De la biodiversité aux services rendus par les écosystèmes prairiaux en Normandie - IRD2

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De la biodiversité aux services rendus par les écosystèmes prairiaux en Normandie - IRD2
De la biodiversité aux services rendus par les
       écosystèmes prairiaux en Normandie

                    Mémoire soutenu le : 28 Septembre 2017
                              par : Le Levier Lisa

Encadrée par : Diquélou Sylvain, Lemauviel-Lavenant Servane et Morvan-Bertrand
                                      Annette.
                              Structure : UMR EVA
          Master 2 Gestion et Conservation de la Biodiversité – Brest (UBO)
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Remerciements
Je remercie en premier lieu la directrice de l’UMR EVA Marie-Pascale Prud'Homme et le directeur
adjoint Philippe Laîné pour leur chaleureux accueil au sein de cette unité.
Je tiens à remercier particulièrement mes encadrants Sylvain Diquélou, Servane Lemauviel-
Lavenant et Annette Morvan-Bertrand pour leurs précieux conseils et leurs temps consacrés à
m'aider tout au long du stage.
Merci aussi à Marion Boisseau et Sophie Raous pour leur encadrement à l'IRD2, de nous avoir suivi
tout au long du stage, de nous avoir donner des conseils et de nous avoir fait découvrir une
approche nouvelle multi-disciplinaire autour de la biodiversité. Je tiens aussi à les remercier pour
toutes les rencontres que nous avons pu faire grâce à elles, notamment lors du séminaire des
stagiaires où nous avons pu discuté avec des élus locaux, des naturalistes, des agriculteurs ou encore
des gérants d’industrie, qui ont tous une action en faveur de la biodiversité.
Je remercie aussi Catherine Zambettakis, déléguée régionale du CBNB antenne Basse-Normandie,
de m’avoir accueilli dans ses locaux pour poursuivre ma mission en utilisant leurs applications.
Merci aussi à Marie Goret et Thomas Bousquet pour m’avoir aidé à appréhender l’utilisation de
certains logiciels pour effectuer ma mission.
Je remercie aussi Emmanuelle Bouillon pour sa formation pédologique dans les tourbières du PNR
MCB qui fût très intéressante, ne connaissant que peu de choses en pédologie.
Je remercie aussi les doctorants de l'unité. Élise pour ses précieux conseils, ainsi que Maxence,
Cylia et Émilie pour leur gentillesse et leur accueil dans leur bureau.
Je tiens à remercier Antoine Girardin, stagiaire de M2, avec qui j'ai passé la plus grande partie de
mon temps, que ce soit en laboratoire ou sur le terrain. La collaboration a été très enrichissante et
son aide très précieuse.
Merci aussi à Cyril Roussel, autre stagiaire de M2, pour avoir apporté sa bonne humeur dans l'unité
et aussi son aide pour quelques point du stage.
Un grand merci à tous le personnel de l’unité pour leur accueil et leur bienveillance, notamment
Emmanuel pour son aide sur le terrain, mais aussi tout le personnel qui avait répondu à mon
sondage au sein du laboratoire.
Merci également à Eva, autre stagiaire de l’IRD2, pour m’avoir aidé à réaliser mon questionnaire,
mais aussi d’avoir été là tout au long du stage, et pour tout les moment passés ensemble.

Enfin, merci à tous mes proches qui m’ont soutenu, que ce soit lors de ce stage ou tout le long de
mes études qui s’achèvent à présent.
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Table des matières

I. Cadre du stage............................................................................................................................1
    I.1. Présentation des structures d'accueil ........................................................................................1
    I.2. Présentation du contexte............................................................................................................2
        I.2.1. Les services écosystémiques des prairies..........................................................................2
            I.2.1.b. Lien entre les pratiques agricoles et la valeur fourragère..........................................5
            I.2.1.c. Lien entre les pratiques agricoles et la séquestration du carbone..............................5
        I.2.2. Historique des prairies.......................................................................................................6
    I.3. Objectifs et missions du stage ..................................................................................................7
II. Matériels et méthodes............................................................................................................9
    II.1. Les programmes de recherche .................................................................................................9
        II.1.1. Programme WOW............................................................................................................9
        II.1.2. Programme P²C................................................................................................................9
        II.1.3. Programme AgriZH........................................................................................................10
    II.2. Présentation des zones d’études.............................................................................................10
        II.2. 1. Le PNR des Marais du Cotentin et du Bessin...............................................................10
        II.2.2. Le PNR de Normandie Maine........................................................................................11
    II.3. Protocole de terrain................................................................................................................12
        II.3.1. Relevés de végétations...................................................................................................13
        II.3.2. Étude et prélèvement du sol...........................................................................................14
    II.4. Analyse des jeux de données..................................................................................................14
        II.5.1. Préparation de l’enquête.................................................................................................15
        II.5.2. Déroulement de l’enquête...............................................................................................15
    II.6. Analyse du service de support : zoom sur la biodiversité végétale........................................16
III. Résultats..................................................................................................................................16
    III.1. Analyse de trois types de services écosystémiques dans deux PNR.....................................16
        III.1.1. Analyse des services écosystémiques des prairies mésophiles du PNRNM.................17
            III.1.1.a. Résultats des analyses en composante principale du PNR NM.............................17
            III.1.1.b. Caractéristiques des groupes de parcelles du projet P²C.......................................17
        III.1.2. Analyse des services écosystémiques des prairies humides dans le PNR MCB...........18
            III.1.2.a. résultats de l’Analyse en composante principale du PNR MCB...........................18
            III.1.2.b. Caractéristiques des groupe de parcelles du projet WOW....................................18
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III.1.3. Comparaison des bouquets de services des deux parcs naturels régionaux..................19
        III.2.1. Perception des paysages................................................................................................20
        Quels types de paysages préférez-vous au sein du territoire du Parc ?.....................................20
        III.2.2. Perception des prairies et de ses services......................................................................21
        III.2.3. Rapport de la population locale et des touristes au territoire........................................22
IV. Discussion................................................................................................................................23
V. Retour d'expérience...............................................................................................................29
Bibliographie.................................................................................................................................32
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Table des figures :
Figure 1 : Schéma des services écosystémiques représentés par le MEA.
Figure 2 : Carte représentant les PNR de Normandie, et notamment les PNR NM et MCB.
Figure 3 : Emplacement des parcelles sélectionnées pour le projet AgriZH, au sein du PNR MCB.
Figure 4 : Schéma du protocole des relevés de végétations.
Figure 5 : Schéma du protocole de prélèvement de sols et de fourrages.
Figure 6 : Bouquets de services contenant les échelles pour chacun des indices de services dans les
                                           deux PNR.
Figure 7 : Analyse en Composante Principale (ACP) des indices de services pour le PNR NM
associés aux parcelles, classées selon le substrat géologique.
Figure 8 : Bouquets de services des groupes de parcelles pour le PNR NM.
Figure 9 : Analyse en Composante Principale (ACP) des indices de services pour le PNR MCB
associés aux parcelles, classées selon le type de gestion.
Figure 10 : Bouquets de services des groupes de parcelles pour le PNR MCB.
Figure 11 : Bouquets de services évalués par la moyenne des indices de services utilisés dans
chacun des parcs (représentées par des graphes en pétales).
Figure 12 : Pourcentage de réponses concernant les milieux les plus identitaires des territoires des
PNR
Figure 13 : Pourcentage de réponses sélectionnées concernant les critères pour qu'on paysage soit
jugé esthétique.
Figure 14 : Pourcentage de réponses concernant les services associés aux prairies au sein des deux
PNR.
Figure 15 : Pourcentage de réponses concernant les services culturels associés aux prairies au sein
des deux PNR.
Figure 16 : Pourcentage de réponses concernant les mots-clés définissant une prairie.
Figure 17 : Bouquet de service évalué par la moyenne des indices de services utilisées pour des
parcelles de prairies permanentes productives (représenté par un graphe en pétales).

