Littéraire 2018 Rentrée - Seuil

La page est créée Hervé Collet
 
CONTINUER À LIRE
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Rentrée
Littéraire
  2018

  Seuil
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Sommaire

  Littérature française

        David Diop
         Frère d’âme
       Cloé Korman
             Midi
    Alain Mabanckou
Les cigognes sont immortelles
    Pascal Manoukian
   Le paradoxe d’Anderson
     Patrice Pluyette
La vallée des Dix Mille Fumées
    Fanny Taillandier
  Par les écrans du monde

  Littérature étrangère

      J. M. Coetzee
      L’abattoir de verre
     Heather O’Neill
    Les enfants de cœur
       Itamar Orlev
            Voyou
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature française

                                                                            © Hermance Triay
                                                                                                                 Extrait

                                                                                                   « J’étais prêt à tout pour qu’il reste en
                                                                                               vie. Je le suivais partout sur le champ de
                                                                                               bataille. Dès que le capitaine Armand
                                                                                               sifflait l’attaque pour bien avertir l’ennemi
                                                                                               d’en face que nous allions sortir en hurlant
                                                                                               du ventre de la terre, pour avertir l’ennemi
                                                                                               de bien se préparer à nous mitrailler, je
                                                                                               me collais à Mademba pour que la balle
                                                                                               qui le blesse me blesse, ou que la balle
                                                                                               qui le tue me tue, ou que la balle qui le
                                                                                               rate me rate. Par la vérité de Dieu, les            L’Auteur
                                                                                               jours d’attaque sur le champ de bataille,           Né à Paris en 1966, David Diop

     David Diop                                                                                nous étions coude à coude, épaule contre            a grandi au Sénégal.
                                                                                                                                                   Il est actuellement maître de
                                                                                               épaule. Nous courions en hurlant vers               conférences à l’université de Pau.

                                                                                               les ennemis d’en face au même rythme,
              U
                                                                                                                                                   Bibliographie
Frère d’âme          n matin de la Grande Guerre, le capitaine Armand
                                                                                               nous tirions nos coups de fusil en même
                     siffle l’attaque contre l’ennemi allemand. Les soldats                                                                        1889, l’Attraction universelle
              s’élancent. Dans leurs rangs, Alfa Ndiaye et Mademba Diop,                       temps, nous étions comme deux frères                L’Harmattan, 2012
              deux tirailleurs sénégalais parmi tous ceux qui se battent                       jumeaux sortis le même jour ou la même
              alors sous le drapeau français. Quelques mètres après avoir
              jailli de la tranchée, Mademba tombe, blessé à mort, sous                        nuit du ventre de leur mère. »
              les yeux d’Alfa, son ami d’enfance, son plus que frère. Alfa
              se retrouve seul dans la folie du grand massacre, sa raison
              s’enfuit. Lui, le paysan d’Afrique, va distribuer la mort sur cette
              terre sans nom. Détaché de tout, y compris de lui-même, il
              répand sa propre violence, sème l’effroi. Au point d’effrayer
              ses camarades. Son évacuation à l’Arrière est le prélude à
              une remémoration de son passé en Afrique, tout un monde
              à la fois perdu et ressuscité dont la convocation fait figure
              d’ultime et splendide résistance à la première boucherie de
              l’ère moderne.

              EAN 9782021398243 • 176 pages. 17 € En librairie le 16 août                                                                      5
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature française

                                                                      © Hermance Triay
                                                                                                           Extrait

