Christian Gerhaher Gerold Huber - SALLE DES CONCERTS - CITÉ DE LA MUSIQUE Ve ndr e di 25 j uin 2021 - 20h00 - Philharmonie de Paris

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SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE L A MUSIQUE

        Ve ndr e di 25 j uin 2021 – 20h 00

Christian Gerhaher
  Gerold Huber
Programme
Robert Schumann
Sechs Gesänge op. 107

Claude Debussy
Trois Chansons de France

Robert Schumann
Lieder und Gesänge op. 98a
Drei Gedichte aus den Waldliedern op. 119
Vier Husarenlieder op. 117
Sechs Gesänge op. 89

Claude Debussy
Trois Poèmes de Mallarmé

Robert Schumann
Lieder und Gesänge op. 83

Christian Gerhaher, baryton
Gerold Huber, piano

F I N D U C O N C E R T ( S A N S E N T R A C T E ) V E R S 21H 2 0 .

Livret : page 14.
Les œuvres
 Robert Schumann                                                   (1810-1856)

    Sechs Gesänge op. 107

    I. Herzeleid [Peine du cœur], texte de Titus Ullrich
    II. Die Fensterscheibe [La Vitre], texte de Titus Ullrich
    III. Der Gärtner [Le Jardinier], texte de Eduard Mörike
    IV. Die Spinnerin [La Fileuse de laine], texte de Paul Heyse
    V. Im Wald [Dans la forêt], texte de Wolfgang Müller von Königswinter
    VI. Abendlied [Chant du soir], texte de Gottfried Kinkel

    Composition : 1851-1852.
    Durée : environ 10 minutes.

Claude Debussy                                            (1862-1918)

    Trois Chansons de France

    I. Rondel I. Le temps a laissé son manteau, texte de Charles d’Orléans
    II. La Grotte. Auprès de cette grotte sombre, texte de François Tristan L’Hermite
    III. Rondel II. Pour ce que Plaisance est morte, texte de Charles d’Orléans

    Composition : 1904.
    Création : le 15 mai 1905, au Théâtre des Mathurins, Paris, par Camille
    Fourrier (voix) et Auguste Delacroix (piano).
    Durée : environ 7 minutes.

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Robert Schumann
 Lieder und Gesänge aus Wilhelm Meister op. 98a

 IV. Wer nie sein Brot mit Tränen ass [Celui qui n’a jamais souffert de la faim]
 VI. Wer sich der Einsamkeit ergibt [Celui qui s’éprend de solitude]
 VIII. An die Türen will ich schleichen [J’irai de porte en porte]

 Textes : Johann Wolfgang von Goethe.
 Composition : 1849.
 Durée : environ 30 minutes.
 Durée des extraits : environ 11 minutes.

 Drei Gedichte aus den Waldliedern op. 119

 I. Die Hütte [Le Refuge]
 II. Warnung [Prends garde]
 III. Der Bräutigam und die Birke [Le Futur Marié et le bouleau]

 Textes : Gustav Pfarrius.
 Composition : 1851.
 Durée : environ 9 minutes.

 Vier Husarenlieder op. 117

 I. Der Husar, trara! [Pour le hussard, trara !]
 II. Der leidige Frieden [Fâcheuse Paix]
 III. Den grünen Zeigern [Branches vertes]
 IV. Da liegt der Feinde gestreckte Schar [Ils gisent là les soldats ennemis]

 Textes : Nikolaus Lenau.
 Composition : 1851.
 Durée : environ 8 minutes.

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Sechs Gesänge op. 89

    I. Es stürmet am Abendhimmel [Tempête au crépuscule]
    II. Heimliches Verschwinden [Discrète disparition]
    III. Herbstlied [Chant d’automne]
    IV. Abschied vom Walde [Adieu à la forêt]
    V. Ins Freie [En quête de liberté]
    VI. Röselein, Röselein! [Petite Rose, petite rose !]

    Textes : Wilfried von der Neun.
    Composition : 1850.
    Durée : environ 12 minutes.

Claude Debussy
    Trois Poèmes de Mallarmé

    I. Soupir
    II. Placet futile
    III. Éventail

    Textes : Stéphane Mallarmé.
    Composition : 1913.
    Durée : environ 9 minutes.

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Robert Schumann
      Lieder und Gesänge op. 83

      I. Resignation [Résignation], texte de Julius Buddeus
      II. Die Blume der Ergebung [La Fleur de l’abandon], texte de Friedrich Rückert
      III. Der Einsiedler [Le Solitaire], texte de Joseph von Eichendorff

      Composition : 1850.
      Durée : environ 10 minutes.

Terrible prémonition : c’est hanté par l’idée de finir interné à l’asile d’Endenich, près
de Düsseldorf, que Schumann consent, en 1850, à devenir Generalmusikdirektor de la
capitale rhénane. Pour ne rien arranger, il lui faut avaler le fait de ne pas avoir été choisi
pour succéder à Wagner comme Kapellmeister de la cour de Dresde.

Mais il semble que l’Opus 83 aille déjà vers l’acceptation. Ainsi Resignation, pré-trista-
nesque dans l’harmonie comme dans le message : « Amour sans espoir ? / Oui, mais
sans désolation. […] Nous nous retrouverons dans l’au-delà ! ». Un certain chromatisme
colore encore Die Blume der Ergebung, retour à Friedrich Rückert dont le motif mi-si-mi
(en allemand, E-h-e [mariage]) entendu dès l’entame lie la pièce aux lieder composés en
1840 dans l’attente de pouvoir épouser Clara contre l’avis du père Wieck (« Et attends
immobile / L’instant chéri / Où tu viendras à moi. », chante-t-on ici). En guise d’adieu à
Joseph von Eichendorff, le narrateur de Der Einsiedler guette la nuit, qui le consolera du
monde – si le jour « troublait » le poète, il « épuise » le musicien. Strophique, la forme
reflète un désir de simplicité.

Le choix des rimes des Sechs Gesänge op. 89 étonne. À tel point que les commentateurs
n’en reviennent toujours pas : comment Schumann, si fin lettré, put-il s’enticher des textes
si maladroits du théologien Wilhelm Schöpff (alias Wilfried von der Neun) ? Mystère,
mais peu importe : le cycle, bigarré, lui permet d’expérimenter, éventuellement dans le
sillage de Wagner. Sombre miniature où le piano, presque orchestral, donne son élan au
drame, Es stürmet am Abendhimmel (no 1) cale ainsi son chant au plus près des rythmes

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et inflexions de la parole. Quel contraste avec le relatif dépouillement de Herbslied (no 3),
où les motifs du clavier semblent tirer vers la tombe celui qui célèbre le réconfort de la
nature à l’automne de sa vie ! Ins Freie (no 5) se ressaisit et bombe le torse : les chants
qui battent dans le cœur du narrateur le sauveront de l’oppression du monde.

Une certaine retenue imprègne les morceaux extraits de l’Opus 98a, sur Les Années
d’apprentissage de Wilhelm Meister de Goethe. Par la bouche du harpiste, Wer nie
sein Brot mit Tränen ass (no 4) chante néanmoins le délaissement de manière à terrifier
sur la deuxième strophe : « Elles ont nos vies en main […] Puis nous abandonnent à nos
peines ». Après Wer sich der Einsamkeit ergibt (no 6), mise en abîme de la claustration
intérieure du compositeur, An die Türen will ich schleichen (no 8) évoque l’errance à la
manière du Joueur de vielle du Voyage d’hiver – comprenez : en ressassant un glaçant
motif posé sur une pédale. Difficile d’imaginer détresse plus pudique.

