Appel à communication du Réseau Sociologie du droit et de la justice " (RT 13) - Congrès - AFS 2021 - Association Française de Sociologie

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Appel à communication du
Réseau     Thématique      «
Sociologie du droit et de la
justice » (RT 13) – Congrès
AFS 2021
Le réseau thématique « Sociologie du droit et de la justice »
(RT13) de l’Association Française de Sociologie a pour
vocation de réunir les chercheur·se·s et doctorant·e·s
travaillant sur le droit ou la justice avec les méthodes et
les questionnements des sciences sociales. Le RT13 met en
relation des travaux fondés sur des bases empiriques solides,
sans exclusivité de méthode, ni de courant d’analyse. Au-delà
des chercheur·se·s prenant directement pour objets les
institutions, les normes, les acteur·ices et les dispositifs
juridiques et judiciaires, le réseau est ouvert à celles et
ceux qui sont amené·e·s à travailler sur le droit et/ou la
justice à travers d’autres objets (organisations, action
publique, mobilisations ou professions, pour ne citer que
quelques exemples). Il est également attentif à travailler ses
objets privilégiés à partir des outils analytiques
transversaux aux sciences sociales.

Dans les discours publics, il n’est pas rare de percevoir le
droit tantôt comme un vecteur de progrès social, tantôt à
l’inverse comme une institution intrinsèquement conservatrice.
Traiter de cette question en sociologues amène à se demander,
si inversement, le changement social entraîne des
transformations du droit, voire à envisager la co-construction
du changement social et du changement juridique. Dans quelle
mesure et à quelles conditions le droit anticipe-t-il,
produit-il ou, au contraire, suit-il les transformations de la
société ? Le congrès 2021 de l’AFS nous invite à renouveler
notre regard sur ces questions, qui irriguent le monde
universitaire, mais aussi les mouvements sociaux et les
institutions publiques. Les sessions organisées par le RT13
inviteront leurs participant·e·s à revisiter des questions qui
structurent de longue date la sociologie du droit tout autant
qu’à ouvrir de nouvelles perspectives à l’aune des
transformations sociales et juridiques contemporaines. Les
propositions de communications pourront s’inscrire dans l’un
des trois axes suivants.

1) Le droit : moteur ou obstacle au changement social ?

Le Congrès sera d’abord l’occasion de revisiter un débat
classique des sciences sociales qui vise à déterminer les
conditions dans lesquelles le droit cesse d’être un facteur
d’inertie et de reproduction de l’ordre social pour devenir un
instrument au service du changement social. Les mouvements
sociaux ont recours au droit pour défendre leurs causes, par
exemple en formulant leurs revendications en termes de droits
ou en contestant des pratiques étatiques ou privées devant la
justice. Mais l’efficacité de « l’arme du droit » varie. Elle
dépend d’abord de facteurs propres aux institutions, qui vont
des trajectoires sociales des juges à l’organisation interne
des bureaucraties chargées de rendre effectifs les droits
nouvellement acquis, elles-mêmes marquées par des processus
d’inertie et de changement. La structuration des mouvements
sociaux doit aussi être considérée, tant sous l’angle des
alliances tissées avec des professionnel·le·s du droit que des
altérations plus ou moins grandes des mots d’ordre afin de les
rendre solubles dans les catégories juridiques. Les débats
actuels sur la réponse à apporter aux violences sexuelles, aux
violences policières ou encore aux atteintes à
l’environnement, montrent à quel point ces enjeux sont
d’actualité. Inversement, les mouvements sociaux sont aussi
“saisis par le droit”, au sens où leur encadrement juridique
par les pouvoirs publics pèse sur leur capacité à faire
émerger des causes, à faire avancer leurs revendications et à
bousculer l’ordre établi. La place du droit et des
institutions juridictionnelles dans la période de restriction
des libertés publiques que nous traversons pose ainsi question
aux sociologues que nous sommes.

Session croisée RT13/RT18       (sociologie   des   relations
professionnelles)

Pratiques syndicales et usages du droit au regard des
transformations récentes du Code du travail

Les changements sociaux dont il est ici question peuvent se
lire à l’aune des nombreuses évolutions législatives
intervenues ces dernières années dans le droit du travail,
avec notamment la loi du 8 août 2016 et les ordonnances du 22
septembre 2017. Ces réformes ont concerné des domaines très
variés, affectant les règles des négociations collectives, le
recours aux prud’hommes, les licenciements collectifs, etc. La
principale tendance de ces nouvelles lois est de faire des
accords d’entreprise l’outil privilégié de la régulation des
relations de travail comme en témoigne la nouvelle
organisation du code du Travail dans lequel les dispositions
prévues par la loi ne disparaissent pas, mais deviennent
supplétives, c’est-à-dire ne s’appliquent qu’en l’absence d’un
accord d’entreprise. En parallèle, les différentes instances
de représentation du personnel (délégué·e·s du personnel,
comité d’hygiène et sécurité et des conditions de travail,
comité d’entreprise) ont disparu au profit d’une instance
unique, le comité économique et social (CSE). Comment les
acteurs·rices – représentant·e·s de direction, du personnel,
délégué·e·s syndicaux, salarié·e·s – se saisissent de ces
nouveaux dispositifs ? En quoi la multiplication des nouveaux
textes législatifs encourage-t-elle certaines formes de
judiciarisation – ou au moins de juridicisation – des
relations professionnelles ? Assiste-t-on à des pratiques d’«
endogénéisation du droit » très diversifiées ou, au contraire,
similaires selon les entreprises ? Dans quelle mesure les
activités syndicales sont-elles affectées par la disparition
des anciennes instances de représentation du personnel et
l’arrivée des CSE ? En partenariat avec le RT 18 « sociologie
des relations professionnelles », cette session cherche à
étudier les usages du droit des syndicats, des employeurs et
des salariés au regard des récentes évolutions du Code du
travail.

