Le Journal del'Andra - Médecine et radioactivité : tout ce qu'il faut savoir P.10
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le
PRINTEMPS 2022 N°41
Journal
del’Andra
ÉDITION MANCHE
P.10
Médecine
et radioactivité :
tout ce qu’il faut savoir
Sommaire
l’essentiel éclairage immersion
P.4 P
odcast « Radio-Actif » : P.7 L’Andra et ses prestataires : une étroite
nouveaux épisodes collaboration pour un travail de qualité
à découvrir ! P.8 Au Centre de stockage de la Manche,
P.4 L
e Journal de l’Andra : une gestion des eaux rigoureuse
votre avis nous intéresse P.9 Comment fonctionne le réseau de
collecte du Centre ?
P.22 Chantier
À Ganagobie, plus qu’un
chantier d’assainissement,
un travail d’enquête
P.4 d
anslesmédias P.10 D
ossier
Un objet radioactif P.24 Portrait
Vincent Lelaidier,
dans votre grenier ? Médecine l’expert technique
P.5 G
roupes mémoire :
10 ans de travaux !
et radioactivité : du CSM
P.5 L
’aventure se poursuit tout ce qu’il faut savoir
avec « Les Voiles P.12 Des rayons pour diagnostiquer
écarlates » et soigner : un siècle d’histoire territoire
P.5 L
a Suède autorise P.14 Ces scientifiques à l’origine
la construction du de la médecine nucléaire
stockage géologique
des déchets P.15 Médecine et radioactivité :
les plus radioactifs de quoi parle-t-on ?
P.16 Les différents types de radiothérapie
pour le traitement des cancers
P.16 Médecine nucléaire : et demain ?
P.17 Traitement ou diagnostic : à quelles
doses de rayonnement s’expose-t-on ?
P.18 Secteur médical : des déchets pas P.25 D
es fleurs à la loupe
comme les autres… P.26 #On vous répond
P.19 … et une gestion sur mesure Les déchets radioactifs
d’un EPR sont-ils différents
P.6 R
éexamen de sûreté P. 20 Reportage : Médecine nucléaire :
des autres déchets ?
du Centre de stockage dans les coulisses du Centre
de la Manche : l’instruction François Baclesse de Caen P.26 #Ils sont venus nous voir
touche à sa fin P.27 Photomystère
Édition de la Manche No41
le Centre de stockage de la Manche
Journal ZI de Digulleville – BP 807 – DIGULLEVILLE -50440 LA HAGUE
del’Andra Tél. : 0 810 120 172 - journal - andra@andra.fr
Directeur de la publication : Pierre-Marie Abadie • Directrice de la rédaction : Annabelle Quenet • Rédactrice en chef : Marie-Pierre Germain • ABONNEMENT GRATUIT
Comité éditorial : Isabelle Deniau, Catherine Dressayre, Florence Espiet, Isabelle Guittonneau, Vincent Lelaidier, Guy-Roland Rapaumbya, Julien
Recarte • Ont participé à la rédaction, pour l’Andra : Marie‑Pierre Germain, Antoine Billat, Anne Brodu, Sophie Dubois ; pour Rouge Vif : Françoise Pour être sûr de ne rien manquer sur l’actualité
de Blomac, Fanny Costes, Emmanuelle Crédoz, Joana Maître, Véronique Parasote et Pascal de Rauglaudre • Responsable iconographie :
Sophie Muzerelle • Crédits photos : Andra ; CEA ; Adrien Daste ; Centre François Baclesse ; Philippe Demail/Andra ; Domaine public ; EDF de l’Andra, abonnez-vous par mail à
Médiathèque - Alexis Morin et Antoine Soubigou - Pôle communication – EDF Flamanville 3 ; Marie-Pierre Germain/Andra ; Jean-Marie Huron ;
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www.grouperougevif.fr • Impression : DILA – Siret 130 009 186 00011 – Imprimé sur du papier issu de forêts durablement gérées, 100 % recyclé la ou les édition(s) souhaitée(s).
dans une imprimerie certifiée imprim’vert •© Andra – 370-41 • DDP/DICOM/22-0028 • ISSN : 2106-7643 • Tirage : 39 750 exemplaires
2 Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022
l’essentiel
LE POINT DE VUE D’ASTER
Dépollution, l’autre mission
de service public de l’Andra
L’assainissement de l’ancien laboratoire Isotopchim est l’un des chantiers les plus complexes
jamais mené par l’Andra. On vous raconte, p. 22.
Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022 3
l’essentiel
Le Journal de l’Andra :
Le Journal de l ’Andra :
votre avis nous intéresse !
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départements de l’Aube (10), Pour participer : remplissez le questionnaire joint à ce numéro
marquée par la crise sanitaire.
la Manche (50), la Haute-Marne (52), ou
Pourscannez le:QR
participer code. le questionnaire joint à ce numéro
remplissez
la Meuse (55). ou scannez le QR code.
danslesmédias
Podcast danslesmédias
« Radio-Actif » : Un objet radioactif
nouveaux dans votre grenier ?
épisodes à Ils sont anciens, parfois décoratifs et on n’hésite pas à les conser-
ver en souvenirs, dans son grenier ou sa cave. Mais ils peuvent être
découvrir ! radioactifs ! Un exemple : les fontaines à radium, à la mode dans les
années 1920. En ce temps-là, on prêtait au radium des vertus curatives
Fin 2021 l’Andra a et il entrait dans la composition d’objets du quotidien. Aujourd’hui, les
lancé son podcast équipes de l’Andra collectent gratuitement ces objets anciens pour
« Radio-Actif » afin les gérer en toute sécurité. Dans le cadre d’un partenariat avec le
de susciter l’intérêt musée Curie, une fontaine au radium à forte valeur historique a pu
d’un large public, être décontaminée afin que cet objet soit exposé au musée, à Paris.
