Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")

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Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent!
           ("Microbiotagutbrain axis")

                             Pr Bruno Bonaz1,2

1. Clinique Universitaire d’Hépato-Gastroentérologie
2. Grenoble Institut des Neurosciences (GIN, INSERM U836). Equipe N°8 :
"Stress et Interactions Neuro-Digestives" (SIND, EA 3744), CHU Grenoble
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Relations Neuro-Digestives
     "Brain-Gut Axis"
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Relations neuro‐anatomiques

Système nerveux                                  Système nerveux
para‐sympathique                                   sympathique

  Tube Digestif

                                      SNI
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Axe
         neuro-endocrinien
            immunitaire

Bonaz B and Bernstein C
Gastroenterology 2013;144: 36-49
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Système
                           endocrine

        Axe                                      Système
    corticotrope                                 limbique
       (CRF)

                   Intégration                                 Réponse
                                                            comportementale
                     centrale               NTS
Afférences                             Moelle épinière
viscérales
                    Réflexes

    Réponse                              Neurones
  autonomique                           pré-moteurs
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Intégration centrale des stimuli périphériques

                                                 Rivest et al, 2000
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Relations neuro‐digestives :
        Colite au TNBS

Porcher et al. (2004)
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Voies de communication bi‐directionnelles entre microbiote et SNC

                          Cryan JF & Dinan TG. Nature Rev Neurosci 2012; 13: 701-712
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Microbiote intestinal

• Le microbiote colonise le TD peu de temps après la naissance et
  pour toute la vie
• 1014‐1015 bactéries soit 10‐100 fois plus que cellules eucaryotes de
  l’organisme (1013)
• Intervient dans les processus immunitaire, processus nutritionnel
  et autres aspects de la physiologie de l’hôte
• Structure‐fonctions microbiote mieux connues (physio‐patho)
• 1000 espèces bactériennes :
   – Firmicutes et Bactéroides = 75%
   – Protéobactéries, actinobacter, fusobacteries, verrucomicrobia
• Variations individuelles
• Microbiote influencé par : génétique, alimentation, âge, ATB,
  stress, géographie
Mon microbiote intestinal et mon cerveau communiquent! ("Microbiota gut brain axis")
Microbiota‐Gut‐Brain Axis : influence sur homéostasie normale et contribution
                           au risque de pathologie

                                  Foster JA & McVey Neufeld KA. Trends Neurosci 2013; 36:305-312
Stratégies utilisées pour étudier le rôle du microbiota‐gut‐brain axis

                            Cryan JF & Dinan TG. Nature Rev Neurosci 2012; 13: 701-712
Stress et Microbiote

• Lien entre microbiote et la réactivité de l’axe HPA avec réponse
   exagérée en corticostérone et ACTH chez animaux germ‐free (GF)
   soumis à un stress (Sudo N, 2004)importance du microbiote
   dans fonctions du SNC
• Microbiote joue un rôle à la fois dans la programmation de l’axe
   HPA tôt dans la vie et réactivité au stress au cours de la vie
• Système du stress est fonctionnellement immature à la naissance
   et continue de se développer pendant la période post‐natale,
   période qui coïncide avec colonisation bactérienne intestinale
• Stress de séparation maternelle néo‐natale chez rat :
 changements prolongés dans composition et diversité du
microbiote pouvant contribuer aux altérations prolongées réactivité
au stress et des modifications comportementales chez ces rats
Stress néo‐natal : modèle de séparation maternelle

• Entraine des modifications prolongées du système CRFergique
  central (Ladd CO, 1996)
• Entraine des modifications de plasticité neuronales
• Prédispose rats adultes à développer :
   – Hypersensibilité viscérale induite par le stress
   – Augmentation de la défécation sous stress
   – Dysfonction de la muqueuse intestinale sous stress
   – Augmentation de la sensibilité à colite expérimentale
   – Augmentation de la réponse de l’axe corticotrope
   – Anxiété
   (Coutinho SV, 2002; Gareau MG, 2006, 2007; Veenema AH, 2008)
Stress et perméabilité intestinale
                                  Bact ries                    Antig nes
                                                                                      CRF2

                                                                                     Cellules
                                                                                    pith liales

