MINIMALIST DREAM HOUSE 14 15
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14 15 MINIMALIST DREAM HOUSE MUSIQUE DE CHAMBRE LU. 23 MARS 20 H
Le minimalisme a cinquante ans. Une série de concerts mensuels, organisés début Pärt et Howard Skempton, les grands précurseurs 1961 par La Monte Young dans le loft de Yoko Ono non-conformistes Érik Satie, Moondog et John au centre-ville de New York, porta pour la première Cage sont tous inscrits à ce programme. Dans l’es- fois ce monde musical nouveau et hypnotique à prit des concerts au loft, improvisations et composi- l’attention du public. Katia et Marielle Labèque, tions vont naître grâce à David Chalmin et Raphaël et quelques amis issus des scènes du rock alter- Séguinier, collaborateurs réguliers des Labèque. natif et de la musique classique, se sont rassem- — blés pour célébrer ce mouvement révolutionnaire et les nombreuses vagues d’influences qui l’ont Igor Toronyi-Lalic (2015) traversé. Des pièces de jeunesse rarement enten- Traduction Auditorium-Orchestre national de Lyon dues de Steve Reich, Terry Riley et Philip Glass, les bourdonnements expérimentaux de La Monte Young, les joyaux cristallins des Européens Arvo 2 3
Katia et Marielle Labèque, piano David Chalmin, guitare électrique, électronique, voix Raphaël Séguinier, percussions Alexandre Maillard, guitare basse Moondog PARTIE 1 – Proto-minimalistes et PARTIE 2 – Les rockeurs ENTRACTE New Amsterdam, pour bande post-minimalistes Laurie Anderson Terry Riley [8’] Érik Satie In C O Superman (bande) Prélude du Ier acte, «La Vocation», [10’] La Monte Young [27’] extrait du Fils des étoiles The Tortoise, His Dream and Journeys [3’30] Aphex Twin [20’] April 14th PARTIE 3 – Européens et John Cage [2’] expérimentalistes FIN Experiences (extrait : n° 1) Brian Eno Howard Skempton [4’30] Laurie Anderson In Dark Trees Images (extraits) : Prélude – Interlude 4 – Time to go (bande) Arvo Pärt [5’] Prélude 5 – Interlude 5 – Prélude 7 [10’] Hymn to a Great City [7’30] [4’] Radiohead Postlude Pyramid Song [2’] William Duckworth [4’] Time Curve Preludes nos 17 et 1 Henry Flynt [5’30] Raphaël Séguinier Work such that no one knows what’s Free to X going on (One just has to guess whether Philip Glass [7’] this work exists and if it does what it is Four Movements like) [24’] Sonic Youth [0’] Free City Rhymes [7’] James Tenney David Chalmin Postal Piece No 10: Having Never Written ENTRACTE a Note for Percussion [15’] Gameland [7’] [5’] 4 5
PARTIE 1 – Proto-minimalistes et post-mi- Cette composition pour deux pianos, lente, nimalistes soigneuse et inaccentuée, est aussi légère et — alvéolée qu’un fromage suisse. Elle a été écrite à Érik Satie (1866-1925) un moment où John Cage était sous l’influence Le Fils des étoiles (1891), Prélude du 1er acte : de la compositrice indienne Gita Sarabhai. Elle l’avait convaincu que «le but de la musique est La Vocation de calmer l’esprit, le rendant ainsi disponible aux Les premières compositions d’Érik Satie influences divines». La réponse de Cage avait été comptent parmi ses plus radicales. Sa répu- la recherche d’une sorte de taïchi musical : des tation de grand précurseur du minimalisme exercices musicaux faits de mouvements lents repose sur des pièces comme les Gymnopédies, incorporant le silence. La pièce a été compo- les Gnossiennes, Vexations et Le Fils des étoiles, sée pour une création chorégraphique de son toutes écrites avant l’âge de vingt-six ans. compagnon Merce Cunningham. C’était une époque expérimentale dans sa vie. — Il s’était installé à Montmartre, au milieu de Arvo Pärt (1935) la foule excentrique des cabarets, s’était lais- sé pousser les cheveux, acheté une cape et Hymn to a Great City, pour deux pianos un haut-de-forme et était devenu le composi- (1984/2004) teur officiel d’un culte mystique, l’ordre de la Le minimalisme pourrait être considéré comme Rose-Croix catholique du Temple et du Graal. le moment où la musique a décidé de réintégrer PARTIE 1 – Proto-minimalistes et post-mi- Faisant écho à l’esprit d’indépendance des Ses compositions étaient excentriques mais le monastère. Le fait de