2) Changement juridique et transformations individuelles

La question du droit et du changement social peut également
être abordée dans une perspective plus microsociologique,
attentive à leur place dans les transitions biographiques,
individuelles et collectives. Cet axe réunira des recherches
qui interrogent le point de vue des citoyennes et des citoyens
qui ont affaire au droit et à la justice dans les moments
critiques de leur vie personnelle ou professionnelle. Former
ou rompre une union conjugale, devenir parent ou organiser sa
succession, chercher ou perdre un emploi ou un logement,
s’installer dans un nouveau pays, sont autant d’occasions de
se saisir (ou non) du droit pour définir son identité, avoir
accès à des ressources, organiser ses relations sociales. Par
la nécessité de justifier les déplacements individuels, de
limiter les regroupements collectifs ou encore de porter le
masque, la gestion de la pandémie actuelle exacerbe également
la question du droit et des droits dans la vie quotidienne.
Ces expériences profanes du droit sont une des logiques qui
guident les actions, les valeurs et les intérêts des individus
et des groupes; elles dépendent des dispositions sociales,
économiques et culturelles ainsi que des configurations
matérielles et institutionnelles du droit. Par ailleurs, la
formalisation juridique de nouveaux droits, les réformes
législatives instituant de nouvelles procédures ou de nouveaux
instruments juridiques peuvent permettre de faire valoir
certains droits, à des victimes d’ester en justice ou de
demander des réparations. On peut dès lors s’interroger sur
les effets de ces transformations juridiques sur les personnes
qu’elles concernent directement, sur leurs rapports au(x)
droit(s) ou leur conscience du droit et de leurs droits. De
même que certaines recherches interrogent le sentiment de
justice, le sens social et politique des sanctions pénales,
ainsi que l’expérience des rituels et des interactions
judiciaires par les justiciables, cet axe est donc ouvert aux
propositions qui étudieront ce que tout·e un·e chacun·e, en
fonction de sa place dans l’ordre social, fait avec ces règles
inédites, entre conformation, évitement et contestation.

3) Droit, justice et sociologie du droit en changement

Enfin, ces sessions du RT13 entendent être particulièrement
ouvertes aux jeunes chercheurs et chercheuses. Plusieurs
raisons à cela : d’abord, les journées doctorales du réseau
n’ont pu avoir lieu en mars 2020, alors même que la jeune
génération joue un rôle majeur pour renouveler la sociologie
du droit – dans ses méthodes, dans ses objets comme dans ses
cadres d’analyse. Ensuite, le contexte pandémique affecte
particulièrement les jeunes chercheuses et chercheurs,
compliquant les enquêtes de terrain dont le temps est pourtant
compté au regard du format actuel des thèses. Cet axe appelle
des propositions réflexives pour faire face à la
déstabilisation induite par la crise dans le déroulement des
recherches. Il invite aussi à penser les enjeux éventuellement
spécifiques des terrains juridiques et judiciaires dans le
contexte pandémique : dans quelle mesure l’épisode du
confinement a-t-il ouvert une fenêtre d’opportunité pour
transformer l’organisation du travail dans les juridictions,
pour accélérer la “digitalisation” de la justice, pour
déjudiciariser certains contentieux ou encore pour faire
émerger de nouvelles normes – par exemple en matière de
télétravail ? Cette liste non exhaustive de pistes de
recherche témoigne de l’ouverture du réseau aux questions qui
se posent ici et maintenant aux sociologues du droit et de la
justice.
Les propositions de communications ne devront pas excéder 5
000 signes. Elles comporteront un titre, la question de
recherche, les principaux arguments ou la thèse démontrée, les
principaux résultats, les méthodes mobilisées, sources et
terrains étudiés, le cadre théorique dans lequel elles
s’inscrivent, ainsi qu’une bibliographie sommaire. Elles
devront, le cas échéant, préciser si elles sont destinées à la
session croisée organisée par les RT13 et RT18.

Elles devront obligatoirement être mises en ligne sur le site
de l’AFS (http://afs-socio.fr/) avant le 30 janvier 2021

Calendrier

30 Janvier 2021 : réception des propositions de communication
sur la plateforme du RT13

Mi-mars 2021 : réponse du RT13

Début juin 2021 : envoi aux discutant·es et aux responsables
du RT13 du support de la communication, d’une longueur de 10 à
15 pages

6-9 juillet 2021 : congrès de l’AFS

Appel à contribution pour un
numéro thématique de la revue
Loisir   &   Société   :   La
digitalisation des activités
physiques   et   de  loisirs
sportifs : enjeux individuels
et sociaux
Ce numéro thématique vise à rassembler des contributions
éclairant les différentes facettes de la digitalisation à
l’œuvre dans le domaine du sport et de l’activité physique.
Ces derniers sont envisagés au sens large des diverses mises
en jeu corporelles inscrites dans des modalités de bien-être,
de détente, de santé et/ou de loisir plus ou moins sérieux
(n’excluant pas la recherche de performance). Par
digitalisation, nous entendons la mise en chiffres des
activités, puis la transformation de ces données via un
traitement informatisé. Les questions soulevées vont cependant
au-delà des data produites et des algorithmes. Sur fond
d’hyper-connexion, de multiplication des réseaux sociaux, de
tendance à l’automesure, à la gamification et au gouvernement
des corps, les évolutions considérées dépassent la
quantification de l’engagement corporel : elles touchent aussi
à la circulation, au partage et à l’exploitation des données
générées. Les mises en lien prenant appui sur les technologies
de l’information et de la communication (TIC), qu’elles soient
inter-individuelles, communautaires ou régulées via une
intervention professionnelle sont également centrales. Enfin,
cette digitalisation a souvent pour corollaire une mise en
récit, voire une mise en scène virtuelle de soi et des autres,
de son corps et de ses compétences, qui emprunte aux codes de
la réalité augmentée.

