PEUT-ON DÉFINIR LA POÉSIE ?
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PEUT-ON DÉFINIR LA POÉSIE ? INTRODUCTION Peut-on en quelques lignes se prononcer sur la définition ou la structure fondamentale de la poésie ? Tout le monde est vraisemblablement d’accord sur un point à savoir que la question est à la fois simple et complexe. Aussi une certaine élégance, justifiée par la prudence et la modestie scientifiques, serait d’éviter un exposé définitoire systématique et de supposer que la poésie est une évidence dont on n’a plus qu’à parler directement selon l’aspect de son choix. Or la didactique, dont la poésie est aussi l’objet, a parmi ses méthodes fondamentales la définition. Celle-ci doit permettre d’introduire la question concernée en commençant par en donner la nature spécifique délimitée avec autant d’exactitude que possible. Pour tenter une approche définitoire de la poésie, nous proposons d’examiner d’abord les difficultés que pose sa définition elle-même. Et pour en atténuer les obstacles tout en répondant au souci pédagogique, nous procéderons à quelques sondages dans les acceptions communes d’une part et dans les conceptualisations des spécialistes d’autre part. Enfin nous mettrons en évidence quelques points de synthèse qui peuvent servir de repères à l’apprenant voire au chercheur. 1. DIFFICULTÉS DE LA DÉFINITION DE LA POÉSIE La définition de la poésie est une source de divergences multiformes. Elle engendre des débats apparemment interminables qui se focalisent tantôt sur la forme, tantôt sur les thèmes, tantôt sur le sujet-poète… Pour les uns, la poésie est une affaire de technique verbale, pour d’autres, c’est une force qui jaillit du génie. Beaucoup de poètes, de critiques et de poéticiens refusent de sauter dans l’arène des définitions. Ils pensent qu’il vaut mieux vivre la poésie par la création et la lecture de ce qu’on ressent soi-même comme étant poétique. Ou encore il faut s’en remettre à certaines institutions littéraires qui ont l’air de se faire les garants de la poéticité. De nombreux ouvrages (essais, manuels, dictionnaires) de poétique, de rhétorique, de stylistique et de critique n’accordent pas de place à une définition systématique de la poésie dont ils traitent cependant. La polémique définitionnelle de la poésie a tout de même un avantage : c’est la richesse des écoles poétiques. Elles naissent des débats ou des prises de position particulières qui réalisent des créations poétiques exceptionnelles. L’histoire littéraire semble d’ailleurs se construire prioritairement sur cette alternance ou cette opposition des points de vue affirmés qui veulent nier ou dépasser d’autres (poésie des rhétoriqueurs, poésie classique, romantique, parnassienne, symboliste, surréaliste…). 45
PEUT-ON DEFINIR LA POESIE ? Finalement la poésie serait-elle vraiment « un je ne sais quoi » ? Nous nous y refusons et commençons par interroger l’opinion commune sur la question. 2. DÉFINITIONS DE NON SPÉCIALISTES OU DÉFINITIONS COMMUNES DE LA POÉSIE Nous entendons par définitions de non spécialistes ou définitions communes, celles de l’opinion populaire ou du bon sens d’une part et celles des dictionnaires de langue d’autre part car ils sont le reflet de l’usage de la communauté linguistique. 2.1. Le bon sens En fait, tout un chacun, sensible à la poésie, en a une définition tacite et intuitive. Le phénomène poétique est universel et très naturel. Il est alors le fait de tout homme normal. La poésie savante – d’ailleurs minoritaire dans l’ensemble des manifestations poétiques humaines – réalisée par des virtuoses et expliquée par des experts, tend à occulter cette vive réalité sans pouvoir l’invalider. Que dit le bon sens, la chose la mieux partagée ? Pour lui, la poésie relève de l’expression qui émeut par sa beauté. Et quand elle veut entrer dans l’arène des spécialistes dont elle n’a pas maîtrisé les arcanes, l’opinion populaire identifie la poésie à la parole en vers ; cela confirme toujours l’idée fondamentale d’une expression non banale. 2.2. Les dictionnaires de langue Il est intéressant d’interroger les dictionnaires de langue. Nous retenons le Littré, le Larousse et le Robert qui nous paraissent assez représentatifs des multiples œuvres lexicographiques du français. 