Le carême protestant, sous le régime de la grâce - Reforme.net

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Publié le 21 février 2021(Mise à jour le 20/02)
Par Luc Perin

Le carême protestant, sous le
régime de la grâce
Le 21 février est le premier dimanche de la période du carême. Pour les
protestants, ce temps est à mettre à profit pour développer sa vie spirituelle, lire
la Bible, méditer et prier.

Du mercredi des Cendres au Samedi Saint, on compte quarante-six jours.
Pourtant, comme son étymologie l’indique (du latin, « quarantième »), le carême
ne comprend que quarante jours… C’est tout simplement que les six dimanches
de la période ne sont pas comptés. Dans l’Église primitive, le carême
correspondait à un temps de préparation des catéchumènes au baptême, célébré
la nuit de Pâques. C’était un temps de pénitence, c’est-à-dire de repentir des
fautes commises, où les chrétiens pratiquaient le jeûne et l’abstinence de viandes.
Cette pratique faisait référence aux quarante jours de jeûne de Jésus au désert
(Mt 4, 2 et Lc 4, 1-2).

Solidarité et sobriété
La Réforme n’a pas rejeté le carême mais a pris du recul par rapport aux
pratiques pénitentielles. Celles-ci sont restées très strictes dans l’orthodoxie mais
sont devenues moins exigeantes dans le catholicisme. « Au XVIe siècle, la critique
des réformateurs a porté sur ces choses que l’on devait faire pour être digne de
recevoir le salut, comme les indulgences ou le jeûne, rappelle Nicolas Cochand,
maître de conférences en théologie pratique à l’Institut protestant de théologie, à
Paris. Aujourd’hui, d’un point de vue protestant, le carême est principalement un
temps de solidarité envers les plus pauvres, un temps d’abstinence, par exemple
d’alcool, et un temps à explorer pour une quête spirituelle contemporaine, la
recherche d’une vie plus simple. Cette idée d’une sobriété heureuse peut tout à
fait être rattachée à Calvin. »

Approches luthériennes
C’est la tradition luthérienne qui accorde le plus de place au carême dans ses
liturgies, notamment par la célébration du mercredi des Cendres. « Le carême est
un moment où l’on médite le sens ou le non sens de la passion et de la mort de
Jésus, explique Sophie Letsch, pasteure luthérienne de la paroisse des Hauts de
Bruche (Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine, UEPAL), dans le
Bas-Rhin. Le fait que le Christ nous rejoigne dans notre faiblesse nous fait
prendre conscience de nos limites, et nous pouvons d’autant plus ressentir sa
grâce. Le carême est un moment où nous nous recentrons, où nous redéfinissons
nos priorités. » Cette année, Sophie Letsch s’est particulièrement investie dans
une nouvelle proposition, les « Parenthèses de Carême » : chaque mercredi de
carême, l’UEPAL propose sur son site Internet des ressources pour vivre ce
temps, dans le contexte de la crise sanitaire.

Le « Carême Protestant » 2021
Mais le rendez-vous emblématique du carême des protestants français reste
l’émission « Carême Protestant » diffusée sur France Culture. À partir de ce
dimanche 21 février et jusqu’au dimanche 28 mars 2021, à 16h, les auditeurs ont
rendez-vous avec Samuel Amedro, pasteur de l’Église protestante unie de France
à Paris. Le thème de ses conférences ? « Les chrétiens pourraient changer le
monde. »
Publié le 23 avril 2020(Mise à jour le 23/04)
Par Ousmane Yansané

Les musulmans s’apprêtent à vivre
un ramadan moins festif mais plus
spirituel
Cette année, une bonne partie du ramadan aura lieu pendant le confinement.
Comment les fidèles musulmans appréhendent-ils ces prochains jours de jeûne ?

Le ramadan débute ce vendredi 24 avril. C’est le neuvième mois de l’année
lunaire pendant lequel les croyants s’abstiennent de manger, de boire et d’avoir
les rapports intimes entre le lever et le coucher du soleil. Une quête spirituelle,
un moment de communion, au cours duquel chaque fidèle se tourne vers Dieu
pour purifier son âme. C’est aussi l’occasion d’exprimer son amour et son
altruisme envers les autres.

Situation inédite
Pour rappel, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a exhorté le mois
dernier dans un communiqué “les responsables musulmans à maintenir les
mosquées fermées et incite les fidèles à accomplir leurs prières journalières chez
eux.” “ C’est la seule attitude responsable et conforme aux principes et valeurs de
notre religion dans ce contexte d’épidémie,” précise le président du CFCM,
Mohammed Moussaoui.

C’est une situation inédite. Les lieux de cultes resteront fermer après le 11 mai
prochain.
Ça sera donc un mois de ramadan sans prière à la mosquée, sans iftar collectif (la
rupture du jeûne). Les fidèles musulmans devront se soumettre aux consignes
sanitaires pour éviter toute propagation du Covid-19. Cette année, on assistera à
un ramadan d’exception, très différent des précédents.

L’importance du tarawih
Ce ramadan sera à l’épreuve du confinement. Habituellement, ces trente jours de
jeûne sont marqués par le tarawih. Ce sont des prières quotidiennes et nocturnes
que chaque musulman peut effectuer chez soi ou en groupe à la mosquée pendant
le mois sacré du ramadan et ce, en dehors des cinq prières obligatoires. “Les
prières nocturnes sont fortement recommandées pendant le mois du ramadan ”
explique Moussa Melghaidi, maître d’école coranique à la mosquée de l’Argonne,
dans un quartier d’Orléans. “Le Prophète Mohamed a dit, dans des paroles
rapportées par Al-Boukhari, que quiconque passe les nuits de ramadan en prière
par foi et en espérant la récompense [auprès d’Allah] verra ses péchés antérieurs
pardonnés ” ajoute-t-il.

Mais pour Mustapha Ettaouzani, président du Conseil départemental du culte
musulman du Loiret (CDCM), “ il est important, voire primordial de respecter les
consignes du gouvernement et des autorités sanitaires, malgré l’importance du
tarawih. Chacun doit faire ses prières chez soi. ”

Des adaptations au confinement
Au vu des circonstances, les familles musulmanes n’auront pas la possibilité de
partager ce quatrième pilier de l’islam avec leur entourage, hormis entre les
membres du même foyer.