Avec son filigrane de rythmes pointés (Herzeleid, Die Fensterscheibe, Im Wald, Abendlied),
la mélancolie des Sechs Gesänge op. 107 touche jusqu’au rouet de Die Spinnerin, fileuse
qui semble avoir connu Schubert (Gretchen am Spinnrade). Même Der Gärtner, page
la plus extravertie du cycle, reste somme toute dans son monde intérieur : n’osant pas
aborder la « plus belle des princesses » qui chevauche devant lui, le jardinier d’Eduard
Mörike ne s’adresse qu’à « sa coiffe rose ».

Sur des strophes de Nikolaus Lenau, les Vier Husarenlieder changent radicalement de ton.
La vie de soldat ? Les tavernes et les femmes (Der Husar, trara). Et le champ de bataille,
le sang, la mort – fût-ce celle de l’ennemi (Da liegt der Feinde gestreckte Schar). Tout cela
sans aucune virtuosité vocale ou pianistique particulière, mais avec une amertume mêlée
d’angoisse, si ce n’est hébétée (Der leidige Frieden). La chair à canon du Wunderhorn
de Mahler ne chantera pas autre chose.

Retour au vert avec Gustav Pfarrius qui, après avoir suscité plusieurs Scènes de la forêt,
inspire l’Opus 119. Trois poèmes, trois styles musicaux : Die Hütte marche joyeusement
au son d’une idée empruntée au scherzo de la « Hammerklavier » de Beethoven que
Clara travaillait à l’époque, Warnung utilise l’image de la fin du jour comme métaphore

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de la mort – où la voix, attirée vers l’aigu, contredit d’emblée le piano qui nous entraîne
inexorablement dans sa chute –, Der Bräutigam und die Birke dénonce, l’air de rien, la
cruauté de l’Homme envers la nature.

      La Bonne Chanson

« Prends l’éloquence et tors-lui le cou. » Debussy aurait pu faire sienne la devise de
Verlaine, dont les vers imprègnent encore, en cette année 1904, la seconde série de Fêtes
galantes. Toujours marié à Lilly Texier, le compositeur en pince maintenant pour Emma
Bardac, amour de Fauré et artiste lyrique de son état. Il lui dédie ses Trois Chansons de
France, sur des textes tournés vers le passé. D’où, sans doute, que le premier Rondel se
teinte d’archaïsmes modaux. Très lent et très doux, La Grotte se reflète en clair-obscur sur
un motif qui tourne à l’obsession. Noble pavane, Pour ce que Plaisance est morte fait son
deuil sur un autre ostinato, vers un postlude d’une lumineuse quiétude.

Après une Apparition (1894) de jeunesse et, surtout, le Prélude à l’Après-midi d’un
faune (1912), Debussy revient à Mallarmé en même temps que son rival Ravel, qui pose
lui-même ses notes sous deux des trois textes ici retenus par Monsieur Croche – la publi-
cation de la poésie complète de l’auteur des Divagations aux Éditions de la Nouvelle
Revue Française explique sans doute cela. Coulés dans deux longues phrases (ou une
seule, selon le point de vue), les vers de Soupir se cherchent une structure musicale
dans l’harmonie – diatonique ici, plus complexe là – et s’appuient sur quelques mots
qui, mis bout à bout, semblent vouloir dire quelque chose : « Mon âme », « monte » (en
descendant !), « mélancolique », « fidèle », « vers l’azur ». Après Placet futile, gracieux
pastiche de menuet, Éventail déploie une ligne tendue de désir sur un accompagnement
presque abstrait. Vertige !

                                                                               Nicolas Derny

                                                                                          9
Les compositeurs
 Robert Schumann
Le jeune Schumann grandit au milieu des            par Mendelssohn au Gewandhaus de Leipzig)
ouvrages de la librairie de son père. Bien vite,   et de la musique de chambre (Quatuors à
il écrit drames et poèmes, découvre la musique     cordes op. 41, œuvres avec piano). En 1843,
avec les leçons de piano données par l’orga-       la création de son oratorio Le Paradis et la Péri
niste de la cathédrale et entend Moscheles et      est un succès, il prend poste au tout nouveau
Paganini en concert. À l’âge de 18 ans, il part    Conservatoire de Leipzig et refuse la direc-
étudier le droit à Leipzig. Mais il prend vite     tion de l’Allgemeine musikalische Zeitung.
conscience de son désir de devenir musicien.       Mais, souffrant depuis longtemps d’angoisses
Il commence alors les leçons de piano avec         et d’insomnies, Schumann s’enfonce dans la
Friedrich Wieck, dont la fille Clara, enfant       dépression. Il abandonne sa revue et le couple
prodige, est la meilleure vitrine. Mais un         déménage à Dresde, où il se plaît assez peu.
problème à la main anéantit ses rêves de           Des pages essentielles voient tout de même
pianiste virtuose. L’année 1831 le voit publier    le jour : le Concerto pour piano op. 54 et la
                                                                 o
ses premières compositions pour piano              Symphonie n 2. La fin de la décennie est attris-
(Variations Abegg et Papillons) et signer sa       tée par la mort de son premier fils et celle de
première critique musicale dans l’Allgemeine       Mendelssohn en 1847. Le compositeur reprend
musikalische Zeitung. En 1834, il fonde sa         son projet sur Faust (achevé en 1853) et com-
propre revue, la Neue Zeitschrift für Musik,       mence Manfred. L’installation à Düsseldorf, en
qu’il dirigera durant presque dix ans et dans      1850, où Schumann prend ses fonctions en
laquelle il fera paraître des articles essen-      tant que Generalmusikdirektor, se fait sous de
tiels sur Schubert, Berlioz ou Chopin. Il com-     bons augures. Genoveva, l’opéra tant rêvé, est
pose la Fantaisie op. 17, les Novellettes, les     un échec, mais la création de la Symphonie
Kreisleriana, le Carnaval de Vienne… Il part       rhénane, en 1851, panse la blessure. En 1853,
pour Vienne dans l’espoir de s’y établir, mais     il rencontre Brahms, tout juste âgé de 20 ans.
les déconvenues le poussent à revenir en terres    Cependant, l’état mental du compositeur empire.
leipzigoises. Il épouse Clara Wieck malgré         Il se jette dans le Rhin en février 1854, et est
l’opposition du père de la pianiste, est l’ami     interné à sa propre demande quelques jours
de Mendelssohn, et Liszt le tient en grande        plus tard à Endenich, près de Bonn. Comprenant
estime. C’est le temps des lieder (L’Amour et la   qu’il ne sortira pas de l’asile, il finit par refuser
vie d’une femme, Dichterliebe…), des œuvres        de s’alimenter et meurt le 29 juillet 1856.
                                             o
pour orchestre (création de la Symphonie n 1

