Rapport demandé par Madame Roselyne Bachelot Narquin, Ministre de la santé et des sports.
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Rapport demandé par Madame Roselyne Bachelot Narquin, Ministre de la santé et des sports. MISSION CONCERNANT LA PROMOTION ET LA MODERNISATION DES RECRUTEMENTS MEDICAUX A L’HOPITAL PUBLIC. Rédigé par Elie Aboud, François Aubart, Alain Jacob, Bruno Mangola et Didier Thévenin. 23 juillet 2009
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SOMMAIRE Lettre de mission…………………………………………………………………………………...2 Préambule………………………………………………………..…………………………………7 Exercice médical hospitalier ou libéral : les conditions d’un nouveau déterminisme…………8 L’illisibilité du temps médical et du temps de travail…………………………………….9 Les rémunérations médicales à l’hôpital…………………………………………………13 Pourquoi le changement est urgent et nécessaire ? …………………………………………….16 Dix propositions pour la promotion des recrutements médicaux à l’hôpital …………………18 1 – Pour la mission, la promotion des recrutements est à initier dès le deuxième cycle des études médicales et à concrétiser dès le troisième……………………………19 2 - Une politique promotionnelle et contractuelle tournée vers les chefs de clinique assistants mérite d’être engagée………………………………………………………… 19 3 - L’équipe hospitalière base de l’identité hospitalière……………………………… 20 4 - Modularité de la carrière et autonomie………………………………………………21 5 - Constituer des équipes de grande taille………………………………………………22 6 - Refonder les règles d’organisation du travail à l’hôpital…………………………… 22 7 – Moderniser les modes de rémunérations médicales à l’hôpital ……………………24 8 - Développer une gestion prévisionnelle des emplois et compétences…………… 25 9 - La performance à l’hôpital, ni culte ni tabou……………………………………… 27 3
10 - Etablir des conditions de travail renouvelées dont un libre choix volontaire…….29 de la base de la quotité de travail Quelle déclinaison pour le clinicien et le praticien hospitalier ?................................................30 Conclusions……………………………………………………………………………………… 35 Personnalités auditionnées…………………………………………………………………..…..36 Documents consultés…………………………………………………………………………….39 « Approfondir ce qui se joue dans les failles, les défauts, les défaillances, les deuils de la perfection, les catastrophes évitées de justesse, les lapsus, les contresens. » François Laplantine (Réflexion sur l’imperfection) 4
Hier, il y avait bien peu de contraintes financières ; il n’y avait pas d’organisation ni de schémas régionaux ; il n’y avait pas de projets d’établissement; il n’y avait pas de crise démographique; le nombre des spécialités médicales était relativement limité ; il n’y avait ni évaluation ni certification ; on ne comptait pas son temps. Aujourd’hui l’action des médecins et des pharmaciens des hôpitaux s’inscrit dans un environnement territorial et régional formalisé. Il existe de fortes contraintes sanitaires, démographiques et économiques durables. L’évaluation et la formation continue se développent de façon organisées. Les maladies chroniques et le vieillissement comme les biotechnologies supposent un rôle renouvelé de l’hôpital. 5
Ce constat, partagé par le plus grand nombre, impose le mouvement. Pérenniser le statut quo c’est priver l’hôpital du niveau d’excellence de ses recrutements médicaux que justifie ses missions. 6
Préambule Les rédacteurs de ce rapport sont tous praticiens hospitaliers expérimentés. Ils disposent d’une expérience clinique professionnelle large. Ils sont fortement impliqués dans les responsabilités institutionnelles et le dialogue social. Ils ont, au cours des auditions de la mission, entendu tous ceux qui, quelle que soit leur expérience, contribuent au fonctionnement quotidien de l’hôpital public. Les rédacteurs ont rassemblé, comme la lettre de mission le leur demandait, des analyses, des préconisations et des réserves, ainsi que de nombreux rapports sur ce thème. De cette écoute et de cette expérience, la mission a retenu que le sujet de la promotion et la modernisation des recrutements médicaux à l’hôpital public constitue à la fois l’enjeu essentiel et le lieu de plus grande fragilité du projet hospitalier au service des malades. Si les solutions à la crise d’attractivité et la crise identitaire, mise en avant dans ce rapport sont en partie techniques, la mission considère que le basculement en cours du contrat social à l’hôpital impose une action politique formalisée forte, rapide et visible pour renouveler les conditions d’attractivité médicale à l’hôpital. 7
Exercice médical hospitalier ou libéral : Les conditions d’un nouveau déterminisme. Jusque dans les années 80, quatre sur cinq des chefs de clinique et assistants formés dans les universités médicales françaises choisissaient l’exercice hospitalier. Cette proportion s’est progressivement renversée. Actuellement, une large majorité des chefs de clinique choisissent un exercice libéral. «Le clinicat prépare à l’exercice médical en ville » telle est l’affirmation que la mission a entendue lors d’une de ses auditions. Comment en est-on arrivé là ? Quels manquements dans les liens de découverte, de compagnonnage et de motivation se sont modifiés dans la vie hospitalière des étudiants de 2ième et 3ième cycle ? Quelles ruptures dans les perspectives de carrière, dans la constitution d’un projet individuel et collectif, se sont-elles produites? Quelle est la part de la déstructuration du rapport au travail des hospitaliers, introduite par la réduction du temps de travail ? Quels déterminants réels ou supposés dans les profils de carrière en ville comme à l’hôpital