Mais qui dit période exceptionnelle dit solution envisageable. Dans le Loiret,
plusieurs dispositifs ont été mis en place. “Nous avons commencé à organiser des
prêches vidéo dès le début du confinement et cela va continuer pendant ce mois
saint. En plus nous organisons des permanences téléphoniques ouvertes tous les
jours et tenues par un collège d’imams qui se relaie” explique Mustapha
Ettaouzani.

Les fois précédentes, les associations musulmanes avait la possibilité d’organiser
l’iftar dans les mosquées pour aider les personnes dans le besoin. Cela va
continuer, car cette année, elles mettront en place de la distribution de repas à
emporter pour les nécessiteux et les étudiants loin de leur famille.

Partout, en France, les musulmans se mobilisent et la solidarité s’organise pour
venir en aide aux plus démunis. C’est le cas par exemple à Angers, où Yaya Barry,
jeune étudiant et membre de l’association musulmane de la ville, compte
s’investir pour soutenir les personnes âgées, musulmanes ou non. “ Nous allons
distribuer des paniers-repas dans certaines familles,” explique t-il modestement.

Un ramadan à la maison
Ce ramadan aux allures particulières est source de motivation pour de nombreux
musulmans. Cela va permettre de se recentrer sur l’essentiel, comme nous
l’explique Alpha Sow, ressortissant guinéen, marié et père d’une petite fille de
presque un an. Il relativise par rapport à cet événement inattendu. Selon lui, le
confinement ne viendra pas perturber son mois de jeûne. Car c’est justement
l’occasion de se consacrer à l’étude des textes religieux, à la méditation et à la
réflexion. “ Lors des ramadans précédents, mon travail et mes nombreuses
occupations ne me permettaient guère de me focaliser entièrement à la lecture du
Saint Coran. Mais cette année, je pourrai m’investir efficacement à cette tâche”
dit-il sereinement.

Ousmane Yansané
Publié le 4 juin 2019(Mise à jour le 5/06)
Par Ousmane Yansané

L’Aïd El-Fitr marque la fin du
ramadan
Les musulmans célèbrent ce mardi 4 juin la fin du jeûne, l’Aïd El-Fitr. Mais que
signifie cette fête pour ces nombreux fidèles de par le monde ?

L’Aïd El-Fitr est également appelé « Aïd El-Séghir », la fête de la rupture. Elle
correspond chaque année au premier jour du mois Chawwal du calendrier
hégirien (islamique). Cette fête, synonyme de partage, de paix et d’amour, est
l’occasion pour toute la communauté islamique de se souhaiter mutuellement «
Aïd Moubarak ». Cette expression signifie bonne fête de l’Aïd ou “Que Dieu vous
bénisse”. C’est l’un des jours les plus importants pour les millions de fidèles dans
le monde.

Bien plus qu’une rupture du jeûne, c’est un moment chaleureux. Après la prière
matinale et collective, les croyants vêtus de leurs plus beaux habits se rendent
visite et se réunissent autour d’un repas. Ils se souhaitent les vœux et se félicitent
du jeûne accompli et des bonnes actions effectuées.
Une grande fête
Les personnes non-musulmanes peuvent aussi participer à cette fête. Certains
sont conviés chez leur ami pour déguster les mets, boire du thé, échanger sur les
bienfaits de la vie et faire un bilan sur ce mois d’abstinence. D’ailleurs, dans les
villes françaises certaines mosquées ouvrent leurs portes après la prière matinale
pour laisser place aux visiteurs et personnes désireuses de connaître la tradition
islamique.

Cette fête religieuse clôture un mois de piété intense. Le ramadan qui a débuté le
5 mai dernier était une aubaine pour chaque musulman de faire une introspection
sur sa foi. L’occasion aussi de faire une auto-évaluation dans le but de purifier son
âme et son esprit. Il se traduit par une privation alimentaire, d’ascèse physique et
morale. C’est un moyen de se repentir, et faire son mea-culpa pour les péchés
commis tout au long de l’année.

Le ramadan, une période considérée parfois comme contraignante, l’est moins
pour certains. C’est le cas de Yaya Diallo, jeune étudiant de Strasbourg, « cette
année, le climat a été plutôt clément. J’ai bien vécu le ramadan donc moins
ressenti l’impact du jeûne » explique-t-il modestement. Avant la fin du ramadan,
tous les musulmans doivent aussi s’acquitter de la Zakat Al-Fitr (aumône légale),
troisième pilier de l’islam et sorte d’offrande sans contrepartie.

La Zakat, sujet de polémique
Chaque croyant a l’obligation de venir en aide à une personne dans le besoin,
c’est un acte symbolique. Elle est qualifiée de « taxe sociale purificatrice », car
elle permet de partager non seulement avec les plus démunis, mais aussi de
purifier son âme contre toutes formes d’avarice.

En revanche, la question liée à sa revalorisation allant de 5 euros à 7 euros sous
l’impulsion du Conseil théologique musulman de France (CTMF) a suscité le
débat cette année. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) quant à lui ne
s’est pas prononcé là-dessus. En effet, cette différence se traduit par le fait que le
mode d’évaluation prend en compte la variation des prix des denrées alimentaires
selon les régions. Un écart qui peut exister entre Paris et les autres régions de
France par exemple. Le CFCM « tient à rassurer les musulmans que les différents
avis sont probants, légitimes et qu’il n’y a pas lieu d’en faire une polémique
puisque depuis le début de l’islam, les gens sortaient la zakat sous forme de
denrées alimentaires différents représentant le même volume, mais pas la même
valeur monétaire ». Il faut tout de même rappeler que c’est la somme de 7 euros
qui est communiquée à tous les fidèles musulmans de France. Mais cette valeur
versée a peu d’importance, car seul l’acte compte pour le fidèle désireux
d’accomplir sa foi, comme nous le précise Abdelhafid, jeune agriculteur de 27 ans,
près de Marseille : « à défaut de ne pas pouvoir verser de l’argent aux pauvres, il
est possible de leur donner de la nourriture, le plus important est d’aider les gens
qui sont dans le besoin ».

Publié le 6 mars 2019(Mise à jour le 8/03)
Par Nathalie Leenhardt

Les protestants suivent-ils le
Carême ?
Les protestants ne tiennent pas le jeûne du Carême comme indispensable. Ces 40
jours avant Pâques sont considérés comme un temps tourné vers la prière.