dépouiller le son à l’ex- nimalistes séries de concerts organisés en 1960-1961 par magiques. Le premier prélude du Fils des étoiles trême a été associé dès le départ avec la pensée La Monte Young chez Yoko Ono, où la musique – ouverture d’une suite de pièces écrite en tant spirituelle. En Europe de l’Est communiste, le Les sœurs Labèque puisent dans des compo- que musique de scène d’une pièce dédiée à lien entre religion et minimalisme a été encore minimaliste connut ses premières vibrations, sitions aux parfums riches et variés, notam- Péladan, son patron rosicrucien – figure parmi plus fort. Là, alors que la dissonance faisait de nous présentons des œuvres nouvelles de David ment les cinétiques Four Movements (2008) de les plus extraordinaires. Comme ses autres vous un traître et la tonalité un laquais de l’État, Chalmin et Raphael Séguinier. Philip Glass, l’œuvre pour piano hypnotique pièces de piano de jeunesse, Satie se débar- le minimalisme était considéré comme une troi- de William Duckworth, qui exerça une grande rasse des barres de mesure, des indications sième voie providentielle. Le compositeur esto- influence, avec une incursion chez deux précur- de mesure et des clés. La lumière d’un lever nien Arvo Pärt a su développer un des langages seurs du minimalisme, Érik Satie et John Cage. PARTIE 3 – Européens et expérimentalistes de soleil matinal nous inonde à l’écoute des les plus sophistiqués du minimalisme dans son Dans ce récit, Arvo Pärt représente l’Europe Les nouvelles idées musicales de l’Amérique accords d’ouverture – faits d’empilements de évocation des cloches. Ce style tintinnabuli s’en- continentale avec des pièces peu entendues. ne tardèrent pas à être adoptées par l’Europe. quartes. La pièce se déroule dans l’immobili- tend de façon discrète dans cette courte pièce Katia et Marielle Labèque présentent une sélec- té, avec la répétition des huit premiers temps pour deux pianos avec la répétition du sol dièse tion d’œuvres minimalistes nées de ce côté-ci verticaux selon une transposition harmonique, et l’aigu soudain de roues de charrette. Pendant PARTIE 2 – Les rockeurs de l’Atlantique, avec des joyaux de Skempton comme pour présenter les huit facettes d’une ce temps, le second piano demeure d’une loyau- Nous atteignons le New York des années 1960 dans l’esprit de Satie. Le désir expérimental de sculpture. Sans connexion aucune entre eux, té sans faille à la tonalité initiale, revenant à une dans la seconde partie, pour explorer l’aube l’esthétique minimaliste est représenté par deux quatre passages se déplient sans but, avec pour cadence parfaite à chaque mesure. Ce refrain enivrante et psychédélique du minimalisme artistes du son issus de Fluxus, James Tenney et chacun une instruction différente en en-tête – confère au morceau un caractère incantatoire. musical. Avec l’aide de leurs collaborateurs Henry Flynt, suivis par Moondog et La Monte «En blanc et immobile», «Précieusement», «Pâle Le titre fait référence à la ville de New York. réguliers David Chalmin, Alexandre Maillard et Young. et hiératique», «Comme une douce demande». — Raphaël Séguinier, Katia et Marielle présentent — C’était cette sorte d’errance cyclique qui avait William Duckworth (1943-2012) une œuvre fondatrice de ces débuts : In C de amené Debussy, ami et disciple de Satie, à le Igor Toronyi-Lalic (2015) Time Curve Preludes (1977-1978) (nos 17 et 1) Terry Riley (1964). qualifier de «musicien médiéval et doux égaré dans Traduction Auditorium-Orchestre national de Lyon ce siècle». Les critiques étaient moins tendres Time Curve Preludes de William Duckworth marque Les rockeurs ne furent pas moins hypnotisés par la fin de la première période du minimalisme, faite cette nouvelle vague musicale qui déferlait de avec ses sillages sonores à la lenteur feutrée. L’un d’eux avait dit des préludes : «On ne sait pas d’austérité, pour ouvrir sur quelque chose de bien New York. Brian Eno absorba rapidement cette plus souple et libre. Le célèbre cycle de piano de esthétique. Elle est devenue entre-temps une par quel bout les prendre», ce qui deviendrait par la suite