EN ROUTE POUR 2023 - SOS Faim Luxembourg
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EN ROUTE POUR 2023 8 NOVEMBRE 2021 DÉPÊCHE SPÉCIALE ONGD - ACCORD DE COALITION 2018-2023 LUXEMBOURG Une évaluation à mi-parcours de la politique de la coopération Encore deux ans Un carcan ou une feuille de route Pistes de réflexion À la suite des élections législatives du développement. Nous souhaiterions que le 14 octobre 2018, le formateur Xavier Gouvernement les prenne en considéra- Index Bettel (DP) et les trois chefs de la déléga- tion avant la fin de la période législative. tion Corinne Cahen (DP), Étienne Schnei- der (LSAP) et Félix Braz (Déi Gréng) ont Comme le texte de l’accord actuel est très généraliste, cette évaluation ne reprend Chaises musicales au sein du signé l’« Accord de Coalition » le 3 dé- gouvernement, page 2 cembre 2018. Pour la deuxième fois, une pas systématiquement tous les points. Elle coalition « gambienne » a formé un gou- propose des pistes de réflexion et des re- À quand une stratégie transversale vernement centriste qui réunit ces trois commandations visant à déclencher un sur les droits humains ? page 2 partis politiques avec des priorités et at- débat en vue d’initier ou de renforcer des tentes différentes. changements et des actions concrètes au L’agriculture familiale comme pierre niveau des thèmes de l’aide publique au angulaire, page 3 Le document de l’accord de coalition, qui développement, de l’agriculture, des devrait servir de feuille de route pour le droits humains, de l’aide multilatérale et Le Fonds ABC, page 4 nouveau gouvernement pour la pé- de la place des ONG de développement riode 2018-2023 avec 246 pages et 35 cha- dans la politique de la coopération au dé- L’aide publique au développement : pitres, met l’accent sur les différents chan- veloppement. un leadership au-delà des chiffres, tiers comme la réforme fiscale, le problème page 5 du marché du logement « en surchauffe » Notre hypothèse est que la politique de co- et l’ambition de faire du Luxembourg un opération au développement doit être co- Quo vadis, Coopération des leaders mondiaux du secteur digital. hérente et aller au-delà des acquis pour multilatérale, page 5 créer un changement durable et atteindre Si la crise sanitaire au printemps de 2020 ses objectifs de développement durable. Les ONG de développement et la peut expliquer la non-réalisation de plu- politique de coopération, page 7 sieurs dossiers, elle a néanmoins donné un Comme indiqué dans l’Accord : « Le contexte international de la coopération au La cohérence des politiques coup de pouce à l’avance numérique : un pour le développement, page 8 volet qui reprend aussi de l’importance développement est devenu plus complexe dans une nouvelle stratégie pour la poli- et évolue en permanence ». Ce contexte Ne touche pas aux services tique économique du gouvernement est aujourd’hui marqué par une crise cli- sociaux de base, page 9 actuel : « Eis Wirtschaft vu muer ». matique sans retour, des violations crois- santes des droits humains, la multiplica- Stratégie environnement et Cependant, cette crise globale n’a pas tion de foyers de conflits et une pandémie changement climatique, page 10 remis en question notre modèle écono- mondiale qui exacerbe les inégalités. mique et les hypothèses générales sur les- En route pour 2023 quels la politique repose. Plus que jamais, la cohérence des poli- 14 recommandations, page 10 tiques pour le développement et le leader- Néanmoins, la pandémie a rappelé aux mi- ship politique sont cruciaux pour atteindre nistres que les prochaines élections sont l’objectif principal que le Gouvernement proches et plusieurs partis politiques se s’est donné dans sa politique de coopéra- concentrent déjà sur les prochaines tion au développement : l’éradication de la échéances au risque de délaisser les grands pauvreté extrême à travers le soutien au dossiers en cours. développement durable sur le plan écono- mique, social et environnemental. Les différents articles de cette dépêche, ré- digés par le Cercle et son groupe « Forum Une première suggestion sera de ne pas at- Politique » (FoPo), exposent les défis pour tendre 2023 et d’utiliser les deux pro- une politique appropriée de coopération au chaines années pour revoir leurs positions !
