Rapport scientifique 2015-2016 - ONCFS
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SOMMAIRE RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 ÉDITORIAL 5 J.-M. Gaillard, Président du Conseil scientifique AVANT-PROPOS 7 Olivier Thibault, Directeur général ORGANIGRAMME GÉNÉRAL DE LA DIRECTION DE LA RECHERCHE ET DE L’EXPERTISE 8 LES ÉTUDES ET LES RECHERCHES SUR LES ESPÈCES 10 Faune de plaine 12 Avifaune migratrice 14 Cervidés et sanglier 16 Faune de montagne 18 Prédateurs et animaux déprédateurs 20 Santé de la faune 22 Faune de Guyane 24 Méthodes statistiques pour l’étude de la faune et de ses habitats 26 LES ÉTUDES ET LES RECHERCHES SUR LES MILIEUX 28 Pôle Bocage 30 Pôle Étangs continentaux 31 Mission Agriculture et faune sauvage 32 LES DOCTORATS À L’ONCFS 33 PUBLICATIONS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES 2015 ET 2016 36 Thèses soutenues 2015 38 Publications 2015 38 Thèses soutenues 2016 44 Publications 2016 44 RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l3
ÉDITORIAL RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 La période 2015-2016 apparaît comme particulièrement fructueuse sur le plan scientifique pour l’ONCFS. A vec plus de soixante publications par an dans des revues à comité de lecture et sept thèses soutenues en deux ans, la moisson est riche ! Ces résultats sont le fruit d’une politique scientifique à long terme qui s’appuie sur un large éventail © DR d’atouts. Tout d’abord, une capacité hors norme à constituer des jeux de données Jean-Michel Gaillard, abondants et de qualité, tant grâce au maillage territorial et aux nombreux partenariats de Directeur de recherche au CNRS Président du Conseil scientifique terrain que par le réseau de réserves et de territoires que gère ou cogère l’établissement. Ensuite, une ouverture dynamique vers des partenariats diversifiés, scientifiques ou techniques, en France comme à l’étranger, permettent de renforcer et de compléter les compétences de l’établissement. Enfin, des équipes de qualité rassemblent des chercheurs et techniciens aguerris sur le plan scientifique et bien informés sur les questions opérationnelles. Cette combinaison atypique est attractive pour les étudiants, et en particulier pour les doctorants, encadrés soit en collaboration avec des laboratoires de recherche, soit en propre par l’ONCFS. L’habilitation à diriger des recherches (HdR) est incontournable pour consolider la place de l’Office dans ce dispositif, et il est impératif de renforcer cette démarche afin d’offrir les ressources d’encadrement scientifique nécessaires à la formation de doctorants dans tous les domaines de recherche traités par l’ONCFS. Le Conseil scientifique a d’ailleurs, sur la base du bilan de ces dernières années, souligné la qualité des thèses de doctorat encadrées ou co-encadrées par l’établissement. Sur le critère du nombre et de la qualité des publications au moment de la soutenance, les thèses réalisées ces dernières années en partenariat avec l’ONCFS sont nettement au-dessus de la moyenne observée dans les laboratoires universitaires ou les instituts de recherche français travaillant dans le domaine de l’écologie. Contrairement à la croyance répandue au sein de la communauté de scientifiques investie principalement dans la résolution de problèmes sociétaux, le développement d’approches finalisées n’est pas, bien au contraire, un frein à la publication dans des journaux scientifiques à fort impact et plus d’ambition dans le choix des journaux ciblés doit prendre place à court terme. En parallèle, les thématiques abordées sont toujours plus variées. Si la dynamique des populations animales exploitées reste au cœur des préoccupations, les équipes travaillent également sur la restauration d’espèces protégées, la gestion des milieux, l’impact du changement climatique ou celui des pathologies, et bien d’autres sujets. Les approches sont également diversifiées et s’appuient sur les outils technologiques (émetteurs GPS, accéléromètres, analyses isotopiques…) et méthodologiques (analyses Bayésiennes, modèles mixtes…) les plus récemment développés. Cela conduit le champ des disciplines abordées à devenir de plus en plus large pour avancer avec une approche d’écologie intégrée incluant partiellement d’autres disciplines comme la bioacoustique, la sociologie, l’agronomie, l’écotoxicologie ou les biomathématiques. Le Conseil scientifique, que je préside depuis 2009, rassemble dix scientifiques reconnus, nommés intuitu personae par les ministres de tutelle de l’établissement, et deux agents de l’établissement nommés par le Directeur général. Ce Conseil apporte un regard indépendant sur l’ensemble des travaux de l’établissement, qu’il s’agisse d’en orienter les programmes de recherche ou de les évaluer précisément. En effet, il audite régulièrement les programmes, avec l’appui d’un rapporteur membre du Conseil et d’un panel d’experts extérieurs indépendants (et régulièrement étrangers). La lecture de ce rapport vous donnera un bel aperçu des résultats concrets de cette stratégie scientifique de longue haleine. ■ RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l5
