CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 - Institute of ...
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
SOMMAIRE AVANT-PROPOS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 TENDANCES 2020 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 DE L’ENVIRONNEMENT POLITIQUE AUX ASPECTS PRUDENTIELS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 ASSURANCE VIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 ASSURANCES DE DOMMAGES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 INTERVIEW . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 L’assurance-crédit plus que jamais un outil de croissance profitable pour le monde des entreprises Christophe Cherry (Atradius), président de la division Crédit/Caution d’Assuralia SANTÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 INTERVIEW . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Le temps est venu d’un partenariat entre les autorités et les assureurs soins de santé Silke Lautenschläger, CEO DKV Belgium et Karel Coudré, directeur Pension & Health, AXA Belgium MEMBRES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . CONSEIL D’ADMINISTRATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ASSEMBLÉES DE DIVISIONS ET COMMISSIONS . . . . . . ORGANISATION INTERNE D’ASSURALIA . . . . . . . . . . . . . . . . Le site www.assuralia.be publie la liste des membres et la composition de ses organes Photo de couverture : Septembre 2020, la tempête Odette ensevelit le littoral ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 2
AVANT-PROPOS DES ASSURANCES ET DES CERTITUDES, MÊME PAR DES TEMPS INCERTAINS Dans le rétroviseur, c’est 2020 que l’on voit, dans les livres d’histoire, ce sera à tout jamais l’année de la crise du coronavirus. Pour beaucoup, une année à oublier au plus vite : des (grands-) parents se sont languis de la visite de leurs (petits-)enfants, de nombreux entrepreneurs ont vécu des moments d’angoisse. Et tout comme l’ensemble de l’économie belge, le secteur de l’assurance a subi lui aussi en 2020 un impact énorme de la crise du Covid-19. Ainsi, l’encaissement global du marché belge de l’assurance a reculé de 2,6 % en 2020, passant de 29,2 milliards d’euros en 2019 à 28,4 milliards d’euros en 2020. Le secteur continue de prendre à cœur son rôle sociétal. Il a pris des mesures essentielles de solidarité afin de soutenir des entreprises et des familles fragilisées. Le personnel des entreprises a continué de bénéficier d’une couverture pendant un chômage temporaire. Pour le remboursement de prêts hypothécaires et le paiement des primes d’assurances solde restant dû et d’assurances incendie qui y sont liées, les assureurs ont accordé un répit. En cas de difficultés de paiement, ils ont offert le ballon d’oxygène nécessaire. Les bénévoles actifs dans le secteur des soins de santé ont eux aussi été gratuitement et automatiquement assurés. Et pendant ce temps, les entreprises d’assurances ont également veillé au bon déroulement de leurs activités habituelles. Elles ont continué en 2020, dans des conditions loin d’être évidentes, à offrir de la protection à un maximum de particuliers, d’entreprises ou d’organisations. Au cours de l’année écoulée, elles ont également fait preuve de résilience. Ainsi, les entreprises d’assurances ont su s’adapter avec une extrême rapidité à ce qui fait à présent figure de nouvelle normalité. Grâce au savoir-faire présent aussi bien chez les assureurs que chez les intermédiaires, chaque client a pu être aidé (par la voie numérique) tout au long de l’année via différents canaux. Tant les particuliers que les entreprises qui ont voulu lancer de nouvelles activités ou étendre ou modifier leurs activités existantes ont toujours pu s’adresser à leurs assureurs. Les assureurs ont pendant l’année écoulée également continué à innover dans le domaine des produits et des services. L’offre de nouveautés mises sur le marché en 2020 est énorme, ne serait-ce que pour suivre l’accélération au niveau de l’utilisation des outils numériques. Pour le secteur, maintenir cette dynamique sera ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 3
de plus en plus important, les besoins des clients changeant et AVANT-PROPOS évoluant sans cesse. Les dernières tendances observées dans les résultats sectoriels révèlent tant des bonnes surprises que des déconvenues. Les défis ont été différents pour chaque assureur, en fonction des activités et de l’impact sur celles-ci de la crise sanitaire. Contrairement à la tendance générale, les opérations en assurances de dommages ont pu enregistrer une croissance, même si elle s’est révélée modeste. En dépit d’une forte remontée au cours du quatrième trimestre, les assurances sur la vie n’ont pas pu égaler les chiffres de 2019. Avec pour conséquence un recul de -5,4 % du total des encaissements. Les chiffres complets accompagnés d’aperçus détaillés par branche d’assurance sont repris plus loin à la page 6 du présent rapport. À l’heure actuelle, mieux vaut se tourner vers l’avenir que vers le passé. L’année 2021 offre en tout cas des perspectives emplies d’espoir et riches en défis. Ce qui ne ne doit pas faire perdre de vue que l’impact réel sur le secteur de l’assurance de cette crise sanitaire et récession économique sans précédent doit sans doute encore venir, même si aujourd’hui il reste flou. Ainsi, 2021 correspond à une année du salon de l’auto traditionnel. Il est clair que malgré la communication massive de messages publicitaires, les ventes de voitures vont stagner. Cela aura bien entendu un impact sur l’assurance omnium. La crise que nous vivons exercera sans nul doute une influence sur l’emploi et les chiffres du chômage. Ceux- ci auront à leur tour une incidence sur les primes en assurance accidents du travail. Toutes les entreprises ne parviendront malheureusement pas à garder la tête hors de l’eau, ce qui aura inévitablement des répercussions pour l’ensemble de l’économie. Par contre, des entreprises de certains secteurs verront leur chiffre d’affaires progresser. Il ne s’agit là que de quelques exemples des incertitudes qui planent sur l’évolution du marché de l’assurance, tant pour les particuliers que pour les entreprises. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 4