l’objectif principal de plus d’une grande Duckworth a été, selon le critique et compositeur influence dominante de la musique contempo- Kyle Gann, «la première œuvre minimaliste majeure raine – appréciée de Sonic Youth, Aphex Twin composition minimaliste. — qui sonnait comme telle tout en refusant de répondre et Radiohead. Et pendant que le rock étudiait aux attentes du minimalisme». les minimalistes, les minimalistes étudiaient John Cage (1912-1992) les scènes du rock, du jazz et des musiques du Experiences (n° 1), pour deux pianos (1945) Contrairement à la première génération, monde. Duckworth affiche sans honte ses influences. 6 7
Le bluegrass, le chant médiéval, la musique PARTIE 2 – Les rockeurs ment contre des rochers aléatoires. La simpli- Raphaël Séguinier (1979) d’Érik Satie et de Keith Jarrett pointent tous leur — cité de la pièce, le relâchement des règles, Free to X (2011) nez à un moment ou à un autre de ce cycle de 24 Terry Riley (1935) les joies de l’écoute attentive et participative Free to X débute selon le principe rythmique pièces pour piano solo. Il y a une fraîcheur folk qu’elle demande ont fait d’elle l’une des œuvres In C (1964) d’addition de Philip Glass combiné avec les dans le premier prélude, lequel gambade avec les plus populaires de l’histoire du minimalisme. bourdons de La Monte Young. Le tout se déve- enjouement autour d’un mi bémol majeur écla- «Une musique comme aucune autre au monde», — affirmait Alfred Frankenstein, critique musical loppe et se construit jusqu’à ce que la complexi- tant et de sa septième majeure. Le dix-septième Aphex Twin (1971) té l’entraîne vers un domaine moins contrôlable. montre un esprit plus apathique, où le rêve suit du San Francisco Chronicle, après la première de In C de Terry Riley. Expérimentale sans Avril 14th (2001), pour piano à quatre mains Ici le bourdon cesse d’être aussi sympathique et en se prélassant un chemin quasi ornemen- engloutit la pulsation rythmique dans une caco- té (mais pas complètement) dans une tonalité être menaçante, aléatoire mais pourtant claire, Peu de minimalistes peuvent résister à la tenta- la pièce de Riley incarne la nature délicate- tion de flirter avec Satie à un moment ou à un phonie de bruitages électroniques. mineure. Malgré une plus grande complexité, — on retrouve une relation forte avec la première ment audacieuse de cette révolution musicale autre de leur vie. Et Richard D. James (alias phase du minimalisme dans les bourdons que américaine. «Personne ne se souvenait du dernier Aphex Twin) ne fait pas exception à cette Sonic Youth (États-Unis, 1981) le piano est censé tenir (grâce à la pédale ou en compositeur expérimental ayant utilisé une armure, règle. Il a placé le minimalisme sur des char- Free City Rhymes (2000) pesant sur les marteaux concernés). et encore moins écrit quelque chose en do majeur», bons ardents dans les années 1980, mélan- Les arbres généalogiques ont leur importance — avait expliqué son collègue compositeur et geant les sons d’ambiance à la pulsation tech- dans l’histoire du minimalisme. L’influence chroniqueur minimaliste, William Duckworth. no. Du temps de l’album Drukqs, cependant, sa de Young sur la scène no wave n’est pas une Philip Glass (1937) In C est le premier classique de l’histoire du musique s’était apaisée. Drukqs regroupe treize Four Movements, pour deux pianos (2008) simple théorie. La lignée qui part de La Monte minimalisme. La pièce est devenue la carte de titres pour piano. L’un des meilleurs est Avril Young jusqu’à Rhys Chatham, Glenn Branca Comme une majeure partie de la produc- visite de Riley et des minimalistes américains 14th, écrit en boucle autour d’une petite mélo- pour aboutir à Lee Ranaldo et Thurston Moore tion tardive des pionniers du minimalisme, lorsqu’elle a été enregistrée par Columbia en die entraînante. est bien perceptible. Que Sonic Youth se soit la musique plus récente de Philip Glass serait 1968. Riley avait en fait réalisé des boucles — spécialisé dans des expériences autour de l’ac- plus justement qualifiée de post-minimale que aléatoires, créant des phases décalées dans