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Claude Debussy
Claude Debussy entre en 1873, à l’âge de            à sa notoriété de compositeur en France et à
11 ans, au Conservatoire, où il restera jusqu’en    l’étranger, et aussi par son mariage avec la
1884. En 1879, il devient pianiste accompa-         cantatrice Emma Bardac en 1904, Debussy
gnateur de Mme von Meck, célèbre mécène             connaît enfin l’aisance financière. À partir de
russe, et parcourt durant deux étés l’Europe        1901, il exerce une activité de critique musical,
en sa compagnie. Il se familiarise ainsi avec       faisant preuve d’un exceptionnel discernement
la musique russe, rencontre Wagner à Venise         dans des textes à la fois ironiques et ouverts,
et entend Tristan à Vienne. Il obtient le prix      regroupés sous le titre de Monsieur Croche
de Rome en 1884, mais son séjour à la Villa         antidilettante et autres textes. À partir de 1908,
Médicis l’ennuie. À son retour anticipé à Paris,    il pratique occasionnellement la direction d’or-
il fréquente les cafés, noue des amitiés avec des   chestre pour diriger ses œuvres, dont il suit les
poètes, s’intéresse à l’ésotérisme et à l’occul-    représentations à travers l’Europe. Se passant
tisme. Il met en musique Verlaine, Baudelaire,      désormais plus volontiers de supports textuels,
lit Schopenhauer et admire Tristan et Parsifal de   il se tourne vers la composition pour le piano
Wagner. Soucieux de sa liberté, il se tiendra       et pour l’orchestre : pour le piano, Estampes
toujours à l’écart des institutions et gardera      (1903), les deux cahiers d’Images (1905 et
ses distances avec le milieu musical. En 1890,      1907), les deux cahiers de Préludes (1910 et
il rencontre Mallarmé, qui lui demande une          1912) ; pour l’orchestre, La Mer (1905), Images
musique de scène pour son poème L’Après-midi        pour orchestre (1912). Après Le Martyre de
d’un faune. De ce projet qui n’aboutira pas         saint Sébastien (1911), la dernière période,
demeure le fameux Prélude, chef-d’œuvre qui,        assombrie par la guerre et une grave maladie,
par sa liberté et sa nouveauté, inaugure la         ouvre cependant de nouvelles perspectives,
              e
musique du xx siècle et trouve un prolongement      vers un langage musical plus abstrait avec Jeux
dans les trois Nocturnes pour orchestre. En         (1913) et Études pour piano (1915), ou vers un
1893, Debussy assiste à une représentation de       classicisme français renouvelé dans les Sonates
Pelléas et Mélisande, qu’il mettra en musique       (1915-1917). Debussy meurt le 25 mars 1918.
avec l’accord de l’auteur, Maeterlinck. Grâce

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Les interprètes
 Christian Gerhaher
 Christian Gerhaher est professeur honoraire à          Concertgebouw d’Amsterdam et les Berliner
 la Hochschule für Musik de Munich et dirige            Philharmoniker​, dont il a été le premier chan-
 des master-classes à travers le monde. Déjà            teur à devenir artiste en résidence, ainsi que
 récipiendaire de l’ordre Maximilien de Bavière         l’Orchestre symphonique de la Radio suédoise
 pour la Science et l’Art, et du titre de Bayerischer   et l’Orchestre symphonique de la Radio
 Kammersänger, il reçoit en 2016 le prix du             bavaroise. Avec cet orchestre et sous la direction
 Printemps de Heidelberg pour sa contribution           de Daniel Harding, Christian Gerhaher enregistre
 à l’interprétation de la musique classique. Il est     son premier disque d’airs d’opéra consacré à la
 artiste exclusif chez Sony Music. Parallèlement        musique romantique allemande, pour lequel il
 à ses nombreux concerts et récitals, il est éga-       reçoit le prix international Opera en 2013. En
 lement très apprécié sur la scène de l’opéra.          raison de la pandémie de covid-19, la tenue de
 Il a reçu de prestigieuses distinctions dans ce        nombre de concerts dépend encore des déci-
 domaine, dont le prix Laurence Olivier et le prix      sions sanitaires. En 2020, certains rendez-vous
 Der Faust. Des collaborations avec des chefs           ont pu être maintenus, le plus souvent enregis-
 tels que Simon Rattle, Daniel Harding, Herbert         trés puis diffusés (par exemple, les Monday
 Blomstedt, Bernard Haitink, Christian Thielemann,      Concerts du Bayerische Staatsoper) ou, parfois, à
 Kirill Petrenko, Nikolaus Harnoncourt, Pierre          jauge réduite (le MDR Musikommer ou le Festival
 Boulez, Daniel Barenboim, Andris Nelsons, Kent         d’Aix-en-Provence). Outre ce récital donné à
 Nagano et Mariss Jansons l’ont emmené dans             la Philharmonie de Paris, le public retrouvera
 les plus grandes salles de concert du monde.           Christian Gerhaher, en juillet dans le cadre du
 Parmi les orchestres avec lesquels Christian           Festival de Munich, dans le rôle de Wolfram
 Gerhaher travaille le plus fréquemment figurent        (Tannhäuser) et dans un récital Schubert avec
 le London Symphony Orchestra, l’Orchestre du           Gerold Huber.

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Gerold Huber
Titulaire d’une bourse pour étudier le piano          Erdmann, Michael Nagy, Maximilian Schmitt
auprès de Friedemann Berger à la Hochschule           et Franz-Josef Selig. Il est aussi le pianiste de
für Musik und Theater de Munich, Gerold Huber         l’ensemble vocal Liedertafel. Il se produit en
a également bénéficié des enseignements sur le        musique de chambre avec le Quatuor Artemis
lied de Dietrich Fischer-Dieskau en master-class      et le Quatuor Henschel ainsi qu’avec le trompet-
à Berlin. En 1998, il a reçu le prix Pro Musicis      tiste Reinhold Friedrich. Dans ses programmes
à Paris avec le baryton Christian Gerhaher, son       en soliste, Gerold Huber met à l’honneur Bach,
fidèle complice depuis leurs années d’étude,          Beethoven, Brahms et Schubert. On a pu l’ap-
et a été primé en 2001 lors du Concours inter-        plaudir en récital au festival Kultursommer ou
national de piano Johann Sebastian Bach de            encore au New Zealand Festival de Wellington.
Sarrebruck. En tant qu’accompagnateur, il est         Sa discographie comprend des albums de
régulièrement accueilli dans des festivals tels que   lieder avec, entre autres artistes, Bernarda Fink
les Schubertiades de Schwarzenberg, les festivals     (Schubert, Harmonia Mundi), Ruth Ziesak (Liszt,
de Schwetzingen et de Rheingau, ou dans de            Berlin Classics ; Mendelssohn, AVI), Christina
prestigieuses salles : Philharmonie de Cologne,       Landshamer (Schumann et Ullmann, Oehms
Alte Oper Francfort, Konzerthaus et Musikverein       Classics) et Franz-Josef Selig (Schubert, Strauss
de Vienne, Concertgebouw d’Amsterdam,                 et Wolf, AVI). Gerold Huber partage son savoir
Wigmore Hall, Lincoln Center, Carnegie Hall,          lors de fréquentes master-classes. Depuis 2013,
musée d’Orsay, etc. Gerold Huber collabore avec       il enseigne l’accompagnement du lied à la
nombre de chanteurs parmi lesquels Christiane         Hochschule für Musik de Wurtzbourg.
Karg, Christina Landshamer, Ruth Ziesak, Mojca
Livret
        Robert Schumann
        Sechs Gesänge op. 107

        I. Herzeleid                                  I. Peine du cœur

 Die Weiden lassen matt die                     Les saules languissants laissent choir
     [Zweige hangen,                                 [leurs branches,
 Und traurig ziehn die Wasser hin:              Et l’eau se traîne tristement :
 Sie schaute starr hinab mit                    Elle regarde fixement vers le bas,
     [bleichen Wangen,
 Die unglückselge Träumerin.                    Les joues exsangues, la rêveuse infortunée.

 Und ihr entfiel ein Strauss von Immortellen,   Un bouquet d’immortelles lui a échappé,
 Er war so schwer von Tränen ja,                Si lourd il était déjà de larmes,
 Und leise warnend lispelten die Wellen:        Et dans un murmure les vagues avisaient :
 Ophelia, Ophelia!                              Ophélie, Ophélie !