    Muqueuse
                                                                                      CRF1
    intestinale                                                 Mastocytes
                                      Cellule B
                          Cellule T                CRF

                                                                      CRF

                               Fibres nerveuses          ACh
                                                                            Granulocyte

                                 STRESS
La perméabilité intestinale est augmentée dans : SII, maladie cœliaque, MICI
• Correction des taux basals de corticostérone chez animaux MS
           ainsi que troubles de la motricité colique par probiotiques*
           (Lactobacillus sp) à la période précoce du stress (Gareau MG,
           2007)
         • Stress  augmentation de la perméabilité intestinale (Gareau
           MG, 2008)
         • Rats pré‐traités avec Lactobacillus farciminis diminue la
           perméabilité intestinale induite par stress de contrainte et
           prévient l’hyper‐réactivité de l’axe HPA (Ait‐Belgnaoui A, 2012)
         • Bactéries résidentes du TD peuvent activer les voies du stress via
           les afférences vagales : Campylobacter jejuni (Goehler LE, 2008)
           ou rodentium (Lyte M, 2006)

* « micro‐organismes vivants qui, lorsqu'ils sont ingérés en quantité suffisante, exercent des effets positifs sur la santé,
au‐delà des effets nutritionnels traditionnels ».
Expression cérébrale de c‐fos après injection intra‐caecale de C.jejuni

                                    Gaykema RPA et al. Brain Behav Immun 2004;18:238–245
Régions cérébrales activées par C.jejuni

                       Goehler LE et al. Brain Behav Immun 2008; 22: 354–366
• Animaux GF traités par Bifidobacterium infantis, E.Coli, ou E.Coli
  muté non pathogène  c‐fos dans le NPV (Sudo N, 2004) :
  Activation neuro‐immune dans ce modèle
 "bottom‐up signaling" entre bactéries commensales et
pathogènes et circuiterie centrale du stress
• Système nerveux intrinsèque (SNI) impliqué également,
  notamment les neurones sensitifs, premier point de contact avec
  le microbiote intestinal
• Ces neurones sensitifs sont moins excitables chez souris GF,
  normalisation après transplantation de microbiote souris
  standards (McVey Neufeld KA, 2009)
• Ces neurones sont plus excitables après ingestion de Lactobacillus
  rhamnosus (Kunze WA, 2009)
Microbiote intestinal et comportement

• Comportement rongeurs modifié quand on manipule la flore
  intestinale
• Comportement influencé par génétique  études réalisées chez
  différentes souches
• Impact des probiotiques sur le comportement objectivé chez de
  nombreuses souches animales (cf Tableau)
• Animaux GF  augmentation corticostérone à l’état basal mais,
  paradoxalement, réduction comportement d’anxiété, notamment
  dans l’EPM qui n’est pas corrélé au taux basal de corticostérone
• Reconstitution microbiote chez GF tôt dans la vie  normalisation
• Fenêtre critique dans développement où microbiote influence SNC
Elevated plus maze (EPM)
Microbiote et comportement

         Foster JA & McVey Neufeld KA. Trends Neurosci 2013; 36:305-312
Animaux GF ont une réduction du comportement d’anxiété : adolescence est une
   période critique où l’axe brain‐gut influence le comportement d’anxiété à l’état adulte

                                         Foster JA & McVey Neufeld KA. Trends Neurosci 2013; 36:305‐312
Effet des ATB sur microbiote

• ATB dans eau boisson  réduit significativement le microbiote et
  la diversité chez l’adulte, notamment en diminuant perméabilité
  intestinale et en diminuant l’inflammation (Gareau MG, 2011)
• Animaux sous ATB 7 j  réduction anxiété et augmentation du
  comportement exploratoire (Bercik P, 2011)
• ATB chez GF  pas de modification comportementale  rôle du
  microbiote
• Animaux GF reconstitués avec microbiote souris SPF Balb/C 
  augmentation du comportement d’anxiété (Bercik P, 2011)
• Inversement GF Balb/C reconstitués avec microbiote souris SPF
  Swiss Webster réduction du comportement d’anxiété identique
  à souris SPF Swiss Webster (Bercik P, 2011)
      Les différences de comportement sont associées avec des
       profils de microbiote différents
Influence des probiotiques sur comportement anxieux et dépressif

