Lourd bilan pour Harper - La Terre de chez nous
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V o l . 86, n o 32 – 12 au 18 août 2015 – w w w . l a t e r r e . c a – U n c a h i e r – 3 2 p a g e s – 2,25 $
Lourd bilan pour Harper
TOUS LES TEXTES SUR LA CAMPAGNE ÉLECTORALE
À LIRE EN PAGES 2 À 7
PIERRE-YVON BÉGIN/TCN
BLÉ D’AUTOMNE
Une récolte très prometteuse
À LIRE EN PAGE 9
MÉNARD/TCN
MARTIN
Vol 86 #32
32
1
Messageries Dynamiques
78313 02664
7
2,25$ 10013PAGE 2 LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015
ÉLECTIONS 2o1 5
Stephen Harper, 10 ans plus tard
YVON LAPRADE LA RÉFORME
ylaprade@laterre.ca DE L’ASSURANCE-EMPLOI
Cette réforme qui prive les producteurs de main-
Il y a près de 10 ans – le 23 janvier 2006 –, d’œuvre saisonnière a été vivement critiquée
– et dénoncée –, mais les règles sont restées les
Stephen Harper prenait le pouvoir à Ottawa. mêmes. Résultat : de plus en plus d’employeurs
ont des difficultés à recruter des travailleurs sai-
Il devenait le 22e premier ministre du Canada sonniers (voir textes en pages 10 et 11).
et il chassait du même coup les libéraux.
Au cours de la dernière décennie, les conservateurs LE PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE
ont mis en place de nombreuses réformes Le Canada va-t-il tenir sa promesse de proté-
L’ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE
CANADA-EUROPE
ger la gestion de l’offre, en dépit des pressions
et négocié des accords de commerce un peu exercées par les autres pays pour l’éliminer ou Cette entente fera entrer 17 700 tonnes supplémen-
partout sur la planète. Mais quel rôle a joué – en réduire la portée? Les producteurs laitiers et taires de fromages fins, principalement au Québec.
avicoles ont prévenu le ministre Denis Lebel Jusqu’à la toute fin, les fromagers québécois ont eu le
ou n’a pas joué – le gouvernement conservateur qu’ils l’avaient à l’œil et qu’ils s’attendaient à ce sentiment que quelque chose se tramait dans leur dos.
qu’il ne cède pas un pouce sur le terrain du libre Les fromagers devraient recevoir une compensation,
au sein du monde agricole? Une décennie plus mais leur stabilité économique demeure fragile.
commerce international.
tard, l’heure est au bilan. La Terre fait le point
sur les principaux dossiers qui ont fait l’actualité L’AFFAIBLISSEMENT DE L’AGENCE CANADIENNE D’INSPECTION DES ALIMENTS
au cours du règne Harper. En septembre 2014, on a appris que le gouvernement conservateur avait demandé à l’Agence de dégraisser son
budget de 56 M$. Depuis, le personnel est réduit, et les inspections sont moins fréquentes et moins rigoureuses.
L’INCERTITUDE POLITIQUE AUTOUR DES PIPELINES
En octobre 2014, le gouvernement fédéral a pris le contrôle de l’évaluation du projet
d’oléoduc Énergie Est, qui fera du Québec le point le plus névralgique au Canada pour
l’exportation de pétrole albertain. Le pipeline devrait permettre d’acheminer du pétrole
aux raffineries de Montréal et de Lévis et à celle de Saint John, au Nouveau-Brunswick.
Un nouvel oléoduc sera construit en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, dans l’est de
l’Ontario, au Québec et au Nouveau-Brunswick.
LA PRIVATISATION
DE LA COMMISSION CANADIENNE LE RESSERREMENT DES RÈGLES TOUCHANT L’ENTRÉE DES TRAVAILLEURS
DU BLÉ (CCB) ÉTRANGERS TEMPORAIRES
En avril 2015, l’entreprise G3 Global Grain Group Pour « faire travailler les chômeurs », le gouvernement limite
a investi 250 M$ pour acquérir 50,1 % des actions désormais l’entrée de Mexicains et de Guatémaltèques dans les
de la CCB. Quatre ans auparavant, la Loi sur le libre usines de transformation alimentaire, ce qui prive ces entreprises
choix des producteurs de grains en matière de com- de main-d’œuvre occasionnelle pour transformer les produits de la
mercialisation avait mis fin au monopole de la CCB terre. Une mesure dénoncée avec véhémence par les entrepreneurs,
sur la vente du blé et de l’orge canadiens. qui ont demandé l’appui du gouvernement Couillard.
L’ÉTIQUETAGE DE LA VIANDE LES RÉDUCTIONS BUDGÉTAIRES LA DIMINUTION DES BUDGETS DE
En octobre 2014, le gouvernement fédéral a rem- MAJEURES TOUCHANT RECHERCHE TOUCHANT LES FERMES
porté une bataille d’importance dans le conflit LE PROGRAMME CULTIVONS EXPÉRIMENTALES.
commercial qui l’opposait aux États-Unis. Il faut L’AVENIR 2 La ferme de Frelighsburg, un centre de recherche
rappeler que l’Organisation mondiale du commerce Le fédéral a réduit son financement de 50 %, d’Agriculture et Agroalimentaire Canada fondé en
(OMC) avait alors tranché en établissant que les ce qui pénalise les producteurs et oblige les 1969, a fermé ses portes en 2012. Cet établissement,
règles américaines touchant l’étiquetage du pays provinces à assumer des coûts supplémen- que plusieurs considéraient comme un joyau, prin-
d’origine (COOL) nuisaient aux exportations de taires pour la sécurité du revenu. cipalement pour la pomiculture, a été victime des
viande du Canada et du Mexique. coupes prévues au budget fédéral.LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015 PAGE 3
ÉLECTIONS 2o1 5
L’agriculture au cœur du scrutin
devrait aussi occuper une place dans les Celle qui était à l’extérieur du Canada Au Bloc québécois, la députation
débats. Les candidats auront à redoubler au moment de la dernière élection est a été réduite à quatre parlementaires.
