CAP'ÉCO LE MENSUEL - VIVRE AU VERT : LA CAMPAGNE REDEVIENT TENDANCE - La Nouvelle République
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CAP’ÉCO LE MENSUEL DE L’ÉCONOMIE EN INDRE-ET-LOIRE #62 VIVRE AU VERT : LA CAMPAGNE REDEVIENT TENDANCE CAHIER DE LA NOUVELLE RÉPUBLIQUE - Mardi 18 mai 2021 - N° 23.312 - Ne peut être vendu séparément - 37
cap’éco #62 3 BAROMÈTRE sommaire 4 CARNET PRO : PAUL DE SINETY 6 ENQUÊTE LA REVANCHE DES TERRITOIRES RURAUX ? 12 LA FEMME DU MOIS : CAROLINE GASCH 14 DOSSIER LE CASTELRENAUDAIS SE DYNAMISE 17 RH 17 JOBS 18 LA MACHINE À CAFÉ Textes : Pierre Bonnet, Juliette Directeur de la rédaction 19 LE BILLET DE FX Lécureuil, Flore Mabilleau. Christophe Hérigault Photos : Pierre Bonnet, Juliette Rédactrice en chef Lécureuil, Flore Mabilleau, NR, Chantal Pétillat Adobe Stock. Responsable Thématiques Photo de une : Adobe Stock Johan Guillermin Réalisation : Régie publicitaire Service des thématiques NR NR Communication Secrétariat de rédaction : Tours : 02.47.60.62.51 Agnès Aurousseau, Johan Guillermin. CPPAP 0525 C 87037 - ISSN 2260-6858 Maquette/PAO : Alexandra Chérioux, Imprimerie La Nouvelle République Christophe Garnier. Tours La Nouvelle République Origine principale du papier : France Taux de fibres recyclées : supérieur du Centre-Ouest ou égal à 50 % / Eutrophisation (pâte 232 avenue de Grammont et papier) : Ptot inférieur ou égal à 37048 Tours Cedex 1 0.014 kg/tonne. Tél. 02.47.31.70.00 Fax 02.47.31.70.70 Directeur de la publication 10-31-3409 président du Directoire Olivier Saint-Cricq 2 I MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62
baromètre à l’agenda 20 mai Les Rencontres Performance - édito Améliorer la compétitivité : Les marchés publics, un bon plan pour gagner de nouveaux marchés. De 9 h à 12 h, CCI Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. Tendance verte ? 21 mai EMMANUELLE PAVILLON, DIRECTRICE DÉPARTEMENTALE Formation développement commercial : Dirigeants d’entreprise, mettez en place une organisation Paris déserté ? Avec un flot d’hyper-urbains des enfants ; parce qu’un jardin partagé, c’est commerciale efficace. De 8 h 30 à 13 h. qui s’abattrait (gentiment) sur nos campagnes, sympa au moment de la récolte, moins quand CCI Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. pour y retrouver le sens et les saveurs de la il faut y bosser ; parce que… les envies de De 9 h à 12 h, webinaire. Les Matinées vie ? Rêve ou réalité, s’interroge l’enquête de campagne des urbains s’arrêtent à la dernière pour entreprendre. Plus d’informations ce Cap’éco de mai ? borne wifi et/ou lorsque finit la fibre. sur www.touraine.cci.fr Il est vrai que le marché de l’immobilier s’est Les entreprises le savent bien, elles qui ont emballé, dans les moyennes et petites villes d’Indre-et-Loire. Il est vrai que la green attitude parfois posé leur production en pleine nature, et qui y ont peiné à recruter, particulièrement 27 mai prospère, boostée par l’urgence climatique, aux postes-clés : un salarié veille à trouver sur Information collective sur les métiers et surtout (surtout !) par la crise sanitaire ; place transports et services, pour lui et pour sa de la sécurité avec Pôle emploi. 10 h. colorant d’un vert vif, et socialement tendance, famille. Mission locale Sud-Touraine, Beaulieu- l’agriculture comme la culture, les fringues et la Alors ? Alors, on verra dans ces pages que lès-Loches. déco… les politiques locaux s’essaient à l’attractivité. Tout, partout, devient vert et nature ; pour ce qui est du moins des éléments de langage. Qu’ils semblent avoir bien compris le message. La question demeure, pourtant : qu’en sera-t-il, 28 mai Formation développement Parce que, en vrac, et pour venir contredire la si la crise sanitaire a le bon goût de s’éloigner, commercial : Dirigeants d’entreprise, joliesse du tableau : le bio des supermarchés de ces appétits de verdure ? Pour une Camille mettez en place une organisation reste enveloppé de plastique ; les tee-shirts menaçant de plaquer Paris, combien de Léo commerciale efficace. De 8 h 30 à 13 h. écolos de certaines grandes marques (que Ferré ? « On t’a chanté sur tous les tons… CCI Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. l’on ne nommera pas) restent fabriqués par Paname, Paname... » 29 mai Portes ouvertes au Cnam de Tours, de dans l’actu en chiffres 10 h à 13 h. 31 mai L’INDUSTRIE RÉGIONALE 4 juin NOTE UNE BELLE REPRISE Comme les mois précédents, la production industrielle en mars a progressé plus 824 La région a déjà récolté près de Stage 5 Jours pour Entreprendre. De 9 h à 17 h. CCI Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. fortement que ce que laissait prévoir le 824 M€ d’aides diverses liées à la jugement des chefs d’entreprise interrogés lors de la dernière enquête. La vigueur de crise du Covid-19, auxquelles vont 3 juin l’activité se reflète dans le taux d’utilisation s’ajouter 364 M€ de baisse sur les Webinaire. Les Rencontres moyen des capacités de production, impôts de production. Performance – Développer le désormais légèrement supérieur à son capital humain : Comment manager 20.000 € niveau sur longue période. aujourd’hui et renforcer ses liens à (Source Banque de France) distance avec ses salariés. De 9 h à 12 h. MEHDI LORÉ-LAUNAY, C’est la somme réunie grâce MEILLEUR APPRENTI CUISINIER au mécénat par le musée du Compagnonnage, à Tours, 4 juin Formation développement pour effectuer des travaux de commercial : Dirigeants d’entreprise, restauration sur des œuvres de mettez en place une organisation Tour de France. commerciale efficace. De 8 h 30 à 13 h. CCI Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. -4% La perte estimée, pour mars, du 5 juin Portes ouvertes au Cnam de Tours, de 10 h à 13 h. niveau régional de production 8 juin industrielle, par rapport au niveau d’avant-crise, selon la Banque de France. Pour le premier trimestre Formation à l’international : les À l’initiative des Maîtres cuisiniers de documents d’accompagnement France (MCF), un jeune élève du lycée 2021, le total serait en léger import-export. De 9 h à 17 h. CCI professionnel Albert-Bayet de Tours, excédent. Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. Mehdi Loré-Launay, 19 ans, a concouru pour l’épreuve du Trophée du meilleur L’Atelier du micro-entrepreneur. De la phrase apprenti de France espoirs 2021. 9 h à 12 h. CCI Touraine, 1 rue Schiller, L’épreuve s’est déroulée dans les cuisines à Tours. du lycée, en présence de Didier Édon, chef du restaurant Les Hautes-Roches à Rochecorbon, délégué régional des Philippe Briand, PDG de Citya 10 juin MCF Centre-Val de Loire, Alain Couturier, Les Rencontres Performance – maître cuisinier, et Barbara Hermelin, Préparer demain : Comment maîtriser professionnelle émérite. Le jeune élève, en sa e-réputation ? De 9 h à 12 h. CCI formation complémentaire post bac pro, a « Nous entrons Touraine, 1 rue Schiller, à Tours. été sélectionné pour la finale qui aura lieu dans une phase l’année prochaine. de négociation 11 juin Portes ouvertes au Cnam de Tours, de UN OUTIL POUR LE SUIVI exclusive avec 14 h à 19 h. DES PATIENTS COVID En lien avec La Mobilery, une start-up Nexity. » basée sur le site de Mame, à Tours, le CHRU a mis en place un outil numérique Cela porterait le groupe Citya octobre permettant de suivre, après leur sortie de Élections aux chambres consulaires à dix-huit mille salariés. des CCI et CMA. l’hôpital, les patients atteints du Covid-19 hospitalisés en réanimation. MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62 I 3
l’invité Paul de Sinety Héraut impliqué de la langue française Pour le délégué général à la langue française, la pratique de la langue au travail n’est pas neutre. Il envisage le français comme un enjeu social et entrepreneurial. P aul de Sinety a été nommé délégué général de la langue française et en chiffres aux langues de France du minis- tère de la Culture en 2018. Cette fonction va particulièrement bien à ce défenseur de longue date de la langue française et de l’écrit précisément. Il souhaitait déjà « la rendre visible, audible, sensible », alors qu’il s’exprimait à l’occasion de la Foire du livre de Francfort (Allemagne) en 2017. Passionné de littérature, il avait exporté le festival Étonnants voyageurs 2 Le français est la deuxième de Saint-Malo… au Maroc – où il était en langue de la diplomatie. Il est poste culturel. Garant d’une langue qui évolue, il met volontiers en avant le nou- la langue officielle à l’ONU veau dictionnaire de la langue française et la langue officielle, avec conçu par le ministère de la Culture et l’anglais, aux Jeux olympiques. l’Institut international pour la franco- phonie. « Ce dictionnaire collaboratif et évolutif comprend plus de cinq cent mille termes et expressions du français, tel qu’il se pratique sur les cinq continents. Il est accessible en ligne (dictionnairedesfran- cophones.org) et téléchargeable sous la forme d’une application mobile gratuite. Parce que le français appartient à toutes 3 Le français est la troisième celles et à tous ceux qui le parlent, ce dic- tionnaire permettra à chacun d’avoir son langue la plus parlée dans le mot à dire ! » Cet outil met en avant la monde des affaires. sérendipité, c’est-à-dire l’art de faire de rencontres imprévues… Ce rayonnement international que connaît la langue française peut aussi devenir un outil en entreprise. Parler un même langage renforce la cohésion dans un groupe, un service, une équipe. On se souvient de Louis Schweitzer, alors PDG de Renault, qui donnait des cours 500.000 Le nombre de professeurs de « Le français appartient de français à ses cadres pour qu’il n’y ait français à l’étranger. Notre plus de faute dans les courriels de l’entre- prise. Pour sa part, Paul de Sinety bannit langue a progressé de 9,6 % les termes anglais dans la conversation (il faut même mettre un euro dans une à toutes celles et à tous entre 2014 et 2018. (Source, ministère de la Culture) tirelire en cas d’oubli)… Alors que dire du jargon des professionnels qui se roulent ceux qui le parlent. » dans le branding ou le greenwashing ? C’est un objet de lutte à ses yeux pour faire s’épanouir le français dans tous les bio express domaines. Même si cet enjeu est de taille > 1972 : naissance à Paris. Master de dans le monde du travail... l lettres classiques, Paris Sorbonne. > 2000 : dirige le département éditions de l’agence culturelle du ministère des Affaires étrangères, puis le département Livre et écrit à Culturesfrance. Commissaire général à l’Institut Une cité internationale de la langue français. Auteur d’ouvrages et de films documentaires. > 2012-2015 : conseiller culturel adjoint à Le français est la deuxième langue plus utilisée dans Pédagogie, enseignement mais aussi expositions l’ambassade de France à Rabat (Maroc). la diplomatie, par exemple. Elle progresse le plus en d’artistes y sont prévus pour en faire un laboratoire > 2017 : commissaire général du Afrique. Alors qu’on dénombre près de trois cents de la francophonie. Le lieu devrait notamment pavillon français à la Foire du livre de millions de francophones dans le monde, le président tester une nouvelle façon d’apprendre le français. La Francfort 2017, où la France était l’invitée Macron a imaginé à Villers-Cotterêts une Cité directrice Valérie Senghor prévoit une fréquentation d’honneur. internationale de la langue français. « Nous en ferons l’un de 200.000 visiteurs dès la première année. Avec un > 2018 : responsable du commissariat des piliers symboliques de notre francophonie », avait-il budget estimé à 185 millions d’euros, installé au logis général de l’exposition permanente sur la langue française, pour le projet Cité indiqué sur Twitter en mars 2017 (avant son élection). royal et au jeu de paume du château, le lieu – qui avait internationale de la langue française à C’est dans cette localité picarde que François Ier, venu y été laissé à l’abandon – devrait ouvrir en 2022. Deux Villers-Cotterêts (Aisne). chasser, avait instauré le français comme langue officielle cents personnes s’y activent pour faire renaître cet > 2018 : délégué général à la langue du royaume, en 1539, pour les actes administratifs, par édifice historique, au potentiel touristique important française et aux langues de France du exemple. C’est aussi le lieu de naissance d’Alexandre dans cette région méconnue. ministère de la Culture. Dumas. Un parrainage illustre pour le projet. 4 I MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62
