104 Numéro spécial : Troubles du comportement suite au colloque du 22 octobre 2021
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P912521 Bureau de dépôt : Nivelles TRIMESTRIEL - JANVIER 2022 - N°104 Numéro spécial : Troubles du comportement suite au colloque du 22 octobre 2021 104 Edité par l’AXFB asbl, avec l’aide de la Région Wallonne
AU SOMMAIRE... L’X presse, numéro 104, janvier 2021 Edito 3 Compte-rendu du colloque du 22 octobre 2021 : Exposé introductif présenté par Françoise Goossens 4 Compte-rendu du colloque du 22 octobre 2021 : Exposé du Professeur Willaye : Comprendre les comportements-défis 6 Compte-rendu du colloque du 22 octobre 2021 : Exposé du Professeur Magerotte : Comment accueillir des personnes ayant des comportements-défis dans des environnements inclusifs 18 Coordonnées des services Inter-Action du SUSA 30 Agenda 31 Compte-rendu du colloque du 22 octobre 2021 : Exposé de MM. Bodson et Durel : Comportements-violents : Des outils pour comprendre et réagir 32 Témoignage : Les personnes X fragile ne savent souvent pas exprimer la douleur 40 Invitation : La promenade des familles X fragile, le dimanche 27 mars 2022 42 Réseau X fragile et Facebook 43 Rejoignez-nous ! Aidez-nous ! 44 Comptes-rendus rédigés par Paul Damas et Bart Bleys, avec l’aide de Françoise Goossens AXFB asbl - N.E. 0674.767.830 - RPM. Nivelles Pachis du Capitaine 4 - 1457 Walhain (TSL) www.x-fragile.be - info@x-fragile.be Editeur responsable : Dominique DAMAS 2 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
EDITO A la demande d’un grand nombre de personnes qui n’ont pas eu la possibilité d’y assister, nous publions dans ce numéro spécial un large compte-rendu de notre colloque du 22 octobre dernier, qui avait pour objet, rappelons-le, « Les troubles du comportement : Comment les comprendre, comment les accompagner, comment les prévenir ? ». Il s’est déroulé à l’Institut de Pathologie et de Génétique (IPG) situé à Gosselies, sous la présidence de Madame Annick Comblain, de l’université de Liège. Je profite de l’occasion pour remercier chaleureusement l’IPG pour son accueil, Madame Comblain pour la direction des débats, ainsi que les quatre orateurs, MM. Willaye, Magerotte, Bodson et Durel, pour leurs exposés magistraux. Sans oublier non plus les deux bénévoles, Mmes Damas et Doncq, qui ont assuré le catering avec brio. La pandémie continue à avoir un impact sur notre vie quotidienne et, spécialement, sur celle des personnes porteuses d’une déficience intellectuelle. Elles éprouvent d’énormes difficultés à s’y retrouver, contraintes de faire face à tant de changements par rapport à leurs habitudes. Espérons, en ce début d’année, que nous pourrons tous retrouver rapidement des conditions de vie plus ordinaires. C’est le vœux que je forme pour nous tous, en vous souhaitant une très bonne année 2022 ! Paul Damas, secrétaire général Tous droits de reproduction réservés pour tous pays. La reproduction d’un article, même partielle, est soumise à l’approbation expresse du conseil d’administration de l’ASBL. L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 3
D. D. COMPTE-RENDU Exposé introductif présenté par Françoise Goossens En introduction à ce colloque, la présidente de l’AXFB asbl s’est d’abord réjouie de la possibilité que nous avions enfin de nous retrouver en présentiel, après un an et demi de restrictions dues à la pandémie de Covid-19. Elle a rappelé que l’IPG est un des cinq centres de génétique existants en Belgique francophone, à côté de ceux du CHU de Liège, de Saint-Luc à Woluwe, d’Erasme à Anderlecht et de l’HUDERF à Bruxelles. Elle a ensuite rappelé que le syndrome X fragile est la première cause de déficience intellectuelle d’origine héréditaire, la deuxième d’origine génétique (après la trisomie 21) et qu’environ 6 % des personnes porteuses du syndrome présentent des troubles du spectre autistique (TSA). Ce syndrome est causé par un gène appelé FMR1 du chromosome X. Cette mutation est la cause de déficience intellectuelle et d’hypersensibilité. Pour donner une idée de l’importance des choses, elle a ensuite présenté quelques chiffres. Selon les chiffres de l’INSERM (Institut National de le Santé et de la Recherche Médicale, France), la déficience intellectuelle 4 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
concerne entre 1 personne sur 400 et 1 personne sur 800. Le syndrome X fragile, lui, concerne 1 garçon sur 4000 et 1 fille sur 8000 à 9000, mais cette dernière fourchette est sans doute sous-estimée, car les filles sont sous-diagnostiquées. Cela signifie qu’il y a en fédération Wallonie- Bruxelles entre 750 et 900 personnes porteuses du syndrome X fragile, dans sa version active (mutation complète), tandis qu’il y a environ 13.000 personnes porteuses de la version latente (prémutation) du syndrome. La prémutation est responsable de trois syndromes : le FXTAS (tremblement- ataxie liée à l’X fragile), dont la prévalence chez les hommes est de 17% des porteurs de la prémutation âgés de 50 ans, et de 75 % des porteurs âgés de 80 ans ; le FXPOI (insuffisance ovarienne précoce due à l’X fragile) qui affecte environ 20 % des femmes porteuses de la prémutation et le FXPAC (états de santé liés à la prémutation X fragile) dont la prévalence n’est pas encore connue avec précision. Il n’existe pas encore de thérapie pour le syndrome X fragile. Le champ de recherche est vaste, incluant les thérapies géniques, qui ne manquent pas de poser des questions éthiques. En attendant les progrès en la matière, notre présidente a rappelé l’importance de savoir profiter de la « pétillance » et de l’innocence des enfants X fragile, qui ont généralement un caractère doux. Ceux qui présentent des comportements du spectre autistique voient heureusement ces troubles diminuer avec l’adolescence. En revanche, ils gardent à tous les âges l’anxiété sociale et le discours que l’on dit tangentiel, qui est souvent une échappatoire. Mais ce qu’on observe le plus dans le syndrome X fragile c’est sa grande variabilité, que les enfants soient calmes ou très agités n’a pas vraiment d’influence sur leurs compétences intellectuelles. Besoin de parler ? Nous sommes joignables par téléphone (voir en page 35), par email (info@x-fragile.be) ou sur le groupe fermé Facebook « Association X fragile Belgique asbl ». Il suffit d’introduire une demande via la page d’accès pour être membre. N’hésitez plus ! Rejoignez-nous ! L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 5
COMPTE-RENDU Exposé du professeur Willaye, de l’UMons, directeur du SUSA Comprendre les comportements-défis L’exposé préparé par le Professeur Willaye a été présenté par son collègue le Professeur émérite Magerotte, le premier ayant été empêché de participer au colloque à la suite d’un décès dans son entourage familial. La présidente de séance a remercié vivement l’orateur pour ce dépannage au pied levé. La fondation SUSA L’auteur a souhaité d’abord présenter la fondation SUSA, qui a été créée en 1984, en réponse aux préoccupations des parents d’enfants autistes. Tout est parti d’une formation résidentielle organisée pour des parents d’enfants avec déficience intellectuelle, dont une maman avait un enfant autiste. Un premier projet, appelé Caroline, en référence aux classe TEACCH en Caroline-du-Nord, a été monté en 1988 à destination des écoles. Il a été suivi par le projet CASA (Consultation Ambulatoire Spécialisée pour Autistes). Tout ceci a conduit à une reconnaissance par l’INAMI en 2000 et à la création de la fondation, qui chapeaute aujourd’hui plusieurs organismes : 6 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
le Service de Diagnostic en Autisme (SDA), dont l’objectif est d’établir pour chaque personne un Projet d’Intervention Individualisé (PII), les services d’accompagnement SUSA (RW) et SUSA Bruxelles, qui sont reconnus par l’AViQ et le PHARE, le Relais Condorcet qui propose une structure d’hébergement pour adultes et le SALSA qui est un service d’accueil pour cours séjours, le centre d’expertise pour les troubles graves du comportement Inter- Action, etc. La fondation est aussi à la base de la méthode d’analyse et de plusieurs publications scientifiques de référence dans le domaine. Le SUSA regroupe aujourd’hui quelque 115 professionnels : psychologues, orthopédagogues, médecins, logopèdes, enseignants, éducateurs/trices et personnels administratifs. Son activité croît sans cesse d’année en année, le nombre de personnes et familles aidées passant de 1147 en 2018 à 1431 en 2020 (soit une augmentation de près de 25% en 2 ans !). L’analyse de la répartition des personnes aidées en fonction de leur âge montre que la tranche d’âge la plus représentée est celle des 6-12 ans (30,52 %), juste devant la tranche des 3-6 ans (25,59 %). Il en va de même pour les personnes bénéficiant d’un accompagnement. La faible représentation des tranches d’âges supérieures à 30 ans amène l’orateur à poser la question : « Quelle est la qualité de vie des adultes autistes ? » Il présente ensuite le site web www.participate-autisme.be, développé en collaboration avec des collègues flamands, qui vise à apporter un certain nombre d’informations et d’outils pour les parents d’enfant autistes. Les troubles du comportement Après cette introduction, il aborde la question des troubles du comportement : agressions (frapper, mordre, …), automutilations (se griffer, se mordre, se frapper, …), destructions (vêtements, matériel, …), comportements antisociaux (crier, s’opposer, se déshabiller, …), comportements « alimentaires » (pica, vomissements, …), autostimulation (bruits, balancements, …), comportements « sexuels » aberrants (masturbation, attouchements, …). Pour clarifier les choses, il propose quelques définitions1 : L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 7
un trouble du comportement (TC), est une « action, ou tout ensemble d’actions, qui est jugé problématique parce qu’il s’écarte des normes sociales, culturelles ou développementales et qui est préjudiciable à la personne ou à son environnement social ou physique » ; un trouble grave du comportement (TGC) est « un trouble du comportement qui met en danger, réellement ou potentiellement, l’intégrité physique ou psychologique de la personne, d’autrui ou de l’environnement ou qui compromet sa liberté, son intégration ou ses liens sociaux ». On notera, dans ces définitions, l’importance de l’environnement, car il occupe une place capitale dans l’évaluation. On parle aussi de comportements-défis (CD) : « ce sont des comportements culturellement anormaux en raison de leur intensité, fréquence ou durée de sorte que la sécurité physique de la personne ou d’autrui est mise sérieusement en péril, ou des comportements qui rendent plus probable une limitation importante ou une impossibilité dans l’accès aux ressources ordinaires de la communauté. Il faut s’attendre à ce que les personnes qui présentent de tel comportement « challengent » les services pour une durée de temps importante ». Plus en détail, un comportement-défi peut avoir les conséquences suivantes : il nuit à la santé ou à l’intégrité physique de la personne elle-même ; il suscite l’utilisation de moyens de contrôle physique de la personne ; il compromet le niveau d’intégration résidentielle de la personne ; il compromet le niveau d’intégration communautaire de la personne dans les sphères autres que résidentielle ; il compromet les liens sociaux de la personne pertinents à son réseau de soutien ; il nuit à l’adaptation de la personne ou à ses apprentissages ; il amène des conséquences sur le plan légal et juridique pour la personne ; il amène une hospitalisation dans une unité fermée de psychiatrie ; il nécessite une surveillance accrue de la personne elle-même ; il nuit à la santé ou à l’intégrité physique d’autrui ; 8 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