AVANT-PROPOS © Roxane Leverrier/ONCFS RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 Olivier Thibault, Directeur général de l'ONCFS L ’Office au cœur de la mise en œuvre des politiques publiques de biodiversité L a production et la diffusion de connaissances scientifiques sont au cœur des missions de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, établissement public technique de référence pour la faune sauvage. Ces connaissances doivent à la fois être objectives et fiables sur le plan scientifique, et utiles et exploitables pour la politique publique et la gestion de la faune et de ses habitats. Sous l’égide d’un conseil scientifique indépendant, l’ONCFS s’attache à produire des données, des outils pour le suivi comme pour la gestion, des analyses et des expertises selon les meilleurs standards. Son maillage territorial, avec des services à double compétence police et technique, lui permet d’être au plus près du terrain, pour collecter des données comme pour recueillir les besoins et détecter les tendances émergentes. Ce réseau est démultiplié par les nombreux partenariats que l’établissement entretient, depuis le niveau national jusqu’au local. Ces collaborations sont renforcées par un effort important de formation et d’information des correspondants, qui en retour permettent le développement d’un vaste système de suivi de la faune sauvage, de ses habitats et de ses pathologies. L’établissement assure une interface étroite entre le suivi et la recherche, puisque ces activités sont pilotées au sein des mêmes équipes de la direction de la recherche et de l’expertise, en lien avec de nombreux organismes scientifiques et techniques. Ces compétences mettent l’Office au cœur de la mise en œuvre des politiques publiques de biodiversité : plans nationaux d’action en faveur d’espèces menacées (loup, grand hamster, vison d’Europe…), stratégie nationale relative aux espèces exotiques envahissantes, gestion adaptative des espèces chassées, plan national forêt et bois, surveillance sanitaire et gestion de foyers de crise… Une fois sur le terrain, la double compétence des agents leur permet de passer d’actions de connaissance aux contrôles de police (et réciproquement) pour apporter la meilleure réponse à chaque situation. Le rapport scientifique que vous tenez entre les mains propose un bilan des activités de recherche et développement de l’établissement sur la période correspondant à l’avenant au contrat d’objectifs 2015-2016, décliné en programme d’études et de recherches sur la même période. Il est le fruit d’une stratégie scientifique de long terme qui s’appuie sur un investissement fort de l’établissement : maintien des territoires de recherche depuis plusieurs décennies, emploi ou soutien de près d’une dizaine de doctorants au sein des équipes, partenariats avec des laboratoires de recherche… Il vous présente la diversité des travaux menés par l’établissement et ses partenaires, par une sélection parmi plus de 150 publications scientifiques et techniques chaque année. Si la recherche sur les espèces (aussi bien chassées que protégées) et leur dynamique de population reste au cœur de notre métier, celui-ci s’élargit également à la connaissance et à la gestion de leurs habitats, sans oublier le développement d’approches innovantes, en particulier pour l’analyse des données. Je vous en souhaite une excellente lecture. ■ RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l7
Organigramme général Direction de la recherche et de l’expertise (au 31 décembre 2016) Chargée de mission auprès du Directeur Directeur de la Recherche et de l’Expertise Responsable administratif et financier Isabelle PINARD-GAUDIN Directrice adjointe Centre de documentation Responsable : Magali BRILHAC Cellule d’appui méthodologique Secrétariat : Estelle DELAMOTTE-DEOTTO, Philippe AUBRY Martine AUPETIT, Christine MERSANT Clément CALENGE, Guillaume BODY Unité Faune de plaine Unité Avifaune migratrice Unité Cervidés-sanglier Responsable : François REITZ Responsable : Yves FERRAND Responsable : François KLEIN Secrétaire de l’unité : Secrétaire de l’unité : Secrétaires de l’unité : Martine MACEROT Valérie GUERINEAU Sandrine LAHAYE, Mission « Agriculture - faune sauvage » : Ophélie TAGNON Francois OMNES Équipe « Habitats-zones humides » Chef de projet : Joël BROYER Mission « équilibre Équipe « Lapin de garenne » Membres de l’équipe : agro-sylvo-cynégétique » : Chef de projet : Laurence CURTET, Laurence HENRY, Manon VIEL Stéphane MARCHANDEAU Romain CHAZAL Membres de l’équipe : Équipe « Suivi national Jérôme LETTY, Équipe « Colombidés » des populations/études Régine BIGREL, Chef de projet : Hervé LORMEE des collisions ongulés-véhicules » Francis BERGER, Membres de l’équipe : Cheffe de projet : Nicolas MATHEVET, Sylvie FORGEARD Christine SAINT-ANDRIEUX, Gilles HOLE Équipe « Alaudidés-turdidés-caille » Membre de l’équipe : Chef de projet : Cyril ERAUD Aurélie BARBOIRON Équipe « Lièvre d’Europe » Chef de projet : Membres de l’équipe : Équipe « Équilibre forêt gibier » Jean-Sébastien GUITTON Denis ROUX, Hervé BIDAULT Cheffe de projet : Sonia SAÏD Membres de l’équipe : Équipe « Bécasse-bécassines » Membres de l’équipe : Bernard MAUVY, Chef de projet : Yves FERRAND Jean-Luc HAMANN, Guillaume SOUCHAY Membres de l’équipe : Marc MARCHI, Kévin LE REST, François GOSSMANN, Claude WARNANT, Équipe « Perdrix grise, faisans Damien COREAU, Claudine BASTAT Agathe CHASSAGNEUX (D) et plaine de grande culture » Cheffe de projet : Elisabeth BRO Équipe « Limicoles et espèces protégées » Équipe « Démographie Membres de l’équipe : Chef de projet : Bertrand TROLLIET et gestion du sanglier » Florian MILLOT, Membres de l’équipe : Chef de projet : Éric BAUBET Laurent SAUTEREAU Charlotte FRANCEZIAS, Olivier GIRARD, Membres de l’équipe : Saadia BOUDINA Cyril ROUSSET, Équipe « Perdrix rouge Thibaut GAYET (D) et milieux méditerranéens » Équipe « Anatidés » Cheffe de projet : Chef de projet : Matthieu GUILLEMAIN, Équipe « Démographie et gestion Françoise PONCE-BOUTIN Membres de l’équipe : des cervidés » Membres de l’équipe : Alain CAIZERGUES, Cheffe de projet : Maryline PELLERIN Jean-Bernard PUCHALA, Jean-Baptiste MOURONVAL, Membres de l’équipe : Luc FRUITET Laetitia POUIOL William GAUDRY Camille LABARRERE Équipe « Suivis internationaux oiseaux d’eau » Chef de projet : Jean-Yves MONDAIN-MONVAL, Membre de l’équipe : Pierre DEFOS du RAU (D) : doctorant 8 l RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016