ont provoqué cette bascule délétère pour la qualité et l’équilibre du système de santé aujourd’hui et demain ? La mission s’est attachée à répondre à ces questions et à formuler sur la base de cette analyse un ensemble de propositions cohérentes. L’augmentation inéluctable et significative des prises en charge des patients atteints de maladies chroniques et liées aux pathologies de vieillissement justifient en soi une nouvelle organisation territoriale rapprochant la médecine hospitalière et la médecine de ville. Pour autant, parce que l’essentiel des missions de service public repose et reposera sur l’hôpital, la pérennité du système nécessite que les mieux formés d’une nouvelle génération choisissent, l’exercice hospitalier. Parce qu’il s’agit d’un enjeu essentiel pour l’équilibre de notre système de santé, la mission souhaite que l’un des indicateurs de réussite ou d’échec des mesures mises en œuvre, porte sur le suivi de la proportion des chefs de clinique assistants optant pour un exercice hospitalier. 8
L’illisibilité du temps médical et du temps de travail disponible à l’hôpital public : « A-t-on le nombre de professionnels médicaux suffisant ? Pour quelle organisation ? ». En 1984, le corps des praticiens hospitaliers était constitué de 16.000 praticiens temps plein (PH). Le nombre de praticiens hospitaliers a atteint 22.738 en 2002 et 34.068 en 2009, soit une augmentation de 49,8% sur les sept dernières années. Dans le même temps, le nombre des praticiens des hôpitaux, temps partiel, est passé de 5.840 en 2002 à 5.676 en 2009 soit une diminution de 2,81% (source CNG. . Trois causes essentielles ont conduit au développement considérable du nombre de poste de praticien hospitalier : La réduction du temps de travail et la mise en œuvre de la directive 93/104 sur l’intégration des gardes dans le temps de travail : mise en place dans la précipitation au moment même où les capacités de formation étaient réduites par l’impact du numerus clausus, la RTT s’est accompagnée, au départ, de la création de 3000 postes médicaux. Mais ces créations n’ont pas été suffisantes. Au 15 septembre 2008, après paiement de 562 194 jours de RTT (accord du 15 janvier 2008) il restait 1.118.093 jours épargnés sur les comptes épargne des praticiens (source CNG). L’émergence de certaines spécialités: Depuis la création du statut de praticien hospitalier, deux spécialités médicales majeures ont émergé : la médecine d’urgence et la médecine gériatrique. Pour ces deux seules spécialités qui n’existaient pas en 1984, le corps des praticiens hospitaliers comptait en 2008, 2713 médecins urgentistes et 1408 médecins gériatres (source CNG). Les variations considérables des flux des internes : Avec un numerus clausus à 3500 au début des années 2000, le nombre des internes avait été diminué par 2 par rapport à ce qu’il était dix ans auparavant. Pour palier cette insuffisance de « juniors » dans les années 90, les hôpitaux ont recruté des médecins à diplôme étranger. Ceux-ci, faisant d’abord fonction d’internes, sont ensuite, pour beaucoup, devenus praticiens adjoints contractuels (PAC). L’essentiel des 7500 praticiens adjoints contractuels ont été ensuite intégrés par transformation de leur poste dans le corps des praticiens hospitaliers. En 2009, suivant l’élévation régulière du numerus clausus, le nombre des internes atteint 5700. En 2006, il y avait 15 767 internes en exercice. Cette croissance doit se poursuivre dans les huit années à venir avec un coût salarial correspondant évalué à 166 millions d’euros en 2010/2011 pour atteindre 368 millions d’euros en 2015/2016. Ce regard croisé sur la démographie des médecins hospitaliers depuis 20 ans ne permet pas de répondre aux deux questions centrales entendues pendant les auditions : 9
« A-t-on le nombre de professionnels médicaux suffisant ? Pour quelle organisation ? ». Le constat est qu’aujourd’hui il existe, outre une crise identitaire, une crise qualitative et parfois quantitative des recrutements médicaux. Quantitativement l’état de vacance des postes de praticiens hospitaliers a fait l’objet d’une étude exhaustive du CNG, rendue publique dans son rapport d’activité de 2008 : (Tableau des emplois médicaux France entière par spécialité pour les praticiens hospitaliers temps plein et temps partiel - SIGMED au 01/01/09) PH Temps plein PH Temps partiels Taux de Taux de Nb de Nb de Nb de Nb de vacance vacance postes postes postes postes statutaire statutaire budgétés occupés budgétés occupés (1) (1) Biologie BIOLOGIE 1 963 1 765 10,1% 279 197 29,4% chirurgie générale 398 324 18,6% 30 14 53,3% chirurgie infantile 170 146 14,1% 23 22 4,3% chirurgie maxillo-faciale 48 39 18,8% 20 17 15,0% chirurgie orthopédique et 1 024 818 20,1% 76 50 34,2% traumatologique chirurgie plastique reconstructrice et 41 30 26,8% 22 17 22,7% esthétique chirurgie thoracique et 148 123 16,9% 14 10 28,6% cardio-vasculaire Chirurgie chirurgie urologique 293 214 27,0% 62 38 38,7% chirurgie vasculaire 144 110 23,6% 18 12 33,3% chirurgie viscérale et 807 676 16,2% 63 42 33,3% digestive gynécologie et obstétrique 1 722 1 360 21,0% 394 268 32,0% neurochirurgie 158 131 17,1% 3 1 66,7% ophtalmologie 299 228 23,7% 268 195 27,2% oto-rhino-laryngologie 345 292 15,4% 336 269 19,9% stomatologie 37 34 8,1% 111 90 18,9% CHIRURGIE 5 634 4 525 19,7% 1 440 1 045 27,4% Médecine anatomie et cytologie 317 263 17,0% 82 64 22,0% pathologiques anesthésie-réanimation 5 718 4 535 20,7% 245 117 52,2% cardiologie et maladies 1 395 1 081 22,5% 417 308 26,1% vasculaires dermatologie et 145 127 12,4% 81 61 24,7% vénéréologie endocrinologie et 353 293 17,0% 85 71 16,5% métabolisme explorations fonctionnelles 60 53 11,7% 24 17 29,2% gastro-entérologie et 886 739 16,6% 177 135 23,7% hépatologie génétique médicale 76 57 25,0% 7 4 42,9% 10