En dépit de tous ces points d’interrogation, le secteur a d’ores et AVANT-PROPOS déjà pris une résolution très importante : continuer à jouer son rôle d’investisseur institutionnel et dégager à cette fin les ressources nécessaires. Aujourd’hui, il incombe plus que jamais au secteur de participer de manière constructive à la réflexion sur la relance de l’économie belge et de jouer un rôle actif dans cette reprise. Collaborer à des initiatives durables et consentir des investissements dans le cadre du redressement de l’économie belge figure aujourd’hui, en notre qualité de partenaire des autorités, en tête de liste de nos priorités. 2021 ne sera pas une année facile, mais elle s’annonce passionnante. Et ça, c’est une certitude. Hilde Vernaillen, Présidente ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 5
TENDANCES 2020 OPÉRATIONS ENCAISSEMENTS CROISSANCE (millions d’€) NOMINALE (%) 2019/2020 2019 2020 (est.) 2018/2019 (est.) Total non-vie 29 203 28 446 3,0% -2,6% et vie Total vie 16 336 15 455 2,4% -5,4% Vie individuelle 10 570 9 559 4,0% -9,6% Taux garanti 6 928 5 917 7,6% -14,6% (Branche 21-22) Fonds d’investissements 3 121 3 159 -2,8% 1,2% (Branche 23) Capitalisation 521 484 1,0% -7,2% (Branche 26) Vie groupe 5 766 5 895 -0,2% 2,2% Taux garanti 5 425 5 431 1,2% 0,1% (Branche 21) Fonds d’investissements 341 464 -18,3% 36,1% (Branche 23) Non-vie 12 868 12 992 3,6% 1,0% Accidents, 410 375 1,7% -8,6% hors AT Accidents du 1 125 1 081 2,2% -3,9% travail (AT) Maladie 1 828 1 870 4,7% 2,2% Automobile 3 875 3 918 1,8% 1,1% Incendie 3 123 3 232 4,7% 3,5% RC Générale 1 057 1 062 4,5% 0,5% Autres opérations 1 450 1 453 6,3% 0,2% non-vie Source : Assuralia, extrapolation après le 4 ème trimestre 2020. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 6
DE L’ENVIRONNEMENT POLITIQUE AUX ASPECTS PRUDENTIELS 2020 avait débuté dans un climat d’incertitude politique avec une Commission européenne à peine installée et une scène politique nationale nappée d’un épais brouillard. Le secteur de l’assurance belge, quant à lui, affichait un bon bilan de santé, qui allait lui venir à point dès le printemps de 2020. L’URGENCE DU COVID19 Dès la fin février, le monde avait en effet pris conscience des dangers de l’apparition d’un virus nouveau qui rapidement semait la turbulence sur les marchés financiers et contraignait les gouvernements à des mesures drastiques pour juguler sa progression tout en soutenant les entreprises et les ménages en difficulté. Le secteur financier a vite réagi : avant même de faire l’inventaire des marchés qui seraient le plus impactés, Assuralia a ainsi annoncé des mesures de maintien de protection et des facilités de paiement pour ceux qui avaient été frappés par ces mesures. Les assureurs ont, en plus de ces décisions sectorielles, aidé leurs assurés en accordant couverture tant aux professionnels de la santé qui dans l’urgence sortaient de leurs spécialités pour monter au créneau que par exemple aux restaurateurs livrant désormais à domicile. Une branche d’assurance a une nouvelle fois révélé à quel point elle sous-tend des échanges commerciaux sains : il s’agit de l’assurance-crédit (lire l’interview de Christophe Cherry à ce propos en p. 19), qui garantit la bonne fin des facilités accordées par des entreprises à leurs clients. Si les assureurs-crédit avaient réduit la voilure devant le risque accru, l’économie aurait connu un coup d’arrêt plus grave encore. Comme ailleurs dans l’union européenne, le gouvernement et les assureurs-crédit se sont heureusement engagés dans un régime qui a permis de maintenir l’encours de crédits couverts à hauteur de ce qu’il était avant l’apparition du coronavirus. Face à la deuxième vague, il est apparu tout aussi légitime de proroger ce régime de garantie. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 7
Le secteur de l’assurance s’est même distingué en adoptant avec ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL les organisations syndicales une recommandation générale visant à convenir de conditions des travail appropriées et sûres et une convention collective de travail permettant un report de congés au vu des circonstances exceptionnelles : il est vrai que le secteur s’est rapidement converti au télétravail et devra pour l’avenir faire la part des choses entre l’autonomie du travail hors siège et le bon fonctionnement des équipes. Des mesures d’urgence ont de même encadré l’accès à la profession pour les métiers commerciaux, en adaptant aux circonstances les examens qui sanctionnent le savoir professionnel d’intermédiaires et autres acteurs de la distribution d’assurances. UN NOUVEL ENVIRONNEMENT POLITIQUE Assuralia entame 2021 dans un paysage politique recomposé, tant au niveau national qu’au niveau européen. L’équipe De Croo a rapidement trouvé ses marques et annoncé ses intentions en matière fiscale et à propos des pensions notamment. Assuralia a pour sa part salué la constitution d’un nouvel exécutif en insistant, ensemble avec Febelfin, sur l’apport du secteur financier à une relance économique qui rejoint les transitions digitales et du développement durable, au travers d’investissements à long terme ©SPF Chancellerie du Premier Ministre Le Gouvernement De Croo ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 8