                                                                                             « Je franchis la por te. Sur le lit
                                                                                         médicalisé, le visage que je regarde est
                                                                                         si maigre qu’on dirait la peau d’un animal
                                                                                         qu’on ferait sécher sur ses propres os.
                                                                                         Pourtant je me souviens illico du visage,
                                                                                         et de la voix m’appelant depuis le salon,
                                                                                         à midi. À quoi pense-t-il à présent ? Dans
                                                                                         l’état où il se trouve, fait-il encore des
                                                                                         milliers de plans et de projets de voyage,
                                                                                         comme à cette époque lointaine d’où il me
                                                                                         revient ? Je revois le jeune homme, dans           L’Auteur
                                                                                         les diagonales de lumière qui transpercent
Cloé Korman
                                                                                                                                            Cloé Korman est née en 1983 à
                                                                                         les lattes des volets clos en se chargeant         Paris. Elle a étudié la littérature,
                                                                                                                                            en particulier la littérature anglo-
                                                                                         de poussière, de coups de klaxon et                saxonne, ainsi que l’histoire des arts
                                                                                         d’autres bruits de la ville, des souffles de       et du cinéma. Midi est son troisième
 Midi
        D    ans l’hôpital parisien où elle exerce, Claire voit arriver
             Dominique, un ancien amant. La maladie de Dom, déjà à
        un stade très avancé, met en échec ses qualités de médecin
                                                                                         la sieste. Il crayonne sur les pages d’un
                                                                                         livre. Je sens l’odeur des melons entaillés
                                                                                                                                            roman.

                                                                                                                                            Bibliographie
        et fait resurgir le souvenir de leur rencontre. Quinze ans plus                  dont les pépins mûrissent sur la planche           Les Hommes-Couleurs
        tôt, Claire est partie à Marseille, avec son amie Manu, tra-                                                                        prix du Livre Inter 2010
        vailler dans le théâtre associatif que dirigeait Dominique.                      en compagnie d’une mouche. Le livre :              prix Valery-Larbaud 2010
        Au milieu d’un groupe d’enfants occupés à apprivoiser la                         peut-être La Tempête, pour préparer les            Seuil, 2010, et « Points », n° P2635
        scène et embarqués dans une adaptation tumultueuse de
        La Tempête de Shakespeare, elles sont troublées par une
                                                                                         scènes des enfants, peut-être autre chose,         Les Saisons de Louveplaine
                                                                                                                                            Seuil, 2013, et « Points », n° P3341
        silhouette fragile : celle d’une petite fille marginale, aussi                    une bande dessinée, ou rien, son attente
        mal à l’aise dans sa famille que parmi les autres enfants,                       ni triste ni désemparée mais agitée de plus
        et qui semble les appeler à l’aide. Pourtant, la joie de l’été,
        la découverte du désir et le cercle des silences coupables                       de pensées et de désirs que la journée
        les empêchent de prendre conscience du drame en train                            ne pourra jamais en exaucer. »
        de se nouer.
        Porté par le souffle vital de deux héroïnes à peine sorties de
        l’adolescence, Midi nous entraîne dans une enquête sur le
        mystère d’une violence exposée devant tous, en plein soleil,
        et néanmoins inapprochable.

        EAN 9782021403558 • 224 pages. 18 € En librairie le 16 août                                                                     7
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature française

                                                                                © Nico Therin
                                                                                                                 Extrait

                                                                                                   « Maman Pauline dit souvent que
                                                                                                lorsqu’on sort il faut penser à mettre des
                                                                                                habits propres car les gens critiquent en
                                                                                                premier ce que nous portons, le reste
                                                                                                on peut bien le cacher, par exemple un
                                                                                                caleçon gâté ou des chaussettes trouées.
                                                                                                   Je viens donc de changer de chemise
                                                                                                et de short.
                                                                                                   Papa Roger est assis sous le man-
                                                                                                guier, au bout de la parcelle, très occupé
                                                                                                à écouter notre radio nationale, La Voix de       L’Auteur
                                                                                                la Révolution Congolaise, qui, depuis hier        Alain Mabanckou est né en 1966