Ce projet éditorial a d’autant plus de sens que la
mobilisation des TIC dans le domaine du sport et de l’activité
physique n’est pas cantonnée aux usages experts visant
l’optimisation de la performance. La sophistication des
solutions high tech accompagne aussi le/la marcheu.se
utilitaire, soucieux.se de se conformer quotidiennement aux
préconisations de santé publique en matière d’activité
physique ; le ou la malade chronique souhaitant mettre en
œuvre la prescription d’activité physique émanant de son
médecin; ou encore le ou la cycliste amateur.e contribuant, à
travers une application communautaire, à la création d’une
émulation entre pairs technophiles. Parmi bien d’autres, ces
utilisations ordinaires des possibilités et fonctionnalités
offertes par la digitalisation figurent au cœur du projet, qui
délaisse à l’inverse les mobilisations d’outils numériques
dans le sport de haut-niveau.

De plus en plus systématiquement embarquées, gérées de manière
individuelle sinon autonome, ces « solutions » combinent des
fonctions tout en promettant simplicité d’utilisation et
circulation fluide des données. La publicité instantanée des
data et des analyses auxquelles elles se prêtent est non
seulement proposée, mais largement encouragée au sein de
communautés d’utilisateurs incités à dévoiler leur vie
physique. Objectiver son activité physique, la déroutiniser,
l’afficher et s’encourager passent par ce type d’application
pour un nombre grandissant de sportifs lambda, bien au-delà du
cercle des athlètes confirmés et des injonctions provenant
d’un entraîneur ou d’un enseignant.

Ces applications sont présentées par leurs promoteurs comme
une source d’amélioration de la connaissance de soi par les
chiffres, de réduction des risques par le contrôle de ses
constantes vitales, et de soutien de la motivation
particulièrement efficace, qu’il s’agisse de « se mettre au
sport », de s’engager régulièrement dans une activité
physique, de perdre du poids, de rationaliser sa pratique, ou
encore de viser un perfectionnement technique afin d’accroître
ses performances.

Les propositions pourront aborder l’architecture et les effets
pluriels des dispositifs communautaires, applications mobiles
de sport ou d’activité physique par différents publics :
sportifs réguliers ou occasionnels, sédentaires en reprise
d’activité, personnes atteintes de maladie chronique,
résidents isolés au sein d’institutions ou patients confinés,
etc . Elles pourront aussi porter sur les promesses des
dispositifs en question, les motivations exprimées par les
utilisateurs (qu’ils soient prescripteurs ou pratiquants),
leurs usages et appropriations plurielles (en fonction,
notamment, du genre, de l’âge, des PCS, du vécu athlétique,
etc.) ou encore le type de connaissances qui circulent et la
nature des mises en relation par leur intermédiaire. Sans
occulter les cas d’abandon, d’utilisation irrégulière,
d’addiction ou de mise à distance de ces dispositifs, dont on
sait qu’ils sont fréquents et méritent une attention
particulière. Enfin, le devenir des données sur l’activité des
utilisateurs de dispositifs digitaux pourra faire l’objet
d’analyses. La circulation des data et les formes de création
de valeur inscrites dans ce qu’il est convenu d’appeler
l’économie digitale soulèvent en effet plusieurs zones d’ombre
: consentement relatif à l’acquisition de données
personnelles, effectivité des régulations (non-cession, dé-
identification), transparence quant à l’utilisation des data,
propriété des données, accès à ses propres données et
portabilité digitale, etc. (Koizumi, 2019). Par ailleurs, les
possibilités de tracking soulèvent d’autres questions
sensibles, liés notamment au cyber-harcèlement.

L’intention est de se pencher sur ces innovations, de
décrypter leurs effets en adoptant un regard détaché de la
fascination technophile et de la rhétorique de l’empowerment.
En effet, les perspectives offertes par ces dispositifs en
termes de santé publique, de ludification et de lutte contre
la sédentarité sont tangibles. Toutefois, cette reconnaissance
ne peut s’exonérer d’une étude attentive de leurs usages
pluriels, de leurs limites et des enjeux systémiques qu’ils
soulèvent. Il importe par conséquent de ne pas céder au
solutionnisme technologique (Morozov, 2013), quand bien même
le numérique bénéficie tout particulièrement de l’emballement
et de la séduction que suscitent les nouvelles technologies,
comme levier évident et presque providentiel de progrès (Oki,
2019). A ce titre, les contributions abordant les conséquences
inattendues, voire les effets pervers et la « face cachée » de
la digitalisation sont également les bienvenues.

De même, le caractère radical de l’évolution décrite pourra
être remis en question : augure-t-elle d’un nouvel âge de la
pratique sportive et de l’activité physique ? L’intégration de
nouvelles technologies agit-elle comme une « onde de choc »
susceptible de bouleverser les manières de s’adonner à une
activité physique ou sportive ? Des transformations semblent à
l’œuvre, mais l’euphorie descriptive pousse régulièrement à
faire signifier aux changements observés plus qu’ils ne disent
réellement (Passeron, 1987). Quelle est leur profondeur ? Sans
nier les changements, il convient d’adopter une posture
prudente par rapport aux effets induits en matière
d’engagement dans une activité physique.