PIERRE-YVON BÉGIN d’efforts pour joindre les agriculteurs en appelée à jouer un rôle de premier La campagne est déjà marquée par le
pybegin@laterre.ca cette période intensive de récoltes. plan en matière agricole au cours de la retour du chef Gilles Duceppe, tandis
Au moment de la dissolution de la campagne actuelle. Jusqu’ici, le NPD que le porte-parole en matière d’agri-
Lancée le 2 août, la campagne élec- Chambre, le Parti conservateur du a choisi environ 70 candidats pour le culture, André Bellavance, a choisi de
torale conduisant au scrutin général du Canada (PC) comptait 166 élus, dont représenter au Québec. se retirer. Il est remplacé par la candi-
19 octobre prochain devrait réserver une 5 au Québec. Député de Mégantic- Chez les libéraux de Justin Trudeau, date Myriam Beaulieu dans sa circons-
place importante au secteur agricole. L’Érable et ancien ministre d’État la formation comptait 34 députés, dont cription de Richmond-Arthabaska.
L’échec des négociations du à l’Agriculture, Christian Paradis 7 au Québec. Le Parti libéral du Canada Enfin, le Parti vert du Canada de la
Partenariat transpacifique (PTP) le a annoncé qu’il se retirait de la vie (PLC) a fait de Jean-Claude Poissant, chef Elizabeth May, seule députée
vendredi 31 juillet et l’avenir de la ges- politique. candidat dans la circonscription de La de cette formation, compte jusqu’ici
tion de l’offre occuperont assurément Le Nouveau Parti démocratique Prairie, son porte-parole en matière 12 candidats au Québec.
un grand espace durant les 78 jours (NPD), quant à lui, a fait élire 103 can- d’agriculture. Selon sa fiche Web, il Rappelons qu’un des points impor-
de campagne dans les circonscriptions didats au dernier scrutin, dont 54 est président de l’organisme Au cœur tants de la campagne actuelle est
rurales. La question du passage d’un au Québec. Députée de Berthier- des familles agricoles et directeur de la l’introduction d’une nouvelle carte
nouvel oléoduc en terres agricoles pour Maskinongé, Ruth Ellen Brosseau Société d’agriculture de La Prairie. Le électorale comprenant l’ajout de
transporter les sables bitumineux de est porte-parole adjointe en matière PLC a jusqu’ici choisi officiellement 3 circonscriptions au Québec, pour
l’Alberta vers les marchés d’exportation d’agriculture pour le NPD au pays. 71 candidats. un total de 78.
« C’est le moment pour Stephen Harper
de prendre sa retraite »
YVON LAPRADE et si son chef, « Tom », comme elle mentaires de fromage, ce qui va affec-
appelle Thomas Mulcair, lui en confie ter les fromagers québécois. »
Un gouvernement néo-démocrate de nouveau la responsabilité. Ruth Ellen Brosseau dit s’être tenue
sera « davantage à l’écoute » des La députée néo-démocrate croit debout dans ce dossier qui avait sou-
producteurs agricoles et des régions, avoir réussi à s’imposer au cours de levé la colère des producteurs de la
favorisera le transfert des entreprises son mandat. « Les agriculteurs que je Belle Province.
familiales et barrera le chemin à ceux rencontre depuis quatre ans me disent « J’ai déposé en chambre une motion
qui veulent ouvrir les frontières de la qu’ils se sentent écoutés et qu’ils ont pour des compensations et un pro-
gestion de l’offre. le sentiment que je défends leur cause gramme de marketing, en vue de faire
« Il faut avoir une vision à long à Ottawa. Il y a plusieurs gros dos- face aux changements, évoque-t-elle.
terme », résume Ruth Ellen Brosseau, siers que je veux continuer à mener de J’ai réussi à faire adopter la motion,
porte-parole adjointe en matière de front », souligne la jeune femme. et le premier ministre a même voté en
dossiers agricoles au sein du NPD. Et elle ajoute : « Ça fait 10 ans qu’il faveur des compensations. Mais il n’y
« Il faut prendre des mesures est au pouvoir, et c’est le moment en a pas encore… »
concrètes pour faire cesser le déclin de pour Stephen Harper de prendre sa Par ailleurs, la députée sortante, qui
nos fermes familiales, ajoute-t-elle en retraite. » s’exprime désormais dans un français
entrevue à la Terre. Pour cela, il faut La confiance perdue plus que correct, prévoit que la cam-
travailler avec les provinces, et non des conservateurs pagne électorale sera éreintante.
l’inverse. » Ruth Ellen Brosseau entend marteler Ruth Ellen Brosseau Elle a déjà commencé à sillonner les
La députée sortante de Berthier- le même message pour renverser les rues et les rangs de sa circonscription.
Maskinongé, âgée de 31 ans, sollicite conservateurs. du Québec et de l’Ontario. « Il n’y a La semaine dernière, elle s’est arrêtée
un deuxième mandat dans sa circons- « J’ai de la difficulté à leur faire pas beaucoup de productions qui sont dans des champs de lavande et dans
cription de la Mauricie, qui compte confiance », déclare-t-elle à propos des sous la gestion de l’offre dans ces pro- un vignoble.
37 municipalités et un important bas- prises de position de ses adversaires sur vinces, comme c’est le cas au Québec et « Je suis passionnée par l’agri-
sin de producteurs. Ceux-ci suivent les sujets économiques qui touchent en Ontario », soulève-t-elle. culture. Je rêve d’acheter une mai-
avec anxiété les négociations en vue du l’agriculture, l’industrie de la transfor- Elle rappelle en outre que c’est son avec un jardin et d’y élever des
Partenariat transpacifique. mation et la sécurité alimentaire. encore le Québec qui a perdu au change poules! » lance l’ancienne gérante
La confiance de « Tom » En termes à peine voilés, elle dit que lors de la conclusion de l’accord com- d’un bar dans l’Outaouais, qui avoue
Ruth Ellen Brosseau ne s’en cache les députés conservateurs – concentrés mercial avec l’Union européenne. être tombée amoureuse de la Mauricie.