qui constituent justement un atout majeur des assureurs. De son ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL côté, le gouvernement a mis sur la table un agenda consumériste concernant la transparence sur les frais, les possibilités de comparaison et les conditions minimales de garantie. De quoi rechercher ensemble le meilleur alignement entre efficience économique et fiabilité des contrats. Du côté européen, l’équipe d’Ursula von der Leyen s’est elle aussi attelée à un agenda où par-delà la pandémie que l’on espère voire s’estomper en 2021, la Commission s’engage dans une double transition, là encore « verte » et digitale, tout en veillant à ce que nul ne soit laissé pour compte en chemin. Son approche comporte des dizaines d’initiatives regroupées en ensembles cohérents, de même que des révisions de législations antérieures qui doivent être mises à jour. Très concrètement, Assuralia a reçu une avalanche de consultations qui s’ajoutent aux grands chantiers déjà entamés : la révision des règles de solvabilité et l’adoption de nouvelles normes comptables. © European Union 2019 – Source EP Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 9
La norme IFRS 17, publiée en mai 2020 par l’IASB, organisme ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL émetteur de ces normes internationales, devait s’appliquer au 1er janvier 2021. En raison d’observations de la part de professionnels soucieux de problèmes d’application, l’IASB a donc proposé une série d’amendements et un report de la date d’application au 1er janvier 2023. En parallèle, pour les entreprises d’assurances et de réassurances, l’exemption d’application de la norme IFRS 9 ‘Instruments financiers’ est prolongée jusqu’au 1er janvier 2023 (de sorte que l’application de ces deux nouvelles normes coïncide pour les assureurs). Le processus de ratification de cette norme internationale dans l’Union Européenne va se poursuivre au cours des mois à venir. Néanmoins, ce processus pourrait achopper sur le fait que certains pays européens voudraient voir l’Europe déroger à la norme sur certains points pour lesquels l’IASB n’a pas modifié son texte. Pour sa part, le marché belge s’est préparé à la nouvelle norme et souhaite une entrée en vigueur sans plus tarder. La révision 2020 de Solvabilité II a formellement commencé début 2019 par un appel de la Commission européenne à l’EIOPA, qui a lancé à son tour des consultations Fin 2020, Assuralia a communiqué sa position à la Commission, qui doit maintenant élaborer sur la base de l’avis de l’EIOPA une proposition, après quoi le texte sera, d’ici l’été 2021, inscrit à l’agenda du Parlement européen et du Conseil. Cela devrait prendre quelques mois, plus un à deux ans pour que les États membres adaptent leur législation, bien que des adaptations au Règlement délégué puissent entrer en vigueur plus rapidement. Dans son argumentation, Assuralia demande l’application d’une certaine proportionnalité à l’égard des plus petits assureurs, moins de charges de reporting et davantage de possibilités d’investir dans des actions et des obligations d’entreprises, ainsi qu’une adaptation de la correction pour volatilité (si nécessaire après la révision 2020 de Solvabilité II) et une réduction de la marge de risque (part des provisions techniques). Un point positif est que ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 10
la Commission européenne semble déjà disposée à faire quelque ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL chose pour faciliter les investissements à long terme, notamment en faveur des projets verts, durables et des PME (non cotées en bourse). Les assureurs sont par ailleurs réticents à des mesures plus strictes en ce qui concerne la gestion des taux d’intérêts ou aux projets de l’EIOPA concernant les entreprises en difficultés, qui impliqueraient à nouveau des charges supplémentaires. Parmi les nombreux autres projets européens, Assuralia suit celui de l’utilisation de l’intelligence artificielle. Pour faire face à des dérives, on imagine une assurance de responsabilité obligatoire. Fort bien, mais s’est-on posé la question de savoir s’il y a une offre au rendez-vous ? Plus réaliste est la volonté d’encadrer la résilience opérationnelle des assureurs, évidemment dépendants des technologies de l’information : encore faudra-t-il ici encore légiférer avec mesure. Un troisième dossier, à plus brève échéance, concerne la transparence des aspects de durabilité de produits d’assurance épargne et investissements, tant quant à l’objectif affiché que quant aux effets négatifs, sous l’angle de la durabilité, de la politique suivie. Le fait que les normes techniques ne verront le jour qu’après l’entrée en vigueur du Règlement, à partir du 10 mars 2021, crée un vide. Cependant, il est acquis que les normes s’appliqueront aux produits de placement à composante d’assurance (IBIP), et aux assurances pension. Par ailleurs, Assuralia suit de près le dossier de la gouvernance des données. Enfin, l’introduction d’une taxe sur les transactions financières ressemble à un mauvais feuilleton : cette proposition qui vise à juguler la spéculation et à laquelle ne croit qu’une minorité d’Etats membres menace pourtant les pensions complémentaires belges. Assuralia se bat pour faire reconnaître que la gestion d’assurances de groupe n’a rien à voir avec l’argent fou que vise le projet et qu’il serait malvenu que les affiliés de plans de pension en fassent les frais. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 11