 Texte : Titus Ulrich

        II. Die Fensterscheibe                        II. La Vitre
 Die Fenster klär’ ich zum Feiertag,            Pour le jour de fête, je lave ma fenêtre,

                                                                                              E.S. n°1-1083294, E.S. n°1-1041550, n°2-1041546, n°3-1041547 – Imprimeur : BAF
 Daß sich die Sonn’ drin spiegeln mag,          Afin que le soleil vienne s’y refléter,
 Und klär’ und denke gar mancherlei.            Et tout en lavant, ma pensée vagabonde.
 Da geht er stolz vorbei!                       Le voilà alors qui passe, la tête haute !

 So sehr muss ich da erschrocken sein,          Cela me trouble tant et si bien,
 Daß ich gleich brach in die                    Que d’un coup je casse les vitres,
     [Scheiben hinein,
 Und gleich auch kam das Blut gerannt           Et que le sang coule
 Rot über meine Hand.                           Rouge sur ma main.

 14
Livret
Und mag sie auch bluten, meine Hand,        Ma main peut bien saigner
Und mag mich auch schmerzen der             Et me faire mal le méchant feu.
    [böse Brand,
Hast einen Blick doch herauf geschickt,     Tu as jeté vers moi un regard,
Als laut das Glas geknickt.                 Lorsqu’avec fracas la vitre s’est cassée.

Und in die Augen dir hab’ ich gesehn;       Et je t’ai alors regardé dans les yeux ;
Ach Gott, wie lang ist es nicht geschehn!   Ah Dieu, depuis le temps que ce n’était
                                                 [arrivé !
Hast mich ja nicht einmal angeblickt,       Tu ne m’as pas ainsi regardée le jour
Als leis mein Herz geknickt!                Où mon cœur en silence s’est brisé !

Texte : Titus Ulrich

       III. Der Gärtner                           III. Le Jardinier
Auf ihrem Leibrösslein,                     Chevauchant son petit destrier
So weiss wie der Schnee,                    La plus belle des princesses
Die schönste Prinzessin                     Aussi blanche que neige
Reit’t durch die Allee.                     Apparaît dans l’allée.

Der Weg, den das Rösslein                   Le chemin qu’emprunte
Hintanzet so hold,                          À pas légers son cheval
Der Sand, den ich streute,                  Brille comme l’or
Er blinket wie Gold.                        Du sable que j’y ai déversé.

Du rosenfarb’s Hütlein                      Si de sa coiffe rose,
Wohl auf und wohl ab,                       Sautillant sur sa tête,
O wirf eine Feder                           S’envolait une plume
Verstohlen herab!                           Qui me soit destinée

Und willst du dagegen                       Je lui offrirais
Eine Blüte von mir,                         Une de mes fleurs,

                                                                                        15
Livret
 Nimm tausend für eine,                    Ou plutôt mille,
 Nimm alle dafür!                          Ou plutôt toutes.

 Texte : Eduard Mörike

       IV. Die Spinnerin                         IV. La Fileuse de laine
 Auf dem Dorf in den Spinnstuben           Dans les salles où l’on file la laine,
 Sind lustig die Mädchen.                  Les filles travaillent gaiement.
 Hat jedes seinen Herzbuben,               Elles sont toutes promises
 Wie flink geht das Rädchen!               Et leurs mains sont agiles.

 Spinnt jedes am Brautschatz,              Chacune s’applique à son trousseau
 Dass der Liebste sich freut.              Pour plaire au bien-aimé,
 Nicht lange, so gibt es                   Car sonneront bientôt
 Ein Hochzeitsgeläut!                      Les cloches de la noce.

 Kein’ Seel’, die mir gut ist,             Et moi qui n’ai personne
 Kommt mit mir zu plaudern;                Auprès de qui me confier,
 Gar schwül mir zu Mut ist,                Je reste seule et désespérée,
 Und die Hände zaudern.                    Et suis toute engourdie.

 Und die Tränen mir rinnen                 Je ne peux m’empêcher
 Leis übers Gesicht.                       De pleurer en silence.
 Wofür soll ich spinnen,                   Pourquoi alors
 Ich weiss es ja nicht!                    Devrais-je filer la laine ?

 Texte : Paul Heyse

       V. Im Wald                                V. Dans la forêt
 Ich zieh’ so allein in den Wald hinein!   Je déambule solitaire dans la forêt
 O sieh zwei Falter fliegen!               Deux papillons s’envolent

 16
Livret
Sie tummeln sich durch die Luft,           S’ébattent dans les airs,
Und wenn sie ruh’n, so wiegen              Puis se posent, bercés
Sie sich in der Blumen Duft,               Par le parfum des fleurs,
Und ich bin so allein, voll Pein!          Et moi, qui reste seul et affligé !

Ich zieh’ so allein in den Wald hinein!    Je déambule solitaire dans la forêt
O sieh zwei Vöglein erschrocken            Deux oiseaux importunés
Entstieben dem warmen Nest!                Quittent leur nid douillet
Doch singen und suchen und locken          Chantent, se poursuivent et s’égaient
Sie hoch sich im Geäst,                    À travers les hautes branches,
Und ich bin so allein, voll Pein!          Et moi, qui reste seul et affligé !

Ich zieh’ so allein in den Wald hinein!    Je déambule solitaire dans la forêt
O sieh zwei Rehe zieh’n                    Deux chevreuils gambadent
An der grünen Halde zumal!                 Sur le pré verdoyant
Und wie sie mich seh’n, entflieh’n         Ils s’enfuient en me voyant
Sie fern in Berg und Tal,                  Vers les montagnes et les vallées,
Und ich bin so allein, voll Pein!          Et moi, qui reste seul et affligé !

Texte : Wolfgang Müller von Königswinter

      VI. Abendlied                              VI. Chant du soir
Es ist so still geworden,                  Tout est à présent calme,
Verrauscht des Abends Weh’n;               Le vent du soir s’est tu
Nun hört man aller Orten                   Laissant partout la place
Der Engel Füsse geh’n.                     Au pas furtif des anges.

Rings in die Tiefe senket                  L’obscurité s’étend
Sich Finsterniss mit Macht;                Sans rencontrer de résistance.
Wirf ab, Herz, was dich kränket            Mon cœur, oublie ce qui te peine
Und was dir bange macht!                   Et qui t’inquiète.

                                                                                   17
Livret
 Nun steh’n im Himmelskreise             Le ciel est parsemé
 Die Stern’ in Majestät;                 D’étoiles majestueuses.
 In gleichem, festem Gleise              Dans la courbe qu’il dessine
 Der goldne Wagen geht.                  L’astre nocturne poursuit sa route.

 Und gleich den Sternen lenket           Et comme les étoiles, il guide
 Er deinen Weg durch Nacht;              Ton chemin dans la nuit.
 Wirf ab, Herz, was dich kränket         Mon cœur, oublie ce qui te peine
 Und was dir bange macht!                Et qui t’inquiète.

       Claude Debussy
       Trois Chansons de France

       I. Rondel I

 Le temps a laissié son manteau
 De vent, de froidure et de pluye,
 Et s’est vestu de broderye,
 De soleil raiant, cler et beau.

 Il n’y a beste ne oiseau
 Qui en son jargon ne chante ou crye :
 Le temps a laissié son manteau.

 Rivière, fontaine et ruisseau
 Portent, en livrée jolye,
 Goultes d’argent d’orfaverie.
 Chascun s’abille de nouveau,
 Le temps a laissié son manteau.

 Texte : Charles d’Orléans

 18
Livret
      II. La Grotte
Auprès de cette grotte sombre
Où l’on respire un air si doux,
L’onde lutte avec les cailloux,
Et la lumière avecque l’ombre.

Ces flots, lassés de l’exercice
Qu’ils ont fait dessus ce gravier,
Se reposent dans ce vivier
Où mourut autrefois Narcisse…

L’ombre de cette fleur vermeille
Et celle de ces joncs pendants
Paraissent estre là-dedans
Les songes de l’eau qui sommeille.

