de la vidéo, ce sont les données de toutes nos
  entreprises, stockées dans le cloud. Si demain nous
  perdons le lien avec les Etats-Unis, c’est l’accès à
  toutes ces données qui serait compromis.[…] aujourd’hui
  ce sont les GAFA qui investissent. Sur l’Atlantique, il
  y a 3 ans la part de marché des GAFA était de 5 %.
  Aujourd’hui, elle est supérieure à 50 %, et on pense
 que d’ici 3 ans elle sera de 90 %. Pour les GAFA, c’est
 le jackpot. D’abord parce que les câbles ne sont pas
 régulés. La neutralité du net ne s’applique pas aux
 câbles sous-marins, elle ne s’applique pas aux réseaux
 internationaux. L’autorité européenne de régulation
 pourrait cependant décider que les câbles européens qui
 arrivent en Europe doivent respecter un certain nombre
 de règles, mais ce n’est pas à l’ordre du jour.

« Nos » informations personnelles ne parlent pas de
nous,    mais    de   nos   relations     aux   autres
(theconversation.com)
Face aux panneaux publicitaires numériques, nous devons
affirmer la dimension collective des données
personnelles (maisouvaleweb.fr)
Les logiques algorithmiques de la rencontre en ligne
sont moins sophistiquées que les logiques sociales
(internetactu.net)
Benoît Thieulin : « Les plates-formes numériques se
pensent comme de nouveaux Etats » (alternatives-
economiques.fr)
Casser les GAFAM… et recommencer (golb.statium.link)
   Rencontre avec Paula Berman, une « hacktiviste »
   brésilienne qui cherche à réinventer les règles de la
   vie démocratique en faisant le lien entre cryptographie
   et civic tech (usbeketrica.com)
   Sans les femmes, il n’y aurait pas d’Internet (et on ne
   le sait pas assez) (telerama.fr)
   Quand Charles Babbage jouait aux échecs avec le Turc
   Mécanique (spectrum.ieee.org – en anglais)

Les BDs/graphiques/photos                       de     la
semaine
   Sagesse
   Fragile
   Pull
   Expérimentation
   Consommation
   Privatisation
   Che
   Possible Code contents
   Brain areas
   Upload filter & torrent file
   Vilain petit canard (cereales.lapin.org)

Les vidéos/podcasts de la semaine
   Benjamin Sonntag sur France Info à propos du vote sur la
   directive droit d’auteur (video.lqdn.fr)
   Lionel Maurel : « Les industries culturelles demandent
   les miettes de la surveillance de masse des Européens »
   (video.lqdn.fr) cf aussi : Droits d’auteur : ce qui
   change avec la nouvelle directive européenne
   (franceculture.fr)
   L’impact spatial et énergétique des data-centers
   (video.passageenseine.fr, par les personnes qui ont
dirigé le rapport (iau-idf.fr) dont parlait TV5Monde la
   semaine dernière )
   Stéphane Bortzmeyer – DNS (2018) (peertube.parleur.net)
   Juan Branco explose tout le Système Macron (2019) (lien
   YouTube)
   Les    français     aspirent     à   une    dictature…
   (franceculture.fr)
   The Expert (Short Comedy Sketch) (peertube.social)

Les autres trucs chouettes de la
semaine
   L’utilisation de logiciels libres, un critère du label
   « numérique inclusif » (zdnet.fr)
   Un positionnement clair de l’association Framasoft
   (framablog.org)
   Le projet Les sans pagEs est né du besoin de combler le
   fossé des genres sur Wikipedia : en octobre 2018,
   Wikipédia en français compte 547 599 biographies
   d’hommes, contre 94 021 de femmes, soit seulement 17,3%.
   Lancement de l’Observatoire de la publicité sexiste
   (antipub.org)
   Comment illustrer une publication ou un site portant sur
   la technologie, la science ou le business de manière
   inclusive ? (numerama.com)
   Après « Faire Ensemble », des Métacartes « Degooglisons
   Internet » (metacartes.cc)
   Caliopen : l’heure de la version bêta a sonné
   (toolinux.com)
   Les Furtifs : Alain Damasio à l’assaut de la société de
   surveillance (usbeketrica.com)
   Contemplez votre mortalité devant l’ultime panorama
   martien d’Opportunity (motherboard.vice.com)
   Wikimedia Commons dévoile ses plus belles photos de 2018
   (numerama.com)
Avec de nouveau un gros merci à Goofy pour son coup de patte
au niveau des illustrations !!!

Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie
Libre Veille du Framablog.

Les articles, commentaires et autres images qui composent ces
« Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).