l’enquête (Photo Flore Mabilleau) La revanche des territoires, rêve ou réalité ? Avec la crise sanitaire, les achats immobiliers se sont multipliés dans le département en ville, et, c’est la nouveauté, en campagne. Un dynamisme signe d’une revitalisation de certains territoires ? V ivre avec plus d’espace et de verdure. Ces désirs, suscités ou vient Vincent Briand, président départemental de la Fédération natio- renforcés par les confinements et le boum sans précédent du télé- nale de l’immobilier (Fnaim). « La dynamisation des villages situés à travail, se traduisent par une vitalité immobilière inédite – surtout 15-20 km de Tours est d’abord le résultat du report du marché du centre dans l’ancien. Et pas uniquement dans les vingt-deux communes de la de Tours, très tendu ; pour pouvoir acheter, il faut s’éloigner, analyse-t-il. métropole tourangelle, qui concentre, avec 300.000 habitants, 48 % de Il y a ensuite l’envie de changer de façon de vivre et la recherche d’espace la population du département. « C’est fou et formidable, s’enthousiasme de citadins tourangeaux ou franciliens. Mais avec des exigences de la part Nancy Canetto, responsable de la Bourse de l’Immobilier, à Loches. Cela de ces profils plutôt cadres : une zone qui ne soit pas trop enclavée et une faisait longtemps que l’on n’avait pas connu une telle dynamique de vente, bonne connexion pour pouvoir télétravailler. » Or, le déploiement de la y compris dans des villages de campagne. » fibre accumule les retards… L’heure serait- Selon un sondage de l’Ifop pour BNP Paribas (1), 81 % des Français souhaitent un extérieur. « Enclencher elle venue, néanmoins, de la revanche de ces territoires, semi-urbains ou semi-ruraux – le mouvement selon le point de vue –, voire même carrément Une revitalisation en vue ? ruraux ? Est-ce que cette crise majeure peut qui va faire En Indre-et-Loire, les communes d’Am- revitaliser certaines zones ? boise, Loches, Bléré, ou encore Sainte-Maure Du côté de l’immobilier d’entreprise, pas de de-Touraine et leurs alentours attirent révolution en vue. « L’activité se situe comme davantage. « On observe un dynamisme immobilier, mais qui doit être tempéré », pré- boule de neige. » auparavant majoritairement dans la métro- pole, avec quelques dossiers à Amboise ou t 6 I MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62
l’enquête à Chinon », commente François Boille, président du Club t immobilier de Touraine. Mais des espaces de coworking, qui ont trouvé leur clientèle, avaient déjà pointé le bout de leur L’emploi pour implanter nez, ici et là, y compris dans des zones peu denses. « Il y a une réalité, mais qui reste émergente, balbutiante, et qu’il faut renforcer et accompagner, affirme Abdelillah Hamdouch, professeur des universités en aménagement de l’espace et urbanisme à Polytech Tours (lire son interview par ailleurs). durablement Le challenge, c’est d’être capable d’enclencher le mouvement qui va faire boule de neige. » les personnes. Pour s’installer, les ménages arbitrent entre leurs besoins, leurs rêves et leur budget. Leur principal critère ? Celui de la distance avec leur lieu de travail – et donc des transports disponibles – avec quelques assouplissements pour ceux qui peuvent travailler à distance. « La seule façon d’implanter durablement des personnes sur un territoire, c’est l’emploi », affirme Louis Rustin, directeur général de l’entreprise épo- nyme, spécialiste du caoutchouc. Basé dans la Sarthe avec 98 salariés, l’industriel a ouvert, en décembre dernier, une antenne à Polaxis, dans la zone d’activité de Neuillé-Pont- Pierre, dépendant de la communauté de communes de Gâtine et Choisilles-Pays de Racan, à 25 km au nord de Tours. « Nous avons cherché à nous rapprocher d’une agglomération avec un territoire et un bassin d’emploi dynamique, dans une zone d’activité équipée et dédiée à l’implantation d’entre- prises, explique-t-il. Ce qui peut faire la différence d’une zone à une autre, c’est l’accessibilité, l’environnement, le fait aussi de pouvoir déjeuner à proximité, une salle de sport, etc. » Les initiatives publiques pour relocaliser les activités éco- nomiques dans les territoires se sont multipliées (création de zones de revitalisation rurale ou aides du plan de relance de l’État, soutien à la relocalisation industrielle de l’agence de développement régionale Dev’Up, etc.). Dans la commu- nauté de communes Bléré-Val de Cher (lire notre reportage), la population est en croissance d’environ 2 % depuis une petite dizaine d’années. « Notre territoire à moins de trente minutes de Tours est attractif, avec le Cher, le château de Che- nonceau, dix trains par jour, mais cela entraîne des tensions au niveau de l’habitat, surtout depuis le premier confinement, observe Vincent Louault, maire de Cigogné et président de la communauté de communes. Plus de 50 % de nos habitants travaillent sur la métropole et 15 à 20 % sur l’Amboisie ; l’enjeu, aujourd’hui, c’est de pérenniser nos emplois sur le secteur avec le projet de zone industrielle, et dire aux habitants de Tours qu’ils peuvent venir travailler chez nous ! » Une cohésion à préserver Des efforts politiques sont aussi