il perturbe les activités d’autrui ; il génère chez autrui du stress et de la détresse ; il génère des conflits dans son réseau social (familial ou de services) ; il porte atteinte à la propriété (de la personne ou à celle d’autrui). Quelles sont les personnes qui présentent des comportements-défis ? Parmi les personnes avec déficience intellectuelle, on en compte, selon les auteurs, entre 10 et 19 %. 2/3 sont du sexe masculin. 2/3 sont des adolescents ou de jeunes adultes, ayant un besoin important d’assistance pour se nourrir, se laver et se vêtir ; ils ont plus de probabilité d’être incontinents et d’avoir des compétences de communication expressives et réceptives restreintes. Les formes les plus fréquentes de comportements-défis sont les suivantes2 : autres comportements : 9 à 12 % ; agressions : 7 % ; destruction : 4 à 5 % ; automutilation : 4 %. On notera que dans la majorité des cas, on rencontre 2 comportements- défis ou plus simultanés. Les facteurs associés aux comportements-défis sont la sévérité de la déficience intellectuelle, les troubles du sommeil, l’hypersensibilité sensorielle, les dysfonctionnements de la communication et les déficits sociaux, sans oublier parfois les problèmes psychiatriques et les médications psychotropes. Les changements dans la vie (passage à l’école secondaire ou à la vie adulte) sont des facteurs déclencheurs fréquents. L’orateur présente ensuite un graphique donnant le lien entre les comportements-défis et quelques profils, dans l’ordre décroissant : autisme (60 %), syndrome de Prader-Willi (55 %), syndrome de Williams (52 %), syndrome X fragile (38 %), syndrome de Down (32 %). L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 9
Recommandations Par rapport à ces comportements, de nombreuses recommandations sont disponibles. L’orateur présente plusieurs ressources, parmi lesquelles nous retiendrons : l’ANESM français (Agence Nationale de l’évaluation et de la qualité des Etablissements et services Socio-Médicaux), le Centre d’Expertise des soins de santé belge (KCE), l’INSSS québécois (Institut National d’Excellence en Santé et Services Sociaux), qui ont tous émis des recommandations dans les domaines tant aspects éducatifs que comportementaux et développementaux. Mais l’orateur pose aussi la question : « Les recommandations existent. Mais sont-elles appliquées sur le terrain ? Qu’en est-il de l’implémentation des bonnes pratiques, notamment dans les écoles ? Elles requièrent en effet l’adhésion de tous les acteurs : les pouvoirs organisateurs, les directions et les enseignants. » En France, il existe une certification des établissements. Pas en Belgique … Il s’agit d’offrir à l'enfant ou à l'adolescent une intervention psychosociale, éclairée par une évaluation fonctionnelle du comportement, en tant que traitement de première ligne. L'évaluation fonctionnelle devrait identifier : les problèmes somatiques éventuels, les facteurs qui semblent déclencher (ou favoriser) le comportement, les besoins traduits par les troubles du comportement, les topographies de comportement, les conséquences du comportement (renforcement). Les interventions psychosociales pour les comportements-défis doivent comprendre : un comportement-cible clairement identifié, un accent mis sur des résultats liés à la qualité de vie, l'évaluation et la modification des facteurs environnementaux, une stratégie d'intervention clairement définie, une programmation dans le temps pour atteindre les objectifs, une mesure systématique du comportement cible avant et après, une application cohérente dans tous les environnements, 10 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
un accord entre les parents, les soignants et les professionnels, de tous les paramètres sur la façon de mettre en œuvre l'intervention. Il faut privilégier les interventions psychosociales. Dans le cas où elles doivent être complétées par une médication, les antipsychotiques devraient être initialement prescrits et surveillés par un pédiatre ou un psychiatre qui devrait : identifier le comportement cible, décider d'une mesure appropriée pour surveiller l'efficacité (fréquence, gravité et mesure d’impact global), examiner efficacité en rapport avec les effets secondaires du médicament après 3-4 semaines (est-ce que cela marche ? une fois ? un certain temps ?), arrêter le traitement si aucune indication de réponse cliniquement significative n’apparaît après 6 semaines. Si une médication antipsychotique est prescrite : commencer avec une faible dose, utiliser la dose minimale nécessaire pour être efficace, examiner régulièrement les avantages du médicament antipsychotique en rapport avec les effets indésirables, vérifier si les médicaments sont efficaces sur la durée. Une cause des comportements-défis est souvent la douleur, que la personne concernée éprouve des difficultés à verbaliser. Il est donc important de reconnaître les situations où la personne a mal. Comment donc reconnaître et prendre en compte l’expression de la douleur ? L’expression de la douleur est différente d’une personne à une autre : Le seuil de tolérance peut être faible ou au contraire très élevé qui peut, par exemple, être lié à des traitements ; L’expression de la douleur peut alors être inexistante ou difficile à interpréter et être sous-estimée par les soignants. La non-reconnaissance de la douleur peut alors s’exprimer sous forme de «comportements-problèmes». Inversement, les «comportements- problèmes» peuvent provoquer des lésions physiques et des douleurs à prendre en compte. L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 11