2.2.1. La poésie : un univers d’émotions esthétiques Les dictionnaires dégagent un premier sens général du mot poésie, celui d’émotions esthétiques. Tout ce qui relève de « ce qu’il y a d’élevé » (Littré) ou « de ce qui touche la sensibilité » (Larousse) ou de ce qui peut « éveiller » en l’homme « l’état poétique » (Robert) , tout cela c’est de la poésie qu’on peut trouver dans les choses et les êtres outre dans la poésie des poèmes. C’est ainsi qu’on parle aisément de la poésie d’un coucher de soleil ou d’un paysage. « Univers d’émotions esthétiques », c’est l’extension la plus large du mot « poésie ». Un deuxième emploi concerne l’émotion esthétique appliquée aux arts. Les dictionnaires reconnaissent que la poésie et les arts partagent les mêmes qualités. Un poème, c’est un ensemble de « propriétés essentielles à cet art, qui peuvent se manifester dans toute œuvre d’art » (Robert). Évidemment le troisième emploi de poésie, celui qui intéresse directement les littéraires, c’est un art verbal qui se manifeste particulièrement dans le poème. C’est l’ensemble des « qualités qui caractérisent les bons vers » (Littré). C’est en d’autres termes plus larges « l’art du langage » (ibidem) qui arrive à éveiller les émotions esthétiques. Le sens d’« univers d’émotions esthétiques » qui se subdivise ainsi en trois plans distincts prend en compte le volet pragmatique de la poésie, c’est-à-dire la relation 46
ANALYSES du sujet à son langage : il s’agit des sentiments de l’émetteur et/ou du récepteur, point de départ et point d’arrivée de la poésie. 2.2.2. La poésie : un art et une technique Un deuxième sens général de la poésie, après celui d’univers d’émotions esthétiques, relève de l’art et de la technique qui la caractérisent. Le Littré, le Larousse et le Robert font une équivalence entre la poésie et le vers éminemment conçu comme un art et une technique. La poésie pour le Littré c’est l’« art de faire des vers » ou « versification »1. Et dans le Larousse on lit : « Œuvre, poème en vers ». La technique de la poésie ou du vers c’est un emploi particulier de la langue : -« Art de combiner les sonorités, les rythmes, les mots d’une langue pour évoquer des images, suggérer des sensations, des émotions » (Larousse). - « Art du langage, visant à exprimer ou suggérer quelque chose par le rythme, l’harmonie et l’image » (Robert). Pour le Littré, rendant compte surtout de la période classique, la technique poétique est le fait du vers par excellence et pour le Larousse et le Robert qui privilégient les époques moderne et contemporaine, la technique poétique concerne toujours le vers mais est présentée d’abord comme un « art du langage » (Robert) qui vise à combiner les éléments d’une langue pour produire l’émotion esthétique. 3. DÉFINITIONS DE LA POÉSIE PAR DES SPÉCIALISTES Après les définitions communes, examinons celles des spécialistes à travers l’étymologie, la poétique aristotélicienne, la stylistique de l’écart et la théorie de la communication. Ces points de sondage nous paraissent avoir le mérite de joindre diachronie et synchronie et d’allier écart et immanence. 3.1. L’étymologie de « poésie » Selon Baumgartner et Ménard (1996), le mot « poésie » aurait vu le jour au XIVe siècle. Il découle du latin « poesis »(=poésie) venant lui-même du grec « poiesis » (=création, composition d’œuvres poétiques) dérivé de « poiein » (=fabriquer, composer un poème). Dès son origine au XIVe siècle le mot « poésie », toujours selon Baumgartner et Ménard, signifiait « pièce de vers » et « art de faire des vers ». À partir du XVIe siècle, par extension, le terme aura aussi les sens suivants : « inspiration, sentiment poétique » et « ce qui suscite une émotion poétique ». 3.2. La poésie aristotélicienne Dans son livre Poétique (1977), Aristote présente la poésie comme étant un phénomène naturel qui prend racine dans l’instinct humain d’imitation. L’art et l’émotion esthétique s’expliqueraient par l’imitation. L’importance de la question nous paraît justifier la longueur de l’extrait : 1 La mise en relief de certains passages de citation est faite par nous. 47