Tableau :
Tableau 1 : Nombre total de locaux et de touristes interrogés dans les deux PNR.
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Table des abréviations :
ACP : Analyse en Composante Principale.

ADEME : Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie.

AgriZH : Agriculture et Zones Humides.

CBNB : Conservatoire Botanique National de Brest.

DCS : Digestibilité à la peptide Cellulase.

E : Équitabilité.

EVA : laboratoire d’Écophysiologie Végétale et d’Agronomie.

FEADER : Fond Européen Agricole pour le Développement Rural

INRA : Institut National de Recherche en Agronomie.

IRD2 : Institut Régional du Développement Durable.

LANO : Laboratoire d’Analyse NOrmand.

MAEC : Mesure Agro-Environnementale et Climatique.

MAT : Matière Azotée Totale.

MEA : Millennium Ecosystem Assessment.

MO : Matière Organique.

P²C : Plante Pilot Carbon.

PNR MCB : Parc Naturel Régional des Marais du Cotentin et du Bessin.

PNR NM : Parc Naturel Régional Normandie Maine.

SAU : Surface Agricole Utile.

STH : Surface Toujours en Herbe.

UMR : Unité Mixte de Recherche.

WOW : value of WOrking Wetlands.
I. Cadre du stage

I.1. Présentation des structures d'accueil
Je réalise mon stage au sein de la structure UMR INRA-UCN 950 EVA (Unité Mixte de Recherche
d'Ecophysiologie Végétale, Agronomie et Nutrition N, C, S), créée en 1992, qui est un partenariat
entre l'INRA et l'Université de Caen Normandie où elle est localisée. Cette unité est dirigée par
Marie-Pascale Prud'homme et Philippe Laîné en tant que directeur adjoint. L'UMR EVA emploie au
total une quarantaine de personnes, en tant qu'enseignant-chercheurs, chercheur, techniciens, agents
techniques, doctorants, post-doctorants et stagiaires. Les recherches en physiologie, écologie et
écophysiologie végétale de cette unité s’intéressent aux performances agro-environnementales des
plantes en se basant sur l’acquisition des ressources carbonées, azotée et soufrées du ray-grass, du
colza et des espèces prairiales, en menant des travaux allant de la plante à l’agroécosystème ou
l’écosystème.
L'unité se compose de trois équipes : l'équipe INCCA (Interactions Nutritionnelles Conduites et
Contraintes Abiotiques), l'équipe FEAST (Fructane, Environnement et Transport des sucres) et
l'équipe « Écologie des prairies », dans laquelle j'ai réalisé mon stage. L’équipe « Écologie des
prairies » a été créée en 2004. L'une de ses thématiques de recherche consiste à évaluer les services
écosystémiques rendus par les prairies et les fonctions sous-jacentes aux services ou à analyser les
processus physiologiques impliqués.
J'ai été encadrée par Sylvain Diquélou, Servane Lemauviel-Lavenant, membres de l’équipe
« Écologie des prairies », et Annette Morvan-Bertrand (de l’équipe FEAST) maîtres de conférences
spécialisés dans les écosystèmes prairiaux.