Les causes de ces douleurs psychologiques et/ou physiques peuvent être multiples (otite, lésions dentaires, etc.) ou spécifiques et doivent alors être recherchées. Parmi ces causes, des soins douloureux répétés (soins d’hygiène de vie ou actes médicaux) ou des soins demandant à la personne des efforts physiques peuvent générer une appréhension des soins, de l’anxiété et entraîner des «comportements-problèmes». Modèle fonctionnel Ce modèle est basé sur l’idée que la qualité de vie des personnes est influencée par une série de facteurs : leurs possibilités de choix (activités, horaires, lieux, entourage, …), leurs possibilités de bénéficier de soins adaptés (médicaux, hygiène), leurs projets (continuité, vie, éducation, …), leurs possibilités de communiquer, leur possibilité de se valoriser, … L’absence ou la faiblesse de ces éléments est susceptible de provoquer des troubles du comportement, qui ont eux-mêmes un impact sur la qualité de vie des personnes, suite à la ségrégation ou à la violence (contention) dont elles peuvent faire l’objet, aux restrictions qui leurs sont imposées, aux médications qui leur sont imposées. Car, en cas de ségrégation, faut-il classer et regrouper les cas les plus graves ? Qui vont-ils imiter ? Quelqu’un qui a aussi des problèmes de comportement ? La solution réside dans un changement de paradigme. D’une vision négative (la personne est un problème) conduisant à tenter de la changer (par des stratégies punitives ou de la médication), il s’agit de passer à une vision positive des choses (la personne rencontre un problème) conduisant à chercher à identifier la cause du problème et à agir sur elle, notamment en se demandant ce qui la personne elle-même a à dire. A cet égard, il faut être très attentif à l’aspect visuel des choses : montrer et parler avec des gestes aide à la communication. Cette approche compréhensive consiste à mettre en balance les caractéristiques de la personne et les conditions d’environnement, qui conduisent aux troubles du comportement. Dans ce contexte la méthode d’analyse ABC (Antécédents, Behavior - soit Comportement -, Consequences) est très utile pour comprendre ce qui est complexe. 12 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
Elle se base sur un tableau avec quatre colonnes, comme illustré ci- dessous. SE A B C Antécédents Conséquence Comportement- Contexte Ce qui précède Ce qui suit problème Influence directement directement Ce que l’on voit, A et C Ce qui favorise Ce qui influence la entend, sent l’apparition probabilité future L’orateur illustre l’application de la méthode par un petit exemple. Les courses ont lieu en fin de journée, maman, papa et leur enfant sont fatigués et un peu nerveux à cause d’une journée difficile. Au supermarché, il y a beaucoup de monde (donc, beaucoup d’observateurs !), pas mal de bruit et les petites voitures sont bien en évidence à l’entrée de chaque caisse. L’enfant demande d’acheter une petite voiture; papa et maman lui refusent. Leur fiston se met alors à crier et à donner des coups de pied à papa. Finalement, papa et maman lui achètent et l’enfant se calme. C’est la nème fois que les choses se passent de la sorte. Le modèle fonctionnel s’établit comme suit. SE A B C Fin de journée Petites voitures Fatigue mises en évidence Crie Obtient la petite Monde et bruit Observateurs Donne des coups voiture Nème fois Refus de pieds On remarquera que tout renforcement positif intervenant dans les conséquences (comme, ici, le fait pour l’enfant d’obtenir exactement ce qu’il souhaitait) a de grandes chances d’augmenter la fréquence du comportement à problème … Différents antécédents et événements contextuels peuvent « aider » à la survenance de tels événements, comme par exemple : des troubles sensoriels, un déficit adaptatif, une absence de choix, des frustrations, un déficit communicatif, l’oisiveté, des déficits cognitifs, etc. Ces éléments peuvent être classés en trois catégories, ce qui aide à sortir de l’immédiateté dans l’analyse et permet de donner à celle-ci une vue plus L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 13