notamment les
jeunes générations, Découvrez en images cette intervention avec le reportage
pour la gestion des déchets radioactifs. de TF1 : https://bit.ly/3Klixl3
En partenariat avec le média Le Drenche,
une première série intitulée « Demain,
dans 1 000 ans », explore la question de
la mémoire des centres de stockage et La Suède autorise
notre rapport au temps long. Sémiologie
sonore, archives, analogues mémoriels, Un la objet
construction radioactif du stockage
support de stockage de l’information…
L’Andra, en compagnie d’experts plu- dansgéologiquevotre grenier des déchets ?
ridisciplinaires de la mémoire et de sa
conservation, font le tour de la question. Ils les plus
sont anciens, radioactifs
parfois décoratifs et on n’hésite pas à les conser-
À vos écouteurs ! ver en souvenirs, dans son grenier ou sa cave. Mais ils peuvent être
Série de 6 épisodes disponibles sur la Le 27radioactifs
janvier 2022, le gouvernement
! Un exemple suédois
: les fontaines a autorisé
à radium, la construction
à la mode dans les d’un
plateforme Ausha, sur le mur des pod- années
stockage 1920. Enpour
géologique ce temps-là, onles
accueillir prêtait au radium usés
combustibles des vertus curatives
du pays. Avec sa voi-
casts de Ouest France, ainsi que sur la et Finlande,
sine la il entrait dans la composition
la Suède est un desd’objets
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quotidien.
avancésAujourd’hui,
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centre de l’Andra
de stockage collectent
géologique pourgratuitement
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plus radioactifs issus des
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cadre d’un (municipalité
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avec le
que l’installation
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fontaine au implantée. Conduit
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valeur la sociétéaSKB
pu déte-
nue par
êtreles exploitants nucléaires,
décontaminée afin que cetce objet
projetsoit
a abouti
exposé après 30 ans de
au musée, recherches
à Paris.
et une demande d’autorisation déposée dès 2011. Placés dans des conteneurs
en cuivre, les combustibles
Découvrez usés
en images cette seront stockés
intervention à 500 mètres de profondeur
avec le reportage
Retrouvez tous les épisodes
du podcast « Radio-Actif » dans unederoche granitique. La construction, le fonctionnement et la fermeture
TF1 : https://bit.ly/3Klixl3
https://bit.ly/3M8xdVk du site s’étaleront sur environ 70 ans.
* La Finlande a opté pour les mêmes procédés de stockage (cf. article p. 6).
4 Journal de l’Andra • Édition Manche
Meuse/Haute-Marne
• Printemps 2022
• Printemps 2022
l’essentiel
L’aventure se
poursuit avec
« Les Voiles
écarlates »
Le 9 février dernier, l’Andra
Groupes mémoire : a signé une nouvelle
convention de parrainage
10 ans de travaux ! avec l’Association « Les Voiles
écarlates » de Cherbourg
Comment préserver la mémoire des sites de stockage de pour soutenir son projet de
déchets radioactifs à travers le temps ? Les groupes de préservation du patrimoine
réflexion sur la mémoire des centres de l’Andra travaillent sur local et de réinsertion
cette question majeure depuis 2011. Réunis à l’occasion de de publics en difficulté.
cet anniversaire, ils ont partagé leurs idées et leurs projets.
Un projet parrainé par l’Andra depuis
Riverains, élus locaux, anciens salariés de l’industrie nucléaire, acteurs de la vie maintenant huit ans et qui s’inscrit plei-
associative, ils habitent dans la Manche, en Meuse/Haute-Marne, dans l’Aube. nement dans la démarche de transmis-
Aux côtés de l’Andra, ils réfléchissent à des pistes originales et innovantes afin sion de la mémoire et de responsabilité
de maintenir le plus longtemps possible la mémoire des centres de stockage. sociétale de l’Agence.
Cette nouvelle convention permettra à
Des solutions créatives et innovantes l’association de poursuivre la restaura-
Leurs réalisations font appel à différentes ressources culturelles, artistiques tion du vieux gréement la Croix du Sud III
ou ludiques : bande dessinée de science-fiction, tableau collectif « Devoir de démarrée en 2014 et d’embarquer à son
mémoire », saynètes théâtrales ou escape box. Au CSM, des visites théâtralisées bord des personnes en difficulté ou fragi-
sur l’histoire du site ont été créées à l’occasion du 50e anniversaire du centre lisées : mineurs délinquants, personnes
en 2019. Le groupe a également travaillé sur une collecte d’anciens articles de atteintes de maladies psychiatriques ou
presse sur la création du Centre, ainsi que sur une ultra-synthèse des informa- résidents de maisons de retraite locales.
tions essentielles concernant le site, document destiné à être diffusé largement Objectif : retrouver confiance en vivant
autour du Centre, mais aussi à l’international. des aventures au grand large !
Début décembre, les groupes Mémoire ont célébré l’anniversaire des 10 ans de Différentes actions entre « Les Voiles
leur création, en Bourgogne. Au programme notamment : la visite du MuséoParc écarlates » et l’Andra sont program-
d’Alésia et une conférence sur la mémoire et les traces, animée par une archéo- mées pour cette année : l’organisation
logue et une socio-anthropologue. De quoi nourrir leur réflexion et susciter de d’une conférence à Cherbourg sur une
nouveaux projets ! thématique en lien avec la réinsertion et
la mise en place de visites du Centre de
stockage de la Manche pour des jeunes
La question de la conservation et de la transmission de la mémoire
du Centre de stockage de la Manche vous intéresse ? en difficulté dans le cadre de l’opération
Vous souhaitez rejoindre le groupe mémoire de l’Andra ? Contact : 0810 120 172 « Port propre, mains propres ».
