Sorties de secours + LA CULTURE EN BRETAGNE
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SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page1 N S C DA discip O Sorties ÉRO E NUMlinées de secours les iGnAELE FLAômesLA CULTURE EN BRETAGNE + N° 190 NOV 18 lles m théâtre, danse, musique, cinéma, livres, expos Les saMMA BURR E
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page3 Numéro 190 • Novembre 2018 Sorties CE NU RO MÉ es DANS iscipliné les ind DES FLAO de secours GAELE BORD(E)SLA LA VIEEMMA BURR CULTURE EN BRETAGNE + théâtre, danse, musique, cinéma, livres, expos N ° 19 0 N OV 18 EN UNE dOIsNEAU À QUImpER Le musée des Beaux-arts expose 130 clichés de Robert Doisneau, en trois Sorties de secours + séries : Le Merveilleux quotidien (Paris et sa ban- LA CULTURE EN BRETAGNE lieue, dont le fameux théâtre, danse, musique, cinéma, livres, expos Baiser de l’Hôtel de Ville), Palm Springs 1960, un reportage pour le magazine Fortune, ainsi qu’une vingtaine de photos prises en Bretagne. Ma p’tite Nicole... Vous n’avez pas ouvert le Mémo Culture ? Avez-vous choisi, Odette ? Scrabble ou Crapette ?> Il y a plein de choses épatantes ce week-end ! Allez zou, on sort ! > Recevez le Mémo Culture tous les jeudis au petit-déjeuner. Comme la lettre qu’on enverrait à notre meilleure amie pour qu’elle sorte de chez elle... Le petit ours INsCRIVEz-VOUs sUR sORTIEsdEsECOURs.COm : « TU mE dONNEs TROp ENVIE » Impression IOV - Arradon Distribution Olivier et Stéphane Sorties de Secours® est un mensuel indépendant Sorties de Secours remercie ses annonceurs pour édité par la SAS Drôles de Dames, 42 avenue de la leur fidélité, ses lieux de dépôt pour leur hospitalité, Perrière, 56100 Lorient et ses lecteurs pour leur attachement au papier... Sorties de Secours décline toute responsabilité quant Publication et rédaction Isabelle Nivet aux visuels, photos, libellés des annonces fournis par Relations annonceurs Gaëlle Lescombat ses annonceurs, omissions ou erreurs cestparla@sortiesdesecours.com. 06 14 01 95 83 figurant dans cette publication. Tous droits Agenda complet en ligne www.sortiesdesecours.com d’auteur réservés et toute reproduction interdite.
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page4 4 Sorties de Secours • Nov. 2018 le top du MOI(S) bretagne LEs spECTACLEs QUI NOUs ONT FAIT dE L’ŒIL EN NOVEmBRE, dANs TOUTE LA BRETAGNE. ON VOUs dONNE dEs ENVIEs ? par Isabelle Nivet les malédictions Vu au Strapontin, Pont-Scorff, le 23 novembre 2017 Nicolas Bonneau (Sortie d’usine, Ali 74 le combat du siècle) met en scène deux artistes hors cadre, la chanteuse Fannytastic et la marionnetiste Hélène Barreau. Deux personnalités qui irradient chacune à leur manière, Barreau en petite souris effacée, étrange portefaix des matières qu’elle manipule en scène, et, Fannytastic, récitante caustique, sourcil levé dans une subtile remise en cause de ce qu’elle raconte. Et c’est déjà, là, l’intérêt de ce spectacle créé d’après collectage : être à la fois dans le récit « sensationnel » et dans le scepticisme. Il faut dire que Bonneau a choisi, à travers l’histoire d’une jeune femme qui s’installe à la campagne et découvre des phénomènes étranges, de parler de l’inexpliqué, rebouteux, magnétiseurs et autres experts des sorts et antidotes, porte-malheurs et amulettes... Selon les spectateurs, les réponses aux questions posées seront différentes, mais davantage que le fond, c’est le traitement plastique qui nous a ici intéressé, l’utilisation d’un matériau inattendu, la céramique, du blanc du kaolin, qui se décline sous différentes formes, du volume à la poussière, et vient trancher sur le noir omniprésent du spectacle, imposant une esthétique singulière dans laquelle on projettera ses références, les nôtres balayant Dorian Gray, Mythe de Cthulhu, cabinets de curiosités, salle des visages du dieu Multiface de Game of thrones, et museum d’histoire naturelle à la Adèle Blanc-Sec... Une scénographie accompagnée d’une création lumière – les deux signées par Rodrigue Bernard, qui font naître une ambiance au bord du fantastique, dont on peine à se détacher, des mois durant... > Le Triskell/Pont l’Abbé. 07/11. À pARTIR dE 12
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page5 Sorties de Secours • Nov. 2018 5 baby macbeth Une date à cocher au gros feutre sur votre agenda, et cette date sera alors la date à laquelle vous vous souviendrez avoir découvert Agnès Limbos. Une belge. Une papesse. Une voix, aussi. Agnès Limbos fait du théâtre d’objet depuis bien longtemps, avant qu’internet n’existe. Elle a beaucoup mis en scène, inspiré, impulsé, et cette fois, c’est avec du Shakespeare qu’on va pouvoir passer 25 minutes avec elle, autour d’une table où des objets vont raconter Macbeth, symboliquement parlant. Derrière la table, la Limbos, avec sa bouille impayable, hybridation entre Yolande Moreau et Fiona Gordon, interagit avec le public dans un vieil anglais bousculé par l’accent belge. Un grand moment. > Centre Jean Ferrat/Hennebont. 07/11. À pARTIR dE 1 la famille semianyki Nous avons enfin réussi à voir la saison passée ce spectacle mythique qui tourne depuis des années. Et oui, même si tout ça sent un peu la fatigue du temps, la poussière des décors et l’usure des costumes, oui, c’est formidable. On pouvait craindre qu’à force de tourner, les interprètes aient fini par endosser leurs rôles comme un employé de bureau ses manches de lustrine, mais du tout. Fraîcheur, enthousiasme, complicité sont là à chaque représentation de ce spectacle réglé au millimètre, dont chaque gag – et ils sont nombreux, intelligents, créatifs et bien foutus - fait mouche. Dans cette forme à mi-chemin entre clown et théâtre sans paroles, les corps sont d’une expressivité folle, les gags s’enchaînent tambour battant, suivant le fil d’une histoire familiale faite de rebondissements, de drames et de joies. Un spectacle à voir en famille, générations et chapelles confondues, dont on sort heu-reux ! > Lanester 09/11, Auray 10/11, Locminé 11/11. EN FAmILLE À pARTIR dE 5 fulmine On ne l’a toujours pas vu mais on est toujours aussi attirées par ce spectacle du collectif Aïe Aïe Aïe, dont on aime beaucoup la façon de transcrire une histoire, avec trois fois rien mais beaucoup d’ingéniosité et d’humour (ici des pompons !). Charlotte Blin raconte le mythe de Troie, et Fulmine, l’expression de la colère, celle qui fait bouillir un frère et une sœur, Arès, dieu de la guerre, et Eris, déesse de la discorde. GrrrrRRR > L’Hermine/Sarzeau. 14/11. EN FAmILLE À pARTIR dE 8 martial, l’homme-bus Qu’est-ce que ça va donner sur une scène, cette histoire ? Tellement presque une forme fictionnelle dans la réalité, tellement un conte poétique, cette histoire vraie. Ce personnage merveilleux a existé. À Lausanne, dans les années 80, Martial a arpenté les rues de sa ville avec une cabine de bus bricolée, jouet d’enfant à taille adulte, respectant circuits et horaires des lignes régulières, mimant montées et descentes des passagers, soufflant dans ses joues les bruits des bus, freinages et portes qui s’ouvrent. Seul dans un monde rempli de gens imaginaires, Martial n’était pas connecté à notre réel mais au sien, parallèle. Marie Baxerres s’est intéressée à cette figure lunaire et touchante, et par extension à la marginalité dans les villes, travaillant sur des formes en lien avec l’art brut. On tentera. > Le Forum/Nivillac. 17/11.