globale : contexte bio-développemental : diagnostic, santé, troubles sensoriels, consommation, médication, santé mentale, développement adaptatif et intellectuel, communication, sommeil, état émotionnel, puberté ; contexte physique : espace personnel, organisation, prévisibilité, matériel disponible, qualité de vie (environnement résidentiel, scolaire, professionnel) ; contexte socio-culturel : qualité de vie (contacts sociaux, préférences, choix), repères sociaux, cohabitation, stabilité des relations, interactions récentes (conflits, réprimandes), absences, décès, attentes, adéquation des programmes, types d’échanges, habitudes, histoire, expériences antérieures, valeurs. Une autre grille d’analyse des antécédents peut aussi être utilisée : médical : douleurs, inconforts, médication, épilepsie ; psychologique : « images », souvenirs, hallucinations ; apprentissage : activités ou tâches trop difficiles ou trop simples, trop nombreuses, trop répétitives, successives, sans choix possible, non valorisantes, avec des temps libres trop longs, pas assez organisés ; qualité de vie : inoccupation, rupture d’intensité, organisation imprévisible, choix trop restreints, contraintes des services ; adaptation : densité de population, stimuli sensoriels, organisation matérielle des activités, structure/lieux, changements/transitions ; frustration : objets, activités, sexualité, relation sociale, aliments ; communication : communication réceptive, attention, modalités de contacts sociaux, interactions « négatives ». Quant aux conséquences, elles ont de l’importance : bénéfices obtenus, effets sur et dans l’environnement, comme, par exemple : arrêt d’une demande, indifférence, bruit, réaction des pairs, immobilisation, effet visuel, … Evaluation fonctionnelle Au-delà d’une première analyse, les spécialistes disposent d’autres outils d’analyse fonctionnelle plus approfondies, basée sur des questionnaires successifs (version abrégé, version détaillée, version approfondie) et des 14 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
outils d’observation directe. Ils sont regroupés dans une méthode Impact disponible sur Internet. Les conclusions de ces analyses doivent permettre de mettre en place un Support Comportemental Positif autour de la personne. L’idée est d’apprendre à mieux communiquer afin de mieux comprendre. Au niveau de l’intervention, on distingue deux étapes essentielles : pro-action : ils faut distinguer deux axes d’action prévention : on agit sur les antécédents : Prévisibilité ; Carnets de règles – Règles explicites (visuelles) ; Contrats de comportements … positifs … avec un code (tarif) Adéquation du niveau des activités ; Organisation des tâches ; Aménagement / organisation des espaces ; Aménagement de votre communication ; Consignes « parsemées » ; Aménager les facteurs déclencheurs. apprentissage : on agit sur le comportement : Communication « fonctionnelle » : STOP – FINI - NON ; Autonomie … s’occuper seul ; Autonomie personnelle ; Scénario sociaux ; Apprendre à comprendre les autres ; Jeux de rôles ; Self-management ; Attention : on n’apprend pas sans être récompensé de ses efforts. ré-action : on agit sur les conséquences : Extinction - indifférence ; Amende (coût de la réponse) ; Time-out (« isolement » par rapport au renforçateur ; Réparation. L’orateur insiste sur le fait qu’il ne doit pas y avoir de ré-action sans pro- action, et sur l’importance de la cohérence et de la durée. L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 15
A titre d’exemple d’aménagement intéressant, l’utilisation d’horaires illustrés en images (pictogrammes) qui facilitent grandement la prévisibilité des événements. Toute cette approche, que l’on appelle SPC (Support Positif au Comportement), apporte des résultats, ainsi que l’expérience de nombreuses années de recherche le montre : sur 222 cas étudiés, 72 % des cas aboutissaient à plus de 60% de réduction des troubles ; 2/3 d’entre eux à 80 % de réduction ! Conclusion Avant de conclure, l’orateur souligne que les stimulations aversives que nous utilisons souvent ne sont pas du tout adaptées aux personnes auxquelles elles sont adressées. Punir n’a en effet jamais appris à quelqu’un ce qu’il est censé faire à la place ! Il faut donc plaider pour une modification des approches, tant dans le milieu familial que dans les institutions. Cela nécessite une meilleure formation des parents et des équipes, et aussi, une meilleure supervision. Est-ce que l’AViQ, la COCOF ou le Ministère de l’Education s’occupent-ils d’évaluer l’efficacité des classes spéciales, des classes TEACCH, des services pour adultes ? Ira-t-on jusqu’à lier les subventions à la qualité des services ? Le monde du handicap aura-t-il le choix du succès ? Et pour conclure, cette citation de Goethe : « Traitez les gens comme s’ils étaient ce qu’ils devraient être et vous les aiderez à devenir ce qu’ils peuvent être ». Références 1. Tassé et al., 2010. 2. Emerson et al., 2001. Bibliographie ANESM : Autisme et autres TED. Interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent. Mars 2012. ANESM : Les « comportements-problèmes » : prévention et réponse au sein des établissements et services intervenant auprès des enfants et adultes handicapés. ANESM : Troubles du spectre de l’autisme : intervention et parcours de vie chez l’adulte. Juin 2017. 16 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
KCE : Report 233. Management of autism in children and young people : a good clinical practice guideline. 2014. INESSS : Troubles graves du comportement : meilleurs pratiques en prévention, en évaluation et en intervention auprès des personnes qui présentent une déficience intellectuelle, une déficience physique ou un trouble du spectre de l’autisme. Mai 2021 Miguel Angel Verdugo et al. : Echelle San Martin. Evaluation de la qualité de vie des personnes ayant des déficiences significatives. 2014. INICO - FOSM. Willaye E. et Magerotte Gh. : Evaluation et intervention auprès des comportements-défis. de Boeck. 2e éd. Un article vous interpelle ? Vous souhaitez réagir ? Apporter un témoignage ? Poser une question ? N’hésitez pas ! Envoyez-nous un mail à info@x-fragile.be ! Nous tiendrons compte de votre message. APPEL À NOS MEMBRES Communiquez-nous votre adresse mail ! Peut-être votre nom, sur l’étiquette adresse de ce numéro, est-il suivi d’un astérisque ? Si oui, cela signifie que nous ne disposons pas de votre adresse mail ! Avec la conséquence que nous sommes dans l’incapacité de vous adresser nos messages ponctuels, comme, par exemple, nos invitations à participer à une rencontre virtuelle ou toute question qui pourrait vous intéresser. Si vous êtes dans le cas, ne perdez donc pas une minute et adressez-nous un mail à info@x-fragile.be, avec pour objet « Adresse mail ». Nous adapterons immédiatement notre base de données et vous ne raterez plus rien de nos activités ! L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 17