le Brian Eno (1948) cord et des textures de bourdon est un héritage de minimale au sens strict. Four Movements temps et les parsemant de motifs mélodiques In Dark Trees (1975) de Young et de ses successeurs. Free City Rhymes utilise la grammaire des années 1960 et 1970 orientaux durant deux ou trois ans. Mais l’ap- est contemporain de l’album le plus expérimen- pour créer un paysage musical d’une densité plication de ces idées à une instrumentation en «Je me souviens très clairement… cette image d’une forêt sombre, d’un bleu d’encre avec la tal de Sonic Youth à cette date, NYC Ghosts & bien plus verticale, d’une structure en zigzags, direct et les réactions positives face aux résul- Flowers (2000). Il est né en partie de la nécessi- le tout nimbé d’une atmosphère romantique. La tats obtenus ont été un événement d’impor- mousse retombante et le bruit continu des chevaux au loin, ces chevaux qui poussaient des sortes de té. Les instruments trafiqués tout spécialement narration revient, comme les thèmes. La répé- tance pour le mouvement naissant. L’idée de par le groupe avaient été volés en 1999. Cela tition et le rythme forment toujours une part la pièce est venue à Riley une nuit à bord d’un hennissement.» In Dark Trees est la transcrip- tion des souvenirs qu’a Brian Eno des bois de les a forcés à partir de zéro, avec un résultat substantielle de la dynamique structurelle de bus. Il a entendu «toute la première ligne de In C. plus bruyant et indiscipliné que jamais. Ce qui la pièce, mais cet aspect n’est plus dominant. Cela semblait juste me tomber dans l’oreille». Steve Rendlesham dans le Suffolk. La pièce fait partie de l’album Another Green World, lequel a marqué n’a pas été apprécié par tout le monde. Perry La pièce débute par un envol semi-mélodique. Reich – voisin de Riley à San Francisco – a créé Serpa, leur agent de l’époque, n’était pas satis- Un réseau dense de rythmes entrecroisés prend la pièce au San Francisco Tape Music Center la rupture de Brian Eno d’avec le monde glam rock de Roxy Music. La musique évolue au fait de ce résultat tout sauf conventionnel : «Ils au piège la phrase d’ouverture. Des octaves en 1964 et ajouté un arsenal de taille pour tenir se sont fait plaisir, les enfoirés», avait-il eu pour massives marquent de grandes enjambées dans la durée une pulsation à la croche. pas de plusieurs pulsations percussives. On retrouve des ricochets inattendus et des lignes commentaire. dans la texture. Deux clairières s’ouvrent, dans — La longueur comme l’instrumentation de la atmosphériques à la guitare qui rappellent les lesquelles Glass expose une première pensée pièce sont indéterminées. Celle-ci consiste en grounds [ndt : basse obstinée] du baroque. David Chalmin (1980) larmoyante et une seconde encore plus furtive. cinquante-trois phrases mélodiques numéro- — Gameland (2011) Le deuxième mouvement est lent. Il oscille tées, pour la plupart assez courtes, chacune entre deux humeurs : l’une abattue et harmoni- Radiohead (Angleterre, 1985) Gameland débute sur le mode expérimental, d’elles étant répétée par l’interprète suivant son quement inconfortable, l’autre dominée par une Pyramid Song (2001) le pianiste et les guitaristes partant dans les envie. Les musiciens doivent jouer les phrases tendre ballade qui s’élance vers un ostinato bril- Pyramid Song, paru en 2001 dans l’album de entrailles de leur instrument. La pièce dérive selon une séquence mais peuvent décrocher lant en clé de sol. Le troisième est le plus long Radiohead Amnesiac, a confirmé le rôle joué par alors vers une danse à 12/8 incisive et très ou raccrocher à tout moment. La forme appa- des mouvements et le plus complexe d’un point ce groupe en tant que tête de file des expéri- chromatique, lentement écrasée par la menace raît et disparaît. L’effet acoustique n’est pas de vue rythmique et harmonique. On y retrouve mentalistes de Grande-Bretagne. Que ce soit de deux secondes mineures. La rencontre des très éloigné de l’aspect mouvant de nuées d’oi- même la bonne vieille lutte romantique entre rythmiquement ou harmoniquement, nous idées musicales crée une