pas : elle veut continuer de défendre dans les provinces de l’Ouest canadien « Il y a eu des brèches, déplore-t-elle. Elle habite à Trois-Rivières-Ouest
les dossiers agricoles si elle est réélue – ne saisissent pas les enjeux agricoles On va importer 17 700 tonnes supplé- depuis trois ans.PAGE 4 LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015
ÉLECTIONS 2o1 5
Poissant prêt à déchirer sa chemise
PIERRE-YVON BÉGIN Partenariat transpacifique afin que la une norme nationale. Sa formation,
gestion de l’offre soit maintenue dans avance-t-il, veut aussi créer un orga-
Producteur laitier à Saint-Philippe, son intégralité? À cette question hypo- nisme national de promotion de l’agri-
Jean-Claude Poissant sort les griffes thétique, il réplique que le Parti libéral culture et de l’agroalimentaire, un peu
pour défendre l’intégralité de la gestion du Canada (PLC) est en faveur de cette à l’image d’Aliments du Québec. Il
de l’offre. entente commerciale de libre-échange, dénonce ainsi l’abolition du Secrétariat
« Je suis prêt à déchirer ma chemise », mais pas à n’importe quel prix. national de la ruralité par le gouverne-
confie en entrevue téléphonique celui Pour la sécurité alimentaire ment conservateur.
qui est aujourd’hui candidat libéral « Ce qu’il y a sur la table, déclare-t- Les « agri-compliqués »
dans la circonscription de La Prairie. La il, personne ne le sait. Nous, on dit que Outre la gestion de l’offre, indique
gestion de l’offre instaurée en 1970 par Harper ne doit pas signer une entente Jean-Claude Poissant, le PLC entend
Pierre-Elliott Trudeau est, rappelle-t-il, en cachette. On l’a vu signer une revoir le cadre stratégique Cultivons
le principal engagement de son parti en entente avec l’Union européenne qui a l’avenir 2 qui vient à échéance en
agriculture et « une fierté » pour son chef laissé entrer 17 700 tonnes de fromage. 2018. Il dénonce la complexité des pro-
GRACIEUSETÉ PLC
Justin, fils de l’ancien premier ministre. Est-ce que les producteurs avaient grammes Agri-risques, Agri-relance,
« Un pays sans agriculture, c’est un été consultés? Je ne le pense pas. Par Agri-investissement et autres.
pays qui n’a pas d’âme », lance celui contre, les provinces devaient donner « On appelle ça les agri-compliqués », Jean-Claude Poissant, candidat du Parti
qui a été administrateur de son syndi- leur aval. C’était déjà un plus. Mais ironise-t-il. libéral du Canada dans La Prairie.
cat de base de L’Acadie pour l’Union là, avec l’entente qui est sur la table, il Enfin, Jean-Claude Poissant promet
des producteurs agricoles. Aujourd’hui, n’est pas question des provinces. C’est qu’un gouvernement libéral va rétablir l’automne dernier, fulmine-t-il. Des
il est aussi toujours ambassadeur des très dangereux. » le programme d’accès aux travailleurs producteurs ont perdu leur récolte au
Producteurs de lait du Québec. Jean-Claude Poissant veut faire de étrangers temporaires. champ, faute de travailleurs. Dans
Serait-il prêt à envisager la possibilité la sécurité alimentaire son cheval de « Il y a beaucoup de fruits et de Mirabel, c’est 50 M$ qu’on a perdus
que le Canada soit absent d’un éventuel bataille. À son avis, celle-ci doit devenir légumes qui sont restés au champ ainsi. C’est inconcevable. »
« Il faut reconnaître le travail des agriculteurs »
YVON LAPRADE « aller porter les dossiers » des produc- concentration agricole, ce qui lui permet, « Mes adversaires n’ont pas de
teurs agricoles québécois à Ottawa s’il dit-il, de bien connaître la réalité des pro- connaissance de l’agriculture », lance
Sécurité alimentaire. Reconnaissance est élu le 19 octobre. Son chef, Gilles ducteurs locaux, qui ont vu la valeur de le professeur au cégep de Joliette,
du travail des agriculteurs. Défense de Duceppe, l’envoie d’ailleurs dans la leurs terres augmenter sous la pression qui agit également comme chargé de
la gestion de l’offre. Mise en valeur mêlée quand il s’agit de commenter des spéculateurs. cours à l’UQAM, en plus de faire de la
du caractère distinct de l’agriculture l’actualité agricole. « Au Bloc québécois, explique-t-il en recherche pour l’Institut de recherche en
québécoise. L’économiste âgé de 35 ans aime rap- entrevue à la Terre, on prône la sécurité économie contemporaine (IRÉC).
Gabriel Ste-Marie, le candidat du peler qu’il est « un gars de la place ». Il alimentaire. Il y a aussi la protection du Le candidat maintient que le Bloc qué-
Bloc québécois dans Joliette, souhaite a grandi dans un environnement à forte territoire et le zonage agricole. Il faut bécois a la capacité de faire entendre la
donner un coup de pouce à la relève dans voix des agriculteurs à Ottawa. Il en pro-
nos fermes. » fite pour écorcher au passage le gouver-
Et il se fait le porte-parole des produc- nement conservateur. « Je ne vois pas ce
Sur le Web laterre.ca teurs laitiers québécois, qui s’attendent qu’il a fait de bon pour l’agriculture »,
Actualités/Vie rurale à ce que le premier ministre Stephen assène-t-il.
y La grêle ravage des récoltes dans les Cantons-de-l’Est Harper ne cède pas un pouce sur le ter- Mais il continue de craindre que le
Actualités/Politique rain glissant du libre commerce dans la Québec soit de nouveau pénalisé –
y La réforme de l’assurance-emploi fait mal zone Asie-Pacifique. comme ç’a été le cas avec les fromages
Avec une pointe d’ironie, Gabriel Ste- fins lors de l’accord Canada-Europe – si
L’agriculture au cœur du scrutin
y Commentez sur facebook.com/laterreca Marie ajoute : « Quand on sait tout ce un accord commercial avec les 12 pays
Partagez vos photos et vidéos avec nous. qu’ils mettent dans le lait produit aux de la zone Asie-Pacifique survient en
États-Unis… » pleine campagne électorale.