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 2 Chaises musicales au sein du gouvernement Le gouvernement s’était fixé certaines ambi- Une fonctionnaire plutôt qu’une politicienne Au bout d'un an seulement, elle a cédé son tions dans le chapitre « Coopération au déve- a été nommée au poste de ministre sans figu- mandat à son collègue socialiste Franz loppement et action humanitaire » de l’Ac- rer sur une liste électorale, cette pratique est Fayot qui a repris en même temps le poste cord, mais la pandémie et les changements rarement utilisée au Luxembourg. de ministre de l’Économie. de personnel n'ont certainement pas aidé à repenser et faire évoluer la coopération au Néanmoins, Paulette Lenert a apporté une Si Paulette Lenert est arrivée à temps au mi- développement et l’aide humanitaire au-delà énergie nouvelle et du pragmatisme à son nistère de la Santé pour gérer l’une des plus des programmes et stratégies existantes. nouveau poste et a ouvert la porte à une ap- grandes crises que le Luxembourg ait connu proche multipartite et transversale. Pendant depuis la dernière guerre, Franz Fayot a lui Après la circulation de plusieurs noms, son mandat, le gouvernement s’est doté aussi été confronté à un contexte de mise en c’est finalement Paulette Lenert (LSAP) qui d’une approche pangouvernementale pour œuvre de la politique de coopération au dé- a remplacé Romain Schneider (LSAP) au l’élaboration des partenariats avec les pays veloppement complexe à gérer à l’aube poste de ministre de la Direction de la Co- privilégiés de la coopération - une approche d’une pandémie globale qui aura un impact opération au développement et action hu- importante pour assurer une meilleure cohé- important sur cette politique. manitaire (ici Direction de la Coopération) rence des politiques pour le développement, dans le nouveau Gouvernement. qui n'a malheureusement pas perduré. À quand une stratégie Le champ de travail des organisations de la société civile ? transversale sur les droits Fin novembre 2020, la loi sur les transferts d’argent vers l’Inde, « The Foreign Contri- humains ? bution Act » (FCRA) fut modifiée par le gouvernement en Inde. Cet amendement demande entre autres que les fonds versés Les OSC Défenseurs·e·s des droits humains Devoir de vigilance de l’étranger puissent être reçus uniquement sur des comptes enregistrés chez la « State Bank of India ». L’ouverture d’un tel compte doit faire l’objet d’un enregistre- « La Coopération luxembourgeoise adopte- humains, semble avoir disparu de la liste ment préliminaire et de l’obtention d’un ra une approche multidimensionnelle de des priorités. En effet, dans l’Accord de permis de la part du gouvernement. Des l’éradication de la pauvreté et du dévelop- coalition, on peut lire que : « trois priorités ONGD au Luxembourg ont exprimé à plu- pement durable, en concentrant ses efforts transversales seront prises en compte de sieurs reprises leurs préoccupations quant à sur quatre thématiques prioritaires inter- manière systématique dans les actions de l’impact de cette nouvelle législation sur les connectées pour lesquelles le Luxembourg la coopération luxembourgeoise, à savoir activités de leurs partenaires sur place qui dispose d’une expertise spécifique : l’accès les droits de l’homme, l’égalité des genres travaillent pour la plupart avec des commu- à des services sociaux de base de qualité, et la durabilité environnementale ». La nautés défavorisées : des paysan·ne·s, des l’intégration socio-économique des femmes question qui se pose est pourquoi la Direc- travailleur·euse·s dans des carrières, des et des jeunes, la croissance durable et inclu- tion de la Coopération s’est dotée de stra- éboueurs. Outre les contraintes administra- sive, ainsi que la gouvernance inclusive. tégies transversales pour aborder les ques- tives supplémentaires qu’elle impose aux Par ailleurs, trois priorités transversales tions du genre, de l’environnement et du organisations ici et là-bas, cette loi risque seront prises en compte de manière systé- climat de manière systématique, mais ne d’impacter négativement le droit à la liberté matique dans les actions de la coopération fait pas de même pour les droits humains ? d’expression en empêchant les OSC de luxembourgeoise, à savoir les droits de suivre et de critiquer les politiques gouver- l’homme, l’égalité des genres et la durabili- Pourtant, les arguments pour se doter d’une nementales, notamment à l’égard des té environnementale. » (Accord de coali- telle stratégie le plus rapidement possible ne pauvres, sous la menace de voir son permis tion 2018-2023, p. 224.) manquent pas. Si le gouvernement souhaite retiré. lutter efficacement contre la pauvreté dans L’année 2021 marquant le mi-mandat du les pays dits en développement, il est indis- En mai cette année, des ONGD au Luxem- gouvernement actuel fut riche en événe- pensable de se focaliser sur les causes qui en bourg ont été alertées par leurs partenaires ments en matière de coopération au déve- sont à l’origine en considérant la pauvreté au Guatemala de l’entrée en vigueur d’une loppement : la Direction de la Coopération comme une violation des droits humains. nouvelle loi sur les ONG qui, selon le Rap- a présenté trois nouvelles stratégies trans- Approcher la pauvreté sous cet angle permet porteur Spécial pour la liberté d’expression versales, qui sont également inscrites dans finalement de prendre en compte les droits de la Commission interaméricaine des la Stratégie générale de la Coopération au des personnes en situation de pauvreté qui droits de l’Homme, Monsieur Pedro Vaca développement « En route pour 2030 », sont souvent marginalisées et discriminées Villarreal, restreindra l’espace civique, dans les domaines de l’égalité des genres, dans les sociétés et les politiques et qui se mettant en danger les droits à la liberté d'as- de l’environnement et du climat, et de la fi- trouvent ainsi exclues du « développement ». sociation et à la liberté d'expression, entra- nance inclusive et innovante. Une qua- vant la participation des citoyens et la dé- trième stratégie sur la coopération avec le Les expériences des ONGD au Luxem- fense des droits humains. secteur privé est en cours de préparation. bourg et de leurs partenaires sur le terrain rappellent sans cesse la nécessité urgente de La loi affecte négativement les associations Or, une autre priorité transversale de la mettre en place une stratégie en matière de nationales et internationales et interfère Direction de la Coopération, les droits droits humains. avec la nature de ces organisations en limi-