réalisés pour revitaliser les centres-bourgs et les commerces de proximité, garantir l’accès aux services publics, etc. Tours, officiellement métro- pole depuis 2017, est également pionnière dans la création de dix « contrats de réciprocité » avec ses voisins, sur neuf thématiques (développement économique, tourisme, mobi- lité, etc). Avec des limites : « Les contrats de réciprocité n’ont pas de financement propre, ni d’ingénierie dédiée mais, surtout, ils se limitent à l’Indre-et-Loire, aire d’influence de la métro- pole », pointe un rapport du Conseil économique, social et environnemental régional (2). Qui dessine quatre scénarios pour 2050 en Centre-Val de Loire : une région où les désé- quilibres se creusent, où l’unité explose, où les coopérations se renforcent, mais où une renaissance est aussi possible. l (Photo © Adobe Stock) Flore Mabilleau (1) Réalisé en avril 2020. (2) Métropolisation et cohésion régionale, nov. 2020. Intérêt économique,qualité de vie Un « desserrement » de la métropole Du coworking en zone rurale Benoist de Lamothe, 47 ans, Avec « Mission Résonance », En avril 2019, Philippe Naudeau, codirigeant d’1ndis – plateforme l’Agence d’urbanisme de ancien dirigeant d’un cabinet de de négoce, de stockage et l’agglomération de Tours courtage à Paris et amoureux de de distribution de dispositifs (ATU 37) a tiré une douzaine sa ville natale, a lancé un espace médicaux – a choisi d’installer son d’enseignements d’une série de coworking et de séminaire à entreprise zone Bois Simbert, à d’entretiens menés en mai, juin et Richelieu, cette commune classée Cinq-Mars-la-Pile, en 2018. Avec juillet, auprès de soixante-quatorze « zone de revitalisation rurale » son collègue, ils souhaitaient acteurs locaux. Concernant la – comme près de cent quarante quitter Paris pour privilégier leur dynamique résidentielle, « nous autres du département, en raison qualité de vie – de la verdure et du avons des impressions et des de sa faible densité de population calme – tout comme leurs intérêts sentiments, mais pas encore et de son revenu moyen par économiques et logistiques. de bases de données pour les habitant. Pour Cité Richelieu, « En étant basés dans cette zone confirmer », prévient Aurélie l’entrepreneur a rénové les 400 m2 d’activité, nous sommes situés sur une sortie d’autoroute Ravier, urbaniste et responsable des stratégies territoriales. d’un hôtel du 18e siècle, le transformant en bureaux et permettant de distribuer le nord, le sud, l’est et l’ouest Des tendances se dégagent néanmoins : « Certains salles de réunion design. « Le coworking accessible 24 h de la France », détaille le chef d’entreprise, qui a déposé territoires sont dans des dynamiques immobilières fortes, sur 24, 7 jours sur 7, a rapidement fonctionné – entre ses valises à Cléré-les-Pins, se rapprochant ainsi de sa avec beaucoup de demandes et pas suffisamment d’offres quarante et cinquante professionnels sont passés ici belle-famille. Autre élément déterminant : des locaux en disponibles, comme, par exemple, à l’ouest (à Semblançay depuis la création malgré le confinement – tout comme les location au rapport qualité-prix compétitif, proposés par la et autour) ou au nord-est de la métropole. Nous observons, séminaires, avec deux à trois organisés chaque mois, les six communauté de communes Touraine Ouest-Val de Loire, depuis quarante ans, le desserrement de la métropole ; mais, premiers mois », observe-t-il. Depuis quelques semaines, à 24 km de Tours, dans une zone de revitalisation rurale, dans le même temps, des territoires sont également en de nouvelles demandes affluent. « Mais la ville ne pourra se permettant « d’avoir accès à certains avantages fiscaux ». perte de vitesse, notamment dans le sud du département. développer que si l’on restaure du patrimoine et que l’on 1ndis doit, par ailleurs, bientôt devenir propriétaire pour Est-ce que le développement du télétravail et l’envie de crée des emplois, explique celui qui est également élu dans « 10 € du mètre carré, contre 40 à 50 € dans d’autres zones nature peuvent suffire à redynamiser ces villages ? Seul l’opposition municipale. Et pour accueillir des entreprises, il d’activité, type Amboise ou Chambray ». l’avenir nous le dira. » faut que tout soit opérationnel ! » MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62 I 7
l’enquête « Les ménages ont réfléchi à leurs modes de vie » Abdelillah Hamdouch, professeur des universités en aménagement de l’espace et urbanisme à Polytech Tours et vice-président de Villes au Carré, centre de ressources politique de la ville, analyse la dynamique immobilière à l’œuvre dans certains territoires. ments. La crise sanitaire a poussé les ménages à réflé- chir à leurs modes de vie, leur alimentation, leurs sources de satisfaction et, pour certains, à leur envie de déménager, avec la prise en compte d’un certain nombre de paramètres : la distance entre lieu de rési- dence et de travail, car ils cherchent à minimiser les temps de trajet, ou la proximité d’un certain nombre de services. Mais tous les territoires d’Indre-et-Loire ne sont pas égaux en termes d’attractivité, certaines équipes municipales s’engagent d’ailleurs pour rendre leur territoire plus attractif, attirer des boulangers, des médecins, etc. Quels sont les ingrédients qui peuvent accompagner ce mouvement? La redynamisation démographique en cours devrait être utilisée comme un levier d’amplification pour investir dans les infrastructures de services, adminis- tratives, de santé, d’éducation ou encore de loisirs. Mais la problématique majeure reste celle des dis- tances, avec des bouchons sur certains axes et une accessibilité limitée – liée notamment au sous-inves- tissement de la SNCF dans le réseau ferroviaire de proximité depuis près de trente ans, au profit du TGV. Même s’il y a encore du travail, la situation s’améliore depuis que les Régions