Mon stage a été réalisé dans le cadre d’un projet porté par l’IRD2 (Institut Régional du
Développement Durable) et financé par la région Normandie en partenariat avec l’UMR EVA.
L’IRD2 est une association menant des projets de sensibilisation écologique. Cet institut, créé en
2010 et co-porté par la région Normandie et l'Université de Caen Normandie, est présidé par Julien
Crapet, professeur d'Urbanisme à l'IUT d'Alençon – Université de Caen-Normandie, et Hubert
Dejean De la Batie, vice-président de l’ex-région Basse-Normandie en charge de l'environnement,
en tant que vice-président. L'IRD2 a notamment pour mission de mettre en relation différents
acteurs (élus, chefs d'entreprises, administrateurs d'association, agriculteurs, ...) avec des
chercheurs. Cela permet d'accompagner les acteurs du territoire sur les problématiques de leurs

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territoires et d'en comprendre les enjeux de préservation de la biodiversité et du développement
durable. Tous les deux ans, une thématique nationale sur laquelle l'IRD2 va communiquer auprès de
ses publics cibles est choisie (http://www.ird2.org/lird2/contexte-de-creation).
La thématique de 2016-2017 est : « Biodiversité, une offre illimitée ? ». Le projet comporte 3
phases : (i) une phase de diagnostic qui consiste en un état des lieux des points forts et des enjeux
du territoire (janvier 2016), (ii) une phase de « temps forts » qui répond aux questions des acteurs
du territoire grâce à des retours d'expériences (mars 2017), (iii) une phase d'applications qui est
menée pendant un an afin de valoriser le projet et débuter des actions pour répondre aux enjeux
identifiés pendant la phase de diagnostic.
Pour la troisième phase de ce projet, 7 stagiaires, dont je fais partie, ont été recrutés par les 7
laboratoires de recherches (de Caen, Rouen et Le Havre) partenaires de l'IRD2 dans ce projet afin
de contribuer à cette étape d'applications. Les thématiques touchent différents domaines qui peuvent
aller de l'écologie au droit, à la sociologie, à la géographie ou encore à l'économie.

I.2. Présentation du contexte

I.2.1. Les services écosystémiques

Les écosystèmes peuvent nous apporter différents types de services, appelés « Services
Écosystémiques » (SE). Ils ont été définis par le Millenium Ecosystem Assessment (MEA) en 2005
comme étant les bénéfices retirés par l’Homme des processus biologiques. Les services sont portés
par les fonctions écologiques qui reposent sur la biodiversité . Cette définition a apporté un lien
entre l'Homme et les services rendus pas la nature (Lavorel et al., 2016). Les services sont divisés
en quatre catégories : i) les services de support, ii)les services de régulation , iii) les services de
fourniture (ou approvisionnement) et iv) les services culturels (MEA, 2005) (fig. 1).

                    Figure 1: Schéma des services écosystémiques selon le MEA                        2
                                          (MEA, 2005).
L’approche des écosystèmes par les services qu’ils rendent permet de les valoriser comme faisant
partie de notre patrimoine, que ce soit d’un point de vue culturel ou écologique. Les services rendus
peuvent servir d’arguments à la protection des milieux, et notamment dans l’agriculture où les
pratiques agricoles peuvent avoir de lourdes conséquences sur les écosystèmes (Leroux et al.,
2008). C’est grâce aux évaluations de ces services que peuvent être apportés des arguments
objectifs pour préserver la biodiversité. Il est difficile de les chiffrer en termes économiques, dans le
sens où la plupart des services ne sont pas marchands et relèvent d’un « consentement à payer »,
par exemple pour éviter une pollution, une catastrophe ou à l’inverse pour profiter de la beauté
scénique d’un paysage. En revanche, il est possible d’évaluer les services par des indices et de
comprendre les relations qui peuvent exister entre eux (Lavorel et al., 2016).

Les services de support sont à la base de tous les autres types de services (de régulation, fourniture
et culturels). Ces service comportent notamment le cycle des nutriments, la formation du sol, la
production primaire, la biodiversité, etc... (Amiaud & Carrere, 2012).
Les services de régulation correspondent au fonctionnement des écosystèmes, comme la régulation
du climat, du stockage de carbone dans le sol, des flux et de la qualité de l’eau etc... (MEA, 2005).
Les services de fourniture permettent aux Hommes d’acquérir des biens venant de la nature, qui
peuvent être commercialisables par la suite, que ce soit pour l’alimentation, l’eau potable et les
fibres (Lavorel et al., 2016).
Les services culturels sont définis par le MEA comme étant « des bénéfices non matériels que
l'Homme obtient à partir des écosystèmes » (MEA, 2005). Ils prennent en compte notamment la
diversité culturelle, les valeurs spirituelles et religieuses, l'apprentissage et les valeurs éducatives,
l'inspiration artistique, les valeurs esthétiques, les relations sociales, le sens du lieu, les valeurs du
patrimoine culturel, les loisirs ou encore l'écotourisme (Chan et al., 2012). Ces services culturels
sont plus ou moins présents selon les régions et leur évaluation est subjective, comme l’appréciation
d’un paysage. Suivant la personne, un milieu donne des services culturels différents selon son statut
ou sa branche professionnelle par exemple.

I.2.2. Les écosystèmes prairiaux

Les prairies sont de bons exemples pour l'étude des services écosystémiques en raison de leur
multifonctionnalité. En plus de fournir du fourrage, elles contribuent au maintien d’espaces ouverts,
appréciés en tant que paysages, mais aussi favorables à l’accueil d’une diversité végétale et animale
(Duru, 2007 ; Ansquer, 2006), faisant interagir les services culturels et environnementaux .