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 3 tant leur champ d'action à des activités Des ONGD ont alerté la Direction de la Coopération et de l'Action humanitaire telles que les projets de charité, d'éducation, Coopération de ce phénomène inquiétant devrait également s’engager en faveur de de santé et de développement présentant un qui touche directement leurs partenaires l’adoption d’une législation sur le devoir avantage social évident, laissant ainsi de en appelant le ministre à désigner un réfé- de diligence en matière de droits humains côté, par exemple, la formation civique, les rent pour les questions relatives aux dé- et environnement par le Luxembourg. droits humains et le soutien organisationnel. fenseur·e·s et aux droits humains. Une Elle comprend également des dispositions proposition qui n’a pas été retenue alors Une stratégie sur les droits humains : qui facilitent la dissolution des organisa- que la Direction a désigné des référent·e·s nécessaire et possible tions ; par exemple, si le gouvernement pour les autres priorités transversales. estime qu'une organisation perturbe l'ordre Le tour d’horizon de la situation dans les public, il peut y mettre fin sans procédure Coopération, entreprises et droits hu- pays partenaires soutenus de manière bi- administrative légale. mains latérale par la coopération luxembour- geoise - Burkina Faso, Nicaragua, Niger, Les législations restreignant le travail Selon les données collectées par Global Mali, Myanmar, Salvador, Territoires pa- d’OSC ne doivent pas être envisagées en Witness, plus d'un tiers des attaques lestiniens occupés, Afghanistan - montre tant qu'accidents isolés. De plus en plus contre les défenseur·e·s auraient été liées que le non-respect de l’état de droit et le d’organisations internationales gouverne- à l'exploitation des ressources - exploita- non-respect des droits humains consti- mentales et non gouvernementales, par tion forestière, minière et agroalimentaire tuent des obstacles majeurs à la réduction exemple le Conseil des droits de l’Homme, à grande échelle - aux barrages hydroélec- de la pauvreté. les Rapporteurs spéciaux sur les défen- triques et autres infrastructures. Dans le seur·e·s des droits humains et Amnesty In- contexte d’un renforcement de la collabo- Des acteurs de la coopération se disent ternational, alertent sur le rétrécissement de ration avec le secteur privé de la coopéra- peut-être qu’exiger le respect des droits l’espace civique partout dans le monde. Un tion luxembourgeoise, il est indispensable humains serait trop difficile en raison de la phénomène qui affecte déjà les partenariats de mettre également en place des garan- religion, la culture locale ou certains des ONGD au Luxembourg et qui doit être ties suffisantes pour s’assurer que le finan- contextes politiques ; que cela pourrait approché d’une manière proactive et systé- cement public ne contribue pas directe- bloquer les efforts de coopération ; voire matique. ment ou indirectement à des violations qu’on ne pourrait plus rien faire ? des droits humains. Attaques contre les défenseurs·e·s des Or, se doter d’une stratégie des droits hu- droits humains Ainsi, il est encourageant de constater que mains permettrait précisément de sortir de dans le cadre de sa nouvelle édition, le ces blocages. Stratégie ne signifie pas re- La diminution de l’espace civique se tra- Business Partnership Facility a ajouté une cette universelle ou politique indifféren- duit, entre autres, par une augmentation des clause dans les contrats avec les acteurs ciée. Il s’agit justement de partir des attaques à l’encontre de défenseur·e·s des privés. Elle les incite à s’engager à faire la contextes spécifiques et des relations de droits humains et environnementaux. diligence raisonnable en matière de droits pouvoir locales, pour chercher, de ma- humains conformément aux Principes di- nière très concrète et pragmatique, à exer- Selon le rapport « Last Line of Defense » recteurs des Nations Unies sur les entre- cer une influence sur certaines pratiques publié par l’organisation Global Witness en prises et les droits humains. Cela permet nuisibles ou discriminatoires ciblées. septembre dernier, 2020 fut l’année la plus de prévenir d’éventuelles violations des Dans un processus de ce type, les droits meurtrière pour les défenseur·e·s environne- droits humains dans le cadre des projets humains représentent l’horizon et la co- mentaux : 227 personnes ont été assassi- soutenus. Or, afin que cette mesure soit opération au développement contribue à nées. Les preuves présentées dans le rapport véritablement efficace, elle devrait être l’atteindre. Pour cela, elle s’appuie sur des montrent qu'à mesure que la crise clima- accompagnée de mécanismes de suivi et leviers tels que la volonté politique, le tique s'intensifie, la violence contre celles et d’évaluation au niveau de sa mise en personnel formé à l’approche basée sur ceux qui protègent leurs terres et notre pla- œuvre. Compte tenu des risques d’im- les droits humains, l’analyse de pratiques nète augmente également. Cette conclusion pacts importants des activités écono- existantes par d’autres acteurs de la co- rappelle aussi que les questions environne- miques sur les populations dans les pays opération et la concertation avec la société mentales et sociales sont fortement liées. dits en développement, le ministre de la civile. À la place, elle dépense 35 milliards de dol- L’agriculture familiale comme lars par an pour importer des aliments. Plus de 232 millions de personnes en Afrique pierre angulaire subsaharienne souffrent encore de la faim, soit près d’une personne sur quatre. … Bien qu’environ 70 % de la population africaine Agroécologie Quels moyens pour assurer les droits des paysan·ne·s ? travaillent dans le secteur agricole, celui-ci ne contribue qu’à hauteur de 30 % à la valeur ajoutée. » Les enjeux sont donc considérables. « Dans ce contexte, la Coopération luxem- objectifs