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page6 6 Sorties de Secours • Nov. 2018 festival les indisciplinées thérapie taxi On vous en parlait la saison dernière, lorsqu’ils sont passés à l’Echonova, les revoici en Morbihan, ils ont explosé depuis, le groupe de minots émergent est devenu valeur sûre des festivals… Une voix sucrée, très pop, qui s’empare des codes du rap sur une musique électro, et dévide des textes qui ne s’interdisent rien, comme dans le titre Salope ou encore sur le tube entêtant Hit sales. C’est frais et trash, entraînant et provoc, léger comme une bulle de chewing-gum rose pastel. On en profite avant de s’en lasser. > Quai 9/Lanester. 03/11 feu ! chatterton Qu’est-ce qu’on peut dire sur Feu ! Chatterton que vous ne sachiez pas déjà ? Qu’ Arthur, le chanteur, a une nouvelle cravate ? Tout a été dit sur ce groupe élégant, dandy, littéraire, sophistiqué et brut à la fois, qui cumule les cinq étoiles et est devenu en trois ans l’une des figures majeures de la chanson-rock française… Ils repartent en tournée avec un nouvel album, L’Oiseleur, qui fait entrer la poésie d’Eluard et Aragon dans leur univers. Et c’est toujours aussi bien. > Les Arcs/Quéven. 07/11 daho + calypso valois Le concert d’Etienne est déjà complet depuis longtemps. Mais on ne résiste pas au plaisir d’écrire trois mots sur Calypso Valois, au cas où vous seriez passé à côté de la jolie fille d’Elli et Jacno, dont le titre Le jour s’incruste dans l’encéphale comme une version moderne de la pop des années 80. Une « fille de » campée dans son époque, discrètement nimbée de l’aura de ses parents. Une présence, un style, une voix. Vamos a bailar Calypso mi amor. > Grand théâtre/Lorient. 09/11
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page7 Sorties de Secours • Nov. 2018 7 festival les indisciplinées LA SELECTION D’ ISÈLE VINCENT de RADIO BALISES daniel blumberg Ancien leader du groupe de rock indépendant Yuck, Daniel Blumberg se lance en solo en 2013. En 2015 il signe chez le prestigieux label Mute records (Sawns, Goldfrapp, Sigur ros, Tiersen…) et livre en 2018 son premier album, Minus. Une proposition pop et expérimentale, douce et forte, mélodique et déstructurée, où la voix et le piano nous emmènent avec lui dans les profondeurs d’une retentissante mélancolie. Accompagné sur scène d’un violoncelliste et d’un batteur, il explore les possibles de ses compositions dans des improvisations magnétiques. C’est puissant, hypnotique, habité et surtout beau à en faire chialer votre âme. > Le Manège/Lorient. 31/10 columbine Collectif de rappeurs rennais, Columbine compte huit membres d’à peine 25 ans (dont Lorenzo, dont on a pu apprécier la prestation lors de l’édition passée. Le parquet rutilant de Quai 9 se souvient encore des sautillantes hordes d’adolescents survoltés). En 2016, à l’époque de Clubbing for Columbine, avec leur apparence de bande de copains grimés en rappeurs et leur textes provocateurs, on croyait que tout ça n’était qu’une blague au goût douteux. Depuis, avec successivement Enfants Terribles et Adieu bientôt , ils ont prouvé, galvanisés par l’énergie et la rage de ceux que l’on n’a pas pris au sérieux, qu’il fallait se méfier des apparences. Columbine, c’est la voix d’une génération, peut-être sacrifiée et hors- circuit, mais résolument indépendante. > Quai 9/Lanester. 03/11 terrenoire C’est le point d’interrogation de cette édition... Cette fratrie stéphanoise nous laisse perplexe. Entre variété française et électro-pop, entre posture et impudeur, on navigue en eaux troubles avec ce duo. Force est de reconnaître l’efficacité redoutable de leurs mélodies et l’habileté de leurs productions, qui tapent facilement l’incruste dans les caboches. On s’était dit un peu la même chose pour Eddy de Pretto. Finalement on avait pris une petite claque et on connaît le succès du jeune homme depuis… Allez-y ! Vous nous direz... > Les Arcs/Quéven. 07/11 képa Ancien skateur pro condamné à arrêter les cabrioles pour cause de vilaine blessure, Kepa s’est consolé en slidant sur le manche de sa guitare. Et pas n’importe quelle guitare, une Dobro, modèle acoustique taillé dans l’acier, prisé par les bluesmen américains depuis les années 20. Ce basque de 28 ans, en mode one-man-band, livre une country teintée de blues pas triste, et qui sent bon la paille ! Ça tombe bien, il se produira aux Indisciplinées dans une yourte. Ambiance bucolique assurée. > Yourte de Moulin Coz/Le Saint. 02/11