Les intérêts du Québec « Il ne faudrait pas, soumet-il, que la
La question de la semaine
Gabriel Ste-Marie est bien conscient gestion de l’offre soit sacrifiée au profit
y La campagne électorale de 78 jours servira-t-elle
les conservateurs, selon vous? que la campagne sera longue et qu’il lui d’une entente qui favoriserait le secteur
faudra convaincre les indécis. La barre de l’automobile, concentré en Ontario. »
Venez répondre à laterre.ca.
est haute : avant lui, pour le Bloc québé- Faut-il comprendre que le Bloc qué-
Résultats du sondage
cois, c’est le député Pierre Paquette qui bécois serait la seule voix crédible pour
y Pensez-vous que le Canada tirera avantage de la signature
a représenté Joliette. Cette fois, la dépu- parler au nom des producteurs d’ici? Le
du Partenariat transpacifique?
tée sortante du NPD, Francine Raynault, candidat économiste, qui ne manque pas
Oui 31% / Non 62% / Je ne sais pas 8%
n’est pas de la course. de confiance en ses moyens, croit que oui.LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015 PAGE 5
ÉLECTIONS 2o1 5
Un conservateur fier qu’il y ait
« plus d’argent dans le domaine agricole »
une population de 35 millions de per- L’enjeu de la main-d’œuvre
sonnes. Il faut exporter. Et avoir un étrangère
MARTIN MÉNARD maximum d’ententes avec les autres La décision du gouvernement fédé-
mmenard@laterre.ca
pays permet d’enlever des tarifs doua- ral de limiter l’entrée des travailleurs
niers, ce qui donne plus d’argent à nos étrangers temporaires au pays a irrité
Sans surprise, le député conservateur agriculteurs », dit-il. plusieurs entreprises de transformation
GOURDE
sortant de Lévis-Lotbinière, Jacques Gestion de l’offre alimentaire. Le géant de la production
Gourde, dresse un bilan positif de son En territoire agricole, ce sujet risque de légumes frais VegPro International
DE CAMPAGNE JACQUES
gouvernement en matière d’agricul- de chauffer les oreilles des candidats songe même à déménager ses usines à
ture. « L’ensemble de l’agriculture conservateurs. La Terre a demandé Plattsburgh, de l’autre côté de la fron-
s’améliore. Il y a plus d’argent dans le si, durant la campagne électorale, tière. Qu’en pense M. Gourde? « Il y a
domaine présentement. En effet, si on M. Gourde allait promettre de main- 1,2 million de Canadiens au chômage et
BUREAU
se rappelle 2006, le prix des grains et tenir la gestion de l’offre dans son donc disponibles [pour le travail]. C’est
DU
de la viande était à terre. Aujourd’hui, intégralité. Sans reprendre le terme beaucoup de monde. Peut-être qu’ils
GRACIEUSETÉ
la situation a vraiment changé. Il faut « intégralité », l’homme a dit qu’il aiment moins travailler dans des usines
dire que nous avons tout mis en place défendrait les trois piliers du concept, de transformation, mais tôt ou tard, ces Le député conservateur sortant de Lévis-
pour aller chercher les meilleurs prix assurant que les conservateurs sauve- Canadiens-là auront besoin d’argent Lotbinière, Jacques Gourde.
du marché », avance cet ex-producteur raient la gestion de l’offre. « C’est ce pour vivre. Et ils doivent passer en pre-
agricole, qui sollicite un deuxième qu’on avait promis, c’est ce qu’on va mier. » Au risque de mettre en péril la subventions agricoles Cultivons l’ave-
mandat. faire. » rentabilité de certaines entreprises? nir 2. Le député de Lévis-Lotbinière
Le politicien souligne les actions Et les 17 770 tonnes de fromage « C’est plus serré et plus compli- répond que l’ensemble des secteurs
des conservateurs visant à stimuler les qui arriveront de l’Europe en vertu qué, mais les entreprises doivent faire économiques canadiens, agriculture
exportations, citant des programmes de l’entente de libre-échange entre le l’effort d’engager des Canadiens. C’est comprise, devait faire sa part pour que
qui promeuvent la qualité des produits Canada et l’Union européenne? plus payant pour l’ensemble de la le gouvernement retrouve l’équilibre
canadiens. « Il faut s’assurer que nos « J’en ai parlé à certains produc- société. En effet, les travailleurs étran- budgétaire.
produits agroalimentaires sont dans teurs et ils ne sont pas inquiets outre gers qui viennent ici partent après six Durant sa campagne, M. Gourde
toutes les vitrines possibles. Et c’est ce mesure. D’abord, ce n’est pas encore mois avec l’argent qu’ils ont gagné au promettra-t-il une bonification des pro-
qu’on fait. » commencé; l’entente prendra effet en Canada. Cet argent-là n’est pas dépensé grammes à ses électeurs? « Il est trop tôt
Sans oublier les ententes de com- 2017. Et s’il y a des pertes, il y aura ici », soutient-il. pour dévoiler quoi que ce soit. On place
merce international signées par son des compensations, comme nous Coupe des subventions la table et on s’étale », affirme-t-il, ajou-
gouvernement. « Le Canada compte l’avons promis », répond le député Le gouvernement conservateur a sabré tant que son gouvernement prépare le
160 millions d’acres en culture pour sortant et ex-producteur laitier. dans le budget associé au programme de programme Cultivons l’avenir 3…
« Harper doit éviter de se faire du capital politique »
– le professeur Benoît Pelletier
YVON LAPRADE L’ancien politicien – il a été député « Le gouvernement reste en fonc-
libéral sur la scène provinciale, avec tion jusqu’à l’assermentation,
Le premier ministre Stephen Harper Jean Charest – suggère au chef conser- précise-t-il. C’est la Chambre qui a
devrait « éviter de se faire du capital vateur de se contenter de « voir à la été dissoute.