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Les prairies permanentes sont des prairies non renouvelées par labour et semis depuis plus de 5 ans.
Lorsque la fréquence de renouvellement est plus grande, les prairies sont qualifiées de temporaires.
Les prairies permanentes sont une source importante de biodiversité (Peyraud et al., 2012). Elles
sont souvent de grands réservoirs de biodiversité, d'un point de vue des communautés végétales,
mais aussi animales que ce soit au niveau ornithologique, entomologique, herpétologique ou
mammalogique. Du point de vue floristique, elles sont généralement dominées par les Poacées
(comme le dactyle ou le ray-grass anglais), ainsi que les Fabacées (comme le trèfle blanc ou trèfle
des prés) (Huyghes, 2005), mais elles accueillent aussi diverses autres monocotylédones et
dicotylédones (Leconte et al., 2004 ; Diquélou et al., 2003). En Normandie, région d’élevage, deux
types de prairies se distinguent d’un point de vue écologique : les prairies hygrophiles et les prairies
mésophiles (Diquélou et al., 2003), avec pour chacune des systèmes acides, calcicoles ou
intermédiaires, en fonction du substrat géologique. La Normandie a la particularité de se placer sur
deux entités géologiques : le bassin parisien et le massif armoricain.
Les prairies hygrophiles ou prairies humides couvrent une superficie comprise entre 4,5% et 5,6%
du territoire national. La dominance des Poacées y est moindre, et d'autres familles comme les
Cypéracées peuvent présenter de forts taux de recouvrement. Elles font face, pour la plupart, à des
périodes d'inondation durant une partie de l'année, en étant alimentée en eau par les crues des
rivières et les nappes alluviales. Grâce à ce stockage des eaux, les parties terrestres alentours sont
inondées plus lentement. Les zones humides contribuent donc à la lutte contre les inondations
(Zones humides Infos, 2015).
Les prairies mésophiles se situent à des niveaux topographiques plus élevés. Leur flore est dominée
par des Poacées fourragères. Comme les prairies humides, elles peuvent être soit fauchées soit
pâturées. Ce sont des prairies qui font la plupart du temps l’objet d’une intensité de gestion agricole
plus forte que les prairies humides. La diversité floristique est très variable et dépend de l’intensité
des pratiques agricoles (Gaujour et al., 2012).

I.2.3. Lien entre les pratiques agricoles et les services écosystémiques des prairies
I.2.3.a. Lien entre les pratiques agricoles et la diversité végétale
La composition floristique varie en fonction de l’intensité des pratiques agricoles. Les pratiques
extensives comme la fauche tardive et le pâturage en particulier avec un faible chargement peuvent
amener à une richesse floristique plus élevée (Garnier & Navas, 2012 ; Kohler, 2015 ; Puyrradieux
& Devaux, 2013). La fauche tardive est surtout intéressante pour la biodiversité faunistique
(Thiebeau et al., 2010) car les prairies servent de zone refuge aux animaux. Les espèces végétales

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sont à un stade de développement différent selon la date de fauche. En fauche tardive, la coupe se
fait après la floraison pour la plupart des espèces, permettant la dissémination des diaspores des
différentes espèces. Au contraire, une fauche précoce favorise les espèces avec un fort taux de
multiplication végétative comme les Poacées au détriment des espèces pour lesquelles la
reproduction végétative est plus difficile, comme les dicotylédones (Ansquer, 2006 ; Smith et al.,
1996), ce qui peut avoir un impact sur la biodiversité dans ces prairies (Huygue, 2008). Les
pratiques intensives favorisent par ailleurs les espèces compétitives avec une forte capacité de
capture des éléments nutritifs et une vitesse de croissance élevée, ce qui a pour conséquence finale
de diminuer la richesse spécifique des prairies (Farruggia et al., 2008). Un abandon total des
pratiques agricoles a un impact tout aussi négatif sur la biodiversité. En devenant des friches, les
prairies perdrent leur richesse floristique. Les espèces plus ordinaires et plus compétitives seraient
favorisées (Peeters et al., 2004 ; Dumont et al., 2007) au détriment des espèces rares ou
remarquables.

I.2.3.b. Lien entre les pratiques agricoles et la valeur fourragère

Si une fauche tardive est favorable aux services de support, elle ne l’est pas forcément pour la
valeur alimentaire du fourrage. En effet, la teneur en parois végétales augmente avec l’âge de la
plante. La digestibilité de ces parois diminue avec le vieillissement des tissus de la plante. La
digestibilité des Poacées prairiales (de types dactyle ou ray-grass anglais) diminue après le stade
d’épiaison (Vermorel & Coulon, 1992). La valeur alimentaire peut être estimée par la teneur en
énergie nette du fourrage et exprimée en unités fourragères (UFL et UFB) dont le principal facteur
de variation est la digestibilité de l’énergie brute (DMO, liée à la digestibilité des parois végétales
DCS).
Une fauche tardive ne participe donc pas forcément à la production d’un foin de qualité en termes
de valeur alimentaire (Baumont et al., 2009). Pour des prairies permanentes, la valeur alimentaire
est également liée aux espèces végétales présentes dans la prairie et cette composition floristique
dépend des conditions du milieu mais aussi, comme indiqué précédemment, du mode de gestion de
la prairie. La diversité floristique a en effet un impact sur la qualité du fourrage. Le fait d’avoir un
grand nombre d’espèces présentes sur une prairie, influence la digestibilité et la valeur nutritive du
produit, car à la date de fauche ou de pâturage, les différentes espèces sont plus ou moins matures
ce qui sous-entend des niveaux de digestibilité différents, les espèces moins matures contribuant à
une hausse de la digestibilité globale de la communauté (Farrugia et al., 2008).

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I.2.3.c. Lien entre les pratiques agricoles et la séquestration du carbone

Les activités agricoles contribuent à 13,5% des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) dans le
monde et 21% en France (ADEME, 2011). L'agriculture est placée deuxième plus gros émetteur de
GES derrière les transports (ADEME, 2011). Cependant, une compensation peut être établie, grâce
à la capacité de séquestration du carbone (C) dans les sols, en particulier ceux des prairies
permanentes. La séquestration du C correspond au bilan de flux entrants de C et de flux sortants,
qui dépendent de la qualité de la matière organique (MO) et de l’activité des micro-organismes
telluriques. La composition végétale impacte la quantité et la qualité du carbone entrant dans le sol
(MEA, 2005 ; De Deyn et al., 2008 ; Soussana & Lemaire, 2014). Les stocks de C des sols prairiaux
sont estimés à environ 70 t ha-1 (Arrouays et al., 2002). Pour maintenir ces stocks de carbone dans
le sol, une gestion appropriée des prairies est primordiale. En effet, en pratiquant des gestions
intensives par une fauche intensive par exemple, la diversité végétale est diminuée mais la
séquestration du carbone peut ne pas être modifié ou au contraire peut être augmentée grâce à
l'implantation d'espèces fourragères plus productives, qui permettent, grâce à une photosynthèse
plus élevée, d’accroître les flux entrants de C (Bruce et al., 1999). Une partie du C est exportée lors
de la fauche, mais une autre peut contribuer à l'augmentation des teneurs en C du sol, au moins à
court terme. Sur une prairie pâturée, le carbone est rejeté dans l’atmosphère sous 3 types de formes,
par la respiration des animaux, par la fermentation entérique rejetant du méthane et enfin par la
biomasse des animaux (Kohler, 2015). Dans les prairies humides, au contraire, une intensification
des pratiques associant souvent un drainage des sols diminue l'hydromorphie, ce qui favorise
l'activité microbienne et provoque un déstockage du carbone présent dans la MO du sol.