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page8 8 Sorties de Secours • Nov. 2018 festival tnb Un festival formidable, où l’on a envie de tout voir. Cette année la thématique porte sur « Le corps et le monde. Comment le monde transforme les corps ? Comment les corps habitent le monde ? ». Performance, cinéma, théâtre, danse, arts plastiques, des créations, des reprises, des propositions hors formats et audacieuses. Notre sélection. Tempête solaire. Gurwann Tran Van Gie / Catastrophe (9 et 10/11) Gurwann Tran Van Gie est artiste et maître praticien en hypnose Eriksonnienne. Guidé par sa voix, le public est invité à vivre une transe, un voyage hypnotique, accompagné en musique par un groupe qu’on aime beaucoup, Catastrophe. Contes immoraux - Partie 1 : Maison mère. Cie Non Nova / Phia Ménard (15 et 17/11) Une de nos artistes favorites, la sensible, engagée et créative Phia Ménard, qui travaille sur une nouvelle création, un triptyque, à partir de maisons en carton, comme on monterait une série de tentes pour des réfugiés. Le bain. Gaëlle Bourges (du 15 au 17/11). ENFANTs & AdULTEs Trois performeuses manipulent poupées et accessoires de toilette. Mêlant danse, chant et récit, Le bain parle de la représentation des corps dans l’histoire de l’art, s’appuyant sur deux tableaux du XVIe siècle. Joli et signifiant. Ersatz. Julien Mellano / Collectif Aïe Aïe Aïe (du 15 au 17/11) L’un des très bons du théâtre d’objet. Drôle, décalé, absurde, il détourne et métamorphose les objets, ici autour des technologies de demain, inspiré par l’idéologie transhumaniste, la cybernétique, l’intelligence artificielle... Crash Park la vie d’une île. Philippe Quesne (du 8 au 10/11) Encore un artiste qu’on adore, la preuve que « concept » peut rimer plutôt avec « poésie et humour » qu’avec « chiant et prise de tête ». Il s’intéresse à un groupe de survivants sur une île, après un accident d’avion, comme au microscope. Love me tender. Raymond Carver / Guillaume Vincent (8 et 9/11) Six nouvelles de Carver, au goût de gin et de couples déchirés, adaptées pour huit comédiens interprétant chacun deux rôles, chacun devant s’accorder, malgré les désaccords de leurs personnages, à deux, à quatre, à huit. One night with Holly Woodlawn. Pierre Maillet (du 8 au 10/11) Figure de l’underground américain des années 70, travesti superstar grâce à Andy Warhol, Holly Woodlawn était actrice, chanteuse, mannequin... Un spectacle performance, ponctué de chansons — de Bette Midler à Lou Reed. La 7e vie de Patti Smith. Claudine Galea / Benoît Bradel (9 et 10/11) On l’a vu l’année dernière et a-do-ré, pour son énergie rock, sa forme originale, où texte et musique dialoguent avec sens, et pour la présence habitée de Marie-Sophie Ferdane, comédienne fascinante, ici devenue rock star androgyne. Sur scène, avec deux musiciens, Patti Smith est racontée, dans son histoire et dans celle d’une jeune fille qui la découvre à 16 ans. Benoît Bradel invente là une belle forme, autour de la magnifique écriture de Claudine Galea. La grande chorégraphe sud-africaine imagine Louis XIV, le roi dansant, en réfugié revenu d’Afrique. Avec Benjamin Oh Louis. Robyn Orlin (15 et 16/11) Pech, danseur étoile de l’Opéra national de Paris, et le claveciniste Loris Barrucand, dans une évocation ironique. Consul et Meshie. Latifa Laâbissi /Antonia Baehr (du 16 au 18/11) Au début du XXe siècle aux États-Unis, deux chimpanzés vivaient comme des humains, chez les humains. Impertinentes et impudiques, ces deux guenons humaines s’exposent dans une performance qui renvoie à la violence des assignations. Témoignage poignant, Unwanted aborde les violences faites aux femmes, le viol comme arme de guerre. Dorothée Unwanted. Dorothée Munyaneza (16 et 17/11) Munyaneza est allée à la rencontre de ces femmes meurtries et leur a posé la question : « Vous êtes-vous acceptée ? » Le dernier métro. François Truffaut / Dorian Rossel (20 et 21/11) En portant le chef-d’œuvre de François Truffaut à la scène, Dorian Rossel et une troupe de 11 acteurs interrogent la position de chacun d’entre nous face aux menaces qui pèsent aujourd’hui sur le monde. Les Idoles. Christophe Honoré (du 23 au 30/11) Jean-Luc Lagarce, Bernard-Marie Koltès, Hervé Guibert, Serge Daney, Cyril Collard et Jacques Demy ont en commun une époque, la France des années Mitterrand, et une maladie, le SIDA. Ils ont marqué une génération, à commencer par Christophe Honoré, qui raconte le manque mais espère aussi transmettre.