COMPTE-RENDU Exposé du professeur émérite Magerotte, de l’UMons Comment accueillir des personnes ayant des comportements-défis dans des environnements inclusifs ? En guise de préambule, l’orateur se demande ce que l’on entend par environnement inclusif ? Sans répondre directement à la question sur laquelle il reviendra, il ajoute « Est-ce le cas des institutions de l’AViQ ? ». Il présente ensuite le plan de son exposé, articulé en quatre parties : 1. Comment les intervenants de 1ère ligne (ceux qui sont « au charbon ») réagissent-ils aux troubles du comportement ? 2. Pourquoi l’élève (celui qui est à l’école obligatoire de 5 à 18 ans !) a-t-il des troubles du comportement ? 3. Que faire pour apprendre à vivre ensemble en classe inclusive lorsque l’on a compris « pour quoi » ? et en école ? 4. Enfin, un adulte qui a des comportements-défis peut-il vivre « bien » dans un habitat inclusif solidaire (HIS) ? Il propose ensuite les objectifs qui devraient être partagés : qu’en tant que parents, personnes en situation de handicap, professionnels et citoyens, nous : 18 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
ayons davantage d’informations sur le mouvement inclusif (école et habitat) et soyons motivés pour implanter des pratiques d’intervention inclusives … aussi pour les personnes ayant des troubles du comportement. 1. Comment les intervenants de 1ère ligne réagissent-ils aux troubles du comportement ? Il faut d’abord circonscrire le contexte, du point de vue de l’intervenant, enseignant ou parent : De quels comportements-défis parle-t-on ? des comportements difficiles à vivre (automutilation et agressivité physique, surtout), imprévisibilité, absence de communication, difficulté à exprimer des besoins, degré de déficience, … Quel est le contexte ? L’élève est-il seul ? Quelle est la cohésion de la famille, de l’équipe ? Le contexte physique (grand magasin versus école, ressources matérielles, …) et social (autres enfants ou adultes, …) ? La cohésion des encadrants est primordiale : il est impératif de se mettre d’accord sur ce que l’on voit et sur ce qu’il convient de faire. Une autre question est de savoir quel modèle l’enfant a-t-il ? Le rôle de l’imitation est fondamental. Ensuite, la question du comportement des intervenants, enseignants ou parents, se pose : réactions affectives (stress, …) et cognitives (inférences sur le comportement-défi : « Pourquoi fait-il cela ? Il m’en veut ? … ») facteurs individuels (expérience et croyance d’auto-efficacité, taille, force, anxiété, problèmes familiaux, …) ce qui les conduit à punir ou à se fâcher ou à ne rien faire, avec le danger d’abandonner des stratégies, de comportements peu positifs, voire de maltraitance … A noter que le langage utilisé a toute son importance. Que comprend, par exemple, une personne avec déficience intellectuelle, si on lui dit « perdre les pédales » ? De nombreuses expressions courantes sont tout à fait incompréhensibles pour elles ! L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 19
Enfin, quelles sont les conséquences pour l’intervenant, enseignant ou parent : il échappe au comportement-défi, mais celui-ci ne diminue pas rapidement, voire persiste … l’intervenant risque de faire un burn-out, ce qui désorganise l’équipe. Pour le jeune, la tendance au comportement-défi ne diminue pas rapidement, voire persiste. Quelles solutions proposer ? Comprendre d’abord le « pour quoi » (en deux mots), les raisons de la colère. Et puis, soutenir le personnel. 2. Pourquoi l’élève a-t-il des troubles du comportement ? Imaginons un élève – appelons-le Jean – dans une classe de 15 à 20 élèves « ordinaires ». Lors d’un exercice, il jette soudainement son matériel par terre. Pourquoi, pour (obtenir, éviter, susciter, …) quoi, fait-il cela ? Peut-être parce que l’exercice est trop difficile pour lui ? Dans ceD.cas, D. le fait de jeter le matériel lui permet d’échapper à une situation désagréable « avant ». Peut-être trouve-t-il l’exercice ennuyeux ? La fonction du comportement-défi est la même dans ce cas : échapper à une situation désagréable. Peut-être est-il simplement fatigué ? Même constat. Dans ces trois premiers cas, le « pour quoi » est « pour échapper à la situation désagréable ». Mais aussi peut-être souhaite-t-il seulement avoir l’attention de l’enseignant ? Dans ce cas, le « pour quoi » est « pour obtenir l’attention de l’enseignant ». Enfin, peut-être souhaite-t-il obtenir l’attention des autres élèves, qui se mettent à rire ? Cette première analyse nous permet d’identifier des raisons possibles (pour échapper à l’activité désagréable ou obtenir de l’attention). Mais nous devons aussi identifier le contexte « avant » le comportement-défi : Où : cela se passe en classe, lors d’un exercice à faire seul ; Quand : vers 11h00 ; Avec qui : lorsque l’enseignant insiste ; 20 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
