MARINS LES ÉCOSYSTÈMES - LES CORAUX BATISSEURS DE RÉCIFS - Oceanopolis
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DIRECTRICE DE LA PUBLICATION Céline Liret Directrice scientifique Océanopolis AUTEURS Janique Etienne Lionel Feuillassier Catherine Gabrié Marine Le Moal Céline Liret Anne Rognant COORDINATION ÉDITORIALE Janique Etienne Chargée de projets Gestion du littoral et Haute mer Secrétariat du FFEM Céline Liret Conception graphique Directrice scientifique Rodhamine Océanopolis Illustrations REMERCIEMENTS Céline Bricard Denis Allemand pp. 2, 10, 30, 44 Carole Antoine Alain Barrere Impression Dominique Barthelemy Media Graphic Noëlinaud Robert Djerryh Pascale Joannot Réference pour citation Sandrine Job FFEM et Océanopolis (2021) Richard Krebs – Les écosystèmes marins – Les coraux, bâtisseurs de récifs. Sylvain Lenoir Fonds Français pour l’Environnement Barbara Mathevon Mondial, Paris et Océanopolis, Brest Céline Miternique Agathe pp. 72 Madi Bamdou Mouchitadi Jean-Pascal Quod Utilisation possible Jérôme Suros des informations et des photos, Clodio Travouck sous réserve de la mention : © Océanopolis / FFEM Utilisation possible des illustrations et des schémas dans un cadre pédagogique (non commercial), sous réserve de la mention : Schémas : © Rodhamine Illustrations : © Cécile Bricard Modification non autorisée 4 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
7 Préambule SOMMAIRE 9 Introduction CHAPITRE 1 — ÉTAT DES CONNAISSANCES 12 Une histoire scientifique 14 Corail et phylogénie 16 Une mémoire calcaire 18 Le symbiocosme 20 La reproduction des coraux 22 Un espace, des espèces 24 Vivre ensemble 26 Une mosaïque vitale 28 Un récif, des ressources CHAPITRE 2 — PRESSIONS ET MENACES 32 Des récifs en sursis 33 Le réchauffement climatique 34 L’acidification de l’océan 35 Les événements extrêmes 36 La surpêche 38 Les EEE… Espèces Exotiques Envahissantes 39 L’étoile de mer épineuse, un prédateur 40 Les activités récréatives 40 Les aménagements terrestres 41 Du macro au microplastique 42 Les apports polluants et eutrophisants 43 Parmi les cosmétiques, les crèmes solaires CHAPITRE 3 — ACTION ! 46 La résilience de l’écosystème corallien 48 Des compétences dédiées aux récifs coralliens 49 La recherche et l’enseignement supérieur 50 L’animation communautaire 52 La gestion de projets 54 L’écotourisme 56 La formation 58 La gestion d’espaces protégés 60 la sensibilisation et l’éducation 62 Le suivi et la surveillance 65 Nous pouvons protéger les récifs ! 66 Bibliographie 68 Crédits 5 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
PRÉAMBULE Donec ante velit, laoreet eu egestas vitae, pellentesque quis metus. Fusce sollicitudin D condimentum mauris et hendrerit. Mauris at dapibus sapien. Suspendisse feugiat condimentum diam at blandit. Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing adipiscing mollis. Donec elementum, erat ultrices elit. Nulla vel velit a sem accumsan lobortis. Lorem tincidunt tempus, quam mauris cursus nisi, in aliquam ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. turpis urna vel nibh. Suspendisse vitae ante lorem. Integer scelerisque luctus luctus. Vivamus hendrerit Donec fermentum sollicitudin elit, ac pretium nulla risus congue ipsum porta in luctus tellus interdum. ultrices vel. Fusce nulla leo, condimentum ac blandit Pellentesque cursus luctus tristique. Duis dignissim quis, sagittis sit amet nunc. In ut molestie nulla. risus sit amet elit adipiscing cursus. In faucibus dapibus tempor. Lorem ipsum dolor sit amet, Donec at odio purus. 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Ut orci lacus, semper laoreet lacus euismod. Class aptent taciti sociosqu ad litora interdum sit amet, mollis vel dui. Duis tincidunt torquent per conubia nostra, per inceptos himenaeos. 7 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
INTRODUCTION Janique Etienne & Céline Liret L Les récifs coralliens figurent parmi les écosystèmes les plus diversifiés de la planète et hébergent plus de 25% de la vie marine mondiale. Environ 4 000 espèces de poissons et 800 espèces de coraux constructeurs de récifs ont été décrites à ce jour. Véritables réservoirs de biodiversité marine, les récifs coralliens affichent une production annuelle de biomasse égale, voire deux fois supérieure à celle des forêts tropicales les plus productives. Protection des côtes, sécurité alimentaire, tourisme, régulation du climat… Les services fournis par les récifs et écosystèmes associés sont vitaux pour certaines populations des régions tropicales. La dynamique naturelle des récifs coralliens est étroitement liée aux conditions environnementales, qui sont influencées par les pressions anthropiques « des actions visant à protéger, gérer de manière durable et restaurer des écosystèmes naturels ou modifiés pour relever directement les défis de société de manière efficace et adaptative, tout en produisant des bénéfices pour la biodiversité ». La survie des récifs coralliens nécessite de réduire les pressions anthropiques, de protéger ces écosystèmes en multipliant les aires marines protégées avec des zones de protection forte plus étendues, de renforcer les réseaux de suivi des récifs, de développer l’acquisition des connaissances et de favoriser une bonne appropriation des enjeux en mobilisant tous les acteurs et en éduquant les citoyens. Pour être à la hauteur