Le présent appel à contribution cible des articles de
recherche ancrés dans des travaux empiriques, basés sur des
études de terrain, mais aussi des réflexions théoriques ou
méthodologiques originales. La focalisation énoncée en
introduction exclut a priori le sport pratiqué par d’autres,
pour des spectateurs dont on cherche à optimiser l’expérience
et la satisfaction ; de même, ne sont pas couvertes dans cet
appel les activités de e-sport s’apparentant davantage au jeu
vidéo qu’à l’expérience corporelle, telle que décrite ci-
dessus. Néanmoins, des mises en perspective problématisant la
question de la frontière entre ces secteurs et ceux couverts
prioritairement dans le cadre de cet appel pourront être
considérées.

Enfin, conformément au positionnement de la revue, les
contributions provenant de plusieurs disciplines, ainsi qu’à
l’interface de celles-ci, sont les bienvenues : sociologie,
histoire,    psychologie,    anthropologie,    philosophie,
épistémologie, sciences de l’information et de la
communication, sciences de gestion, géographie.
Date limite de réception des propositions, au format de la
revue Loisir & Société : 30 avril 2021

Pour toute soumission ou question, s’adresser à Bastien Soulé
: bastien.soule@univ-lyon1.fr

Appel à communications –
sessions du RT 43 au congrès
AFS 2021
         Approches croisées des changements religieux

La sociologie des religions française s’est structurée dans
les années 1960 autour de concepts – la sécularisation, la
pluralisation religieuse, l’individualisation des pratiques et
croyances– qui accordent une place centrale à la notion de
changement, en y associant des connotations positives (la
« modernité » religieuse) ou négatives (le registre de la
perte) et analysée à différents échelles (individuelle,
organisationnelle etc.). Tout en tenant compte des apports de
ces paradigmes, l’objectif du réseau thématique sera de
s’éloigner des approches théoriques qui seraient spécifiques
aux religieux en s’interrogeant sur le travail de sélection et
de catégorisation à l’œuvre (comment définir ce qui est
« religieux « ? Comment appréhender objectivement ou
subjectivement le changement ?). Pour ce faire, ces sessions
privilégieront des approches croisées, fondées sur des
enquêtes empiriques, de manière à interroger l’articulation
entre changements religieux et d’autres types de changements
sociaux en associant sociologie des religions et sociologie
politique, sociologie urbaine et des territoires, sociologie
de la famille et du genre, des associations, du militantisme
etc. Nous accorderons une attention particulière aux relations
entre religions et territoires, et aux changements affectant
aujourd’hui l’exercice du métier de sociologue lorsque celui-
ci prend pour objet la religion.

Changements religieux, changements sociaux

En analysant les interactions entre changements religieux et
changements sociaux il s’agira à la fois de rendre compte de
l’inscription du religieux dans son environnement social et de
mesurer l’autonomie relative de la variable religieuse dans
des contextes donnés. Autrement dit, l’objectif est de
réfléchir à des approches du changement religieux qui prennent
en compte l’imbrication des rapports sociaux. Cette réflexion
pourra prendre appui aussi bien sur des méthodes
quantitatives, afin de mesurer les corrélations entre des
affiliations religieuses et des pratiques sociales, que sur
des méthodes qualitatives ancrées dans l’observation directe
des imbrications du religieux et du social.

Religions et territoires en changement

En nous intéressant plus particulièrement aux approches
croisant sociologie des religions et sociologie des
territoires (urbains, périurbains, ruraux etc.), l’objectif
est de questionner la dimension territoriale des pratiques et
croyances religieuses catégorisées comme « nouvelles »
(mobilité, circulation, multiappartenance) ou mettant en avant
la mobilité géographique (pèlerinages). On pourra aussi
analyser, dans cette perspective, les reconstitutions
discursives, rituelles ou matérielles que le registre du
changement religieux est susceptible de produire en référence
à des territoires : patrimonialisation du religieux, nostalgie
ou discours politico-religieux sur les « racines »,
réappropriations symboliques, préoccupations environnementales
et sacralisation de la nature etc.
La transformation du métier de sociologue des religions

Enfin, il s’agira de s’interroger sur les transformations du
métier de sociologue et les enjeux méthodiques, théoriques et
épistémologiques que ces transformations soulèvent pour les
sociologues spécialistes du religieux ou qui croisent le
religieux sur leur terrain d’enquête. Dans un contexte marqué
par la contractualisation de la recherche et par la place
grandissante que les religions occupent dans l’espace public,
politique et médiatique la thématique du changement religieux
est-elle même l’objet de discours idéologiques et normatifs
qui ont une incidence sur les conditions de l’enquête en
terrain religieux. L’objectif ici est d’analyser
collectivement, à partir d’expériences de terrain et d’une
approche réflexive du champ académique, les principaux
facteurs sociaux, politiques et scientifiques pesant
aujourd’hui sur nos pratiques de recherche et les questions
méthodologiques qu’ils soulèvent.

Envoi des propositions de communication

Les propositions de communications, d’une demi-page à une
page, doivent indiquer : nom et prénom du ou des auteur.e.s ;
affiliation institutionnelle ; adresse email.

Les propositions sont à déposer sur le site de l’AFS selon les
modalités communes à tous les réseaux thématiques, avant la
date limite fixée au 31 janvier 2021. La décision sera
communiquée aux auteur.e.s mi-mars 2021.

Congrès             AFS        Lille           2021        –
appel          à        communications                        du
RT48
Du changement dans les coordonnées du « problème » de
l’articulation travail/famille ?