Aujourd’hui, mercredi 6 mars est le mercredi des Cendres, signe du début du
Carême pour les catholiques et les orthodoxes. Les protestants n’ont pas le même
rapport au Carême.
Les raisons en sont d’abord historiques et théologiques. Convaincus qu’ils sont
portés par la Sola Gratia, la grâce seule, les luthériens et les réformés, héritiers
de Luther et de Calvin, refusent l’idée de pénitence et de “gagner son ciel” en
jeûnant. Sauvés par grâce, une grâce offerte inconditionnellement à toutes et
tous, ils n’expriment pas le besoin de poser des actes pour se rapprocher de Dieu.
Cette attitude est inspirée de la geste de Luther, qui, rejetant l’idée de l’achat du
salut par les œuvres et donc les indulgences, pose les fondements de la Réforme.

Au fil du temps pourtant, les choses ont pu évoluer et le temps de Carême est
aujourd’hui perçu comme un temps à part, pour se préparer pendant 40 jours à
Pâques. Ces 40 jours renvoie au temps passé par Jésus au Désert. Beaucoup de
protestants considèrent cette période comme “un moment privilégié d’écoute, de
prière et d’engagement renouvelé au cours duquel chacun essaie de mieux suivre
la voie et la voix du Christ, de prier, d’entrer dans son enseignement” comme
l’explique la pasteure Jane Stranz.

Le Carême, temps de prière et de
méditation
La sobriété, la modération et la simplicité ont toujours tenu des places
importantes dans la spiritualité protestante. Depuis quelques années et face aux
enjeux du réchauffement climatique un jeûne pour le climat a été lancé au niveau
mondial par la Fédération luthérienne mondiale, rejointe par d’autres Églises
chrétiennes ainsi que par des représentants d’autres religions. D’autres initiatives
sont prises ici et là dans les paroisses comme le jeûne informatique.

Pour encourager à la réflexion, la méditation et la prière, ont été créées les
Conférences de Carême protestant. Cette émission de radio est diffusée chaque
dimanche sur France Culture, cette année du 10 mars au 14 avril 2019 de 16h à
16h30 (rediffusion sur Fréquence protestante le lundi suivant à 21h30, ou en
podcast sur le site de France Culture).

Cette année, ces conférences sont assurées par le pasteur Bruno Gaudelet,
membre de l’Église protestante unie de France de Neuilly-sur-Seine (92).

Bruno Gaudelet propose de cheminer avec six personnages touchés dans leur
existence par leur rencontre avec Jésus. Solidement étayées par l’exégèse
biblique, ces relectures narratives, de facture théâtrale, feront partager les
remises en cause intérieures de ces premiers témoins selon leur ancrage social et
théologique.

En chemin vers Pâques, ces conférences se veulent un moyen d’entrer dans
l’espérance !

Voici le programme des conférences :

10 mars : LE TÉMOIGNAGE DE PIERRE
Apprendre à se pardonner soi-même
Luc 5.1-11, Marc 8.27-33, Matthieu 26. 69-75, Jean 21.14-25

17 mars : LE TÉMOIGNAGE DE MARIE-MADELEINE
La Bonne Nouvelle qui relève
Luc 8.1-3, Jean 20.1-18

24 mars : LE TÉMOIGNAGE DE THOMAS
Croire au-delà du voir
Jean 11.16, 14.1-14 et 20.24-31

31 mars : LE TÉMOIGNAGE DE NICODÈME
Il faut naître de nouveau
Jean 3.1-12 et 19.38-42

7 avril : LE TÉMOIGNAGE DE PAUL
De la haine à l’amour
Actes 9.1-22, 1 Corinthiens 15.1-11, 2 Corinthiens 11.18-32, Galates 1.11-24

14 avril : LE TÉMOIGNAGE DE JÉSUS
Père me voici !
Matthieu 26.36-46, Marc 14.32-42, Luc 22.39-46

Les 6 conférences sont publiées en une brochure au prix de : 18 € pour la France
et les DOM/TOM et de 21 € pour l‘étranger et sont enregistrées sur 3 CD
indivisibles au prix de : 27 € pour la France et les DOM/TOM et de 32 € pour
l’étranger.
Publié le 14 novembre 2018(Mise à jour le 2/07)
Par Collectif

COP24 : Jeûnons ensemble pour le
climat !
Des femmes et des hommes de tous horizons lancent un appel à toutes celles et
ceux qui se sentent concernés par les défis du changement climatique.

Appel au jeûne avant la COP24
Jeûner, c’est prendre soin de soi, des autres et de notre environnement. Prendre
soin de soi en offrant à son corps et son esprit un temps différent. Prendre soin
des autres en témoignant de notre capacité à nous limiter pour une meilleure
répartition des ressources. Prendre soin de ce que certains appellent nature,
d’autres création, en nous montrant capables de résister à l’avidité encouragée
par nos sociétés de consommation.

Jeûner pour le climat, c’est répondre à l’alerte lancée par le Groupe
intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et interpeller les citoyens et
les gouvernements à l’occasion de la COP24 :
Oui, nous avons entendu qu’il est à la fois urgent et possible d’agir pour limiter le
réchauffement climatique en cours. Continuant à évoluer sur sa trajectoire
actuelle, il engagerait à court terme des dérèglements dévastateurs et
irrémédiables pour l’ensemble du vivant.

Oui, nous avons conscience que les conséquences du dérèglement climatique
pour l’humanité touchent et toucheront d’abord les populations les plus
vulnérables. Chacun et tous devons nous mobiliser pour prévenir les injustices et
les violences locales qui sont le résultat d’une irresponsabilité collective.

Oui, nous avons une plus belle ambition que celle de « tirer notre épingle du jeu »
: que la crise que nous traversons à une échelle inédite soit l’occasion d’une
transformation positive de l’humain, conscient d’appartenir à un monde, à une
histoire, à une communauté avec lesquels il interagit pour le meilleur et non plus
pour le pire.

Jeûner pour le climat, c’est saisir l’occasion de réfléchir à notre manière
d’habiter le monde et de décider de changements concrets dans nos modes de vie
(choisir, par exemple, de manger, se déplacer, ou consommer autrement).