Désinformation, le rapport –
3
La traduction suivante est la suite et la continuation du
travail entamé la semaine dernière sur le long rapport final
élaboré par le comité « Digital, Culture, Media and Sport » du
Parlement britannique, publié le 14 février dernier, sur la
désinformation et la mésinformation.

Maintenant que le décor est posé, on aborde les questions
réglementaires. Après avoir clairement défini ce qu’est une
fake news, que nous avons traduit par « infox » et que les
auteurs regroupent sous le terme plus précis de
« désinformation », il est question de définir une nouvelle
catégorie de fournisseurs de service pour caractériser leur
responsabilité dans les préjudices faits à la société ainsi
que des solutions pour protéger le public et financer l’action
des structures de contrôle.

Le groupe Framalang a en effet entrepris de vous communiquer
l’intégralité du rapport en feuilleton suivant l’avancement de
la traduction.

Vous trouverez le texte intégral en suivant ce lien vers le
PDF original (3,8 Mo).

La traduction est effectuée par le groupe Framalang, avec
l’aide de toutes celles et ceux qui veulent bien participer et
pour cet opus :

Traducteurs : Khrys, Lumibd, Maestox, simon, Fabrice, serici,
Barbara, Angie, Fabrice, simon

La réglementation, le rôle, la
définition et la responsabilité
juridique   des entreprises  de
technologie
Définitions
11. Dans notre rapport intermédiaire, nous avons désavoué le
terme d’« infox » puisqu’il a « pris de nombreux sens,
notamment une description de toute affirmation qui n’est pas
appréciée ou en accord avec l’opinion du lecteur » et nous
avons recommandé à la place les termes de « mésinformation »
ou de « désinformation ». Avec ces termes viennent « des
directives claires à suivre pour les compagnies, organisations
et le Gouvernement » liées à « une cohérence partagée de la
définition sur les plateformes, qui peuvent être utilisées
comme la base de la régulation et de l’application de la loi

»1.

12. Nous avons eu le plaisir de      voir que le Gouvernement a
accepté notre point de vue sur le    fait que le terme « infox »
soit trompeur, et ait essayé à la    place d’employer les termes
de « désinformation » et de «        mésinformation ». Dans sa
réponse, le gouvernement a affirmé   :

      Dans notre travail, nous avons défini le mot
      « désinformation » comme la création et le partage
      délibérés d’informations fausses et/ou manipulées dans le
      but de tromper et d’induire en erreur le public, peu
      importe que ce soit pour porter préjudice, ou pour des
      raisons politiques, personnelles ou financières. La
      « mésinformation » se réfère au partage par inadvertance de
                          2
      fausses informations .

13. Nous avons aussi recommandé une nouvelle catégorie
d’entreprises de réseaux sociaux, qui resserrent les
responsabilités des entreprises de technologie et qui ne sont
pas forcément « une plateforme » ou un « éditeur ». le
gouvernement n’a pas du tout répondu à cette recommandation,
mais Sharon White, Pdg de Of.com a qualifié cette catégorie de
« très soignée » car les « plateformes ont vraiment des
responsabilités, même si elles ne génèrent pas les contenus,
concernant ce qu’elles hébergent et promeuvent sur leur

site ».3.

14. Les entreprises de réseaux sociaux ne peuvent se cacher
derrière le fait qu’elles seraient simplement une plateforme,
et maintenir qu’elles n’ont elles-mêmes aucune responsabilité
sur la régulation du contenu de leurs sites. Nous répétons la
recommandation de notre rapport provisoire, qui stipule qu’une
nouvelle catégorie d’entreprises technologiques doit être
définie qui renforcera les responsabilités des entreprises
technologiques et qui ne sont pas forcément « une plateforme »
ou un « éditeur ». Cette approche voudrait que les entreprises
de technologie prennent leur responsabilité en cas de contenu
identifié comme étant abusif après qu’il a été posté par des
utilisateurs. Nous demandons au gouvernement de prendre en
compte cette nouvelle catégorie de compagnies technologiques
dans son livre blanc qui va paraître prochainement.

Préjudices et réglementation en ligne
15. Plus tôt dans le cadre de notre enquête, nous avons écouté
le témoignage de Sandy Parakilas et Tristan Harris, qui
étaient tous deux à l’époque impliqués dans le Center for
Human Technology, situé aux États-Unis. Le centre a compilé un
« Recueil de Préjudices » qui résume les « impacts négatifs de
la technologie qui n’apparaissent pas dans les bilans des

entreprises, mais dans le bilan de la société ».4 Le Recueil de
Préjudices contient les impacts négatifs de la technologie,
notamment la perte d’attention, les problèmes de santé
mentale, les confusions sur les relations personnelles, les
risques qui pèsent sur nos démocraties et les problèmes qui

touchent les enfants.5.