ASSURANCE VIE L’ASSURANCE-VIE A PLUS QU’UN RÔLE COMPLÉMENTAIRE L’accord de gouvernement prévoit une réforme d’ici septembre 2021 afin de garantir des pensions adéquates et financièrement viables. La combinaison de la pension légale et de la pension com- plémentaire permet d’y parvenir : elle relève le taux de remplace- ment et par conséquent le niveau de vie des retraités, sans tailler davantage dans le budget de l’État. En outre, la combinaison du système de répartition de la pension légale et du système de ca- pitalisation de la pension complémentaire permet de répartir les risques de financement. Même si quelque 75 % des travailleurs salariés se constituent à l’heure actuelle une pension complémentaire professionnelle, tous n’en bénéficient pas encore et le taux de cotisation prévu dans ces plans d’entreprise est encore très bas pour beaucoup d’entre eux. Assuralia salue dès lors l’idée évoquée dans l’accord de gouverne- ment d’aboutir à une généralisation du deuxième pilier de pension et de faire en sorte que tout le monde puisse bénéficier d’une cotisation d’au moins 3 % dans le cadre des pensions professionnelles. Une telle cotisation porte la combinaison avec la pension légale - qui sera relevée d’ici 2024 à plus de 1.500 euros bruts pour une carrière de 45 ans - à plus de 1.800 euros en moyenne, un niveau qui correspond au coût mensuel moyen d’un séjour en maison de repos. L’harmonisation entre les ouvriers et les employés et l’abandon de la norme salariale contraignante peuvent préparer le terrain à cette fin au sein de la concertation sociale, pour autant que le cadre réglementaire et fiscal reste également stable. Par ailleurs, les travailleurs devraient bénéficier d’une plus grande flexibilité pour effectuer des versements supplémentaires à titre volontaire, au-delà des cotisations personnelles prévues dans le cadre de leur assurance de groupe. Le troisième pilier de pension doit également demeurer une com- posante essentielle de la politique en matière de pension. Ces produits d’épargne-pension sont populaires, simples et facilement ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 12
accessibles et ils connaissent, avec 3 millions de participants, un ASSURANCE VIE succès grandissant. Assuralia soutient également la proposition du gouvernement d’œuvrer à une simplification administrative, non seulement pour les pensions complémentaires, mais aussi pour toute forme d’as- surance-vie. Une numérisation plus poussée est importante dans ce cadre. Une étape importante à cette fin serait de permettre aux assureurs sur la vie d’avoir accès au Registre national. Cela pré- senterait de nombreux avantages pour les bénéficiaires d’assu- rances-vie, comme un versement plus rapide. Étant donné que les produits d’assurance sur la vie sont complexes et que l’offre est large et flexible, les assureurs attachent la plus grande importance à une communication claire et transparente sur les assurances pension et les assurances-vie. Cela se traduit no- tamment par des fiches d’information précontractuelle adaptées à chaque produit proposé et reprenant tous les détails sur les coûts, les cotisations et la fiscalité. Outre les fiches d’informations déjà introduites précédemment, le secteur a également introduit depuis le 1er octobre 2020 un code de bonne conduite prévoyant des fiches d’information sectorielles pour les produits de pension du deuxième pilier individuel. Ces nouvelles fiches visent plus précisément la pen- sion libre complémentaire pour travailleurs indépendants (PLCI) ou pour travailleurs salariés (PLCS) ainsi que pour les engagements individuels de pension pour les travailleurs indépendants personnes physiques ou pour les dirigeants d’entreprise indépen- dants. Les assureurs avaient précédem- ment déjà fourni un effort important afin que chaque individu puisse suivre le calcul LES ASSURANCES-VIE POUR PARTICULIERS de ses pensions complémentaires sur le POUR CEUX QUI VEULENT PILOTER LEUR AVENIR site Internet très fréquenté MyPension. be. À côté des brochures sur l’assurance de groupe et l’épargne-pension, Assuralia a publié en 2020 un aperçu pratique des ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 13
caractéristiques des assurances-vie individuelles et des combinai- ASSURANCE VIE sons possibles en la matière. Outre son rôle fondamental dans le cadre de la constitution de la pension, l’assurance sur la vie joue également un important rôle sociétal dans d’autres domaines. Les assureurs investissent en effet les primes et les réserves (qui représentent plus de 300 mil- liards d’euros toutes branches confondues), dont une large part est directement placée dans l’économie et l’État. Le secteur soutient ainsi la relance indispensable à la suite de la crise du coronavirus. En investissant de manière plus ciblée, le secteur contribue en outre largement à la transition vers un monde plus durable. Les assurances sur la vie ont également une fonction sociétale ponctuelle. Depuis l’apparition de la crise du coronavirus, les as- sureurs ont permis de maintenir, en cas de chômage temporaire, les garanties en matière de pension, d’indemnités de décès, d’in- validité et d’hospitalisation dont les travailleurs bénéficient dans le cadre d’assurances de groupe, alors qu’elles auraient normale- ment dû être supprimées. Ils ont également accordé un répit pour le remboursement des emprunts hypothécaires et des assurances de solde restant dû qui y sont liées. Assuralia a récemment conclu avec le SPF Défense une conven- tion visant à garantir que nos soldats ne subissent pas les inconvé- nients de leur profession sur le plan de leurs assurances de solde restant dû. Dans ce cadre, la Défense couvrira les risques qui sont propres à la profession de militaire, à concurrence du solde res- tant dû du crédit hypothécaire, et l’assureur concerné couvrira tous les autres risques encourus par les membres du personnel de la Défense dans le cadre de l’exercice de leur profession. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 14