Jeûner ensemble, c’est rassembler des femmes et des hommes de tous horizons,
d’appartenance confessionnelle ou non, militants ou non, autour d’une pratique
ancestrale et d’une identité commune : habitants d’un monde en surchauffe, en
résistance devant la fatalité et en espérance pour un changement au bénéfice de
tous.

Jeûner pour le climat, c’est sortir de la fascination du désastre, témoigner de la
capacité humaine au changement, à la solidarité avec sa propre espèce et
l’ensemble du vivant et encourager les gouvernements à faire des enjeux
climatiques le point giratoire de leur politique.

Rendez-vous le vendredi 30 novembre, samedi 1er décembre et dimanche
2 décembre, jour d’ouverture de la COP24. Jeûnons un jour ou plusieurs.
Jeûnons seul ou en groupe. Jeûnons de nourriture ou d’autre chose (de sa voiture,
de son smartphone, etc.). Et pourquoi ne pas rompre son jeûne par un repas
joyeux, qui célèbre nos engagements actuels et à venir ? Proposons et rejoignons
des événements locaux de jeûne et/ou de repas de rupture partout en France,
grâce au site : jeunepourleclimat.net
Signataires
L’appel est signé par plus de 90 personnalités venues de tous les horizons :
Emmanuel Carrère, écrivain ; Alexandre Jollien, philosophe et écrivain ; Radia
Bakkouch, présidente de Coexister ; Dominique Bourg, philosophe, université de
Lausanne ; Véronique Fayet, présidente du Secours catholique ; Pauline Bebe,
rabbin ; Olivier de Schutter, ancien rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à
l’alimentation et membre du comité des droits économiques, sociaux et culturels
de l’ONU ; Siham Tamansourt, Assises musulmanes de l’écologie ; Patrick Viveret,
philosophe et cofondateur des Dialogues en Humanité ; Kankyo Tannier,
bouddhiste et vegan ; Jon Palais, militant climat ; Alexandra Breukink, pasteure ;
Natacha Cros-Ancey, pasteure ; Marion Muller-Colard, théologienne et écrivaine ;
Martin Kopp, écothéologien et militant climat ; Dominique Lang, prêtre
assomptionniste et journaliste ; Sandrine Pires, comédienne et metteur en scène ;
Dany Schmidt, agriculteur bio ; Antoine Nouis, théologien ; Colette Nys-Mazure,
écrivaine ; Jean-Claude Guillebaud, écrivain et journaliste ; Isaac Doude van
Troostwijk, guide de haute montagne UIAGM ; Jacob Rogozinski, professeur de
philosophie, université de Strasbourg ; Jenny Litzelmann, directrice de la Maison
Schweitzer ; Dominique Schoenheitz, viticultrice ; Isabelle Czernichowski-Lauriol,
chercheuse en stockage géologique de CO2 ; Sylvie Lander, artiste-peintre ;
Pascal Poirot, artiste-peintre ; Olivier Abel, philosophe ; Éric Tillette de Clermont-
Tonnerre, religieux dominicain et théologien ; Gabriel Farhi, rabbin ; Frédéric
Rognon, professeur de philosophie, université de Strasbourg ; Patrick Cabanel,
historien et directeur d’études EPHE ; Marc Félix-Faure, médecin généraliste,
diplômé en soins palliatifs ; Marie-Hélène Cahuzac-Feron, formatrice ; Jacques
Verseils, enseignant, berger en Cévennes et fondateur de l’association Abraham
Mazel ; Bernard Dugas, consultant en entreprise ; Daniel Arnera, sociologue
d’entreprise ; Caroline Sarra-Gallet, psychologue ; Olivier Wang-Genh, abbé du
monastère bouddhiste zen de Weiterswiller en Alsace ; Bertrand Hériard, jésuite ;
Stéphane Lavignotte, pasteur ; Pierre Muckensturm, artiste-plasticien ; Robin
Sautter, pasteur ; Laura Morosini, Chrétiens Unis pour la Terre ; Marcel
Ngirinshuti, coordinateur de la Toile des Églises vertes en Afrique ; Caroline
Bauer, théologienne et économiste ; Fabien Revol, théologien de l’écologie ; Jean-
Pierre Rive, pasteur et militant climat ; Alain Prin, diacre et agriculteur bio ; Loïc
Lainé, professeur de commerce international, diacre permanent et théologien de
l’écologie ; François Prouteau, président de Fondacio ; Gérard Siegwalt,
professeur émérite de théologie ; Anne-Claire Bucciali, psychologue ; Michel Hutt,
écrivain ; Bernard Rodenstein, président fondateur de l’association Espoir ;
Bertrand Gaufryau, chef d’établissement (64) ; Armelle Nouis, chef
d’établissement (75) ; Jean-Paul Vesco, évêque d’Oran ; Matthieu Fuchs,
archéologue et directeur général de collectivité territoriale ; Marie-Olga Cros,
médecin généraliste ; Antoine Lecomte, banquier ; Nathanaël Wallenhorst, maître
de conférences, université catholique de l’Ouest ; Farid Grine, imam traducteur et
aumônier pénitentiaire ; Francis Roess, informaticien ; Bruno Lamour, ancien
président du Collectif Roosevelt ; Alberto Ambrosio, dominicain ; Caroline Riegel,
réalisatrice et ingénieure ; Bernard Stoehr, guid nature ; Dominique Ley,
professeure de lettres et laïque dominicaine ; Andreas Seyboldt, pasteur ; Nicolas
Beziaux, médecin généraliste, diplômé en soins palliatifs ; Chris Doude van
Troostwijk, philosophe ; Jean-Marc Ferry, philosophe ; Mohamed Latahy,
aumônier des hôpitaux de l’université de Strasbourg ; Jean-Louis Hoffet,
conseiller régional d’Alsace honoraire ; Marie Christmann ; Caroline Runacher,
religieuse dominicaine et doyenne de la faculté de théologie de l’université de
Lille ; Anne Soupa, écrivaine et présidente de la Conférence catholique des
baptisé-e-s francophones et du Comité de la jupe ; Corinne Lanoir, enseignante à
l’Institut protestant de théologie et pasteure ; Marie-Laure Denès, religieuse
dominicaine et provinciale de la Congrégation romaine de Saint-Dominique ;
Marco Baumann, propriétaire de l’Hôtel des Berges à Illhaeusern ; Steven
Weinberg, biologiste spécialiste du monde sous-marin et voyageur curieux de
nature ; Isabelle Ullern, faculté libre d’études politiques et en économie solidaire ;
Chiara Villa, metteur en scène ; Valérie Rodriguez, directrice de la Fraternité
mission populaire de Trappes ; Thierry Truillet, lama enseignant-formateur,
ermitage bouddhiste du bocage normand ; Luk Bouckaert, SPES-Forum Belgique ;
Johan Van der Walt, professeur en philosophie du droit au Luxembourg ;
Stéphane Reitter, enseignant; Silvère Lataix, coordinateur de Bible et Création ;
Michel Maxime Egger, sociologue et écothéologien d’enracinement orthodoxe ;
Jean Jouzel, climatologue.
Publié le 26 septembre 2018(Mise à jour le 9/10)
Par Nathalie Leenhardt

Protestants et musulmans
“Que sait-on de l’islam, en milieux protestants ? À quelques exceptions près,
globalement, peu de choses.”