      Alain Mabanckou                                                                           après-midi, ne passe que de la musique            à Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville.
                                                                                                                                                  Ses œuvres sont traduites dans
                                                                                                soviétique.                                       le monde entier. Il enseigne la
                                                                                                                                                  littérature francophone à l’Université
                                                                                                   Sans se retourner, il me donne des
Les cigognes
               À    Pointe-Noire, dans le quartier Voungou, la vie suit son                                                                       de Californie-Los Angeles (UCLA).
                    cours. Autour de la parcelle familiale où il habite avec                    consignes :
        sont   Maman Pauline et Papa Roger, le jeune collégien Michel a                            – Michel, ne traîne pas sur ton chemin !       Bibliographie sélective
 immortelles   une réputation de rêveur. Mais les tracas du quotidien (argent                   N’oublie pas les courses de ta mère, mon          Verre Cassé
               égaré, retards et distractions, humeur variable des parents,                                                                       prix Ouest-France/
               mesquineries des voisins) vont bientôt être emportés par                         vin rouge, mon tabac, et ne perds pas             Étonnants Voyageurs
               le vent de l’Histoire. En ce mois de mars 1977 qui devrait                       ma monnaie !                                      prix des Cinq Continents de la
               marquer l’arrivée de la petite saison des pluies, le camarade                                                                      Francophonie et le prix du livre RFO
               président Marien Ngouabi est brutalement assassiné à
                                                                                                   S’il me rappelle de ne pas traîner c’est       Seuil, 2005, et « Points », n° P1418

               Brazzaville. Et cela ne sera pas sans conséquences pour                          parce que j’ai l’habitude d’admirer les           Mémoires de porc-épic
               le jeune Michel, qui fera alors, entre autres, l’apprentissage                                                                     prix Renaudot 2006
                                                                                                voitures des capitalistes noirs du côté de        Seuil, 2006, et « Points », n° P1742
               du mensonge.
               Partant d’un univers familial, Alain Mabanckou élargit vite                      l’avenue de l’Indépendance en me disant           Lumières de Pointe-Noire
               le cercle et nous fait entrer dans la grande fresque du colo-                    que je ne les reverrai plus dans ma vie. »        Seuil, 2013, et « Points », n° P3203
               nialisme, de la décolonisation et des impasses du continent                                                                        Petit Piment
               africain, dont le Congo est ici la métaphore puissante et                                                                          Seuil, 2015, et « Points », n° P4465
               douloureuse. Mêlant l’intimisme et la tragédie politique, il
               explore les nuances de l’âme humaine à travers le regard naïf
               d’un adolescent qui, d’un coup, apprend la vie et son prix.

               EAN 9782021304510 • 304 pages. 19,50 € En librairie le 16 août                                                                 9
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature française

                                                                            © Hermance Triay
                                                                                                                   Extrait

                                                                                                   « Christophe n’a jamais trouvé aussi
                                                                                               gracieuse la chorégraphie métallique des
                                                                                               machines tournant et retournant les bouteilles
                                                                                               chauffées à blanc de leurs pinces d’acier. Sans
                                                                                               doute la peur de ne plus assister au spec-
                                                                                               tacle. Elles montent et descendent, glissent
                                                                                               de goulotte en goulotte, épurant leur ligne
                                                                                               d’un moule à l’autre pour défiler, cristallines
                                                                                               et pures, longues et fines, sous l’éclairage
                                                                                               des scanners de contrôle avec la grâce de
                                                                                               danseuses de cabaret en plein tableau final.
                                                                                                   Tout autour des fours, ses gars s’activent.
                                                                                               Chacun maîtrise un geste à la perfection.             L’Auteur