ont repris en main les réseaux de TER. En Centre-Val de Loire, les transports repré- sentent un tiers du budget de la Région, soit près de 450 millions d’euros par an. Est-ce que cet intérêt pour ces territoires semi- ruraux peut s’accompagner d’un développement économique ? Je ne crois pas au développement de l’industrie, qui ne représente plus que 10 % des emplois en France. Mais, plusieurs types d’activités peuvent contribuer à redy- namiser ces territoires : le développement d’une agri- Pour Abdelillah Hamdouch, le tourisme et l’agriculture de proximité sont des atouts pour l’Indre-et-Loire. culture de proximité et de qualité qu’on observe déjà (Photo Flore Mabilleau) en périphérie de Tours, d’une activité de transforma- tion des produits agricoles, sur place. Le tourisme est Comment s’explique le dynamisme immobilier avec enfants à se délocaliser vers ces périphéries, également un levier de développement économique en dehors de la métropole depuis le premier attirés par ailleurs par l’accès à la nature, à davantage pour l’Indre-et-Loire, tandis que le vieillissement de déconfinement ? d’espace et à une certaine qualité de vie. la population et l’installation de ménages néoruraux Le mouvement dit de « démétropolisation », soit de devraient permettre de développer un certain nombre desserrement de l’étau urbain depuis les années 1960, Quel rôle joue la crise sanitaire ? de services créateurs d’emplois non délocalisables. Il en faveur des premières et deuxièmes couronnes des Les inégalités en matière d’habitats sont apparues de y a une dynamique, mais qui doit être organisée, gérée aires urbaines, et de plus en plus loin, s’est accéléré manière flagrante : les locataires ou les propriétaires et planifiée. avec la pandémie. Les prix du foncier et de l’immobi- disposant de terrasses, de balcons, de jardins ou de lier dans les villes centres poussent les jeunes ménages paysages ont vécu moins péniblement les confine- Propos recueillis par Flore Mabilleau 160 Le réseau TER Centre couvre 160 gares, 18 Le nombre de diplômes en sanitaire et 25 % du budget régional est consacré à dont 90 rénovées. Les nouveaux trains social ouverts à la voie directe, avec l’éducation et à la formation, autant Rémi Centre ont été mis en place ce un total de 59 formations diplômantes pour les rénovations et constructions printemps pour remplacer, d’ici à fin dispensées et réparties sur le territoire de bâtiments que pour la mise en place 2022, tous les Corail. régional. d’actions éducatives. 8 I MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62
l’enquête Dans les zones rurales, guichet unique public Impôts, Pôle emploi ou encore allocations familiales : les maisons France Services proposent des relais de service public dans dix-neuf lieux du département, dont Bléré. E n ce moment, j’aide beaucoup de personnes ces guichets polyvalents – dix-neuf à ce jour dans leurs déclarations d’impôts, observe dans le département – regroupent, sur leurs Nathalie Bessé, agent d’accueil France Ser- sites, plusieurs administrations, dans l’objectif vices, dans son bureau de la communauté de de « proposer une offre élargie de services au communes Bléré-Val de Cher. En temps normal, public, au plus près des territoires, en particulier cette professionnelle polyvalente « accompagne dans les zones rurales », explique le gouverne- aussi des habitants pour leur carte grise, les pré- ment. « L’État s’est désengagé de nos territoires et demandes de carte d’identité, des actualisations s’est dit qu’en même temps, il ne fallait pas perdre Pôle emploi, des déclarations d’allocation d’adulte le lien avec l’usager », ironise le président de la handicapé, de prime d’activité, etc. ». Bref, des communauté de communes Vincent Louault. dizaines de démarches administratives. Ces guichets labellisés sont portés majoritai- La communauté aux quinze communes et vingt- rement par des collectivités, mais aussi par des deux mille habitants (1), attirant chaque année de associations ou des bureaux de poste, contre une nouveaux venus, a lancé, en 2019, sa maison de subvention de 30.000 € par an. « Nous jouons le services au public (MSAP), tout juste estampil- jeu, car notre objectif est de satisfaire nos usa- lée France Services par l’État. Un label assurant gers et de répondre au maximum à leurs besoins, que ce guichet, ainsi que son antenne du centre martèle Vincent Louault. Mais une partie de ces socioculturel, propose un socle minimum de ser- services restent à notre charge et sont donc payés vices auprès de neuf partenaires (Caisse d’allo- par nos impôts. » cations familiales, Assurance maladie, Vieillesse, En 2020, mille cinq cents personnes se sont La Poste, etc.) auxquels s’en ajoutent d’autres. déplacées auprès des guichets de Bléré, malgré « Certains services administratifs pré-existaient, la crise sanitaire. Pour compléter ce dispositif, mais ont été rassemblés sous un seul chapeau », deux conseillers numériques auront bientôt détaille la vice-présidente Annie Bechon. Des pour mission de former à l’utilisation de services postes informatiques sont à disposition et des dématérialisés. Contre une subvention de l’État permanences assurées par le Trésor public, la de 100.000 € sur deux ans. Mission locale ou encore le Planning familial. F. M. La maison France Services de Bléré a vu passer mille cinq cents Déployés depuis janvier 2020 dans l’Hexagone, (1) Chiffres Insee. personnes l’an dernier. (Photo Flore Mabilleau) L’épicerie de vrac décolle à Langeais Avec Graines de Loire, Cécile Hérisson a lancé, en 2018, une épicerie de produits biologiques, régionaux et de vrac, qui séduit de plus en plus de clients. D es convictions écologistes, une solide fournies par près d’une soixantaine de produc- étude de marché, l’envie de changer de teurs et de quelques grossistes. « Localement, il vie et l’aide d’un financement participa- manquait