de ces enjeux, il n’est plus possible que seules les politiques publiques mettent en œuvre ces activités. Une mobilisation (pollutions, pêche, aménagements), les événements globale, incluant les citoyens dans leurs pratiques extrêmes (hausse de la température, cyclones, au quotidien, fera la différence. Il est indispensable fortes houles) et les perturbations biologiques aujourd’hui que les générations futures se mobilisent (espèces exotiques envahissantes, infestations, et acquièrent les compétences nécessaires à la mise maladies). Près d’un tiers des récifs sont actuellement en œuvre des actions permettant la survie de ces menacés, en particulier par le changement écosystèmes essentiels. Cet ouvrage est destiné climatique (réchauffement des eaux ; acidification)*. aux Organisations Non Gouvernementales qui Une grande partie des récifs va subir un recul notable agissent quotidiennement sur le terrain, aux étudiants de leur couverture et connaître des extinctions et jeunes professionnels, aux gestionnaires d’espaces significatives localement, aboutissant globalement protégés, aux enseignants des territoires impliqués à un déclin pouvant atteindre plus de 90% et aux collectivités. Il fait un état des connaissances si le réchauffement climatique dépasse les 2°C actuelles sur les coraux bâtisseurs de récifs et en 2100 ! Les récifs construits par les coraux restants traite des menaces et des pressions dont ils font devraient être différents par leur composition l’objet. La dernière partie met en avant les métiers et leur diversité. Cette situation compromettra et les compétences nécessaires pour la survie fortement les services qu’ils procurent aux sociétés et la sauvegarde des récifs coralliens. Loin d’être humaines avec des risques accrus sur la sécurité exhaustifs, ils pourront être une source d’inspiration alimentaire liée aux ressources halieutiques. pour les étudiants et jeunes professionnels. Face aux défis à relever, de nouveaux métiers pourront La crise écologique actuelle marquée par une émerger des compétences et expertises existantes ; importante dégradation des écosystèmes dans les générations futures devront faire preuve un contexte de changement global nécessite d’agilité pour accompagner ces évolutions. une protection plus forte et plus durable des récifs coralliens, hauts lieux de la biodiversité marine En espérant que cet ouvrage, qui s’inscrit dans mondiale. Devant les pressions et menaces auxquelles le cadre de la Décennie des Nations Unies pour ils sont confrontés, il s’avère essentiel de limiter les sciences océaniques au service du développement les impacts anthropiques directs et indirects afin durable (2021-2030), inspire les générations d’accroître la résilience de ces écosystèmes. Maintenus futures et leur donne envie de s’impliquer dans en bon état écologique, les écosystèmes coralliens la connaissance et la préservation des récifs coralliens ! constituent des solutions naturelles pour lutter contre les effets du changement climatique. L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature *Les rapports internationaux de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES, 2019) (UICN) met en avant les solutions fondées sur la nature et du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat pour relever les défis globaux, les définissant comme (GIEC, 2019) dressent un tableau plutôt sombre de l’avenir des coraux. 9 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
CHAPITRE 1 État des connaissances 11 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Une histoire 77 AP. J.-C. scientifique Le Traité d’Histoire naturelle (Livre II) de Pline l’Ancien (23-79 ap. J.-C.) révèle que le corail a la forme « d’un arbrisseau » pourvu de « baies (…) blanches et molles sous l’eau et qui devinrent dures et rouges en dehors ». Dès cette époque, le corail Si le corail est décrit dès l’Antiquité est cité pour ses nombreuses vertus médicinales. en revanche, sa véritable nature a longtemps été sujette à débats entre les D’après Pline l’Ancien, le mot « corail » dérive naturalistes. Persuadés de leurs propres du grec , la tonte. Ce mot fait référence à la collecte du corail : « on dit qu’il suffit de le toucher expériences, ces érudits étaient surtout pendant qu’il est encore vivant pour le pétrifier, et que pour cette raison on cherche à le prévenir, partagés entre la nature minérale l’arrachant avec un filet ou le coupant avec et l’origine végétale du corail. un fer bien aiguisé : c’est cette espèce de tonte qui lui a fait, ajoute-t-on, donner le nom de corail. » 77 PLINE L’ANCIEN, HISTORIA NATURALIS, 77 AP. J.-C. Ainsi, le corail fut tour à tour assimilé aux pierres sanguines (hématites), aux agates, aux particules rocheuses, aux pierres arborescentes tandis que d’autres s’attachaient à le décrire comme une plante pétrifiée, une plante pierreuse, une plante de la mer ou une plante de corail voire même un insecte semblable à une petite ortie, au pourpre, avec l’épanouissement de fleurs étoilées. -310 « Et l’Hématite ou Pierre sanguine qui est d’une texture dense et solide (…) comme si elle était formée de sang caillé. (…) Le corail par Nunc quoque curaliis eadem natura remansit, Duritiam tacto capiant ut ab aere, quodque Uimen in aequore erat, fiat super aequora saxum. 