théâtralité menaçante seaux. Certaines de ces figures peuvent sembler les tonalités (fa majeur et fa mineur). Le dernier entrons là dans des domaines déconcertants. La rappelant les compositions de Bernard Herr- curieusement familières. D’aucuns ont entendu mouvement débute par une mélodie dans les pulsation aux percussions est syncopée comme mann. la matérialisation de Bruckner dans les répéti- graves, richement harmonisée et qui serpente du non-mesuré virtuel. Les choix harmoniques tions en triades de la vingt-neuvième phrase. au second piano. Des syncopes et des ostinatos – neuvièmes majeures, mineures et dissonances Ailleurs, des phrases musicales indonésiennes rapides la propulsent en avant jusqu’à l’anéan- – ajoutent une humidité moyen-orientale. Tout et indiennes arrivent à portée de voix. Chaque tissement final, d’un style spectaculaire. conspire à créer un climat de perdition à la Satie. idée musicale est néanmoins lancée immédiate- 8 9
ENTRACTE PARTIE 3 – Européens et expérimentalistes boration qui unit Young et Henry Flynt, lequel une pièce «très longue». Cette observation d’un a marqué de diverses manières la culture créa- principe musical de base est censée familiariser — — tive des années 1960. Il a lancé le terme d’art l’oreille au processus sonore lui-même – avec Laurie Anderson (1947) Howard Skempton (1947) conceptuel, été à la tête d’un groupe culte les harmoniques de l’instrument et les réson- O Superman (1981) Images (extraits) : Prélude – Interlude 4 – Prélude 5 – rockabilly, pionnier par ailleurs du mouvement nances sympathiques de la salle. Le minimalisme a été le premier mouvement Interlude 5 – Prélude 7 (1989) Fluxus auquel il a contribué avec plusieurs — musical dans le développement duquel les Listing Pieces. Les pièces à listings sont des Postlude (1978) La Monte Young (1935) femmes ont joué un rôle aussi crucial que les pièces qui n’existent que sur le programme. La Les minimalistes sont souvent des maximalistes première date de 1960 et s’intitule An Invisible The Tortoise, His Dreams and Journeys, hommes. Pauline Oliveros, Meredith Monk, quant aux durées. Pas Howard Skempton. C’est Poem Sent To Terry Jennings For Him To Perform ensemble au choix (1964 – jusqu’à aujourd’hui) Eliane Radigue et Mary Ellen Childs ont toutes l’un des très rares minimalistes miniaturistes. Il de Young (Poème invisible envoyé à Terry (La Tortue, ses rêves et ses voyages) fait avancer le langage minimaliste. La musi- a commencé sa carrière musicale dans l’orbite Jennings pour qu’il le joue). Lors du concert de cienne et artiste expérimentale Laurie Anderson Les premières incursions de Young dans le de Cornelius Cardew, avec lequel il a fondé en 1960 ou il était programmé, Young a demandé a propulsé le minimalisme en tête des palmarès domaine du minimalisme frappaient par leur 1969 l’ensemble expérimental Scratch Orches- à Jennings : «Pourquoi n’avez-vous pas joué le en 1981 avec O Superman. La pièce faisait partie caractère anguleux, atonal et délibérément tra, et installé dans cet environnement une poème invisible ?» et Jennings de répondre : «Je d’une plus vaste performance intitulée United pervers. «LE BUT DE CETTE SÉRIE N’EST musicalité distincte à travers une série de pièces l’ai joué ; vous ne l’avez pas entendu ?» Work Such States, dont la première partie – Americans PAS LE DIVERTISSEMENT», hurlait le texte du de piano à la Satie. That de Flint a été la deuxième pièce à listings on the Move – avait été commandée par Holly programme de sa série Chamber Street dans le Solomon pour l’anniversaire de son mari, avec Ses Images forment un ensemble de pièces pour jamais écrite, créée durant la série Chambers loft new-yorkais de Yoko Ono en 1960-1961. une création en 1979 au Carnegie Recital Hall. piano solo composées pour une série télévi- Street de Young en 1960-1961. Mais dès 1962, il semble qu’il se soit calmé, Les pulsations du minimalisme, son harmonie sée de Channel Four axée sur la photographie — probablement parce qu’il avait trouvé son âme statique et l’entrée des arpèges asymétriques et datée de 1989. Les préludes évoquent le