Médecine gériatrie 1 834 1 396 23,9% 517 255 50,7% hématologie clinique 245 210 14,3% 12 9 25,0% hémobiologie transfusion 246 212 13,8% 10 9 10,0% hygiène hospitalière 188 155 17,6% 42 23 45,2% immunologie clinique 12 10 16,7% 5 5 0,0% maladies infectieuses, 139 118 15,1% 15 8 46,7% maladies tropicales médecine de la reproduction et 20 16 20,0% 17 15 11,8% gynécologie médicale médecine d'urgence 3 645 2 902 20,4% 516 337 34,7% médecine du travail 54 37 31,5% 4 4 0,0% médecine générale 2 564 2 014 21,5% 991 572 42,3% médecine interne 702 604 14,0% 54 41 24,1% médecine légale 51 39 23,5% 11 8 27,3% médecine physique et de 443 346 21,9% 96 59 38,5% réadaptation néphrologie 566 454 19,8% 46 35 23,9% neurologie 733 580 20,9% 128 91 28,9% oncologie médicale 278 185 33,5% 36 13 63,9% pédiatrie 2 111 1 692 19,8% 519 370 28,7% pharmacologie clinique et 28 24 14,3% 0 0 --- toxicologie pneumologie 858 708 17,5% 177 142 19,8% oncologie - radiothérapie 172 124 27,9% 14 12 14,3% réanimation médicale 593 446 24,8% 5 5 0,0% rhumatologie 249 212 14,9% 85 71 16,5% santé publique 568 437 23,1% 106 36 66,0% Spécialité non signalée 2 0 100,0% 4 0 100,0% MEDECINE 25 251 20 069 20,5% 4 528 2 897 36,0% Odontologie ODONTOLOGIE 72 56 22,2% 128 96 25,0% PHARMACIE 1 817 1 672 8,0% 471 247 47,6% Pharmacie HOSPITALIERE PSYCHIATRIE 5 912 4 410 25,4% 1 360 798 41,3% Psychiatrie POLYVALENTE médecine nucléaire 166 130 21,7% 19 7 63,2% Radiologie radiologie 1 849 1 208 34,7% 458 267 41,7% et imagerie RADIOLOGIE et médicale 2 015 1 338 33,6% 477 274 42,6% IMAGERIE MEDICALE France Entière 42 664 33 835 20,7% 8 683 5 554 36,0% Au-delà des chiffres globaux, il existe des disparités importantes selon les établissements, les spécialités, les régions : Les travaux du CNG soulignent que ce taux est variable selon les régions et selon les spécialités. Ainsi, des taux de vacance statutaire très supérieurs au taux national sont enregistrés pour la Basse Normandie (31,8%), la Picardie (29,8%), la Champagne Ardenne (29%) et la Franche Comté (27,4 %). La Guyane connaît, elle, un taux de vacance statutaire de 44%. 11
(Taux de vacance statutaire des Ph temps plein) Taux de vacance statutaire régional Nord-pas-de-calais > au taux national légèrement > au taux national autour du taux national PICARDIE < au taux national HAUTE-NORMANDIE LORRAINE BASSE-NORMANDIE ILE-DE-France ALSACE CHAMPAGNE-ARDENNE BRETAGNE CENTRE BOURGOGNE FRANCHE-COMTÉ PAYS DE LA LOIRE POITOU-CHARENTES LIMOUSIN RHÔNES-ALPES AUVERGNE AQUITAINE PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR MIDI-PYRÉNÉES LANGUEDOC-ROUSSILLON CORSE Souvent ces vacances font peser une charge réelle ou ressentie sur les praticiens restants. Parfois même le mercenariat vient un peu plus gangréner les organisations avec le recours à des praticiens sans attaches et sans évaluation des pratiques. Le problème de la sécurisation des soins et des prises en charge est parfois posé. Le CNG rappelle que « ces données sont à utiliser avec précaution. C’est une photographie à un moment donné : « le nombre de postes vacants varie de façon importante selon le moment où la statistique est produite ». Pour autant, depuis bientôt vingt ans, le pourcentage de vacance de poste a subi un inexorable accroissement. L’analyse des disparités ajoute à la complexité : Par discipline, c’est l’imagerie médicale (33,6%) et la psychiatrie (25,4%) qui disposent du taux de vacance statutaire instantané le plus élevé. Mais à l’intérieur même des disciplines, les taux de vacance varient du simple au double entre spécialités, surtout celles en concurrence avec une activité très attractive dans le secteur privé. S’agissant des errances sur la distribution des spécialités médicales, il suffit de rappeler que 2/3 des chirurgiens français travaillent en libéral alors que 2/3 des anesthésistes réanimateurs travaillent à l’hôpital (source DREES) Aujourd’hui 38,5% des praticiens hospitaliers sont des femmes, elles seront 50% en 2020 (source ONPDS). Quant aux projections démographiques, la DREES a fait en février 2009 de nouvelles projections à l’horizon de 2030. « Dans le scénario tendanciel malgré un fort relèvement du numerus clausus jusqu’à 8000 en 2011 le nombre des médecins ne retrouverait son niveau actuel qu’en 2030 ! La baisse des effectifs serait moins 12
marquée pour les généralistes que pour les spécialistes mais les évolutions seraient très contrastées d’une spécialité à l’autre. » Nombre et densité de médecins actifs par région en 2006 et 2030 d'après le scénario tendanciel Densité pour 100 000 Nombre de médecins Evolution (en %) de 2006 à 2030 habitants de la du densité de la en 2006 en 2030 en 2006 en 2030 nombre de pour population médecins 100 000 habitants Alsace 6 101 5 802 333 280 -4,9 13,2 -16,0 Antilles-Guyane 2 337 2 782 219 196 19,0 32,8 -10,3 Aquitaine 10 694 12 139 343 339 13,5 14,8 -1,2 Auvergne 3 921 4 320 294 325 10,2 -0,5 10,8 Basse Normandie 4 000 4 569 275 309 14,2 1,8 12,2 Bourgogne 4 565 4 070 280 252 -10,9 -0,9 -10,0 Bretagne 9 258 11 586 300 333 25,2 12,9 10,9 Centre 6 627 6 160 264 232 -7,0 5,8 -12,2 Champagne-Ardenne 3 750 3 737 281 297 -0,3 -5,7 5,7 Corse 910 668 326 212 -26,6 12,7 -34,9 Franche-Comté 3 356 3 971 292 334 18,3 3,3 14,6 Haute-Normandie 4 857 4 916 268 266 1,2 2,0 -0,7 Ile-de-France 46 144 37 132 402 299 -19,5 8,4 -25,8 Languedoc-Roussillon 9 040 8 274 354 248 -8,5 30,5 -29,8 Limousin 