Guillaume ROUSSET Assistance du directeur Assistante de direction : Brigitte IWACH Nirmala SÉON-MASSIN Secrétaires : Anne COURTECUISSE Corinne VERGER (50 %) Missions auprès du directeur : Faune d’Outre-mer : Cécile RICHARD-HANSEN Espèces exotiques envahissantes : Jean-François MAILLARD Espaces protégés : David LAFFITTE Unité Faune de montagne Unité Prédateurs - animaux Unité sanitaire déprédateurs de la faune Responsable : Daniel MAILLARD Secrétaires de l’unité : Responsable : Responsable : Katia MARTINEZ, Murielle GUINOT-GHESTEM Jean-Yves CHOLLET Thérèse CURT-DUCHAUSSOY, Secrétaire de l’unité : Secrétaires de l’unité : Carole THOMAS DE LA BORDE Sophie VERZELLONI Sophie GRAMMONT (50 %), Équipe « Galliformes de montagne » Corinne VERGER (50 %) Équipe « Petits et moyens carnivores » Cheffe de projet : Cheffe de projet : Responsable scientifique Ariane BERNARD-LAURENT Sandrine RUETTE du réseau SAGIR : Membres de l’équipe : Membres de l’équipe : Anouk DECORS Stéphane MARIN, Patricia VINCENT, Emmanuel MENONI, Michel ALBARET, Conseillère technique contrôle Marc MONTADERT, François LEGER, et police sanitaires : Claude NOVOA, Jean-Michel VANDEL, Anne VAN de WIELE Jean-Pierre SERRES, Mickaël JACQUIER (D) Bertrand MUFFAT-JOLY, Régis DESBARAX (50 %) Équipe « Grands carnivores – Chargé d’études et de recherche Loup/Lynx » « épidémiologie et écotoxicologie » Équipe « Ongulés de montagne » Olivier CARDOSO Chef de projet : Chef de projet : Mathieu GAREL Éric MARBOUTIN Équipe « maladies transmissibles Membres de l’équipe : Membres de l’équipe : bétail-faune » Thibaut AMBLARD, François COUILLOUD, Christophe DUCHAMP, Cheffe d’équipe : Claire ANCEAU, Pierre-Emmanuel BRIAUDET, Sophie ROSSI Joël APPOLINAIRE, Yannick LEONARD, Cheffe de projet : Dominique DUBRAY, Nicolas JEAN (50 %) Stéphanie DESVAUX Carole TOÏGO, Équipe « Ours » Pascal MARCHAND, Jean-Claude REVERDY, Chef de projet : Coline CANONE (D) Pierre-Yves QUENETTE Membres de l’équipe : Françoise de PABLOS, Jean-Jacques CAMARRA, Étienne DUBARRY, Jérôme SENTILLES, Cécile VANPE Chargé de mission « Réseau Castor » Yoann BRESSAN (20 %) RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l9
© Pascal Marchand/ONCFS Faune de plaine Avifaune migratrice Cervidés et sanglier Faune de montagne Prédateurs et animaux déprédateurs Santé de la faune Faune de Guyane Méthodes statistiques pour l’étude de la faune sauvage et de ses habitats 10 l RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016
Les études et les recherches sur les espèces Les études et recherches sur les espèces à l’ONCFS ainsi qu’une équipe spécialisée sur la faune de Guyane, constituent la déclinaison opérationnelle de l’axe 2 du appuyés par une cellule d’appui et des chargés de missions contrat d’objectifs (Améliorer la connaissance pour une transversaux. Les délégations interrégionales et leurs expertise solide en matière de faune sauvage), et cellules techniques, ainsi que les services départementaux, contribuent également à l’axe 1 (Contribuer à la contribuent aux programmes de suivi, de recherche et sauvegarde de la biodiversité). d’expertise. Enfin de nombreux partenaires, tant Ces programmes sont pilotés par six unités thématiques scientifiques qu’opérationnels, en France et à l’étranger, au sein de la Direction de la recherche et de l’expertise sont également mobilisés dans ces travaux. RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l 11
LES ÉTUDES ET LES RECHERCHES SUR LES ESPÈCES © Philippe Massit/ONCFS Faune de plaine Présentation des principaux programmes Les moyens d’étude et de recherche de l’unité Faune de plaine sont • l’étude de l’occupation de l’espace et de l’utilisation des milieux dans essentiellement consacrés aux perdrix grises et rouges, faisans communs, l’objectif de rechercher les pratiques agricoles et les aménagements les lapins de garenne et lièvres d’Europe. Ces espèces ont en commun de plus favorables à la préservation de la petite faune et à son présenter de fortes fluctuations spatio-temporelles et d’être dépendantes développement ou, pour le lapin, pour tenter de remédier aux risques de de nombreux facteurs de régulation externes ou internes : mode de dégâts ; gestion par la chasse bien sûr mais aussi structure du paysage, agriculture, • l’expérimentation d’outils de gestion des populations et des habitats : prédation, conditions climatiques, maladies, densité-dépendance, par exemple, la mesure d’indices cynégétiques d’abondance (lièvre), le dispersion. L’objectif principal de l’unité, dans un contexte d’évolution suivi de nouveaux moyens de repeuplement et le volet génétique souvent défavorable des populations et des habitats, est en premier lieu correspondant pour la perdrix grise, le suivi de la fréquentation d’assurer le suivi aussi complet que possible de populations afin d’en d’abreuvoirs par la perdrix rouge. mieux comprendre le fonctionnement et les facteurs de régulation. Il s’agit aussi d’établir ou de tester les modalités de gestion des populations L’unité contribue également aux travaux de l’établissement sur le hamster par la chasse les plus efficaces pour un maintien durable des niveaux d’Europe, le lièvre à collier noir et le tangue. Elle pilote enfin la mission d’abondance et, dans la mesure du possible, de déterminer les modes de transversale au sein de l’ONCFS d’étude de l’intérêt de pratiques agricoles gestion les plus favorables de l’environnement dans lequel elles évoluent. innovantes pour la faune et de mise au point des outils de développement nécessaires. Les principaux thèmes d’études en cours sont : • le suivi des populations par des réseaux partenariaux dans l’objectif multiple de connaître leur statut, d’évaluer les paramètres Zoom sur démographiques et leurs variations spatio-temporelles et de fournir un environnement technique à la gestion cynégétique ; De nouveaux virus identifiés dans les populations • l’étude de certains facteurs de régulation. En particulier, les maladies de lièvres et de lapins virales chez les lagomorphes et les effets non intentionnels des produits Les caliciviroses des lagomorphes, European brown hare syndrome phytopharmaceutiques sur la perdrix grise font l’objet d’une attention (EBHS) chez le lièvre et Rabbit haemorrhagic disease (RHD) chez le soutenue ; lapin, sont des maladies qui ont émergé au début des années 1980. Elles • l’étude approfondie de la dynamique des populations, là où le besoin sont causées par des virus génétiquement proches de la famille des