sœur en l’artiste Marian Zazeela, ainsi qu’un à la Glass est très suggestive si l’on pense au jeu des vagues. Dans le premier, un ricochet James Tenney (1935-2006) groupe de frères avec lequel il avait formé The contexte de son texte, discrètement politique passe doucement d’une main à l’autre. Dans Postal Piece n° 10 : Having Never Written a Theatre of Eternal Music, et rapidement son et éventuellement apocalyptique. Le glissement le septième, les coups se font plus vifs. Dans le Note for Percussion, pour percussion solo au esthétique Far West s’était adoucie jusqu’à des arpèges représente-t-il l’expansion colo- cinquième, un vent vient troubler la structure en choix (1971) devenir un bourdon onirique. Ce fils de berger niale de l’Amérique ? Devons-nous lire quelque surface. Les interludes sont plus contemplatifs. (Sans jamais avoir écrit une seule note pour mormon, d’une indépendance farouche, passe- chose dans la manière dont une voix féminine Le quatrième trahit le gout de Skempton pour percussion) ra alors le reste de sa vie sur une autre planète chaleureuse se trouve dissociée de son origine, les Beatles par son côté direct et syncopé. Le – qu’elle soit musicale, physique ou spirituelle Au début des années 1960, il était difficile de mécanisée et forcée à battre la mesure ? D’une cinquième véhicule les harmonies de Debus- – en quête des sons du cosmos. En 1962, il a distinguer les artistes visuels des composi- manière ou d’une autre, cela importe peu. La sy. Pièce finale et autonome, le postlude est transcrit le vrombissement des câbles élec- teurs. La Monte Young a créé l’art conceptuel. première fois que j’ai entendu cette chanson, l’un des plus économique et évocateur qu’ait triques dans The Four Dreams of China. En 1964, Yves Klein a composé des symphonies. James j’ai cru que cela parlait de quelqu’un présentant jamais écrit ce miniaturiste. En seulement deux il a commencé à faire l’arrangement du ronron- Tenney a fait les deux. Il a fait partie intégrante son petit ami à ses parents. Cela fonctionnait de minutes, il semble voyager au loin et gagner en nement de son aquarium dans The Tortoise, His de la première génération minimaliste (membre même. amplitude dans une série d’accords non résolus, Dreams and Journeys, laquelle devint une pièce du Philip Glass Ensemble à ses débuts), et été avec à chaque verticale un tableau atmosphé- sans fin. «Les tortues étaient “statiques” dans leur élément fondateur de la scène du Sound Art. rique remplaçant un monde caché. concept, comme la plupart des formes musicales qui Les artistes comme les minimalistes remet- — taient en cause les principes de base. Et lorsque m’intéressent», a-t-il écrit. Henry Flynt (1940) des artistes tels que Tenney ont commencé à Lorsque les Rolling Stone ont fait une interview s’attaquer aux principes de base de la musique, avec Young dans les années 1960, on pouvait Work Such That No One Knows What’s Going ils sont souvent arrivés à des résultats d’un style lire en gros titre : «Quand La Monte Young dit : On / One just has to guess whether this work exists très minimal. Les Postal Pieces de Tenney sont and if it does what it is like (1961) “Reprenez du début”, il veut dire : remontez à un parfait exemple de ce minimalisme expéri- mercredi dernier.» (Pièce telle que personne ne comprend ce qui se mental. Leur origine remonte à l’aversion de passe / Il faut seulement deviner si cette pièce leur auteur pour la rédaction des lettres. À la Ce soir le groupe interprétera un court segment existe et si oui, à quoi elle ressemble) place, celui-ci poste de courtes compositions au lui-même extrait d’un court segment de The dos de ses cartes postales. La dernière, Having Tortoise. Il n’y a pas de partition officielle – bien Parmi les premières pièces de La Monte Young Never Written a Note for Percussion (Sans jamais qu’il existe une table de fréquences et d’in- (et en particulier ses Compositions de 1960), avoir écrit une seule note pour percussion), est tervalles indéchiffrable correspondant à un nombreuses sont celles qui ont inspiré non écrite pour un percussionniste solo. L’interprète morceau de l’ouvrage. Le groupe a été aussi seulement le minimalisme musical à ses débuts a pour seules instructions d’entretenir un roule- loin que possible dans la récupération des sons mais aussi l’art conceptuel. L’affinité entre ces ment sur une seule note allant du quadruple et intervalles originaux, dont des septièmes deux mouvements est très lisible dans la colla- pianissimo au quadruple fortissimo et de jouer majeures et mineures de «taille variée», des 10 11