2 415 2 415 332 327 0,0 1,6 -1,6 Lorraine 6 834 7 303 292 322 6,9 -3,0 10,2 Midi-pyrénées 9 668 9 132 348 272 -5,5 20,6 -21,7 Nord-Pas-de-Calais 11 770 11 651 291 287 -1,0 0,3 -1,3 Pays de la Loire 9 392 11 408 273 287 21,5 15,3 5,3 Picardie 4 814 4 778 255 248 -0,8 2,2 -2,9 Poitou-Charentes 4 998 6 296 291 336 26,0 8,9 15,7 Provence-Alpes-Côte d'Azur 19 286 16 821 400 298 -12,8 17,2 -25,6 Réunion 2 079 2 573 262 249 23,8 30,5 -5,1 Rhône-Alpes 19 698 21 448 326 307 8,9 15,6 -5,8 Ensemble 206 514 203 953 327 292 -1,2 10,5 -10,6 Les rémunérations médicales à l’hôpital Par lettre du 28 février 2008, la Ministre de la Santé a lancé une mission de l’IGAS sur les rémunérations des médecins et chirurgiens hospitaliers. L’IGAS a constaté que « dans l’exercice privé libéral, il existe de fortes disparités de rémunérations (honoraires et revenus) inter et intra disciplinaire qui reflètent d’abord une tarification des actes plus favorable aux spécialités médico-techniques qu’aux spécialités 13
cliniques mais sont aussi le résultat de l’impact des dépassements d’honoraires sur les rémunérations ». A titre d’exemple, en 2007, les honoraires moyens annuels s’établissaient de 79 168 euros pour la neuropsychiatrie à 686 913 euros pour la radiothérapie. Par ailleurs, l’IGAS note des différences de 1 à 4 entre les spécialités à dominante technique qui perçoivent des honoraires largement supérieurs aux spécialités à dominante clinique. Le deuxième constat porte sur la nature même de la rémunération à l’acte. L’IGAS souligne « que les dispositifs de rémunération à l’acte ne prennent que très peu en compte les exigences de qualité. Il existe cependant quelques exceptions à cette situation en particulier par la création de cahiers des charges quant à la qualité par exemple des examens de mammographie de dépistage ». A l’hôpital, le rapport de la cours des comptes de mai 2006 indiquait que « du fait de la faiblesse des systèmes d’information, il n’est pas possible de déterminer avec précision les parts des hausses et des dépenses attribuables à la croissance des effectifs et celles imputables aux augmentations salariales et aux valorisations indemnitaires ». Dans ce contexte, l’IGAS écrit que « dans les établissements publics de santé, les disparités de rémunération sont également très importantes, combinant plusieurs éléments, les différences de statuts, les activités de permanence de soins, l’exercice libéral, les rémunérations complémentaires liées à la recherche ou les expertises ». Les écarts de rémunération vont couramment de 1 à 5 dans les centres hospitaliers et de 1 à 10 dans les CHU, conclue l’IGAS qui ajoute « les systèmes de rémunération publics et privés ne prennent que faiblement en compte les enjeux de long terme que constituent l’évolution de la démographie médicale, le décloisonnement du système de santé entre l’hôpital et la médecine de ville et l’équilibre entre concurrence et complémentarité dans les relations liant l’établissement public et privé ». L’IGAS ajoute que « l’augmentation des indemnités liées à la permanence de soins dans les établissements de santé a cru de 43% entre 2002 et 2005 ». Le CNG dans un rapport de 2008 souligne l’importance de la part indemnitaire qui dépasse 30% dans de nombreuses situations. Pour autant aucun lien explicite avec l’activité n’est clairement corrélé. Enfin l’IGAS évoque l’expérience britannique du nouveau contrat de consultant hospitalier. Le contrat vise à une meilleure cohérence des plans de travail avec des objectifs d’organisation des services médicaux. L’implication personnelle des médecins en dehors des horaires normaux de travail est reconnue et l’intégralité de l’activité professionnelle du consultant est prise en compte. De son côté la MEAH a mis en exergue la faiblesse des systèmes de gestion et de pilotage du temps de travail médical ; multiplicité des activités et absence de décompte du temps de travail des médecins ; pénurie de compétence et risque de perte de droits ouverts par la nouvelle réglementation ou d’une partie de la rémunération. Depuis 2006 le statut de praticien hospitalier s’est lui ouvert à la possibilité contractuelle d’une rémunération complémentaire sur des critères quantitatifs 14
d’activité et des critères qualitatifs. Ouverte, dans un premier temps, aux chirurgiens cette part complémentaire variable (PCV) peine à se développer du fait d’un encadrement règlementaire complexe. La PCV constitue cependant une première approche pour encourager le lien entre une prise en compte de la qualité et de l’activité et la rémunération. Des expériences innovantes en vue d’améliorer l’attractivité des carrières médicales ont été proposées (Rapport Guy Vallancien, Philippe Cuq, François Aubart sur la rémunération des chirurgiens proposant un contrat d’exercice global) ou dans les centres de lutte contre le cancer. Dans ces centres sont associés une rémunération de base forfaitaire et un régime individuel et collectif par le biais d’une enveloppe d’équipe. Dans l’établissement Arnault Tzanck (PSPH) le secteur de cardiologie médico-chirurgicale a opté pour une rémunération associant une grille hospitalière majorée de 30% et une prime plafonnée fonction sur les actes effectivement encaissés. Dans le prolongements de ces travaux et des propositions recueillies lors des auditions, la mission considère que le nécessaire ajustement des ressources aux activités médicales suppose un lien formel nouveau entre le temps de travail, le planning des activités et les rémunérations. La mission attire l’attention sur la nécessaire et urgente reconnaissance de l’activité clinique. En effet, l’utilisation exclusive de la CCAM technique pour identifier l’activité hospitalière provoque à juste titre réserves voire dénigrement de la part des cliniciens n’effectuant que peu ou pas d’activités techniques comme la gériatrie par exemple. La CCAM clinique a pourtant fait l’objet d’études techniques avancée mais s’est heurté à un refus de mise en œuvre conventionnelle. La mission recommande une étude de faisabilité et d’impact à la mise en œuvre sur le secteur hospitalier de la CCAM clinique. 15