16. La prolifération des préjudices en ligne est rendu plus
dangereuse si on axe des messages spécifiques sur des
individus suite à des « messages micro-ciblés », qui jouent
souvent sur les opinions négatives qu’ont les gens d’eux-mêmes
et des autres et en les déformant. Cette déformation est

rendue encore plus extrême par l’utilisation de « deepfakes » 6
audio et vidéos qui sonnent et ressemblent à une personne

existante tenant des propos qui ne lui appartiennent pas. 7
Comme nous l’avons dit dans notre rapport intermédiaire, la
détection de ces exemples ne deviendra que plus complexe et
plus difficile à démasquer au fur et à mesure de la
8
sophistication des logiciels         .

17. Le ministre de la santé, le député Hon Matthew Hancock, a
récemment mis en garde les sociétés informatiques, notamment
Facebook, Google et Twitter, qu’elles étaient en charge de la
suppression des contenus inappropriés, blessants suite à la
mort de Molly Russel, qui à 14 ans s’est suicidée en novembre
2017. Son compte Instagram contenait du contenu en lien avec
la dépression, l’auto-mutilation et le suicide. Facebook,
propriétaire d’Instagram, s’est déclaré profondément désolé de

l’affaire.9 Le directeur d’Instagram, Adam Mosseri, a rencontré
le secrétaire de la Santé début février 2019 et déclaré
qu’Instagram n’était pas « dans une situation où il était
nécessaire de traiter le problème de l’auto-mutilation et du
suicide » et que cela revenait à arbitrer entre « agir
                                              10
maintenant et agir de manière responsable »

18. Nous relevons également que dans son discours du 5 février
2019, la députée Margot James, ministre du numérique dans le
département du numérique, de la culture, des médias et du
sport a exprimé ses craintes :

   La réponse des principales plateformes est depuis trop
   longtemps inefficace. Il y a eu moins de 15 chartes de
   bonne conduite mises en place volontairement depuis 2008.
   Il faut maintenant remettre absolument en cause un système
   qui n’a jamais été suffisamment encadré par la loi. Le
   livre blanc, que le DCMS produit en collaboration avec le
   ministère de l’intérieur sera suivi d’une consultation
   durant l’été et débouchera sur des mesures législatives
   permettant de s’assurer que les plateformes supprimeront
   les contenus illégaux et privilégieront la protection des
   utilisateurs, particulièrement des enfants, adolescents et
                          11
   adultes vulnérables.
Le nouveau Centre pour des algorithmes et
des données éthiques
19. Comme nous l’avons écrit dans notre rapport intermédiaire,
les sociétés fournissant des réseaux sociaux tout comme celles
fournissant des moteurs de recherche utilisent des algorithmes
ou des séquences d’instructions pour personnaliser les
informations et autres contenus aux utilisateurs. Ces
algorithmes sélectionnent le contenu sur la base de facteurs
tels que l’activité numérique passée de l’utilisateur, ses
connexions sociales et leur localisation. Le modèle de revenus
des compagnies d’Internet repose sur les revenus provenant de
la vente d’espaces publicitaires et parce qu’il faut faire du
profit, toute forme de contenu augmentant celui-ci sera
priorisé. C’est pourquoi les histoires négatives seront
toujours mises en avant par les algorithmes parce qu’elles

sont plus fréquemment partagées que les histoires positives.12

20. Tout autant que les informations sur les compagnies de
l’internet, les informations sur leurs algorithmes doivent
être plus transparentes. Ils comportent intrinsèquement des
travers, inhérents à la façon dont ils ont été développés par
les ingénieurs ; ces travers sont ensuite reproduits diffusés
et renforcés. Monica Bickert, de Facebook, a admis « que sa
compagnie était attentive à toute forme de déviance, sur le
genre, la race ou autre qui pourrait affecter les produits de
l’entreprise et que cela inclut les algorithmes ». Facebook
devrait mettre plus d’ardeur à lutter contre ces défauts dans
les algorithmes de ses ingénieurs pour éviter leur
propagation.
13

21. Dans le budget de 2017, le Centre des données Ethiques et
de l’innovation a été créé par le gouvernement pour conseiller
sur « l’usage éthique, respectueux et innovant des données,
incluant l’IA ». Le secrétaire d’état a décrit son rôle ainsi:
Le Centre est un composant central de la charte numérique
   du gouvernement, qui définit des normes et des règles
   communes pour le monde numérique. Le centre permettra au
   Royaume-Uni de mener le débat concernant l’usage correct

   des données et de l’intelligence artificielle.14

22. Le centre agira comme un organisme de recommandation pour
le gouvernement et parmi ses fonctions essentielles figurent :
l’analyse et l’anticipation des manques en termes de
régulation et de gestion; définition et orchestration des
bonnes pratiques, codes de conduites et standards
d’utilisations de l’Intelligence Artificielle; recommandation
au gouvernement sur les règles et actions réglementaires à
mettre en place en relation avec l’usage responsable et
                        15
innovant des données.