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page9 Sorties de Secours • Nov. 2018 9 christian olivier & yolande moreau Yolande Moreau, la tendre, la délicate, la différente. Muse belge des Deschiens, comédienne pour Jérôme Deschamps et Macha Makeïeff (Lapin chasseur, Les pieds dans l’eau, C’est magnifique…), réalisatrice (Quand la mer monte...), elle impose depuis des années sa personnalité hors norme et sa voix de petite fille simplette dans des personnages poétiques et décalés. Elle s’acoquine ici avec Christian Olivier, leader du groupe culte des années 90, Têtes raides, inventeur d’un langage et d’une esthétique entre musette, cirque, punk-rock alternatif. A eux deux ils s’attaquent à un poète qui va leur aller comme un gant, Prévert, dans une sorte de théâtre musical : Olivier a fait la musique, il chante, Yolande dit, et dans sa bouche, Prévert devient quelque chose qu’on a jamais entendu… > Les Arcs/Quéven. 21/11 celui qui tombe Yoann Bourgeois fut il y a un temps l’une de nos découvertes enthousiastes, il fait partie maintenant des grosses pointures du spectacle, après avoir fait tourner les têtes et humidifié les yeux, avec Cavale, spectacle épuré où un trampoline caché derrière des escaliers faisait rebondir des danseurs comme en apesanteur. Tout le génie de Bourgeois, c’est de travailler avec cet air de rien, ces rebonds ou glissades permis par des dispositifs très simples qui font « flotter » les danseurs, souvent dans la nature, provoquant un émerveillement méditatif. Dans Celui qui tombe, Bourgeois reprend un principe qui n’est pas nouveau (vu chez Mathurin Bolze, notamment) : un plancher tournant sur lequel les danseurs évoluent en formant des marches, des groupes, des figures. C’est très beau, c’est pur, c’est parfait. > Théâtre de Saint-Nazaire. 21/11. the beggar’s opera Comment ne pas se noyer dans les superlatifs pour parler de William Christie ? Comment se retenir pour ne pas dégouliner d’une admiration béate ? Rappelons que William Christie : A- est le pape du baroque et en a montré le sublime, le dépoussiérant des mignardises rococo qui l’alourdissaient ; B- a fondé l’ensemble des Arts Florissants, qui joue sur instruments d’époque, C- n’est pas venu en Bretagne depuis au moins vingt ans. On le retrouve dans une proposition atypique, un énorme spectacle, L’Opéra des Gueux, ancètre de la comédie musicale, une ballad-opera, pièce de théâtre entrecoupée de chansons populaires et d’airs savants compilés par le compositeur de l’ouverture, Pepusch, qui décrit les bas-fonds londoniens au XVIIIe. C’est la première fois que les Arts Florissants s’attaquent à ce type d’œuvre, que met en scène Robert Carsen, avec une troupe de danseurs bondissants, showmen dignes des musicals londoniens – argot londonien en prime – dans un décor contemporain et surdimensionné. Un spectacle étonnant, qui mélange art populaire et art savant. > Palais des arts (TAB)/Vannes. 23 & 24/11.
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page10 10 Sorties de Secours • Nov. 2018 doreen - david geselson Pour parler de ce spectacle, que nous n’avions pu voir à sa sortie, mais dont nous n’avons cessé d’entendre des éloges, nous avons fait appel à un chroniqueur exceptionnel - dans tous les sens du terme. C’est un pair de David Geselson qui signe cette chronique, l’auteur et metteur en scène Joël Jouanneau, grande figure du théâtre français. Parvenu à l’hiver de son existence, André Gorz, auteur d’un ouvrage majeur, Le traître, se relit et découvre, effaré, qu’il y parle avec « une sorte de condescen- dance désinvolte » de celle qu’il aime et l’accompagne dans la vie depuis plusieurs décennies. Plus accablant encore, dans le peu de place qu’il lui accorde dans le livre, elle est soit « défigurée », soit « humiliée ». Hanté par le pourquoi de ses oublis et mensonges, ce célèbre visionnaire politique et écologiste écrit Lettre à D. sous-titrée Histoire d’un amour, à la fois tentative de rachat, demande de pardon et poignante confession de 75 pages qui ne s’oublient pas. Peu de mois après la publication du livre, les deux amants font le choix de disparaître ensemble. Deux acteurs décident d’exposer et soumettre ce texte au cordeau aux vérités du plateau. Ce n’est pas leur histoire, ils n’ont pas du tout l’âge de ce couple octogénaire, ce sont d’encore jeunes gens, mais tant par la délicatesse de l’adaptation que par la magie de l’interprétation, nous sommes invités à partager ce bouleversant, bien que tardif, aveu. Invités oui, puisque dès l’amorce de ce grand travail, le couple nous attend chez lui, dans ses meubles, sourire aux lèvres et coupe de champagne à la main. Disons-le, ce n’est pas sans risque de jouer ainsi la connivence avec le public, ce pourrait même être un brin facile, si ce n’est démagogue, mais ici non, pas du tout, ici cela se justifie pleinement, ici cela conduit à l’écoute délicate et attentive de ce qui suit : une heure intense, sans pathos ni cri, où ne se perd dans le vent aucune syllabe, et où l’amour est mis en abîme avec un tact infini. Pure merveille de théâtre portée par David Geselson et Laure Mathis. > L’Archipel/Fouesnant. 25/11 JOËL JOUANNEAU
