CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021 - Institute of ...

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CONSTAT &
PERSPECTIVES
2020-2021
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SOMMAIRE

AVANT-PROPOS .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 3

TENDANCES 2020 .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 6

DE L’ENVIRONNEMENT POLITIQUE AUX
ASPECTS PRUDENTIELS .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 7

ASSURANCE VIE  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 12

ASSURANCES DE DOMMAGES .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 15

INTERVIEW                                 .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   19
L’assurance-crédit plus que jamais un outil de croissance
profitable pour le monde des entreprises
Christophe Cherry (Atradius), président de la division
Crédit/Caution d’Assuralia

SANTÉ  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . 24

INTERVIEW                                 .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .   25
Le temps est venu d’un partenariat entre les autorités
et les assureurs soins de santé
Silke Lautenschläger, CEO DKV Belgium et Karel Coudré,
directeur Pension & Health, AXA Belgium

MEMBRES  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .

CONSEIL D’ADMINISTRATION  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .

ASSEMBLÉES DE DIVISIONS ET COMMISSIONS  .  .  .  .  .  .

ORGANISATION INTERNE D’ASSURALIA .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .

Le site www.assuralia.be publie la liste des membres
et la composition de ses organes

Photo de couverture : Septembre 2020, la tempête Odette ensevelit le littoral

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AVANT-PROPOS
DES ASSURANCES ET DES CERTITUDES,
MÊME PAR DES TEMPS INCERTAINS
Dans le rétroviseur, c’est 2020 que l’on voit, dans les livres
d’histoire, ce sera à tout jamais l’année de la crise du coronavirus.
Pour beaucoup, une année à oublier au plus vite : des (grands-)
parents se sont languis de la visite de leurs (petits-)enfants, de
nombreux entrepreneurs ont vécu des moments d’angoisse. Et tout
comme l’ensemble de l’économie belge, le secteur de l’assurance
a subi lui aussi en 2020 un impact énorme de la crise du Covid-19.
Ainsi, l’encaissement global du marché belge de l’assurance a
reculé de 2,6 % en 2020, passant de 29,2 milliards d’euros en 2019 à
28,4 milliards d’euros en 2020.

Le secteur continue de prendre à cœur son rôle sociétal. Il a pris des
mesures essentielles de solidarité afin de soutenir des entreprises
et des familles fragilisées. Le personnel des entreprises a continué
de bénéficier d’une couverture pendant un chômage temporaire.
Pour le remboursement de prêts hypothécaires et le paiement des
primes d’assurances solde restant dû et d’assurances incendie qui
y sont liées, les assureurs ont accordé un répit. En cas de difficultés
de paiement, ils ont offert le ballon d’oxygène nécessaire. Les
bénévoles actifs dans le secteur des soins de santé ont eux aussi été
gratuitement et automatiquement assurés. Et pendant ce temps, les
entreprises d’assurances ont également veillé au bon déroulement
de leurs activités habituelles. Elles ont continué en 2020, dans
des conditions loin d’être évidentes, à offrir de la protection à un
maximum de particuliers, d’entreprises ou d’organisations.

Au cours de l’année écoulée, elles ont également fait preuve de
résilience. Ainsi, les entreprises d’assurances ont su s’adapter
avec une extrême rapidité à ce qui fait à présent figure de nouvelle
normalité. Grâce au savoir-faire présent aussi bien chez les
assureurs que chez les intermédiaires, chaque client a pu être aidé
(par la voie numérique) tout au long de l’année via différents canaux.
Tant les particuliers que les entreprises qui ont voulu lancer de
nouvelles activités ou étendre ou modifier leurs activités existantes
ont toujours pu s’adresser à leurs assureurs.

Les assureurs ont pendant l’année écoulée également continué à
innover dans le domaine des produits et des services. L’offre de
nouveautés mises sur le marché en 2020 est énorme, ne serait-ce
que pour suivre l’accélération au niveau de l’utilisation des outils
numériques. Pour le secteur, maintenir cette dynamique sera

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de plus en plus important, les besoins des clients changeant et
AVANT-PROPOS

               évoluant sans cesse.

               Les dernières tendances observées dans les résultats sectoriels
               révèlent tant des bonnes surprises que des déconvenues. Les défis
               ont été différents pour chaque assureur, en fonction des activités et
               de l’impact sur celles-ci de la crise sanitaire.

               Contrairement à la tendance générale, les opérations en assurances
               de dommages ont pu enregistrer une croissance, même si elle s’est
               révélée modeste.

               En dépit d’une forte remontée au cours du quatrième trimestre, les
               assurances sur la vie n’ont pas pu égaler les chiffres de 2019. Avec
               pour conséquence un recul de -5,4 % du total des encaissements.

               Les chiffres complets accompagnés d’aperçus détaillés par branche
               d’assurance sont repris plus loin à la page 6 du présent rapport.

               À l’heure actuelle, mieux vaut se tourner vers l’avenir que vers le
               passé. L’année 2021 offre en tout cas des perspectives emplies
               d’espoir et riches en défis. Ce qui ne ne doit pas faire perdre de vue
               que l’impact réel sur le secteur de l’assurance de cette crise sanitaire
               et récession économique sans précédent doit sans doute encore
               venir, même si aujourd’hui il reste flou. Ainsi, 2021 correspond à
               une année du salon de l’auto traditionnel. Il est clair que malgré
               la communication massive de messages publicitaires, les ventes
               de voitures vont stagner. Cela aura bien entendu un impact sur
               l’assurance omnium. La crise que nous vivons exercera sans nul
               doute une influence sur l’emploi et les chiffres du chômage. Ceux-
               ci auront à leur tour une incidence sur les primes en assurance
               accidents du travail. Toutes les entreprises ne parviendront
               malheureusement pas à garder la tête hors de l’eau, ce qui aura
               inévitablement des répercussions pour l’ensemble de l’économie.

               Par contre, des entreprises de certains secteurs verront leur chiffre
               d’affaires progresser.

               Il ne s’agit là que de quelques exemples des incertitudes qui planent
               sur l’évolution du marché de l’assurance, tant pour les particuliers
               que pour les entreprises.