existe pour affiner la gestion cynégétique des populations sauvages ou calicivirus et appelés lagovirus. Le virus RHDV n’infecte que le lapin mixtes (en particulier perdrix rouge et faisan) ou pour mettre en (Oryctolagus cuniculus) alors que l’EBHSV est capable d’infecter évidence l’impact de facteurs de régulation ; différentes espèces de lièvre dont le lièvre d’Europe (Lepus europaeus) et le lièvre variable (L. timidus). En 2010, un nouveau lagovirus apparenté au RHDV (RHDV2) a été détecté chez des lapins de garenne avant de se LES POINTS FORTS 2015-2016 propager à plusieurs espèces de lièvres. L’émergence d’un virus pathogène chez une espèce peut avoir deux • Poursuite de la mise en place du réseau national Lièvre. origines : un virus non pathogène qui acquiert de la virulence ou un virus • Lancement d’une étude de la survie juvénile des lièvres par suivis GPS qui vient d’une autre espèce. La première hypothèse a rapidement été avec les fédérations de l’Oise et de la Somme. privilégiée puisque des anticorps dirigés contre ces virus ont été détectés dans des échantillons sanguins récoltés dans les années 1970, avant les • Nouveau projet européen d’étude des origines des maladies virales des premières épidémies connues. Toutefois elle n’a pas été confirmée à ce lagomorphes. jour car les différents lagovirus non pathogènes isolés chez le lapin de • Publication d’une brochure sur l’aménagement de garennes artificielles. garenne et le lièvre sont génétiquement trop distants pour être des • Forte extension du réseau multipartenarial de sites perdrix rouge. ancêtres proches du RHDV, du RHDV2 ou de l’EBHS. Elle n’explique pas non plus les trois émergences récentes de lagovirus pathogènes alors • Achèvement de l’étude de la fréquentation des abreuvoirs par la qu’aucune autre n’avait été détectée précédemment. perdrix rouge. • Achèvement d’une étude régionale multisites de dynamique de La seconde hypothèse est celle d’un saut de barrière d’espèce depuis une populations et d’occupation de l’habitat par le faisan commun. espèce réservoir sympatrique, endémique ou précédemment introduite. Deux raisons nous ont conduits à l’hypothèse que le lapin de Floride • Achèvement d’un vaste programme d’études d’effets non intentionnels (Sylvilagus floridanus) pourrait être ce réservoir : les sauts de barrière de produits phytopharmaceutiques sur la perdrix grise et d’autres espèces d’espèces sont plus probables entre espèces proches et les introductions des plaines agricoles. massives de lapins de Floride en Europe dans les années 1970 et 1980 • Achèvement d’une étude des caractéristiques génétiques de populations coïncident avec l’émergence de l’EBHS et de la RHD. de perdrix grises. Cette hypothèse s’appuie aussi sur une étude épidémiologique conduite sur une population de lapins de Floride installée dans la plaine du Pô en 12 l RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016
Italie. Elle a mis en évidence la présence d’anticorps anti-RHDV et anti- comme certains néonicotinoïdes). En sus, ce travail a apporté une grande EBHSV chez cette espèce, prouvant sa sensibilité aux lagovirus. Une quantité de données de terrain pour l’évaluation du risque infection expérimentale de lapins de Floride par l’EBHSV a en outre post-homologation. démontré la faisabilité d’un saut de barrière d’espèce entre le lapin de Floride et les lagomorphes européens. Pontes Nous avons également mis en évidence une forte exposition potentielle Ces travaux bénéficient d’un financement européen au travers du des pontes (71 %) à une diversité de SA (108). La contamination de programme ECALEP en partenariat avec des équipes de recherche certains œufs a été avérée lors d’analyses à large spectre (500 substances françaises, italienne, suédoise et portugaise. recherchées). En effet, 15 molécules ont été détectées dans 24 des 52 pontes analysées. Parmi elles, 9 sont actuellement utilisées en agriculture. Références Les autres molécules ne sont plus autorisées, mais persistent dans Esteves P.J., Abrantes J., Bertagnoli S., Cavadini P., Gavier-Widén D., Guitton J.-S., Lavazza A., l’environnement. Les propriétés physico-chimiques, biologiques et Lemaitre E., Letty J., Lopes A.M., Neimanis A.S., Ruvoën-Clouet N., Le Pendu J., écotoxicologiques de ces SA ont été déduites en utilisant des modèles Marchandeau S. & Le Gall-Reculé G., (2015). Emergence of Pathogenicity in Lagoviruses: Evolution from Pre-existing Nonpathogenic Strains or through a Species Jump? PLoS dits « structure-propriété » (QSPR) ou « structure-activité » (QSAR). Les Pathog 11, e1005087. résultats mettent en évidence un potentiel d’effets adverses liés, par exemple, à la lipophilie importante de certaines SA ou encore à leur capacité Lavazza A., Cavadini P., Barbieri I., Tizzani P., Pinheiro A., Abrantes J., Esteves P., Grilli G., à se fixer sur un site actif d’enzyme en lieu et place d’hormones. Gioia E., Zanoni M., Meneguz P., Guitton J.-S., Marchandeau S., Chiari M. & Capucci L., (2015). Field and experimental data indicate that the eastern cottontail (Sylvilagus floridanus) is susceptible to infection with European brown hare syndrome (EBHS) Ce travail a posé des fondations solides en écotoxicologie terrestre, domaine virus and not with rabbit haemorrhagic disease (RHD) virus - Vet Res 46, 13. encore très peu exploré. Les perspectives se dessinent pour examiner et quantifier les éventuelles relations de cause à effet à l’échelle des individus, Exposition des perdrix grises aux produits phytopharma- puis le cas échéant en termes d’impact sur les populations. ceutiques en période de reproduction Les programmes PeGASE et M6P (environ 500 Références oiseaux suivis par radiopistage et 300 pontes), Bro E., Devillers J., Millot F. & Decors A., (2016). Residues of plant protection products menés en collaboration avec l’unité sanitaire in grey partridge eggs in French cereal ecosystems, Environmental Science and Pollution Research, 23: 9559-9573. de la faune et divers partenaires scientifiques (CTIS, VetAgro