23. La réponse du gouvernement à notre rapport intermédiaire a
mis en lumière certaines réponses à la consultation telle que
la priorité de l’action immédiate du centre, telle que « le
monopole sur la donnée, l’utilisation d’algorithme prédictifs
dans la police, l’utilisation de l’analyse des données dans
les campagnes politiques ainsi que l’éventualité           de
discrimination automatisée dans les décisions              de
recrutement ». Nous nous félicitons de la création du Centre
et nous nous réjouissons à la perspective d’en recueillir les
fruits de ses prochaines travaux.

La loi en Allemagne et en France
24. D’autres pays ont légiféré contre le contenu malveillant
sur les plateformes numériques. Comme nous l’avons relevé dans
notre rapport intermédiaire, les compagnies d’internet en
Allemagne ont été contraintes initialement de supprimer les
propos haineux en moins de 24 heures. Quand cette auto-
régulation s’est montrée inefficace, le gouvernement allemand
a voté le Network Enforcement Act, aussi connu sous le nom de
NetzDG, qui a été adopté en janvier 2018. Cette loi force les
compagnies technologiques à retirer les propos haineux de
leurs sites en moins de 24 heures et les condamne à une amende

de 20 millions d’euros si ces contenus ne sont pas retirés16.
Par conséquent, un modérateur sur six de Facebook travaille
désormais en Allemagne, ce qui prouve bien que la loi peut

être efficace.17.

25. Une nouvelle loi en France, adoptée en novembre 2018
permet aux juges d’ordonner le retrait immédiat d’articles en
ligne s’ils estiment qu’ils diffusent de la désinformation
pendant les campagnes d’élection. La loi stipule que les
utilisateurs doivent recevoir « d’informations qui sont
justes, claires et transparentes » sur l’utilisation de leurs
données personnelles, que les sites doivent divulguer les
sommes qu’elles reçoivent pour promouvoir des informations, et
la loi autorise le CSA français à pouvoir suspendre des
chaînes de télévision contrôlées ou sous influence d’un état
étranger, s’il estime que cette chaîne dissémine de manière
délibérée des fausses informations qui pourraient affecter
l’authenticité du vote. Les sanctions imposées en violation de
la loi comprennent un an de prison et une amende de 75000
     18
euros .

Le Royaume-Uni
26. Comme la Commissaire de l’Information du Royaume-Uni,
Elisabeth Denham, nous l’a expliqué en novembre 2018, il y a
une tension entre le modèle économique des médias sociaux,
centré sur la publicité, et les droits humains tels que la
protection de la vie privée. « C’est notre situation actuelle
et il s’agit d’une tâche importante à la fois pour les
régulateurs et le législateur de s’assurer que les bonnes

exigences, la surveillance et sanctions sont en place » 19 .
Elle nous a dit que Facebook, par exemple, devrait en faire
plus et devrait faire « l’objet d’une régulation et d’une

surveillance plus stricte »20. Les activités de Facebook dans
la scène politique sont en augmentation; l’entreprise a
récemment lancé un fil d’actualités intitulé « Community
Actions » avec une fonctionnalité de pétition pour, par
exemple, permettre aux utilisateurs de résoudre des problèmes
politiques locaux en créant ou soutenant des pétitions. Il est
difficile de comprendre comment Facebook sera capable d’auto-
réguler une telle fonctionnalité; plus le problème local va
être sujet à controverse et litiges, plus il entrainera de
l’engagement sur Facebook et donc de revenus associés grâce
                 21
aux publicités    .