16 sa substance approche celle des pierres sanguines ; Maintenant encore les coraux présentent la couleur rouge et la forme cylindrique semblable la même propriété : ils n’acquièrent leur dureté (…) à une racine. Il croit dans la mer ». qu’au contact de l’air, et leur tige souple dans THÉOPHRASTE, DE LAPIDIBUS, ≈ 310 AV. J.-C. la mer devient de la pierre quand elle en sort. OVIDE, PERSÉE ET ANDROMÈDE, MÉTAMORPHOSE DES CORAUX, 1-17 AP. J.-C. 310 AV. J.-C. Le Traité des pierres du philosophe et botaniste 16 AP. J.-C. Théophraste (372-288 av. J.-C. - disciple et successeur d’Aristote) est le premier recueil à dépeindre la Le poète latin Ovide (43 av. J.-C. – 18 ap. J.-C.) décrit nature du corail. Dès cette époque, il est acquis la formation du corail dans Métamorphoses – Origine que le corail semble évoluer comme un être vivant. du Corail (années 1 à 17 ap. J.-C.). Selon la mythologie Cependant le dualisme entre sa dureté pierreuse grecque, Persée trancha la tête de la gorgone Méduse, et son apparence végétale va jeter le trouble parmi capable de transformer ses observateurs et pour plusieurs siècles. ses ennemis en pierre d’un simple regard. En déposant la tête de Méduse sur des algues, le regard de la terrible Méduse pétrifia les végétaux Rapporté par les pêcheurs, le corail rouge marins qui devinrent du de Méditerranée, Corallium rubrum, corail. Ainsi, le corail serait était la principale espèce étudiée. une branche flexible sous les eaux mais dure dans l’air. 12 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Défini par Ehrenberg en 1833, les Anthozoaires désignent les « animaux en forme de fleurs ». 1518 LE CORAIL, UN ANIMAL ? L’appartenance au règne animal du corail est XII E envisagée pour la première fois par Dodoens dès 1518. D’autres naturalistes suggèreront cette origine. Cependant, en 1585 le chevalier J.-B. de Nicolaï décrivit le corail comme une « branche aussi dure dans l’air que dans l’eau, HERBIER MÉDIEVAL entourée d’une écorce molle et capable de RÉPERTORIANT LE CORAIL PARMI rendre une liqueur laiteuse » comparable selon LES PLANTES MÉDICINALES O. de la Poitier (1613), « au lait du figuier ». « Le corail est chaud et sec au second degré. C’est une sorte de substance terreuse que l’on En 1674, P. Boccone comparera les polypes coralliens à des insectes. Mais ses 1674 trouve dans les régions… et plus précisément dans les montagnes caverneuses qui sont observations furent remises en question en la mer. Le corail croît comme une sorte par les expériences de Marsigli (1706) qui d’humeur gluante, qui adhère aux rochers. Par consistaient à déposer, dans un vase rempli la chaleur de la mer, elle sèche et se transforme d’eau de mer, des branches justes récoltées en une substance semblable à la pierre ». de corail rouge. Il y observa le déploiement EXTRAIT DU LIVRE DES SIMPLES MÉDECINES (XII E SIÈCLE) des polypes qualifiés de « fleurs de corail ». Quand M. Peyssonnel, fondé sur les résultats Chymiques que lui avoient donné les prétendues fleurs du Corail s’avisa de dire que cette substance appartenoit au régne animal, & n’étoit rien autre chose que des logements d’insectes : on regarda la découverte de l’habile Physicien comme fort hasardée, & aux yeux de bien des gens rien ne parut plus bizarre qu’une opinion qui renversoit les notions reçues sur le Corail. De vrais Savans penserent autrement; ils ajouterent des expériences nouvelles aux expériences de M. Peyssonnel, & il a résulté de « Ce fut un effet ces recherches, que ce dernier avoit très-bien vu, du hazard, que la découverte de ces qu’en un mot il falloit nécessairement considérer 1766 fleurs du corail ». le Corail comme une pépiniere d’insectes & les Expérience de Marsigli prétendues fleurs de cette substance comme les (1706-1707) animaux qui formoient & habitoient cette demeure. LETTRE DE M. DE ROME DELISLE À M. BERTRAND, J.-A. Peyssonnel (1694-1759), évoque à nouveau SUR LES POLYPES D’EAU DOUCE (JOURNAL DES SÇAVANS, ART. III, OCTOBRE 1766) la thèse animale en se fondant sur les écrits anciens et sur les résultats de ses propres expériences. Il suggéra dès 1724 l’idée de coquillages et proposa de les classer parmi les Animalcules en 1726. Sa proposition fut TRAITÉ DU CORAIL, PEYSSONNEL 1744 vivement contestée dès 1727 par les membres influant « Ayant mis le vase plein d’eau où le vase était, de l’Académie des Sciences dont Jussieu, Guettard près du feu, tous ces petits insectes s’épanouirent. et Réaumur. Il faudra attendre seulement 1742 Je poussai le feu et je fis bouillir l’eau, et je les conservai épanouis hors du corail ». avant que son appartenance au règne animal ne soit clairement acceptée par la communauté scientifique. 13 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Corail et phylogénie LE CORAIL DE LA VIE Afin d’appuyer sa théorie sur l’évolution des espèces, Charles Darwin publie en 1859 L’origine des espèces qui sera assorti d’un dessin, de 1837, à l’allure d’un arbre ramifié. Le degré d’apparentement des espèces est représenté par les ramifications et les branches. Longtemps considérée comme l’arbre de la vie, certains auteurs soulignent que cette configuration rappelle davantage l’organisation corallienne. Darwin lui-même évoquera cette idée « The tree of life should perhaps be called the coral of life ». La représentation contemporaine en 3D du buisson phylogénétique s’apparente plus à la ramification du corail. Les parties anciennes et mortes du corail constituent la base des espèces actuelles. À partir des ramifications se formeront de nouvelles lignées d’espèces issues de mutations tandis que d’autres disparaîtront. Les coraux fossiles les plus anciens remonteraient entre 600 et 700 millions d’années. Aujourd‘hui près de 10 000 espèces sont répertoriées parmi les Cnidaires. CLASSIFICATION DES CNIDAIRES D’APRÈS OU ET AL., 2017 Formes fossiles Coraux constructeurs Hexacoralliaires Anémones de mer de récifs (Scléractiniaires) Cnidaires Anthozoaires Octocoralliaires Corail rouge Gorgones Hydrozoaires Corail de feu Physalie Obelia Méduzoaires Cubozoaires Chironex Embranchement Sous-embranchement Scyphozoaires Aurelia Classe Staurozoaires Lucernaire Sous-classe 14 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