d’éliminer la faim, d’assurer la sé- La coopération luxembourgeoise dédie à bourgeoise entend privilégier les partenariats curité alimentaire, d’améliorer la nutrition l’heure actuelle 4,7 % de son budget annuel respectueux des besoins des petites structures et promouvoir une agriculture durable. En au secteur de l’agriculture, alors que les agricoles et des méthodes agroécologiques. » Afrique, la situation est particulièrement ONGD au Luxembourg, en concertation (Accord de coalition 2018-2023, p. 224.) paradoxale comme l’analyse le ministère de avec les ONG belges, recommandent de la Coopération allemande dans le rapport consacrer 10 % de ce budget. Ce pourcen- Alors que le secteur agricole est un élément « Afrika und Europa – Neue Partnerschaft tage se base sur les engagements pris en central de l'économie des pays les moins für Entwicklung, Frieden und Zukunft » 2003 par les chefs d’États et de gouverne- avancés du Sud globalisé, le développement (2017) pour un nouveau partenariat pour le ments africains membres de l’Union afri- de l’agriculture est la condition préalable développement de ce continent : « ... Alors caine lorsqu’ils ont signé la déclaration de pour la réalisation de l’ODD 2 qui a pour que l’Afrique pourrait se nourrir elle-même. Maputo sur l’agriculture et la sécurité ali-
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 4 mentaire, les engageant à allouer au moins Enfin, l’agenda 2030 et la Décennie des Na- négociations au sein de l’ONU. Cette Décla- 10 % de leur budget national à l’investis- tions Unies pour l’agriculture familiale ration vise à répondre aux nombreuses sement agricole à l’horizon 2008. (2019-2028) constituent la toile de fond formes de discrimination auxquelles sont pour la mise en place de systèmes alimen- confronté·e·s les paysan·ne·s et les autres En parallèle des volumes d’investissement, taires plus territorialisés et plus respectueux personnes travaillant dans les zones rurales. se pose également la question du modèle des droits des populations rurales et des Puisque le Luxembourg était, avec le Portu- agricole qui doit être promu. Il existe désor- écosystèmes. gal, parmi les seuls pays de l’UE à soutenir mais là aussi un consensus pour reconnaître l’adoption de la Déclaration pour les droits que l’agriculture familiale doit être au cœur L’agroécologie : clé de la réponse globale des paysans devant l’Assemblée des Nations des stratégies de développement du secteur de l’insécurité alimentaire et du change- Unies, un engagement et des initiatives vo- agricole : « il n'est plus possible de considé- ment climatique lontaires sont attendus de la part du gouver- rer séparément l'alimentation, les moyens nement luxembourgeois pour donner corps de subsistance, la santé et la gestion des C’est dans ce contexte que la FAO met en aux droits reconnus par la Déclaration. ressources naturelles. Il est nécessaire avant l’agroécologie comme un élément clé d'adopter une réflexion systémique par le de la réponse globale à la problématique de La coopération bilatérale au travers des pro- biais d'approches holistiques pour relever l’insécurité alimentaire. Elle la considère jets de LuxDev et l’engagement des ONGD ces défis complexes et interdépendants. Le également comme un outil incontournable dans le secteur agricole témoignent de lien fondamental entre l'homme et la pla- pour atteindre les objectifs de développe- conserve d’une approche basée sur le soutien nète, avec des systèmes agricoles et ali- ment durable (ODD). En effet, l’agroécolo- aux petits producteurs via l’appui notam- mentaires durables, est au cœur de l'Agen- gie est en mesure de répondre à l'augmenta- ment à de petites structures agricoles, à des da 2030 pour le développement durable, tion significative des besoins alimentaires organisations paysannes ou des coopératives qui souligne l'urgence de prendre des me- futurs tout en veillant à ce que personne ne ainsi qu’aux pratiques agroécologiques. On sures concertées et de mener des politiques soit laissé pour compte. En cela, l’Accord observe cependant des initiatives qui contre- visant à un changement transformation- de coalition 2018-2023 a visé juste en privi- disent cet engagement : lancé en 2019, le nel », insiste l'Organisation des Nations légiant cette approche. Cependant, dans les fonds ABC notamment ne va pas sans soule- Unies pour l'alimentation et l'agriculture faits, un engagement déterminé en faveur ver quelques questions de cohérence avec (FAO) sur son site web concernant le rôle de l’agroécologie au niveau de la coopéra- ces efforts (voir article sur le fonds ABC). de l'agroécologie. tion bilatérale ou multilatérale n’est pas assez visible, alors même que les ONGD La mise en avant de l’appui aux petites De même le Fida, l'agence des Nations quant à elles s’engagent de plus en plus au structures et la promotion des pratiques unies chargée de financer l'agriculture, côté de leurs partenaires et des communau- agroécologiques dans l’Accord de coali- « veut pousser un développement de tés dans les projets de promotions de pra- tion 2018-2023 sont pertinentes. Il serait l'agriculture familiale et donner un tiques agroécologiques. important que le Gouvernement se donne revenu décent aux agriculteurs qui vont rapidement les moyens de renforcer la réali- donner une nourriture de qualité pour les Vers une approche de l’appui au secteur sation de cet engagement et mette en cohé- urbains et les autres populations à tra- agricole davantage basée sur les droits rence ses politiques avec celui-ci. Des pistes vers des circuits courts et des chaînes de allant dans cette direction seraient de conso- valeurs adaptées », explique Benoît L’adoption de la Déclaration des Nations lider un système de financement valorisant Thierry, représentant du Fida pour Unies sur les droits des paysans et des autres les pratiques durables et respectueux des l'Afrique de l'Ouest lors d’une interview personnes travaillant dans les zones rurales droits des populations rurales, et permettant sur RFI dans une actualité « Le Fida ré- (Déclaration UNDROP) par l’Assemblée gé- de les associer dans les choix qui les clame une révolution verte » du 30 sep- nérale des Nations Unies en 2018 est le fruit concernent, mais aussi de mettre en avant tembre 