ASSURANCES DE DOMMAGES DES COLLISIONS MOINS FRÉQUENTES La fréquence des sinistres en assurance RC auto obligatoire pour- suit sa décrue. En d’autres termes : le risque de collision est en légère diminution. La fréquence des sinistres passe de 5,92 % en 2018 à 5,74 % en 2019. Si l’on prend uniquement en considération les voitures particulières - en jargon la catégorie « tourisme et af- faires » - elle chute même de 5,89 % en 2018 à 5,70 % en 2019. Les chiffres définitifs pour l’année particulière que fut 2020 ne sont pas encore disponibles, mais le confinement et le télétravail ont fait sensiblement diminuer le nombre d’accidents. Pour sa part, Vias dénombre en 2020 22 % de tués et 22 % de blessés en moins sur nos routes. L’institut pour la sécurité routière souligne que les accidents ont en moyenne été plus graves, en raison d’une vitesse excessive sur les autoroutes. Les accidents avec lésions corporelles graves causent beaucoup de souffrance aux victimes et à leurs proches. Ils ont également un impact économique. Les assureurs auto ont recensé en 2019 pas moins de 815 « sinistres graves », c’est-à-dire de sinistres dont la charge s’élève à plus de 125.000 euros (831 en 2018). Ils ont coûté au total 341 millions d’euros, soit près de 30 % de la charge des sinistres globale pour l’ensemble des accidents couverts par l’as- surance RC auto en Belgique sur un an de temps. PREUVE D’ASSURANCE En 2021, les propriétaires de voitures continueront à faire leurs adieux à la traditionnelle « carte verte ». Depuis le 1er juillet 2020, les assureurs fournissent la preuve d’assurance par voie électro- nique et/ou sur papier, mais uniquement sur fond noir et blanc. Entre-temps, le secteur de l’assurance œuvre à une numérisation plus poussée de la preuve d’assurance. Le projet, qui a été baptisé « Proof of Insurance », présente des avantages tant pour l’assureur que pour la police et le consommateur. Grâce à la numérisation, la police pourra agir plus efficacement contre les véhicules non assurés. Elle pourra contrôler 24h/24 le statut d’assurance d’un ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 15
véhicule sur la base de la plaque d’immatriculation. Le consom- ASSURANCES DE DOMMAGES mateur ne devra quant à lui plus conserver ou présenter une preuve d’assurance. CRASHFORM Les assureurs auto modernisent aussi leur prestation de services en ce qui concerne la déclaration des accidents. L’application Crashform a fait l’objet d’une mise à jour importante. Jusqu’au mi- lieu de l’année dernière, deux parties impliquées dans un accident ne pouvaient utiliser cette application que sur un seul smartphone. Elles peuvent désormais utiliser leurs deux smartphones. Depuis l’introduction de cette nouveauté, Assuralia constate une hausse du nombre de téléchargements. Vous trouverez de plus amples rensei- gnements concernant Crashform sur www.ABCassurance.be. En ce qui concerne le règlement des sinistres, Assuralia a encou- ragé les entreprises à mieux ou du moins à systématiquement expliquer leur position au sujet de la responsabilité en cas d’ac- cident. Ce qui est évident pour un gestionnaire de dossier ne l’est pas forcément pour le consommateur. L’union professionnelle suit ce faisant une recommandation de l’Ombudsman des Assurances. Entre-temps, les instances européennes se penchent sur une ré- forme de la cinquième directive Auto. Le message est d’harmo- niser. Ainsi, les assureurs devront par exemple également tenir compte de l’historique des sinistres de leurs preneurs d’assurance originaire d’autres pays. En outre, le Parlement européen plaide également pour la création d’une plateforme indépendante en ma- tière de comparaison des assurances, une idée que l’on retrouve également dans l’accord de gouvernement belge. Le système Siabis+ a pour objectif de garantir un dépannage effi- cace sur les autoroutes wallonnes. Sur la base de la plaque d’im- matriculation, la police ou le centre Perex (qui assure la gestion et la surveillance du trafic) contacte l’ assureur assistance concerné, qui fait immédiatement intervenir une société de dépannage/un partenaire de Siabis+. Si nécessaire, par exemple si la police ne ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 16
peut pas se rendre ou rester sur place, le dépanneur prévoit éga- ASSURANCES DE DOMMAGES lement un véhicule de signalisation afin d’assurer la sécurité de l’opération. Le système a été déployé en 2019 dans l’ensemble de la Région wallonne et a atteint sa vitesse de croisière en 2020 avec pas moins de 6.314 interventions effectuées. TERRORISME Afin de familiariser les victimes d’actes de terrorisme (en Belgique ou avec des victimes belges à l’étranger) et leurs proches/repré- sentants avec les assurances qui peuvent intervenir dans l’indem- nisation des dommages, Assuralia a développé un module interactif qui se trouve sur le site Internet ABCassurance.be. Une autre nouveauté est la convention Assuralia grâce à laquelle un seul assureur est désigné pour l’organisation de l’expertise. Le secteur de l’assurance veut ainsi éviter que les victimes doivent se prêter à plusieurs expertises auprès de différents médecins experts. PROTECTION JURIDIQUE Tant le monde politique que les citoyens ont trop peu conscience du fait que l’assureur protection juridique tente d’abord toujours de régler un litige à l’amiable. Il y parvient d’ailleurs dans 75 % des cas. L’union professionnelle rappelle la nature spécifique de l’as- surance protection juridique, qui bénéficie depuis septembre 2019 d’un incitant fiscal permettant à davantage de ménages d’avoir ac- cès à une assistance juridique. Pour les quatre derniers mois de cette année-là, le secteur a recensé environ 70.000 contrats d’as- surance de protection juridique - nouveaux contrats et contrats adaptés - répondant aux conditions pour pouvoir bénéficier de l’avantage fiscal. DÉGÂTS DES EAUX Les tempêtes et inondations attirent plus facilement l’attention parce que des milliers de ménages peuvent subir des dégâts en un ou plusieurs jours. Fin septembre 2020, la tempête Odette a ainsi causé des dégâts considérables (23,6 millions d’euros), principa- ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 17