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En dépit de tous ces points d’interrogation, le secteur a d’ores et
AVANT-PROPOS

               déjà pris une résolution très importante : continuer à jouer son rôle
               d’investisseur institutionnel et dégager à cette fin les ressources
               nécessaires.

               Aujourd’hui, il incombe plus que jamais au secteur de participer
               de manière constructive à la réflexion sur la relance de l’économie
               belge et de jouer un rôle actif dans cette reprise. Collaborer à des
               initiatives durables et consentir des investissements dans le cadre
               du redressement de l’économie belge figure aujourd’hui, en notre
               qualité de partenaire des autorités, en tête de liste de nos priorités.

               2021 ne sera pas une année facile, mais elle s’annonce passionnante.

               Et ça, c’est une certitude.

                                  Hilde Vernaillen, Présidente

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TENDANCES 2020
 OPÉRATIONS               ENCAISSEMENTS                     CROISSANCE
                          (millions d’€)                    NOMINALE (%)

                                                                          2019/2020
                              2019          2020 (est.)     2018/2019
                                                                            (est.)

 Total non-vie
                             29 203          28 446                3,0%     -2,6%
 et vie

 Total vie                   16 336          15 455                2,4%     -5,4%

 Vie individuelle            10 570            9 559               4,0%     -9,6%
 Taux garanti
                               6 928           5 917               7,6%    -14,6%
 (Branche 21-22)
 Fonds
 d’investissements             3 121           3 159           -2,8%         1,2%
 (Branche 23)
 Capitalisation
                                 521             484               1,0%     -7,2%
 (Branche 26)

 Vie groupe                    5 766           5 895           -0,2%         2,2%
 Taux garanti
                               5 425           5 431               1,2%      0,1%
 (Branche 21)
 Fonds
 d’investissements               341             464          -18,3%        36,1%
 (Branche 23)

 Non-vie                     12 868          12 992                3,6%      1,0%
 Accidents,
                                 410             375               1,7%     -8,6%
 hors AT
 Accidents du
                               1 125           1 081               2,2%     -3,9%
 travail (AT)
 Maladie                       1 828           1 870               4,7%      2,2%
 Automobile                    3 875           3 918               1,8%      1,1%
 Incendie                      3 123           3 232               4,7%      3,5%
 RC Générale                   1 057           1 062               4,5%      0,5%
 Autres opérations
                               1 450           1 453               6,3%      0,2%
 non-vie

Source : Assuralia, extrapolation après le 4 ème trimestre 2020.

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DE L’ENVIRONNEMENT POLITIQUE
AUX ASPECTS PRUDENTIELS
2020 avait débuté dans un climat d’incertitude politique avec une
Commission européenne à peine installée et une scène politique
nationale nappée d’un épais brouillard. Le secteur de l’assurance
belge, quant à lui, affichait un bon bilan de santé, qui allait lui venir
à point dès le printemps de 2020.

L’URGENCE DU COVID19
Dès la fin février, le monde avait en effet pris conscience des
dangers de l’apparition d’un virus nouveau qui rapidement
semait la turbulence sur les marchés financiers et contraignait
les gouvernements à des mesures drastiques pour juguler sa
progression tout en soutenant les entreprises et les ménages
en difficulté. Le secteur financier a vite réagi : avant même de
faire l’inventaire des marchés qui seraient le plus impactés,
Assuralia a ainsi annoncé des mesures de maintien de protection
et des facilités de paiement pour ceux qui avaient été frappés
par ces mesures. Les assureurs ont, en plus de ces décisions
sectorielles, aidé leurs assurés en accordant couverture tant
aux professionnels de la santé qui dans l’urgence sortaient de
leurs spécialités pour monter au créneau que par exemple aux
restaurateurs livrant désormais à domicile.

Une branche d’assurance a une nouvelle fois révélé à quel point
elle sous-tend des échanges commerciaux sains : il s’agit de
l’assurance-crédit (lire l’interview de Christophe Cherry à ce
propos en p. 19), qui garantit la bonne fin des facilités accordées
par des entreprises à leurs clients. Si les assureurs-crédit
avaient réduit la voilure devant le risque accru, l’économie aurait
connu un coup d’arrêt plus grave encore. Comme ailleurs dans
l’union européenne, le gouvernement et les assureurs-crédit
se sont heureusement engagés dans un régime qui a permis
de maintenir l’encours de crédits couverts à hauteur de ce
qu’il était avant l’apparition du coronavirus. Face à la deuxième
vague, il est apparu tout aussi légitime de proroger ce régime
de garantie.

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Le secteur de l’assurance s’est même distingué en adoptant avec
ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL

                          les organisations syndicales une recommandation générale visant
                          à convenir de conditions des travail appropriées et sûres et une
                          convention collective de travail permettant un report de congés
                          au vu des circonstances exceptionnelles : il est vrai que le secteur
                          s’est rapidement converti au télétravail et devra pour l’avenir faire
                          la part des choses entre l’autonomie du travail hors siège et le bon
                          fonctionnement des équipes. Des mesures d’urgence ont de même
                          encadré l’accès à la profession pour les métiers commerciaux, en
                          adaptant aux circonstances les examens qui sanctionnent le savoir
                          professionnel d’intermédiaires et autres acteurs de la distribution
                          d’assurances.

                           UN NOUVEL ENVIRONNEMENT POLITIQUE
                          Assuralia entame 2021 dans un paysage politique recomposé,
                          tant au niveau national qu’au niveau européen. L’équipe De Croo
                          a rapidement trouvé ses marques et annoncé ses intentions en
                          matière fiscale et à propos des pensions notamment. Assuralia a
                          pour sa part salué la constitution d’un nouvel exécutif en insistant,
                          ensemble avec Febelfin, sur l’apport du secteur financier à une
                          relance économique qui rejoint les transitions digitales et du
                          développement durable, au travers d’investissements à long terme
                        ©SPF Chancellerie du Premier Ministre

                                                  Le Gouvernement De Croo

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qui constituent justement un atout majeur des assureurs. De son
ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL

                          côté, le gouvernement a mis sur la table un agenda consumériste
                          concernant la transparence sur les frais, les possibilités de
                          comparaison et les conditions minimales de garantie. De quoi
                          rechercher ensemble le meilleur alignement entre efficience
                          économique et fiabilité des contrats.