I.2.4. Historique des prairies

Malgré les services que peuvent rendre les prairies permanentes, celles-ci connaissent en France une
réelle régression. Ceci s’explique par un besoin en fourrages et en alimentation en constante
augmentation depuis les années 1960, dans un contexte d’après guerre (Plantureux et al., 1987). Un
nombre important de cultures fourragères (de betterave ou choux fourrager) a été converti en
cultures céréalières, en maïs d’ensilage notamment, ces pratiques intensives étant plus rentables. En
effet, le blé et le maïs d’ensilage représentent 90% des cultures fourragères hors prairie avec un
rendement très supérieur à celles-ci (Agreste, 2014). Cette « révolution verte » se traduit aussi par
une transformation des prairies permanentes en prairies temporaires fertilisées artificiellement
(Balesdent, 1996) afin d’intensifier l’élevage industriel notamment hors sol.
Les prairies humides, du fait d’une exploitation rendue difficile par les périodes d’inondation et le

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sol peu portant, ont aussi fortement régressé. Beaucoup d’entre elles ont été drainées afin de
faciliter l’accès aux engins agricoles, favorisant l’exploitation mais entraînant dans le même temps
des modifications importantes dans la structure des sols, et dans la composition floristique. De plus
en plus d’espèces banales apparaissent au détriment d’espèces rares et remarquables (Leroux et al.,
2008). En raison de la difficulté à les exploiter, les prairies humides subsistantes sont peu à peu
abandonnées par la profession agricole, malgré les aides mises en place par la France et l'Europe
comme les Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEC). Ces mesures ont pour but de
favoriser les exploitations agricoles respectueuses de l’environnement, et notamment dans les
milieux sensibles et remarquables comme les zones humides (www.agriculture.gouv.fr/maec).

L’agriculture en Normandie est en forte mutation, avec une diminution de presque la moitié des
exploitations agricoles entre 2000 et 2016 selon des estimations (Agreste, 2017), due aux fusions
des exploitations. Entre 2000 et 2010, la Normandie a perdu 3,8 % de la SAU, ce qui s’explique par
l’urbanisation et la déprise agricole. Cependant, elle reste tout de même parmi les 3 régions les plus
agricoles de France avec 70 % de sols agricoles (Agreste, 2015). Les prairies permanentes couvrent
en France un tiers de la surface agricole utile (SAU), ce qui représente une surface d'environ 10
millions d'hectares (Agreste, 2014, Puydarrieux & Devaux, 2013).
Les prairies permanentes en Normandie ont commencé à se développer à la fin du 17ème siècle, et
même avant dans le Pays d’Auge et la Bassin de Sainte Mère Eglise (Brunet et al., 1995). Avant
cela, la région était dominée par des cultures. Ce n'est qu'après la première guerre mondiale que les
prairies permanentes se sont véritablement développées (Leconte et al., 2004). Elles occupent
aujourd’hui une part importante du territoire agricole en Normandie d’environ 30 %, contre 21 % en
France (Agreste, 2014), malgré une recrudescence des cultures fourragères, avec l’arrivée du maïs
d’ensilage dans les années 1970.
Les prairies normandes ont évolué d'une manière différente de celles des autres régions françaises
durant les cinquante dernières années, la révolution verte n'a pas eu le même impact à cause du
retard technique dans cette région (Leconte et al., 2004). Les prairies permanentes sont restées
majoritaires bien que les prairies temporaires aient tout de même doublé leur superficie en
Normandie dès la fin du XXème siècle (Brunet et al., 1995).
Beaucoup d’agriculteurs ont conservé en Normandie une gestion extensive de ces prairies
notamment grâce à une faible fertilisation ou une récolte tardive des foins (Brunet et al., 1995).
Malgré une intensification de l’élevage, avec l’ensilage maïs notamment, les pratiques intensives ne
sont plus aujourd’hui vues comme les plus performantes économiquement. Cette tradition, gardée
en Normandie, est maintenant vue comme un atout pour la préservation de la biodiversité, un milieu

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moins dégradé, source également d'une plus haute qualité des produits laitiers et carnés dérivés
(Leconte et al., 2004).