Texte : François Tristan L’Hermite

      III. Rondel II
Pour ce que Plaisance est morte
Ce may, suis vestu de noir ;
C’est grand pitié de véoir
Mon cœur qui s’en desconforte.

Je m’abille de la sorte
Que doy, pour faire devoir ;
Pour ce que Plaisance est morte,
Ce may, suis vestu de noir.

Le temps ces nouvelles porte
Qui ne veut déduit avoir ;
Mais par force du plouvoir

                                        19
Livret
 Fait des champs clore la porte,
 Pour ce que Plaisance est morte.

 Texte : Charles d’Orléans

       Robert Schumann
       Lieder und Gesänge op. 98a

       IV. Wer nie sein Brot                    IV. Celui qui n’a
       mit Tränen ass                           jamais souffert de
                                                la faim

 Wer nie sein Brot mit Tränen ass,        Celui qui n’a jamais souffert de la faim,
 Wer nie die kummervollen Nächte          N’a pas connu les nuits de désespoir
 Auf seinem Bette weinend sass,           Assis sur son lit en pleurant,
 Der kennt euch nicht, ihr                Ne vous connaît pas, forces divines.
     [himmlischen Mächte!

 Ihr führt ins Leben uns hinein,          Elles ont nos vies en main,
 Ihr lasst den Armen schuldig werden,     Nous accusent de notre dénuement,
 Dann überlasst ihr ihn der Pein:         Puis nous abandonnent à nos peines
 Denn alle Schuld rächt sich auf Erden.   Car toute faute doit trouver son châtiment.

 Texte : Johann Wolfgang von Goethe

       VI. Wer sich der                         VI. Celui qui
       Einsamkeit ergibt                        s’éprend de solitude

 Wer sich der Einsamkeit ergibt,          Celui qui s’éprend de solitude
 Ach! der ist bald allein;                Est destiné à rester seul ;
 Ein jeder lebt, ein jeder liebt,         Car ceux qui vivent et qui aiment
 Und lässt ihn seiner Pein.               Le laisseront à son tourment.

 20
Livret
Ja! lasst mich meiner Qual!                   Oui ! Laissez-moi à ma peine,
Und kann ich nur einmal                       Connaître pour une fois
Recht einsam sein,                            La véritable solitude,
Dann bin ich nicht allein.                    Qui elle ne me laissera pas seul.

Es schleicht ein Liebender lauschend sacht,   Comme l’amant meurtri
Ob seine Freundin allein?                     Doutant de son amante,
So überschleicht bei Tag und Nacht            De jour comme de nuit
Mich Einsamen die Pein,                       S’insinue en moi la peine,
Mich Einsamen die Pein.                       S’insinue en moi le tourment.
Ach, werd’ ich erst einmal                    Ah, connaître enfin
Einsam im Grabe sein,                         La solitude du tombeau,
Da lässt sie mich allein!                     Et qu’on m’y laisse seul.

Texte : Johann Wolfgang von Goethe

      VIII. An die Türen                            VIII. J’irai de porte
      will ich schleichen                           en porte

An die Türen will ich schleichen,             J’irai de porte en porte,
Still und sittsam will ich stehn;             Et me présenterai humble et silencieux.
Fromme Hand wird Nahrung reichen,             Une main pieuse me donnera du pain
Und ich werde weiter gehn.                    Et je poursuivrai mon chemin.
Jeder wird sich glücklich scheinen,           À ma vue devant lui,
Wenn mein Bild vor ihm erscheint;             Chacun s’estimera chanceux
Eine Träne wird er weinen,                    Et versera sans doute une larme,
Und ich Weiß nicht, was er weint.             Mais je ne sais ce qu’il pleurera.

Texte : Johann Wolfgang von Goethe

                                                                                        21
Livret
       Robert Schumann
       Drei Gedichte aus den
       Waldliedern op. 119

       I. Die Hütte                            I. Le Refuge

 Im Wald in grüner Runde,                Dans la forêt verdoyante,
 Wo Wipfel über Wipfel schaut,           Peuplée de hautes futaies
 Auf stillem Wiesengrunde                Donnant de l’ombre à la prairie,
 Hab’ ich die Hütte mir gebaut;          J’ai bâti mon refuge.

 Sie steht, bewahrt vor Stürmen          Là, protégé des orages,
 An graubemooster Felsenwand,            Adossé à une falaise de mousse recouverte,
 Baumriesen sie umtürmen,                Des arbres le dominent,
 Die schützen sie mit Freundeshand;      Et le protègent de leurs branches amicales.

 Ins Fenster blüht die Rose,             Un rosier s’épanouit et orne la fenêtre,
 Die Rebe grünt hinauf zum Dach,         La vigne grimpe nonchalamment
                                             [jusqu’au toit,
 Mit heimlichem Gekose                   Avec ses étranges murmures,
 Rauscht nah vorbei der Wiesenbach.      Le ruisseau s’écoule non loin.

 Im Wald zur guten Stunde                Dans cette forêt, à l’heure opportune,
 Hab’ ich die Stätte mir erschaut,       J’ai choisi l’endroit propice,
 Und auf entlegnem Grunde                Et, en ce lieu isolé,
 Die traute Hütte mir gebaut.            Ai bâti un bon refuge.

 Vom Frühroth angelächelt,               Aidé du sourire de l’aube
 Wie blickt ins Grün sie lebensfrisch!   Il s’épanouit dans la verdure,
 Vom Abendhauch umfächelt,               Et lorsque le soir doucement se déploie,
 Versinkt ins Thal sie träumerisch;      S’efface en rêvant dans la vallée.

 22
Livret
Am Mittag hält von Zweigen               Au zénith venu, un des grands arbres
Den Schirm ein Sohn des Walds ihr vor,   Lui fait office de parasol,
Des Nachts umschlingt in Reigen          Et la nuit, les fées de la prairie
Sie leis der Wiesen Elfenchor.           Lui accordent une ronde.

Im Wald, in grüner Runde,                Dans la forêt verdoyante
Wo Wipfel über Wipfel schaut,            Peuplées de hautes futaies,
Natur, in deinem Bunde                   Sous ta tutelle, chère nature,
Hab’ ich die Hütte mir gebaut            J’ai bâti mon refuge.

Texte : Gustav Pfarrius

      II. Warnung                               II. Prends garde
Es geht der Tag zur Neige,               Le jour achève sa course
Der Licht und Freiheit bot,              Après t’avoir offert lumière et liberté.
O schweige, Vöglein, schweige,           À présent, tais-toi, petit oiseau, tais-toi,
Du singst dich in den Tod.               Ton chant pourrait causer ta perte.

Die Winde nächtlich rauschen,            Le vent nocturne rugit,
Die Blätter zittern bang,                Le feuillage en est tout secoué,
Den Feinden, die drin lauschen,          Ton chant pourrait te trahir
Verrät dich dein Gesang.                 Auprès de tes ennemis.

Glutäugig durchs Gezweige                Tapi au milieu des branches
Der finstre Schuhu droht:                Le hibou aux yeux de braise est à l’affût.
O schweige, Vöglein, schweige,           Tais-toi, petit oiseau, tais-toi,
Du singst dich in den Tod!               Ton chant pourrait causer ta perte.

Texte : Gustav Pfarrius

                                                                                        23
Livret
       III. Der Bräutigam                         III. Le Futur Marié et
       und die Birke                              le bouleau

 Birke, des Waldes Zier,                    Cher bouleau, parure de la forêt,
 Will Hochzeit machen,                      Comme je me marie,
 Brauch viele Sachen,                       J’ai grand besoin de choses,
 Was schenkst du mir?                       Qu’es-tu prêt à me donner ?