Lors de quelle activité : tâche difficile (ou trop facile, ennuyeuse) ; Contexte : n’a rien mange le matin (d’où faim, fatigue) ; Contexte : les autres élèves … l’organisation de la classe … Une analyse de différents cas de comportements-défis a permis d’établir le classement suivant, des raisons de ces comportements : 34 % des cas sont motivés par une tentative d’échappement ou d’évitement d’une situation ; 35 % des cas sont motivés par une recherche d’attention (25%) ou d’un objet (jeu, nourriture, …) ; 15 % des cas sont automatiques : auto-renforcement par un comportement « agréable » (stéréotypies, automutilation, …) ; 15 % des cas ont des causes multiples : avec le risque de voir un comportement se généraliser comme outil de communication générique ! 3. Que faire pour apprendre à vivre ensemble en classe inclusive lorsqu’on a compris « pour quoi » ? L’orateur rappelle qu’il existe en société quatre situations possibles (voir illustration) : L’exclusion, où un ensemble non structuré d’individus ne sont pas admis au sein du cercle des « élus » ; La ségrégation, où un groupe structuré de personnes n’est pas admis dans le cercle ; L’intégration, où un groupe de personnes, bien qu’admis dans le cercle, forme un groupe à part ; L’inclusion, enfin, où dans le cercle on ne fait aucune différence entre les individus quels qu’ils soient. Seule cette dernière situation est conforme à la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées (CNUDPH). L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 21
L’orateur cite alors Antoine de Saint-Exupéry : « Si tu diffères de moi, loin de me léser, tu m’enrichis ! ». Cela nécessite évidemment de l’ouverture d’esprit. Qu’est-ce qu’une école inclusive ? C’est une école qui accueille tous les élèves, y compris ceux à besoins spécifiques, qui habitent dans un environnement proche, dans le cadre d’une collaboration soutenue entre des équipes (celles d’une école ordinaire et d’une école spécialisée, ainsi que des équipes de l’AViQ et du PHARE), au bénéfice de tous les élèves, avec une transformation systémique des contenus, méthodes d’enseignement, approches, structures et stratégies en éducation1. Le comportement-problème devient un comportement-défi s’il : est un danger pour la personne ; D. D. est un danger pour d’autres personnes ; rend l’intégration sociale difficile et donc aussi l’accès aux services « ordinaires » ; risque de devenir plus grave, si on n’intervient pas et compromet d’autres apprentissages, et si on décide qu’il faut intervenir et qu’une action est réellement organisée. Que faire alors ? C’est un défi pour tous, à travers le PIA, qui doit traduire une véritable « alliance développementale » entre les enseignants, les parents, l’élève, l’AViQ, la COCOF. A ce propos, l’orateur rappelle que le PIA (Plan Individuel d’Apprentissage) est inspiré de l’Individual Education Program américain, qui remonte à 1980, et a été adopté en Fédération Wallonie-Bruxelles en 2004. Depuis 2009, la participation de l’élève et de ses parents à son élaboration est obligatoire, car « Ce que tu fais pour moi, si tu le fais sans moi, tu le fais contre moi » (proverbe marocain). Et il n’y a pas que des troubles du comportement ! Il convient aussi d’observer et de noter tous les comportements « positifs », « de collaboration » et dans quels contextes ils se manifestent. Par exemple, la proximité d’un élève calme ou la solitude (jouer seul ou avec un casque ?) … Que faire après un comportement d’évitement ? Demander à l’élève de verbaliser son mal-être. Ensuite, par exemple, simplifier la tâche, l’aider, 22 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
avec des renforçateurs …, proposer une autre tâche, ou l’écourter, … Mais surtout : revoir l’organisation de la vie en classe : revoir l’aménagement de la classe (flexibilité) : dans une classe flexible, l’environnement est organisé d’une façon flexible, en agissant sur la disposition des meubles, avec des emplacements isolés dans la classe ; assurer la prévisibilité (horaires des élèves, des professeurs), adapter la façon de parler aux élèves : utiliser des supports visuels, parler simple, en étant attentif à ne pas utiliser des expressions qui littéralement ne signifient rien, comme par exemple « couper le courant » ; organiser le travail par deux, en plaçant un élève « ordinaire » avec un élève « à difficulté » : le tutorat est le plus vieux métier du monde ; revoir le choix des activités, l’ordre des tâches, etc. L’élève avec comportements-défis apprendra dans la classe/l’école inclusive : si l’équipe a identifié les raisons (le pour quoi) de ces comportements (grâce à une évaluation fonctionnelle) et si l’équipe s’est mise d’accord dans le PIA sur les stratégies « positives » à employer dans la classe. C’est ainsi que l’on pourra mettre en place un soutien au comportement positif (Positive Behavior Support – PBS2). Cela nécessite de mettre en place, dans la classe et dans l’école, une prévention primaire : enseigner toutes les attentes de l’école ; soutien scolaire ; enseigner des comportements sociaux ; prévoir des renforcements positifs pour tous (ex. féliciter …) ; favoriser les contacts entre tous les élèves via le tutorat (apprentissage et relations sociales). Au niveau de groupes, on peut mettre en place une prévention secondaire : programmes de self-management : apprendre à s’autogérer ; enseignement intensif de compétences sociales ; enseignement de compétences scolaires. L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 23