Pourquoi le changement est urgent et nécessaire ? L’ordonnance de 1958 a fondé les CHU et marqué l’histoire de la médecine française. Il faudra attendre la loi hospitalière de 1970 pour voir essaimer cet élan fondateur dans ce qu’étaient à l’époque les centres hospitaliers généraux. Cette loi a provoqué une forte attractivité médicale vers les centres hospitaliers essentiellement pour des fonctions de chef de service. Les statuts alors disponibles pour accéder à la carrière hospitalière non universitaire étaient au nombre de deux : celui, valorisant, de chefs de service et celui d’assistants adjoints. Les postes de chefs de service une fois pourvus, les nouveaux arrivants n’ont plus disposé que du « statut d’adjoint assistant » peu attractif. Les carrières proposées dans ce cadre étaient alors perçues comme des culs de sac sans possibilité de promotion en termes de responsabilité. Si on ajoute à cela que les procédures de nomination aux statuts de chefs de service et d’adjoints étaient souvent opaques on comprend que, dans le contexte de l’époque, l’attente de changement était forte. La création du statut de praticien hospitalier a eu lieu en 1984. En créant le statut unique de praticien hospitalier il s’agissait d’apporter un élément de collégialité et un outil de transparence. La création d’un statut unique dissociant le grade et la fonction est apparue comme l’outil emblématique pour valoriser la carrière médicale à l’hôpital pour le plus grand nombre. Le choix d’un concours d’entrée anonyme a été porteur de transparence. Il a créé un cadre professionnel égalitaire apportant une offre sécurisée et protectrice. Ce statut de 1984 a permis une médicalisation accélérée dans les hôpitaux, fleurons des politiques municipales. Dans les années qui ont suivi, les quelques éléments statutaires visant à reconnaître l’engagement et l’initiative individuelle ont été gommés. En particulier, les accélérations de carrière ont été supprimées. Par la suite, de nombreuses réformes du statut ont modifié la carrière au profit tantôt des plus jeunes tantôt des plus anciens. A la fin du XXème siècle, la réduction du temps de travail (RTT) puis l’intégration du temps de garde dans le temps de travail (directive 93/104) ont constitué autant de chocs et d’impacts statutaires qui ont achevé de déstabiliser le système. Toute cette période a été marquée par une quête récurrente des praticiens pour chercher à diversifier le statut. Ainsi la gestion horaire du temps de travail, celle des plages additionnelles, l’activité libérale, les activités d’intérêt général, la participation à la permanence des soins et plus récemment la part variable complémentaire ont constitué une somme d’opportunités. Aujourd’hui, force est de constater que le statut a connu un inexorable déclin en terme d’attractivité quantitative et surtout qualitative. Force est de constater que le fossé n’a cessé de se creuser entre les besoins et les attentes des hôpitaux et des malades et la distribution des praticiens. Mais l’analyse et le bilan du statut de 1984 seraient inexacts et surtout partisans si on ne rappelait pas les éléments du contexte de l’époque et ceux qui prévalent aujourd’hui. 16
En 1984 dans les hôpitaux, il y avait bien peu de contraintes financières ; il n’y avait pas d’organisation ni de schémas régionaux ; il n’y avait pas de projets d’établissement; il n’y avait pas de crise démographique; le nombre des spécialités médicales était relativement limité ; il n’y avait ni évaluation ni certification. Aujourd’hui l’action des praticiens s’inscrit dans un environnement territorial et régional formalisé, dans des schémas régionaux opposables et une politique contractuelle entre ARH et hôpitaux. Il existe de fortes contraintes démographiques, sanitaires et économiques durables. L’évaluation et la formation continue se développent de façons organisées ; les maladies chroniques et le vieillissement supposent un rôle renouvelé de l’hôpital. Ce constat, partagé par le plus grand nombre, impose le mouvement. Pérenniser cette situation c’est priver l’hôpital du niveau d’excellence de ses recrutements médicaux que justifie ses missions. Au terme des auditions et de la compilation des travaux et rapports réalisés sur ce thème c’est une préoccupation d’action et de cohérence que la mission souhaite privilégier. Le sujet de l’attractivité médicale à l’hôpital est intimement lié à celui de l’attractivité de l’hôpital en général. C’est fort de ce constat que la mission a travaillé avec l’objectif de concrétiser de nouvelles formes d’exercice et de rémunération dans le cadre de la lettre de mission qui lui a été confiée. La mission attire d’emblée l’attention sur la cohérence de l’ensemble des propositions présentées dans ce rapport qui visent à renouveler profondément l’exercice hospitalier. Bien évidemment leur acceptabilité suppose débat, partage et adaptation. Elle suppose aussi un engagement politique fort appuyé sur une capacité opérationnelle visible. Pour autant, l’hôpital et sa communauté médicale devront affronter dans les 10 ans à venir une mutation organisationnelle et démographique sans précédent car également inscrite dans une phase de crise économique et financière centenaire. Il faudra y répondre en mettant à contribution une réflexion d’éthique collective sur les objectifs à atteindre et notre capacité commune à les mettre en œuvre. 17