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SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page12 12 Sorties de Secours • Nov. 2018 mélanie de biasio On vous en parle parce que malgré tout vous auriez pu passer à côté de cette chose magnifique, ce son feutré, parfait, ces tempos retenus et extatiques, de cette langueur, cette sensualité, qui collerait des frissons aux plus cérébraux, qui remuerait les plus réfractaires au down tempo. Difficile de ne pas craquer, fondre, onduler, suffoquer, s’abandonner totalement à cette voix de dingue - au moins égale à celle de Nina Simone - à ces climats subtils, qui convoquent légèreté du clavier à la Philip Glass, envolées jazzy, grandes chanteuses bluesy, tout autant que les monstres du trip-hop, Portishead, Massive Attack ou Morcheeba. Et ce n’est pas tout. Parce que Mélanie de Biasio possède une arme fatale : une flûte traversière dont elle fait ce qu’elle veut, bruitiste, impro, jazzy, accents à la Debussy, et qui vlan, vous embarque ailleurs, quand vous croyez vous être posé dans un transat, non, on repart en hors-piste, paf un trip à la Moon Martin, sa voix se transforme, bim la Peggy Lee de Fever, hop un coup dans la poudreuse, c’est bon, elle maîtrise toujours, batterie jazz, percus inventives, et bam, elle dévale, elle dévale, piano élégant et dry Martini, James Bond girl passant d’un hélico à un jet ski, électro rock, elle sait tout faire, et nous on s’extasie, on fond, on bave, et on lui file les clefs de la Twingo direct. > L’Archipel/Fouesnant. 30/11 et aussi... Festival du film court Roméo et Juliette Le rendez-vous de la jeune création cinéma- Une pièce culte, créée il y a 20 ans par Angelin tographique en Europe. Preljocaj, qui transposait le ballet de Prokofiev > Brest, 6>11/11 dans un décor de science-fiction signé Enki Bilal. Navette spatiale ou Twingo, on fonce. Festival Grande marée > Cité des congrès/Nantes, 6>11/11 Un temps fort dans Brest et ses alentours, autour de la parole et du conte. > Brest, 17>30/11 Atelier de cartographie subjective Parce qu’on adore ce principe, et que Nantes a été l’une des premières villes à le mettre en Hedda. Lena Paugam place, on vous signale ces ateliers qui Comment la violence peut-elle naître dans consistent à cartographier la ville en fonction l’amour ? C’est la question que pose cette de ses chemins de cœur, ses lieux favoris, ses création qui illustre les mécanismes points de souvenirs, et dressent un inventaire conduisant à des situations extrêmes. Une graphique du rapport affectif que chacun création de Léna Paugam dans une scénographie entretient avec la ville... très esthétique qui n’est pas sans évoquer > Stereolux/Nantes, 17/11 l’univers de Hopper... > Maison du théâtre/Brest. 30/11 A Love Supreme Parcels En 2005, Salva Sanchis et Anne Teresa De Un électro-funk cool, pop et frais, mais pas Keersmaeker donnaient une première version mêlant écriture et improvisation du chef d’œuvre de Coltrane, A Love Supreme. Ils idiot. > Stereolux/Nantes, 12/11 reviennent avec, toujours comme principe chorégraphique, un danseur dédié à chaque La mini-moi de Catherine Ringer, sa fille, Minuit instrument du quartet. Essentiel, comme Simone, voix de clone, en compagnie de son chaque battement d’aile de cette grande frère Raoul, tous deux enfants de Fred Chichin. chorégraphe.... > Stereolux/Nantes, 17/11 > Le Lieu Unique/Nantes, 20 et 21/11
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V SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page14 14 Sorties de Secours • Nov. 2018 bouquin GROs CRUsh Le discours S o r t i e s de secours Fabrice Caro UN dIsCOURs ! UN dIsCOURs ! QUI N’A JAmAIs pRONONCé OU ENTENdU CETTE INJONCTION LORs d’UN mARIAGE OU dE TOUTE AUTRE CéLéBRATION ? mAIs QUANd CEs dEUx pETITs mOTs VOUs sONT AdREssés, QUE FAIRE, sINON FUIR OU TENTER dE s’éChAppER ? UN ROmAN sOLILOQUE QUI CLAQUE COmmE LEs FRIzzy pAzzy dE NOTRE ENFANCE. pAR VIRGINIE sALLé Le chwingue dingue qui claque et qui craque, ça vous rappelle quelque chose ? Eh bien, lire Le Adrien aime Sonia. Et Sonia veut faire « une discours, c’est un peu comme ouvrir un sachet pause ». 38 jours qu’Adrien est en manque, et de Frizzy Pazzy et sentir les granulés frétiller en ce jour de fête, durant ce repas qui célèbre l’union de sa sœur et son beau-frère, il attend sur la langue en formant un feu d’artifice dans désespérément un retour de flamme de son la bouche. On n’arrête pas de rire tant l’esprit amour fuyant, à travers un SMS qui ne vient est vif et le verbe joyeux. On voudrait que cela pas, ou en tout cas qui tarde à venir. ne s’arrête jamais, un peu comme on voudrait En injectant une bonne dose d’absurde dans rester toute sa vie avec la fille ou le garçon son discours intérieur, le narrateur se réconforte qu’on aime. Mais voilà, et c’est là où le bât comme il peut du tragique de l’existence, au blesse, l’attente d’un SMS se transforme en delà de ses drames intimes. Plus qu’une souffrance insupportable. Qu’à cela ne tienne, possibilité, l’humour devient ici nécessité. le discours attendra aussi. En suivant le Fabrice Caro nous fait rire, et ce faisant, nous rend la vie pétillante et plus légère. C’est ça l’effet Frizzy Pazzy ! parcours sentimental d’Adrien, l’amoureux éconduit, Fabrice Caro nous livre une bulle de légèreté qui vient couronner ce repas d’une magnifique cascade de champagne. Un fragment de discours amoureux C’est à cette envolée ou plutôt à cette tentative d’extraction d’une situation embarrassante que nous assistons tout au long du livre. Plus qu’une échappée, le discours est un hymne aux amoureux solitaires avec une autodérision qui ne masque rien de la finesse de l’auteur. D’ailleurs, son nom vous rappelle peut-être quelqu’un ? Fabrice Caro alias FabCaro le génial auteur de BD drôles et grinçantes à souhait, comme Zaï Zaï Zaï Zaï, ou plus récemment Et si l’amour, c’était aimer ? Quel plaisir de le retrouver ici, dans un autre format qui lui sied à merveille. Derrière l’humour, ce deuxième roman révèle une sensibilité à fleur de peau qui se déploie avec une élégance rare (l’auteur avait déjà publié en 2006 chez Gallimard son premier roman, Figurec). Editions Gallimard, Collection Sygne. 208 pages. 16 €