Que sait-on de l’islam, des musulmans, en milieux protestants ? À quelques
exceptions près, globalement, peu de choses. Il y a bien le jeûne et sa très
médiatique rupture, les prières quotidiennes, la séparation des hommes et des
femmes dans les mosquées, le pèlerinage à La Mecque. Mais du Coran, de son
contenu, de sa constitution, que sait-on ? Rien ou presque. C’est pourquoi la
démarche de la Fédération protestante de France, consistant à organiser une
rencontre sur les rapports entre Bible et Coran, paraît judicieuse. C’est pourquoi
aussi nous avons interrogé un certain nombre des orateurs de la soirée : comment
aborder cette épineuse question ?

C’est en effet ouvrir, une sacrée (si j’ose dire) boîte de Pandore que de poser la
question des relations entre christianisme et islam, au-delà du beau – et utopique
? – discours de l’interreligieux : « Nous sommes deux religions monothéistes,
frères et sœurs en Abraham, nous pouvons prier ensemble. » Sauf, comme
l’explique le pasteur Pierre Lacoste, qui vit au Liban, que rien n’est aussi simple
tant demeurent deux réalités éloignées : d’un côté un texte sacré, révélé,
intouchable pour la majorité des musulmans -mais pas tous, de l’autre une
bibliothèque riche de 66 livres, dont 4 évangiles, comme pour signifier aux
protestants que c’est bien dans la confrontation, le débat, les différences
d’approches que se situe le chemin de la foi, même si d’aucuns préfèrent une voie
fondamentaliste.

C’est également un vrai défi tant on sait que, dans nos banlieues, mosquées et
communautés évangéliques se retrouvent en « concurrence », œuvrant sur le
même terrain pour convertir ou évangéliser.

Pourtant, cette familiarisation avec l’autre est indispensable. Les musulmans
constituent la seconde religion en France. Et parce que si tous les musulmans ne
sont pas des islamistes – faut-il encore le rappeler ? – tous les tenants du djihad et
autres horreurs le font au nom de Dieu. Mais lequel ?

Publié le 23 mai 2018(Mise à jour le 23/05)
Par Antoine Nouis

Islam : qu’est-ce que le ramadan ?
Le ramadan, qui a commencé cette année le 17 mai, est une prescription
religieuse et un marqueur identitaire pour les musulmans.

Le meilleur moyen de construire une communauté est de permettre à ses
membres de célébrer ensemble. Lorsqu’en plus les fidèles d’une religion
surmontent ensemble une épreuve, cela renforce les relations. Si, vu de
l’extérieur, le ramadan est une obligation religieuse difficile, pour les musulmans,
c’est un marqueur identitaire qui permet une relation privilégiée avec le divin et
avec ses proches.
Pour Omero Marongiu-Perria, sociologue spécialiste de l’islam, le ramadan a une
fonction sociale très forte dans les pays musulmans. La société vit un temps
spécial, les cafés et les restaurants sont fermés, des espaces sont aménagés
autour des mosquées, les temps de rupture du jeûne sont festifs. Pourtant
certains musulmans préfèrent vivre le ramadan en France, car le climat est moins
chaud – donc l’abstinence d’eau moins difficile – et la pratique plus intériorisée,
donc plus authentique.

Le ramadan dans le Coran
L’origine du jeûne se trouve dans une sourate : « Le Coran a été révélé durant le
mois de Ramadan. C’est une direction pour les hommes : une manifestation claire
de la direction et de la loi. Quiconque d’entre vous verra la nouvelle lune jeûnera
le mois entier. Celui qui est malade ou celui qui voyagera jeûnera ensuite le même
nombre de jours. Dieu veut la facilité pour vous, il ne veut pas pour vous la
contrainte. » (Coran, II,185-187). Au commencement de la vie du Prophète, il
avait adopté le jeûne pratiqué par les juifs. Lorsqu’il a voulu se distinguer, il a
institué un mois de jeûne et il le voulut plus sévère que le carême des chrétiens.

Le mot ramadan signifie grande chaleur. Il est le nom du neuvième mois du
calendrier musulman. Comme l’année est composée de douze mois lunaires, le
mois avance de dix jours chaque année par rapport à un calendrier basé sur le
soleil. Si bien que la « grande chaleur » peut parfois être célébrée en plein hiver !

Pendant ce mois, le croyant s’abstient de manger, de boire, de fumer et d’avoir
des relations sexuelles du lever du soleil (dès que l’on peut distinguer un fil blanc
d’un fil noir, dit le Coran), à son coucher. Les jeunes enfants, les personnes âgées,
les malades, les personnes en voyage, les femmes enceintes et celles qui allaitent
ne sont pas tenus de respecter le jeûne, mais ils doivent rattraper par un jeûne de
remplacement à un autre moment de l’année. S’ils ne peuvent rattraper, ils
compensent alors le jeûne par une aumône destinée aux nécessiteux, l’équivalent
d’un repas par jour de jeûne.

Le jeûne est plus difficile en été, car les jours sont plus longs. Dans les pays
nordiques où le soleil peut encore briller à minui,t des aménagements sont
prévus. Les sages disent que l’idéal est un jeûne de seize heures, soit les deux
tiers de la journée.
Le but du jeûne est d’abord personnel, afin de se libérer de la dépendance
matérielle et de la consommation aveugle. Il renforce la spiritualité et la
soumission au divin. Le Prophète a dit que le jeûne est un bouclier qui protège la
personne du péché et des passions.