Dix propositions pour la promotion et la modernisation des recrutements médicaux à l’hôpital 18
1 – Pour la mission, la promotion des recrutements est à initier dès le deuxième cycle des études médicales et à concrétiser dès le troisième cycle. Pour l’étudiant en médecine, les premiers stages à l’hôpital constituent le premier contact avec la médecine clinique et donc le malade. C’est au cours du deuxième cycle des études médicales que cette confrontation avec le monde du travail hospitalier se concrétise. Cette étape est essentielle non seulement pour l’acquisition de connaissances médicales mais également pour la connaissance des différentes fonctions et modes d’exercice au sein de l’équipe médicale hospitalière. Force est de constater, en écoutant les étudiants, que cette phase de découverte si marquante est souvent laissée en friche par ceux-là même qui devraient en être les avocats. Lors du 3ème cycle, si la formation médicale et la prise de responsabilité sont des objectifs affichés, la place structurante de l’équipe n’est pas toujours valorisée. La formation de terrain n’évoque que peu les parcours professionnels, les choix et évolutions possibles, les alternatives de métier. Les responsables médicaux ne jouent pas toujours le rôle de promoteurs d’un exercice hospitalier ou domine parfois la morosité. L’interne et le chef de clinique ne sont pas ou peu intégrés dans la vie institutionnelle du service, du pôle et de l’hôpital. La mission considère que le troisième cycle doit être le temps fort de formation vis à vis du projet personnel de l’interne mais aussi celui de la formation intégrante à l’équipe et à son projet collectif. La promotion de l’exercice médical à l’hôpital doit être un objectif explicite et formalisé des services et de leurs responsables vis à vis des étudiants et des internes. De nouvelles formes d’intégration aux structures d’organisation de l’équipe doivent être développées. La participation à ces instances pourra illustrer les responsabilités ultérieures dans la vie hospitalière et responsabiliser les étudiants. 2 - Une politique promotionnelle et contractuelle tournée vers les chefs de clinique assistants mérite d’être engagée. Le post internat, celui des chefs de clinique et des assistants, poursuit l’objectif de formation individuelle en l’étendant, au delà du soin, à l’enseignement et à la recherche clinique. C’est le temps de la responsabilité de plein exercice. C’est le temps de la construction de l’avenir professionnel. Le chef de clinique, l’assistant, acquièrent une certaine vision d’ensemble de l’exercice en CHU. Ils ne disposent que peu de base d’information formalisée sur l’exercice hospitalier ; ils ignorent le plus souvent l’exercice non universitaire. Les « remplacements » constituent très souvent un mode de passerelle, d’expérience et d’information pour l’exercice libéral. Dès lors il n’est pas étonnant que leur orientation professionnelle soit dépendante des incitations et informations dont ils disposent. La mission propose d’offrir systématiquement une démarche d’information et de promotion des carrières hospitalières pendant le post internat. Le centre national de gestion (CNG) semble constituer le lieu naturel de cette démarche. Il pourrait notamment prendre l’initiative de mettre en œuvre une démarche individuelle d’information et d’échanges sur les carrières à l’hôpital. Il pourrait 19
aussi mettre à disposition des chefs de clinique et assistants, des outils contractuels pour valoriser les « remplacements » hospitaliers notamment dans les centres hospitaliers. La mise en place de réseaux de recherche clinique pourrait être un facteur favorisant cette démarche. Enfin les innovations que constituent les chefs de cliniques régionaux et les assistants partagés entre CHU et centre hospitalier doivent être évaluées et probablement élargies. Le cadre des cliniciens hospitaliers pourrait servir ensuite de support à l’intégration à un exercice hospitalier. 3 - L’équipe hospitalière base de l’identité hospitalière. Labelliser les équipes, facteur de notoriété de valorisation sociale et d’attractivité. L’équipe et l’appartenance à une équipe médicale sont apparues comme un repère récurrent, et opérationnel au fil des auditions de la mission. La notion d’équipe dispose d’une valeur symbolique majeure. L’équipe médicale n’est pas présentée comme une abstraction mais comme un collectif de travail. Chacun, avec ses mots, a indiqué que ce collectif est capable de déclencher ou non une véritable « plus value » dépassant la simple somme des objectifs, des savoirs et des savoir-faire de chaque individualité qui la constitue. Elle est aussi présentée comme capable de promouvoir une action exemplaire, efficace, performante. A contrario, elle est capable de désagrégation face aux résistances passives individuelles, aux refuges dans de « véritables niches écologiques ». Dans les cas extrêmes, l’isolement, le mercenariat, la déshérence des pratiques réduisent l’équipe à un alibi de façade condamnable. L’équipe médicale doit être l’unité de base de l’organisation qui va devenir maintenant territoriale. Elle est identifiée le plus souvent autour des spécialités médicales, souvent regroupées en unités. Le service, à condition qu’il ne soit pas