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page15 Sorties de Secours • Nov. 2018 15 bouquin Nous voulons des coquelicots Fabrice Nicolino et François Veillerette pEU ImpORTE LE FLACON pOURVU QU'ON AIT LE LIVREsQUE. C'EsT AINsI QUE CE mOIs CI, L'ON s'INTéREssE BIEN pLUs AU FONd QU'À LA FORmE. CE mANIFEsTE sE pOsE COmmE UNE VéRITABLE épOpéE dE VERTs, COmBATTANT L'AGENT ORANGE. pAR mORGANE ThOmAs 1962. Rachel Carson publie Printemps silencieux. Ainsi instruits, vous pourrez vous en retourner Elle décrit les « élixirs de la mort » qui tuent en conter de belles. Voire même, si le cœur vous insectes, oiseaux et humains. Et, alors que en dit, fredonner du Souchon après avoir Claude François nous chante les progrès de la redonné le pouvoir aux fleurs science de « cette année là », d'autres prennent conscience qu'on est, bel et bien, en train de se faire spoutniquer. « Nous pouvons vivre sans Les cafés-librairies de Bretagne oiseaux et sans animaux mais nous ne s'engagent pouvons vivre sans business » : la messe est Entre le 18 octobre et le 15 décembre, dans le cadre de Libres en littératures 2018, ils vont nous donner dite. Et ce sont de violentes critiques qui à réfléchir sur notre mère Nature par le biais de s'abattent sur « ce qui n'est qu'une femme ». rencontres autour d'essais, de récits, de romans, et Poussée par des idées communistes, ce suppôt de documentaires. Ainsi, à de Satan est sûrement une lesbienne aux mains la Dame Blanche, vous pourrez écouter Alexis Gloaguen, le 2 novembre à du KGB... C'est sur ce joli terrible terreau que 20h, relater ses Ecrits de sont semées les premières graines viciées. Personne ne peut à présent fermer les yeux sur nature entre Ecosse et ce qui nous attend, pourtant le lobbying se Bretagne, et le 30 saisit du moment pour se faire souverain de la novembre à 20h Gilles Clément partagera son roman Le dernier B.A.L. désinformation. Carson devient d’ores et déjà coupable du crime de lèse-majesté. Faisant la pluie et le beau temps sur nos chères cultures, une poignée d'hommes veille à essaimer le Editions Les Liens qui Libèrent doux poison, et se charge d'occuper les postes 126 pages - 8 € d'homologation. Dans la presse, on minimise les erreurs pour ne pas faire peur. Le cousin du gaz sarin devient à la fois formidable et biodégradable. Les gouvernements se succèdent quand aux Antilles on décède. Les sols sont la souillés pour les siècles et les siècles, Amen. Sous la droite, le Gaucho entre. Sous la gauche sélection la tuerie des ruches se poursuit. Un pesticide de de perdu c'est dix de ses copains qui viennent. LA DAME BLANCHE Alors si vous rêvez de sauver le monde sans 35, Grande Rue mettre un slip rouge par dessus votre legging 56290 Port-Louis bleu, mettez vous au vert en un clic : 02 97 82 45 11 nousvoulonsdescoquelicots.fr
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page16 16 Sorties de Secours • Nov. 2018 MUSIQUE la Play-listdu mois Vous l’avez, le réflexe, quand vous montez dans une voiture ? Tournez le C’est quoi, Balises ? potard et mémorisez le 99.8 qui diffuse H24 à 30 km autour de son pylône > Une radio locale associative de Caudan ! Hors émissions, Emmanuelle Debaussart et Tiphaine Legoupil animée par des pros de l’au- vous mitonnent des playlists mélangées de découvertes, grands oubliés et diovisuel et des bénévoles, qui couvre un secteur autour de coups de cœur toujours doux à l’oreille, selon la ligne Rock-R’n’B-Electro- Lanester, sa base, du pays de Rap-Pop-Folk d’origine, origine qui remonte à quinze mois ! Retrouvez sur Quimperlé à la ria d’Etel radiobalises.com le direct et le nom des titres à l’antenne. > Chaque mois, Balises et sds, qui s’entendent bien, échangent des émotions... UNdERGROUNd sysTEm - WhAT ARE yOU (2018) - Gros coup de cœur pour ce groupe programmé aux Trans, mix d’afro beat et de no wave, un pur produit New-Yorkais ! Underground System sONs OF RAphAEL - LAUNCh pARTy (2018) - Le pendant british de MGMT, bricolages désinvoltes et pop noisy, deux frangins qui recyclent moult époques avec génie et simplicité. OTIs sTACKs - FAshION dRUNK (2018) - Un rapprochement Danemark (Just Mike de Dafuniks) - Californie (Elias Wallace) où chacun apporte son savoir-faire pour un mélange R’n’B souvent à deux voix, en retenue, contre-temps et groove élégant. IT IT ANITA - LAURENT (2018) - Guitares tour à tour acérées ou lancinantes, basses hypnotiques ; pas mal de titres bien énervés, donc ça passera plutôt en soirée. Un power groupe belge édité par le label bordelais Vicious Circle, à qui l’on doit également les excellents Lysistrata, eux aussi recrutés par la playlist ce mois-ci. Otis Stacks FLAVIEN BERGER - CONTRE-TEmps (2018) - Après avoir fait des petits pas dans toutes les directions, Flavien Berger, toujours habillé d’un costard plutôt électro, s’engage au petit trot sur un chemin résolument chanson... Et ça fonctionne ! LALA LALA - ThE LAmB (2018) - Couverte de tatouages comme une BD vivante, les cheveux roses soigneusement domptés, cette jeune américaine réinvente un grunge dilué de douceurs pop avec un nouvel album, ode à la sobriété retrouvée. Rien de révolutionnaire mais ultra efficace et touchant. RhyECE O’NEILL ANd ThE NAROdNIKs - dEATh OF A GRINGO (2017) - Vus au Galion de Lorient, puis au festival de Binic, un bon blues rock à l’australienne, Lala Lala à la voix profonde et aux ambiances poussiéreuses de western, avec quelques pointes de trompette. dIE LIGA dER GEWÖhNLIChEN GENTLEmEN - IT’s OK TO LOVE (2017) - Des reprises en allemand et en version ska de Jacques Dutronc ou d’Antoine, pour nous c’est super exotique et en tous cas, ça vaut le détour ! À guetter sur les ondes de Balises dans le courant de l’après-midi ! yOUNG FAThERs - COCOA sUGAR (2017) - Un excellent album des trois chanteurs entre Hip Hop, Trip hop et R’n’B. Hypnotique, rythmique, rapeux, varié, toujours envoûtant, ni trop, ni trop peu. It It Anita mARs REd sKy - FRIENdLy FIRE (2016) - Aaahh, du stoner rock psyché de Bordeaux. Mélodies fines et guitares lourdes. La nuit, osez la tape avant le live !