: DANIEL LESSARD
politique » en ratifiant l’accord de bonne marche des affaires de l’État », « De ce fait, analyse le professeur,
libre-échange du Partenariat trans- entre ses nombreuses sorties publiques il pourrait signer l’accord commercial
PHOTOGRAPHE
pacifique (PTP) en pleine période pour tenter de se faire réélire. [avec les 11 autres pays de la zone
électorale. « En période électorale, soumet-il, on Asie-Pacifique]. »
C’est l’avis du professeur Benoît parle d’un gouvernement d’interven- Rappelons que Stephen Harper n’a
QUÉBEC,
Pelletier, qui enseigne le droit consti- tion minimaliste, qui ne doit faire que pas écarté la possibilité de ratifier
NATIONALE DU
tutionnel à l’Université d’Ottawa. les gestes nécessaires au bon fonction- l’entente (touchant 800 millions de
« Sur des questions de droit, a-t-il nement de l’État. » consommateurs) malgré la dissolu-
expliqué en entrevue à la Terre, on Benoît Pelletier rappelle néanmoins tion du Parlement. C’est ce qu’il a
COLLECTION ASSEMBLÉE
ne peut empêcher le premier ministre que Stephen Harper « demeure premier affirmé le 3 août, alors qu’il était de
de signer l’accord commercial. Mais ministre, tout comme ses ministres passage à Laval.
puisque c’est un sujet sensible [la ges- demeurent ministres », jusqu’à la fin de Les défenseurs de la gestion de
tion de l’offre], il devrait attendre. » la campagne électorale. l’offre restent par ailleurs aux aguets. Benoit Pelletier.PAGE 6 LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015
ÉDITORIAL
Partenariat transpacifique :
un peu de rigueur SVP!
Nouvelle-Zélande à la mouche sur le … cette échéance, il sera trop tard pour que l’accord
de l’éléphant dans cette négociation. soit accepté par le Congrès avant le début de la
MARCEL fièvre provoquée par les élections présidentielles
GROLEAU Dans aucune de mes rencontres avec des américaines de novembre 2016.
Président général de
l’Union des producteurs
organisations de producteurs ou des représentants
agricoles de pays on ne m’a dit que le Canada devrait abolir Heureusement que, dans ce marathon de
la gestion de l’offre, tout comme aucun pays ne négociations, nos ministres et nos gouvernements
demande aux États-Unis de modifier son Farm Bill ont plus de vision que certains analystes
(1 000 G$ de subventions sur 10 ans) ou au Japon économiques et qu’ils comprennent l’importance
Le Partenariat transpacifique (PTP) a fait de libéraliser entièrement son marché du riz. de la gestion de l’offre. L’Europe traverse une
couler beaucoup d’encre ces derniers jours. crise agricole sans précédent et les producteurs
Malheureusement, plusieurs intervenants manquent En fait, le Japon n’aurait à peu près rien offert. Il de lait américains viennent de subir des baisses
de rigueur dans leur analyse. aurait mis sur la table une réduction marginale de de revenus de plus de 30 %. En agriculture, en
ses tarifs sur les importations de bœuf et de porc, raison du grand nombre de producteurs et de
J’étais à Maui la semaine dernière pour suivre mais aucun volume supplémentaire. Pour le riz, il l’imprévisibilité des rendements, l’équilibre du
les négociations. Les 12 pays participants ont aurait proposé un accès supplémentaire équivalant marché entre l’offre et la demande est le fruit du
des réalités économiques, sociales et politiques à 1 % de son marché sur une période de 15 ans. hasard, et cet équilibre, s’il arrive, ne dure jamais.
très différentes. Tout comme ç’a été le cas lors Peut-on vraiment parler d’ouverture de marché? C’est pour cette raison qu’il y a une si grande
des négociations multilatérales de l’Organisation volatilité des prix des produits agricoles sur les
mondiale du commerce, les intérêts divergents des Pour ce qui est du lait, l’objectif des États-Unis marchés mondiaux. La gestion de l’offre est une
pays font en sorte qu’il est très difficile de clore est d’obtenir un effet neutre, car l’industrie laitière solution économique à cette imperfection du
les négociations, chacun ayant reporté à la fin les américaine est contre une ouverture de son marché. Ailleurs, on soutient les prix par des
discussions portant sur les secteurs qui lui sont marché. Les Américains veulent donc obtenir de interventions financières pour pallier la volatilité.
sensibles. certains pays l’équivalent des concessions qu’ils Ce type d’interventions, doit-on le rappeler, n’est
accorderont à d’autres. Peut-on vraiment parler de pas sur la table de négociations du PTP.
La Nouvelle-Zélande fait grand état des accès concessions?
aux marchés laitiers du Japon, des États-Unis La gestion de l’offre permet à une multitude
et du Canada, mais son poids (quatre millions Il y aura reprise des négociations en 2015. Dans d’entreprises agricoles, partout sur le territoire,
de consommateurs) est marginal dans cette les coulisses, à Maui, on parlait de la fin d’août. d’assurer leur pérennité et de contribuer aux
négociation. Ce pays a beau faire du bruit, il n’a Selon le représentant de l’American Farm Bureau économies régionales tout en évitant d’opter pour
pas grand-chose à offrir à ses partenaires. J’ai qui était sur place, la fenêtre propice à une le gigantisme américain. Veut-on vraiment changer
même entendu un commentaire où on comparait la entente se présentera cet automne. Au-delà de une recette gagnante?