                          Du côté européen, l’équipe d’Ursula von der Leyen s’est elle aussi
                          attelée à un agenda où par-delà la pandémie que l’on espère voire
                          s’estomper en 2021, la Commission s’engage dans une double
                          transition, là encore « verte » et digitale, tout en veillant à ce que
                          nul ne soit laissé pour compte en chemin. Son approche comporte
                          des dizaines d’initiatives regroupées en ensembles cohérents, de
                          même que des révisions de législations antérieures qui doivent être
                          mises à jour. Très concrètement, Assuralia a reçu une avalanche de
                          consultations qui s’ajoutent aux grands chantiers déjà entamés : la
                          révision des règles de solvabilité et l’adoption de nouvelles normes
                          comptables.
                        © European Union 2019 – Source EP

                                               Ursula von der Leyen, Présidente de la Commission européenne

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La norme IFRS 17, publiée en mai 2020 par l’IASB, organisme
ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL

                        émetteur de ces normes internationales, devait s’appliquer au
                        1er janvier 2021. En raison d’observations de la part de professionnels
                        soucieux de problèmes d’application, l’IASB a donc proposé une
                        série d’amendements et un report de la date d’application au 1er
                        janvier 2023. En parallèle, pour les entreprises d’assurances et
                        de réassurances, l’exemption d’application de la norme IFRS 9
                        ‘Instruments financiers’ est prolongée jusqu’au 1er janvier 2023
                        (de sorte que l’application de ces deux nouvelles normes coïncide
                        pour les assureurs).

                        Le processus de ratification de cette norme internationale dans
                        l’Union Européenne va se poursuivre au cours des mois à venir.
                        Néanmoins, ce processus pourrait achopper sur le fait que certains
                        pays européens voudraient voir l’Europe déroger à la norme sur
                        certains points pour lesquels l’IASB n’a pas modifié son texte.
                        Pour sa part, le marché belge s’est préparé à la nouvelle norme et
                        souhaite une entrée en vigueur sans plus tarder.

                        La révision 2020 de Solvabilité II a formellement commencé
                        début 2019 par un appel de la Commission européenne à l’EIOPA,
                        qui a lancé à son tour des consultations Fin 2020, Assuralia a
                        communiqué sa position à la Commission, qui doit maintenant
                        élaborer sur la base de l’avis de l’EIOPA une proposition, après
                        quoi le texte sera, d’ici l’été 2021, inscrit à l’agenda du Parlement
                        européen et du Conseil. Cela devrait prendre quelques mois, plus
                        un à deux ans pour que les États membres adaptent leur législation,
                        bien que des adaptations au Règlement délégué puissent entrer en
                        vigueur plus rapidement.

                        Dans son argumentation, Assuralia demande l’application d’une
                        certaine proportionnalité à l’égard des plus petits assureurs, moins
                        de charges de reporting et davantage de possibilités d’investir
                        dans des actions et des obligations d’entreprises, ainsi qu’une
                        adaptation de la correction pour volatilité (si nécessaire après la
                        révision 2020 de Solvabilité II) et une réduction de la marge de
                        risque (part des provisions techniques). Un point positif est que

                        ASSURALIA         CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  10
la Commission européenne semble déjà disposée à faire quelque
ENVIRONNEMENT GÉNÉRAL

                        chose pour faciliter les investissements à long terme, notamment
                        en faveur des projets verts, durables et des PME (non cotées en
                        bourse). Les assureurs sont par ailleurs réticents à des mesures
                        plus strictes en ce qui concerne la gestion des taux d’intérêts ou
                        aux projets de l’EIOPA concernant les entreprises en difficultés, qui
                        impliqueraient à nouveau des charges supplémentaires.

                        Parmi les nombreux autres projets européens, Assuralia suit celui
                        de l’utilisation de l’intelligence artificielle. Pour faire face à des
                        dérives, on imagine une assurance de responsabilité obligatoire.
                        Fort bien, mais s’est-on posé la question de savoir s’il y a une
                        offre au rendez-vous ? Plus réaliste est la volonté d’encadrer la
                        résilience opérationnelle des assureurs, évidemment dépendants
                        des technologies de l’information : encore faudra-t-il ici encore
                        légiférer avec mesure. Un troisième dossier, à plus brève échéance,
                        concerne la transparence des aspects de durabilité de produits
                        d’assurance épargne et investissements, tant quant à l’objectif
                        affiché que quant aux effets négatifs, sous l’angle de la durabilité,
                        de la politique suivie. Le fait que les normes techniques ne
                        verront le jour qu’après l’entrée en vigueur du Règlement, à partir
                        du 10 mars 2021, crée un vide. Cependant, il est acquis que les
                        normes s’appliqueront aux produits de placement à composante
                        d’assurance (IBIP), et aux assurances pension. Par ailleurs,
                        Assuralia suit de près le dossier de la gouvernance des données.

                        Enfin, l’introduction d’une taxe sur les transactions financières
                        ressemble à un mauvais feuilleton : cette proposition qui vise à
                        juguler la spéculation et à laquelle ne croit qu’une minorité d’Etats
                        membres menace pourtant les pensions complémentaires belges.
                        Assuralia se bat pour faire reconnaître que la gestion d’assurances
                        de groupe n’a rien à voir avec l’argent fou que vise le projet et qu’il
                        serait malvenu que les affiliés de plans de pension en fassent les
                        frais.

                        ASSURALIA         CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  11
ASSURANCE VIE
L’ASSURANCE-VIE A PLUS QU’UN RÔLE COMPLÉMENTAIRE
L’accord de gouvernement prévoit une réforme d’ici septembre
2021 afin de garantir des pensions adéquates et financièrement
viables. La combinaison de la pension légale et de la pension com-
plémentaire permet d’y parvenir : elle relève le taux de remplace-
ment et par conséquent le niveau de vie des retraités, sans tailler
davantage dans le budget de l’État. En outre, la combinaison du
système de répartition de la pension légale et du système de ca-
pitalisation de la pension complémentaire permet de répartir les
risques de financement.