La Suède autorise la construction du stockage
géologique des déchets les plus radioactifs
Le 27 janvier 2022, le gouvernement suédois a autorisé a abouti après 30 ans de recherches et une demande d’auto-
la construction d’un stockage géologique pour accueil- risation déposée dès 2011. Placés dans des conteneurs en
lir les combustibles usés du pays. Avec sa voisine la cuivre, les combustibles usés seront stockés à 500 mètres
Finlande, la Suède est un des pays les plus avancés de profondeur dans une roche granitique. La construction, le
dans leur projet de centre de stockage géologique pour les fonctionnement et la fermeture du site s’étaleront sur envi-
déchets les plus radioactifs issus des centrales*. C’est au ron 70 ans.
nord de Stockholm, à Forsmark (municipalité d ’Östhammar),
* La Finlande a opté pour les mêmes procédés de stockage et autorisé la construction
que l’installation de stockage sera implantée. Conduit par la d’une installation en couche profonde en 2016. Une demande d’autorisation d’exploitation
société SKB détenue par les exploitants nucléaires, ce projet a été déposée fin décembre 2021.
Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022 5
l’essentiel
Vue du nord du Centre de stockage de la Manche.
Réexamen de sûreté du telle ou telle situation donnée ? « Il
Centre de stockage de la Manche :
n’y a pas eu de point d’achoppement
particulier entre nos propositions et
l’instruction touche à sa fin
les recommandations de l’IRSN. Le
retour des experts du GP a été glo-
balement positif », précise Catherine
En février dernier, l’Autorité de sûreté nucléaire, l’Institut de Dressayre. En attendant la déci-
radioprotection et de sûreté nucléaire et « le groupe permanent sion de l’ASN qui viendra encadrer
déchets » (GP) se sont réunis pour l’évaluation du dossier de réexamen par des prescriptions la poursuite
de sûreté du CSM. L’aboutissement de deux années d’instruction. de fonctionnement de l’installa-
Explications. tion, l’Agence travaille à la prise en
compte des 28 engagements pris
En avril 2019, l’Andra a remis à l’Institut de radioprotection et de pour améliorer la sûreté du centre.
l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), sûreté nucléaire (IRSN). La phase Ceux-ci concernent le confortement
le dossier de réexamen de sûreté d’instruction technique du dossier de la couverture du stockage, la sur-
du CSM. Un document de près menée par l’IRSN aura duré deux veillance du centre, et aussi la sûreté
de 1 000 pages, fruit d’un travail ans et suscité près de 450 ques- à long terme et le dispositif lié à la
de longue haleine qui mobilise les tions : « L’instruction est une période conservation de sa mémoire ou
équipes de l’Andra depuis 2016 : d’échanges intenses. Nous devons encore la mise à jour des documents
« Tous les dix ans, le réexamen de apporter un maximum de précisions règlementaires. « Nous travaillons à
sûreté vise à réévaluer la conformité à l’IRSN afin qu’il puisse établir son la préparation des plans d’action afin
du Centre et sa sûreté actuelle sur le rapport d’expertise remis ensuite de les mener à bien les dix prochaines
long terme », expliquent Catherine au GP », complète Fabrice Poirier. années », conclut Fabrice Poirier. ●
Dressayre et Fabrice Poirier, ingé- Cette phase très exigeante s’est clô-
nieurs sûreté à l’Andra. turée le 1er février dernier par une
L’instruction du dossier
Pour rappel, l’ASN instruit le dossier réunion officielle du GP en présence
de rééxamen de sûreté,
et dans ce cadre, elle missionne de l’ASN, de l’IRSN et de l’Andra.
c’est :
Le GP est composé notamment de
450
producteurs de déchets, d’experts
universitaires et de représentants
Il n’y a pas eu de point d’associations.
d’achoppement particulier questions posées par l’IRSN
entre nos propositions et Un retour positif
28
Le centre de stockage est-il toujours
les recommandations de l’IRSN. adapté et conforme à la réglementa-
Le retour des experts tion en vigueur ? Comment les instal-
a été globalement positif. » lations se comporteraient-elles dans engagements pris par l’Andra
6 Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022
éclairage
L’Andra et ses prestataires : une étroite
collaboration pour un travail de qualité
Analyses
environnementales,
nettoyage, entretien
paysager, etc. : une
vingtaine d’entreprises
prestataires travaillent
aux côtés de l’Andra
au Centre de stockage
de la Manche.
Pour s’assurer de
la qualité des prestations
réalisées, l’Agence
procède à des contrôles
réguliers. Exemple, avec
le laboratoire d’analyses
Subatech.
Si le Centre de stockage de la Échantillons d’eau de la nappe phréatique.
Manche ne reçoit plus de colis de
déchets radioactifs, les équipes de
l’Andra poursuivent leurs activités Pour cela, Subatech prend en avec le prestataire pour l’informer
d’entretien et de maintenance des charge les analyses radiologiques des résultats. Si le rapport pointe
installations, mais aussi de surveil- d’échantillons d’eau, de sol et d’air des irrégularités majeures, l’Andra
lance de l’environnement. Au total, prélevés sur le site. Si cette mis- peut interrompre la prestation.
une vingtaine de sociétés effectuent sion très importante nécessite les Pour éviter les effets de routine,
différentes prestations, qui vont du compétences et les moyens maté- l’Andra renouvelle ses contrats
prélèvement d’échantillons au net- riels et logistiques d’un expert avec les auditeurs tous les trois ans
toyage des locaux, en passant par dédié, elle demeure étroitement par appel d’offres : « Les auditeurs
le gardiennage et l’entretien pay- encadrée par l’Andra. ont des expériences différentes et
sager du site. Autant d’activités ne voient pas tous la même chose »,
qui sont encadrées par des cahiers Des contrôles réguliers complète Flore Denizet.