La sociologie de l’articulation des temps sociaux examine les
contextes de production du « problème » de la « conciliation »
travail/famille. De nombreux travaux ont déconstruit les
référentiels qui structurent aujourd’hui l’articulation des
temps sociaux et ses tensions, dont ceux dédiés à des
activités touchant à l’emploi et ceux relatifs à des activités
hors-emploi. Ces travaux permettent de comprendre l’origine de
ces tensions, principalement dans les sociétés occidentales
contemporaines (mais aussi ailleurs). Dans le même temps, des
travaux analysent les expériences concrètes des individus en
la matière. Au-delà de la seule description des arrangements
opérés par les individus, ces travaux ont particulièrement mis
en lumière les inégalités de genre qui y président ou encore
la manière dont les cultures professionnelles travaillent ou
sont travaillées par cet enjeu quotidiennement renouvelé pour
l’immense majorité des individus : comment articuler au mieux
engagements et contraintes professionnelles avec les
engagements et contraintes liées à d’autres sphères tout au
long de la vie (notamment parentaux, civiques, associatifs)?

Dans le cadre de ce congrès, nous proposons d’explorer les
dynamiques récentes, dont celles liées à la pandémie du
Covid-19, qui interrogent les contours actuels du « problème »
de l’articulation des temps sociaux : dans quelle mesure
certaines transformations ou évènements récents bouleversent-
ils les coordonnées du « problème » de la conciliation, cela à
l’échelle individuelle des expériences mais aussi à l’échelle
collective ?

Nous   proposons   de   réfléchir   aux   effets   de   changements
normatifs puissants travaillant les sphères de la vie
familiale et de la vie professionnelle : l’injonction à une
vie familiale de « qualité » en ce qui concerne la famille
dont sa globalité en tant qu’agent de socialisation agissant
sur les enfants (1) ; la diffusion de normes d’égalité hommes
/ femmes à des milieux sociaux variés (2) ; l’intensification
du travail à distance dans certains segments professionnels
(3). Certains de ces changements ont été mis à l’ordre du jour
par la pandémie du Covid-19 tout en étant des processus
inscrits dans le temps long. En quoi ces transformations
renouvellent-elles les pratiques d’articulation des temps
sociaux ? A quelles négociations conduisent-elles à l’échelle
du couple et de la famille ? En quoi ces dynamiques
renouvellent-elles les inégalités telles qu’elles font valoir
leurs effets et telles que ces derniers sont vécus par les
individus ? Ces réflexions se déclineront en trois axes de
questionnements.

Axes de questionnement

Axe 1 : au nom du bien-être des enfants

En quoi la diffusion de certaines normes de parentalité (au
nom du bien être enfantin) enjoignant au dialogue et à la
présence/disponibilité auprès de l’enfant repose-t-elle la
question de l’articulation des temps sociaux à l’échelle de la
vie familiale ? Dans les milieux sociaux où la prise en charge
des enfants (pour les hommes de milieux populaires par
exemple) ou le développement d’une carrière professionnelle
(dans le cas de femmes de classes populaires) ne constituaient
pas des horizons désirables, dans quelle mesure des
changements sur ces deux plans renouvellent-ils la question de
l’articulation entre des investissements familiaux,
individuels et professionnels ? Quels arrangements ces
nouvelles aspirations supposent-elles à l’échelle des
familles ? Plus généralement, quels changements la diffusion
de normes de parentalité promouvant un certain bien-être
enfantin génère-t-elle sur les organisations familiales ?
Axe 2 : Au nom de l’égalité entre les sexes

Des questions similaires peuvent être posées au sujet de la
répartition des charges parentales et domestiques à l’échelle
des membres du couple et de la fratrie. En quoi la diffusion
de normes de genre promouvant l’égalité hommes/femmes se
traduit-elle par une reformulation de la question de la
« conciliation » dans les organisations familiales ? Quels
facteurs font varier ces effets (âge des enfants, âge des
parents, position dans le parcours de vie, classes sociales,
etc.) ? En quoi les normes de l’égalité influent-elles la mise
à l’agenda politique des Etats du « problème » de la
conciliation travail/famille ? Il s’agit donc de s’interroger
sur la reformulation de ce problème dans les familles, mais
aussi en termes de politiques publiques. Au-delà des
politiques publiques, c’est à l’échelle du débat public que la
question peut être posée à travers l’irruption de termes
mettant en avant ce problème (tel que, en 2017, la « charge
mentale » dans la BD d’Emma et le livre de Titiou Lecoq).

Axe 3 : Travail, famille, Covid (axe commun avec le RT33
FAMILLE)

L’irruption du Covid-19 dans le courant de l’année 2020 a
bouleversé emploi et conditions de travail. Nous proposons de
réfléchir à ces transformations sous l’angle de l’articulation
travail/famille : comment l’accroissement exceptionnel du
chômage et le changement des modalités de travail (le chômage
partiel, le télétravail) impactent la famille ? Comment ces
changements s’imposent-ils selon les milieux sociaux ? Dans
quelle mesure le télétravail renouvelle-t-il les
questionnements sur l’articulation travail/famille ? En outre,
nous proposons de réfléchir aux pratiques du sociologue et aux
frontières sous-disciplinaires : en quoi la question du
télétravail impose-t-elle à la sociologie du travail une
réflexion sur l’articulation entre les sphères professionnelle
et familiale et à la sociologie de la famille une
considération envers la question du travail professionnel ?
Nous proposons également d’interroger la manière dont des
politiques récentes en la matière ont affecté la manière dont
le « problème » de l’articulation des temps sociaux est
formulé et pris en charge à l’échelle collective. Comment les
partenaires sociaux s’emparent-ils de l’enjeu du télétravail ?
Avec quels référentiels ? En quoi la mise à l’agenda
journalistique du télétravail par la pandémie Covid-19
affecte-t-elle les acteurs et actrices lors des négociations
professionnelles ? Dans quelle mesure les dispositifs récents
sur les aidants déplacent-ils la focale du problème de
l’articulation travail/famille vers la question de
l’accompagnement de la dépendance ? Comment se pose la
question de l’articulation travail/famille en lien avec la
prise en charge d’une personne âgée dépendante ou d’un enfant
en situation de handicap par exemple ?