Même si quelque 75 % des travailleurs salariés se constituent à
l’heure actuelle une pension complémentaire professionnelle, tous
n’en bénéficient pas encore et le taux de cotisation prévu dans ces
plans d’entreprise est encore très bas pour beaucoup d’entre eux.
Assuralia salue dès lors l’idée évoquée dans l’accord de gouverne-
ment d’aboutir à une généralisation du deuxième pilier de pension et
de faire en sorte que tout le monde puisse bénéficier d’une cotisation
d’au moins 3 % dans le cadre des pensions professionnelles. Une
telle cotisation porte la combinaison avec la pension légale - qui sera
relevée d’ici 2024 à plus de 1.500 euros bruts pour une carrière de
45 ans - à plus de 1.800 euros en moyenne, un niveau qui correspond
au coût mensuel moyen d’un séjour en maison de repos.

L’harmonisation entre les ouvriers et les employés et l’abandon
de la norme salariale contraignante peuvent préparer le terrain
à cette fin au sein de la concertation sociale, pour autant que le
cadre réglementaire et fiscal reste également stable. Par ailleurs,
les travailleurs devraient bénéficier d’une plus grande flexibilité
pour effectuer des versements supplémentaires à titre volontaire,
au-delà des cotisations personnelles prévues dans le cadre de leur
assurance de groupe.

Le troisième pilier de pension doit également demeurer une com-
posante essentielle de la politique en matière de pension. Ces
produits d’épargne-pension sont populaires, simples et facilement

ASSURALIA         CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  12
accessibles et ils connaissent, avec 3 millions de participants, un
ASSURANCE VIE

                succès grandissant.

                Assuralia soutient également la proposition du gouvernement
                d’œuvrer à une simplification administrative, non seulement pour
                les pensions complémentaires, mais aussi pour toute forme d’as-
                surance-vie. Une numérisation plus poussée est importante dans
                ce cadre. Une étape importante à cette fin serait de permettre aux
                assureurs sur la vie d’avoir accès au Registre national. Cela pré-
                senterait de nombreux avantages pour les bénéficiaires d’assu-
                rances-vie, comme un versement plus rapide.

                Étant donné que les produits d’assurance sur la vie sont complexes
                et que l’offre est large et flexible, les assureurs attachent la plus
                grande importance à une communication claire et transparente sur
                les assurances pension et les assurances-vie. Cela se traduit no-
                tamment par des fiches d’information précontractuelle adaptées à
                chaque produit proposé et reprenant tous les détails sur les coûts,
                les cotisations et la fiscalité. Outre les fiches d’informations déjà
                introduites précédemment, le secteur a également introduit depuis
                le 1er octobre 2020 un code de bonne conduite prévoyant des fiches
                d’information sectorielles pour les produits de pension du deuxième
                pilier individuel. Ces nouvelles fiches visent plus précisément la pen-
                sion libre complémentaire pour travailleurs indépendants (PLCI) ou
                pour travailleurs salariés (PLCS) ainsi que pour les engagements
                individuels de pension pour les travailleurs
                indépendants personnes physiques ou
                pour les dirigeants d’entreprise indépen-
                dants. Les assureurs avaient précédem-
                ment déjà fourni un effort important afin
                que chaque individu puisse suivre le calcul          LES ASSURANCES-VIE
                                                                     POUR PARTICULIERS
                de ses pensions complémentaires sur le               POUR CEUX QUI VEULENT
                                                                     PILOTER LEUR AVENIR

                site Internet très fréquenté MyPension.
                be. À côté des brochures sur l’assurance
                de groupe et l’épargne-pension, Assuralia
                a publié en 2020 un aperçu pratique des

                ASSURALIA         CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                           13
caractéristiques des assurances-vie individuelles et des combinai-
ASSURANCE VIE

                sons possibles en la matière.

                Outre son rôle fondamental dans le cadre de la constitution de la
                pension, l’assurance sur la vie joue également un important rôle
                sociétal dans d’autres domaines. Les assureurs investissent en
                effet les primes et les réserves (qui représentent plus de 300 mil-
                liards d’euros toutes branches confondues), dont une large part est
                directement placée dans l’économie et l’État. Le secteur soutient
                ainsi la relance indispensable à la suite de la crise du coronavirus.
                En investissant de manière plus ciblée, le secteur contribue en
                outre largement à la transition vers un monde plus durable.

                Les assurances sur la vie ont également une fonction sociétale
                ponctuelle. Depuis l’apparition de la crise du coronavirus, les as-
                sureurs ont permis de maintenir, en cas de chômage temporaire,
                les garanties en matière de pension, d’indemnités de décès, d’in-
                validité et d’hospitalisation dont les travailleurs bénéficient dans
                le cadre d’assurances de groupe, alors qu’elles auraient normale-
                ment dû être supprimées. Ils ont également accordé un répit pour
                le remboursement des emprunts hypothécaires et des assurances
                de solde restant dû qui y sont liées.

                Assuralia a récemment conclu avec le SPF Défense une conven-
                tion visant à garantir que nos soldats ne subissent pas les inconvé-
                nients de leur profession sur le plan de leurs assurances de solde
                restant dû. Dans ce cadre, la Défense couvrira les risques qui sont
                propres à la profession de militaire, à concurrence du solde res-
                tant dû du crédit hypothécaire, et l’assureur concerné couvrira tous
                les autres risques encourus par les membres du personnel de la
                Défense dans le cadre de l’exercice de leur profession.

                ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 14
ASSURANCES DE DOMMAGES
DES COLLISIONS MOINS FRÉQUENTES
La fréquence des sinistres en assurance RC auto obligatoire pour-
suit sa décrue. En d’autres termes : le risque de collision est en
légère diminution. La fréquence des sinistres passe de 5,92 % en
2018 à 5,74 % en 2019. Si l’on prend uniquement en considération
les voitures particulières - en jargon la catégorie « tourisme et af-
faires » - elle chute même de 5,89 % en 2018 à 5,70 % en 2019.
Les chiffres définitifs pour l’année particulière que fut 2020 ne sont
pas encore disponibles, mais le confinement et le télétravail ont
fait sensiblement diminuer le nombre d’accidents. Pour sa part,
Vias dénombre en 2020 22 % de tués et 22 % de blessés en moins
sur nos routes. L’institut pour la sécurité routière souligne que les
accidents ont en moyenne été plus graves, en raison d’une vitesse
excessive sur les autoroutes.