2021. de près de 20 ans de mobilisation de La Via des structures d’entrepreneuriat privé soli- Campesina et de ses alliés et de six années de daire comme les coopératives. Le Fond ABC Mobilisant des capitaux mixtes publics-pri- vés pour financer l’entrepreneuriat rural, les l'Europe (France, Belgique, Hollande, Suisse et Allemagne), le Maghreb et l'Afrique cen- ambitions affichées par ce fonds sont tout à trale ». La société « Dragon Farming » dé- fait louables, alors que sa mise en œuvre veloppe quant à elle l'industrie du soja au soulève quelques interrogations. Ghana et produit pour fabriquer et exporter des aliments pour animaux. On cite : « La En 2019 - à l'initiative du Fonds internatio- Première question : selon quels critères les vision de Dragon est de devenir un leader nal de développement agricole (FIDA), en projets sont-ils soutenus ? De fait, le fonds dans l'industrie de la nutrition animale et une collaboration avec les gouvernements du ABC, s’il invoque l’appui aux petits exploi- voix dans la construction des industries de la Luxembourg & de la Suisse, et l'Alliance tants agricoles, est largement orienté en di- volaille et de l'aquaculture en Afrique ». AGRA (Alliance pour une révolution verte rection de l’agrobusiness, comme en at- en Afrique) - un fonds d'investissement testent les divers financements déjà oc- À travers ces exemples, force est de consta- pour promouvoir l'entrepreneuriat agricole troyés. Un soutien est offert aux cultures de ter que le modèle de développement agricole en Afrique (ABC Fund - Agri-Business Ca- rente largement destinées à l'exportation et, promu est loin de correspondre aux stan- pital Fund) a été créé sur la place financière pour la grande majorité, utilisant un modèle dards de l’agroécologie, alors que l’impact de Luxembourg. de production agricole intensif. réel des investissements sur la lutte contre la pauvreté rurale reste à démontrer, tandis que Ce « fonds d'impact innovant vise à cataly- À titre d’exemples, nous relevons les cas de les besoins en financement des petites ex- ser une assistance financière et technique l'exportateur de mangues, Yaffa et Frères ploitations familiales ne sont pas desservis. pour les petits exploitants agricoles avec (EYF) du Mali et une société, appelée l'objectif principal de contribuer à la réduc- "Dragon Farming" au Ghana. Le premier est Une seconde question concerne le crédit à tion de la pauvreté et à assurer la sécurité une entreprise qui vise à "...livrer les accorder au partenariat avec AGRA (Al- alimentaire à travers l'accès à des moyens mangues directement de son centre de condi- liance for Green Revolution in Africa) qui de subsistance plus justes, plus sains et plus tionnement aux supermarchés par fret aérien. est constitutif de ce fonds, alors que cet opé- inclusifs », explique son site web. Ses destinations d'exportation comprennent rateur est largement décrié par les OSC
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 5 ouest-africaines. Ces dernières, qui sont en Affaires étrangères du Luxembourg, par cisionnels susceptibles d’avoir une inci- première ligne pour observer le travail de AGRA et par la Commission européenne dence sur leur vie, leurs terres et leurs l’Alliance sur le terrain depuis 10 ans, en collaboration avec le secrétariat de moyens de subsistance [...] ». Avec ses constatent que les objectifs fixés sont très l’ACP. L’Art. 10.2 de la DDP stipule que 200 millions d’euros à destination des loin d’être atteints. « Les États s'emploient à faire en sorte que “petits exploitants agricoles”, le Fond les paysans et les autres personnes tra- ABC ne devrait pas faire l’impasse sur la Le conseil d’administration du Fonds ABC vaillant dans les zones rurales participent, représentation des organisations paysannes est composé de directeurs·trices nom- directement ou par le canal de leurs organi- au sein du conseil d’administration de ce mé·e·s par le FIDA, par le ministère des sations représentatives, aux processus dé- fonds ou dans son comité directeur. L’aide publique au développement : un leadership au-delà des chiffres « Afin de consolider ses atouts et de Le gouvernement confirme à plusieurs maximiser son impact, le Luxembourg reprises que l'APD sous forme de dons maintiendra son objectif d’allouer 1 % est - et sera - toujours privilégiée, tout en de son revenu national brut à l’aide pu- utilisant la coopération comme cataly- blique au développement (APD). L’APD seur pour la mobilisation de ressources sous forme de dons sera privilégiée, tout supplémentaires. Le Luxembourg conti- en renforçant le rôle de la coopération nuera à ne pas comptabiliser dans l'APD comme acteur-catalyseur pour la mobi- les fonds mobilisés pour le financement lisation de ressources supplémentaires. international du climat ou pour l'accueil Le Luxembourg continuera d’appliquer des réfugiés. Le Luxembourg continue l’additionnalité des fonds mobilisés d’orienter ses financements vers les pays pour le financement climatique interna- les moins avancés comme au Niger, Bur- tional et pour l’accueil de réfugiés au kina ou au Mali. Plus de 40 % de l’APD Luxembourg, renforçant ainsi son image est destinée à ces pays. de marque et son influence sur la scène in- ternationale en tant que leader du dévelop- À l'avenir, le Luxembourg continuera à pement. » (Accord de coalition 2018-2023, promouvoir des mécanismes innovants p. 224-225.) de financement du développement, no- Le gouvernement luxembourgeois a tamment par le biais de garanties et d'ins- truments d'atténuation des risques et de Quo vadis, honoré son engagement de consacrer au fonds d'investissement à impact social, moins 1 % de son RNB à l'APD. L'APD luxembourgeoise a atteint 1,02 % du en partenariat avec les banques multila- térales de développement et le secteur Coopération RNB en 2020 - c'est-à-dire environ 376 millions d'euros, l’APD est infé- privé. Une nouvelle stratégie sur la fi- nance inclusive a été finalisée et une multilatérale rieure d'environ 10,8 % à celle de l'année autre sur le secteur privé est en prépara- précédente selon les chiffres du rapport tion. Non spécifié Méthodes Aidwatch. Cette diminution s'explique différentes de calcul par une contraction du RNB et une dimi- Malgré une baisse en chiffres absolus de nution