lieu de propriété patrimoniale, reste une identité importante porteuse de missions et de cohérence. Si l’équipe doit constituer l’unité de base de l’organisation, elle doit disposer d’un « chef d’équipe » confirmé, disposant d’une légitimité propre et reconnue professionnellement. A l’intérieur de l’équipe le métier de médecin et de pharmacien des hôpitaux impose une part d’autonomie. Le médecin, le pharmacien des hôpitaux ne peut être un simple opérateur de tâches. Chacun s’accorde pour insister sur le fait que la qualité de l’équipe doit beaucoup à la solidité de son organisation. Mais cette unité et la cohésion de l’équipe sont en équilibre fragile. Comme lieu de résolution des contradictions entre l’intérêt collectif et celui des praticiens qui la constituent, elle est en position de perpétuelle instabilité. Cette difficulté est d’autant plus présente que les règles d’organisation de l’équipe apparaissent souvent comme peu visibles voire masquées ou opaques. Dès lors la mission a travaillé, à partir de cette notion d’équipe, sur l’objectif d’en faire le lieu de reconnaissance de l’action médicale et de sa reconnaissance individuelle et collective. L’appartenance à une équipe reconnue disposant d’un véritable projet décliné et inclus dans celui de l’établissement (activité médicale dynamique, recherche clinique, innovation..) est indissociable d’une véritable promotion des recrutements médicaux à l’hôpital. Mais il n’y a pas d’équipe sans chef d’équipe dont la légitimité 20
professionnelle et organisationnelle autorise la dynamique et l’émulation collective indispensable. L’appartenance à une équipe labellisée est attractive pour les praticiens et participe à la notoriété de l’équipe et de l’hôpital. Les équipes hautement performantes par leurs travaux, leurs résultats, sont connues non seulement de la communauté scientifique mais aussi bien souvent des malades. L’appartenance à ces équipes est valorisante et motivante. L’équipe constituée autour d’un projet et d’objectifs d’activité, intégrée dans le territoire, engagée dans le développement professionnel continu, doit être « labellisée ». Ce label doit aussi reconnaître la production de savoir, puissant moteur d’attractivité au travers notamment de la recherche clinique, des publications médicales et scientifiques, des travaux épidémiologiques. Cette reconnaissance doit intégrer les actions extérieures pouvant concerner des actions ville hôpital. La Mission propose de confier à la Haute Autorité de Santé une proposition de labellisation des équipes hospitalières. 4 - Modularité de la carrière et autonomie. Après le post internat, le jeune médecin, le jeune pharmacien a acquis une compétence initiale forte et défini ses objectifs professionnels : Activité de soin, d’enseignement, de recherche notamment clinique constituent en général la trilogie des objectifs. L’implication dans l’évaluation, la responsabilité de gestion ou d’organisation, les partages de formes d’exercice viennent notamment les compléter. Au moment du choix entre carrière libérale et carrière hospitalière, Il se heurte à une réalité qui ne lui offre que rarement à l’hôpital : la capacité d’agir en lien avec son projet et ses savoirs faire. Aujourd’hui la carrière hospitalière offre le plus souvent un exercice figé très peu évolutif et très peu adaptable au cours de 30 années d’exercice. C’est pourquoi une modularité de la carrière professionnelle doit rendre possible des choix et des évolutions. Ils doivent être fonction des acquis de compétences, des segments de vie, des découvertes et des opportunités : Moduler les fonctions et les activités selon les compétences, les rythmes, les investissements dans les différents domaines d’activité, individuels et collectifs, ainsi que des besoins des établissements est une nécessité. La modulation doit permettre au praticien hospitalier, resté maître in fine des bases de son temps de travail, d’alterner des années plus centrés sur le soin et d’autres sur la formation, l’enseignement, la recherche, la prise de responsabilité ou le projet personnel. Il doit pouvoir choisir de travailler beaucoup sur des missions à pénibilité reconnue, ou choisir de travailler sur un temps limité. Le corollaire de cette modularité est de mettre en place au cours de la carrière des bilans rétrospectifs et prospectifs des compétences et des engagements. Le Centre National de Gestion doit notamment être le lieu externalisé de ces moments de bilan et de prospective. Ces choix personnels doivent être formalisés. La mission propose de faire de la modularité de la carrière un élément central du « volet social » de l’exercice hospitalier et de faire du « volet fonctionnel » un outil de reconnaissance de l’activité locale du praticien. Pour la mission, le parcours professionnel doit être visible et sécurisé par le centre national de gestion. 21