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ÉLECTIONS 2o1 5
JiCi Lauzon dans la peau du politicien
PIERRE-YVON BÉGIN Le Parti vert est bien placé pour aider les sur le développement durable à l’Uni-
petits producteurs et réduire la dépen- versité Laval, il dit être sorti « littérale-
Après s’être payé la tête des poli- dance aux pesticides. » ment atterré » d’une conférence sur les
ticiens pendant des années, l’humo- Pas de langue de bois effets dévastateurs des néonicotinoïdes.
riste JiCi Lauzon a décidé de se mettre La langue de bois n’a pas remplacé De même, il est visiblement horrifié
dans leur peau. Il est candidat pour le l’humour dans la bouche du nouveau par l’usage des herbicides en agricul-
Parti vert dans la circonscription agri- politicien. L’homme, indigné depuis ture, rapportant des « histoires assez
cole de Pierre-Boucher–Les Patriotes– la première heure par le projet de port tragiques » sur la culture des bleuets au
Verchères. Aujourd’hui écologiste, il dit méthanier Rabaska à Lévis, dit entrer Nouveau-Brunswick.
soutenir la gestion de l’offre et s’oppose en politique par les « voies maritimes ». « En agriculture, j’ai l’impression
GRACIEUSETÉ PARTI VERT
à l’accord commercial dans la zone Asie- Il rappelle d’ailleurs avoir été « porteur qu’on peut à peine tout dire parce que
Pacifique pour des raisons alimentaires. d’eau » pour la Coalition Eau Secours. c’est inquiétant », affirme-t-il.
« Faut pas que ça passe », martèle- Âgé de 61 ans depuis quelques jours, JiCi accepterait volontiers d’être le
t-il en entrevue téléphonique. Il croit que il dit être en pleine forme et pense le porte-parole des verts en matière agri- JiCi Lauzon s’oppose à l’entente de libre-
ce genre d’accord favorise avant tout le demeurer parce qu’« y a bien des esca- cole. Juste avant le début de la campagne échange du Partenariat transpacifique.
panier le moins cher. Or, dit-il, ce panier liers » à la Chambre des communes. électorale, il a reçu dans sa circonscrip-
est loin d’être écologique. Plus sérieusement, JiCi Lauzon veut tion la chef de son parti, Elizabeth May, écrits de Roméo Bouchard, fondateur de
« Le Parti vert veut une agriculture de devenir député par conviction, car il qui a dévoilé quelques éléments de sa l’Union paysanne.
proximité, explique-t-il. Les fraises de est certain qu’il y a « urgence d’agir » politique agricole. JiCi dit aussi suivre « On est dans une révolution verte et
l’autre bout du monde, faut arrêter ça. en environnement « bien avant autre une formation accélérée en agricul- il y a une économie verte qui pointe à
On veut encourager les marchés publics. chose ». Inscrit récemment à un cours ture, notamment en s’appuyant sur les l’horizon », prédit-il.PAGE 8 LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015
PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE
La gestion de l’offre l’a échappé belle
Selon The Globe and Mail, un haut de l’accord, parmi lesquels on note un
fonctionnaire du gouvernement Harper différend entre le Canada et les États-
JULIE MERCIER aurait pressé un représentant de l’in- Unis concernant le commerce automo-
jumercier@laterre.ca dustrie manufacturière d’insister sur bile. Ce point serait particulièrement
son appui au PTP dans les médias afin problématique.
Des sources confirment que le gou- d’enterrer les critiques des producteurs Les ministres du Commerce pour-
vernement canadien a mis la gestion de laitiers, groupe qui pourrait être très raient se réunir de nouveau en sep-
l’offre sur la table du Partenariat trans- déçu de l’accord à venir. tembre en marge d’un sommet des
pacifique (PTP). Pour bientôt Nations unies à New York. L’idée d’une
Dans une lettre d’opinion, Lawrence À la clôture de la dernière ronde de ronde de négociations en octobre, qui se
Herman, un avocat spécialisé en com- négociations, le 31 juillet, le secré- tiendrait parallèlement à une rencontre
merce international, révèle que les taire américain du Commerce, Michael des membres de la Coopération écono-
conservateurs ont offert des contingents Froman, a indiqué qu’un accord était mique pour l’Asie-Pacifique (APEC),
d’importations de produits laitiers aux à portée de main. Le 4 août, le secré- circule également. Le temps presse pour
MAECD
pays membres du PTP. Bien que l’ac- taire d’État, John Kerry, a répété que les États-Unis : Barack Obama souhaite
cord n’ait pas été conclu, l’offre du les 12 pays membres du PTP étaient signer le PTP au plus tard cet automne, Des sources confirment que le ministre du
Commerce, Ed Fast, a offert des contin-
Canada crée maintenant un précédent, tout près d’une entente. Plusieurs élé- avant le début des primaires des élec- gents d’importations de produits laitiers
estime M. Herman. ments auraient empêché la conclusion tions américaines. aux pays membres du PTP.
Les producteurs L’incertitude gagne les producteurs
en campagne L’échec de la dernière ronde de
négociations du Partenariat transpa-
ainsi que leurs partenaires continueront
aussi de marteler qu’ils sont pour un
lement dans le doute quant à l’issue du
PTP. « Nous continuerons à travailler
cifique (PTP) suscite des réactions PTP sans concession d’accès au mar- de façon constructive afin d’obtenir
opposées à l’intérieur du secteur agri- ché et assorti d’une gestion de l’offre un “chapitre laitier” qui amène des
cole canadien. Toutefois, les diffé- intégralement préservée. résultats équivalents entre les occa-
rentes organisations s’entendent sur L’Alliance canadienne du commerce sions d’exportation et une plus grande
un point : l’incertitude que l’éventuel agroalimentaire (ACCA) est déçue de ouverture du marché américain aux
accord laisse planer sur toute la filière l’échec des pourparlers. « Nous espé- importations », a averti le chef de la
ARCHIVES/TCN
agroalimentaire du pays. rons que tous les chefs politiques réa- direction de l’organisme, Jim Mulhern.