PEUT-ON DEFINIR LA POESIE ? « La poésie semble bien devoir en général son origine à deux causes, et deux causes naturelles. Imiter est naturel aux hommes et se manifeste dès leur enfance (l’homme diffère des autres animaux en ce qu’il est très apte à l’imitation et c’est au moyen de celle-ci qu’il acquiert ses premières connaissances) et, en second lieu, tous les hommes prennent plaisir aux imitations. Un indice est ce qui se passe dans la réalité : des êtres dont l’original fait peine à la vue, nous aimons à en contempler l’image exécutée avec la plus grande exactitude ; par exemple les formes des animaux les plus vils et des cadavres. Une raison en est encore qu’apprendre est très agréable non seulement aux philosophes mais pareillement aussi aux autres hommes ; seulement ceux-ci n’y ont qu’une faible part. On se plaît à la vue des images parce qu’on apprend en les regardant et on en déduit ce que représente chaque chose, par exemple que cette figure c’est untel. Si on n’a pas vu auparavant l’objet représenté, ce n’est plus comme imitation que l’œuvre pourra plaire, mais à raison de l’exécution, de la couleur ou d’une autre cause de ce genre. L’instinct d’imitation étant naturel en nous, ainsi que la mélodie et le rythme (car il est évident que les mètres ne sont que des parties des rythmes) dans le principe ceux qui étaient le mieux doués à cet égard firent petit à petit des progrès et la poésie naquit de leurs improvisations ». 3.3. La poésie selon la stylistique de l’écart 3.3.1. Le langage lyrique opposé au langage logique Il existe une définition de la poésie, par opposition de deux types de langage, relevant de la logique de l’écart et à laquelle on recourt depuis l’époque classique. Voici ce qu’en dit Pierre Guiraud dans Essais de stylistique (1969) : « Prose et poésie – et ces deux mots désignent ici le langage logique opposé au langage lyrique sous leurs formes limites et « pures », - prose et poésie constituent deux états autonomes, voire, antinomiques du discours ; et « la poésie n’est pas (selon la définition de Paul Valéry) un accident de la substance de la prose », mais un mode d’expression spécifique ». 3.3.2. Poésie pure et poème abstrait Cette opposition langage logique/langage lyrique va donner lieu aux concepts de « poésie pure » et de « poème abstrait » particulièrement à partir du XIXe siècle. Voici ce qu’en dit Henri Morier (1961) : « Est poésie pure, dans un poème réalisé, en vers ou en prose poétique, tout ce qui contribue, indépendamment du sens des mots, à recomposer chez le lecteur l’enchantement du poète. L’énoncé des idées, leur enchaînement, les comparaisons même, toutes choses qui peuvent être immédiatement et sans effort traduites en prose ordinaire ou dans une langue étrangère quelconque, constituent l’impur ». « Poème abstrait se dit d’un poème dont la valeur artistique tient essentiellement aux sonorités qui le composent. Dans un poème ordinaire, la description ou la narration le disputent à la musique du langage et absorbent une part de l’attention. En enveloppant de mystère la signification des mots, le poète 48
ANALYSES cesse d’imposer à l’esprit du lecteur une pensée arrêtée ; l’attention se reporte sur les valeurs substantielles de la parole – timbre, durée, intensité, mélodie – qui filtrées, abstraites de l’ensemble brut du langage, nous livrent un message poétique épuré, délivré de l’insistance sémantique propre à la prose. Ainsi ne sont retenues que les valeurs sensibles à l’oreille, une parole rythmée, symbolique et chantante ». 3.4. La poésie et la théorie de la communication Après une vision de la stylistique de l’écart, nous passons à présent à une autre qui relève de la stylistique de l’immanence : Roman Jakobson s’est intéressé à la configuration de la poésie dans le jeu du système de la communication linguistique. Il est parti de la question suivante : « Qu’est-ce qui fait d’un message verbal une œuvre d’art ? »(1963). Pour lui « la poésie est un art verbal et c’est donc l’emploi particulier de la langue qu’elle implique en premier lieu » (1973). Cet emploi particulier de la langue découle de l’organisation des langues naturelles autour de six fonctions correspondant aux différents facteurs de la communication linguistique. Ces facteurs forment un système dans le schéma de la communication ci-dessous présenté. Code (langue) Contact Contact Destinateur Message (texte, Destinataire (émetteur, auteur) énoncé, œuvre) (récepteur, (Véhicule, canal) auditeur, lecteur) Contexte (contenu, sujet, idée, thème) Aus facteurs correspondent Les fonctions ↓ ↓ 1. Destinateur 1. Émotive 2. Destinataire 2. Conative 3. Contexte 3. Référentielle 4. Contact 4. Phatique 5. Code 5. Métalinguistique 6. Message 6. Poétique La spécificité de chaque fonction réside dans l’accent que la communication met sur le facteur correspondant. Chacune des fonctions peut être prédominante dans l’acte de communication. La fonction poétique qui peut être présente dans n’importe quelle parole (comme les autres fonctions) est prédominante dans la poésie qu’elle caractérise. La fonction poétique, c’est l’accent mis sur le message en tant que tel, la visée du message pour lui-même. Et notons bien que message ici signifie texte, énoncé, œuvre… et non contenu, thème ou idée. Cette visée du message fait que l’œuvre poétique est un texte qui s’impose à l’esprit et à la mémoire. Le message plaît pour lui-même quand bien même sa mission informative est faible. Le texte dont la fonction poétique est prédominante demeure et celui dont la fonction référentielle constitue l’essentiel quitte la mémoire automatiquement après usage. 49
PEUT-ON DEFINIR LA POESIE ? 4. DES POINTS DE SYNTHÈSE 4.1. Continuité définitoire Un sens général du terme de « poésie » englobe d’une part la poésie littéraire, celle des mots et d’autre part la poésie de tous les êtres, de toutes les choses et de tous les arts qui provoquent l’émotion esthétique. Ici nous nous intéressons particulièrement à la poésie réalisée par l’usage de la langue. Et chaque fois que nous emploierons le terme poésie, ce sera dans ce sens spécifique. Les définitions et la présentation des structures fondamentales de la poésie vont des énoncés lapidaires aux exposés les plus complexes, de l’intuition populaire à la conceptualisation savante. Contrairement à ce qu’on pourrait penser a priori, elles ne paraissent cependant pas se détruire les unes les autres. Les secondes sont dans l’ensemble des explicitations des premières. Ainsi « l’imitation » d’Aristote, en tant que faire, rejoint la définition des dictionnaires selon laquelle la poésie est un art. Elle est également en accord avec l’idée fondamentale d’émotion esthétique par la mise en évidence du plaisir naturel que les hommes éprouvent en imitant. Les notions de « poésie pure » ou de « poème abstrait » par leur insistance sur « les valeurs substantielles de la parole » sur la « musique du langage » développent le point de vue général des dictionnaires selon lequel la poésie est une technique dont les matériaux sont la langue. On a pu remarquer l’insistance de Jakobson sur ce point. 4.2. Quelques mots clés indicatifs Les différentes définitions nous permettent de retenir quelques mots clés de la notion de poésie. S’ils ne sont pas exhaustifs, ils nous semblent comporter l’avantage d’être très indicatifs et très représentatifs et de constituer des nœuds susceptibles de générer des enchaînements de termes et de concepts de plus en plus spécifiques. Et chacun constitue un thème de réflexion sur la nature de la poésie. Dans l’ordre alphabétique nous avons : - art - plaisir aux imitations - création - rythme - émotion esthétique - sonorités - enchantement - technique - exécution - valeurs substantielles de la parole - fabrication - vers - images - visée du message - imitation - mélodie - mémorisation - mot - musique du langage Une organisation de ces mots clés en un champ lexical ci-dessous présenté est déjà une entrée dans le sens de la poésie. 50
ANALYSES POÉSIE : Mots clés Produit textuel spécifique Charge affective spécifique Faire Structure Beauté Affectivité a) Méthode a) Généralité - émotion esthétique - art - musique du langage - plaisir aux imitations - technique - valeurs substantielles - enchantement de la parole - mémorisation - visée du message b) Action - création b) Éléments - fabrication - mot - imitation - rythme - exécution - sonorités - mélodie - images - vers 4.3. Commentaire du champ lexical des mots clés L’intégration de ce champ lexical impose quelques constats : les thèmes que constituent ces mots clés représentatifs du concept de poésie selon les définitions que nous avons parcourues à titre de sondage se présentent comme il suit. La poésie