     Pascal Manoukian
                                                                                               Aucun n’est suffisant mais tous sont indis-            Photographe, journaliste, réalisateur,
                                                                                                                                                     Pascal Manoukian a couvert un
                                                                                               pensables. Il est fier d’être le chef d’orchestre
                                                                                                                                                     grand nombre de conflits. Ancien
                                                                                               de ce ballet d’artistes en bleu de travail.           directeur de l’agence Capa, il se
                                                                                                   Nul dans le fracas des machineries ne peut        consacre à l’écriture. Il a notamment
Le paradoxe
 d’Anderson
              P   lus rien n’est acquis. Plus rien ne protège. Pas même
                  les diplômes.
              À 17 ans, Léa ne s’en doute pas encore. À 42 ans, ses parents
                                                                                               imaginer la délicatesse et la précision des
                                                                                               mains qui font naître du feu autant de grâce. Il
                                                                                                                                                     publié, aux éditions Don Quichotte,
                                                                                                                                                     Le Diable au creux de
                                                                                                                                                     la main (2013), Les Échoués (2015)
              vont le découvrir. La famille habite dans le nord de l’Oise, où                  faut dix ans à un doreur avant d’avoir le droit de    et Ce que tient ta main droite
              la crise malmène le monde ouvrier. Aline, la mère, travaille                                                                           t’appartient (2017).
                                                                                               tracer à l’or fin le trait qui soulignera le goulot
              dans une fabrique de textile, Christophe, le père, dans une
              manufacture de bouteilles. Cette année-là, en septembre, coup                    d’une carafe. Dix années d’apprentissage              Bibliographie sélective
              de tonnerre, les deux usines qui les emploient délocalisent.                     pour cinq secondes de perfection. Christophe          Le Diable au creux de la main
              Ironie du sort, leur fille se prépare à passer le bac, section                    en a chaque fois les larmes aux yeux. Il est          Don Quichotte, 2013, et « Points »,
              « économique et social ».                                                        amoureux de son usine. La fermer, ce serait           n° P4154
              Pour protéger Léa et son petit frère, Aline et Christophe vont
              redoubler d’imagination et faire semblant de vivre comme                         lui arracher le cœur, et aujourd’hui, à son âge,      Les Échoués
                                                                                                                                                     Don Quichotte, 2015, et « Points »,
              avant, tout en révisant avec Léa ce qui a fait la grandeur du                    dans l’Oise, il le sait, aucune greffe n’est pos-     n° P4480
              monde ouvrier et ce qui aujourd’hui le détruit. Comme le                         sible, il n’y a plus de donneurs d’ordre, les         Ce que tient ta main droite
              paradoxe d’Anderson, par exemple.                                                seuls à faire repartir le cœur des chômeurs           t’appartient
              « C’est quoi, le paradoxe d’Anderson ? » demande Aline. Léa                                                                            Don Quichotte, 2017, et « Points »,
                                                                                               sont les restos du même nom, et toujours
              hésite. « Quelque chose qui ne va pas te plaire », prévient-elle.                                                                      n° P4709
              Léon, dit Staline, le grand-père communiste, les avait pourtant                  quand il passe devant, il prie pour ne jamais
              alertés : « Les usines ne poussent qu’une fois et n’engraissent                  devoir s’y arrêter. »
              que ceux qui les possèdent. »

              EAN 9782021402438 • 304 pages. 19 € En librairie le 16 août                                                                           11
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature française

                                                                          © Hermance Triay
                                                                                                                Extrait

                                                                                                 « Tout porte à y croire : en pleine retraite
                                                                                             monsieur Henri se remet à naître. Il est
                                                                                             pourtant déjà vieux mais il ouvre les yeux
                                                                                             comme si c’était la première fois sur une
                                                                                             surface plane, claire, horizontale, limitant
                                                                                             l’espace dans sa partie supérieure. Le
                                                                                             regard se fixe sur cette surface sans que
                                                                                             le cerveau cherche à identifier l’image ni
                                                                                             à lui trouver un nom (plafond) ; rien que
                                                                                             d’avoir ouvert les yeux et de découvrir
                                                                                             une lumière, monsieur Henri trouve cela                 L’Auteur
                                                                                             formidable. En fermant les paupières la                 Patrice Pluyette est né en 1977