lement dans la région côtière. En début d’année, deux tempêtes ASSURANCES DE DOMMAGES assez fortes avaient causé respectivement pour 189 et 64 millions d’euros de dommages. La charge de ces sinistres en 2020 dépasse donc celle de 2019, lorsque deux tempêtes avaient, en mars, ravagé l’ensemble du pays (216 millions d’euros). Son coût est encore as- sez raisonnable par comparaison avec les tempêtes ayant ravagé l’ensemble du pays en mars 2019 (200 millions d’euros). Un autre risque qui est également couvert dans le cadre de l’assurance in- cendie pour les habitations et qui se produit également de manière fréquente est le risque de dégâts des eaux (salles de bains inon- dées, conduites qui sautent, rupture de canalisations, machines à laver défectueuses, infiltration au niveau du plafond ou du toit). Les dégâts des eaux ne sont jamais agréables, mais ils sont d’autant plus ennuyeux lorsqu’ils se produisent ou apparaissent lorsqu’un bien immobilier change de propriétaire. Assuralia a récemment adopté une convention qui détermine désormais clairement quel assureur doit intervenir et quand. Une source de conflit est ainsi à nouveau supprimée, dans l’intérêt du consommateur. BLOQUER LA FRAUDE ORGANISÉE Début 2021, les assureurs ont mis en service une banque de données sinistres. L’initiative sectorielle émane de l’asbl Alfa Belgium, une association de lutte contre la fraude à l’assu- rance. À l’instar de ce qui se fait à l’étranger, la banque de données est un nouvel outil contribuant à la détection de la fraude organisée. La banque de données, qui est fortement sécurisée et conforme au RGPD, croise les données relatives aux sinistres dans le cadre des assurances auto. Lorsque certains noms ou certaines données apparaissent dans plu- sieurs dossiers de sinistres, l’entreprise concernée en est avisée. Il revient ensuite à cet assureur d’effectuer ou non une enquête plus poussée concernant un sinistre (suspect). ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 18
L’ASSURANCE-CRÉDIT PLUS QUE JAMAIS UN OUTIL DE CROISSANCE PROFITABLE POUR LE MONDE DES ENTREPRISES Interview avec Christophe Cherry (Atradius), président de la division Crédit/Caution d’Assuralia L’assurance-crédit est un marché de niche. Est-il bien connu, même au sein du secteur ? Pourriez-vous en deux mots situer ce marché ? L’assurance-crédit existe depuis plus d’une centaine d’années. Si c’est un marché qui reste peu connu, c’est également un marché qui est bien inscrit dans les processus commerciaux et qui repré- sente environ 200 millions d’euros de primes par an en Belgique. Un marché de niche et donc confidentiel. Il ne l’est cependant pas dans le monde de l’entreprise. L’assurance-crédit est vrai- ment une assurance qui ne se propose qu’aux entreprises. Ce que nous faisons est cependant très important. Le poste des créances commerciales, c’est-à-dire les factures émises en attente de paiement, représente 30 à 40 % de l’actif d’une en- treprise. Sur l’ensemble des créances présentes sur le marché belge, cinquante milliards sont couvertes par un assureur crédit. Une société qui désire protéger son patrimoine doit donc forcé- ment aussi protéger ses créances commerciales. Elle paie une prime d’assurance sur son chiffre d’affaires pour couvrir la défail- lance de ses propres clients, ses acheteurs. En résumé, il s’agit donc d’un instrument largement utilisé dans les entreprises pour sécuriser le chiffre d’affaires et donc la croissance. Est-ce que selon vous les entreprises se rendent suffisamment compte du risque de faillite, intègrent-elles suffisamment ce risque dans leur gestion d’entreprise ? La corrélation entre la structure et la taille d’une entreprise et la conscience du risque de crédit est manifeste. Généralement les structures de plus petite taille n’ont pas les ressources pour avoir un credit controller. De plus elles n’ont la conscience de ce risque que lorsqu’il arrive effectivement. Elles pensent énormément à ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 19
leurs risques opérationnels, mais très peu aux risques financiers INTERVIEW qu’elles courent. Le monde des petites et moyennes entreprises est un univers peu pénétré aujourd’hui par les assureurs crédit. Mais c’est aussi la faute des assureurs eux-mêmes. Nous devons reconnaître qu’il y a sans doute eu à travers les années une in- capacité de notre part à proposer le bon niveau de service et le bon niveau de produits, adaptés au chiffre d’affaires des PME. Tout d’abord il y a un seuil au niveau de la prime d’assurance, qui constitue un réel investissement pour les entreprises. Puis, il faut aussi un suivi, une certaine forme de gestion. Passer en revue 2020 sans évoquer la crise de la Covid-19 est impossible. La crise sanitaire entraîne(ra) des retards de paie- ment. Qui les financera ? Quel rôle l’assurance-crédit y a-t-elle joué depuis début mars 2020 et quel rôle y aura-t-elle dans les mois qui suivent ? Sur la base d’une étude que nous avons réalisée au mois de no- vembre 2020, il apparaît que la valeur totale des factures en re- tard est passée de 26 % en 2019 à 47 % en 2020. Une facture sur deux était donc en retard de paiement. Le poids de ces factures en retard de paiement a augmenté de 80%. C’est un signal assez fort tout de même. Autre chiffre remarquable : en 2019, seule- ment 1 % des factures sont restées définitivement impayées. En 2020 ce chiffre est monté à 8 %. C’est gigantesque. L’impact de la crise Covid est donc bel et bien présent. Paradoxalement les as- sureurs crédit n’ont pas encore été impactés par cette crise quant à leur sinistralité. Ce constat s’explique principalement par le fait que les secteurs dans lesquels les pertes s’accumulent sont des secteurs où les assureurs-crédit sont moins exposés au risque. Les grands risques pour les assureurs-crédit se situent dans la construction, l’industrie, et les services et moins dans l’horeca ou dans le commerce de détail. Pour l’instant, le contexte fait que les pertes des assureurs-crédit ne sont pas en rapport avec la situation économique. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 20