• L.rhamnosus chez souris male Balb/C  décroissance
  comportement anxiété et dépression dans l’EPM, test nage forcé
  et open field (Bravo JA, 2011)
• B.infantism chez rats adultes avec MS  diminution symptômes
  dépressifs; effets aussi observés sous antidépresseurs
  (citalopram) (Desbonnet L, 2010)
Effet infection et inflammation intestinale sur comportement

• Infection infra‐pathogénique à C.jejuni ou C.rodentium, en
  l’absence de modification immunitaire systémique 
  augmentation du comportement d’anxiété (Lyte M, 1998, 2006;
  Goehler LE, 2008)
• Expériences avec augmentation inflammation GI par Trichuris
  muris (Bercik P, 2010) ou modèle DSS (Bercik P, 2011) 
  augmentation comportement anxiété
• Dans ces 2 modèles, correction comportement après traitement
  par B.longum
 Etat inflammatoire influence le comportement
Rôle du microbiote dans les relations inflammation‐comportement anxiété

                               Foster JA & McVey Neufeld KA. Trends Neurosci 2013; 36:305-312
Gut‐brain axis et neurochimie

• Est‐ce que les changements comportementaux médiés par le
  microbiote sont la conséquence de changements prolongés des
  systèmes de signalisation centrale?
• Brain‐derived neurotrophic factor (BDNF)
   – Neurotrophine (facteur de croissance proche du Nerve Growth Factor,
     NGF), influence la survie et la différentiation neuronale, formation de
     synapses fonctionnelles (hippocampe), neuroplasticité pendant le
     développement et adolescence
   – Dans les modèles infectieux entrainant des altérations du microbiote
     intestinal  diminution ARNm du BDNF dans hippocampe associé à
     comportement de type anxiété
   – Restauration d’un comportement normal sous probiotiques associé à
     expression normale de BDNF (Bercik P, 2010, 2011)
   – Stress  diminue expression de BDNF dans hippocampe et restauration
     sous antidépresseurs (Dumand RS, 2006)
– Diminution ARNm BDNF hippocampe chez souris male GF par comparaison
    SPF alors que augmentation ARNm BDNF chez souris femelles  influence
    du sexe
• GABA
  – Neurotransmetteur inhibiteur important dans le SNC (contrebalance effets
    excitateurs du glutamate), dysfonctionnement lié à anxiété et dépression
  – Lactobacillus et Bifidobacterium capables de métaboliser glutamate pour
    produire GABA en culture (Barrett E, 2012)
  – Ingestion de L.rhamnosus, capable de modifier comportement
    anxiété/dépression, altère expression centrale de GABA dans régions
    impliquées dans le stress, effets "médiés" par nerf vague (effet vagotomie)
    (Bravo JA, 2011)
• 5HT :
   – Monoamine, servant de neurotransmetteur dans SNC (5% vs 95% TD).
     Implication dans les troubles de l’humeur
   – Souris GF : augmentation "turnover" 5HT et altération niveaux métabolites
     dans striatum, hippocampe (Heijtz RD, 2011; Clarke G, 2012)
Impact du microbiote intestinal sur l’axe gut-brain dans des conditions normales et
                                  pathologiques

                                   Cryan JF & Dinan TG. Nature Rev Neurosci 2012; 13: 701-712
Homologie des barrières

          Savidge TC et al. Laboratory Investigation 2007; 87:731–736
Role du microbiote dans pathologie impliquant le SNC

• Douleur viscérale
   – Hypersensibilité viscérale dans le syndrome de l’intestin irritable (SII)
   – Probiotiques de type Lactobacilli et Bifidobacteria peuvent atténuer
     douleur viscérale induite par le stress et le SII (Verdu EF, 2006; McKernan
     DP, 2010; Ait‐Belgnaoui A, 2006; Johnson AC, 2011; Clarke G, 2012)
   – Tillisch K (2013) : ingestion mélange probiotiques pendant 4 semaines chez
     volontaires sains (femmes) modifie activité de régions cérébrales
     impliquées dans le contrôle central des émotions‐sensations
   – Mécanisme mixte : neuro‐endocrinien‐immunitaire
A resting‐state midbrain centered network has strong positive correlation with midbrain emotional
reactivity after No‐Intervention, is not engaged after Control, and is negatively correlated with
midbrain activity after FMPP. This suggests a shift away from an arousal‐based resting‐state network
and toward a regulatory network.