I.3. Objectifs et missions du stage
Mon stage consiste à étudier les compromis entre services écosystémiques rendus par les prairies
permanentes de Normandie, et plus particulièrement par les prairies localisées dans les territoires de
deux Parcs Naturels Régionaux (PNR) de Normandie, le PNR de Normandie Maine (NM) et le
PNR des Marais du Cotentin et du Bessin (MCB). Je me concentre principalement sur i) la
biodiversité végétale comme service de support, ii) le stockage du carbone en tant que service de
régulation, iii) la valeur fourragère pour le service de fourniture et enfin iv) la perception des
prairies comme service culturel. L’évaluation des trois premiers services a été réalisée grâce aux
données obtenues dans le cadre de trois programmes de recherches :
- le projet « La Plante : Pilote de la capture et du transfert de Carbone vers le sol des prairies de
plaine » (P²C), financé par l’ADEME, se déroulant sur trois sites pédoclimatiques contrastés à
savoir le PNR Normandie Maine (PNR NM), le PNR de Lorraine et le site expérimental INRA de
Theix en Auvergne. Pour ce projet, je n’ai utilisé que les données concernant la Normandie dans le
PNR NM.
- le projet«value of WOrking Wetlands » (WOW), financé par Interreg IVa transmanche, concerne
les prairies humides de plusieurs sites français et anglais. Dans le cadre de ce stage je me baserai
seulement sur les prairies humides situées dans le PNR MCB.
- le projet AgriZH « Agriculture et Zones Humides : équilibre entre services écosystémiques dans
les marais du Cotentin », financé par le FEADER, concerne des prairies du PNR des marais du
Cotentin et du Bessin (PNRMCB), comme le projet WOW.
Pour les programmes P²C et WOW, la phase de terrain s’est déroulée avant la période de mon stage,
je n’ai pas pu y participer mais j’ai eu accès aux jeux de données de ces programmes. En revanche
le programme AgriZH a démarré fin 2016, ce qui m’a permis de participer à la première phase de
terrain. L’évaluation des services écosystémiques et leur comparaison pour les différents sites
d’étude contribueront à la création d’une typologie des prairies Normandes en fonction des services
étudiés.
La phase du terrain du programme AgriZH s’est déroulée en juin-juillet, l’ensemble des résultats
n’a donc pas été disponible avant la fin du stage. J’ai donc pour ce travail analysé les données des
deux autres programmes (P²C et WOW). Les phases de terrain pour ces trois programmes sont
cependant très analogues.
Pour l’étude des services culturels, j’ai pu réaliser une enquête de type questionnaire afin de rendre

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compte de la perception des prairies par deux types d'acteurs : la population locale et les touristes.
Cette étude a pour objectif de comprendre et mettre en évidence les différences entre les points de
vue. La perception de chacun est importante à comprendre pour que la valorisation des prairies soit
la plus efficace possible auprès du plus grand nombre.
J’ai aussi pu contribuer à l’évaluation de la valeur patrimoniale végétale des prairies normandes.
J’ai réalisé une première liste d’habitats rares et menacés des prairies de Basse-Normandie, mais
aussi une liste des taxons prairiaux rares et menacées de Basse-Normandie. J’ai pu réaliser ce travail
avec l’aide du Conservatoire de Botanique National de Brest (CBNB), antenne Basse-Normandie.
Les données de ce travail étant en cours dans le but de réaliser une cartographie à partir de ces deux
listes, je ne présenterais pas cette mission dans mes résultats. Les listes sont néanmoins citées en
annexes.

II. Matériels et méthodes

II.1. Les programmes de recherche

II.1.1. Programme WOW

Le programme Interreg IVa transmanche «value of WOrking Wetlands » (WOW) (2013-2015) visait
à promouvoir la coopération entre les différents acteurs autour de la problématique de préservation
et de gestion des marais se situant de part et d’autre de la Manche et notamment dans le territoire du
PNR des Marais du Cotentin et du Bessin (PNR MCB). Dix partenaires au total ont été associés à ce
programme dont 5 partenaires français : l'Institution d’Aménagement de la Vilaine, le Syndicat
Mixte Baie de Somme Grand Littoral Picard, la Chambre d’Agriculture de la Somme, le Parc
Naturel Régional des Marais du Cotentin et du Bessin, l'Université de Caen Normandie ; ainsi que 5
partenaires anglais : Somerset County Council (chef de file), Somerset Wildlife Trust, Devon
Wildlife Trust, Royal Society for Protection of Birds et Farming et Wildlife Advisory Group.

Ce programme a eu pour but d’identifier des solutions durables pour la conservation des prairies de
marais à travers une gestion agricole extensive. Ceci s’est traduit par une amélioration des
connaissances sur les pratiques de gestion qui permettent de concilier la rentabilité de l’exploitation
agricole avec les services écosystémiques d’un milieu, ainsi que par la sensibilisation sur ce sujet
auprès des agriculteurs.

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II.1.2. Programme P²C
Le second programme, P²C « La Plante : Pilote de la capture et du transfert de C vers le sol des
prairies de plaine » (2015-2018), se focalise sur un service écosystémique en particulier qui est le
stockage du C dans les prairies. Le projet a été créé suite à un appel à projet REACCTIF 2
(REcherche sur l'Atténuation du Changement ClimaTique par l'agrIculture et la Forêt) débuté en
2013, de l’ADEME. Au total, six partenaires sont associés à ce programme : l'Université de Caen
Normandie, le PNR NM, le PNR de Lorraine, l'Université de Lorraine, l'Institut de l’Élevage et
l'Unité de Recherche sur l'Ecosystème Prairial (UREP) de l'INRA de Clermont-Ferrand. Le porteur
du projet est Annette Bertrand de l'UMR EVA.
Ce programme se fixe trois objectifs principaux, le premier étant d'évaluer le stockage du Carbone
dans des sites pédoclimatiques différents avec des pratiques de gestion différentes (documentées
grâce à une enquête agricole). En effet, les zones d'études se trouvent sur deux PNR : le PNR de
Normandie-Maine et le PNR de Lorraine, ainsi que la station expérimentale INRA (ACBB SOERE)
de Theix en Auvergne. Le second objectif est d'identifier les facteurs de modulation (composition
floristique, fonctionnelle, historique, mode de gestion…) du stock et des capacités du transfert du
Carbone. Le dernier objectif est d'identifier des indicateurs (fonctionnels, floristiques ou
pédologiques) de stockage et de transfert de C. Le programme P 2C concerne une zone géographique
large mais je n’utiliserai que les données obtenues au niveau de la Normandie dans le PNR
Normandie Maine.