des charges précis dans lesquels pour vérifier la qualité L’audit n’est pas le seul moyen
l’Andra spécifie ses exigences. des prestations d’évaluer la qualité des travaux
Aussi, pour s’assurer de la qua- des prestataires. L’Andra orga-
Des experts dédiés lité des prestations, l’Agence pro- nise régulièrement des réunions
« C’est un choix stratégique, explique cède chaque année à un audit de avec eux, et procède aussi à des
Julien Recarte, chef de centre du ses prestataires, comme ce fut inspections sur le terrain. ●
CSM. Avec dix collaborateurs sur le cas en janvier dernier pour le
le site, l’Andra n’a ni les ressources laboratoire Subatech. « L’auditeur
humaines ni le matériel pour assurer externe a examiné la façon dont le
l’ensemble de l’exploitation de ses laboratoire analyse les échantil-
installations. Elle fait donc appel à lons et garantit la traçabilité des Les normes qui encadrent
des experts extérieurs qui viennent mesures, et comment les résul- le système qualité de l’Andra
avec leurs équipements et forment tats sont présentés dans le compte — Comme toutes les installations industrielles
leur personnel. » rendu, en vérifiant qu’ils satisfont de grande ampleur, l’Andra est certifiée
Exemple : le laboratoire Subatech aux exigences de notre cahier des par des normes ISO* qui garantissent le bon
réalise une partie des mesures charges », précise Flore Denizet, déroulement des processus mis en place
entrant dans le cadre de la surveil- ingénieure système de mana- pour veiller à la qualité, à la performance et
lance du CSM. Sa mission consiste gement, qui a piloté l’audit pour à la sécurité de ses activités.
à effectuer chaque année une partie l’Andra et s’est assurée de sa L’Andra exige également de ses prestataires
d’être notamment en conformité avec
des 2 000 prélèvements et 10 000 conformité avec la norme ISO
la norme ISO 17025 qui s’applique aux travaux
analyses de l’eau, du sol et de l’air. 17025 (lire encadré). de laboratoires.
Objectif : s’assurer que l’impact du En fin d’audit, l’auditeur transmet
centre sur l’environnement se main- son rapport à l’Andra et une réu- * Organisation internationale de normalisation
tient à un niveau très faible. nion de restitution est organisée
Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022 7
éclairage
Contrôle du volume de prélèvement des eaux
Légende
Au Centre de stockage de la Manche,
une gestion des eaux rigoureuse
S’il dispose bien de toutes les autorisations, le Centre de stockage et la convention peut être revue
de la Manche (CSM) n’a pas les équipements nécessaires si nécessaire.
pour effectuer directement ses rejets liquides dans l’environnement. « Toutes les eaux sont transférées
Ceux-ci transitent par le site voisin d’Orano La Hague qui prend sur le site d’Orano La Hague, avec
le relais. Des opérations encadrées par une convention de plus une gestion différenciée selon leur
de 25 ans. Explications. origine », explique Isabelle Deniau,
chargée d’affaires en surveillance
La maîtrise du système de gestion 1976 et l’Andra en 1991). L’enjeu de l’environnement au CSM. Les
des eaux est un enjeu important était d’assurer la continuité dans eaux pluviales sont analysées à
pour le CSM. Il s’agit de faire en le fonctionnement du système en la fois sur le CSM et sur Orano La
sorte que les différentes eaux qui place, mais en précisant finement Hague avant d’être rejetées dans
sont collectées sur et sous le site les responsabilités de chacun et le la Sainte-Hélène après un passage
ne se mélangent pas, et qu’elles processus de passation des eaux dans le bassin d’orage situé sur le
puissent être, après analyses, réo- entre les deux entités. site d’Orano La Hague. Pour les eaux
rientées vers le milieu naturel où collectées dans le réseau souterrain
elles sont rejetées. Par sa confi- Une gestion des eaux et qui auraient pu entrer en contact
guration et son histoire, le CSM ne différenciée avec de la radioactivité, celles-ci
dispose sur son emprise que d’une La première convention entre sont stockées dans des cuves et
partie du système de gestion des l’Andra et Orano La Hague ne doivent pas dépasser certains
eaux, celle qui permet la collecte (ex-Cogema) est mise en place en seuils pour pouvoir être transférées.
puis celle nécessaire aux mesures 1996. Elle spécifie les caractéris- Ces effluents sont ensuite rejetés
radiologiques et chimiques. tiques radiologiques et les limites en mer dans le raz Blanchard via la
Le CSM a été implanté en 1969 en volumes que doivent respecter canalisation de rejets d’Orano La
sur un terrain jouxtant le site l’ensemble des effluents en prove- Hague. « Tout est suivi et contrôlé,
d’Orano La Hague. Les deux sites nance du CSM. Cette convention nous connaissons la quantité et la
faisant alors partie d’une seule et précise également la maintenance qualité des effluents de nos réseaux,
même entité : le CEA. Le système à réaliser sur le bassin d’orage de au niveau radiologique et physico-
des eaux a été conçu en consé- l’Andra situé sur le site d’Orano chimique. Les analyses menées à la
quence, sans discontinuité entre ce La Hague, selon les exigences fois par le CSM et Orano La Hague,
qui allait devenir deux entités bien de l’Agence. Des réunions et des permettent de sécuriser les rejets
distinctes et indépendantes du CEA échanges réguliers sont organisés réalisés dans l’environnement »,
(Orano, alors appelé la Cogema, en entre l’Andra et Orano La Hague conclut Isabelle Deniau.
8 Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022
éclairage
Comment fonctionne le réseau de collecte du Centre ?
L’ensemble des eaux qui circulent sur le CSM sont collectées et analysées
avant d’être rejetées dans l’environnement
Chambre de mesure Caniveau
1 Les eaux de pluie
globale pluvial L’eau de pluie est collectée et canalisée par un réseau
situé sur et autour de la couverture du CSM. Ces eaux
sont orientées vers des chambres de récupération en
pied de talus puis transférées vers un point de collecte
appelé « chambre de mesure globale » (la CMG)
Bassin
d’orage Canalisation où des prélèvements sont effectués. Les
pluviale eaux pluviales sont ensuite évacuées vers
Rejet des eaux
vers le ruisseau
un bassin d’orage situé sur le site voisin
Sainte-Hélène Chambre d’Orano La Hague avant d’être rejetées,
pluviale après de nouveaux contrôles, dans le
ruisseau de la Sainte-Hélène.