Enfin, quels furent les changements apportés par la situation
du confinement et du télétravail dans les usages sociaux du
temps à l’intérieur des familles (temps conjugal,
professionnel, parental, à soi, etc.) ? Comment les familles
(ré)agissent-elles face aux strictes réglementations
gouvernementales dues au Covid-19 et dans quelle mesure les
nouvelles normes structurent-elles leur quotidien ? Comment
ces éventuelles transformations se déclinent-elles
socialement ? Contribuent-elles à une reconfiguration des
rôles de genre au sein des familles ? Dans quelle mesure la
pandémie a-t-elle conduit à une refonte des manières de penser
le temps aux échelles individuelle et collective
(anticipation, prévision, organisation des temps familiaux) ?
Comment ces aspirations à des temps à soi, pour soi, pour les
autres, pour le travail, etc. ont-elles été gérées dans le
cadre du confinement ?

Vos propositions de communication

Les propositions de communication peuvent être envoyées
jusqu’au 30 janvier 2021. Elles compteront un titre et un bref
argumentaire sur la méthode, les objectifs et les résultats de
recherche (max. 1 page). Les propositions doivent être
déposées sur le site de l’AFS (http://afs-socio.fr/rt/rt48/)

Les réponses seront transmises début mars et les interventions
sélectionnées seront inscrites dans le programme que nous vous
communiquerons fin mars.

Les membres du bureau du RT 48 :

Pascal Barbier (Pascal.Barbier@univ-paris1.fr) Myriam Chatot
(myriam.chatot@ehess.fr)            Bernard        Fusulier
(bernard.fusulier@uclouvain.be)           Julie     Landour
(julie.landour@dauphine.psl.eu)      Marianne   Le   Gagneur
(marianne.legagneur@hotmail.fr)        Alexandra      Piesen
(alexandra.piesen@gmail.com)         Sebastian     Pizarroe
(sebastian.pizarroe@gmail.com)           Bertrand       Réau
(bertrand.reau@lecnam.net)         Abdia    Touahria-Gaillard
(Abdia.Gaillard@ens.fr) Diane      Gabrielle Tremblay (diane-
gabrielle.tremblay@teluq.ca)        Valerya  Viera    Giraldo
(valeryavierag@gmail.com)              Charlotte        Vampo
(vampo.charlotte@gmail.com)

AAC   Revue   ‘Sciences   et
Actions   Sociales”   :  Les
sciences sociales face à la
pandémie, entre nouvelles et
vieilles marginalités. Un
regard croisé à travers les
réalités européennes
      Appel à contributions pour un dossier de la revue

                 Sciences et Actions Sociales

 Les sciences sociales face à la pandémie, entre nouvelles et
vieilles marginalités. Un regard croisé à travers les réalités
                         européennes

Coordination :

Walter Greco, Professeur de sociologie politique, Département
de Sciences Politiques et Sociales de l’Université de Calabre
(UNICAL), DISPeS

Anna Elia, Professeur de sociologie du territoire, Département
de Sciences Politiques et Sociales de l’Université de Calabre
(UNICAL), DISPeS

Contexte

La pandémie est l’événement historique qui a réussi en moins
de six mois à bouleverser le monde entier, obligeant en grande
partie l’espèce humaine à revoir ses propres certitudes sur le
rapport homme/science/nature. Face à un tel bouleversement,
les idées qui s’étaient consolidées au cours de cette longue
période que nous appelons modernité se sont révélées
fallacieuses et inadéquates. Les symboles et les croyances,
laïcs ou religieux, ont été fortement influencés par la marche
silencieuse d’un micro-organisme à la fois invisible et
perfide. Comme accompagnés d’un interminable refrain, les
débats télévisés ont longtemps été animés par des experts
virologues, des médecins, des épidémiologistes, auxquels une
même question, toujours latente, était posée : “que doit-on
faire ?”, et immanquablement, la science, visiblement éplorée,
dévoilait son impuissance et son incapacité à apporter des
solutions immédiates et définitives.

Objectifs de l’appel à propositions

Dans l’incertitude généralisée, et ce au niveau mondial,
l’expansion de la pandémie de COVID-19 a entraîné des
changements significatifs en termes de restructuration des
processus économiques et sociaux ; suivis, à l’échelle
globale, de comportements fermés impliquant de limiter au
maximum les contacts interpersonnels : pratiquement le blocage
de la socialité comme elle était vécue jusqu’alors. Du point
de vue économique, en référence au travail de Giovanni Arrighi
sur les cycles capitalistes d’accumulation (1996), il
semblerait presque que la pandémie représente un moment de
                                                     e
rupture marquant la fin de ce qui fut un très bref XXI siècle.
Commencé au vingtième siècle, au milieu des années 1980, par
l’affirmation (Reagonomics) des théories néo-libérales aux
États-Unis d’Amérique et des politiques thatchériennes en
Angleterre ainsi que par le tournant de la Chine de Deng Xiao
Ping (Harvey, 2014), il se referme environ quarante ans plus
tard. Durant ce laps de temps, l’hégémonie s’étant en
définitive avérée polycentrique (Sassen, 1996) cède la place à
un avenir incertain à l’intérieur duquel la pandémie pourrait
représenter un point de rupture, plus précisément une crise
révélatrice.