une alternative entre l’Amap et le super- tif : ces quatre moteurs ont mis en orbite Cécile marché ! », analyse Cécile Hérisson. L’épicerie, Hérisson, à Langeais, en novembre 2018, avec son sans chambre froide ni bananes – pour consom- projet Graines de Loire. La vie professionnelle mer « local et de saison » – a cependant perdu, de cette quadragénaire, ancienne interprète en avec la crise sanitaire, son restaurant. langue des signes, est entrée dans une nouvelle Pour poursuivre ses investissements et s’agran- dimension, celle d’une épicerie de produits bio- dir, Graines de Loire a fait appel à une subven- logiques et régionaux – le plus possible – propo- tion de la communauté de communes Touraine sant également du « vrac » depuis quelques mois. Ouest Val Loire, dans le cadre du plan local de Le but de ce déménagement à une vingtaine relance économique, au prêt garanti par l’État ou de kilomètres de Tours : « Vivre avec moins, encore au prêt du fonds régional Renaissance. mais avoir davantage de temps, notamment avec « J’ai augmenté mes dettes, mais je suis en capacité mes trois enfants », confie celle qui a quitté de les rembourser », analyse Cécile Hérisson. Son Saint-Pierre-des-Corps pour le village de Saint- chiffre d’affaires a d’ailleurs décollé. « L’épicerie Patrice, il y a sept ans, avec sa famille. fonctionne bien, surtout depuis le lancement du L’atterrissage dans la zone commerciale, à côté vrac. Pour notre deuxième année pleine, nous de Carrefour et de Mr Bricolage, face à la station avons atteint les objectifs de la quatrième année. service, n’était pas l’option la plus bucolique. Il y a beaucoup de nouveaux arrivants qui consom- Mais la pompe à essence, passage obligé des maient déjà bio et en vrac, et qui retrouvent ici habitants des zones rurales, génère du trafic, les mêmes services que dans un centre-ville », sans compter que le local, aménagé du sol au explique celle qui a fait, avec sa famille, le choix plafond par la locataire des lieux et son mari, « de la décroissance et de l’autonomie alimen- permet de voir grand. En tout, une centaine de taire ». mètres carrés pour plus de 2.500 références (en L’épicerie vrac de Cécile Hérisson trouve sa place à Langeais. (Photo Flore Mabilleau) dehors des livres de la toute nouvelle librairie) F. M. MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62 I 9
« Il faut avoir l’art de magnifier les contextes ordinaires, Caroline sait très bien le faire. » bio express 1969 : naissance à Aix-en-Provence 1992 : master LEA (anglais-espagnol) 2013 : CAP photographie 2016 : BTS photographie 2016 : ouverture de son atelier- galerie, place de la Résistance, (Photo Jean-Christophe Louis) à Tours. 2021 : médaille d’or aux Médailles de la photographie professionnelle française 2020 (janvier). 1er prix du concours international Art4competition (avril). 12 I MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62
la femme du mois Caroline Gasch « Le monde est beau et j’ai envie de le montrer » Par Juliette Lécureuil C ’est à 14 ans, lorsque sa grand-mère lui offre son pas forcément comme tels aux yeux d’un observateur premier appareil, que Caroline Gasch découvre lambda. Elle cite en exemple un shooting passé en com- sa vocation : elle sera photographe. « La décou- pagnie d’égoutiers sur leur lieu de travail, a priori peu verte m’a transpercée », se souvient celle qui, l’œil flatteur… Et dont elle est très fière du rendu : « J’aime aimanté par le viseur, capture les scènes et les visages mettre en lumière ces métiers, valoriser l’humain dans ses du quotidien. Elle explore le monde derrière son objec- gestes et son expression. » tif, s’essaye à dompter la lumière, au cadrage et à la Des gens qu’elle aime rencontrer à travers l’objec- mise au point. Au cours de ses années lycée, elle se tif, en tant que photographe d’entreprise, mais aussi rêve étudiante à Arles, où se trouve l’École nationale portraitiste, puisque sa galerie tourangelle fait office supérieure de la photographie (ENSP Arles). Mais ses de studio. Dans cet espace, elle travaille à « révéler la parents s’opposent au projet : les professions artistiques beauté » de ses clients, exercice qui lui apporte beau- sont encore marginales, ils l’orientent donc vers un cur- coup tant il nécessite d’être à l’écoute et bienveillant. sus plus classique. De ses études d’espagnol, de son oral « La plupart des gens n’aiment pas être pris en photo, de titularisation – au cours duquel elle se rend compte il faut les guider », explique Caroline Gasch, pour qui qu’elle ne veut pas devenir professeur de langues –, de seuls le dialogue et le temps permettent à une personne ses années d’assistanat de direction, elle rapporte une chose : l’envie omniprésente de se consacrer entière- rendue nerveuse par l’appareil de retrouver son naturel. Elle aime le portrait en studio parce qu’il lui permet de Trouver ment à la photographie. C’est après un gros pépin de santé – de ceux qui font mesurer la chance que l’on jouer avec l’ombre et la lumière, de mettre en valeur les formes… « C’est très classique, mais c’est ainsi que les bons angles a d’être en vie – qu’elle saute le pas, passe son CAP j’ai appris à capturer l’intimité des gens. » C’est à travers son travail artistique que photographie et crée son entreprise. « J’avais le droit à Si une partie de son activité est en pause en raison des Victor Viot, architecte associé au sein une seconde vie, je devais absolument en profiter », jus- mesures sanitaires prises pour lutter contre l’épidémie de l’atelier RVL, a découvert Caroline tifie-t-elle. On est en 2009 et elle réalise enfin son rêve de Covid-19, elle continue d’exercer en extérieur. « J’ai Gasch. « J’ai été bluffé par son choix d’adolescente : vivre – pour partie, puisqu’elle conserve, également profité d’avoir un peu de temps libre pour par- de points de vue », se souvient celui