Réseau pluvial
Chambre de Réseaux RSGE
drainage
Canalisation
drainage
Pomperie CSM
envoie vers le réseau
de rejet Orano La
Hague 3 Le réseau souterrain
2 Même si la couverture du CSM
Les eaux de drainage
présente de très bonnes perfor-
De l’eau de pluie peut s’infil- mances d’étanchéité, il peut arriver
trer dans la couverture. Ces eaux, qu’une très faible part des eaux pluviales
appelées « eaux de drainage » réussisse à parvenir jusqu’aux ouvrages
sont collectées via des drains de stockage. Ces eaux sont alors col-
disposés dans la couverture, lectées dans un réseau souterrain ou
au-dessus et en dessous de la par des drains situés à proximité des
membrane bitumineuse. Ces galeries de ce réseau. Les eaux sont
eaux sont orientées vers des transférées vers le bâtiment des bassins
Réseau
chambres de drainage dédiées, où elles transitent momentanément dans
Drains de souterrain
puis vers le bâtiment des bassins du des cuves dédiées le temps de faire les prélè-
la couverture
CSM grâce à des canalisations bien distinctes vements nécessaires aux analyses radiologiques.
de celles des eaux pluviales. Dans le bâtiment Elles rejoignent ensuite les eaux de drainage dans
des bassins, les eaux de drainage rejoignent le BDS, qui rassemble ainsi tous les effluents dits
le bac du séparatif (le BDS) avant le transfert « à risque », c’est-à-dire les eaux qui auraient pu
vers Orano la Hague. avoir été contaminées par la radioactivité.
Des contrôles réguliers
— Des analyses sont réalisées toutes les semaines. Les résultats sont communiqués mensuellement à l’Autorité de sûreté
nucléaire (ASN) et à la Dreal*. La synthèse est rendue publique dans le Rapport d’information sur la sûreté nucléaire et la
radioprotection du centre disponible sur www.manche.andra.fr/documents-et-ressources et présentée lors des réunions
de la commission locale d’information (CLI) du CSM.
Les résultats de la surveillance sont accessibles au public via le réseau national de mesures de la radioactivité de
l’environnement sur www.mesure-radioactivite.fr.
* La direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement
Journal de l’Andra • Édition Manche • Printemps 2022 9
éclairage — DOSSIER —
10
8 Journal de l’Andra • Édition Manche
Meuse/Haute-Marne
• Printemps 2022
• Printemps 2022— DOSSIER — éclairage
Médecine
et radioactivité :
tout ce qu’il faut savoir
Scintigraphie, TEP scan, radiothérapie, ces termes
médicaux vous évoquent sans doute quelque chose.
Tous ces examens et thérapies sont couramment prescrits
pour le diagnostic, le traitement et le suivi de cancers, de
maladies pulmonaires ou thyroïdiennes, de troubles
cardiovasculaires ou encore de rhumatismes. Mais leur
principe comme leurs origines sont souvent méconnus.
Ils appartiennent au domaine de la médecine nucléaire.
Une discipline née il y a plus d’un siècle, peu de temps
après la découverte de la radioactivité. Car c’est bien
cette radioactivité qui, bien dosée et ciblée, permet
aujourd’hui des diagnostics plus précoces et des traitements
plus efficaces. Et parce qu’elle manipule quotidiennement
des produits radioactifs, la médecine nucléaire
est très encadrée pour garantir la radioprotection
des personnels de santé, des patients et de l’environnement,
mais aussi assurer une gestion adaptée des déchets
issus de ces activités.
P.12 Des rayons pour diagnostiquer et soigner : un siècle d’histoire
P.14 Ces scientifiques à l’origine de la médecine nucléaire
P.15 Médecine et radioactivité : de quoi parle-t-on ?
P.16 Les différents types de radiothérapie pour le traitement des cancers
P.16 Médecine nucléaire : et demain ?
P.17 Traitement ou diagnostic : à quelles doses de rayonnement
s’expose-t-on ?
P.18 Secteur médical : des déchets pas comme les autres…
P.19 … et une gestion sur mesure
P. 20 Reportage : Médecine nucléaire : dans les coulisses
du Centre François Baclesse de Caen
Journal de l’Andra • Édition
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Des rayons pour diagnostiquer
et soigner : un siècle d’histoire
Les découvertes des rayons X puis de la radioactivité à la fin du De plus, ce développement signe
XIXe siècle ont permis aux médecins et autres professionnels de santé le début de grands progrès pour
d’améliorer leurs capacités de diagnostic, et de mettre au point des le diagnostic de cancers, de mala-
traitements efficaces contre des maladies graves, le cancer notamment. dies cardiaques ou thyroïdiennes.
Retour sur les origines des activités nucléaires à finalité médicale. Grâce aux rayons (alpha, bêta, ou
gamma) qu’émettent certains de
Tout commence en 1895. Le phy- et chercheurs ont observé que le ces atomes (on parle d’isotopes
sicien allemand Wilhelm Conrad radium émettait des rayonne- radioactifs) durant leur rapide
Röntgen découvre les rayons X. ments de plus haute énergie que désintégration radioactive, on peut
Des rayonnements invisibles dont les rayons X, et permettait donc de en effet les tracer dans le corps
la propriété de traverser la matière cibler des tumeurs plus profondes. et en faire de puissants outils de
a ensuite permis le développement D’abord contenu dans des petits diagnostic. C’est ainsi qu’est née
de la radiologie moderne (radiogra- sachets en plastique et directement l’imagerie fonctionnelle.
phie, scanner, échographie, IRM…). mis au contact de la peau pour soi- Dès 1937, dans une série d’ar-
Mais c’est d’abord au traitement gner lésions et tumeurs, le radium ticles, le professeur américain
contre le cancer que cette décou- est ensuite conditionné dans des en physique médicale Joseph
verte profite. Dès 1896, des méde- petits tubes ou dans des aiguilles Gilbert Hamilton a détaillé les pre-
cins ont ainsi donné naissance à placées au contact ou implantées miers essais médicaux utilisant du
la radiothérapie externe, traite- directement dans les tumeurs.