Les changements auxquels toutes les sociétés devront faire
face ont certainement été provoqués par des facteurs
sanitaires de nature exceptionnelle. Toutefois, ces
perturbations viennent se greffer sur des économies déjà
affaiblies et constamment traversées par des crises
financières de plus en plus fortes et répétées (Gallino,
2011). Si avant la pandémie, les énormes bénéfices liés aux
spéculations financières engendraient des crises récurrentes
(net-economy, subprime, crises des dettes souveraines, etc.)
dont il était de plus en plus difficile de se relever, suite
au choc pandémique et de manière généralisée, les économies
mondiales réussissent difficilement à retrouver des parcours
connus afin de pouvoir mettre de nouveau en œuvre leur
capacité productive et d’inverser la tendance fortement
négative des indicateurs macroéconomiques. On assiste un peu
partout à un important recul de la capacité de production et
une chute vertigineuse des produits intérieurs libres, dont
l’effet secondaire le plus évident est l’élimination
substantielle de la force de travail dans les circuits de
production (Sassen, 2016). Des millions d’emplois ne sont pas
compatibles avec cette nouvelle situation et, en outre,
deviennent impossibles par le risque sanitaire. L’ancienne
structure de production devient excédentaire de par
l’impossibilité de faire coïncider l’emploi actuel avec les
valeurs préexistantes, face à une crise économique qui se
manifeste de manière exacerbée et ayant été provoquée aussi
bien par le blocage de la production que par les lourdes
contraintes liées aux mesures nécessaires de prophylaxie
sanitaire, de distanciation sociale et de recours à des formes
alternatives d’emploi de la main-d’œuvre telles que le
télétravail. En substance et tendanciellement à l’intérieur
des différents secteurs économiques, on assiste à un certain
besoin de récupération des valeurs économiques perdues à cause
du confinement, et ce, à travers l’augmentation de la
productivité lorsque cela est possible et la tentative
d’externalisation des coûts sociaux destinés à replacer la
force de travail (et la population) qui n’est plus nécessaire.

Aux États-Unis, les politiques libéristes de l’administration
Trump estiment que le marché constitue le principal agent de
régulation sociale, ce qui entraîne une évidente
militarisation du territoire, l’apparition de formes de
gouvernement de plus en plus sécuritaires, ce qui ne fait
qu’augmenter les motifs de conflictualité sociale. Les
économies européennes, par contre, tentent de résister au raz-
de-marée grâce à des mesures expansives de type monétaire,
élargissant de manière démesurée la base monétaire et
remettant à plus tard la nécessité de faire coïncider la
croissance économique et les déficits publics. Ces deux
mesures, malheureusement, soulèvent des questions quant à la
période de gestion politique et sociale que l’économie
traverse, surtout en termes de gouvernance de la population
excédente qui, soyons réalistes, n’aura aucune chance d’être
réintégrée dans le monde du travail. Comme l’affirme Laurent
Cordonnier dans le numéro de mai 2020 du Monde Diplomatique,
cette crise ne ressemble à rien de connu dans l’histoire du
capitalisme. Elle ne résulte ni d’un choc d’offre, dû à des
entraves institutionnelles, technologiques ou provenant de la
disponibilité insuffisante des facteurs de production, ni d’un
effondrement soudain de la demande. Cette crise, selon
Cordonnier, découle essentiellement de décisions souveraines
qui ont conduit à mettre brutalement à l’arrêt des pans
entiers de l’appareil productif.

À cette population marginale en soi et déjà confrontée à des
difficultés économiques s’ajoutent de nouveaux sujets en
difficulté tels que les victimes de restructurations des
processus productifs, les travailleurs autonomes, ceux qui
travaillent dans l’économie souterraine, et enfin la portion
(difficilement quantifiable) de population porteuse saine de
COVID-19, potentiellement en mesure de réalimenter de
nouvelles vagues pandémiques : tous ces sujets ont
immédiatement soulevé des problèmes d’accès à des ressources
qui ne sont plus disponibles.

Bien que garantissant une gestion plus sereine des frictions
sociales, les solutions et les aides financières dont on
asperge la population ne sont en réalité que des remèdes
immédiats mais faibles, des solutions à brève échéance ; de
même, les formes d’intervention directe en économie, là où il
s’avère nécessaire de diminuer le nombre d’employés sur les
lieux de travail, auraient toutefois des effets positifs
limités, alors qu’elles auraient habituellement participé à
alimenter de vertueux circuits de croissance. Dans ce cadre,
le virus entraîne une sorte d’asymptote fixant une limite
infranchissable et ayant une influence sur les réponses
apportées par les politiques publiques : la « 90% economy »
dont parle The Economist dans son numéro du 2 mai 2020.

Toujours dans The Economist, on peut lire que le bureau
central de statistiques des États-Unis enregistre, uniquement
pour le mois d’avril 2020, une chute de 11,6% du Produit
Intérieur Brut américain. On observe également des situations
analogues en Europe. Un rapport de l’OCDE cité dans le
Corriere della Sera du 10 juin, indique que le PIB italien
pourrait subir une chute libre jusqu’à -14% en 2020. Mais
c’est toute l’Europe qui est en train de payer le prix fort:
L’Espagne, la France et la Grande-Bretagne perdront des quotas
de production analogues, alors que l’Allemagne devrait limiter
l’effondrement avec des pertes de produit estimées autour de
8%. Avec des scénarios de ce genre et des niveaux de dette
publique qui s’envolent jusqu’à être multipliés par deux par
rapport au début de l’année, le rôle des dépenses publiques
est destiné à subir de continuelles tensions et on peut
clairement imaginer que les plans pour combler les énormes
déficits à taux croissant seront difficilement soutenables par
des économies en récession : de longues périodes de mise en
discussion ou de réduction des niveaux de couverture des
systèmes liés à l’état social sont facilement prévisibles.