quintes justes, des octaves, des unissons et leurs musicale… Nous entrons là avec lui dans le monde inversions, des secondes majeures et mineures du microcosme sonore, où les intervalles deviennent ainsi que des quartes justes. Les tierces majeures des paysages où s’illumine chaque détail.» sont exclues. Voici ce qu’écrit Terry Riley : «Ce — qui émerge à l’écoute du bourdon amplifié et bien juste sculpté par La Monte est un monde molécu- Igor Toronyi-Lalic (2013) laire de sons dont les manifestations sont habi- Traduction : Delphine Malik tuellement couvertes par un ouvrage rythmique et Reproduit avec l’aimable autorisation de la mélodique sophistiqué. Si l’auditeur ou l’auditrice Philharmonie de Paris s’autorise une immersion plus profonde dans le son, son étonnement croîtra devant tous ces éléments qui fonctionnent naturellement sans l’aide d’une manipulation normale ou d’une interprétation Biographies Katia et Marielle Labèque © Brigitte Lacombe Katia et Marielle Labèque, piano expérimentale. Elles abordent le répertoire formation, produit, enregistre et mixe le second, Alexandre Maillard, guitare basse Katia et Marielle Labèque, deux sœurs pianistes, ancien en compagnie des English Baroque B for Bang. Rewires the Beatles, paru en janvier Alexandre Maillard est premier prix de compo- sont connues pour la fusion et l’énergie de leur Soloists, d’Il Giardino Armonico ou, récem- 2011. Le groupe s’est produit dans différents sition électroacoustique du conservatoire de duo. Filles d’Ada Cecchi (elle-même élève de ment, lors d’une tournée européenne avec festivals français et étrangers. David Chalmin Marseille, chanteur, et multi-instrumentiste Marguerite Long), elles ont connu une enfance l’Orchestre de l’Âge des Lumières et Sir Simon est également membre du groupe de rock brui- ayant officié au sein de divers groupes de rock immergée dans la musique. Nées à Bayonne, Rattle. Elles travaillent également avec les tiste/expérimental/improvisé Dimension X, et post-rock, notamment Astrid, Nation all Dust, elles ont rapidement développé une carrière compositeurs de leur temps tels Luciano Berio, qu’il forme avec le bassiste Massimo Pupillo et et depuis 2006, Phoebe Killdeer & the Short éblouissante, obtenant une renommée mondiale Pierre Boulez, Osvaldo Golijov, György Ligeti, le batteur Chris Corsano, et chanteur et guita- Straws dont il cosigne une partie du répertoire. avec Rhapsody in Blue de Gershwin (un des Olivier Messiaen ou Richard Dubugnon. Elles riste du groupe de rock alternatif Red Velvet Il compose par ailleurs depuis une dizaine d’an- premiers disques d’or de la musique classique). sont artistes associées de l’Auditorium-Or- avec Fabio Recchia. nées des bandes son pour le cinéma, la danse, chestre national de Lyon. le théâtre, et des formes pluridisciplinaires La liste des orchestres qui les ont accueillies est impressionnante : Orchestres philharmoniques Raphaël Séguinier, mêlant performance, vidéo, installations et arts de Berlin, Vienne et Los Angeles, Orchestres David Chalmin, guitare électrique, percussions plastiques. Il participe ainsi à la création de électronique, voix plusieurs spectacles avec la chorégraphe Barba- symphoniques de Londres, Chicago et Boston, Il commence l’étude des percussions à l’âge ra Sarreau, le collectif Irène avale un dé, La Orchestres de Cleveland et Philadelphie, Producteur, chanteur, guitariste et compositeur, de quinze ans, jouant sur les disques de ses Zouze/Cie Christophe Haleb, Mathieu ma fille Gewandhaus de Leipzig, Staatskapelle de Dres- David Chalmin est né à Chambéry en 1980. parents : les Beatles, Nirvana, les