ment encore couramment utilisé Nous sommes en 1920 : on appelle
aujourd’hui pour tuer les cellules ce procédé la curiethérapie.
cancéreuses avec de fortes doses
de rayons ionisants. La découverte de la radioactivité
Au même moment, Henri Becquerel artificielle : un tournant majeur
découvre la radioactivité naturelle Le radium est un élément rare et
de l’uranium avant que Marie et cher. Aussi le développement de
Pierre Curie identifient celle du tho- la radioactivité artificielle par Irène
rium, du polonium et du radium. En et Frédéric Joliot-Curie, en 1934,
1901, Henri Becquerel et Pierre marque-t-elle un nouveau tournant.
Curie mettent en avant les actions Petit à petit, différents radioélé-
de ce radioélément sur la peau, ments comme le césium 137, le
ouvrant alors la voie à son utili- phosphore 32, l’iridium 192 ou
sation pour guérir des infections l’iode 125 sont produits pour créer
dermatologiques mais aussi des des traitements moins onéreux et Henri Becquerel.
cancers. Rapidement, les médecins surtout plus ciblés et efficaces.
Le Français Henri Becquerel
découvre la radioactivité Note d’Henri Becquerel
naturelle en remarquant et Pierre Curie sur
que l’uranium émet des l’action du radium
rayonnements invisibles. sur la peau.
1896 1901
1895 1898
Découverte des rayons X Pierre et Marie Curie
par l’Allemand Röntgen. isolent le polonium et
L’image représente le radium, deux éléments
l’une des premières radioactifs jusqu’alors
radiographies effectuées inconnus, présents dans
par le physicien. le minerai d’uranium.
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sodium radioactif comme traceur
pour détecter les troubles thyroï-
diens, puis ceux d’autres isotopes
radioactifs comme le potassium et
l’iode. Ce dernier s’est avéré très
efficace pour détecter les maladies
de la thyroïde mais aussi les traiter
par radiothérapie in vivo (dans l’or-
ganisme vivant).
Par la suite, la découverte du
technétium faite par Emilio Segré
en 1937 contribua également à l’im-
portant développement de l’image-
rie fonctionnelle. Il est aujourd’hui
l’un des isotopes les plus utilisés en
imagerie fonctionnelle car il n’émet
que des rayons gamma, lesquels
sont aisément détectables tout en Laboratoire d’Irène et Frédéric Joliot-Curie.
irradiant faiblement le corps.
Efficacité et risques : le rôle comme l’invention du scanner en radioactivité ont-elles toujours été
central des technologies 1970 par l’ingénieur anglais Geoffrey en lien avec les progrès de la méde-
Néanmoins, pour détecter et ana- Hounsfield, qui utilise des rayons X cine. Avec une attention historique
lyser les rayons émis sur une zone produits à partir de générateurs et continue pour réduire les impacts
donnée, il a fallu mettre au point des électriques. négatifs d’exposition, la médecine
appareils spécifiques. Assez rudi- Du côté des traitements par rayonne- nucléaire au sens large a contri-
mentaires et lourds, les premiers ment, là encore les chercheurs ont bué et contribue à l’amélioration
systèmes utilisés dans les années continué de progresser pour mieux des diagnostics, ainsi qu’au traite-
1940 ont laissé place, à partir de irradier les tumeurs tout en limitant ment, voire à la guérison, de nom-
1956, à l’invention du physicien amé- l’atteinte des tissus sains. Aux radio- breux cancers et maladies.
ricain Hal Anger : une caméra dotée thérapies à base de rayons X ou de
d’un cristal scintillant permettant de radium succèdent, en 1955, les
transformer les photons gamma sources au cobalt, dont les rayons
issus du corps en lumière. C’est la plus puissants pénètrent mieux les
raison pour laquelle aujourd’hui on tissus. Une invention qui, à son tour,
parle de scintigraphie. a laissé place à une technologie plus
Puis au cours des années 1960 performante à la fin des années
et 1970, l’imagerie fonctionnelle 1960 : l’accélérateur de particules.
comme la radiologie ont progressé Ainsi, les recherches scientifiques Aiguilles de radium.
grâce à des techniques nouvelles, associées aux rayonnements et à la
Découverte de
la radioactivité Invention
artificielle : il est de la caméra à
possible de créer scintillation 1971
des isotopes appelée
La médecine
radioactifs. gamma-caméra.
nucléaire
1934 1956 est reconnue
comme
une spécialité
1913 1937 médicale
par l’American
Le chercheur hongrois J.-G.Hamilton effectue la première
Medical
G.C. de Hevesy utilise le radium utilisation clinique du sodium radioactif
Association.
pour en étudier sa distribution comme traceur dans le but de diagnostiquer
dans le corps d’un mammifère. les troubles thyroïdiens. Puis en 1942,
Il s’agit du tout premier les premières applications thérapeutiques
traceur radioactif. de l’iode 131 et du phosphore 32.