5 - Constituer des équipes de grande taille. La relative attractivité pour l’exercice en CHU porte notamment sur la taille plus grande des équipes. La taille importante de l’équipe diminue la pénibilité liée notamment à la permanence de soins par ailleurs dévoreuse de temps médical. Plusieurs rapports ou documents se réfèrent à cette permanence des soins pour quantifier la taille souhaitable de l’équipe. On évoque ainsi le chiffre de 6 voire 8 équivalent temps plein pour constituer la taille des équipes concernées. La mission considère que cette approche, qui se limite aux seuls impératifs de la permanence des soins, est incompatible avec les objectifs de promotion de l’attractivité et celle de territorialité de l’exercice. La motivation pour l’exercice hospitalier doit s’appuyer sur un équilibre retrouvé entre les objectifs gratifiants et les contraintes. La recherche clinique, la confrontation professionnelle à des cas cliniques complexes, la production de savoir et sa transmission, justifient un objectif de création d’équipes de grande taille comme on les rencontre dans de nombreux pays notamment au Canada ou aux Etats Unis. La mission considère que la fenêtre de 10 à 15 équivalents temps pleins est nécessaire au rassemblement autour d’importants plateaux techniques dans une logique de territoire. . La dynamisation liée au mélange des générations est par ailleurs indispensable pour retrouver une pyramide des âges évitant que l’équipe « ne vieillisse ensemble » et permettant la transmission des savoirs. L’augmentation attendue du nombre des internes doit y participer. Pour la mission, il faudra constituer des équipes de taille importante (10 à 15) transgénérationnelles appuyées sur des plateaux techniques performants. 6 - Refonder les règles d’organisation du travail à l’hôpital. Divers rapports et expériences étrangères (comme le « job planning » en Grande Bretagne) ont déjà souligné le besoin de disposer d’un descriptif nouveau des organisations des activités médicales à l’hôpital. La diversité des activités internes et externes des membres des équipes, l’illisibilité évoquée du temps de travail , les impératifs de la permanence et de la continuité des soins et l’impact des choix autonomes des praticiens justifient ce besoin. Localement, Les évolutions souhaitées par le praticien doivent à la fois s’accorder aux projets de la où des équipes où il va exercer. Elles doivent s’inscrire dans le cadre d’une sécurisation du parcours professionnel. C’est sur ces bases que les conditions de confiance et donc de réussite d’une contractualisation fonctionnelle pourront lier le praticien et le centre hospitalier et/ou le CHU. Il revient donc à l’équipe et au chef d’équipe de la spécialité en lien avec les responsables institutionnels de formaliser le lien contractuel entre le projet de l’équipe et l’attente du praticien. Cette relation transparente établie sur un projet et un « Tableau Annuel Prévisionnels d’Activités (TAPA) » doit constituer la « garantie » des engagements. Ce TAPA doit servir de sablier et de boussole pour quantifier temps et activités. 22
C’est le contrat fonctionnel qui doit servir de trait d’union entre l’équipe et chacun de ceux qui la constituent. Le contrat d’équipe inclus dans le contrat de pôle, doit alimenter et décliner le contrat d’établissement défini territorialement dans le CPOM. Ce lien contractuel, régulièrement renouvelé, doit être outil de transparence, de partage des droits et des devoirs, de reconnaissance en fonction des engagements individuellement consentis. Comme l’opacité nourrit la bureaucratie, la transparence doit la faire reculer. C’est au niveau de l’équipe (service, unité….) que doit être établi le TAPA inclus dans le projet de pôle. Celui-ci établit, à priori, le temps médical nécessaire à la réalisation des objectifs de l’équipe. Par journée et demie journée de travail, voire dans certains cas par comptage horaire, le TAPA doit définir le temps nécessaire à l’activité professionnelle et médicale du projet dans six domaines principaux : Le soin : diagnostic et traitement, continuité et permanence. La santé : prévention, éducation, épidémiologie. La qualité et la sécurité : gestion des risques, vigilance, évaluation. La formation, l’enseignement, la recherche et notamment la recherche clinique. La responsabilité institutionnelle et l’engagement de gestion médico-économique Le projet personnel : Il est en effet important de conserver une part d’activité « projet personnel » (action humanitaire, éthique ou santé publique ; action syndicale….) essentielle à la motivation Le TAPA, une fois validé, permettra de définir les moyens médicaux nécessaires à la prise en charge des patients et à la réalisation du projet de l’équipe. Cette démarche explicite doit permettre de rompre avec des pratiques qui aboutissent soit à méconnaître les besoins nécessaires soit, au contraire, à voir exiger des moyens supplémentaires auto définis. Le contrat fonctionnel doit permettre une véritable reconnaissance et une maîtrise choisie du temps de travail médical. Au sein de l’équipe, autour du TAPA ainsi établi, chaque praticien peut et doit formaliser son engagement personnel quantitatif en terme de temps de travail. Le praticien contractualise également son engagement qualitatif en pondérant son action et son engagement dans les six typologies d’activités précédemment décrites. Bien évidemment, à l’instar de l’organisation en secteur développée en psychiatrie et en pneumologie le TAPA devra pouvoir concerner un territoire si l’équipe en a la responsabilité au sein d’une communauté hospitalière de territoire. Ce véritable « contrat d’équipe » devient un cadre de missions fonctionnelles pour tous ceux qui la constituent. Il ne peut être viable que si l’équipe est de taille suffisante. Ce contrat doit formaliser un engagement clair entre les objectifs personnels et ceux de l’équipe. Il doit : Alimenter et décliner le contrat d’objectif et de moyen de l’établissement ainsi que le contrat de pôle. S’ouvrir et s’inscrire dans une logique de contrat de territoire. Concerner l’ensemble des praticiens de l’équipe quel que soit leur statut. Réinvestir l’activité clinique La mission souhaite la promotion d’un contrat fonctionnel d’équipe : Le TAPA. 23
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