à ses débuts, une activité salariée – de son art. ticiper à des concours photo », raconte-t-elle, citant les qui, après avoir visité sa galerie, lui Médailles de la photographie professionnelle française propose de collaborer. « Les bâtiments que l’on crée doivent être fonctionnels, où elle a reçu une médaille d’or, et le concours inter- mais aussi susciter une émotion… C’est national Art4competition 2021, dont elle a remporté cette émotion que la photographie doit le 1er prix dans la catégorie Asbtract Art. Des récom- Profession photographe penses qui lui ont valu la couverture et un portfolio représenter », explique l’architecte, qui a très vite fait confiance à Caroline dans le magazine Profession Photographe, mais aussi des dans sa seconde vie Gasch, parce qu’elle savait justement contacts avec plusieurs galeristes souhaitant l’exposer. saisir l’essence de ses réalisations Pendant les confinements, elle s’est également consa- et les retranscrire sous forme de crée à la communication autour de son activité, à travers compositions graphiques. Trouver les Très vite, elle prend goût aux paysages urbains, de la la mise en ligne d’un nouveau site internet – « Mieux bons cadrages, les bons points de vue, skyline de New York aux rues colorées de Hong Kong. référencé par les moteurs de recherche », précise-t-elle – les bons angles, être là à la bonne heure – parfois à plusieurs heures… Mais aussi « J’aime beaucoup les couleurs et la géométrie des villes », et une communication accrue sur les réseaux sociaux. savoir s’accommoder de la trivialité. confie-t-elle, ajoutant qu’elle trouve une grande partie Elle prospecte notamment sur LinkedIn, repérant et « On conçoit des bâtiments qui de son inspiration dans le voyage. Elle produit égale- contactant les entreprises dont l’identité lui plaît. s’érigent dans des contextes ordinaires, ment des clichés d’entreprise, notamment pour l’in- Et le goût de photographier dans tout ça, toujours au il faut arriver à les magnifier et Caroline dustrie, le génie civil, les énergies renouvelables, l’ar- rendez-vous ? « La photographie, c’est ma vie… Je n’ai sait très bien le faire. Certaines photos chitecture ou encore l’immobilier. L’objectif ? Rendre jamais l’impression de travailler », nous rassure-t-elle sont absolument canons ! », conclut esthétiques des objets et des sujets qui n’apparaissent pour conclure. l Victor Viot. MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62 I 13
le dossier (Photo Pierre Bonnet) Expérimenter pour innover en Castelrenaudais Au nord-est de la Touraine, la communauté de communes du Castelrenaudais forme un territoire rural, très dynamique, qui oscille entre industrie de pointe, agriculture et développement touristique. P lus petit territoire intercommunal de Touraine (353,06 km2), le Cas- Les entreprises du territoire, quel que soit leur domaine d’activité, se telrenaudais dispose d’un très important centre de recherche en bio- sont organisées en réseau, au sein de l’Association des industriels du technologies, d’une zone d’activité plébiscitée, à Autrèche, en bordure Castelrenaudais (AICR 37). « On travaille en meute avec Amboise, Bléré, d’A10 et possède une longue tradition industrielle, aujourd’hui déployée Montlouis et Vouvray, pour l’attractivité du grand est tourangeau, y com- dans de nombreux domaines, lance Jérôme Vaugoyeau, directeur du pris à l’international, avec Business France », ajoute Jérôme Vaugoyeau. pôle Aménagement et développement territorial de la communauté de Avec l’Union commerciale et artisanale castelrenaudaise (UCAC), les communes. commerces locaux se sont dynamisés, avec différentes animations col- Château-Renault, l’ancienne Cité du cuir, a fait sa réputation, dès le lectives. « En 2008, on a mis en place une aide aux investissements pour 19e siècle, grâce à seize tanneries spécialisées dans le cuir à semelles… les petites entreprises artisanales et commerciales, Renaudais Création De cet héritage, il ne reste rien d’autre qu’une paire d’entreprises de Développement. En douze ans ce sont près de cent cinquante projets qui cordonnerie : Boinet (ceintures de luxe) et Arche (chaussures), et ce ont été soutenus », précise Fabien Houzé. Avec la crise du Covid-19, une chiffre seize, pour le nombre de communes qui forment la communauté aide « coup de poing » a été ouverte pour contribuer à la trésorerie des de communes du Castelrenaudais. établissements fermés administrativement. « Car ces commerces sont Idéalement placé, entre Saint-Pierre-des-Corps et Vendôme, le territoire essentiels à l’animation des centres-villes. » met Paris à moins d’une heure de TGV. Six zones d’activité regroupent Le 22 mai, la Maison du tourisme du Castelrenaudais va ouvrir ses une grosse centaine d’entreprises, sur une surface cumulée d’environ portes, dans les anciennes tanneries. « On veut proposer un tourisme 130 ha. L’attractivité est indéniable. « Il n’y a pas vocation à privilégier alternatif, avec 400 km d’itinéraires de randonnée. On veut lancer la notion un secteur particulier, même si l’INRAE à Nouzilly constitue l’un des plus de “ 3e jour ”… Le premier jour, on visite un château, le second jour un lieu prestigieux pôles de biotechnologies au monde. D’ailleurs, il figure sur culturel et le troisième jour, on vient se balader en Castelrenaudais. » le podium 2020 des centres de recherche, au classement de Shanghai », Une exposition permanente Lego va ouvrir ses portes. Il y a la volonté précise Fabien Houzé, vice-président Stratégie développement écono- d’expérimenter pour se développer. mique, tourisme et commerce. Pierre Bonnet 5.265 Le nombre des emplois salariés 388 Le nombre d’entreprises 47,4 Le nombre d’habitants au km2, sur et non salariés sur le territoire de et d’établissements publics implantés l’ensemble du territoire. Avec une la communauté de communes du sur le territoire. Cela représente superficie de 3,51 km2, pour 4.944 Castelrenaudais. 3.682 emplois. habitants, la commune de Château- Renault compte 1.409 habitants au km2. 14 I MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62