  Patrice Pluyette                                                                           lumière se retire, à l’inverse forcément le             à Chevreuse. Il vit en Bretagne
                                                                                                                                                     et se consacre à l’écriture.
                                                                                             jour revient. Ce qui nous semble évident                Il a été pensionnaire de la villa
                                                                                                                                                     Médicis à Rome en 2010.
                                                                                             est une source d’émerveillement pour
La vallée
            M     onsieur Henri, soixante-quinze ans au début de ce roman,                                                                           La Vallée des Dix Mille Fumées
                  sort d’une longue période d’immobilité à la suite d’une                    lui. Le mouvement répond à sa volonté :                 est son huitième roman.
     des    chute de toit. C’est pour lui l’occasion de redécouvrir le monde,                clignement, balayage oculaire droit,
                                                                                                                                                     Bibliographie sélective
Dix Mille   en toute innocence et avec des yeux neufs, comme une pre-                        gauche, coupe transversale. En relevant
            mière fois pour chaque chose, chaque paysage, chaque
 Fumées     réalité. D’abord la maison, puis le jardin, puis les alentours,                  un peu la tête on exerce la technique sur
                                                                                                                                                     La Traversée du Mozambique
                                                                                                                                                     par temps calme
            et bientôt, aidé par son médecin traitant et un nouveau voisin                   trois autres surfaces (la quatrième s’élève             prix Amerigo Vespucci 2008
            qui ne l’est pas tant, monsieur Henri exprime des appétits de                                                                            prix Pierre Mac Orlan 2008
            lointains, d’expéditions à travers le globe que ses lectures
                                                                                             derrière lui) séparées de la première par               Seuil, 2008, et « Points », n° P2207

            lui inspirent. Il lui faudra se contenter de moins, même si un                   un angle droit. »                                       Un été sur le Magnifique
            certain goût pour les extrêmes, volcans ou sommets monta-                                                                                Seuil, 2011
            gneux, trouvera sa satisfaction, ou presque, dans des entre-                                                                             La Fourmi assassine
            prises plus modestes, en Auvergne et sur le mont Blanc.                                                                                  Seuil, 2015
            Dans ce roman d’apprentissage ou de découverte, Patrice
            Pluyette fait montre d’une fantaisie à proprement parler
            extraordinaire, il réussit à enchanter le réel et nous invite à
            retrouver l’origine de nos sensations, de nos sentiments,
            de nos rêves aussi. Un roman des merveilles. Un roman qui
            rend tout merveilleux.

            EAN 9782021240023 • 320 pages. 19 € En librairie le 16 août                                                                         13
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature française

                                                                              © Hermance Triay
                                                                                                                    Extrait

                                                                                                     « Faute de film, nous n’aurons pas un
                                                                                                 regard pour ce carré de pelouse bien
                                                                                                 tondue qui descend, depuis la porte-fenêtre
                                                                                                 restée ouverte, jusqu’au lac. La scène ne
                                                                                                 sera enregistrée nulle part.
                                                                                                     Deux corneilles réveillées se sont mises
                                                                                                 à tournoyer, formes noires et légères dans
                                                                                                 un monde encore bleu, et jettent leur cri
                                                                                                 perçant vers le voile de brume matinale
                                                                                                 suspendu sur les eaux, que le soleil n’a pas
                                                                                                 encore déchiré. Plus loin sur la berge se         L’Auteur
                                                                                                 détachent les silhouettes droites des pins        Née en 1986, Fanny Taillandier

   Fanny Taillandier                                                                             sur le miroitement huileux de l’eau calme         est agrégée de lettres. Elle écrit
                                                                                                                                                   des textes pour des revues telles
                                                                                                 qui dépasse au-dessus des hautes herbes,          que Mouvement ou Urbanités,
                                                                                                                                                   et participe à différents croisements
                                                                                                 jusqu’à perte de vue. Souvent il y a du vent
       Par
             D    ans l’aube à peine levée sur un lac proche de Detroit,                                                                           artistiques (Rencontres d’Arles,
                  aux États-Unis, un vieil homme insomniaque laisse                              ici, mais ce matin à peine un souffle.            festival Hors Pistes, Muerto Coco).
les écrans   successivement le même message à sa fille et à son fils : il                              Dans le cadre que fait la porte-fenêtre,      Elle vit et travaille en Seine-Saint-
                                                                                                                                                   Denis. Par les écrans du monde
du monde     va bientôt mourir. Elle est une brillante mathématicienne et                        bordée d’un côté par le voilage blanc             est son troisième livre.
             travaille à calculer les risques dans une compagnie mon-
             diale d’assurances dont le siège est au World Trade Center,                         bouffant légèrement sous cette minuscule          Bibliographie
             à New York. Lui est un vétéran de l’US Air Force, il dirige la                      brise, le paysage a l’air d’une photo peinte :
             sécurité à l’aéroport de Boston. C’est le matin du 11 septembre                                                                       Les Confessions du monstre
             2001 et un jeune architecte égyptien, Mohammed Atta, a pris
                                                                                                 pelouse, hautes herbes, pins, lac, ciel. »        prix littéraire des Grandes Écoles
                                                                                                                                                   Flammarion, 2013
             les commandes d’un Boeing 767.
             Entre roman d’espionnage et méditation historique, entre                                                                              Les États et Empires
             western et fable dostoïevskienne, Fanny Taillandier propose                                                                           du lotissement Grand Siècle
                                                                                                                                                   prix Révélation de la SGDL 2016
             de parcourir le labyrinthe cathodique d’un millénaire dont le
                                                                                                                                                   prix Fénéon 2017
             spectacle, d’emblée, s’impose comme une énigme.                                                                                       PUF, 2016