 « Ich schenke dir einen grünen Strauss,    « Je te donnerai un bouquet des bois,
 Den trägst du bei deinem                   Que tu pourras porter à ta noce. »
     [Hochzeitsschmaus. »

 Der grüne Strauss gefällt mir sehr         Ton bouquet des bois me plaît bien,
                                                [cher bouleau,
 Birke, was schenkst du mir noch mehr?      Mais que me donneras-tu d’autre ?

 « Ich schenke dir eine Rute,               « Je te donnerai une fine verge,
 Die kommt deinen Kindern zugute. »         Pour l’éducation de tes enfants. »

 Die schwanke Rute gefällt mir sehr;        Ta fine verge me plaît bien, cher bouleau,
 Birke, was schenkst du mir noch mehr?      Mais que me donneras-tu d’autre ?

 « Ich schenke dir einen Besen rauh,        « Je te donnerai un bon balai,
 Den führt mit Fleiß die junge Frau. »      Pour les travaux de ta jeune épouse. »

 Der rauhe Besen gefällt mir sehr;          Ton bon balai me plaît bien, cher bouleau,
 Birke, was schenkst du mir noch mehr?      Mais que me donneras-tu d’autre ?

 « Ich schenke dir einen Peitschenstiel,    « Je te donnerai une cravache de cuir,
 Den schwingst du über den Rossen viel. »   Pour que tu en menaces tes chevaux. »

 24
Livret
Der Peitschenstiel gefällt mir sehr;         Ta cravache de cuir me plaît bien,
                                                 [cher bouleau,
Birke, was schenkst du mir noch mehr?        Mais que me donneras-tu d’autre ?

« Ich schenk dir auch den Wein dazu;         « Je te donnerai aussi de mon vin ;
Laß träufeln mein Blut, so hast du Ruh. »    Je laisserai couler ma sève, es-tu content ? »

Der Birkensaft gefällt mir sehr;             Ta sève me plaît bien, cher bouleau,
Birke, was schenkst du mir noch mehr?        Mais que me donneras-tu d’autre ?

« Ich hab nun alles gegeben dir,             « Je t’ai tout donné à présent,
Es bleibt nur noch das nackte Leben mir. »   Il ne me reste plus que la vie. »

Birke, so lebst du dir selbst zur Pein;      Cher bouleau, alors tu es perdu,
Will Hochzeit machen,                        Comme je me marie,
Brauch viele Sachen,                         J’ai grand besoin de choses,
Komm mit und heize mein Kämmerlein!          Je te prends pour chauffer ma chambrée.

Texte : Gustav Pfarrius

      Robert Schumann
      Vier Husarenlieder op. 117

      I. Der Husar, trara!                         I. Pour le hussard,
                                                   trara !
Der Husar,                                   Pour le hussard,
Trara!                                       Trara !
Was ist die Gefahr?                          C’est quoi le danger ?
Sein herzliebster Schatz!                    Sa bien-aimée !
Sie winkt, mit einem Satz                    Un signe d’elle, il saute
Ist er da, trara!                            Et le voilà, trara !
Der Husar,                                   Pour le hussard,

                                                                                        25
Livret
 Trara!                      Trara !
 Was ist die Gefahr?         C’est quoi le danger ?
 Sein Wein; flink! flink!    Le vin, cul sec !
 Säbel blink! Säbel trink!   Sabre au clair ! Sabre en l’air !
 Trink Blut! trara!          Sang de la terre ! trara !

 Der Husar,                  Pour le hussard,
 Trara!                      Trara !
 Was ist die Gefahr?         C’est quoi le danger ?
 Sein herzliebster Klang,    Sa chanson préférée,
 Sein Leibgesang,            Son air ressassé,
 Schlafgesang, trara!        Une berceuse, trara !

 Texte : Nikolaus Lenau

       II. Der                      II. Fâcheuse paix
       leidige Frieden

 Der leidige Frieden         Fâcheuse paix
 Hat lange gewährt,          Beaucoup trop longue,
 Wir waren geschieden,       Qui nous sépare,
 Mein gutes Schwert!         Ma bonne épée.

 Derweil ich gekostet        Pendant que je goûtais
 Im Keller den Wein,         Au vin de la treille
 Hingst du verrostet         Pendue au mur,
 An der Wand allein.         Tristement tu rouillais.

 Von Sorte zu Sorte          J’allais de cave en cave,
 Probiert’ ich den Wein,     Dégustais les nectars,
 Indessen dorrte             Tandis que le sang
 Das Blut dir ein.           Séchait sur ta lame.
 Ist endlich entglommen      Mais enfin se rallume

 26
Livret
Der heisse Streit,           Le rude combat.
Mein Schwert, und gekommen   Chère épée, voici
Ist deine Zeit.              Ton temps revenu.

Ich geb’ deiner Klingen      J’affûte ton tranchant
Den blanken Schliff,         Fais briller son acier,
Ich lasse dich singen        Te laisse entonner
Den Todespfiff.              L’hymne de mort.

Im Pulvernebel               Dans l’odeur de la poudre,
Die Arbeit rauscht,          Agiles ouvriers,
Wir haben, o Säbel,          Toi et moi partageons
Die Freuden getauscht.       D’identiques plaisirs.

Im brausenden Moste,         Dans le moût écumant,
Mein durstiges Erz,          Ta lame assoiffée
Betrinke dich, koste         S’enivre et s’épanche
Von Herz zu Herz.            À cœur ouvert.

Derweil du gekostet          Et tandis que tu t’abreuves
Das rote Blut,               De sang écarlate,
Ist mir eingerostet          Ma gorge s’assèche
Der Hals vor Glut.           Au feu du combat.

Texte : Nikolaus Lenau

      III. Den                     IIII. Branches vertes
      grünen Zeigern

Den grünen Zeigern,          Branches vertes,
Den roten Wangen,            Joues écarlates,
Den lustigen Geigern         Violonistes joyeux
Bin ich nachgegangen         Je les suivais

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Livret
 Von Schenk’ zu Schenk’,                      De taverne en taverne
 Solang’ ich denk’.                           D’autant que je me souvienne.

 Am Tschako jetzt trag’ ich                   Avec le shako que je porte à présent,
 Die grünen Äste,                             Branches vertes,
 Rote Wangen, die schlag’ ich                 Joues écarlates, j’affronte
 Den Feinden aufs beste,                      L’ennemi du mieux que je peux
 Kanonengebrumm                               Au son du canon,
 Musiziert herum.                             Notre musique.

 Texte : Nikolaus Lenau

       IV. Da liegt der Feinde                      IV. Ils gisent là les
       gestreckte Schar                             soldats ennemis

 Da liegt der Feinde gestreckte Schar,        Ils gisent là les soldats ennemis,
 Sie liegt in ihrem blutroten Blut.           Ils gisent dans leur sang rouge sang
 Wie haut er so scharf, wie haut er so gut,   Frappés par les coups imparables
 Der flinke Husar!                            Du brave hussard.

 Da liegen sie, ha! so bleich und rot,        Ils gisent là, si pâles et rouges,
 Es zittern und wanken noch, husch! husch!    Leurs âmes toujours tremblantes
 Ihre Seelen auf seinem Federbusch;           Volent autour de sa coiffe ;
 Da liegen sie tot.                           Leurs corps gisent là.

 Und weiter ruft der Trompetenruf,            Voici l’appel de la trompette,
 Er wischt an die Mähne sein                  Il essuie son épée à la crinière du cheval,
 nasses Schwert,                              Celui-ci bondit gaiement,
 Und weiter springt sein lustiges Pferd       Les sabots rouges de sang.
 Mit rotem Huf.