le dossier Mecatig Vattier : de la tôle à la pose Mecatig Vattier est une entreprise à part. Spécialisée dans la fabrication et la pose de pots d’échappement pour motos anciennes, elle s’est diversifiée dans les voitures, les avions et les hélicoptères. L es amateurs de belles motos sont una- venues des ateliers Sapim Inox à Migennes nimes : en matière de pot d’échappement, (Yonne) ou de ceux d’Hoorman-Prolians, à il n’y a pas mieux que les flûtes Vattier ! Saint-Pierre-des-Corps. Mecatig Vattier tra- Appelées ainsi en raison de la sonorité caracté- vaille d’abord pour la moto de route (80 % du ristique qu’elles délivrent à l’accélération, ces chiffre d’affaires), mais les voitures anciennes véritables œuvres d’art nécessitent un très haut représentent désormais près de 20 % de l’acti- degré de compétences techniques et artistiques. vité. En marge, des collectionneurs ont même Elles sont entièrement faites à la main, sous la fait réaliser des échappements pour avion ou direction d’Antony Fefeu, un chaudronnier venu pour hélicoptère. « On travaille surtout sur des de l’aéronautique. Natif de Joué-lès-Tours, il a motos des années 1960, 1970 et 1980, notamment longtemps travaillé en sous-traitance pour la sur des BMW. Kawasaki France nous a également Snecma, où il dirigeait un atelier de soudure en demandé de développer un kit pour les Z 900 RS. tubulure de réacteurs d’avions. C’est par pas- On en a l’exclusivité dans l’Hexagone. » sion, autant que par savoir-faire, qu’il s’est lancé Il s’agit d’un marché de niche tourné à 50 % vers en Nord-Touraine dans la fabrication de pots une clientèle de particuliers. « Mais ce sont aussi d’échappement. des concessionnaires, des clubs ou des collection- À l’origine, la fabrication était située à Cer- neurs venus de toute la France, d’Allemagne, de gy-Pontoise (Val-d’Oise). « En 2006, les diri- Suisse, du Benelux, de Suède, d’Espagne ou, plus geants partaient à la retraite. J’ai eu l’opportunité surprenant, d’Afrique. » de reprendre la marque, le matériel et les homolo- Dotée du statut de SARL en nom propre, Mecatig gations », explique Antony Fefeu. « J’ai ainsi pu Vattier fonctionne, depuis les années 2000, de développer la société, en Touraine. D’abord dans manière originale, grâce aux compétences d’un un local au Moulin de Launay, puis ici, au Parc – même – duo d’entrepreneurs. « Le souci n’est des Portes de Touraine, à Autrèche… Désormais, pas de donner du travail, mais de le confier à des je suis propriétaire. » personnes qualifiées, qui ont le souci perfection- De la tôle à la pose, en passant par le pliage, la niste du détail. Je les ai trouvées. » soudure ou le polissage, tout est fait à la main, Antony Fefeu est fier de présenter la fameuse flûte Vattier, produit sur place, exclusivement à partir de tôles d’inox P. B. de référence des passionnés de belles motos. (Photo Pierre Bonnet). La maîtrise technologique des sols imprimés Le site Forbo Flooring Systems de Château-Renault fabrique des revêtements de sol depuis 1962. L’unité tourangelle est spécialisée dans l’impression digitale du Flotex. L e groupe suisse Forbo, né en 1928, se divise spécialisés, poseurs ou architectes) qui amé- en deux branches : Forbo Flooring Systems nagent des bureaux, des boutiques, des hôtels, (revêtements de sol, colles et outils de pose) des lieux de loisirs, des résidences-services…, et Forbo Movement Systems (courroies, bandes sur des projets de toutes tailles. de transports…). Le site de Château-Renault, « Flotex est un produit de prescription. Il faut qui compte près de trente-cinq collaborateurs trouver des marchés et “ gagner sa commande ”. (Forbo recense plus de cinq mille salariés), s’est On n’est pas sur l’idée d’une vente directe. » Forbo spécialisé dès 2007 dans l’impression digitale du dispose d’une importante équipe commerciale, revêtement de sol Flotex. Il a intégré le groupe qui n’est pas liée au produit, mais qui officie Forbo en 2009. par secteur géographique. Environ 30 % des « Le Flotex, c’est une base PVC sur laquelle ventes du site de Château-Renault concernent est apposé un flocage électrostatique de fibres la France. « Grâce à l’offre de service de person- de polyamide. Il combine le confort du textile avec nalisation Flotex Lab, un échantillon test peut les qualités d’hygiène et d’acoustique d’un sol PVC. être fait en deux jours pour que, après validation, De plus, il laisse place à la créativité », explique l’impression soit lancée sous cinq jours. Sur les Benoît Millon, directeur du site castelrenaudais collections, le flux est plus traditionnel. » depuis le 12 mai 2020. « Il arrive, brut, de notre La crise du Covid-19 a eu d’autant plus d’im- usine de Ripley (Grande-Bretagne), sous forme pact que l’entreprise travaille beaucoup avec le de bobines. Les encres et les produits relatifs au bâtiment, l’hôtellerie ou les loisirs, des secteurs traitement digital proviennent de fournisseurs eux-mêmes très touchés. « Le site a été fermé extérieurs. Ici, on travaille à la commande, à partir au printemps 2020. Outre le chômage partiel et de collections référencées, de collections créées le télétravail, le protocole sanitaire strict et l’en- par des designers réputés (Sottsass, Reich, Starck) gagement collectif ont été déterminants. » Aussi, ou de demandes clients. Tout est possible, que ce en septembre dernier, la situation est presque Benoît Millon, le directeur du site Forbo de Château-Renault. soit en lés, en dalles ou en lames. » Les clients sont redevenue normale. (Photo Pierre Bonnet) exclusivement des professionnels (distributeurs P. B. MAI 2021 I 37 I CAP’ÉCO # 62 I 15
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