Beaucoup de ventes B2B se réalisent via crédits ? Avez-vous vu INTERVIEW augmenter ce pourcentage pendant ces derniers mois ? Ce pourcentage est resté assez stable. Généralement entre 30 et 60 % du chiffre d’affaires est fait à crédit dans le B2B. Les délais de crédit autorisés de leur côté ont parfois tendance à vouloir raccourcir en période de difficulté. Quels sont selon vous, la crise sanitaire mise à part, les prin- cipaux risques qui menacent le commerce mondial et les pers- pectives d’une croissance solide ? Aucun doute que d’une façon générale l’incertitude est très pé- nalisante. Je crains que nous soyons confrontés à une baisse de l’activité dont nous ne voyons qu’une partie de l’iceberg. Beaucoup d’économies, et surtout en Europe, sont encore sous baxter, pro- tégées par des mesures gouvernementales. Ce qui fait que l’on permet pour l’instant à des entreprises quelque peu zombies de rester en vie. Lorsque ces mesures d’aide vont cesser – ce qui sera bien le cas un jour – je crains qu’il y ait un choc économique important, qui mènera à des fermetures d’entreprise, du chô- mage, une baisse de la consommation. Les lueurs d’espoir sont sur une reprise rapide en 2021. On voit que les économies qui ont réussi à bien gérer le Covid sont déjà très réactives. Dans quelle mesure le Brexit pourrait-il avoir une influence sur l’assurance-crédit ? Le premier impact du Brexit sera sur l’économie britannique. En tant qu’assureurs crédit nous avons anticipé depuis maintenant deux ans les impacts de la sortie du Royaume-Uni. Nous voyons un certain déplacement du business. Les entreprises belges qui faisaient des affaires avec des acheteurs britanniques ont tout doucement réussi à trouver des clients ailleurs. En somme, pour les assureurs crédit en Belgique le Brexit est déjà quelque chose d’anticipé dans les chiffres. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 21
Pourrait-on dire que l’assureur-crédit joue quelque part le rôle INTERVIEW d’un banquier, mais qu’à la différence d’une banque classique qui fuit le risque, il en fait son quotidien et son gagne-pain ? J’ai eu l’occasion de travailler dans les deux secteurs. Leurs mo- dèles sont tout à fait différents. Dans le secteur bancaire, un dos- sier crédit est en effet construit pour éviter les pertes. En cas de doute sur un dossier un refus de crédit est assez probable. Nous, les assureurs crédit, ne devons pas analyser les risques de cré- dit d’investissement sur quinze ans. Notre tâche est de mesurer la probabilité de faillite dans les six à douze mois qui viennent. L’analyse de crédit est tout à fait différente. La tâche de l’assureur crédit est de permettre le business tout en cadrant les risques à éviter. Toute la valeur de l’assurance-crédit est de dire non quand il faut dire non. Ainsi les assureurs crédit injectent constamment pour 50 milliards d’euros de crédits gratuits pour les acheteurs, payants pour les fournisseurs. Y a-t-il des secteurs où les risques d’impayés sont plus grands qu’ailleurs ? Les assureurs crédit constatent que le secteur de la construc- tion héberge le plus d’impayés. D’un autre côté le secteur de la construction a l’avantage d’être assez prévisible. Nous savons plus ou moins estimer les pertes. Le grand danger pour l’assu- reur crédit, c’est la volatilité. Un pays ou un secteur qui en deux semaines s’effondre alors que ce n’était pas prévisible. Pour cer- tains secteurs notre prime de risque est plus élevée. Mais nous connaissons les tenants et aboutissants de ces secteurs. Ce qui fait que nous sommes à même de gérer le risque. Le grand cau- chemar des assureurs crédit ce serait une société gigantesque qui de façon inattendue et subite serait en redressement judi- ciaire ou en défaillance. L’exposition de risque sur ce genre de société peut se compter en effet en milliards d’euros. Quels facteurs de vulnérabilité inattendus sont apparus dans le cadre du confinement ? ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 22
Ce qui est assez nouveau c’est que des entreprises en excellente INTERVIEW santé financière se sont retrouvées en difficulté à cause de l’inter- ruption de leur filière d’approvisionnement. Même avec un carnet de commandes plein à craquer des sociétés se sont retrouvées à l’arrêt pendant un certain temps. Il faudra que l’on étudie la vul- nérabilité d’une société ou d’un secteur en fonction de l’ensemble de la chaîne. Dans quelle mesure l’assurance-crédit avait-elle été touchée par la grande crise financière d’il y a dix ans ? A-t-elle engendré des différences au niveau du modèle de gestion des compagnies ? Les entreprises ont en effet complètement revu leur modèle de gestion et de service. Il y a dix ans, dans mon entreprise, nous avions décidé quasi du jour au lendemain de supprimer 10 % de notre exposition risque de façon unilatérale et d’augmenter toutes nos primes d’assurance d’au moins 20 %. La conséquence en a été que nous avions perdu 20 % de nos clients, et surtout nos meilleurs clients. Dix ans plus tard, la tendance a été complète- ment renversée. Au mois de mars 2020 nous nous retrouvions un peu dans la même situation qu’il y a dix ans. Nous avons vu arriver le tsunami et avons agi de façon tout à fait différente. Nous avons identifié toute une série de risques dont nous nous sommes dit qu’ils représentaient un danger. Plutôt de les couper ou de les annuler, nous avons pris contact avec l’ensemble de nos clients. Nous leur avons signalé nos inquiétudes par rapport à des entre- prises dans leurs portefeuilles. Nous leur avons donné la possi- bilité de gérer eux-mêmes leur sortie par rapport à leurs propres acheteurs ou d’apporter de nouvelles informations. Ce faisant nous avons grosso modo réduit autant nos expositions que l’on avait fait il y a dix ans, mais de façon beaucoup plus sereine, en partenariat avec nos clients. Par rapport au chemin qui a été fait entre il y a dix ans et aujourd’hui nous constatons que nous nous sommes beaucoup plus rapprochés de nos clients avec beaucoup plus de partenariat. Nous prenons en compte la vie de nos clients avant de prendre nos décisions. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 23