II.1.3. Programme AgriZH

Le dernier programme sur lequel je travaille est le programme – FEADER AgriZH (Agriculture et
Zones Humides : équilibre entre services écosystémiques dans les marais du Cotentin) (2016-2019).
Il se concentre sur la valorisation des pratiques agricoles pour la préservation des marais,
notamment l'élevage. Le maintien de cette activité bénéficie aux prairies et aux services qu'elles
rendent. Ce programme, porté par Servane Lemauviel-Lavenant, a débuté en 2016 suite à un appel à
projet FEADER. 3 partenaires collaborent à ce programme : l'Université de Caen Normandie, le
PNRMCB et la Chambre d'Agriculture de la Manche. Le but est d'analyser les services
écosystémiques rendus d'un point de vue écologique, économique et social. Pour cela, la quantité
ainsi que la qualité du fourrage produit (incluant la quantification des micronutriments), la
composition et biodiversité floristique et enfin la séquestration du C sont mesurés. Une démarche de
concertation entre les différents acteurs, notamment les éleveurs, les professionnels de la filière
bovine, les élus et les acteurs impliqués dans la protection de la nature est réalisée. C’est pour ce
programme de recherche que j’ai pu contribuer aux phases de terrain et d’analyses.

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II.2. Présentation des zones d’études

      Figure 2: Carte représentant les Parcs Naturels Régionaux de Normandie, comprenant
                       notamment les PNR NM et MCB (PNR MCB, 2010).

II.2. 1. Le PNR des Marais du Cotentin et du Bessin

La zone d'étude pour le programme AgriZH est le territoire du PNR MCB se trouvant dans la région
Normandie, entre les départements de la Manche et du Calvados (fig. 2). Ce PNR a été classé par
arrêté ministériel le 14 mai 1991, suivi par deux nouvelles chartes, une en 1998 (période 1998-
2005) et une en 2010 (période 2010-2022) par un nouveau décret ministériel (charte 2010-2022,
PNRMCB).
Le territoire du parc est identifié au titre de la convention RAMSAR (39 000 ha terrestres et
maritimes) et des directives oiseaux et habitats de Natura 2000 (33 000 ha classées en Natura 2000),
(PNRMCB, 2010). Son territoire accueille 3 Réserves Naturelles Nationales (le Marais de la
Sangsurière et de l'Adriennerie, le Marais de Beauguillot et la Tourbière de Mathon) ainsi qu’une
Réserve Naturelle Régionale (Marais de la Taute).

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Le Parc représente un espace de 148 000 hectares (charte PNRMCB, 2010), comprenant 154
communes. Les zones humides comme les marais et les tourbières occupent 39 000 ha du Parc. La
biodiversité y est riche, abritant un grand nombre d'espèces faunistiques ou floristiques,
patrimoniales au niveau national (13 espèces végétales protégées nationalement comme Drosera
anglica dont le parc abrite la dernière station actuelle du Massif Armoricain ; et la deuxième
population nationale de phoque veau-marin) mais aussi international (comme la cigogne blanche, le
vanneau huppé et le courlis cendrés, espèces toutes trois nicheuses au statut européen défavorable ;
et pour la présence de 9 espèces de Chiroptères dont 6 inscrites à la directive habitat).
C’est un parc qui est principalement bocager hors de la zone de marais ; l'agriculture possède une
place primordiale dans la préservation et la gestion des espèces et habitats, et contribue fortement à
la richesse culturelle patrimoniale et aux ressources économiques de la région. En effet, 73% du
Parc est agricole, et spécialisé en particulier dans la production laitière (zone AOC réputée d'Isigny
Ste Mère). Au total, 1027 exploitations agricoles sont en activité sur le Parc. Le maintien des
pratiques agricoles extensives ainsi qu'une gestion adéquate de l'eau pour la préservation des
espèces sont indispensables pour la sauvegarde du milieu, notamment grâce aux aides comme les
MAEC. L'ensemble des activités est donc à prendre en compte pour le maintien et le
développement du Parc, que ce soit d'un point de vue écologique, économique ou social
(http://ww.parc-cotentin-bessin.fr/).

II.2.2. Le PNR de Normandie Maine

Ce parc a été créé le 23 octobre 1975. Après deux premières chartes, il a été re-labellisé avec un
nouveau décret pour la période 2008-2020. Il couvre actuellement une superficie totale de 262 248
hectares, sur 169 communes de quatre départements : l’Orne, la Manche, la Mayenne et la Sarthe.
Le parc se situe entre deux régions : la Normandie et les Pays de la Loire (fig. 2). En 1999, la
population totale s’élevait à 91 449 habitants (Charte PNRNM, 2008). Ce parc a la particularité,
comme le PNRMCB de se trouver sur la frontière géologique entre le Bassin parisien et le Massif
armoricain, même si ce dernier occupe le plus grand territoire.
Le PNRNM comprend 17 sites Natura 2000 couvrant plus de 25 000 ha. Il possède également sur
son territoire une Réserve Naturelle Régionale (RNR) orientée biodiversité : la clairière de
Bresolette, ainsi qu'une RNR géologique multi-sites. Les forêts et bois couvrent 25% de la
superficie du parc. Le parc est connu comme abritant des populations encore importante de mulettes
perlières (bénéficiant d’un programme européen, LIFE) et d'écrevisses à pied blanc (espèce
protégée, classée « vulnérable » en France) et pour ses populations de chiroptères.
L’activité agricole occupe aujourd’hui encore 64 % du territoire (soit environ 164 000 ha de

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surface), elle est donc au cœur des thématiques de préservation du territoire et patrimoine. Malgré
cette domination marquée de l’agriculture, celle-ci a néanmoins connu une forte déprise avec une
forte diminution du nombre d’exploitations. La SAU (Surface Agricole Utile) a diminué d’environ
200 000 ha entre 1979 et 2010 et la population d’actifs agricoles a diminué de 65 % durant cette
période. Le PNR NM a donc pour objectif de promouvoir l’activité agricole sur le territoire et
notamment de promouvoir les activités respectueuses du territoire. Son second objectif est de
trouver un équilibre entre la préservation de la biodiversité et les patrimoines culturels et socio-
économiques du territoire. Enfin, il a pour but d’informer, former et responsabiliser le grand public
et certains acteurs (comme les agriculteurs, les élus...) pour une gestion durable du milieu (Rapport
d’activité 2015) (http://www.parc-naturel-normandie-maine.fr/).