Rolling Stones, de, sous la direction de chefs comme Semyon Foundation et UPSBD. Depuis 2011, il porte et Il apprend tôt le piano durant cinq ans puis Pink Floyd. Trois ans plus tard, il signe son Bychkov, Sir Colin Davis, Gustavo Dudamel, réalise le projet KinG en qualité d’auteur-com- commence à jouer de la guitare électrique à premier album avec son propre groupe Polagirl, Charles Dutoit, Sir John Eliot Gardiner, Zubin positeur-interprète. quatorze ans. Il obtient en 2004 un MBA déli- dont le style mêle le post-rock à l’indie pop. Mehta, Seiji Ozawa, Esa-Pekka Salonen, Michael vré par l’Essec (École supérieure des sciences Dans le même temps, il commence à travailler Tilson Thomas… économiques et commerciales) avant de déci- avec différents artistes de la scène française, Interprètes majeures de la musique française der de se consacrer exclusivement à la musique. dont Orly, Villeneuve et Joseph d’Anvers. Arri- et américaine du xxe siècle, Katia et Marielle David Chalmin est depuis 2006 chanteur et vé à Paris en 2005, il entame une carrière de Labèque font de fréquentes incursions dans guitariste du groupe B for Bang (aux côtés de batteur de studio, et collabore avec des artistes l’univers du jazz et se produisent avec des musi- Katia Labèque), qui réinvente la musique des de la scène internationale (Émilie Simon, ciens issus du rock alternatif et de la musique Beatles. Il compose, arrange et coproduit Across Cocoon, Nouvelle Vague, Venus Gets Even et the Universe of Languages, le premier album de la Phoebe Killdeer). 12 13
RHÔNE-ALPES mAtiN L’iNfo, SERvicE Et SouRiRE comPRiS ! ZYGEL ET VOUS ! Crédit photos : Nicolas Robin SA. 28 MARS 16H : 10 BONNES RAISONS D’IMPROVISER AVEC JEAN-FRANÇOIS ZYGEL (ENTRÉE LIBRE) 18H : CONCERT PARTICIPATIF / ENSEMBLE ORCHESTRAL CONTEMPORAIN / J. F. ZYGEL, PRÉSENTATION Réservations sur auditorium-lyon.com 10h15 à voir et à revoir sur VOUS ÊTES AU BON ENDROIT rhone-alpes.france3.fr 14 15
Prochainement VE. 27 MARS 15H CONCERT EXPRESSO / HAPPY DAYS #4 SYMPHONIES EXPRESSO Orchestre des Pays de Savoie / Solistes de l’Orchestre des Pays de Savoie / Nicolas Chalvin, direction / François Castang, présentation — Joseph Haydn Symphonie n° 30, en ut majeur, Hob I/30, «Alleluja» / Wolfgang Amadeus Mozart Symphonie concertante pour violon, alto et orchestre KV 364 Tarif : 10 € SA. 28 MARS 18H ORCHESTRES INVITÉS ZYGEL ET VOUS Ensemble orchestral contemporain / Daniel Kawka, direction / Jean-François Zygel, piano et présentation — Karlheinz Stockhausen Tierkreis, pour hautbois, clarinette, percussions et basse électrique / Jean-François Zygel Concerto «ouvert» pour piano et ensemble / John Adams Son of Chamber Symphony / Jam session (improvisation) Tarif : de 10 € à 36 € / réduit : de 8 € à 31 € DI. 29 MARS 16H CONCERT PARTICIPATIF À VOS INSTRUMENTS Orchestre national de Lyon / Leonard Slatkin, direction — Samuel Barber Adagio pour cordes / Edvard Grieg «Dans la grotte du roi de la montagne», extrait de la suite n° 1 de Peer Gynt, op. 46* / Maurice Ravel Ma Mère l’Oye, cinq pièces enfantines / Giuseppe Verdi «Marche triomphale», extraite d’Aida* Gratuit * Pièces participatives JE. 2 AVRIL 20H / SA. 4 AVRIL 18H SYMPHONIQUE ONL MOZART MESSE EN UT Orchestre national de Lyon / Chœur Britten-Nicole Corti / María Espada, soprano I / Yetzabel Arias Fernandez, soprano II / Sarah Jouffroy, alto / Tilman Lichdi, ténor / Mathieu Gardon, baryton / Ton Koopman, direction — Wolfgang Amadeus Mozart Symphonie n° 40, en sol mineur, KV 550 – Grande Messe en ut mineur, KV 427 (version Koopman) Tarif : de 26 € à 56 € / réduit : de 8 € à 51 € VE. 3 AVRIL 12H30 CONCERT EXPRESSO KOOPMAN EXPRESSO Orchestre national de Lyon / Ton Koopman, direction / NN, présentation — Johann Sebastian Bach Concerto brandebourgeois n° 3, en sol majeur, BWV 1048 / Wolfgang Amadeus Mozart Symphonie n° 40, en sol mineur, KV 550 Tarif : 10 € Ton Koopman © Eddy Posthuma de Boer auditorium-lyon.com L’Auditorium-Orchestre national de Lyon est un établissement de la Ville de Lyon. Licences n° 1064009–1064010–1064011
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