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Une mémoire calcaire Derrière le mot « corail » se cache un animal ressemblant Lobophytum sp. Corail mou à une petite anémone de mer et appelé le polype. IL EXISTE 2 CATÉGORIES DE POLYPES Les polypes capables de bio-calcifier Les polypes capables un exosquelette calcaire pour les coraux durs de synthétiser (constitués de calcite ou d’aragonite) uniquement des aiguilles calcaires (les sclérites ou les 1 spicules) soutenant le tissu pour les coraux mous. 2 Acropora sp. Corail dur Tentacules et cnidocytes Le mot « polype » dérive du latin polypus ou du grec polýpous / polýpodos, signifiant en zoologie « de nombreux pieds ». Ectoderme Endoderme Pharynx LA CROISSANCE CORALLIENNE Soutenue par l’activité photosynthétique Cavité gastrique Squelette des zooxanthelles, la vitesse de Cœlenteron calcification des Scléractiniaires (endosynthèse) est 4 à 5 fois plus rapide en présence de lumière qu’à l’obscurité. Cœnosarque La croissance corallienne varie en fonction des conditions environnementales mais aussi de l’espèce. Ainsi, certains coraux branchus peuvent croître de quelques dizaines de centimètres de haut par an tandis que les coraux en boule (massifs) LA CALCIFICATION grandiront d’à peine 1 cm de diamètre La calcification définit la capacité du corail dans l’année. Cependant, soumis à à synthétiser un squelette calcaire. l’érosion et à la pression de la faune Les Scléractiniaires figurent parmi les organismes associée (bactéries, virus, éponges, champignons, etc), la croissance du récif reste faible (10 mm par an maximum). Ainsi, le récif de Moorea en Polynésie 300 000 Les analyses réalisées par les calcifiants ayant un taux de calcification de 2 à 6 kg de carbonate de calcium.m-2.an-1. À l’échelle de la planète, les récifs coralliens française cumulerait jusqu’à 80 m de scientifiques sur le récif de Moruroa, précipiteraient plus d’1 Gigatonne de CaCO3.an-1. corail accumulé soit 8 000 ans d’Histoire… atoll de l’archipel des Tuamotu, Cette minéralisation d’origine biologique en Polynésie française, ont permis (biominéralisation) est très sensible aux de dater avec précision les fossiles conditions environnantes. Des carottages coralliens. Situés 140 m en dessous effectués dans les patates coralliennes de la surface actuelle de l’océan, permettent aux paléoclimatologues de ces récifs vieux de 300 000 ans comprendre les évolutions climatiques du passé (dernière glaciation) pourraient et de suivre les variations du niveau de l’océan. indiquer un niveau de l’océan bien plus faible que le niveau actuel. D’APRÈS CAMOIN ET AL., 2001 17 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Le symbiocosme En 1882, les « corps jaunes » et les L’association symbiotique entre le corail et l’algue unicellulaire est perceptible chez les formes fossiles « corps verts » observés dans les tissus dès l’ère Primaire. Un tel caractère adaptatif apparu il y d’organismes marins sont d’abord a 400 millions d’années est certainement responsable du succès évolutif des coraux et de l’apparition des considérés comme des « algues parasites ». formes actuelles 200 millions d’années plus tard. L’année suivante, l’importance nutritionnelle du « phytozoon » hébergé Le symbiocosme désigne une nouvelle entité biologique créée par la symbiose. dans les tissus animaux est établie. Comme pour le polypier, cette désignation est aussi employée pour les insectes. Zooxanthelle ZOOXANTHELLES Ions minéraux Complément Les microalgues symbiotiques Abri, protection de nouriture sont communément appelées CO2 SYMBIOSE Favorise la formation des zooxanthelles (zōon : animal du squelette calcaire et du grec ksanthos : jaune). Leur O2 diamètre peut varier de 6 µm à plus de 15 µm. Aussi appelées « symbiontes », ces algues unicellulaires sont capables de couvrir de 70 à 90% voire Polype 99% des besoins énergétiques des cellules coralliennes. Cnidocyte Zooxanthelle L’abondance est estimée entre 1 et 10.106 zooxanthelles.cm-2 de tissu animal. Les algues unicellulaires sont surtout localisées dans les tissus couvrant les parties les plus externes et les plus exposées à la lumière. 18 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