             EAN 9782021401301 • 256 pages. 18,50 € En librairie le 16 août                                                                       15
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature étrangère

                                                                           © Jerry Bauer
                                                                                                              Extrait

                                                                                               « Elle n’éprouve aucune culpabilité. Pas
                                                                                           la moindre. C’est ce qui la surprend.
                                                                                               Une ou deux fois par semaine, elle se
                                                                                           rend en ville, chez un homme, se déshabille,
                                                                                           fait l’amour avec lui, se rhabille, quitte les
                                                                                           lieux, va à l’école récupérer sa fille et celle
                                                                                           d’une voisine. Ensuite, pendant que les
                                                                                           deux filles prennent leur goûter et regardent
                                                                                           la télévision, elle se douche, se lave les
                                                                                           cheveux, se fait toute fraîche, toute neuve.
                                                                                           Sans culpabilité. Fredonnant.
                                                                                                                                               L’Auteur
                                                                                               Quel genre de femme suis-je ? se
   J. M. Coetzee
                                                                                                                                               J. M. Coetzee, né en 1940 au
                                                                                           demande-t-elle en tendant le visage sous            Cap (Afrique du Sud), est l’auteur
                                                                                                                                               de treize romans, trois romans
   Prix Nobel de littérature                                                               la cascade d’eau chaude. Quel genre de              autobiographiques, plusieurs
                                                                                           femme suis-je donc, que me convienne si             recueils de nouvelles et d’essais
                                                                                                                                               traduits dans une trentaine de
                                                                                           facilement cette infidélité ?
L’abattoir
 de verre    U    ne femme, écrivain, au soir de sa vie. Chaque jour qui
                  passe la rapproche de l’ombre, et elle constate, avec
             calme et lucidité, la déliquescence de ses facultés mentales.
                                                                                               Infidélité : c’est le mot qu’elle a prononcé
                                                                                                                                               langues et abondamment primés.
                                                                                                                                               Lauréat du prix Femina étranger
                                                                                                                                               et par deux fois du Booker Prize,
                                                                                           in petto à l’instant où l’homme s’est glissé en     il a reçu le prix Nobel de littérature
             Autour d’elle se pressent ses enfants, qui s’inquiètent pour
             elle, l’admonestent de quitter l’Australie pour les rejoindre.                elle la première fois. Tout ce qui s’était passé    en 2003. Il vit aujourd’hui à
                                                                                                                                               Adélaïde, en Australie.
             Elle s’y refuse pourtant, préférant faire face à l’inéluctable                auparavant pouvait trouver excuse, être
             dans la liberté et l’indépendance de la solitude, s’interro-                                                                      Bibliographie sélective
             geant jusqu’au bout, sans relâche, sur le sens de sa propre                   qualifié de futile : les baisers, l’effeuillage,
             existence et sur la nature profonde de notre humanité.                        les caresses. À tout cela, on pouvait donner        L’Été de la vie
             En sept tableaux romanesques, J. M. Coetzee nous offre                                                                            Seuil, 2010, et « Points », n° P2667
                                                                                           un autre nom. Mais quand il s’est glissé en
             un somptueux portrait de femme (une certaine Elizabeth                                                                            Une enfance de Jésus
             Costello) et une leçon de littérature, aussi dense que brève.                 elle, la chose est devenue irréversible. Elle       Seuil, 2013, et « Points », n° P3303
             Dans une langue d’une épure admirable, il touche au cœur                      advenait ; elle était advenue. »                    Trois Histoires
             de nos interrogations les plus complexes et les plus univer-                                                                      Seuil, 2016
             selles (que restera-t-il de nous lorsque nous serons partis ?
                                                                                                                                               L’Éducation de Jésus
             que transmet-on à ceux qui restent ?) et les affronte sans                                                                        Seuil, 2017
             jamais se départir de sa suprême élégance, de sa dignité
             et de son humilité.
                Traduit de l’anglais par Georges Lory