des subventions bilatérales en l’APD en 2020, le Luxembourg reste l’un raison de la pandémie qui a ralenti la des bailleurs de fonds européens les plus «La politique de coopération luxembour- mise en œuvre de nombreux projets. En généreux. Il respecte ses engagements geoise s’inscrit dans le cadre des Objectifs de revanche, le budget consacré aux ONGD pour une aide basée sur les dons, orientée développement durable de l’agenda 2030 et et aux agences multilatérales a légère- vers les pays moins avancés et ne des engagements pris au niveau du finance- ment augmenté. « gonfle » pas les chiffres de l’APD avec ment du développement dans le Plan d’Action des dépenses au Luxembourg telles que, d’Addis Abeba. Dans ce contexte, le Luxem- Le Luxembourg a réorienté certains par exemple, les frais pour l’accueil des bourg continuera à promouvoir et à soutenir fonds de la coopération au développe- réfugiés, les bourses pour les étudiants le multilatéralisme et la coopération interna- ment qui n'ont pas pu être dépensés des pays du Sud ou des remises de dettes. tionale.» (Accord de coalition 2018-2023, comme prévu pour soutenir la réponse à p. 224.) la COVID-19, mobilisant 2 à 3 millions Ce rôle de leader entraîne des responsabi- d'euros pour chacun de ses pays parte- lités supplémentaires, ne serait-ce que En conformité avec la « Stratégie générale naires et mettant en œuvre cette aide pour encourager les autres pays euro- de la coopération luxembourgeoise - en conjointement avec des partenaires euro- péens à suivre le mouvement. Le Luxem- route pour 2030 », l’aide au développement péens dans le cadre d’initiatives Team bourg devrait se faire le champion, multilatérale constitue en 2020 environ Europe. auprès des institutions internationales et 30 % de l’aide publique au développement des États membres de l'UE, d'une ap- (APD) luxembourgeoise. Elle est en aug- Les ONGD au Luxembourg ont eu la proche du développement fondée sur les mentation depuis 2018 où elle représentait possibilité de restructurer leurs projets et subventions et non sur les prêts. 27,95 % de l’APD. C’est ainsi qu’en 2020, de fournir des fonds à leurs partenaires un montant de 124,6 millions d’euros a été pour les aider à lutter contre la pandémie Ce texte est basé sur la page Luxem- alloué à des organisations internationales et et ses conséquences. bourg du rapport AIDWATCH 2021 multilatérales. (Concord Europe, 2021)
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 6 Répartition de l’APD multilatérale 2020 2020 2019 APD multilatérale % DE l'APD % DE APD multilatérale % DE L'APD % DE multilatérale L’APD multilatérale L’APD Coopération multilatérale brute 124.618.745,02 € 100,00% 30,80% 119.670.040,93 € 100,00% 28,15% Organismes des Nations unies 48.769.091,64 € 39,13% 12,05% 41.803.767,41 € 34,93% 9,83% Institutions de l’Union européenne 43.065.020,12 € 34,56% 10,64% 36.685.820,71 € 30,66% 8,63% Banque mondiale & FMI 17.721.674,38 € 14,22% 4,38% 20.915.000,00 € 17,48% 4,92% Banques régionales de 8.172.963,26 € 6,56% 2,02% 12.701.601,19 € 10,61% 2,99% développement Autres 6.889.995,62 € 5,53% 1,70% 7.563.851,62 € 6,32% 1,78% APD brute 404.596.867,04 € 100,00% 425.167.485,20 € 100,00% Ainsi, en 2020, 39 % de l’aide multilatérale a été allouée aux organismes des Nations unies, presque 35 % aux institutions de l’Union européenne, plus de 14 % à la Banque mondiale et au FMI et presque 7 % aux Banques régionales de développement. Ventilation sectorielle de l’APD multilatérale (rapport annuel de la coopération luxembourgeoise) 2020 2019 APD multilatérale % APD multilatérale % Infrastructure et services sociaux 5.909.596,38 € 4,74 % 25.009.129,14 € 20,90 % Éducation 1.100.000,00 € 0,92 % dont éducation, niveau non spécifié 500.000,00 € 0,42 % dont éducation de base 600.000,00 € 0,50 % Santé 3.872.315,00 € 3,11 % 9.270.000,00 € 7,75 % dont santé, général 1.172.315,00 € 0,94 % 2.220.000,00 € 1,86 % dont santé de base 2.700.000,00 € 2,17 % 6.650.000,00 € 5,56 % dont maladies non-transmissibles 400.000,00 € 0,33 % Politique en matière de population/santé 9.000.000,00 € 7,52 % et fertilité Distribution d’eau et assainissement 700.000,00 € 0,58 % Gouvernement et société civile 1.958.577,68 € 1,57 % 4.439.129,14 € 3,71 % dont gouvernement et société civile - 235.760,00 € 0,19 % 3.702.200,00 € 3,09 % général dont politique fiscale et soutien à 250.000,00 € 0,21 % l’administration fiscale Droits de la personne 210.760,00 € 0,17 % 217.200,00 € 0,18 % Organisations et mouvements de défense 25.000,00 € 0,02 % 2.025.000,00 € 1,69 % des droits des femmes et institutions gouvernementales dont conflits, paix et sécurité 1.722.817,68 € 1,38 % 736.929,14 € 0,62 % Infrastructure et services sociaux divers 78.703,70 € 0,06 % 500.000,00 € 0,42 % Infrastructure et services économiques 41.674,38 € 0,03 % 456.359,00 € 0,38 % Centrales nucléaires 56.359,00 € 0,05 % Banques et services financiers 400.000,00 € 0,33 % Entreprises et autres services 41.674,38 € 0,03 % 0,03 % Production 304.731,00 € 0,25 % dont Agriculture, sylviculture et pêche 304.731,00 € 0,25 % Aide humanitaire 8.150.000,00 € 6,54 % Assistance matérielle et services d’urgence 7.900.000,00 € 6,34 % Prévention des catastrophes et 250.000,00 € 0,20 % préparation à leur survenue Non affecté/non spécifié 110.517.474,27 € 88,68 % 93.899.821,79 € 78,47 % Total de l’aide multilatérale 124.618.745,02 € 100,00 % 119.670.040,93 € 100,00 %