 Texte : Nikolaus Lenau

       Robert Schumann
 28
Livret
      Sechs Gesänge op. 89

      I. Es stürmet                         I. Tempête
      am Abendhimmel                        au crépuscule

Es stürmet am Abendhimmel,            La tempête au crépuscule
Es zittert der Sonne Licht,           Fait trembler la lumière,
Im Äther die eine Wolke               Dans le ciel, un nuage solitaire
Von Lust und Lieb’ ihr spricht.       Lui parle de plaisir et d’amour.

Die Wolke, vom Sturm gezogen,         Poussé par la tempête,
Dehnt weit die Arme aus,              Le nuage tend les bras
Sie glüht im Purpur der Liebe         Et brille d’un éclat pourpre
Und wirbt im Sturmgebraus.            Animé par les remous du vent.

Da scheidet die Braut von dannen,     Mais la tempête chasse la lumière
Die Wolke der Sturm entrafft;         Et le nuage solitaire ;
Der Purpur ist all verschwunden,      Le pourpre disparait,
Schwarz ist sie und grausenhaft.      Elle est noire et terrible.

Texte : Wilfried von der Neun

      II. Heimliches                        II. Discrète
      Verschwinden                          disparition

Nachts zu unbekannter Stunde          À une heure inconnue de la nuit
Flieht der liebe Lenz die Flur,       Le printemps aimé quitte la prairie,
Küßt, was blüht, still in der Runde   Il embrasse tout ce qui a fleuri
Und verschwindet sonder Spur.         Et disparaît discrètement.

Rings von seinen Küssen prangen       Fortes de ces baisers du matin
Früh die Blumen hold verschämt,       Les fleurs s’ouvrent timidement
Daß an ihrem Mund zu hangen,          Pour attirer au bord de leurs pétales

                                                                              29
Livret
 Schmetterling sich nicht bezähmt.   Les papillons effarouchés.

 Doch die Leute draußen sagen,       Et l’on dit tout autour
 Daß der Lenz vorüber sei;           Que le printemps s’en est allé,
 Und an wetterheißen Tagen           Que les chaudes journées
 Kennt man Sommers Tyrannei.         Annoncent la tyrannie de l’été.

 Und wir denken dran beklommen,      Dans notre peine nous songeons
 Daß der Lenz so heimlich floh;      Que le printemps furtivement enfui
 Daß er Abschied nicht genommen,     Ne nous a pas dit au revoir,
 Ach! das läßt uns nimmer froh.      Et que nous ne connaîtrons plus le bonheur.

 Also schmerzt es, geht das erste    Blessant comme un premier amour
 Lieb ohn’ Abschied von uns fort.    Parti sans dire un mot,
 Ruhig trügen wir das Schwerste,     Cet abandon serait moins douloureux
 Spräch’ sie aus das Scheidewort.    S’il s’accompagnait d’un adieu.

 Texte : Wilfried von der Neun

       III. Herbstlied                     III. Chant d’automne
 Durch die Tannen und die Linden     À travers sapins et tilleuls,
 Spinnt schon Purpur her und hin;    La lumière pourpre scintille ;
 Will mich Wehmut überwinden,        Pourrai-je surmonter la tristesse
 Daß ich bald im Herbste bin.        De savoir l’automne revenu.

 Nimmer! denn vom Walde klingen      Jamais ! Pourtant les bruits de la forêt,
 Märlein mir und Sprüchelein,        Contes et récits qui me sont destinés,
 Die mir süße Tröstung bringen       M’apportent un tendre réconfort
 Ob erstorb’nem Sonnenschein.        Malgré le déclin du soleil.

 Ja, erstorben ist die Sonne,        Oui, le soleil s’éteint doucement
 Und ihr Strahl ist ohne Macht!      Et son éclat faiblit.

 30
Livret
Dennoch spricht von ferner Wonne         Pourtant, les futaies vénérables
Greiser Wipfel Farbenpracht.             Parlent toujours de bonheur.

Texte : Wilfried von der Neun

      IV. Abschied                              IV. Adieu à la forêt
      vom Walde

Nun scheidet vom sterbenden Walde        De la forêt agonisante
Der Wandrer mit Herz und Mund:           Le voyageur ne veut plus rien connaitre :
« Wie wardst du mir lieb so balde,       « Je t’ai aimée dès que je t’ai connue,
Was sangst du mir vor allstund!          Et tu chantais pour moi autrefois.

« Wohl wußt’ ich deine Sprache,          Je comprenais ta langue,
Wohl kannt’ ich deinen Sang,             Je connaissais ton chant,
Und will’s an manchem Tage               Et certains jours, il revient
Nachsingen trüb und bang.                Tristement sur mes lèvres.

« Doch nun, o Wald, dein Rauschen,       Mais alors que tes rumeurs
Dein Brausen laß mir sein!               Et murmures s’évanouissent,
Nicht alles mag ich tauschen             Je n’ôterai rien
Für Herbstes Melodein! »                 Au chant de l’automne. »

Texte : Wilfried von der Neun

      V. Ins Freie                              V. En quête de liberté
Mir ist’s so eng allüberall!             Je me sens à l’étroit dans le monde.
Es schlägt das Herz mit lautem Schall,   Mon cœur bat si fort,
Und was da schallt, sind Lieder!         Il bat au rythme des chansons.
Aus düstrer Mauern bangem Ring           Hors de l’ombre sinistre des murs,
Flieg’ ich ins Weite froh und flink:     Je vole au loin, heureux et agile,
Da atm’ ich Wonne wieder!                Là où je peux respirer le bonheur.

                                                                                     31
Livret
 Da flattert aus der offnen Brust        Alors, ma poitrine palpite
 Die Sehnsucht nach verrauschter Lust    À l’ivresse des plaisirs
 Und nach gehoffter Wonne:               Et de la félicité retrouvés,
 Die Winde tragen’s himmelan,            Mais le vent les emporte au loin.
 Die Gräslein geben Fürbitt’ dran,       Tournées vers le soleil,
 Sich neigend in der Sonne.              Les herbes s’entremettent.

 Texte : Wilfried von der Neun

       VI. Röselein,                           VI. Petite Rose, petite
       Röselein!                               rose !

 Röselein, Röselein,                     Petite rose, petite rose,
 Müssen denn Dornen sein?                Faut-il que tu aies des épines ?
 Schlief am schatt’gen Bächelein         J’ai dormi à l’ombre près d’un ruisseau
 Einst zu süssem Träumen ein,            Et j’ai fait un doux rêve,
 Sah in goldner Sonne-Schein             J’ai vu dans les rayons dorés du soleil
 Dornenlos ein Röselein,                 Une petite rose sans épine,
 Pflückt’ es auch und küsst’ es fein,    Je l’ai cueillie et l’ai doucement appelée,
 « Dornloses Röselein! »                 « Petite rose sans épine ! »

 Ich erwacht’ und schaute drein:         À mon réveil je l’ai cherchée,
 « Hatt’ ich’s doch! wo mag es sein? »   « Je l’avais bien, où peut-elle être ? »
 Rings im weiten Sonnenschein            Autour de moi, le soleil ne m’a montré
 Standen nur Dornröselein!               Que des roses à épines,
 Und das Bächlein lachte mein:           Et le ruisseau moqueur m’a dit :
 « Lass du nur dein Träumen sein!        « Oublie ton rêve l’ami,
 Merk’ dir’s fein, merk’ dir’s fein,     Et sache bien que les roses
 Dornröslein müssen sein! »              Auront toujours des épines ! »

 Texte : Wilfried von der Neun

 32
Livret
      Claude Debussy
      Trois Poèmes de Mallarmé

      Soupir

Mon âme vers ton front où rêve, ô
calme sœur,
Un automne jonché de taches de rousseur,
Et vers le ciel errant de ton œil angélique,
Monte, comme dans un
jardin mélancolique,
Fidèle, un blanc jet d’eau soupire vers
     [l’azur !
Vers l’azur attendri d’octobre pâle et pur
Qui mire aux grands bassins sa
     [langueur infinie
Et laisse, sur l’eau morte où la fauve agonie
Des feuilles erre au vent et creuse un
     [froid sillon,
Se traîner le soleil jaune d’un long rayon.