La famille et l’aumône
Le jeûne a aussi une dimension communautaire. C’est un acte social qui permet
de renforcer les liens entre musulmans. Le repas de rupture du jeûne, après le
coucher du soleil, est souvent un temps de convivialité très fort.

C’est enfin une période privilégiée pour l’aumône et le partage. C’est un moment
de prédilection pour rappeler aux riches la solidarité avec les pauvres. Jadis, les
maisons étaient ouvertes et les tables offertes aux indigents.

Pour beaucoup de musulmans, le ramadan appartient à leur identité religieuse.
Comme pour toutes les prescriptions, certains vivent le jeûne dans toute sa
rigueur, d’autres en ont une pratique plus souple. Ils jeûnent certains jours, ce
qui ne les empêche pas de participer quotidiennement aux festivités de rupture
du jeûne pour sa convivialité.

Comme pour tous les jeûnes, une attention doit être portée à la reprise de
l’alimentation, nécessairement progressive. Il est recommandé de commencer par
se réhydrater, puis par prendre un repas léger en évitant les sucres et pâtisseries.
Dans les pays du Moyen-Orient, les services d’urgence des hôpitaux sont souvent
débordés par des pics de diabète pendant le mois du ramadan.

Normalement, le jeûne n’est prescrit qu’à partir de la puberté, mais on voit des
enfants jeûner de plus en plus tôt. En France, les collèges tiennent compte de la
période de ramadan pour leur service de cantine, car certains collégiens jeûnent.
Ils le font parfois contre l’avis de leurs parents, par imitation de leurs aînés ou
sous l’influence d’une radicalisation religieuse. On voit aussi parfois des non-
musulmans faire le ramadan par solidarité avec leurs amis.
Témoignage d’un journaliste syrien
réfugié en France
“C’est la deuxième année que je passe en France, la deuxième fois que je vivrai
le ramadan loin de mon pays.

Pour les musulmans, le ramadan est un mois consacré au culte et à l’obéissance
à Dieu, mais c’est aussi un temps de célébrations familiales. En Syrie, la
télévision diffuse un programme spécial pendant cette période. Les voisins
s’invitent et partagent leur nourriture. C’est cette atmosphère particulière que
j’ai connue dans mon pays qui me manque pendant le ramadan en France.

Le jeûne est une épreuve. Ne pas manger ni boire pendant dix-sept heures tout
en poursuivant son travail est un défi. Mais le plus difficile pour moi est de ne
plus avoir ces moments particuliers du petit déjeuner en famille avant le lever
du soleil, et de retrouvailles le soir pour la rupture du jeûne. J’aimais ces
ambiances de fête, avec le sentiment d’avoir traversé ensemble une épreuve
difficile.

En France, j’ai parfois des craintes que la société dans laquelle je vis
maintenant n’accepte pas ma pratique religieuse. J’ai peur qu’elle me considère
comme un extrémiste, surtout dans cette période d’attentats.

Si j’ai parfois peur, je suis aussi reconnaissant, car j’ai le sentiment d’être sur
un chemin d’intégration. J’ai noué des relations avec des personnes d’autres
religions. J’ai même reçu des messages d’encouragement pour m’aider à vivre
mon ramadan.”

Mahmoud Alhaji Othman
Publié le 18 décembre 2017(Mise à jour le 6/08)
Par Frédérick Casadesus

Cuisine et plaisirs de la table :
“Luther ne méprisait pas les
bonnes choses”
Le professeur Matthieu Arnold explique de quelle façon Martin Luther
appréhendait la cuisine et les plaisirs de la table, entre gourmandise et invite à la
modération. Entretien.

Matthieu Arnold est professeur d’histoire moderne et contemporaine à la
faculté de théologie protestante de l’université de Strasbourg

Quelles sont les conceptions de Luther à
l’égard des plaisirs de la table ?
Il faut distinguer le Luther de la jeunesse, qui a été moine et qui reste marqué par
l’ascétisme de celui qui, mûr et marié, qui se comporte comme les autres hommes
de son temps.

Martin Luther estime qu’il n’y a pas deux sortes de chrétiens, le clerc et le laïc. Il
ne se conforme donc plus à des règles qu’il juge inutiles. Ainsi a-t-il congédié le
jeûne comme œuvre méritoire, même s’il n’empêche personne de s’y adonner, si
le chrétien pense que c’est bon pour son corps ; mais il conteste que cela puisse
aider au salut.

De surcroît, cette pratique n’apporte rien à autrui. Dès lors, Martin Luther
entretient des relations beaucoup plus détendues, c’est le moins que l’on puisse
dire, avec la nourriture et la boisson.

Luther aimait-il bien manger ?
Il ne méprisait nullement les bonnes choses de la Création. Dans ses fameux
Propos de tables comme dans ses lettres, il dévoilait nombre de détails
concernant cet aspect de son rapport au monde. À la table des Luther, il y a avait
bien souvent du monde : outre Martin, son épouse Catherine et leurs enfants,
venaient des étudiants, les collègues de Wittenberg. Ils constituaient de grandes
tablées chaleureuses.

Il semblerait que Catherine ait été très douée pour la cuisine, beaucoup plus que
madame Mélanchthon. Martin, par exemple, donne à des amis la recette par
laquelle elle accommode les pommes. Ceci étant posé, des gens venaient l’aider à
faire fonctionner la maisonnée.

Quels étaient les plats servis chez les Luther ?

Nous savons pas mal de choses à ce sujet. Luther remercie le prince de Danemark
de lui avoir envoyé des tonneaux de hareng, il mange souvent des poissons d’eau
douce – des brochets, des carpes – et des volailles, en particulier des poules. À
l’approche d’une soutenance de thèse d’un étudiant, Luther demande du gibier
aux princes, pour fêter l’événement. Nous savons par ses lettres que lorsqu’il
voyage, il veille à bien se nourrir – il écrit à Catherine un jour qu’il mange comme
un Bohémien et boit comme un Allemand.

Par ailleurs, son épouse bénéficiait, par sa famille, du privilège de brasser de la
bière. Quand la ville de Wittenberg a voulu lui retirer cet avantage, Martin s’est
indigné, en a réclamé officiellement le maintien et bien sûr obtenu gain de cause.
Était-il gourmand ?
Oui, on peut le dire. Mais Luther insiste sur la nécessité de rester modéré dans
son comportement. Certaines prédications contiennent des condamnations sans
appel de ceux qui s’empiffrent ou s’enivrent à toute occasion.