Enfin, au niveau individuel, on peut mettre en place une prévention tertiaire : évaluation fonctionnelle des troubles du comportement ; apprentissage de comportements alternatifs positifs (compétences scolaires et compétences sociales). 4. Un adulte avec comportements-défis peut-il « vivre bien » dans un habitat inclusif solidaire ? Pour l’orateur, une personne adulte qui cumule situation de handicap et comportements-défis devrait pouvoir vivre chez elle, de façon à participer de façon pleine et entière à la vie de la cité (voir CNUDPH) et, comme tout adulte, de façon à remplir des rôles sociaux que tout adulte remplit (ou devrait remplir). Qu’entend-t-on par « rôles sociaux » ? C’est : être membre d’une famille (enfant de ses parents, membre d’un couple et parent, membre d’une grande famille, comme oncle, tante, …) ; être autonome dans la vie quotidienne (repas, toilette, etc.) ; être ami, voisin ; pouvoir apprendre tout au long de sa vie ; travailler ou exercer une activité socialement valorisée ; participer à des activités de loisir, en particulier inclusives ; être membre de groupes proposant des activités sociales (parti, église, club de sport, de jeux, etc.) ; être membre de la cité, comme tout citoyen et toute citoyenne ; être retraité. Les habitats inclusifs solidaires ont pour objectif de favoriser les possibilités d’exercer ces rôles sociaux. Mais qu’est-ce qu’un habitat inclusif solidaire ? C’est : un environnement ordinaire que les habitants s’approprient ; accueillant un nombre limité de personnes (c’est le point le plus délicat) ; assurant aux personnes un soutien adapté tenant compte de leurs capacités et de leurs projets ; favorisant le développement d’un réseau de soutien volontaire (et pas seulement de professionnels) pour chaque habitant ; 24 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
faisant appel à des ressources professionnelles extérieures en soutien et en cas de difficultés, afin d’éviter l’exclusion ; favorisant un maximum d’activités inclusives. L’asbl Habitat et Participation (www.habitat-participation.be) milite en vue de la multiplication de ce type d’habitat. En pratique, un habitat inclusif solidaire est une maison ou un appartement qui : accueille au maximum 5 ( ?) personnes, est proche des transports en commun, se situe dans un quartier résidentiel ordinaire, répond à des critères personnalisés, n’est pas réservé à une catégorie de personnes (en terme de types ou d’intensité de handicap), est occupée par des personnes ayant un style de vie compatible. Dans ce type d’habitat, la personne : dispose d’une adresse individuelle, assume régulièrement les dépenses de la vie quotidienne (loyer, gaz, électricité, alimentation, …), voit ses choix individuels pris en compte avant les choix du groupe, a un groupe de soutien (parents, amis) qui est centré sur la personne, son environnement familial, ses amis, a un « life-coach » qui l’accompagne un certain temps. Afin de prévenir les troubles du comportement, des professionnels interviennent de temps à autre : l’accompagnement, variable dans le temps, se fait en fonction des besoins individuels, via le projet individualisé « rien pour nous sans nous » ; pour le reste, la personne peut faire appel à ses ressources ordinaires : réseau social, service d’accompagnement, parrainage citoyen, etc. Les professionnels qui interviennent dans ce cadre mettent en place des stratégies spécifiques aux problématiques de la personne concernée, avec le recours éventuel à des spécialistes du trouble du comportement. L’adulte avec comportements-défis pourra vivre bien chez elle : L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022 25
si l’équipe a identifié les raisons (le pour quoi) de ces comportements grâce à une évaluation fonctionnelle et si l’équipe s’est mise d’accord dans le projet individualisé sur les stratégies « positives » à employer dans l’habitat inclusif solidaire. Les professionnels utilisent un système de gestion des activités pour que la personne adulte ait un style de vie valorisé, en réalisant des activités : dans la communauté (« intégration physique ») ; avec des personnes significatives (parents, amis, connaissances = « intégration sociale ») ; de la manière la plus autonome et la plus compétente possible ; qui ont sa préférence ; qui sont variées et liées à un objectif. A chaque activité sont évidemment liées des compétences. Par exemple, pour pouvoir aller chercher le journal de l’autre côté de la rue (activité), il faut apprendre à traverser (compétence). Dans ce contexte, il est opportun d’utiliser un répertoire d’activités. On peut distinguer trois grands domaines : le domaine des loisirs, domaine qui offre des opportunités et qui comporte les possibilités suivantes : média, exercices physiques, jeux/ art/hobbies, événements, visites et rencontres ; le domaine de l’autonomie personnelle, domaine qui regroupe plutôt des obligations auxquelles la personne doit satisfaire et dans lequel on trouve : les soins personnels, l’alimentation, les tâches ménagères, la gestion personnelle, les services de soins personnels ; le domaine des activités de service, qui donne la possibilité de faire valoir ses compétences et qui offre une large palette d’activités : entretien des espaces et des objets, entretien des espaces verts, cuisine et restauration, travail administratif, activités artistiques et artisanales, activités d’élevage et de soins aux animaux. Ce panorama est évidemment non exhaustif et peut être étendu en fonction des cas individuels, en fonction de ce que la personne aime et souhaite faire. Pour chacun des domaines d’activité proposée, on peut identifier diverses possibilités et évaluer dans quelle mesure elle est à recommander ou à 26 L’X Presse 104 | AXFB asbl | janvier 2022
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