Sup) apportent des données Bro E., Millot F., Decors A. & Devillers J., (2015). Quantification of potential exposure essentielles sur le suivi des effets non of grey partridge (Perdix perdix) to pesticide active substances in farmlands, Science intentionnels des produits phyto of Total Environment, 521-522 : 315-325. pharmaceutiques sur la faune non-cible (plan Devillers J., Bro E. & Millot F., (2015). Prediction of the endocrine disruption profile Ecophyto du ministère chargé de l’Agriculture). of pesticides – SAR and QSAR in Environmental Research, 26(10): 831–852. Reproducteurs Millot F., Berny P., Decors A. & Bro E., (2015). Little field evidence of direct acute and Les femelles sont potentiellement exposées à une grande diversité de short-term effects of current pesticides on the grey partridge – Ecotoxicology and substances actives (dites SA, 157 recensées). Des résidus de diverses SA Environmental Safety, 117: 41-61. ont été détectés dans 40 % des 94 cadavres analysés. Cependant, il n’a Saxena A.K., Devillers J., Bhunia S.S. & Bro E., (2015). Modelling inhibition of avian pas été mis en évidence d’effets létaux aigus (i. e. mortalité survenant aromatase by azole pesticides – SAR and QSAR in Environmental Research, 26(7-9): rapidement). Ce résultat concorde avec la faible toxicité aiguë pour les 757-782. oiseaux des SA utilisées actuellement (sauf cas particuliers spécifiques © L. Armand, E. Bro, FDC 28, E. Millot RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l 13
LES ÉTUDES ET LES RECHERCHES SUR LES ESPÈCES © Romain Chazal/ONCFS Avifaune migratrice Présentation des principaux programmes Deux éléments principaux caractérisent les travaux conduits par l’unité Les espèces exotiques envahissantes forment une thématique particulière Avifaune migratrice : un grand nombre d’espèces concernées (45 si on à l’unité qui est impliquée sur deux espèces : l’érismature rousse et la s’en tient aux seules espèces chassables en métropole) et une dimension bernache du Canada. Deux volets composent ce thème : le suivi des internationale, en raison des déplacements annuels de ces espèces. effectifs et les plans de lutte ou de maîtrise des populations. Pour ce qui est de la partie Recherche, les travaux de l’unité se déclinent Enfin, l’unité s’intéresse plus particulièrement à trois écosystèmes et aux pour l’essentiel en trois actions : évaluer l’état de conservation des activités humaines les concernant : les étangs continentaux, les prairies espèces par un suivi des effectifs, identifier les mécanismes qui sous- de fauche et le bocage (voir page 30). Deux actions principales concernent tendent la dynamique des populations, élaborer des modèles de gestion cette thématique : l’évaluation de leur état de conservation sur le plan et proposer des systèmes d’évaluation de leurs performances. quantitatif (surfaces concernées et leur tendance) et qualitatif (diversité biologique animale et végétale) et le test de modèles de gestion de ces L’exploitation durable des oiseaux migrateurs chassables est clairement écosystèmes pour en améliorer la qualité. un sujet qui monte en puissance. La publication par l’AEWA, en 2015, d’un document qui en fixe les lignes directrices témoigne de cette évolution. Les travaux de l’unité viendront utilement renseigner les plans Zoom sur de gestion à venir. La pisciculture extensive, une activité profitable Pour ce qui est de la partie Expertise, l’implication de l’unité est plus aux anatidés nicheurs sur les étangs piscicoles particulièrement orientée vers l’appui aux ministères de tutelle Les grands complexes d’étangs piscicoles européens sont des sites (moratoires, dates d’ouverture/fermeture de la chasse, quotas de majeurs pour la reproduction des anatidés. Or, les difficultés économiques prélèvements…), l’appui et/ou la rédaction de tout ou partie de Plans de la filière piscicole sont à l’origine d’une interruption de l’élevage du d’action/gestion nationaux et internationaux (barge à queue noire, poisson dans plusieurs régions de France. Cette étude a cherché à décrire, courlis cendré), la participation active aux groupes d’experts pilotés par à l’échelle de l’étang, les conséquences pour la reproduction des canards d’autres organisations, nationales et internationales (CEPO, GEOC, de la cessation des pratiques piscicoles en Sologne. À l’aide de modèles AEWA, UICN) ou aux instances liées aux textes européens (notamment la linéaires généralisés, nous avons cherché à expliquer la variabilité du Directive Oiseaux) ainsi qu’à des groupes de travail face à l’émergence de nombre de couples de canards cantonnés et du rapport nichées/couples situations de crise (influenza aviaire, risques de collision pour l’aviation). dans trois catégories d’étangs : certains encore régulièrement empoissonnés et pêchés, d’autres non pêchés depuis quatre à dix ans, ou depuis plus de dix ans, en tenant compte du développement de la LES POINTS FORTS 2015-2016 végétation aquatique herbacée haute ou basse (couvert disponible pour la nidification), du degré d’envahissement des ceintures végétales par les saules Salix sp. (indice d’une non-gestion des berges) et des • Contribution à la rédaction du plan d’action international sur la tourterelle caractéristiques physico-chimiques de l’eau (transparence, pH) et du des bois, sous l’égide de la Royal Society for the Protection of Birds (Grande- sédiment des étangs (calcium échangeable, potassium, magnésium, Bretagne), commissionnée par l’Union européenne. phosphore, azote Kjeldahl et carbone organique). • Mise en œuvre de la première partie du programme Ressource Les analyses montrent que la pratique régulière de la pisciculture explique (Renforcement de l’expertise au Sud du Sahara sur les oiseaux et leur le mieux : 1) l’abondance des couples de canards cantonnés sur les étangs, utilisation rationnelle en faveur des communautés et de leur 2) le rapport nichées/couples – qui traduit la réussite de la nidification ou environnement) financé par le FFEM, la FAO et l’UE. l’attractivité