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 7 Malheureusement cette répartition n’a ou domaine spécifique rendant difficile le lontaires, au budget général des agences. qu’une valeur très limitée, car 88,68 % de suivi des objectifs de la coopération de dé- l’APD multilatérale en 2020 est classée veloppement. Néanmoins, il est regrettable que pour plus dans la catégorie « Non affecté/non spéci- d’un quart de l’APD, le rapport annuel de fié ». En 2019, cela concernait 78,47 % de La situation s’explique par la nature même la coopération luxembourgeoise ne pré- l’APD. Ceci signifie que 27,3 % du total de de l’aide multilatérale qui est constituée des sente pas de manière transparente l’utilisa- l’APD ne peut pas être affecté à un secteur contributions directes, obligatoires ou vo- tion de ces fonds. Les ONG de développement et la politique de coopération Acteur important de l’aide bilatérale Indépendance It’s complicated « L’APD luxembourgeoise se caractérise Comme il est répété au fil des ans dans le de 1 % du revenu national brut (RNB) est par ailleurs par l’importance accordée aux rapport annuel de la coopération, la politique relativement grande. ONG de développement. La complémenta- de la Coopération luxembourgeoise perçoit rité et les partenariats dynamiques et di- les ONGD comme « partenaire dans la lutte Sachant que les ONGD au Luxembourg versifiés avec les ONG internationales, na- contre la pauvreté et les inégalités sociales et doivent compléter le budget annuel de 20 % tionales et locales seront maintenus et ren- non pas des agents exécutants du gouverne- ou 40 % (selon pays d’intervention ou type forcés, notamment par le biais d’accords ment » et comme « un vecteur complémen- de projet) à travers des collectes de fonds de partenariat stratégiques pluriannuels, taire de l’aide bilatérale permettant d’être autres que ceux de la Direction de la Coopé- permettant de renforcer les compétences actif dans des pays et secteurs où le minis- ration, on peut estimer que les ONGD mo- spécifiques et l’avantage comparatif des tère ne peut intervenir et d’atteindre des par- bilisent autour de 16,5 millions du public au ONG au niveau des communautés locales ties de la population des pays en développe- Luxembourg en plus de l’APD. et en matière de promotion de la bonne ment où la coopération bilatérale n’est pas gouvernance. » (Accord de coalition 2018- présente en travaillant au plus près des béné- Selon le rapport Aidwatch 2021, les ONGD 2023, p. 225.) ficiaires. » dans les 27 pays de l’Union européenne re- çoivent environ 20 % de financement de La situation des ONG de développement Les ONGD sont encouragées à intervenir base. Ce financement est un élément impor- (ONGD) au Luxembourg est unique avec dans les pays partenaires de la coopération et tant en vue de la capacité d’une ONGD en 2020, 91 associations disposant d’un les pays dits les moins avancés avec des taux d’investir dans le renforcement des capaci- agrément auprès du ministère de tutelle et de cofinancement plus avantageux par une tés et de pouvoir se développer pour faire permettant à la société civile de s’engager modification de la loi du 6 janvier 1996 sur la face aux défis prochains. pour la solidarité internationale. En France, coopération au développement et l’action hu- on estime environ 450 organisations avec manitaire en 2017. Cela crée des tensions La plupart des ONGD sont regroupées au une population plus de cent fois plus nom- voire de la concurrence entre projets et rend sein de la fédération Cercle de Coopération breuse. difficile la continuité du travail des ONGD qui représente les intérêts des ONGD dans certains pays où les inégalités per- auprès du gouvernement. La société civile En termes financiers, l'importance des durent, mais pour lesquels il faut trouver des organisée joue un rôle de contrepoids dé- ONGD semble confirmée avec 20 % de apports financiers supplémentaires. mocratique, d’observateur et de veille et cri- l’aide publique au développement qui leur tique de la mise en œuvre des politiques est destinée. Même dans une année extraor- À travers le soutien du gouvernement aux gouvernementales. dinaire comme 2020, l’année où la pandé- projets de développement ou aux projets de mie a creusé les budgets de l’État, le budget sensibilisation et d’éducation au développe- Les ONGD luxembourgeoises reçoivent affecté aux ONGD a progressé (+2,5 mil- ment des ONGD qui, elles, regroupent une plus de 17 % de l’APD luxembourgeois. Au lions) alors que le montant total de l’APD a large partie de la société civile, l’accepta- fil des ans, elles ont développé leurs capaci- diminué (-23,8 millions). tion du grand public pour une APD autour tés et sont devenues des acteurs importants de la coopération au développement. APD et ONGD Le Cercle de Coopération et les ONGD sont consultés régulièrement à travers plusieurs €450,000,000 processus de réflexion stratégique concernant la politique de coopération au développe- €400,000,000 ment. L’échange entre le Cercle et le minis- €350,000,000 tère de tutelle est formalisé à travers le Groupe de travail MAEE-ONG, qui se réunit €300,000,000 environ cinq fois dans l’année. Le Cercle de €250,000,000 Coopération est aussi observateur actif au Comité Interministériel pour la Coopération €200,000,000 APD au Développement (CID) pour tous les points dont bilatéral en relation avec le sujet de la cohérence des €150,000,000 dont ONG politiques pour le développement. €100,000,000 Cependant, une réelle participation poli- €50,000,000 tique des organisations de la société civile impliquerait également la possibilité de co- €0 construire les stratégies et documents de ré- 2013 2018 2019 2020
8 NOVEMBRE 2021 En route pour 2023 8 férence pour la mise en œuvre des politiques Il en va de même pour la programmation veloppement. Cela se matérialise par l’enga- gouvernementales. Ce rôle de coordination de l’aide européenne. Dans le cadre des gement de personnels formés qui créent et et de mise en commun des intelligences col- initiatives Team Europe auxquelles il par- organisent des activités dans les écoles et lectives des acteurs de la société civile et ticipe, le Luxembourg devrait se faire, au lycées, des formations pour des personnes étatiques se doit d’être au centre de la parti- travers de ses délégations, le porte-parole relais, des campagnes publiques, des mobili- cipation politique de nos démocraties. d’une participation de qualité des acteurs sations de différents publics et des échanges de la société civile locale au processus de réguliers avec les décideurs politiques. De même, dans les pays partenaires, il est conception et planification des actions eu- important de pouvoir faire participer de ma- ropéennes. En 2020, le pourcentage de l’APD consacré nière constructive tous les acteurs à la pro- à l’éducation au développement se situait à grammation de l’APD. Vu l’impact de ces La prédécesseuse du ministre actuel, Pau- 0,62 %. Ceci est substantiellement inférieur réflexions sur le travail des ONGD, une lette Lenert, avait initié un processus d’éla- aux recommandations du Programme des concertation en amont et sur