La Fédération canadienne de l’agri- liseront l’importance d’une conclusion Un pavé dans la mare (Saputo)
Le président des Producteurs de lait du culture a dénoncé cette incertitude, rapide des négociations du PTP pour En plein débat concernant le PTP
Québec (PLQ), Bruno Letendre. qui touche l’ensemble des agricul- assurer la croissance et la compétiti- et ses possibles effets néfastes sur la
teurs canadiens. Ceux qui produisent vité de notre agriculture et de l’agro- gestion de l’offre, le transformateur
En attendant la prochaine rencontre des denrées destinées majoritairement alimentaire », a déclaré son président, Saputo ne compte pas défendre le sys-
des ministres du Commerce des 12 pays aux marchés d’exportation font face à Brian Innes. Cette coalition regroupe tème en place en production laitière,
membres du Partenariat transpacifique de l’iniquité due à des écarts dans les les producteurs, les transformateurs, a déclaré son chef de la direction à
(PTP), les producteurs sous gestion de règles et le traitement de nos concur- les négociants et les exportateurs de La Presse Canadienne. Lino Saputo
l’offre n’entendent pas baisser la garde. rents, a souligné l’organisation. Dans bœuf, de porc, de sucre, de grains et Jr. a reconnu que son entreprise avait
« On va continuer à maintenir la pres- les secteurs sous gestion de l’offre, les de malt. Ensemble, ces secteurs repré- profité de la gestion de l’offre, mais
sion durant la campagne électorale. Il ne producteurs ont des doutes quant aux sentent près de 80 % des exportations qu’une ouverture des marchés pour-
faut pas abandonner », affirme le pré- décisions commerciales à prendre à la agroalimentaires du Canada, réalisent rait lui bénéficier. Il a de plus admis
sident des Producteurs de lait du Québec ferme, a-t-elle ajouté. Les représen- des transactions totalisant 50 G$ par que les quotas d’importation accordés
(PLQ), Bruno Letendre. Il promet des tants de la Coalition GO5 comptent année et emploient directement près à l’Union européenne causeront des
actions au cours des prochaines semaines d’ailleurs profiter de la campagne élec- de 500 000 Canadiens. dommages à toute l’industrie froma-
et invite les éleveurs à interroger les can- torale pour rappeler ses engagements Chez nos voisins gère canadienne. J.M.
didats de leur comté afin de prendre la au gouvernement du Canada. Les pro- Aux États-Unis, la Fédération natio-
meilleure décision pour la gestion de ducteurs de lait, d’œufs et de volailles nale des producteurs de lait nage éga-
l’offre le jour du scrutin. Maintenant que
le Parlement a été dissous, M. Letendre
met en doute la légitimité du retour des
conservateurs à la table de négociations De mauvais Harper voulait absolument signer
l’entente », soutient Pierre Girard,
conservateurs ont perdu ma confiance
lors de l’accord avec l’Europe.
augure
du PTP. Le dirigeant met aussi les gens producteur laitier du Saguenay–Lac- Attaquer le système par en dessous,
en garde contre les propos véhiculés par Saint-Jean. À son avis, la suite des c’est pire que l’éliminer, affirme-t-il.
certains médias anglophones, propos sui- pourparlers ne laisse présager rien de Je ne dis pas aux gens pour qui voter,
vant lesquels le gouvernement canadien La crainte des producteurs sous ges- bon. Si le Canada a accordé l’équiva- mais je vais donner mon x à la per-
aurait été à un cheveu de sacrifier la ges- tion de l’offre demeure entière quant lent de 2 % de son marché à l’Union sonne qui va le mieux protéger la ges-
tion de l’offre. « Je n’étais pas à la table aux négociations du Partenariat trans- européenne, combien donnera-t-il aux tion de l’offre. » Pour Pierre Girard, il
de négociations, et eux non plus », dit-il pacifique (PTP). « On a été sauvés États-Unis et aux autres membres du est temps que les producteurs passent
en terminant. J.M. par les autres pays, parce que Stephen PTP? se demande l’agriculteur. « Les à des actions plus musclées. J.M.LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015 PAGE 9
« Récoltez votre blé d’automne! »
PHOTOS : MARTIN MÉNARD/TCN
Marc Durivage à la ferme EDPA Durivage. Tous les travaux se font en même temps : la récolte du blé et le pressage de la paille.
MARTIN MÉNARD pluie, l’humidité fera germer le grain, À Saint-Édouard, les frères Marc est correct. « Les producteurs du
et l’indice de chute passera sous le et Raymond Durivage sont en pleine Québec ont vraiment amélioré leur effi-
Les moissonneuses-batteuses seuil des 250 secondes. Pour le bou- récolte. Trois moissonneuses tra- cacité en ce qui concerne les céréales
démarrent dans différentes régions langer qui l’utilisera, cela suscitera vaillent simultanément afin de terminer d’automne. Cette filière se développe
du Québec afin de prendre d’assaut des problèmes de levée [de la pâte] les 240 hectares de blé. « Je suis satis- très bien et a encore beaucoup de poten-
les champs de blé. La récolte s’an- et de coloration du pain. C’est très fait. Nous avons des zones de 7 tonnes tiel, notamment en Beauce et dans les
nonce particulièrement productive. problématique », commente Rudy à l’hectare et d’autres un peu moins Bois-Francs, où les sols et la couverture
Cependant, au moment d’écrire ces Laixhay, qui effectue le suivi sur plus bonnes de 3,5 tonnes; ça donne une de neige se révèlent très propices aux
lignes, pour plusieurs champs, on de 3 500 hectares de blé d’automne moyenne correcte. Mais c’est la maladie céréales d’automne », note M. Laixhay.
recommandait de moissonner avant la pour les Moulins de Soulanges. qui nous inquiète. Il a plu beaucoup », Chez Semican, une entreprise de
prochaine pluie, autrement la baisse Les récoltes du blé semé à l’automne mentionne Marc. Étonnamment, ce sont semences spécialisée dans les céréales,
de la qualité du grain allait pouvoir affichent un retard d’une dizaine des champs semés à la volée et non au Luc Julien remarque que le seigle et
miner la rentabilité du blé destiné à la de jours, évalue M. Laixhay. En semoir qui ont le mieux résisté au gel le blé d’automne ont le vent dans les
consommation humaine. Montérégie et dans Lanaudière, environ mortel. Les producteurs évaluent tout voiles. « Le nombre d’hectares s’ac-
« Dans Lanaudière, en Montérégie 20 % des superficies seulement seraient de même à 40 % les pertes de la culture croît chaque année. Nous estimons
et dans une partie de l’Estrie, de nom- récoltées (en date du 7 août). Par contre, de blé associées au gel. que, dans trois ans, les superficies
breux champs sont arrivés à maturité. les rendements sont impressionnants, Par ailleurs, on rapporte très peu de ensemencées en céréales d’automne
Et si le blé d’automne est encore au avec une moyenne de cinq tonnes à lots déclassés : le taux moyen de pro- auront crû de 45 %. C’est très signifi-
champ au moment de la prochaine l’hectare. téines est de 11 % et l’indice de chute catif », juge M. Julien.PAGE 10 LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015
MAIN-D’ŒUVRE
La réforme de l’assurance-emploi
fait mal
YVON LAPRADE Le ministre Ritz
À la mi-juillet, peu avant le déclen-
Alors que s’amorce la campagne chement des élections par le pre-
électorale, l’industrie horticole se mier ministre Stephen Harper, Luce
questionne sérieusement sur le bien- Daigneault a fait brièvement part de
fondé de la réforme de l’assurance- cet enjeu au ministre fédéral de l’Agri-
emploi, qui continue de pénaliser à la culture, Gerry Ritz, lors du meeting
fois les travailleurs saisonniers et les d’été de la Fédération canadienne de
employeurs. l’agriculture (FCA), à Charlottetown.