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page17 17 DOCUMENTAIRE PÉTROLE C’est quoi, KuB ? On vous propose d’aller regarder un documentaire sur – une fois n’est pas > Un média culturel fait coutume – un spectacle de la saison passée, mais passionnant, réalisé par d’œuvres audiovisuelles, KuB autour de l’aventure « Pétrole ». Et si l’aspect artistique du projet ne enrichies de texte et d’image. vous inspire pas, profitez-en quand même pour vous intéresser aux thèses > Chaque mois, KuB et sds, de Matthieu Auzanneau, qui a beaucoup à nous apprendre sur la transition qui s’entendent bien, échan- gent des articles, parfois énergétique... même créent du contenu ensemble autour d’un même sujet. UN dOCUmENTAIRE À VIsIONNER sUR WWW.KUBWEB.mEdIA Ils sont sept compositeurs à avoir écrit la scénique faisant alterner musique et parole musique, elles sont deux pianistes à l’interpréter, scientifico-poétique d’une même durée sur la auxquels s’ajoute un dixième personnage pour place (passée, présente, à venir) du pétrole raconter l’histoire de notre totale dépendance dans notre quotidien, dans notre civilisation ou à l’or noir. Une addiction mortifère, tant nous sur Terre. sommes conditionnés à ce concentré d’énergie, une énergie qui nous donne les moyens d’être des surhommes. Comment renoncer à tout cela ? La menace climatique se précise, le ministre de la transition énergétique démissionne, l’opinion frissonne… Mais pour le moment nous poursuivons notre fuite en avant, toujours plus nombreux, toujours plus voraces... Pour Nathalie Darche et Carine Llobet, ce projet est né de l’irisation au soleil d’une flaque sur la route l’été, de la sensation d’un bleu profond, de l’or noir de Tintin et son voyage au pays des mille et une nuits, de la matière épaisse, noire et visqueuse, des entrailles de la Terre, des prouesses des hommes pour s’en emparer, de la chaleur réconfortante des foyers et de la lumière qui rassure, de l’énergie, de la découverte du(des) monde(s), de l’incroyable facilitation des transports, de voyage. mATThIEU AUzANNEAU Mais le pétrole évoque aussi le lynchage au Auteur et blogueur spécialiste d'écologie et d'économie, il est directeur du think tank de la goudron et aux plumes, la folie des hommes, les transition énergétique The Shift Project. Durant plus violentes crises financières, la monnaie de dix ans, il a été journaliste à la croisée de d’échange, la richesse et la pauvreté du monde, l’économie et l’écologie (Le Monde, Arte...) et depuis la hiérarchie, le choix des priorités des 2010 l’un des blogueurs invités de la rédaction du Monde, avec le blog Oil Man, chroniques du début hommes, les moyens de pression, les guerres de la fin du pétrole. Il a publié Or Noir, la grande des (aux) peuples, la pollution et la destruction histoire du pétrole (La Découverte, 2015), une bible de l’environnement.L’Estran, à Guidel, a récompensée par le Prix spécial de l’Association des proposé aux musiciennes de créer une version économistes de l’énergie (AEE).
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page18 18 Sorties de Secours • Nov. 2018 expo gaele flao dessine la guerre LEs ARChIVEs dépARTEmENTALEs RACONTENT 14-18 À LEUR mANIèRE : UNE FICTION COmmE UNE FREsQUE hIsTORIQUE, dANs UN VILLAGE BRETON FICTIF, AUTOUR d’UN COUpLE, JEANNE ET JOsEph. UNE hIsTOIRE ILLUsTRéE pAR LEs dEssINs EN GRANd FORmAT dE GAELE FLAO. Ça nous arrache les tripes, de mélanger 14-18 héroïsme, devant la connerie transmutée en et l’art, même si l’histoire, même si le temps, patriotisme, devant le meurtre transcendé en même si savoir, même si comprendre, même si sacrifice. Le centenaire de la boucherie de ne pas oublier ; cela n’y change rien, on secoue 14-18 et ses commémorations en tous genres toujours la tête devant l’absurde déguisé en nous fait mal au bide, avec ses femmes éplorées et ses orphelins, sa propagande patriotique a posteriori. On voudrait du décodage, des aveux, des mises à plat, des explications, de la rationa- lité. On ne voudrait pas que par la grâce du temps qui passe, ces hommes et ses femmes redeviennent des héros alors qu’ils ne sont que des victimes, que les chromos enjolivent les couleurs de ce qui n’a été qu’un massacre. Si ce n’étaient pas des artisans sincères et talentueux – Gaele Flao pour les dessins, Achille Grimaud les enregistrements sonores, et les Archives départementales la scénographie – on n’en aurait jamais parlé, on n’aurait jamais écrit là dessus, posé nos mots là dessus, parce qu’on ne veut pas faire comme si c’était normal, comme si c’était admis, alors que l’horreur, la révolte, le dégoût, la colère nous rongent. Kiss Kiss Bank Bank Mais voilà, et c’est le piège – ils sont beaux, les dessins de Gaele. Elle est belle, Jeanne aux champs, Jeanne courageuse, Jeanne veuve, Jeanne tenant ses petits bien serrés contre ses jupes, tournée vers l’avenir malgré tout. Jeanne digne oui, surtout digne, merde, quoi. Elle est belle Jeanne, ses petits cheveux collés aux tempes par la sueur, retournant la terre pour gagner de quoi participer. Participer à la souscription pour un beau monument aux morts où elle pourra emmener ses petits voir leur papa tous les dimanches. Ils seront beaux et dignes, tous en noir. Ils seront graves. Pas un seul ne crachera devant le monument, pas un ne le frappera de ses poings, personne ne le bourrera de coups de galoches. Non, ça ne se fait pas.