d’un étang pour l’élevage des canetons – à condition que la • Déploiement de balises Argos sur des bécasses des bois. transparence de l’eau soit supérieure à 40 cm. Ces résultats suggèrent que • Expertise sur les origines géographiques et la quantification des flux la gestion d’un étang pour la pisciculture peut permettre d’améliorer ses migratoires d’alouettes des champs en automne-hiver en France. capacités d’accueil pour les canards nicheurs, et que la déprise piscicole peut avoir des conséquences négatives sur les populations locales • Soutenance d’une thèse relative à l’influence des pratiques culturales d’anatidés. sur l’utilisation des rizières par les canards hivernants. • Lancement d’une thèse sur le fonctionnement démographique des Référence populations de fuligules milouins et morillons en Europe de l’Ouest. Broyer J., Richier S., Boullard C. & Blottière E., (2016) – Fish farming abandonment and pond use by ducks breeding in Sologne (Central France) – European Journal of • Finalisation du Plan national de lutte contre l’érismature rousse. Wildlife Research – 62 (3): 325-332. • Expertise auprès de l’Autorité européenne de sécurité alimentaire lors des épisodes de grippe aviaire. 14 l RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016
L’origine très nordique des fuligules milouins Comparaison du nombre de couples de canards cantonnés a et morillons hivernant en France précisée et du rapport nichées/couples chez les plongeurs b (moyennes et par l’approche isotopique intervalles de confiance à 95 % dans trois catégories d’étangs : 1 = encore régulièrement pêchés (n = 15) ; 2 = abandonnés depuis 4 à 10 ans (n = 12) ; 3 = abandonnés depuis plus de 10 ans (n = 13) (sologne, 2014). Pour les oiseaux migrateurs, la manière dont les populations hivernantes a 12 et reproductrices sont connectées est essentielle dans une perspective de gestion. À partir d’une approche isotopique (variation géographique du nombre de couples d'anatidés 10 rapport des isotopes stables de l’hydrogène ou δ2Hf), nous avons 8 déterminé la provenance de 666 fuligules milouins et 190 fuligules 6 morillons capturés en France au cours de deux hivers (2005-2006, plus froid que la normale, et 2008-2009, dans les normales saisonnières). Les 4 signatures isotopiques des fuligules milouins montrent une distribution 2 bi-modale (figure 1), indiquant une forte contribution des zones de reproduction nordiques (60°-65° de latitude) et d’Europe centrale 0 1 2 3 (45°-55° de latitude) à la population hivernante française. Le pic de b 1,2 présence des individus d’origine nordique est atteint en décembre- canards plongeurs : rapport 1 janvier, au même moment que le pic d’hivernage. En revanche, le fuligule morillon ne présente pas de bi-modalité dans son patron de signatures 0,8 nichées/couples isotopiques mais une nette dominance des signatures d’origine nordique, 0,6 probablement scandinaves et russes (60°-70° de latitude, figures 2a, 2b). 0,4 Chez cette espèce, les individus d’origine nordique ont été observés tôt 0,2 dans la saison pour les échantillons issus de l’est de la France et tard dans la saison pour ceux récoltés dans l’ouest. Les effets de la rigueur de l’hiver 0 sur la distribution des individus sont confirmés chez le fuligule morillon - 0,2 avec des signatures plus nordiques enregistrées lors de l’hiver le plus 1 2 3 rigoureux, mais pas chez le fuligule milouin. Ces résultats suggèrent que les prélèvements cynégétiques sur ces deux espèces puisent globalement Les graines adventices contribuent à l’alimentation dans un immense réservoir constitué par les individus nés et se des alouettes des champs en hiver reproduisant dans les contrées nordiques. L’hiver est une saison cruciale pour de Référence nombreuses espèces d’oiseaux qui Caizergues A., Van Wilgenburg S.L. & Hobson K.A. (2016). Unraveling migratory doivent alors couvrir d’importants connectivity of two European diving ducks: a stable isotope approach – European Journal of Wildlife Research 62 (6): 701-711. besoins énergétiques. La détermi © Thibaut Powolny nation du régime alimentaire à cette Assignation géographique des fuligules milouins échantillonnés époque de l’année présente par en france 2005-2006 (n = 494), et 2008-2009 (n = 172) en fonction de leur signature isotopique (δ2hf). les couleurs représentent le nombre conséquent d’évidentes implications d’individus portant la signature correspondant à la valeur attendue pour en matière de conservation. Pour chaque pixel du modèle isoscape. les ronds rouges représentent les principales zones d’échantillonnage, les lignes rouge et noire représentent ❚ L ’alouette des champs préfèrent certaines espèces comme l’alouette respectivement les limites nord et sud des « flyways » europe centrale et les graines d’adventices aux céréales des champs (Alauda arvensis), nord-ouest europe de l’espèce (d’après Scott and Rose 1996). cultivées pendant l’hiver ces aspects sont toutefois peu documentés. À partir de 123 gésiers récoltés au cours de différents hivers (décembre-janvier) et dans deux régions de l’Ouest de la France, nos travaux se sont attachés en premier lieu à déterminer et quantifier la fraction en graines consommées par les oiseaux. 