Les accidents avec lésions corporelles graves causent beaucoup
de souffrance aux victimes et à leurs proches. Ils ont également un
impact économique. Les assureurs auto ont recensé en 2019 pas
moins de 815 « sinistres graves », c’est-à-dire de sinistres dont la
charge s’élève à plus de 125.000 euros (831 en 2018). Ils ont coûté
au total 341 millions d’euros, soit près de 30 % de la charge des
sinistres globale pour l’ensemble des accidents couverts par l’as-
surance RC auto en Belgique sur un an de temps.

PREUVE D’ASSURANCE
En 2021, les propriétaires de voitures continueront à faire leurs
adieux à la traditionnelle « carte verte ». Depuis le 1er juillet 2020,
les assureurs fournissent la preuve d’assurance par voie électro-
nique et/ou sur papier, mais uniquement sur fond noir et blanc.

Entre-temps, le secteur de l’assurance œuvre à une numérisation
plus poussée de la preuve d’assurance. Le projet, qui a été baptisé
« Proof of Insurance », présente des avantages tant pour l’assureur
que pour la police et le consommateur. Grâce à la numérisation,
la police pourra agir plus efficacement contre les véhicules non
assurés. Elle pourra contrôler 24h/24 le statut d’assurance d’un

ASSURALIA         CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  15
véhicule sur la base de la plaque d’immatriculation. Le consom-
ASSURANCES DE DOMMAGES

                         mateur ne devra quant à lui plus conserver ou présenter une
                         preuve d’assurance.

                         CRASHFORM
                         Les assureurs auto modernisent aussi leur prestation de services
                         en ce qui concerne la déclaration des accidents. L’application
                         Crashform a fait l’objet d’une mise à jour importante. Jusqu’au mi-
                         lieu de l’année dernière, deux parties impliquées dans un accident
                         ne pouvaient utiliser cette application que sur un seul smartphone.
                         Elles peuvent désormais utiliser leurs deux smartphones. Depuis
                         l’introduction de cette nouveauté, Assuralia constate une hausse du
                         nombre de téléchargements. Vous trouverez de plus amples rensei-
                         gnements concernant Crashform sur www.ABCassurance.be.

                         En ce qui concerne le règlement des sinistres, Assuralia a encou-
                         ragé les entreprises à mieux ou du moins à systématiquement
                         expliquer leur position au sujet de la responsabilité en cas d’ac-
                         cident. Ce qui est évident pour un gestionnaire de dossier ne l’est
                         pas forcément pour le consommateur. L’union professionnelle suit
                         ce faisant une recommandation de l’Ombudsman des Assurances.

                         Entre-temps, les instances européennes se penchent sur une ré-
                         forme de la cinquième directive Auto. Le message est d’harmo-
                         niser. Ainsi, les assureurs devront par exemple également tenir
                         compte de l’historique des sinistres de leurs preneurs d’assurance
                         originaire d’autres pays. En outre, le Parlement européen plaide
                         également pour la création d’une plateforme indépendante en ma-
                         tière de comparaison des assurances, une idée que l’on retrouve
                         également dans l’accord de gouvernement belge.

                         Le système Siabis+ a pour objectif de garantir un dépannage effi-
                         cace sur les autoroutes wallonnes. Sur la base de la plaque d’im-
                         matriculation, la police ou le centre Perex (qui assure la gestion et
                         la surveillance du trafic) contacte l’ assureur assistance concerné,
                         qui fait immédiatement intervenir une société de dépannage/un
                         partenaire de Siabis+. Si nécessaire, par exemple si la police ne

                         ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 16
peut pas se rendre ou rester sur place, le dépanneur prévoit éga-
ASSURANCES DE DOMMAGES

                         lement un véhicule de signalisation afin d’assurer la sécurité de
                         l’opération. Le système a été déployé en 2019 dans l’ensemble de
                         la Région wallonne et a atteint sa vitesse de croisière en 2020 avec
                         pas moins de 6.314 interventions effectuées.

                         TERRORISME
                         Afin de familiariser les victimes d’actes de terrorisme (en Belgique
                         ou avec des victimes belges à l’étranger) et leurs proches/repré-
                         sentants avec les assurances qui peuvent intervenir dans l’indem-
                         nisation des dommages, Assuralia a développé un module interactif
                         qui se trouve sur le site Internet ABCassurance.be.

                         Une autre nouveauté est la convention Assuralia grâce à laquelle
                         un seul assureur est désigné pour l’organisation de l’expertise. Le
                         secteur de l’assurance veut ainsi éviter que les victimes doivent se
                         prêter à plusieurs expertises auprès de différents médecins experts.

                         PROTECTION JURIDIQUE
                         Tant le monde politique que les citoyens ont trop peu conscience
                         du fait que l’assureur protection juridique tente d’abord toujours
                         de régler un litige à l’amiable. Il y parvient d’ailleurs dans 75 % des
                         cas. L’union professionnelle rappelle la nature spécifique de l’as-
                         surance protection juridique, qui bénéficie depuis septembre 2019
                         d’un incitant fiscal permettant à davantage de ménages d’avoir ac-
                         cès à une assistance juridique. Pour les quatre derniers mois de
                         cette année-là, le secteur a recensé environ 70.000 contrats d’as-
                         surance de protection juridique - nouveaux contrats et contrats
                         adaptés - répondant aux conditions pour pouvoir bénéficier de
                         l’avantage fiscal.