II.3. Protocole de terrain
Ce protocole expose les méthodes utilisées sur le terrain dans le cadre du projet AgriZH, auquel j’ai
pu participer. Ces méthodes sont analogues à celles utilisées pour les programmes de recherches
P2C et WOW pour lesquels la phase de terrain et d'analyses en laboratoire ont été réalisées avant la
période de mon stage, à savoir en 2014-2015 pour WOW et en 2016 pour P2C. C’est pourquoi par
la suite, j’utiliserai les données de ces deux autres programmes de recherches.
   •   Choix des parcelles pour AgriZH :
Les parcelles ont été choisies avec la Chambre d’Agriculture Régionale de la Manche et le PNR
MCB grâce tout d’abord à une enquête agricole réalisée par le PNR. Cette enquête avait pour but de
connaître les pratiques de gestion des parcelles et d’identifier les agriculteurs qui accepteraient que
des prélèvements soient effectués sur leurs parcelles. Seules des parcelles où sont réalisées de la
fauche tardive (après le 25 juillet) sur un sol tourbeux ont été retenues.
Un panel d’agriculteurs a été sélectionné après l’enquête et nous avons pu visiter et choisir parmi
les différents sites proposés. Afin de constituer un gradient d’humidité entre les sites, cinq sites ont
été choisis correspondant aux marais du Gravier (le moins humide), de Cap et Prés Rotz (le plus
humide humide), St-Hilaire, Mesnil et Rivage, trois marais où le sol est qualifié « d'intermédiaire »
avec toutefois différents degrés d'humidité. Pour chaque marais, deux parcelles situées dans des
zones faciles d'accès et aisément repérables sur carte ou vue aérienne ont été sélectionnés, l'étude se
déroulant sur deux années consécutives (fig. 3).

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Figure 3 : Emplacement des parcelles sélectionnées pour le projet
                            AgriZH, au sein du PNR MCB.

   •   Choix des parcelles pour les projets WOW et P²C :
Le projet WOW avait utilisé un panel plus large des prairies humides du PNR MCB qui comprenait
à la fois des prairies tourbeuses et des prairies minérales et pour ces deux modalités, des prairies
fauchées ou pâturées. Enfin, pour le projet P²C, ce sont des parcelles de prairies mésophiles
fauchées qui ont été retenues dans le territoire du PNR NM. Néanmoins, certaines des prairies
fauchées subissent un pâturage de regains.

II.3.1. Relevés de végétations

Après avoir choisi les parcelles, des relevés de végétations ont pu être réalisés durant la période
allant de mi-juin jusqu’au 3 juillet. Au sein des 10 parcelles, des stations ont été délimitées par un
carré de 20m de diagonale placé dans une zone floristique homogène de la parcelle. 5 quadrats de
1m² ont été placés dans les 4 coins du carré et un au centre de celui-ci. Dans ces carrés, des relevés
de végétation ont été réalisés par l’estimation du pourcentage de recouvrement de chaque espèce
(fig. 4). C’est à partir de ce pourcentage recouvrement au sol par différentes espèces qu’est calculé
tout d’abord l’indice de Shannon (H’) pour chacune des parcelles. Un indice d’équitabilité (E) est
ensuite calculé à partir de cet indice H’ et de la richesse spécifique. En l’associant à l’équitabilité,
l’indice de Shannon permet de se rendre compte de la diversité spécifique d’une parcelle.

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Figure 4: Schéma du dispositif utilisé lors
                             du projet AgriZH pour les relevés de
                             végétation. Les carrés jaunes représentant
                             des quadrats de 1m².

Des prélèvements de végétation ont été réalisés pour évaluer la valeur fourragère des prairies juste
avant que les fauches ne soient faites par les agriculteurs. Ceux-ci se sont tous engagés à réaliser la
fauche tardivement (fin juillet), en touchant les MAEC, afin de favoriser la biodiversité sur leurs
parcelles (fig. 5). Sur chacune des 10 parcelles, 3 prélèvements de biomasse végétale ont été
effectués dans des carrés de 50 sur 50 cm et de 5cm de hauteur selon la méthode de l’anneau de de
Vries. Le fourrage coupé est mis en sac micro-perforé puis placé à l’étuve à 30°C pendant au moins
48h afin d'obtenir un séchage homogène pour tous les échantillons, mimant un foin « ventilé ».

Les analyses de la valeur fourragère sont effectuées par le Laboratoire d’Analyse NOrmand
(LANO). Parmi les indices de qualité fourragère fournis par ce laboratoire, j’ai utilisé : la teneur en
matière azotée totale (MAT), exprimée en g/kg, et la digestibilité à la pepsine cellulase (DCS) qui
est la digestibilité enzymatique de la matière sèche exprimée en pourcentage.

II.3.2. Étude et prélèvement du sol

Des prélèvements de sol ont été effectués sur les parcelles. 4 prélèvements sont effectués sur chaque
parcelle, avec des carottes de 0 à 15 cm puis de 15-30 cm de profondeur pour chaque prélèvement
pour le programme AgriZH (fig. 5). Les carottes de sol pour le programme P 2C vont de 0 à 10cm
puis de 10 à 30cm de profondeur. Celles pour le programme WOW elles vont de 0 à 20cm puis de
20 à 40cm de profondeur. D’après le protocole de Klingenfu et al. (2014), les carottes de sol ont
ensuite été triées en laboratoire pour n’avoir que du sol sans les matières vivantes (racines). Ce sol
est mis à l’étuve à 60°C pendant 48h puis environ 8h à 110°C pour retirer toute l’eau du sol. Une
fois sec, le sol est passé au four à moufle à 550°C pendant 8h. Le pourcentage de MO est obtenu en
calculant la perte de masse après le passage au four à moufle.

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