Facebook et la loi
27. En dépit de toutes les excuses formulées par Facebook pour
ses erreurs passées, il semble encore réticent à être
correctement surveillé. Lors de la session de témoignage
verbal au « Grand Comité International », Richard Alland,
vice-président des solutions politiques de Facebook, a été
interrogé à plusieurs reprises sur les opinions de Facebook
sur la régulation, et à chaque fois il a déclaré que Facebook
était très ouvert au débat sur la régulation, et que
travailler ensemble avec les gouvernements seraient la
meilleure option possible :

   « Je suis ravi, personnellement, et l’entreprise est
   vraiment engagé, de la base jusqu’à notre PDG — il en a
   parlé en public — à l’idée d’obtenir le bon type de
   régulation afin que l’on puisse arrêter d’être dans ce mode
   de confrontation. Cela ne sert ni notre société ni nos
   utilisateurs. Essayons de trouver le juste milieu, où vous
   êtes d’accord pour dire que nous faisons un travail
   suffisamment bon et où vous avez le pouvoir de nous tenir
   responsable si nous ne le faisons pas, et nous comprenons
   quel le travail que nous avons à faire. C’est la partie

   régulation22. »

28. Ashkan Soltani, un chercheur et consultant indépendant, et
ancien Responsable Technologique de la Commission Fédérale du

Commerce des USA 23, a questionné la volonté de Facebook à être
régulé. À propos de la culture interne de Facebook, il a dit :
« Il y a ce mépris — cette capacité à penser que l’entreprise

sait mieux que tout le monde et tous les législateurs » 24. Il
a discuté de la loi californienne pour la vie privée des
                    25
consommateurs            que Facebook a supporté en public, mais a
                            26
combattu en coulisses        .

29. Facebook ne semble pas vouloir être régulé ou surveillé.
C’est considéré comme normal pour les ressortissants étrangers
de témoigner devant les comités. En effet, en juin 2011, le
                                                           27
Comité pour la Culture, les Médias et le Sport                  a entendu le
témoignage de Rupert Murdoch lors de l’enquête sur le hacking
               28                            29
téléphonique        et le Comité au Trésor        a récemment entendu le
                                                      30
témoignage de trois ressortissants étrangers . En choisissant
de ne pas se présenter devant le Comité et en choisissant de
ne pas répondre personnellement à aucune de nos invitations,
Mark Zuckerberg a fait preuve de mépris envers à la fois le
parlement du Royaume-Uni et le « Grand Comité International »,
qui compte des représentants de neufs législatures dans le
monde.

30. La structure managériale de Facebook est opaque pour les
personnes extérieures, et semble conçue pour dissimuler la
connaissance et la responsabilité de certaines décisions.
Facebook a pour stratégie d’envoyer des témoins dont ils
disent qu’ils sont les plus adéquats, mais qui n’ont pas été
suffisamment informés sur les points cruciaux, et ne peuvent
répondre ou choisissent de ne pas répondre à nombre de nos
questions. Ils promettent ensuite d’y répondre par lettre, qui
—sans surprise— échouent à répondre à toutes nos questions. Il
ne fait pas de doute que cette stratégie est délibérée.
Régulateurs britanniques existants
31. Au Royaume-Uni, les principales autorités compétentes —
                                                             31
Ofcom, l’autorité pour les standards publicitaires                , le
                                               32
bureau du commissaire à l’information               , la commission

électorale 33 et l’autorité pour la compétition et le marché 34
— ont des responsabilités spécifiques sur l’utilisation de
contenus, données et comportements. Quand Sharon White,
responsable de Ofcom, est passé devant le comité en octobre
2018, après la publication de notre rapport intermédiaire,
nous lui avons posé la question si leur expérience comme
régulateur de diffusion audiovisuelle pourrait être utile pour
réguler les contenus en ligne. Elle a répondu :

   « On a essayé d’identifier quelles synergies seraient
   possibles. […] On a été frappé de voir qu’il y a deux ou
   trois domaines qui pourraient être applicable en ligne. […]
                              35
   Le fait que le Parlement        ait mis en place des standards,
   ainsi que des objectifs plutôt ambitieux, nous a semblé
   très important, mais aussi durable avec des objectifs clés,
   que ce soit la protection de l’enfance ou les
   préoccupations autour des agressions et injures. Vous
   pouvez le voir comme un processus démocratique sur quels
   sont les maux que l’on croit en tant que société être
   fréquent en ligne. L’autre chose qui est très importante
   dans le code de diffusion audiovisuelle est qu’il explicite
   clairement le fait que ces choses peuvent varier au cours
   du temps comme la notion d’agression se modifie et les
   inquiétudes des consommateurs changent. La mise en œuvre
   est ensuite déléguée à un régulateur indépendant qui
   traduit en pratique ces objectifs de standards. Il y a
   aussi la transparence, le fait que l’on publie nos
   décisions dans le cas d’infractions, et que tout soit
   accessible au public. Il y a la surveillance de nos
                                               36
   décisions et l’indépendance du jugement          ».
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