                         DÉGÂTS DES EAUX
                         Les tempêtes et inondations attirent plus facilement l’attention
                         parce que des milliers de ménages peuvent subir des dégâts en un
                         ou plusieurs jours. Fin septembre 2020, la tempête Odette a ainsi
                         causé des dégâts considérables (23,6 millions d’euros), principa-

                         ASSURALIA         CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  17
lement dans la région côtière. En début d’année, deux tempêtes
ASSURANCES DE DOMMAGES

                         assez fortes avaient causé respectivement pour 189 et 64 millions
                         d’euros de dommages. La charge de ces sinistres en 2020 dépasse
                         donc celle de 2019, lorsque deux tempêtes avaient, en mars, ravagé
                         l’ensemble du pays (216 millions d’euros). Son coût est encore as-
                         sez raisonnable par comparaison avec les tempêtes ayant ravagé
                         l’ensemble du pays en mars 2019 (200 millions d’euros). Un autre
                         risque qui est également couvert dans le cadre de l’assurance in-
                         cendie pour les habitations et qui se produit également de manière
                         fréquente est le risque de dégâts des eaux (salles de bains inon-
                         dées, conduites qui sautent, rupture de canalisations, machines à
                         laver défectueuses, infiltration au niveau du plafond ou du toit). Les
                         dégâts des eaux ne sont jamais agréables, mais ils sont d’autant
                         plus ennuyeux lorsqu’ils se produisent ou apparaissent lorsqu’un
                         bien immobilier change de propriétaire. Assuralia a récemment
                         adopté une convention qui détermine désormais clairement quel
                         assureur doit intervenir et quand. Une source de conflit est ainsi à
                         nouveau supprimée, dans l’intérêt du consommateur.

                           BLOQUER LA FRAUDE ORGANISÉE

                           Début 2021, les assureurs ont mis en service une banque de
                           données sinistres. L’initiative sectorielle émane de l’asbl Alfa
                           Belgium, une association de lutte contre la fraude à l’assu-
                           rance. À l’instar de ce qui se fait à l’étranger, la banque de
                           données est un nouvel outil contribuant à la détection de la
                           fraude organisée. La banque de données, qui est fortement
                           sécurisée et conforme au RGPD, croise les données relatives
                           aux sinistres dans le cadre des assurances auto. Lorsque
                           certains noms ou certaines données apparaissent dans plu-
                           sieurs dossiers de sinistres, l’entreprise concernée en est
                           avisée. Il revient ensuite à cet assureur d’effectuer ou non
                           une enquête plus poussée concernant un sinistre (suspect).

                         ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                    18
L’ASSURANCE-CRÉDIT PLUS QUE JAMAIS
UN OUTIL DE CROISSANCE PROFITABLE
POUR LE MONDE DES ENTREPRISES
                Interview avec Christophe Cherry (Atradius),
                président de la division Crédit/Caution
                d’Assuralia

                L’assurance-crédit est un marché de niche.
                Est-il bien connu, même au sein du secteur ?
                Pourriez-vous en deux mots situer ce marché ?

L’assurance-crédit existe depuis plus d’une centaine d’années. Si
c’est un marché qui reste peu connu, c’est également un marché
qui est bien inscrit dans les processus commerciaux et qui repré-
sente environ 200 millions d’euros de primes par an en Belgique.
Un marché de niche et donc confidentiel. Il ne l’est cependant
pas dans le monde de l’entreprise. L’assurance-crédit est vrai-
ment une assurance qui ne se propose qu’aux entreprises. Ce
que nous faisons est cependant très important. Le poste des
créances commerciales, c’est-à-dire les factures émises en
attente de paiement, représente 30 à 40 % de l’actif d’une en-
treprise. Sur l’ensemble des créances présentes sur le marché
belge, cinquante milliards sont couvertes par un assureur crédit.
Une société qui désire protéger son patrimoine doit donc forcé-
ment aussi protéger ses créances commerciales. Elle paie une
prime d’assurance sur son chiffre d’affaires pour couvrir la défail-
lance de ses propres clients, ses acheteurs. En résumé, il s’agit
donc d’un instrument largement utilisé dans les entreprises pour
sécuriser le chiffre d’affaires et donc la croissance.

Est-ce que selon vous les entreprises se rendent suffisamment
compte du risque de faillite, intègrent-elles suffisamment ce
risque dans leur gestion d’entreprise ?

La corrélation entre la structure et la taille d’une entreprise et la
conscience du risque de crédit est manifeste. Généralement les
structures de plus petite taille n’ont pas les ressources pour avoir
un credit controller. De plus elles n’ont la conscience de ce risque
que lorsqu’il arrive effectivement. Elles pensent énormément à

ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 19
leurs risques opérationnels, mais très peu aux risques financiers
INTERVIEW

            qu’elles courent. Le monde des petites et moyennes entreprises
            est un univers peu pénétré aujourd’hui par les assureurs crédit.
            Mais c’est aussi la faute des assureurs eux-mêmes. Nous devons
            reconnaître qu’il y a sans doute eu à travers les années une in-
            capacité de notre part à proposer le bon niveau de service et le
            bon niveau de produits, adaptés au chiffre d’affaires des PME.
            Tout d’abord il y a un seuil au niveau de la prime d’assurance, qui
            constitue un réel investissement pour les entreprises. Puis, il faut
            aussi un suivi, une certaine forme de gestion.

            Passer en revue 2020 sans évoquer la crise de la Covid-19 est
            impossible. La crise sanitaire entraîne(ra) des retards de paie-
            ment. Qui les financera ? Quel rôle l’assurance-crédit y a-t-elle
            joué depuis début mars 2020 et quel rôle y aura-t-elle dans les
            mois qui suivent ?

            Sur la base d’une étude que nous avons réalisée au mois de no-
            vembre 2020, il apparaît que la valeur totale des factures en re-
            tard est passée de 26 % en 2019 à 47 % en 2020. Une facture sur
            deux était donc en retard de paiement. Le poids de ces factures
            en retard de paiement a augmenté de 80%. C’est un signal assez
            fort tout de même. Autre chiffre remarquable : en 2019, seule-
            ment 1 % des factures sont restées définitivement impayées. En
            2020 ce chiffre est monté à 8 %. C’est gigantesque. L’impact de la
            crise Covid est donc bel et bien présent. Paradoxalement les as-
            sureurs crédit n’ont pas encore été impactés par cette crise quant
            à leur sinistralité. Ce constat s’explique principalement par le fait
            que les secteurs dans lesquels les pertes s’accumulent sont des
            secteurs où les assureurs-crédit sont moins exposés au risque.
            Les grands risques pour les assureurs-crédit se situent dans la
            construction, l’industrie, et les services et moins dans l’horeca ou
            dans le commerce de détail. Pour l’instant, le contexte fait que
            les pertes des assureurs-crédit ne sont pas en rapport avec la
            situation économique.

            ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 20
Beaucoup de ventes B2B se réalisent via crédits ? Avez-vous vu
INTERVIEW

            augmenter ce pourcentage pendant ces derniers mois ?

            Ce pourcentage est resté assez stable. Généralement entre 30 et
            60 % du chiffre d’affaires est fait à crédit dans le B2B. Les délais
            de crédit autorisés de leur côté ont parfois tendance à vouloir
            raccourcir en période de difficulté.

            Quels sont selon vous, la crise sanitaire mise à part, les prin-
            cipaux risques qui menacent le commerce mondial et les pers-
            pectives d’une croissance solide ?

            Aucun doute que d’une façon générale l’incertitude est très pé-
            nalisante. Je crains que nous soyons confrontés à une baisse de
            l’activité dont nous ne voyons qu’une partie de l’iceberg. Beaucoup
            d’économies, et surtout en Europe, sont encore sous baxter, pro-
            tégées par des mesures gouvernementales. Ce qui fait que l’on
            permet pour l’instant à des entreprises quelque peu zombies de
            rester en vie. Lorsque ces mesures d’aide vont cesser – ce qui
            sera bien le cas un jour – je crains qu’il y ait un choc économique
            important, qui mènera à des fermetures d’entreprise, du chô-
            mage, une baisse de la consommation. Les lueurs d’espoir sont
            sur une reprise rapide en 2021. On voit que les économies qui ont
            réussi à bien gérer le Covid sont déjà très réactives.

            Dans quelle mesure le Brexit pourrait-il avoir une influence sur
            l’assurance-crédit ?

            Le premier impact du Brexit sera sur l’économie britannique. En
            tant qu’assureurs crédit nous avons anticipé depuis maintenant
            deux ans les impacts de la sortie du Royaume-Uni. Nous voyons
            un certain déplacement du business. Les entreprises belges qui
            faisaient des affaires avec des acheteurs britanniques ont tout
            doucement réussi à trouver des clients ailleurs. En somme, pour
            les assureurs crédit en Belgique le Brexit est déjà quelque chose
            d’anticipé dans les chiffres.

            ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                21
Pourrait-on dire que l’assureur-crédit joue quelque part le rôle
INTERVIEW

            d’un banquier, mais qu’à la différence d’une banque classique
            qui fuit le risque, il en fait son quotidien et son gagne-pain ?

            J’ai eu l’occasion de travailler dans les deux secteurs. Leurs mo-
            dèles sont tout à fait différents. Dans le secteur bancaire, un dos-
            sier crédit est en effet construit pour éviter les pertes. En cas de
            doute sur un dossier un refus de crédit est assez probable. Nous,
            les assureurs crédit, ne devons pas analyser les risques de cré-
            dit d’investissement sur quinze ans. Notre tâche est de mesurer
            la probabilité de faillite dans les six à douze mois qui viennent.
            L’analyse de crédit est tout à fait différente. La tâche de l’assureur
            crédit est de permettre le business tout en cadrant les risques à
            éviter. Toute la valeur de l’assurance-crédit est de dire non quand
            il faut dire non. Ainsi les assureurs crédit injectent constamment
            pour 50 milliards d’euros de crédits gratuits pour les acheteurs,
            payants pour les fournisseurs.

            Y a-t-il des secteurs où les risques d’impayés sont plus grands
            qu’ailleurs ?

            Les assureurs crédit constatent que le secteur de la construc-
            tion héberge le plus d’impayés. D’un autre côté le secteur de la
            construction a l’avantage d’être assez prévisible. Nous savons
            plus ou moins estimer les pertes. Le grand danger pour l’assu-
            reur crédit, c’est la volatilité. Un pays ou un secteur qui en deux
            semaines s’effondre alors que ce n’était pas prévisible. Pour cer-
            tains secteurs notre prime de risque est plus élevée. Mais nous
            connaissons les tenants et aboutissants de ces secteurs. Ce qui
            fait que nous sommes à même de gérer le risque. Le grand cau-
            chemar des assureurs crédit ce serait une société gigantesque
            qui de façon inattendue et subite serait en redressement judi-
            ciaire ou en défaillance. L’exposition de risque sur ce genre de
            société peut se compter en effet en milliards d’euros.

            Quels facteurs de vulnérabilité inattendus sont apparus dans le
            cadre du confinement ?

            ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  22
Ce qui est assez nouveau c’est que des entreprises en excellente
INTERVIEW

            santé financière se sont retrouvées en difficulté à cause de l’inter-
            ruption de leur filière d’approvisionnement. Même avec un carnet
            de commandes plein à craquer des sociétés se sont retrouvées à
            l’arrêt pendant un certain temps. Il faudra que l’on étudie la vul-
            nérabilité d’une société ou d’un secteur en fonction de l’ensemble
            de la chaîne.

            Dans quelle mesure l’assurance-crédit avait-elle été touchée par
            la grande crise financière d’il y a dix ans ? A-t-elle engendré des
            différences au niveau du modèle de gestion des compagnies ?

            Les entreprises ont en effet complètement revu leur modèle de
            gestion et de service. Il y a dix ans, dans mon entreprise, nous
            avions décidé quasi du jour au lendemain de supprimer 10 %
            de notre exposition risque de façon unilatérale et d’augmenter
            toutes nos primes d’assurance d’au moins 20 %. La conséquence
            en a été que nous avions perdu 20 % de nos clients, et surtout nos
            meilleurs clients. Dix ans plus tard, la tendance a été complète-
            ment renversée. Au mois de mars 2020 nous nous retrouvions un
            peu dans la même situation qu’il y a dix ans. Nous avons vu arriver
            le tsunami et avons agi de façon tout à fait différente. Nous avons
            identifié toute une série de risques dont nous nous sommes dit
            qu’ils représentaient un danger. Plutôt de les couper ou de les
            annuler, nous avons pris contact avec l’ensemble de nos clients.
            Nous leur avons signalé nos inquiétudes par rapport à des entre-
            prises dans leurs portefeuilles. Nous leur avons donné la possi-
            bilité de gérer eux-mêmes leur sortie par rapport à leurs propres
            acheteurs ou d’apporter de nouvelles informations. Ce faisant
            nous avons grosso modo réduit autant nos expositions que l’on
            avait fait il y a dix ans, mais de façon beaucoup plus sereine, en
            partenariat avec nos clients. Par rapport au chemin qui a été fait
            entre il y a dix ans et aujourd’hui nous constatons que nous nous
            sommes beaucoup plus rapprochés de nos clients avec beaucoup
            plus de partenariat. Nous prenons en compte la vie de nos clients
            avant de prendre nos décisions.

            ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 23
SANTÉ
LA PANDÉMIE MET EN LUMIÈRE L’UTILITÉ
DE L’ASSURANCE HOSPITALISATION
L’assurance maladie obligatoire permet à tout citoyen d’avoir un
accès convenable aux soins essentiels, mais 23 % des plus de 45
milliards d’euros de dépenses de santé restent toutefois à charge
du patient. Plus de 9 millions de Belges, soit la majeure partie de la
population, disposent heureusement d’une assurance hospitalisa-
tion complémentaire qui les aide à assumer les frais élevés d’une
hospitalisation souvent de longue durée.

La crise totalement inattendue du coronavirus a exercé une pres-
sion inédite sur l’ensemble des hôpitaux. Les assureurs hospita-
lisation ont dû s’adapter au report massif des soins non urgents,
qu’ils devront de toute façon gérer ultérieurement. La pandémie
elle-même relève des risques assurés. Cela vaut également pour
ceux qui ont souscrit une assurance revenu garanti en cas de
maladie.

Au total, les Belges versent à l’heure actuelle 7 milliards d’euros
de leur poche pour des soins ambulatoires et dentaires. Les as-
surances hospitalisation complémentaires permettent de couvrir
dans une mesure croissante ces dépenses. La numérisation ac-
célère cette évolution étant donné que de tels coûts nécessitent
un suivi administratif intensif en raison de leur multiplicité et de
leur fréquence. Une numérisation poussée ouvre des perspectives
en termes d’accompagnement des patients durant l’intégralité de
leur trajet de santé.

ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                  24
LE TEMPS EST VENU D’UN
PARTENARIAT ENTRE LES AUTORITÉS
ET LES ASSUREURS SOINS DE SANTÉ
                                 Silke Lautenschläger, CEO
                                 DKV Belgium et Karel Coudré,
                                 directeur Pension & Health,
                                 AXA Belgium explorent l’avenir
                                 du système belge des soins de
                                 santé

Mme Lautenschläger, une première question en guise d’entrée
en matière : vous avez découvert le système des soins de santé
belge lorsque vous êtes entrée en fonction chez DKV. Y a-t-il une
chose qui vous a étonnée dans la manière dont le système belge
des soins de santé est organisé ?

SL : Rien de particulier ne m’a étonnée. Les assurances soins
de santé sont comparables dans tous les pays européens, avec
toujours quelques spécificités dans chaque pays. La plupart des
pays ont une assurance soins de santé obligatoire, mais elle ne
couvre jamais tout. Cela laisse de la place pour les assurances
complémentaires qui permettent de bénéficier d’une meilleure
couverture et souvent d’avoir un meilleur accès aux soins médi-
caux. Ceci est très important pour une population plus âgée.

Monsieur Coudré, vous travaillez au sein d’un groupe interna-
tional qui a fait des soins de santé l’une de ses priorités. Y a-t-il
une particularité belge que vous devez expliquer à vos collègues
d’autres pays lorsque vous discutez de l’assurance soins de san-
té en Belgique ?

KC : En Belgique, le marché de l’assurance soins de santé com-
plémentaire est moins développé que dans d’autres pays comme
le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France. En outre, le système
des soins de santé est organisé d’une manière différente dans
chaque pays. La Belgique a un système comparable à celui de
la France, bien qu’il soit moins développé sur certains points,
comme les soins ambulatoires et la numérisation.

ASSURALIA        CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 25
Comment voyez-vous évoluer à l’avenir la coexistence du sys-
INTERVIEW

            tème public et des soins privés pour les besoins qui ne sont pas
            rencontrés par le système public ?

            SL : Les statistiques en matière de santé de l’OCDE montrent que
            les dépenses privées restent très élevées dans tous les pays. En
            Belgique, nous avons beaucoup de produits complémentaires
            en matière d’hospitalisation. Comme le montrent les chiffres
            de l’OCDE, une marge d’amélioration existe toutefois en ce qui
            concerne les soins ambulatoires : les dépenses privées des
            Belges en matière de soins ambulatoires s’élèvent à 7,5 milliards
            d’euros. Pour les soins dentaires par exemple, les patients paient
            encore un montant élevé de leur poche (près de 1 milliard d’euros).

            KC : J’ai travaillé dans le domaine des pensions et dans celui
            de la santé et je constate de nombreuses similitudes entre les
            deux branches. Dans les deux cas, le vieillissement constitue un
            défi très important pour les États et les gouvernements qui sont
            confrontés à une hausse de leurs dépenses. Dans le secteur des
            pensions, nous avons déjà réussi à mettre en place un partenariat
            public-privé avec le gouvernement qui se compose de la pension
            légale et des pensions complémentaires. Nous devrions à mon
            avis suivre la même voie dans le domaine de l’assurance soins de
            santé. Nous constatons en outre que cela s’est déjà mis en place
            d’une manière autonome, sans véritable incitant du gouverne-
            ment. À l’heure actuelle, pas moins de 80 % des Belges disposent
            d’une assurance soins de santé complémentaire sans aucun in-
            citant. Cela démontre qu’il s’agit d’un véritable besoin pour les
            citoyens et que les assureurs complémentaires parviennent à
            rencontrer ce besoin. Les conditions sont actuellement propices
            à la concrétisation d’un partenariat similaire au sein de cette
            branche. La crise du coronavirus nous a incité à réfléchir à la
            manière de mettre en place une gouvernance pour les soins de
            santé. Il s’agirait d’une bonne opportunité d’examiner comment
            nous pouvons travailler en symbiose comme nous le faisons déjà
            dans le domaine des pensions.

            ASSURALIA       CONSTAT & PERSPECTIVES 2020-2021                 26
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