En 1541, il reconnaît que l’électeur de Saxe, neveu de Frédéric le Sage, est trop
porté sur la boisson, même s’il essaie de lui trouver des circonstances
atténuantes. Il critique les ripailles de taverne, tout en ne voulant pas les
empêcher. Son attitude est donc plutôt prudente. Il est vrai qu’à la fin de sa vie
Luther avait de l’embonpoint, souffrait de la goutte et se soignait… en buvant de
la bière ! L’historien Lucien Febvre l’a beaucoup critiqué pour cela.

En allait-il de la même façon pour les
autres Réformateurs ?
Il est difficile de comparer. Calvin n’était pas de la même eau, si j’ose dire. Il
paraissait un ascète, puisqu’il ne prenait qu’un repas par jour. Durant son séjour
à Strasbourg, il s’est un jour tellement mis en colère contre le théologien Pierre
Caroli qu’il en perdit l’appétit.

Pareille situation aurait été impensable pour Luther. Il est difficile de savoir si
Martin Bucer ou d’autres aimaient la cuisine.

Peut-on dire que les protestants, dans
leur ensemble, ont une culture spécifique
à l’égard de l’art culinaire ?
Je resterai prudent sur ce point. Je peux certes témoigner que dans la tradition
luthérienne le goût de la gastronomie, d’une gourmandise tempérée, s’est
transmis. Aujourd’hui encore, dans les fêtes paroissiales, tout particulièrement en
Alsace évidemment, les plaisirs de la table constituent un héritage important et
tout à fait assumé.

Cela dit, je suis bien certain que l’on mange bien aussi dans les familles
calvinistes ou évangéliques. J’incline à penser que les traditions régionales y
tiennent un rôle.

Propos recueillis par Frédérick Casadesus

À lire
Luther
Matthieu Arnold
Fayard, 685 p., 25 €.

Publié le 28 juin 2017(Mise à jour le 28/06)
Par Frédérick Casadesus

Le président Macron à la
rencontre  des  responsables
musulmans du CFCM
À l’occasion de la rupture du jeûne, Emmanuel Macron a invité les musulmans de
France à lutter contre le terrorisme sur le terrain spirituel et culturel.
La fraternité favorise la franchise. Le 20 juin dernier, le président de la
République est venu assister à l’iftar, dîner de rupture du jeûne, organisé par le
Conseil français du culte musulman (CFCM).

Une première depuis dix ans. Soucieux sans doute de donner du sens à sa
présence, Emmanuel Macron a prononcé un discours vigoureux. Après avoir
rendu hommage à la fermeté de l’instance représentative quand il s’est agi de
dénoncer les crimes perpétrés au nom de l’islam et de maintenir la cohésion
nationale face au terrorisme, le chef de l’État n’a pas manqué d’inviter les
musulmans de France à prendre leur part à la lutte sur un plan plus large : « La
réponse à ce terrorisme contemporain est évidemment dans la mobilisation de nos
forces de l’ordre et je veux saluer ici la présence du ministre de l’Intérieur. Mais
elle est aussi dans la réponse civilisationnelle, morale, qu’ensemble nous leur
apporterons. Il vous appartient vous, acteurs du culte, de combattre pied à pied
sur le terrain théologique et religieux, de démasquer chaque fois que nécessaire
l’usurpation de vos valeurs, la captation de l’histoire de votre religion, la négation
de quinze siècles de travail, d’interprétation réalisés par vos savants. »

Se mobiliser davantage
Une telle injonction, constructive et vigilante, soulève des interrogations. Le
président voulait-il accroître la pression sur le CFCM ? Ou simplement rappeler
quelques évidences en début de mandat ? « J’ai écouté le discours du président et
j’ai trouvé qu’il était à la hauteur des enjeux, déclare sans ambages Habib
Kaaniche , aumônier des prisons à Marseille. Nous devons aller de l’avant, tous
ensemble, pour combattre l’ignorance des musulmans et construire un islam
commun à tous. Les civilisations humaines ont été fabriquées par des apports
multiples, il nous faut, nous aussi, accepter les différences. »

Pour beaucoup d’observateurs, les propos convenus « sur des actes barbares qui
n’ont rien à voir avec l’islam », religion d’amour et de paix, ne sont plus
d’actualité. « Dire que l’on refuse les amalgames, c’est bien gentil, mais cela me
paraît totalement décalé, prévient l’islamologue Ghaleb Bencheikh. Jusqu’à
présent, la communauté nationale a su faire preuve de sang-froid, de solidarité,
mais les musulmans doivent se mobiliser davantage et, sous cet angle aussi, le
discours présidentiel a le mérite de la clarté. Nous devons nous demander, sur un
plan théologique mais aussi scientifique, comment nous en sommes arrivés là. »
Tout le monde cependant ne partage pas cet engouement. Sans marquer
d’opposition à l’égard d’Emmanuel Macron, l’imam de Bordeaux, Tareq Oubrou,
souligne que les principes de la laïcité française reposant sur la séparation des
Églises et de l’État, le pouvoir politique ne peut pas dépasser certaines limites :
« La République impose à chacun le respect de la Constitution et du droit. Il n’est
pas du ressort du président de la République de définir le droit canon, les
orientations théologiques ou de dire comment les religions doivent se
transformer. Les religions sont souveraines tant qu’elles ne troublent pas l’ordre
public. »

Dans ce contexte, les réformes restent possibles. « Il faut développer la soif de
connaissance chez les musulmans, quel que soit leur niveau de culture, estime
Habib Kaaniche. Faire comprendre que la science, l’analyse des textes coraniques
et la foi se situent sur des chemins différents, quoique parallèles, est
indispensable. Nous vivons dans un pays qui nous permet de dire un certain
nombre de vérités, nous devons nous saisir de cette opportunité. »

Mais ces évolutions théoriques suffiront-elles ? Pour Tareq Oubrou, l’islam doit se
réformer sinon il va disparaître, mais c’est l’amélioration des conditions de vie
des jeunes musulmans qui permettra de lutter de manière efficace contre
l’ignorance : « Comme autrefois les anarchistes, les terroristes qui se réclament
de l’islam ont choisi la stratégie du désespoir et de l’effondrement. L’islam est
déjà en train de s’adapter, mais il faut de la patience, parce que le temps des
religions n’est pas celui des politiques. » Un tel point de vue ne calme pas
toujours les impatiences parmi les Français, musulmans ou non. Tablant sur
l’efficacité d’une meilleure formation des imams pour écarter tout esprit de repli
identitaire, Emmanuel Macron a réitéré la volonté de l’État d’accompagner la
construction d’un islam de France pleinement inscrit dans la logique républicaine.