Texte : Stéphane Mallarmé

      Placet futile
Princesse ! à jalouser le destin d’une Hébé
Qui point sur cette tasse au baiser de vos
    [lèvres ;
J’use mes feux mais n’ai rang discret
    [que d’abbé
Et ne figurerai même nu sur le Sèvres.

Comme je ne suis pas ton bichon embarbé

                                                   33
Livret
 Ni la pastille, ni jeux mièvres
 Et que sur moi je sens ton regard clos tombé
 Blonde dont les coiffeurs divins sont des
     [orfèvres !

 Nommez-nous… toi de qui tant de
     [ris framboisés
 Se joignent en troupeaux
 d’agneaux apprivoisés
 Chez tous broutant les vœux et bêlant
     [aux délires,
 Nommez-nous… pour qu’Amour ailé
     [d’un éventail
 M’y peigne flûte aux doigts endormant
     [ce bercail,
 Princesse, nommez-nous berger de
     [vos sourires.

 Texte : Stéphane Mallarmé

       Éventail
 Ô rêveuse, pour que je plonge
 Au pur délice sans chemin,
 Sache, par un subtil mensonge,
 Garder mon aile dans ta main.

 Une fraîcheur de crépuscule
 Te vient à chaque battement
 Dont le coup prisonnier recule
 L’horizon délicatement.

 Vertige ! voici que frissonne

 34
Livret
L’espace comme un grand baiser
Qui, fou de naître pour personne,
Ne peut jaillir ni s’apaiser.

Sens-tu le paradis farouche
Ainsi qu’un rire enseveli
Se couler du coin de ta bouche
Au fond de l’unanime pli.

Le sceptre des rivages roses
Stagnants sur les soirs d’or, ce l’est
Ce vol blanc fermé que tu poses
Contre le feu d’un bracelet.

Texte : Stéphane Mallarmé

      Robert Schumann
      Lieder und Gesänge op. 83

      I. Resignation                           I. Résignation

Lieben, von ganzer Seele,                T’aimer de tout mon cœur,
Lieben herzinniglich;                    T’aimer de toute mon âme,
Daß nimmer ich’s verhehle,               Je ne puis le cacher,
Heiß lieben muß ich dich!                Je dois t’aimer toujours.

Wie’s kommt?                             Pourquoi cela ?
Wie kann ich’s wissen?                   Comment savoir ?

Wohl höher schlägt mein Herz,            Mon cœur bat plus fort
Wenn deine Augen grüßen:                 Lorsque tu me regardes,
Gehst du, erbebts im Schmerz,            Mais saigne lorsque tu pars.

                                                                           35
Livret
 Erbebt im heißen Glühen,                Saisi d’un silencieux émoi,
 Im still verschwiegnen Rausch,          Je frissonne, fébrile
 Und Tränen überziehen                   Et de discrètes larmes
 Den Blick im Wechseltausch.             Me voilent ta vision.

 Lieben, von ganzer Seele,               T’aimer de toute mon âme,
 Muß ich dich!                           Tel est mon sort.
 Du wirst mich nie umschließen,          Jamais tu ne m’embrasseras,
 Nie wird dein Aug’ mir glühn!           Jamais tes yeux ne se poseront sur moi.
 Der Sehnsucht still Vermissen           Jamais désir et silencieuse attente
 Wird nie dich zu mir ziehn!             Ne t’amèneront à moi.

 So hoffnungslos mein Lieben?            Amour sans espoir ?
 Gewiß! doch trostlos nicht!             Oui, mais sans désolation.
 Will Gegenwart nicht trüben—            Je ne ternirai pas le présent,
 Zukunft? kenn’ ich ja nicht!—           Mais l’avenir ? Je ne sais pas.

 Will auch der Trennungsstunde Schmerz   L’intense douleur de la séparation
 Düster mich umwehn,                     Cherche sur moi son emprise,
 Lächle mit bleichem Munde:              Et je souris pourtant,
 Jenseits ist Wiedersehn!                Nous nous retrouverons dans l’au-delà !

 Texte : Julius Buddeus

       II. Die Blume                           II. La Fleur
       der Ergebung                            de l’abandon

 Ich bin die Blum’ im Garten,            Je suis la fleur du jardin
 Und muss in Stille warten,              Et attends immobile
 Wann und in welcher Weise               L’instant chéri
 Du trittst in meine Kreise.             Où tu viendras à moi.

 36
Livret
Kommst du, ein Strahl der Sonne,         Si tu apportes un rayon de soleil,
So werd’ ich deiner Wonne                J’ouvrirai mon cœur
Den Busen still entfalten                Aux délices qu’il amène
Und deinen Blick behalten.               Et chérirai l’éclat de ton regard.

Kommst du als Tau und Regen,             Si tu apportes la rosée et la pluie,
So werd’ ich deinen Segen                J’y verrai l’eau sacrée
In Liebesschalen fassen,                 Du baptistère, que jamais
Ihn nicht versiegen lassen.              Je ne laisserai tarir.

Und fährest du gelinde                   Et si, comme une douce brise,
Hin über mich im Winde,                  Tu passes au-dessus de moi,
So werd’ ich dir mich neigen,            Je m’inclinerai et dirai,
Sprechend: Ich bin dein eigen.           Je suis tout à toi.

Texte : Friedrich Rückert

      III. Der Einsiedler                      III. Le Solitaire
Komm, Trost der Welt, du stille Nacht!   Viens, nuit consolatrice,
Wie steigst du von den Bergen sacht,     Descends doucement des montagnes,
Die Lüfte alle schlafen,                 Le vent s’est endormi,
Ein Schiffer nur noch, wandermüd’,       Seul, depuis le port, un marin, fatigué
                                             [du voyage,
Singt übers Meer sein Abendlied          Entonne vers la mer un chant du soir
Zu Gottes Lob im Hafen.                  À la gloire des cieux.

Die Jahre wie die Wolken gehn            Les années passent comme les nuages
Und lassen mich hier einsam stehn,       Et me laissent ici solitaire,
Die Welt hat mich vergessen,             Le monde m’a oublié.
Da tratst du wunderbar zu mir,           Mais toi, merveille, tu viens me voir,
Wenn ich beim Waldesrauschen hier        Perdu dans mes pensées,
Gedankenvoll gesessen.                   Dans le bruissement de la forêt.

                                                                                   37
Livret
 O Trost der Welt, du stille Nacht!   Ô nuit consolatrice,
 Der Tag hat mich so müd gemacht,     Après ce jour qui m’épuise,
 Das weite Meer schon dunkelt,        La vaste mer s’assombrit,
 Laß ausruhn mich von Lust und Not,   Et m’épargne plaisirs et tourments
 Bis daß das ew’ge Morgenrot          Jusqu’à ce que l’aube, toujours revenue,
 Den stillen Wald durchfunkelt.       Embrase à nouveau la forêt.

 Texte : Joseph von Eichendorff

                                      Traduction de Herzeleid et Die Fensterscheibe :
                                      Miriam Lopes

                                      Traduction des autres textes : Miri Stern

                                      Il est strictement interdit, sauf accord
                                      préalable et écrit de la Cité de la
                                      musique – Philharmonie de Paris, de
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