                                                         Tillisch K et al. Gastroenterology 2013; 144:1394‐1401
• Autisme
   – Symptômes GI fréquents dans autisme  implication du microbiote ? (de
     Ttheije CG, 2011)
   – Anomalies de la composition du microbiote dans l’autisme (Williams BL,
     2012; Finegold SM, 2010)
   – Mais utilisation fréquente d’ATB dans autisme et régime alimentaire
     différents  influence sur microbiote
   – Alteration concentration fécale des AGCC () dans l’autisme (Wang L, 2012)
   – Injection icv d’AGCC chez animal  comportement de type autistique
     (Thomas RH; MacFabe DF, 2011)
   – Apport d’un traitement par vancomycine dans l’autisme (Sandler RH, 2000)
Schematic representation of the proposed role of non‐allergic mast‐cell activation in gut–
            blood–brain‐barrier permeability and autism spectrum disorders

                                                      Theoharides TC et al. Trends Pharmacol Sci 2008
• Obésité
   – Souris GF : ont moins de masse graisseuse totale et sont résistantes à
     obésité induite par alimentation (Backhed F, 2007)
   – Relation composition microbiote et obésité chez l’Homme (Turnbaugh PJ,
     2009)
• SEP
   – Microbiote pourrait avoir un rôle dans SEP?
   – Induction expérimentale d’une encéphalomyélite auto‐immune est
     atténuée chez souris GF (Lee YK, 2011; Berer K, 2011)
Probiotiques et troubles comportement chez l’Homme

• Etude RCT, double aveugle, vs placebo volontaires sains traités
  par L.helveticus et B.longum R0175 ou placebo 30 j
• Questionnaires stress‐anxiété‐dépression‐coping
• Moins de détresse psychologique chez sujets traités vs placebo
  (Messaoudi M, 2011)
• Autre étude volontaires sains nourris avec solution lactée
  contenant probiotique ou placebo pdt 3S  amélioration
  significative des symptômes chez sujets scorant 1/3 inf des
  troubles de l’humeur (Benton D, 2007)
• Sujets avec syndrome de fatigue chronique recevant L.casei
  pendant 2 mois  moins d’anxiété que placebo (Rao AV, 2009)
      intérêt cibler microbiote intestinal dans troubles humeurs et
       l’anxiété mais aussi SII‐MICI
Effet anti-inflammatoire du nerf
 vague : Voie cholinergique anti-
 inflammatoire

Le stress inhibe le nerf vague et stimule le
sympathique (Wood SK & Woods JH. Expert
Opin Ther Targets 2007;11:1401-1413)
 Rôle pro-inflammatoire

Bonaz B and Bernstein C
Gastroenterology 2013;144: 36-49
Neurostimulation vagale (NSV) dans la maladie de Crohn

•   NSV approuvée :
     – 1994 : traitement épilepsie réfractaire
     – 2001 : traitement dépression pharmaco-résistante

•   Paramètres de stimulation du nerf vague gauche
    (afférences) dans l’épilepsie et la dépression
     – 20-30 Hz
     – 0,5 à 1,5mA
     – 30 sec ON, 5 min OFF
•   Paramètres de stimulation du nerf vague (efférences)
    gauche (5 Hz) à visée anti-inflammatoire dans un
    modèle de colite expérimentale au TNBS (Meregnani
    J, 2011)

•   Effet anti-inflammatoire de la NSV dans la maladie de
    Crohn (AAP translationnel INSERM-DGOS 2011)
•   Projet européen Horizon 2020 avec étude notamment
    de l’effet de la NSV sur le microbiote intestinal

                                                Bonaz B et al. Neurogastroenterol Motil 2013;25:208-21
Conclusions

• Importance du microbiote intestinal dans les fonctions du cerveau
• Stress influence microbiote intestinal et communication bi‐
  directionnelle entre microbiote et SNC influence la réactivité au
  stress
• Influence de la dysbiose intestinale sur maladies mentales
• Intérêt de cibler le microbiote pour prévenir et traiter désordres
  induits par le stress (anxiété, dépression) et autres pathologies
Je vous remercie pour votre attention
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