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La reproduction des coraux 1 à 4h après la tombée de la nuit Dispersion larvaire 2 à 5 nuits après la pleine lune en surface et sur de longues distances 3 4 FÉCONDATION EXTERNE EMBRYOGÉNÈSE 5 PHASE PÉLAGIQUE DÉVELOPPEMENT 2 LARVAIRE PONTE Larve en recherche d’un site de fixation Cellule-œuf Larve ciliée 1h après la ponte (planula) Oocytes 24h après la fécondation Spermatozoïdes 6 Larve en forme RECRUTEMENT de poire (piriforme). La larve perd ses cils vibratiles et se pose sur PHASE BENTHIQUE le sédiment. Fixation Fécondation interne Coraux REPRODUCTION Coraux émetteurs SEXUÉE incubateurs Métamorphose en un premier polype, ouverture de la bouche, 1 déploiement des tentacules FORMATION DES CELLULES Polype primaire REPRODUCTRICES Calcification MÂLES ET FEMELLES Polypes secondaires (colonie adulte) (jeune colonie) des espèces Fragmentation coralliennes réalisent une fécondation Bourgeonnement 7 externe. REPRODUCTION ASEXUÉE DÉVELOPPEMENT DE LA COLONIE 75% des espèces de Scléractiniaires sont hermaphrodites. CYCLE DE DÉVELOPPEMENT DU CORAIL L’hermaphrodisme est favorable à la stabilité des petites Pour les coraux incubateurs, la fécondation Bénéficiant des nutriments issus de la populations de corail. et l’embryogénèse sont internes. photosynthèse des microalgues (glucides, Elles se déroulent dans la cavité gastro- acides aminés, etc), ces larves peuvent rester vasculaire du polype. Les larves incubées plus longtemps au stade planctonique et ont un développement embryonnaire réaliser une dispersion plus importante. généralement plus rapide que celles issues La larve représente de la fécondation externe. le seul stade libre du corail. En fonction des espèces, les larves MOBILITÉ résultant de la fécondation externe Le polype des anémones de mer peuvent être pourvues de microalgues (Actiniaires) peut conserver (larves zooxanthellées) ou non (larves une mobilité pendant les stades Du choix du site azooxanthellées). La transmission juvénile et adulte. Cependant de de fixation de la parentale peut se faire par les gamètes nombreuses espèces de coraux planula dépendra (spermatozoïdes/oocytes). se fixeront définitivement le développement Certains coraux incubateurs sont capables (espèces sessiles). du corail adulte. de libérer des larves zooxanthellées. 20 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Générations asexuées Le bourgeonnement réalisé par les polypes est un cas de reproduction asexuée. De nombreuses espèces de coraux peuvent La colonisation de l’espace par l’espèce sera plus régénérer leurs tissus après une fragmentation rapide en raison du nombre plus important de clones (cassure accidentelle ou non). Ces modes de produits en peu de temps. Que ce soit par voie reproduction viennent renforcer la capacité sexuée ou asexuée, les coraux ne recherchent pas du corail à se développer dans des milieux de partenaires sexuels. L’économie d’énergie sera de vie instables (séisme, ouragan, etc). allouée à d’autres fonctions vitales de l’organisme (croissance, régénération, etc). En revanche, en La reproduction asexuée produit un nouvel individu l’absence de croisements génétiques, les descendants génétiquement identique au parent. Ce mode ne s’adapteront pas (ou très lentement) à l’évolution de transmission favorise le développement de la des conditions du milieu de vie (réchauffement nouvelle génération dans son milieu environnant. climatique, acidification de l’océan, etc). SOLITAIRES VS SOLIDAIRES Le polype peut avoir un mode de vie solitaire ou colonial. Les colonies coralliennes sont formées de polypes clones, reliés les uns aux autres par un tissu de liaison (le cœnosarque) les rendant tous solidaires. Ils se partageront les éléments nutritifs, véhiculeront l’eau, les signaux de défense, de reproduction, etc, via des canaux internes. 21 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Un espace, des espèces Les récifs coralliens sensu stricto (sans les autres structures associées) couvrent moins RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE La majorité des Scléractiniaires se répartit dans de 0,2 % de la surface de l’océan (surface les eaux peu profondes (entre 0 et 50 m) des zones océanique = 361 132 millions de km²). tropicales et inter-tropicales, entre les latitudes 30°N et 30°S (Tropiques du Cancer et du Capricorne). En prenant en compte les écosystèmes associés (mangroves, herbiers, estuaires, lagons…), les zones récifales s’étendent Réparti sur Connus dans les années 1950 sur 617 000 km². Il existerait près de 6 millions de km2 Exposé au delta de l’Amazone 1 400 espèces de coraux durs et mous à Près de 35% des récifs (eaux boueuses, faible coralliens de la planète lumière, sédimentation travers le monde dont près de 850 espèces Jusqu’à 350 espèces permanente, salinité fluctuante, de coraux constructeurs de récifs. de coraux par km2 importante acidité). Le Triangle de Corail Bancs coralliens de l’Amazone DIVERSITÉ CORALLIENNE À L’ÉCHELLE GLOBALE Tropique du Cancer OCÉAN CARAÏBES PAC I F I Q U E Équateur OCÉAN Tropique du Capricorne INDIEN Nombre d’espèces de corail < 50 à 100 150 200 250 à 500 550 600 La Grande Barrière de Corail RÉPARTITION BATHYMÉTRIQUE DU CORAIL Plus grande bio-construction de la planète Longue de 2 600 km 40% des récifs La pénétration de la lumière dans la colonne Inscrite depuis 1981 au Patrimoine ▶ océan Pacifique d’eau est considérée comme indispensable au Mondial par l’UNESCO 20% développement du corail. Ce paramètre demeure Plus de 400 espèces coralliennes un facteur limitant ; l’essentiel des coraux se développe dans la zone suffisamment éclairée de l’océan pour permettre la photosynthèse des récifs de leurs algues symbiotiques (zone euphotique). ▶ océan Indien Néanmoins, certaines espèces arrivent à proliférer 8% à des profondeurs beaucoup plus importantes. TEMPÉRATURES Les températures Profondeur océaniques fluctuent des récifs 0m entre 18 et 35°C avec un Récifs de surface ▶ Caraïbes optimal de croissance 50 m pour le corail tropical Récifs mésophotiques 150 m situé entre 25 et 29°C. Récifs rariphotiques 300 m Récifs bathyaux 1 000 m Récifs abyssaux Les coraux constructeurs de récifs sont appelés 4 000 m les Scléractiniaires ou les coraux durs. 22 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