             EAN 9782021402391 • 176 pages. 18 € En librairie le 16 août                                                                      17
Littéraire 2018 Rentrée - Seuil
Littérature étrangère

                                                                           © Julia C. Vona
                                                                                                               Extrait

                                                                                                 « En ce jour de 1914, une très jeune fille
                                                                                             frappa à la porte de l’hôpital de la Misé-
                                                                                             ricorde à Montréal. Elle avait des joues
                                                                                             rondes comme des pommes. Elle avait
                                                                                             douze ans. […] Tous les jours, des jeunes
                                                                                             filles enceintes faisaient la queue devant
                                                                                             l’hôpital, avec leur gros ventre qu’elles ne
                                                                                             pouvaient plus cacher à leur famille. On
                                                                                             les avait mises à la porte. Elles arrivaient
                                                                                             avec l’empreinte de la main de leur père
                                                                                             sur le visage, s’efforçant de cacher leurs
                                                                                                                                                  L’Auteur
                                                                                             bleus sous leurs jolies bouclettes blondes
    Heather O’Neill
                                                                                                                                                  Heather O’Neill est née et vit à
                                                                                             ou leur chevelure noire et lisse. On aurait          Montréal. Après La Ballade de Baby,
                                                                                             dit des poupées de porcelaine tombées                finaliste du prix Orange, The Girl
                                                                                                                                                  Who Was Saturday Night et le recueil
                                                                                             en disgrâce auprès d’un enfant. Elles                de nouvelles Daydreams of Angels,
Les enfants
   de cœur    M      ontréal, hiver 1914. Deux bébés sont abandonnés dans
                     un orphelinat. Élevés sous la férule des bonnes sœurs,
              ils ne tardent pas à révéler des dons exceptionnels. Pierrot
                                                                                             avaient gâché leur vie entière pour cinq
                                                                                             minutes de plaisir dans un escalier de
                                                                                                                                                  à paraître aux éditions du Seuil,
                                                                                                                                                  Les enfants de cœur est son
                                                                                                                                                  troisième roman.
              est un pianiste prodige ; Rose sait comme personne illuminer                   service avant d’être répudiées à jamais
              le visage des enfants tristes par ses pantomimes. Ils tombent                                                                       Bibliographie
              bientôt amoureux, et se mettent à rêver ensemble d’un avenir                   par leurs parents, tandis que les jeunes
                                                                                                                                                  La Ballade de Baby
              lumineux, sous le chapiteau du cirque le plus spectaculaire que                pères continuaient de vaquer à leurs occu-           10/18, 2008
              le monde ait jamais connu. Mais l’adolescence les sépare et,
              tandis que s’avancent les ombres de la Grande Dépression,
                                                                                             pations, se promenaient à bicyclette et
              voici nos tourtereaux repoussés aux marges sordides de la ville,               sifflaient dans leur bain. Voilà pourquoi on
              dans la misère, la débauche et le crime. Animés cependant                      avait construit cet édifice. Par immense
              d’une foi inextinguible en leurs talents et d’un insatiable appétit
              de vie, Rose et Pierrot n’auront de cesse de braver les obs-                   bonté envers ces misérables gueuses. »
              tacles, et ne désespéreront jamais de se retrouver.
              Rocambolesque et poétique, le roman de Heather O’Neill
              fait retomber le lecteur en enfance, convoquant les pouvoirs
              magiques de l’imagination pour l’entraîner dans une étour-
              dissante parade d’aventures et d’émotions.
              Traduit de l’anglais (Canada) par Dominique Fortier