Le problème se posera au niveau de la gouvernance d’une
structure sociale qui ne pourra vraisemblablement se fonder
que sur une exposition inégale des causes de la vulnérabilité,
(Bauman, 2005, 2006) et des facteurs de risque. Très
probablement, des technologies politiques s’imposeront et
s’empareront de manière différenciée des corps, de la santé,
de la manière de se nourrir, de tout l’espace lié à
l’existence (Foucault, 2004b, 2004a). D’un côté, une élite
sera comprise au sein d’un processus productif immunisé, de
l’autre, une humanité éventuellement sacrifiable (Agamben,
1997, 2003) à laquelle on demandera, sous conditions
difficilement modifiables, d’endosser aussi bien la
responsabilité des niveaux productifs que la nécessité
d’éviter d’éventuelles contagions.

Ouvrir un débat devrait permettre de commencer à élaborer
différents espaces de réflexion qui pourraient être répartis
sur au moins quatre points :

     L’analyse pourrait suivre une première        direction
     concernant les impacts déjà visibles          tels que
     l’augmentation des inégalités, le désordre social qui se
     manifeste et la dégradation des conditions de vie,
     surtout dans les banlieues et les quartiers en marge de
     la réalité urbaine.
     Une seconde direction pourrait mener à l’observation de
     la capacité de réaction des différents systèmes
     sanitaires nationaux, surtout face à l’urgence et
     s’agissant de devoir faire front à des conditions
     particulièrement complexes, telle la gestion des
     personnes    âgées   dépendantes,    particulièrement
     vulnérables face au virus.
     La “distance” chez les jeunes générations pourrait
     synthétiser un troisième moment de réflexion. Des
     phénomènes tels que la distanciation sociale et la
     didactique à distance ont entraîné des changements
     nécessaires quant à l’organisation de la vie
     quotidienne. Quels impacts ont-ils eu sur les processus
     de croissance psychologique et sociale des étudiants ?
     Quels impacts peut-on déjà observer et quels sont ceux
     que l’on pourrait imaginer à l’avenir en cas de
fermeture prolongée des écoles et des universités ?
     Quelles sont les différenciations rattachables aux
     niveaux socio-économiques et les corrélations avec les
     contextes d’origine ?
     Un dernier point concerne la gestion des populations
     irrégulières que le confinement social pousse dans les
     limbes de l’invisibilité paradoxale. Déjà problématiques
     du point de vue des stéréotypes sociaux, les migrants
     qui vivent en marge de la régularité, d’un côté ne
     rentrent pas dans les procédures de prophylaxie
     destinées à lutter contre la pandémie et, de l’autre,
     s’avèrent essentiels pour les systèmes de production,
     surtout pour les activités nécessitant un emploi
     important de main-d’œuvre comme dans l’agriculture ou
     les secteurs économiques informels.

Il ne s’agit clairement que de quelques réflexions qui
s’avèrent cependant nécessaires et urgentes pour un débat au
sein de toutes les Sciences Sociales. On peut facilement
imaginer que ce type de questions orientera le débat
scientifique encore pour longtemps.

Bibliographie

Agamben G. (1997), Le pouvoir souverain et la vie nue, Paris,
éd. du Seuil.

Agamben G. (2003), État d’exception, Paris, éd. du Seuil.

Arrighi G. (1996), Il lungo XX secolo Denaro, potere e le
origini del nostro tempo, Milano, ed. Il Saggiatore.

Bauman, Z. (2005), La société assiégée, Paris, éd. du
Rouergue.

Bauman Z. (2006), Vies perdues. La modernité et ses exclus,
Paris, éd. Payot & Rivages.
Boucher M. (2015), Sociologie des turbulences : penser les
désordres des inégalités (Recherche et transformation
sociale), Paris, éd. l’Harmattan.

Foucault M. (2004a), Naissance de la biopolitique Cours au
Collège de France (1978-1979), Paris, éd. Gallimard-Le Seuil.

Foucault M. (2004b), Sécurité, territoire, population. Cours
au Collège de France (1977-1978), Paris, éd. Gallimard.

Gallino L. (2011), Finanzcapitalismo. La civiltà del denaro in
crisi, Torino, ed. Einaudi.

Harvey D. (2014), Brève histoire du néo-libéralisme, Paris,
éd. Les Prairies ordinaires.

Sassen S. (1996), La ville globale – New York, Londres, Tokyo.
Paris, éd. Descart et Cie.

Sassen S. (2016), Expulsions. Brutalité et complexité dans
l’économie globale, Paris, éd. Gallimard.

Wieviorka M. (2015), Retour au sens, Paris, éd. Robert
Laffont.

Wieviorka M. (2020), Pour une démocratie de combat, Paris, éd.
Robert Laffont.

Procédure d’évaluation des propositions de contributions

En lien avec la ligne éditoriale de la revue (voir
présentation de la revue [http://www.sas-revue.org/]), les
textes proposés doivent être originaux et ne pas avoir déjà
fait l’objet d’une publication dans des revues. Néanmoins, à
la condition qu’il demande l’accord préalable à la revue
Sciences & Actions Sociales, l’auteur d’un article dans la
revue SAS peut publier son article dans un ouvrage ou des
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