DOSSIER : La Qualité de Vie au Travail post COVID - Drogue : le grand débat n'aura pas lieu - Adixio
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DOSSIER : La Qualité de Vie au Travail post COVID pages 12-13 Actualité Drogue : le grand débat n'aura pas lieu n°186 pages 16-17 Action Le projet PACTS : prévention en milieux spécifiques
SOMMAIRE Dossier : Pages 4-7 La Qualité de Vie au Travail post-COVID Interview : Pages 8-9 Pierre Poloméni : « Les salariés ont décompensé en consommant des produits psychoactifs » Reportage : Page 10 A la clinique Marmottan : des patients hors-normes Billet : Page 11 Les espaces sans tabac Actualité : Pages 12-13 Drogue : le grand débat n'aura pas lieu Zoom : Pages 14-15 Le CBD, un produit tendance ? Action : Pages 16-17 Le projet PACTS : prévention en milieux spécifiques Nouveautés : Pages 18-19 Les supports ADIXIO Contraddiction ADIXIO 82 bis, rue Blomet 75015 Paris Tél. 01 53 79 61 61 - Fax 01 45 63 98 41 www.adixio.fr - contact@adixio.fr Directeur de la publication : Christian Trémoyet Rédacteur en chef : Christian Andréo Maquette : Agence ZAKKA Mise en page / iconographie : Bérangère Sintes Ont collaboré à ce numéro : Christian Andréo, Bérangère Sintes, Agathe Brenguier, Aurélie Verny Journalistes : Agnès Morel Crédit photos : ©ADIXIO, ©Istock Impression : Imprimerie Pierre Trollé Chemin de la Houssoye - 62870 Buire-le-Sec N°ISSN EN LIGNE ADIXIO : 2728-0659 Parution Novembre 2021 Dépôt légal : à parution Tirage : 10 000 exemplaires Avec le soutien du COGAS du Groupe La Poste et du CCUES d’Orange. 2
ÉDITO De nouveaux horizons avec le Projet PACTS Après cette longue période de crise sanitaire, nous revenons peu à peu à un C’est le cas des personnes en situation de handicap, de personnels intérimaires mode de vie normal. Il en va de même au travail. Depuis le 1er septembre, ou encore des personnes en rupture avec le milieu professionnel. Nous avons l'obligation de rester a minima chez soi pour télétravailler est levée. Ces ainsi constaté qu'il y a plus de risques de développer certaines consommations périodes de confinement, combinées à un changement des comportements dans des environnements de travail avec des caractéristiques particulières. dans la sphère professionnelle observé depuis quelques années déjà, Il y a une véritable nécessité d’adaptation du discours et des outils… rédéfinissent la notion de Qualité de Vie au Travail. C'est justement l'enjeu du dossier de cette édition de Contraddiction : la Qualité de Vie au Travail C'est ainsi qu'est né le projet PACTS qui s'articule autour de cet objectif post COVID (cf pages 4 à 7). principal : développer des actions de sensibilisation et d'accompagnement en milieu de travail qui prennent en considération les populations en Toujours dans cette réflexion de promotion du bien-être et de l'inclusion situation de vulnérabilité dans des situations de travail spécifiques ainsi au travail, nous avons lancé avec ADIXIO un nouveau projet. Fin 2020, que les professionnel.le.s les entourant. avec l'APF, le FASTT et la FNATH, nous avons identifié que dans le « monde du travail », un certain type de public pouvait être éloigné des actions de C'est la première fois qu'ADIXIO remporte un appel à projets du Fonds de sensibilisation et de prévention. lutte contre les Addictions. Cela représente une véritable opportunité pour l'association et nous en sommes très fier.e.s ! Le rapport de la Cour des comptes de juin 2016 a demandé aux pouvoirs publics de faire de la lutte contre les consommations nocives d’alcool une priorité de l’action publique. Elle a notamment préconisé la suppression Le Président, de l’autorisation d’introduction et de consommation d’alcool sur le lieu de Christian Trémoyet travail et a recommandé de renforcer l’implication des personnels de santé dans le repérage précoce des consommateur.rice.s à risques. 3