PROFIL D’UN LAGON PRÉSENTANT LA RÉPARTITION DU CORAIL Coraux Coraux Coraux Coraux Coraux Coraux Coraux columnaires en plateau foliacés branchus massifs encroûtants turbinés 1 2 3 4 5 6 7 5 6 4 LAGON 4 7 5 OCÉAN PINACLE 3 CORAIL MORT 2 1 PENTE INTERNE SABLE CORALLIEN PLATIER CRÊTE RÉCIFALE PENTE EXTERNE Véritables réservoirs de biodiversité marine, les récifs coralliens affichent une production annuelle de biomasse égale voire deux fois supérieure à celle des forêts tropicales les plus productives. HOT-SPOT Parmi les 36 hot-spots planétaires figurent Madagascar et des îles de l’Océan Indien (îles et archipels des Mascareignes – La Réunion, Maurice et Rodrigues –, des Comores et des Seychelles). Ce réservoir de biodiversité fait état d’une extrême diversité spécifique, abritant environ 15 000 espèces de plantes. 23 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
24 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Vivre ensemble Sur des surfaces extrêmement limitées et dans des eaux pauvres en nutriments (eaux oligotrophes), l’écosystème corallien représente l’un des milieux les plus productifs de notre planète. Un récif Un récif en enbonne bonnesanté santépeut produire peut produirejusqu’à jusqu’à 15 tonnes.km tonnes/km2-2 /an 1 15 .ande produits -1 de consommables. produits consommables. Les récifs abritent une diversité spécifique évaluée Les récifs abritent une diversité spécifique évaluée au tiers des espèces décrites à ce jour dans le milieu au tiers des espèces décrites à ce jour dans le milieu océanique. Les scientifiques estiment que l’écosystème océanique. Lesrecéler récifal pourrait scientifiques estiment entre 1 et que 4 millions l’écosystème d’espèces récifal pourraitrestent dont beaucoup recélerencore entre 1à découvrir et 4 millions ! d’espèces dont beaucoup restent encore à découvrir ! CO2 ZOOPLANCTONOPHAGES CO2 CORALLIVORES Zooplancton PISCIVORES Phytoplancton CO2 Algues ALGIVORES HERBIVORES Éléments nutritifs Est mangé par DÉCOMPOSEURS 1000 espèces.m-2 de récifs coralliens. Bactéries Les espèces de poissons de petites tailles sont beaucoup plus abondantes En l’absence de requins, certaines espèces sur les récifs que les grandes espèces. prédatrices vont proliférer et consommer Cependant, ces dernières ont de plus davantage de poissons herbivores comme grandes capacités de dispersion. le poisson-perroquet. Ces brouteurs LES REQUINS d’algues sont pourtant indispensables pour La richesse spécifique de la faune AU SERVICE DES CORAUX permettre aux coraux de se développer. associée à un récif corallien est aussi Qualifiés de super-prédateurs, les requins Les excréments des requins permettraient dépendante de la surface et de la influencent le développement et la survie également l’apport de quantités importantes diversité des habitats du récif ainsi des coraux. Leur surpêche peut être de composés azotés qui favoriseraient que de la température de l’eau. dramatique pour l’écosystème corallien. l’activité des producteurs primaires du récif. D’APRÈS BARNECHE ET AL., 2019 25 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Une mosaïque vitale Les récifs coralliens sont connectés entre eux mais aussi avec d’autres écosystèmes tels que les mangroves, les couvertures algales, l’océan. À travers cette mosaïque d’écosystèmes interconnectés, les déséquilibres de l’un d’eux perturberont directement le fonctionnement des autres écosystèmes. 3 ÉCOSYSTÈMES CONNECTÉS 5 4 1 2 3 1 RÉCIF CORALLIEN Favorise la sédimentation Absorption des nutriments (nombreux filtreurs) Nurserie, habitats Protection contre l’érosion 2 HERBIER Favorise la sédimentation Absorption des nutriments (nombreux filtreurs) Nurserie, habitats Épuration bactérienne 3 MANGROVE Zone tampon ▶ Absorption des nutriments et des polluants ▶ Absorption des apports en eau douce Protection contre l’érosion Nurserie, habitats CONSÉQUENCES DE LA DÉGRADATION D’UN ÉCOSYSTÈME 1 2 3 4 5 Diminution Réduction Exposition aux Augmentation de Diminution de la de la biodiversité du couvert végétal polluants et charges l’érosion du littoral ressource vivrière récifale Les récifs coralliens et sédimentaires Le récif corallien et la La connexion récifs- Les récifs coralliens les herbiers limitent Les mangroves et les mangrove forment une herbiers-mangroves offrent une multitude l’avancée des eaux herbiers absorbent les barrière naturelle contre permet de concentrer d’habitats et sont des salées vers les terres. alluvions et les pollutions la houle, les tempêtes, sur un faible espace zones de reproduction, Ces écosystèmes d’origine terrestre. etc. Ces écosystèmes une forte abondance de nurserie pour de favorisent l’installation Ces écosystèmes préservent la côte et et une importante très nombreuses des mangroves et de la protègent les récifs des les aménagements diversité d’espèce. Ces espèces récifales. végétation terrestre. apports terrigènes. terrestres de l’érosion. milieux constituent des réservoirs de protéines animales et aussi une ressource économique dans des territoires parfois très isolés. 26 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