SANTÉ LA PANDÉMIE MET EN LUMIÈRE L’UTILITÉ DE L’ASSURANCE HOSPITALISATION L’assurance maladie obligatoire permet à tout citoyen d’avoir un accès convenable aux soins essentiels, mais 23 % des plus de 45 milliards d’euros de dépenses de santé restent toutefois à charge du patient. Plus de 9 millions de Belges, soit la majeure partie de la population, disposent heureusement d’une assurance hospitalisa- tion complémentaire qui les aide à assumer les frais élevés d’une hospitalisation souvent de longue durée. La crise totalement inattendue du coronavirus a exercé une pres- sion inédite sur l’ensemble des hôpitaux. Les assureurs hospita- lisation ont dû s’adapter au report massif des soins non urgents, qu’ils devront de toute façon gérer ultérieurement. La pandémie elle-même relève des risques assurés. Cela vaut également pour ceux qui ont souscrit une assurance revenu garanti en cas de maladie. Au total, les Belges versent à l’heure actuelle 7 milliards d’euros de leur poche pour des soins ambulatoires et dentaires. Les as- surances hospitalisation complémentaires permettent de couvrir dans une mesure croissante ces dépenses. La numérisation ac- célère cette évolution étant donné que de tels coûts nécessitent un suivi administratif intensif en raison de leur multiplicité et de leur fréquence. Une numérisation poussée ouvre des perspectives en termes d’accompagnement des patients durant l’intégralité de leur trajet de santé. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 24
LE TEMPS EST VENU D’UN PARTENARIAT ENTRE LES AUTORITÉS ET LES ASSUREURS SOINS DE SANTÉ Silke Lautenschläger, CEO DKV Belgium et Karel Coudré, directeur Pension & Health, AXA Belgium explorent l’avenir du système belge des soins de santé Mme Lautenschläger, une première question en guise d’entrée en matière : vous avez découvert le système des soins de santé belge lorsque vous êtes entrée en fonction chez DKV. Y a-t-il une chose qui vous a étonnée dans la manière dont le système belge des soins de santé est organisé ? SL : Rien de particulier ne m’a étonnée. Les assurances soins de santé sont comparables dans tous les pays européens, avec toujours quelques spécificités dans chaque pays. La plupart des pays ont une assurance soins de santé obligatoire, mais elle ne couvre jamais tout. Cela laisse de la place pour les assurances complémentaires qui permettent de bénéficier d’une meilleure couverture et souvent d’avoir un meilleur accès aux soins médi- caux. Ceci est très important pour une population plus âgée. Monsieur Coudré, vous travaillez au sein d’un groupe interna- tional qui a fait des soins de santé l’une de ses priorités. Y a-t-il une particularité belge que vous devez expliquer à vos collègues d’autres pays lorsque vous discutez de l’assurance soins de san- té en Belgique ? KC : En Belgique, le marché de l’assurance soins de santé com- plémentaire est moins développé que dans d’autres pays comme le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France. En outre, le système des soins de santé est organisé d’une manière différente dans chaque pays. La Belgique a un système comparable à celui de la France, bien qu’il soit moins développé sur certains points, comme les soins ambulatoires et la numérisation. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 25
Comment voyez-vous évoluer à l’avenir la coexistence du sys- INTERVIEW tème public et des soins privés pour les besoins qui ne sont pas rencontrés par le système public ? SL : Les statistiques en matière de santé de l’OCDE montrent que les dépenses privées restent très élevées dans tous les pays. En Belgique, nous avons beaucoup de produits complémentaires en matière d’hospitalisation. Comme le montrent les chiffres de l’OCDE, une marge d’amélioration existe toutefois en ce qui concerne les soins ambulatoires : les dépenses privées des Belges en matière de soins ambulatoires s’élèvent à 7,5 milliards d’euros. Pour les soins dentaires par exemple, les patients paient encore un montant élevé de leur poche (près de 1 milliard d’euros). KC : J’ai travaillé dans le domaine des pensions et dans celui de la santé et je constate de nombreuses similitudes entre les deux branches. Dans les deux cas, le vieillissement constitue un défi très important pour les États et les gouvernements qui sont confrontés à une hausse de leurs dépenses. Dans le secteur des pensions, nous avons déjà réussi à mettre en place un partenariat public-privé avec le gouvernement qui se compose de la pension légale et des pensions complémentaires. Nous devrions à mon avis suivre la même voie dans le domaine de l’assurance soins de santé. Nous constatons en outre que cela s’est déjà mis en place d’une manière autonome, sans véritable incitant du gouverne- ment. À l’heure actuelle, pas moins de 80 % des Belges disposent d’une assurance soins de santé complémentaire sans aucun in- citant. Cela démontre qu’il s’agit d’un véritable besoin pour les citoyens et que les assureurs complémentaires parviennent à rencontrer ce besoin. Les conditions sont actuellement propices à la concrétisation d’un partenariat similaire au sein de cette branche. La crise du coronavirus nous a incité à réfléchir à la manière de mettre en place une gouvernance pour les soins de santé. Il s’agirait d’une bonne opportunité d’examiner comment nous pouvons travailler en symbiose comme nous le faisons déjà dans le domaine des pensions. ASSURALIA CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 26
Vous pouvez aussi lire