38 espèces de graines (16 familles) ont ainsi été identifiées, parmi lesquelles 37 étaient des espèces de plantes adventices. À l’inverse de précédents travaux conduits en Grande-Bretagne, aucune présence de grain de céréale (blé, orge…) n’a été relevée dans les gésiers, suggérant que seules les espèces adventices composent la fraction en graines du bol alimentaire hivernal. Des a simulations basées sur la valeur nutritionnelle des différentes espèces de graines indiquent que des alouettes s’alimentant exclusivement de Assignation géographique des fuligules morillons échantillonnés dans l’Est a et graines devraient ingérer 7 à 8 grammes ou entre 4 000 et 5 600 graines, l’Ouest de la France 2005-2006 (n = 155), pour couvrir leur besoin quotidien. Cette valeur s’est révélée proche de la et 2008-2009 (n = 22) en fonction de leur signature isotopique (δ2Hf). Les couleurs quantité que nous avons mesurée (6,7 grammes) chez des alouettes représentent le nombre d’individus portant maintenues en captivité et nourries exclusivement de graines de millet. la signature correspondant à la valeur attendue pour chaque pixel du modèle Ces résultats suggèrent que le maintien de couverts riches en adventices « isoscape ». Les ronds rouges représentent b est bénéfique à la conservation des alouettes des champs qui hivernent les principales zones d’échantillonnage, les lignes rouge et noire représentent dans les plaines cultivées de notre pays. respectivement les limites des « flyways » Europe centrale et Nord-Ouest Europe de l’espèce (d’après Scott and Rose 1996). Référence Eraud C., Cadet E., Powolny T., Gaba S., Bretagnolle F. & Bretagnolle V., (2015). Weed seeds, not grain, contribute to the diet of wintering skylarks in arable farmlands of Western France – European Journal of Wildlife Research 61 (1): 151-161. RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l 15
LES ÉTUDES ET LES RECHERCHES SUR LES ESPÈCES © Philippe Massit/ONCFS Cervidés et sanglier Présentation des principaux programmes Trouver un équilibre harmonieux et durable entre les populations Quatre axes de travail interconnectés d’ongulés sauvages et les différents usages de l’espace rural est un • Suivi patrimonial des ongulés et des modalités de gestion : état des exercice d’autant plus difficile que leurs composantes sont en perpétuelle populations nationales et efficacité de la gestion pratiquée, à des évolution. Car les changements globaux intègrent tout autant les échelles départementales et nationale. changements climatiques, dont on perçoit les effets sur l’environnement • Gestion du sanglier : dynamique de l’espèce et facteurs principaux de et en conséquence, la dynamique des espèces animales, que les ses variations ; outils techniques opérationnels pour la gestion. changements d’usages des espaces liés aux objectifs i) économiques pour • Équilibre forêt-gibier : interactions à court et moyen termes entre les activités agricoles et forestières ii) écologiques pour le maintien de la herbivores et habitats forestiers gérés ou non gérés – plus biodiversité iii) sociaux, pour l’accueil et le loisir en milieu rural. Et les particulièrement impacts sur le renouvellement de la forêt. Élaboration services éco-systémiques assurés par l’environnement sont une nouvelle de méthodes simples et opérationnelles de suivi du bon fonctionnement composante à intégrer. de l’écosystème forestier. L’étude du fonctionnement spatial et démographique des ongulés • Gestion opérationnelle des populations et des habitats : modélisation sauvages et la recherche des causes de variations des effectifs restent démographique, test de nouveaux ICE, mise en œuvre – échantillonnage essentielles dans nos travaux. Les connaissances sont déjà solides, qui ont et organisation humaine et technique – détermination des plans de facilité le développement d’outils de gestion pertinents. Mais il nous faut prélèvements. encore modéliser leur démographie future à l’échelle des peuplements animaux et étudier les conséquences du retour des grands prédateurs. Il faut aussi mesurer plus précisément l’impact de la chasse sur le Zoom sur fonctionnement des espèces. Ces dernières se montrent parfois capables de résister à l’augmentation de la pression de chasse, en évitant les Variations saisonnières du potentiel de dispersion chasseurs ou en développant des stratégies démographiques appropriées. des plantes par les ongulés sauvages Face à la réduction durable du nombre de chasseurs qui pourrait conduire Les ongulés sauvages sont très souvent présentés au travers des difficultés à l’impossibilité de contrôler la dynamique animale, il faut proposer des qu’ils engendrent. Ils assurent aussi des services écosystémiques très méthodes de gestion plus efficaces et moins consommatrices en moyens utiles, par exemple en dispersant des graines à longue distance, au même humains, tant pour les suivis que pour la planification des prélèvements titre que le vent, l’eau ou les activités humaines, permettant aux plantes ou leur réalisation. de mieux s’adapter aux changements globaux. Dans le cadre d’un projet La mise au point de solutions concrètes, intégrant autant la gestion scientifique piloté par Irstea, nous nous sommes intéressés aux variations cynégétique que la gestion des habitats, est donc toujours au cœur des saisonnières de la dispersion des plantes par endozoochorie, en utilisant préoccupations de l’équipe. comme modèles trois espèces communes d’ongulés sauvages : le chevreuil, le cerf et le sanglier. LES POINTS FORTS 2015-2016 Le temps de rétention interne et la proportion excrétée de graines a porté sur trois plantes (plantain, brunelle et ronce) proposées à des animaux en • Organisation du colloque sur les indicateurs de changement écologique, semi-captivité. La proportion de graines excrétées en fonction du temps Chambord 20 et 21 mai 2015 ; publication des actes en 2016. a été calculée en cumulant les trois espèces de plante. Les distances • Parution de la brochure technique Vers une nouvelle gestion du grand moyennes et maximales parcourues quotidiennement pendant trois gibier : les indicateurs de changement écologique. périodes : janvier-avril, mai-août et septembre-décembre ont été obtenues grâce à des suivis GPS sur trois sites d’études : Chizé, La Petite • Un troisième territoire du réseau Sylvafaune aboutit à une convention Pierre et Arc-en-Barrois. Des capteurs d’activité ont permis de déterminer entre les partenaires locaux en 2016. les périodes d’alimentation des animaux au cours d’une journée. Nous • Mise en place de l’Observatoire national des fructifications forestières avons couplé les temps de rétention et l’analyse des trajets pour estimer et de la reproduction du sanglier (22 territoires intégrés fin 2016). les distances potentielles de dispersion des graines ingérées par les animaux (figure 