Peut-il aller plus loin ? « Pour l’instant, rien dans la loi ne l’y autorise, explique le
philosophe Philippe Gaudin, président de la commission des relations avec l’islam
de la Fédération protestante de France. Pour intervenir sur le fond des
problèmes, il faudrait que le président définisse ce qu’est le vrai islam. » On
devine que telle n’est pas l’intention du président. Tout juste peut-il espérer que
le CFCM, qu’il reconnaît comme interlocuteur privilégié, gagne en influence pour
entamer de vraies réformes. On ne peut exclure que cette visite ait allié à la
courtoisie cette intention tactique. En même temps !
Publié le 8 février 2017(Mise à jour le 8/02)
Par Holger Wetjen

Sept bonnes pratiques pour le
jeûne informatique
Après le jeûne climatique, pourquoi ne pas tenter le “jeûne informatique” pour
appréhender autrement nos relations par courriel et autres réseaux sociaux ?

Deux amis se rencontrent : « Tu as eu mon texto ? », demande le premier. « Non.
Qu’est-ce que tu as écrit ? », répond l’autre. « Que je ne viens pas à ta soirée »,
dit le premier. « Je ne te l’avais pas écrit ?, dit l’autre. La soirée tombe à l’eau. »

Textos, courriels, messages sur Facebook : trop d’informations tue l’information.
Pour ne pas se noyer dans les messages, il peut être utile de s’imposer un « jeûne
informatique », en ces temps de début de carême.

Après le « jeûne climatique », mis en place au moment de la COP21 et initié
notamment par Martin Kopp, on peut très bien imaginer un « jeûne
informatique », qui consisterait à réduire le nombre de messages émis par
téléphone, SMS, courriel ou sur Facebook et de travailler sur la qualité humaine
du message pour entendre, dans le dialogue avec l’autre, la parole de Dieu. Voici
quelques astuces que je vous propose :
1 – Si votre message est important, n’écrivez pas de texto, mais téléphonez à
l’autre et invitez-le à un vrai dialogue. Préparez bien ce que vous avez envie de lui
dire. Vous pouvez pour cela noter sur un papier les questions que vous allez poser
avant de téléphoner. Pendant ce temps de préparation, éteignez votre ordinateur,
ne regardez pas votre portable. Quand vous êtes au téléphone avec lui, soyez
fidèle à votre plan, notez ses réponses. Votre dialogue aboutira à un résultat
précis, peut-être à un rendez-vous, et surtout, vous ressentirez dans la présence
de l’autre la présence de Dieu.

2 – Vous attendez une réponse par courriel d’un ami ou d’un client lors d’une
transaction. Elle se fait attendre : n’écrivez pas une deuxième fois ! Attendez au
moins deux jours avant de le rappeler. Soyez patient ! Appréciez l’autre, restez
serein : la bonne relation avec l’autre est plus importante que le petit premier
résultat que vous visez dans votre entretien.

Laissez la relation primer sur votre angoisse intime. Dans 99 % des cas, la raison
du retard est que votre interlocuteur a du travail et qu’il n’a pas encore eu le
temps de lire votre message et de réfléchir à votre proposition. Simplement,
parce que sa boîte courriel déborde. N’ajoutez pas de courriel à son déluge de
courriels ! Vous ne feriez que l’irriter davantage.

3 – Prenez votre temps pour bien lire, réfléchir et répondre aux messages que
vous recevez vous-même, et qui arrivent souvent par surprise. Ces messages sont
des signes. Un ami vous propose de venir chez lui pour partager avec lui le
déjeuner : ne dites pas non ! Suivez son invitation ! Elle sera la base pour d’autres
rencontres et d’autres relations humaines !

4 – Réduisez le nombre de vos courriels et travaillez davantage sur la qualité
humaine de chacun. Préparez vos courriels (ou vos messages à publier sur
Facebook), le matin, quand vous avez l’esprit clair. Laissez votre tablette ou
ordinateur éteints.

Préparez vos courriels à la main, au stylo sur un papier. La touche personnelle de
votre main vous permet pendant la rédaction d’y insérer une touche personnelle.
Prenez votre temps pour souhaiter à votre correspondant une bonne journée, un
bon week-end, pour vous renseigner sur sa vie et ses amis. Vous allez voir : quand
vous passez, plus tard, aux questions plus professionnelles et « sérieuses », vous
dialoguez dans une ambiance d’écoute et d’intérêt sincère. Vous devenez plus
efficace.

5 – Sur Facebook, il y a le risque de révéler dans une humeur des secrets de votre
vie privée qui auraient dû rester privés. Pour rester discret sur Facebook : avant
de répondre à un message, faites une pause. Posez-vous la question : que veut
savoir l’autre ? Est-il nécessaire de répondre ? Puis, qu’est-ce que je vais
répondre ? Levez-vous de votre fauteuil et marchez dans votre bureau :
préformulez votre réponse. Ensuite seulement, rasseyez-vous, et répondez à votre
correspondant.

6 – Avec vos clients et contacts professionnels : convenez d’un rythme pour votre
correspondance par courriel : tenez-vous à ce rythme. Par exemple, fixez des
règles pour limiter le nombre d’allers-retours sur un texte qu’il faut relire et
remanier ou traduire.

7 – Respectez une fois par semaine un « sabbat informatique » : peut-être le
dimanche. Pendant cette journée, vous n’allez pas sur Internet, votre boîte
courriel se repose.

La Bible dit : « L’homme ne vit pas seul du pain, mais de chaque parole qui sort
de la bouche de Dieu. » Soigner notre parole peut nous permettre d’entendre la
parole de Dieu, au milieu de nos médias modernes que sont le téléphone, les SMS,
les courriels ou Facebook.

Ce « jeûne informatique » s’inscrit dans la tradition protestante : il est une
« ascèse dans le monde » et permet d’appliquer la sagesse de la Bible dans la vie
quotidienne.
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