davantage de boration des PIC basé sur une approche pan- Nations Unies pour le développement sujets serait appréciée, notamment au niveau gouvernementale. Lors d’une session de (PNUD) depuis le milieu des années 90. des Programmes indicatifs de coopération préparation pour le PIC du Cap Vert à la- « On pourrait consacrer jusqu'à 3 % des dé- (PIC). En effet, les ONGD actives dans un quelle il avait été convié, le Cercle de Co- penses engagées au titre de l'aide accordée pays spécifique et les organisations de la so- opération avait plaidé pour une meilleure par les pays donateurs pour sensibiliser leur ciété civile locales ne sont pas consultées cohérence des politiques pour le développe- opinion publique aux réalités de l'après- lors du développement et de l’évaluation de ment. Cet avis est malheureusement resté guerre froide et de l'interdépendance Nord- ces accords généraux avec les pays parte- sans suite. Depuis, le Cercle de Coopération Sud » (Rapport Mondial sur le Développe- naires de la coopération. Or, une telle dé- n’a plus été invité à partager son expérience ment 1993 du PNUD). Face à l’importance marche permettrait non seulement de faire et ses suggestions sur les PIC. de ces actions pour sensibiliser et engager la connaître les préoccupations de la société population, le Luxembourg devrait investir civile, mais permettrait aussi une réelle co- La politique de coopération au développe- au moins 2 % de son APD dans l’éducation ordination des différents acteurs en tant que ment accorde une grande importance aux ac- au développement et à la citoyenneté mon- partenaires effectifs de la coopération. tions de sensibilisation et d’éducation au dé- diale et solidaire. La cohérence des politiques devenu une plateforme qui permet à la Di- rection de la Coopération de présenter et de pour le développement valoriser son travail au sein du gouverne- ment, n’utilisant pas son potentiel de plate- forme multi-acteurs ni multisectoriels. Le CID Un avis n’en cache pas un autre Des sujets tabous ? Il s'agit certainement d'une contribution im- portante pour s'assurer que l'aide au déve- « Le comité interministériel pour la coopéra- tiques pour le développement et organise une loppement conserve la place qui lui revient tion au développement (CID), présidé par le réunion annuelle avec un sujet sélectionné dans le paysage politique luxembourgeois. ministère ayant la coopération au développe- par lui-même. Ceci permet de s’assurer que Cependant, si la CPD ne conduit plus à des ment dans ses attributions, assurera la coordi- la société civile est représentée et que son discussions et à des apprentissages signifi- nation et la cohérence de la politique pour la point de vue et son expertise sur les questions catifs, la politique de coopération au déve- coopération au développement. Il fournit le de politique de coopération au développe- loppement n’atteindra pas ses objectifs, car forum pour des échanges de vues réguliers ment sont pris en compte. les impacts des incohérences saperont les entre ministères et veillera à promouvoir pour efforts et progrès réalisés. le compte du Gouvernement le dialogue avec Néanmoins, le Cercle est invité uniquement notamment la société civile sur les questions de lorsque le concept de la CPD est discuté et Ce point de vue a été confirmé par la revue politique de coopération au développement. » non pour les sujets où les enjeux de cohérence mi-parcours du comité d’aide au dévelop- (Accord de coalition 2018- 2023, p. 226.) sont cruciaux et pourraient avoir un réel pement (CAD) fin novembre 2020, avec sa impact. Par exemple, les thématiques géné- recommandation de considérer davantage La cohérence des politiques pour le dévelop- rales du programme de travail 2021 et notam- le rôle important de la société civile dans la pement (CPD) est au cœur des ambitions gou- ment les stratégies sectorielles de la Coopéra- CPD : « Nous avons également encouragé vernementales luxembourgeoises et se re- tion luxembourgeoise sur la finance inclusive les réflexions sur la manière dont le Luxem- trouve confirmée dans la loi modifiée sur la et secteur privé, la digitalisation, le climat, le bourg pourrait permettre à la société civile coopération au développement du 9 mai 2012. genre et l’action humanitaire ne sont pas de contribuer davantage aux débats d'actua- considérés comme des sujets de la CPD. Mais lité, au-delà des échanges utiles au sein du Un Comité Interministériel pour la coopéra- le Cercle pourra participer à une présentation comité interministériel ». tion au développement (CID) « est appelé à du PCSD toolkit de l’OCDE, une réunion donner son avis sur les grandes orientations de avec le Center for Global Development Policy Le CAD continue de noter que l'une des la politique de coopération au développement, (CDG), et, s’il est prêt, du « Nohaltegkeets- bonnes pratiques de la CPD est d'élaborer sur la cohérence des politiques pour le déve- scheck », un instrument de contrôle des effets des avis sur les politiques différentes. Or, loppement ainsi que sur les matières indiquées de la politique luxembourgeoise que la société le dernier avis de ce comité date du 2 juin par la présente loi. (…) » (loi du 9 mai 2021, civile revendique depuis plusieurs années et 2017 et porte sur la cohérence de la poli- modifiant la loi modifiée du 6 janvier 1996). qui devrait inclure l’impact sur les popula- tique agricole commune (PAC) au regard tions du sud globalisé pour veiller à la CPD. des politiques pour le développement. Le CID se réunit en principe tous les deux Depuis son existence, le CID a émis trois mois sous la présidence du Directeur de la Co- Cela laisse l’impression que le CID ne rem- avis qui ont été transmis aux ministres res- opération au développement. Depuis 2016, le plit pas sa mission d’être un réel forum faci- pectifs. Considérant les défis grandissants Cercle de Coopération est invité à participer litant les échanges de vues réguliers entre de la cohérence des politiques pour le dé- aux réunions en tant qu’observateur actif pour les différents ministères et la société civile veloppement, les avis ne devraient pas les points concernant la cohérence des poli- représentée par le Cercle. Le CID est manquer.
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