est un produit textuel spécifique ; cette spécificité se dégage du faire du poète, conjonction d’une méthode (faite de technique artistique) et d’une action créatrice qui fait du poète un artisan d’une structure de mots dont la nature spécifique, ensemble de « valeurs substantielles de la parole » se constitue à partir des rythmes, des sonorités, de la mélodie, des images et des vers. La poésie est aussi une charge affective spécifique, conséquence du produit textuel spécifique qui la caractérise. La flèche dans le tableau du champ lexical est la traduction de cette relation de cause à effet. La charge affective elle- même se décompose en deux sous-thèmes : la beauté et l’affectivité. Les définitions présentent les données de cette dernière par des termes généraux dont la description ne semble pas s’imposer ou ne semble pas pouvoir se réaliser avec les termes de la poétique. On remarquera que la beauté ne s’explique pas autrement que comme une coïncidence avec la structure qui résulte du faire du poète. 51
PEUT-ON DEFINIR LA POESIE ? Les quatre sous-thèmes faire, structure, beauté et affectivité ont une relation continue de causes à effets marquée par des flèches dans notre tableau où un effet devient cause pour provoquer un autre effet. Ainsi le faire du poète produit la structure particulière du poème, laquelle engendre la beauté dont découle la réaction de l’affectivité du lecteur ou de l’auditeur. Cet enchaînement répond au réseau des faits qui constituent l’objet de ce que Charles Bally appelle la stylistique : « La stylistique étudie […] l’expression des faits de la sensibilité par le langage et l’action des faits de langage sur la sensibilité (1951). » CONCLUSION L’impression d’une infinité de visages de la poésie pourrait faire conclure à l’impossibilité de pouvoir en donner des fondements structurels à partir desquels on pourrait la définir. Cependant la poésie est l’objet de connaissance intuitive de tous et objective de nombreux spécialistes. Ces derniers, malgré tous les renouvellements théoriques qu’ils déploient, ne semblent pas se contredire. Ils justifient, précisent et conceptualisent ce qui est déjà senti par tous, ce qui a déjà fait l’objet de déclarations intuitives de poètes et d’amateurs de poésie. C’est ce que soulignent Daniel Delas et Jacques Filliolet (1973) : « Comme c’est généralement le cas, les affirmations des poètes et des artistes ont précédé les démonstrations des linguistes, ce qui est naturel puisque la tâche de ces derniers est, dans un premier temps, de déterminer les conditions de possibilité de l’approche scientifique d’un phénomène nouveau qu’il faut d’abord définir et, dans un second temps, de vérifier le bon fonctionnement des concepts de leurs discours descriptif et didactique. C’est pourquoi il est toujours possible de trouver des affirmations prémonitoires d’une mise en question de la doctrine universitaire. Ainsi, dès 1857, Baudelaire écrivait-il à la suite d’Edgar Poe : « La Poésie (…) n’a pas d’autre but qu’Elle-même ». Quels que soient les développements théoriques des spécialistes de la poésie, elle apparaît comme une expression linguistique très technique et très artistique, source de très fortes émotions esthétiques. La poésie se réalise avec des mots comme la peinture s’effectue avec des couleurs et des lignes. Louis MILLOGO Université de OUAGADOUGOU BIBLIOGRAPHIE Aquien Michèle, 1993, Dictionnaire de poétique, Librairie Générale Française, Paris. Aristote, 1977, Poétique, Société d’édition « Les belles lettres », Paris (texte établi et traduit par J. Hardy). Bally Charles, 1951, Traité de stylistique française, Georg et Cie S.A. Genève, Klincksieck, Paris (1e éd. 1909). Baumgartner Emmanuèle, Ménard Philippe, 1996, Dictionnaire étymologique et historique de la langue française, Librairie Générale Française, Paris. Delas Daniel, Filliolet Jaques, 1973, Linguistique et poétique, Larousse, Paris. Guiraud Pierre, 1969, Essais de stylistique, Édition Klincksieck, Paris. Jakobson Roman, 1963, Essais de linguistique générale, Éditions Seuil, Paris. Jakobson Roman, 1973, Questions de poétique, Seuil, Paris. Morier Henri, 1975, Dictionnaire de poétique et de rhétorique, PUF, Paris (1e éd., 1961). 52
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