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Ces scientifiques à l’origine
de la médecine nucléaire
De nombreux physiciens, chimistes, ingénieurs et médecins
ont contribué à l’émergence puis au développement
des médicaments et techniques utilisées pour diagnostiquer
et soigner en utilisant les propriétés de la radioactivité. Emilio Segré
Originaire d’Italie où il étudie et enseigne la
physique nucléaire, puis naturalisé Américain
Irène et Frédéric Joliot-Curie en 1944, Emilio Segré est réputé dans le sec-
teur médical et de la recherche pour avoir
Sur la voie de ses parents Marie et Pierre Curie, découvert le technétium. Un élément
Irène Joliot-Curie a marqué l’histoire de la radioac- chimique qui n’apparaissait pas dans le tableau
tivité, et en particulier celle de la médecine de Mendeleïev en 1937 et qui, depuis, s’est
nucléaire. Avec son mari Frédéric, ils ont ainsi pourtant imposé dans le quotidien des prati-
contribué à développer les usages de la radioac- ciens de la médecine nucléaire. Son isotope
tivité artificielle. Autrement dit, ils ont démontré 99m est ainsi utilisé dans 75 % des examens
qu’on pouvait fabriquer des éléments radioactifs. scintigraphiques aujourd’hui pratiqués dans
Ils ont développé les applications concrètes le monde.
de cette découverte, dans le domaine médical
en particulier. Ainsi il est devenu possible de
fabriquer des traceurs ou marqueurs radioactifs Hal Anger
pour aller explorer in vivo le fonctionnement des Dans la pratique et la diffusion de
cellules et organes, et détecter des anomalies la médecine nucléaire, le cyclo-
comme des cancers. Pour cette découverte ils tron, qui produit des radionucléi-
ont d’ailleurs reçu le prix Nobel de chimie des capables de tracer et détruire
en 1935. les tumeurs, a été une première
grande révolution technique.
La gamma-caméra, capable
de mettre en images les par-
ties du corps humain où des
Ernest Orlando Lawrence radionucléides émettant des
rayons gamma ont été injectés,
Physicien américain né en 1901, Ernest Orlando Lawrence est a constitué une deuxième révo-
particulièrement reconnu pour l’invention du cyclotron. Un ins- lution. Cette invention, on la doit
trument dont l’immense utilité médicale lui a valu de recevoir à Hal Oscar Anger, un ingénieur
le prix Nobel de physique en 1939. Car le cyclotron permet américain et biophysicien ayant
d’accélérer les particules pour justement créer des isotopes énormément collaboré, au sein
radioactifs, aussi appelés radionucléides. Aujourd’hui, si son de l’université de Californie, avec
invention a bénéficié d’améliorations continues, elle est tou- Ernest Orlando Lawrence, l’inven-
jours utilisée dans les structures de santé et de recherche. teur du cyclotron.
Le saviez-vous ?
Des pacemakers à pile nucléaire
— À partir de 1970 et jusqu’à la fin des années 1980, quelque 3 000 stimulateurs cardiaques
au plutonium 238 ont été implantés dans le monde, dont 872 en France. Ce type de stimulateur
utilisait en effet l’énergie thermique libérée par les rayonnements alpha du plutonium lors de
sa désintégration, laquelle était ensuite transformée en électricité. Évidemment le plutonium 238 était enfermé
dans un boîtier à plusieurs couches métalliques afin de protéger le patient des rayonnements.
Les pacemakers au plutonium 238 ont été abandonnés au profit des pacemakers à pile iode/lithium tout aussi
robustes sur la durée, mais sans risque d’irradiation en cas de défaillance du boîtier hermétique.
Toutefois, ces pacemakers fonctionnent encore chez certains patients. Les personnes implantées « types » avaient
en effet 75 ans en 2010 et les plus jeunes à peine 40 ans. Au décès des patients, les pacemakers sont retirés
et renvoyés aux fabricants pour pouvoir être évacués vers les bonnes filières de gestion.
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Médecine et radioactivité :
de quoi parle-t-on ?
Quels éléments radioactifs
la médecine nucléaire
emploie-t-elle ?
Pour quelles applications
est-ce utile et avec
quels instruments ?
On fait le point.
Comment définir la médecine
nucléaire ? Comme l’explique le
professeur Jean-Philippe Vuillez
du CHU de Grenoble, dans l’émis-
sion « À l’Andra, à l’envers, les
sciences en perspectives » diffu-
sée sur Troyes Aube Radio1, « la
médecine nucléaire consiste à
injecter des produits radioactifs
aux patients que nous prenons en
charge dans un but diagnostic ou Appareil d’imagerie médicale de type TEP scan (tomographie par émission de positons).
thérapeutique ».
Premier usage : diagnostiquer tel produit, il va s’accumuler dans tel une scintigraphie, mais elle per-
avec précision ou tel organe et nous apporter des met de localiser plus finement la
Les techniques de diagnostic en informations sur les mécanismes zone d’émission et permet un dépis-
médecine nucléaire ne montrent pas physiopathologiques, c’est-à-dire ce tage précoce des cancers ou le dia-
l’anatomie comme une radio ou un qui explique qu’une maladie donne gnostic de maladies dégénératives
scanner. Il s’agit d’une imagerie fonc- tel et tel symptôme et ce qui permet- comme la maladie d’Alzheimer.
tionnelle : « Elle montre vraiment la tra ensuite de la soigner. »
biologie à l’œuvre dans les cellules », C’est la base de l’imagerie en méde- Deuxième usage : irradier
ajoute Jean-Philippe Vuillez. cine nucléaire : la scintigraphie. pour détruire les cellules
L’imagerie anatomique (ou morpholo- Et c’est la plus ancienne. Elle malades
gique) comme l’imagerie fonctionnelle consiste à administrer au patient Outre son utilité dans le diagnostic,
s’appuient sur des rayonnements une petite quantité de substance la radioactivité a également large-
ionisants pour « mettre en lumière » radioactive appelée médicament ment prouvé son efficacité dans le
un trouble ou un dysfonctionnement. radiopharmaceutique (MRP) par traitement de maladies graves, de
Ils ont en effet la capacité de traverser voie intraveineuse, par inhalation cancers notamment. Son principe :
la matière. Les rayonnements utilisés ou par ingestion. Cette substance irradier des cellules cancéreuses
pour le diagnostic sont les rayons X est choisie en fonction de l’organe pour altérer leur ADN, les empê-
et gamma. ou du tissu à observer sur lequel cher de se multiplier, et finalement
Mais les rayons X émis lorsqu’on elle va se fixer. Et ses rayonne- les détruire.