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Un récif, des ressources Les récifs coralliens offrent de nombreuses ressources pour l’être humain, en particulier aux populations locales. À l’échelle de la planète, cet écosystème concentre Le concept de Récif Urbain de forts intérêts sociaux, économiques et culturels. repense l’organisation de nos sociétés urbaines en s’inspirant de l’organisation squelettique, 20% 50% du réseau d’interactions Les récifs coralliens sains et de l’association symbiotique fourniraient à eux seuls de décrits chez les coraux. la nourriture et des moyens des besoins en protéines L’épisode de blanchissement D’APRÈS GERARD, 2017 de subsistance pour plus de apportés par l’océan des coraux qui a touché l’Océan 500 millions de personnes à près de 3 milliards Indien en 1998 a fait diminuer réparties dans les zones d’êtres humains de moitié la densité globale tropicales et sub-tropicales D’APRÈS des poissons de récifs de certaines HOEGH-GULDBERG, 2019 D’APRÈS HOEGH- zones particulièrement impacctées GULDBERG, 2019 ; des Chagos ou encore des Seychelles. SWEET ET AL., 2019 D’APRÈS L’UICN, 2008 Environ 3,5 milliards Revenus de personnes vivent à touristiques moins de 100 km de la côte D’APRÈS WRIGHT Protection & NICHOLS, 2019 du littoral contre Ressource les catastrophes Protection contre alimentaire naturelles l’érosion du littoral 1 km² de récif Les récifs coralliens ▶ jusqu’à 600 000 $.an-1 réduisent la hauteur Barrière Ressource des vagues jusqu’à 70% naturelle économique D’APRÈS NARAYAN ET AL., 2016 Réduction de la houle, des tsunamis. Lors du tsunami dévastateur de 2004 dans l’océan Squelette corallien Indien, les côtes protégées ▶ source minérale par des récifs coralliens Ressource Ressource et d’oligoéléments en bonne santé n’ont matérielle médicale été que peu affectées Prothèses, implants par la vague mortelle. D’APRÈS DENIS Traitements anti- ALLEMAND, 2016 Ressource VIH, anti-tumoraux, culturelle anti-leucémique 400 atolls dépendants des récifs Engrais Matériaux de construction pour les habitations Dans le sud NOUVELLES MOLÉCULES du Kenya, des Sable corallien La probabilité de trouver de rituels religieux pour les routes nouvelles molécules à partir sont organisés d’espèces issues des récifs autour des récifs Les récifs des Maldives coralliens est 300 à 400 fois plus afin d’apaiser fournissent ainsi élevée que pour des organismes les esprits. annuellement environ provenant d’un écosystème 20 000 m3 de matériaux. D’APRÈS DENIS terrestre. Les propriétés anti- ALLEMAND, 2016 tumorales provenant du corail D’APRÈS DENIS ou de la faune associée (éponge, ALLEMAND, 2016 etc) ont pu être testées sur près de 60 cancers différents. 28 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
29 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
CHAPITRE 2 Pressions et menaces 31 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
20%des récifs Des récifs en sursis de la planète ont disparu. Les années 2010 ont débuté avec un constat inquiétant : la planète traverse-t-elle une nouvelle crise de la biodiversité ? 70% des récifs sont Il pourrait s’agir de la 6e extinction de masse dégradés par les activités des espèces en 500 millions d’années. humaines. Aujourd’hui, les scientifiques estiment que 2050 jusqu’à 100 000 espèces disparaîtraient chaque année, induisant une régression de 50% de la biodiversité d’ici 2050. L’accélération et l’intensification des événements naturels seraient en partie induites par les nombreuses activités anthropiques. Une extinction des espèces estimée jusqu’à 500 fois supérieure à la disparition naturelle d’une espèce après 250 000 ans de présence humaine et seulement 200 ans d’ère industrielle. 90% des coraux de la planète 30%des récifs seront menacés. sont menacés En constante régression à travers le monde, d’extinction. l’écosystème corallien inquiète et mobilise la communauté scientifique. Il est désormais établi que l’intensification et l’augmentation de la fréquence des épisodes de mortalité massive des coraux s’accompagnent d’une diminution de la biodiversité marine associée EN SAVOIR PLUS ainsi que d’une érosion côtière accélérée. Dans l’Océan Indien, près de 65% des récifs coralliens sont menacés par les activités Les perturbations sont d’autant plus visibles sur locales et près de 35% d’entre eux le sont des milieux fortement diversifiés. Les écosystèmes à un niveau élevé ou très élevé. coralliens figurent ainsi parmi les plus menacés par le changement global. Pourtant, l’espèce humaine tire de nombreux profits des milieux récifaux. 32 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