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page19 Sorties de Secours • Nov. 2018 19 WHY ? Ils sont beaux, ces dessins. Elle est belle, cette On lui a trouvé une drôle de tête, à Gaele Flao, France vidée de son sang, orpheline de ses quand on est allées la voir, dans son atelier pères, veuve de ses maris, endeuillée de ses d’Hennebont. Elle a usé des dizaines de fusain enfants. Ils sont beaux, les catalogues des à dessiner, dessiner, encore et encore la mort, entrepreneurs, on peut choisir dessus, comme l’absence, le chagrin, la solitude, la colère. pour les cercueils – si des cercueils il y en avait, « Cette guerre terrible, inutile, c’est une mais comme il n’y en a pas, on appelle un période très triste et amère. Je n’ai dessiné représentant, pour leur acheter un monument que des avant/après, je n’ai cotoyé que des en kit. Ils sont beaux ces monuments, ces poilus personnages tristes ». Elle traîne une crève qui bras tendus, ces palmes fièrement dressées, ces n’en finit pas, exsude les huiles essentielles de médailles, ces couronnes de laurier, c’est bien. Ils le méritent bien, on peut quand même faire Thym, d’Eucalyptus et de Ravintsara, mais rien ça pour eux. Ne jamais oublier la force du n’y fait, ça ne passe pas. Tu m’étonnes. And no religion too symbole. C’est important le symbole. Imagine there's no countries Imagine all the people It isn't hard to do Living life in peace... Nothing to kill or die for C’est la première fois que cette artiste créative, véritable tête chercheuse, se donne à un boulot d’illustration, à une commande, et son trait si libre se plie ici à un certain classicisme qui a produit de magnifiques dessins : « Je me suis surprise à travailler comme un dessinateur de bande dessinée. C’est un boulot monstrueux, mais c’est aussi un plaisir d’aller chercher le réalisme et le trait. ça fait trois mois que je suis sur ces personnages, ces costumes, c’est comme des gammes ». Ces personnages, Gaele les a créés en piochant dans l’énorme base fournie par les Archives, mais aussi d’après les visages de personnages réels, c’est ainsi que l’entrepreneur ressemble à Debussy et Jeanne à une actrice de cinéma... « Il fallait que je fasse vivre ces personnages, ces images du souvenir. Il y avait tellement de souffrance, de peur, de détresse, de haine... C’est pour ça qu’elles sont sans doute plus sanctuarisées qu’expressionnistes ». Un énorme boulot de recherche, d’observation, mais aussi d’imagination pour mixer les images d’archives et l’histoire fictive de Jeanne et Joseph, dans un village breton « Les Archives ont demandé des scènes précises, connec- tées à leur synopsis et au texte d’Achille, sans être redondantes, mais malgré les indica- tions et les photos d’archives, il fallait vivre ces scènes, les imaginer pour les dessiner ». Maintenant – no offense – il va falloir les oublier. IsABELLE NIVET « des larmes de granit : après la Grande Guerre, se souvenir ». Archives départementales du morbihan, Vannes. du 11 nov au 30 juin. Lun/ven, 9h/17h30. dim 11 nov 14h/18h. Entrée gratuite.
SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page20 20 Sorties de Secours • Nov. 2018 INTERVIEW 06 la vie des bord(e)s ON A CRAQUé sUR CE spECTACLE EN CRéATION, d’ABORd pARCE QUE LE dUO NINA FIshER y TIENT UNE pLACE ImpORTANTE, ET ON AdORE LEUR mUsIQUE ELECTRO-ChANsON. pUIs ON A EU sANdRINE ROChE AU TéLéphONE, QUI JOUE ET éCRIT AU sEIN dE L’AssOCIATION pERspECTIVE NEVsKI, ET çA A EmpORTé LE mORCEAU. ON pARLE ICI dE mAUVAIsE hERBE ET d’INdOCILITé, ET çA NOUs VA BIEN... IsABELLE NIVET Les débuts du projet Je connaissais la chanteuse du duo Nina Fisher, rires. Tout au long du conte, on ouvre des brèches je devais lui écrire des chansons, et puis on s’est avec des anecdotes : politique, rôles homme - retrouvés tous les trois sur le plateau, elle m’a femme, opposition riche - pauvre, immigration... parlé de Marie-José Mondzain, une philosophe qui a écrit sur les plantes saxifrages, qui fendent On chante, on parle, on joue le béton, on est partis sur cette notion de On est entre le concert et l’histoire, on navigue « débordement du vivant », et on a cherché comment entre les deux sur une forme de théâtre musical le retranscrire textuellement et au plateau. On a où on a beaucoup travaillé sur la spatialisation imaginé un conte, une histoire onirique, j’ai écrit sonore. On n’a pas de place assignée, on joue et un premier jet et ensemble, on a tricoté entre les on dialogue tous les trois. mots et la musique une sorte d’opéra électro-pop. Projeter l’herbe et le sésame Une fleur allégorique On a choisi d’utiliser un rétroprojecteur, pour son Quand j’écris, je convoque toujours des enfants côté artisanal. Je crée des propositions pour écouter et mettre mes questions en pâture. graphiques avec des matières végétales, que je Il est apparu que le texte permettait le dialogue projette sur les corps et l’espace. Avant chaque entre les générations, mais à plusieurs niveaux spectacle, on cueille des végétaux là où on est, et de lecture. Chacun en parle avec ses références. on fait des essais. On sait maintenant ce qui C’est un conte, une allégorie du monde marche ou pas, mais ça permet de conserver une d’aujourd’hui : dans un royaume sans plantes ni part d’aléatoire selon les lieux et les saisons. Je fleurs, où tout est bien organisé, une fleur se sème rajoute des encres, de l’aquarelle et de l’eau, de et va tout fissurer. Tout part en vrille et en fous l’huile, du marc de café, et du sésame, mais non torréfié, sinon ça ne marche pas ! Un tunnel végétal La force du vivant, les corridors de continuité, le paysagiste Gilles Clément en parle beaucoup, et on a tout de suite vu le parallèle avec le tunnel de Calais comme un corridor. Les mêmes termes sont utilisés pour le déplacement migratoire et végétal. Le vivant, il existe, il continue de pousser, on ne peut pas continuer à être muselés. Seulement ces choses, je ne veux pas les dire en donnant des leçons, alors j’ai travaillé sur les « passions joyeuses » d’après Spinoza, une posture qui est relayée par la musique entraînante et joyeuse d’Elisabeth et Pierre... Au festival « Les salles mômes », Théâtre du Blavet, Inzinzac-Lochrist, vendredi 2 nov à 15h. dès 7 ans.
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SDS NOV 2018_Mise en page 2 26/10/18 11:59 Page22 22 Sorties de Secours • Nov. 2018 EXPO emma burr is back in town ELLE AImE LA VILLE ET LA dEssINE COmmE pERsONNE, AVEC UN méLANGE UNIQUE dE pOésIE ET dE RIGUEUR. LIGNEs dE FUITE, BLANCs ImpECCABLEs ET TOUChEs dE COULEUR COmmE dEs COQUELICOTs INATTENdUs, EmmA BURR LA BRITIsh, VANNETAIsE dE CŒUR, A CROQUé sA VILLE dANs UNE ExpOsITION ORIGINALE, mIsE EN VALEUR pAR L’éCRIN 17E dE L’hÔTEL dE LImUR. Ils sont une centaine, délicatement exposés Musée départemental breton à Quimper, parmi les boiseries de l’Hôtel de Limur par la Hangar à bananes à Nantes, Fonds Leclerc à grâce de la scénographie d’Eric Morin, subtil Landerneau... On retrouve sa patte, respec- architecte des grandes expositions dans l’Ouest : tueuse, sensible, épurée, dans la petite conver-
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