1). Nous montrons que le temps de rétention moyen et • Organisation de la recherche nationale pluridisciplinaire sur l’équilibre la proportion moyenne des graines libérées sont plus élevés chez le forêt-gibier : production en 2016 d’un premier plan d’action. sanglier. • TVB et infrastructures linéaires : synthèse sur facteurs favorables aux collisions routières, lancement d’une étude sur couloirs de circulation de la grande faune en Rhône-Alpes. Figure 1 : Proportion de graines excrétées en fonction de la distance de dispersion. • Lancement en 2015 d’une thèse sur les interactions forêt-gibier en contexte de changement climatique, en collaboration avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l’Office national des forêts (ONF). �• Lancement en 2016 d’une thèse ONCFS sur l’effet de la chasse et des variations environnementales sur la stratégie spatiale de deux grands ongulés forestiers. 16 l RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016
En conclusion, les proportions de graines excrétées bien plus élevées chez Alléger la mise en œuvre des ICE les sangliers, et cela malgré un temps de rétention plus long, nous laissent par un échantillonnage adapté penser que la rumination qui a lieu chez les cervidés a un effet négatif sur La mise en œuvre des indicateurs de changement écologique (ICE) est le passage des graines. Nous avons également pu mettre en évidence un d’ores et déjà bien engagée en France métropolitaine mais de nombreux effet de l’espèce animale et de la période de l’année sur les distances gestionnaires se heurtent à la difficulté de trouver annuellement des maximales parcourues, et donc sur les distances de dispersion des graines, moyens humains suffisants pour les réaliser. C’est notamment le cas de avec des distances plus importantes chez les sangliers, et chez les biches l’indice de consommation, le plus souvent relevé par les forestiers. Le des distances supérieures ou égales à celles des chevrettes suivant la protocole initial prévoit de relever un minimum de 150 placettes quelle période de l’année. que soit la surface du massif. S’il s’agit d’un massif de très grande taille, il faut respecter un minimum d’une placette pour 30 hectares, selon un Référence échantillonnage aléatoire systématique. Le travail peut donc devenir fastidieux. Pellerin M., Picard M., Saïd S., Baubet É. & Baltzinger C. Complementary endozoo Aussi, une méthode a été développée pour réduire l’effort d’échantillonnage. chorous long-distance seed dispersal by three native herbivorous ungulates in Europe Différentes approches statistiques ont été envisagées pour stratifier la – Basic And Applied Ecology 17, 2016. 321-332. population de placettes pour finalement retenir le « Point-Region quadtree » en raison de sa grande souplesse de mise en œuvre. Réponse de la végétation forestière à la baisse Cette méthode a d’abord été appliquée sur un massif test – le Pilat (Loire) – de la pression d’herbivorie en conditions naturelles pour lequel des relevés exhaustifs étaient disponibles sur un réseau de De fortes populations de cervidés impactent la dynamique forestière mais 1 800 placettes. Un échantillonnage au 1/5 soit 400 placettes retenues plusieurs autres facteurs tels l’eutrophisation naturelle des écosystèmes et permettant une faible perte de puissance statistique, a été finalement la gestion sylvicole peuvent aussi affecter celle-ci. En s’appuyant sur retenu et appliqué lors des années suivantes. plusieurs campagnes de mesures de la végétation conduites entre 1976 et 2006, il a été possible de documenter le rôle des herbivores sauvages sur Référence la composition et la dynamique de la végétation forestière. Michallet J., Aubry Ph., Chevrier Th., Chauveau S., Brisson J. M., Pellerin M., (2015). Cette étude au moyen terme a été conduite sur le massif forestier d’Arc- Réduire l’effort d’échantillonnage pour mesurer la pression des ongulés sur la forêt – Faune sauvage n° 309 – 18-24. en-Barrois (Haute-Marne), composé de deux unités distinctes, ayant subi des trajectoires cynégétiques distinctes : forts effectifs initiaux de cervidés dans l’unité nord significativement réduits par la suite et effectifs Exemple de réduction de l’effort d’échantillonnage pour la mise en œuvre de l’IC sur plusieurs massifs forestiers de la région Auvergne-Rhône-Alpes. stables et moyens dans l’unité sud. Les différentes campagnes de mesures ont porté sur les mêmes sites et ont suivi des protocoles identiques. Elle a montré que la pression d’abroutissement et les variables édaphiques conditionnaient la composition initiale de la végétation. Par la suite, une forte progression des plantes nitrophiles est notée en même temps que l’évolution vers des communautés végétales caractéristiques d’une faible pression d’herbivorie. Cette tendance est d’autant plus marquée que le changement de la pression d’herbivorie est intense. De tels résultats confirment le rôle de la pression d’herbivorie sur la composition de la végétation une fois pris en compte les autres facteurs (édaphiques, gestion sylvicole). Il est donc important de l’intégrer dans les suivis à long terme de la biodiversité forestière. Elle permet aussi d’envisager d’utiliser la composition spécifique des communautés végétales comme indicateurs de l’évolution de la pression d’herbivorie, à la condition que les variations de cette dernière soient significatives. Ceci est d’autant plus vrai que la reconstitution des communautés végétales est lente. Dans le cas présent, celle-ci est encore incomplète plus de vingt-cinq années après la réduction des effectifs. Référence Boulanger V., Baltzinger Ch., Said S., Ballon Ph., Picard J.F., Dupouey J.L., (2015). Decreasing deer browsing pressure influenced understory vegetation dynamics over 30 years – Annals of Forest Science 72. 367-378. © Jean-Luc Hamann/ONCFS ❚ L es grands herbivores comme le cerf élaphe influencent la composition des communautés végétales RAPPORT SCIENTIFIQUE 2015-2016 l 17
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