Le réchauffement climatique Les coraux sont sensibles aux fluctuations et aux fortes températures ; de nombreuses Les épisodes de blanchissement semblent survenir désormais tous les 3 ans. L’adaptation évolutive des 40 gigatonnes de CO2 espèces sont proches de leur seuil espèces coralliennes face à ces nouvelles émis tous les ans conditions est un processus lent. Ainsi, maximal de tolérance thermique. +40% de nombreuses espèces sont menacées de disparition. En 1997-1998, le phénomène Une exposition prolongée des coraux à des El Niño a entraîné dans certaines températures océaniques de +1 voire +2°C est régions une régression de 50% voire de CO2 atmosphérique susceptible d’entraîner un stress thermique (stress jusqu’à 90% de la couverture corallienne. depuis 1870 physiologique) du corail et de leurs zooxanthelles. La mort et l’expulsion des microalgues se manifestent par un phénomène de blanchissement corallien à grande échelle. Le squelette calcaire Depuis les épisodes récurrents de 2016 et 2017, ce sont plus de 90% du récif de la Grande Barrière qui ont été touchés et plus +0,9°C depuis 1870 du corail devient alors visible avec la transparence de la moitié des coraux ont disparus. Cette des tissus dépourvus de zooxanthelles. année, seulement 1% du plus grand récif Le blanchissement du corail est connu depuis plus de 70 ans avec des descriptions sur des colonies isolées corallien du Japon était encore en vie. Avec l’augmentation de température, +3°C à +5°C d’ici 2100 ou des spots récifaux. Le premier blanchissement les coraux devront également s’adapter de masse a été rapporté en 1979 dans l’Est Pacifique. à la montée du niveau de l’océan. CORAIL MORT COLONISÉ CORAIL EN BONNE SANTÉ CORAIL BLANCHI PAR DES ALGUES FILAMENTEUSES Température 30 Période de blanchissement de la mer ESPOIR en surface (°C) 29 Un suivi mené pendant 40 ans sur un récif à l’Est de l’océan Indien, 28 révèle que l’augmentation du niveau de l’océan, provoqué par 27 le réchauffement global, pourrait être favorable au développement de la couverture corallienne et limiter 26 le blanchissement du corail lors des épisodes de fortes températures. 25 D’APRÈS BROWN ET AL., 2019 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2003 2005 Source : Date Adjeroud et al., 2009 La microalgue Symbiodinium thermophilum ESPOIR est capable de résister à des températures En 30 000 ans, la Grande Barrière de Corail de plus de 36°C. Les coraux en symbiose a survécu 5 fois à des extinctions massives. avec cette espèce supportent plus Couvrant seulement 3% de la Grande Barrière, facilement les variations de température. un cœur de récif sain a été découvert en 2017. Ce récif moins touché par les agressions pourrait avoir la capacité de fournir des larves sur près de 50% de la Grande Barrière de Corail. Un espoir pour ce 6e déclin de la biodiversité ? 33 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
L’acidification En 30 ans, le taux de calcification des coraux aurait été réduit de 40%. Une calcification moindre qui de l’océan conduirait à une érosion plus importante du récif (tempête, houle, etc) et à une diminution de la biodiversité de l’écosystème récifal. Mais l’acidification s’accompagne également d’autres répercussions Véritable puit de dioxyde de carbone (CO2), physiologiques notamment sur la reproduction. l’océan concentre 50 fois plus de carbone En Atlantique Nord, les coraux d’eau profonde que l’atmosphère. seraient les plus affectés par l’acidification plus importante des masses d’eau en profondeur. Une telle capacité d’absorption est liée à La distribution de ces espèces pourrait s’en trouver l’utilisation du CO2 par les microalgues pour leur limitée à 1 500 m de profondeur contre les 2 500 m photosynthèse (= pompe biologique) et au stockage actuels. Les répercussions sur la faune associée du carbone par les courants océaniques dans et la richesse des fonds seraient alors considérables. les eaux profondes et froides (= pompe physique). Chaque année, ce sont près de 25 milliards de kilos de CO2 absorbés dont 70 à 90 millions de tonnes de carbone stockées par les récifs coralliens. MINÉRALISATION Certaines espèces pourraient s’adapter Mais le piégeage du CO2 a un coût, l’océan est aujourd’hui en situation plus acides. Ainsi, le corail Stylophora pistillata semblerait résister 30% plus acide qu’au début de la révolution industrielle. et évoluer face à ces nouvelles conditions. En 2100 cette acidité océanique pourrait atteindre 150%. Le pH des eaux de surface pourrait ainsi diminuer à 7,8 contre une valeur de 8,2 avant pH les années 1870. Un tel niveau d’acidité n’aurait « Le pH de l’océan pourrait atteindre pas été atteint depuis 20 millions d’années. 7,7 d’ici 2100, soit un triplement de son acidité par rapport à la période préindustrielle. (...) Il ne faut pas espérer conserver plus de 20 à 30 % des récifs coralliens POMPE BIOLOGIQUE POMPE PHYSICO-CHIMIQUE qui existent aujourd’hui. » JEAN-PIERRE GATTUSO, 2018 CO2 ATMOSPHÉRIQUE CO2 ATMOSPHÉRIQUE 1 Le phytoplancton absorbe le carbone du CO2 1 Agitation de surface et mouvements d’eau favorisant les échanges 40 kg.seconde-1 de CO2 dissous dans l’océan 2 CO2 DISSOUS Chute des organismes CO2 DISSOUS 30% du CO2 atmosphérique morts vers les profondeurs 2 absorbés par l’océan Convection profonde 3 SÉDIMENTATION Séquestration du carbone 3 STOCK DE CARBONE Carbone dissous en profondeur 150 milliards de tonnes de carbone absorbées depuis 1870 En Papouasie Nouvelle-Guinée, des coraux sont capables de se développer dans des résurgences d’eaux volcaniques. Dans ces eaux, le pH est similaire aux prévisions pour 2100. Des capacités d’adaptation ? 34 LES CORAUX, BÂTISSEURS DE RÉCIFS
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