passe une radio ou un scanner ne ments sont détectés à l’aide d’un La radiothérapie interne consiste,
sont pas dus à la radioactivité. Ils système d’imagerie appelé gam- comme son nom l’indique, à injec-
sont produits par des générateurs ma-caméra. Selon l’organe et la ter des sources radioactives dans
électriques. Une fois ces généra- pathologie, le tissu malade appa- le corps via une injection de médi- 1 Première diffusion
le mardi 22 juin 2021,
teurs éteints, les rayonnements raîtra alors à l’écran comme une caments radiopharmaceutiques disponible en replay
cessent, contrairement à la radioac- zone chaude par rapport au tissu spécifiques : on parle alors de sur Troyes Aube Radio
tivité qui peut avoir une durée de vie sain ou, à l’inverse comme une zone radiothérapie métabolique.
plus ou moins longue en fonction froide. On peut faire des scintigra- Et la recherche se poursuit en
de l’élément concerné. phies osseuses, des scintigraphies médecine nucléaire. De nouveaux
La médecine nucléaire à propre- thyroïdiennes, des scintigraphies radionucléides sont ainsi élaborés
ment parler utilise, elle, des radio- pulmonaires… pour diagnostiquer toujours plus https://bit.
ly/3uGwSDy
isotopes ou radionucléides. « Ils Autre technique de la méde- précocement, suivre plus préci-
sont radioactifs pour être détec- cine nucléaire diagnostique, plus sément les traitements et cibler
tables, précise encore Jean-Philippe récente, la tomographie par émis- plus efficacement les cellules
Vuillez. Selon les propriétés de tel ou sion de positons (TEP) est aussi cancéreuses.
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15éclairage — DOSSIER —
Les différents types de radiothérapie
pour le traitement des cancers
La radiothérapie est un traitement courant des cancers. Son principe : utiliser des rayonnements
(on parle aussi de rayons ou radiations) pour cibler et détruire les cellules cancéreuses.
Néanmoins, ces rayonnements ne proviennent pas tous des mêmes sources. Raison pour laquelle
on distingue radiothérapie externe et radiothérapie interne.
En radiothérapie externe, on De grands progrès
utilise des machines situées à
proximité du patient (des
en radiothérapie externe
accélérateurs de particules) pour — Au cours des 20 dernières années,
générer des rayons X ou des les techniques se sont sans cesse modernisées
électrons qui traversent la peau pour mieux cibler les traitements et diminuer
pour atteindre une tumeur les risques d’irradiation des cellules saines.
cancéreuse et la détruire. La plus utilisée de nos jours est la
radiothérapie conformationnelle 3D qui fait
correspondre le plus précisément possible
le volume sur lequel sont dirigés les rayons
au volume de la tumeur, en épargnant
En radiothérapie interne au maximum les tissus sains avoisinants.
(ou radiothérapie interne vectorisée La protonthérapie est réputée pour être
ou radiothérapie métabolique), la plus précise. Elle utilise des faisceaux
on administre, généralement par voie de protons accélérés dont l’un des avantages
orale, une substance radioactive est de peu se disperser sur leur trajectoire
couplée à une molécule porteuse. pour augmenter le dépôt d’énergie sur
Et c’est ce médicament la tumeur tout en évitant les cellules voisines.
radiopharmaceutique qui va émettre Seul inconvénient, cette technique nécessite
des rayons (bêta ou alpha) sur des installations très coûteuses.
les cellules cancéreuses sur lesquelles Elle est aujourd’hui principalement utilisée
il se sera fixé. Cette technique pour traiter certains cancers chez l’enfant
est également appelée médecine ou certains cancers de l’œil.
nucléaire thérapeutique.
fréquent chez l’homme. Citons par
Médecine nucléaire : et demain ? exemple l’actinium 225 dont les
émissions de rayonnements alpha
Les recherches et essais cliniques en médecine nucléaire menés intéressent beaucoup. « Car ce
actuellement dans le monde permettent d’ouvrir la voie à de nouvelles radionucléide a la capacité d’émettre
possibilités thérapeutiques pour les patients. une grande quantité d’énergie et de
manière très localisée », précise
Les innovations à venir dans le (essai intitulé « Vision ») a permis Célian Michel. Ils limitent donc les
champ de la médecine nucléaire de valider l’efficacité d’un nouveau dommages potentiels aux cellules
concernent en particulier les trai- médicament radiopharmaceutique saines voisines, tout en attaquant les
tements, à savoir la radiothérapie composé de lutétium 177 (radio- cellules cancéreuses avec plus de
interne vectorisée (RTIV). Ces nou- nucléide) et de PSMA 617 (molé- puissance. On parle d’alphathérapie.
veaux traitements s’appuient sur cule porteuse) », explique Célian Par ailleurs, les recherches sur l’utili-
l’utilisation de nouveaux radionu- Michel, physicien médical au sein sation clinique de nouveaux radionu-
cléides couplés à des molécules de l’Institut de radioprotection et de cléides promettent aussi d’améliorer
« porteuses » pour former le médica- sûreté nucléaire (IRSN). Du fait de les diagnostics. Gallium 68, cuivre 64
ment radiopharmaceutique (MRP). ces résultats prometteurs, il semble ou encore zirconium 89 ont cha-
Ce MRP est administré au patient probable que ce nouveau traitement cun des propriétés qui, couplées à
via une injection intraveineuse dans obtienne prochainement une auto- celles de molécules porteuses, vont,
la plupart des cas. « Le traitement risation de mise sur le marché. par exemple, améliorer la qualité de
de certains cancers métastatiques Et nombre d’essais cliniques moins l’image d’une zone malade, ou per-
de la prostate est ainsi en train de avancés testent d’autres radionucléi- mettre de mieux explorer le com-
s’améliorer. Un essai clinique de des pour lutter contre le cancer de portement et l’évolution de cellules
phase 3 mené à l’échelle mondiale la prostate, qui est le cancer le plus cancéreuses.
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