              EAN 9782021363456 • 480 pages. 21,50 € En librairie le 16 août                                                                 19
Littérature étrangère

                                                                      © DR
                                                                                               Extrait

                                                                                 « Il était là, assis sur son lit, adossé
                                                                             contre le mur, cheveux ébouriffés, visage
                                                                             gris. S’il était né dans un autre milieu
                                                                             social, dans un autre pays, en un autre
                                                                             temps, il aurait pu être un libertin plein de
                                                                             panache… Mais là, ce n’était qu’un voyou
                                                                             polonais qui avait émergé des égouts de
                                                                             Majdanek pour atterrir dans la crasse des
                                                                             quartiers pauvres de Wrocław. Son aura
                                                                             de liberté et de romantisme fracassée
                                                                             sur le sol d’une réalité viciée, sombre,             L’Auteur
                                                                             nauséabonde. Il était à moitié assoupi,              Itamar Orlev est né en 1975 à

Itamar Orlev                                                                 avachi, en pyjama élimé, la bouche entrou-           Jérusalem. Après des études
                                                                                                                                  d’histoire et de cinéma, il travaille
                                                                             verte, une cigarette consumée entre les              dans l’édition. Il vit aujourd’hui à
                                                                                                                                  Berlin avec sa femme et ses deux
                                                                             doigts. Vieux. Pitoyable. Mon père. Baiseur
Voyou
        L   orsque sa femme le quitte, emportant loin de lui leur                                                                 fils. Voyou a été récompensé en
            jeune fils, Tadek voit soudain sa vie s’effriter entre ses        et buveur invétéré, qui s’était enivré de            2016 par le prix Sapir du meilleur
                                                                                                                                  premier roman en Israël.
        doigts. Il n’a plus pour compagnie qu’un fatras de souvenirs,        musique, qui avait dansé, frappé, tué sans
        de cauchemars – et un fantôme, celui de son père, qu’il              scrupule. Comment ne pas rester pantois
        n’a pas revu depuis vingt ans. Sur un coup de tête, Tadek
        décide alors de quitter Jérusalem pour retrouver ce dernier,         devant la capacité de jouissance absolue
        qui croupit dans un hospice de Varsovie. L’homme qu’il               dont il avait fait preuve toute sa vie, sans
        découvre n’est plus que l’ombre du personnage flamboyant
        qui a marqué son enfance. Stefan Zagourski était jadis un
                                                                             jamais tenir compte de personne à part lui-
        ogre, une force de la nature, un séducteur – et un monstre. Il       même ? Pourtant, j’avais beau regarder, je
        buvait, vitupérait, cognait, faisait régner la terreur au sein de    ne trouvais pas le moindre flamboiement
        sa famille, qui a préféré le fuir en émigrant. Aujourd’hui, c’est
        un vieil homme pathétique aux portes de la mort, impotent,           dans l’individu minable qui somnolait sur
        rongé par l’alcool et la rancœur, hanté par les atrocités de         le lit en face de moi. »
        la Seconde Guerre mondiale, dont il fut à la fois une victime
        et un bourreau. Une semaine durant, père et fils vont se
        confronter, et affronter ensemble les spectres du passé, à
        la recherche d’une impossible réconciliation.
            Traduit de l’hébreu par Laurence Sendrowicz

        EAN 9782021365795 • 432 pages. 22 € En librairie le 16 août                                                          21
Les Éditions du Seuil vous proposent

       de retrouver toutes les informations de ce catalogue

                sur le site dédié à la Rentrée Littéraire.

            Vous y découvrirez des interviews d’auteurs

                 et les premiers chapitres des romans

                         ainsi que des extraits audio.

                        www.rentree-seuil.com

            Pour y accéder directement, flashez ce code :

                 Et pour suivre toute notre actualité :

Les prix et les paginations sont donnés à titre indicatif et ne sont en aucun cas contractuels.
Vous pouvez aussi lire