« Il serait grand temps de valoriser « J’ai voulu le sensibiliser à cet
le travail saisonnier dans notre secteur enjeu, dit-elle. Je crois même, à sa
d’activités », plaide Luce Daigneault, réaction, qu’il en est conscient et qu’il
directrice générale de la Fédération croit possible de trouver une piste de
interdisciplinaire d’horticulture orne- solution. Ce que nous demandons,
ARCHIVES/TCN
mentale du Québec (FIHOQ). c’est qu’on reconnaisse notre statut
« Il faudrait qu’on reconnaisse la d’employeurs saisonniers et qu’on
contribution de cette main-d’œuvre et ne pénalise pas nos travailleurs parce Luce Daigneault, directrice générale de la FIHOQ.
qu’on tienne compte de nos besoins », qu’ils sont à l’emploi d’entreprises
ajoute-t-elle, en entrevue à la Terre. saisonnières. » Luce Daigneault fait valoir que les Elle déplore que le gouvernement
nouvelles règles du jeu – la très contes- fédéral semble considérer cette main-
tée réforme de l’assurance-emploi est d’œuvre besogneuse et qualifiée comme
en vigueur depuis janvier 2013 – ne « des travailleurs de seconde zone ».
touchent pas seulement le Québec. « Ce n’est pas de cette façon qu’on
« En Ontario, constate-t-elle, les les encouragera à rester dans le domaine
entreprises d’horticulture ornemen- qu’ils ont choisi et pour lequel ils ont
tale sont devant la même réalité. On été formés, résume-t-elle. Cela crée un
fait tous face à un problème de main- climat de grande incertitude et ça envoie
d’œuvre, et la pression sur les tra- des messages négatifs, qui peuvent
vailleurs saisonniers ne fait rien pour décourager ceux et celles qui souhaitent
améliorer les choses. » travailler dans notre industrie. »
Des entreprises qui vendent Sur le terrain, Martine Matteau voit
De son côté, Martine Matteau, des employeurs inquiets. « Certaines
directrice d’HortiCompétences, le des entreprises que je connais ont
comité sectoriel de main-d’œuvre décidé de vendre parce qu’il y avait trop
en horticulture ornementale à Saint- d’insécurité liée à la problématique de
Hyacinthe, plaide elle aussi la cause l’assurance-emploi, a-t-elle observé.
des travailleurs saisonniers et de leurs Elles ne trouvaient pas d’employés. »
employeurs.LA TERRE DE CHEZ NOUS, 12 août 2015 PAGE 11
MAIN-D’ŒUVRE
Des solutions proposées
YVON LAPRADE
Avec sa réforme de l’assurance-
emploi, le gouvernement Harper a L’HORTICULTURE
défini trois types de prestataires. Dans
le secteur horticole, les travailleurs sai-
ORNEMENTALE
sonniers entrent dans la catégorie des
prestataires fréquents.
Cette réforme, selon l’interprétation
de l’industrie, a pour conséquence de Au Canada,
pousser les travailleurs saisonniers vers une industrie de
BARRÉ
des emplois dits permanents. 14,5 G$
CAROLINE
Résultat : des employés expérimentés
font souvent des choix contre leur gré. Martine Matteau, directrice d’HortiCompétences.
Au Québec,
une industrie de
Ils quittent le métier ou ils démarrent
leur propre entreprise. Ceux qui restent avec son employeur principal », « Les entreprises pourraient ainsi 3,5 G$
doivent faire preuve d’imagination pour exprime Martine Matteau. continuer de profiter de son expé-
La FIHOQ
ne pas se faire enlever leurs prestations Ainsi, le travailleur qui trouve un rience, de sa formation et de sa com-
représente
d’assurance-emploi. emploi dans un autre secteur d’activité, pétence, et il pourrait poursuivre sa
Martine Matteau, directrice d’Hor- alors qu’il est temporairement mis à carrière dans le domaine choisi, où 6 000 entreprises
tiCompétences, reconnaît que la com- pied, pourrait retourner, sans pénalité, il a déjà de l’expertise », analyse (source : Statistique Canada 2007)
préhension des nouvelles directives à son emploi saisonnier d’origine. Martine Matteau.
gouvernementales est particulièrement
complexe.
En février 2013, la ministre
des Ressources humaines et du
Développement des compétences,
Diane Finley, qui tentait de justifier le
bien-fondé de la réforme de son chef
conservateur, avait déclaré que « les
changements apportés servent à pré-
ciser les responsabilités des chômeurs
qui reçoivent de l’assurance-emploi ».
Or la directrice d’HortiCompé-
tences admet avoir du mal à com-
prendre le raisonnement derrière cette
réforme. « C’est comme si on disait
qu’un emploi saisonnier, ce n’est pas
une vraie job », résume-t-elle.
Maintien du lien d’emploi
Elle se trouve où, la solution?
« On demande le maintien du lien
d’emploi (du travailleur saisonnier)
ARCHIVES/TCN
Pas toujours facile de recruter de la main-
d’œuvre dans les jardineries.Vous pouvez aussi lire