DOSSIER La Qualité de Vie au Travail post-COVID En impactant le moral des travailleurs, la pandémie a souligné l’importance pour les entreprises de s'occuper de la santé et le bien- être de leurs collaborateur.rice.s, ce qu’on appelle la Qualité de Vie au Travail (QVT). Une considération primordiale au moment du retour au bureau / lieu de travail. Qu'est-ce que la QVT ? ADIXIO et la QVT : Selon l'Accord National Interprofessionnel de juin 2013, la perception de la « ADIXIO intervient régulièrement dans le cadre d’événements comme la QVT est déterminée par trois grands critères : semaine de la QVT organisée du 14 au 18 juin dernier », explique Vitaline • les conditions d'emploi et de travail (salaire, nature du contrat de travail, PIGEON, Responsable animation réseau. Ces événements se composent de espace de travail, temps de transport) ; différents ateliers autour de la QVT, comme la prévention des troubles musculo • le contenu du travail (rythme, sentiment d'utilité, utilisation des squelettiques (TMS) ou des accidents du travail (conduite de véhicules…) compétences, progrès) ; L’occasion d’aborder également la question des risques psycho-sociaux et des • la capacité d'expression et d'action (travail en équipe, soutien conduites addictives. managérial, dialogue sur le travail et sa qualité). Coordinatrice ADIXIO Pays de la Loire et Bretagne, Aurélie VERNY intervient dans la Sarthe avec son binôme Yannick COIRIER dans des centres courrier de « La théorie de la symétrie de l’attention » La Poste comme ceux de La Suze, le Lude, Loué, etc. « Le temps d’échange se fait en petit groupe (6 personnes), ce qui permet de libérer la parole plus Concrètement, des salarié.e.s bien traité.e.s auront une conscience facilement autour du tabac, des médicaments, de l’alcool… et des difficultés professionelle accrue vis-à-vis de leurs client.e.s et leurs partenaires ! Cette rencontrées dans une période un très anxyogène », explique -t-elle. « Avec théorie, qui trouve son origine au sein du groupe Accor au début des années les confinements successifs, le télétravail qui a été mis en place pour les 2000, pose le principe suivant : la qualité de la relation entre une entreprise cadres ou bien l’angoisse ressentie par les personnes qui ont continué de et ses client.e.s est symétrique de la qualité de la relation de cette entreprise travailler au contact du public, comme les facteurs ou les chargés de clientèle, avec l’ensemble de ses collaborateur.rice.s. nous savons que le risque de consommer des substances psychoactives a augmenté. L’important, c’est de pouvoir en parler et d’identifier les situations Améliorer "l’expérience collaborateur.rice" permet donc d’améliorer à risques le plus précocement », poursuit-elle. "l’expérience client.e". Il existe même des baromètres classant les entreprises, en fonction de la bienveillance qu’elles accordent à leurs collaborateurs ! Exemples : le site Glassdoor permet aux employé.e.s d'une entreprise d'évaluer leur environnement de travail de manière anonyme, ou encore le label Great place to work, qui associe enquêtes de satisfaction des salarié.e.s et audit des pratiques managériales. 4
Pandémie et QVT : la nécessité de prendre soin des Un dialogue social qui apparait comme un véritable levier de gestion de collaborateur.rice.s crise : RH, managers, salarié.e.s… les acteur.rice.s de l’entreprise sont invité.e.s à se mettre autour d’une table et travailler ensemble « dans une Depuis mi-juin, les salariés reprennent petit à petit le chemin des bureaux. démarche de co-construction ». La promesse du retour des « jours heureux » ? Pas si sûr : la crise sanitaire a amplifié le mal-être au travail. Associer les salarié.e.s aux décisions peut contribuer à renforcer leur sentiment d’appartenance à l’entreprise à un moment idéal : « après des mois à avoir Soignant.e.s, livreur.se.s, éboueur.se.s, vendeur.se.s, caissier.e.s de travaillé seuls chez eux, beaucoup de salarié.e.s ont besoin de retrouver supermarché… Les salarié.e.s qui étaient en première ligne pendant du sens à leur travail » confirme la sociologue du travail Danièle LINHART les confinements, ont été confronté.e.s à un contexte particulièrement (cf. témoignage page 7). anxiogène, ce qui a bien entendu pu avoir des conséquences. Mais pas seulement : toutes les études montrent une dégradation de la santé mentale Ecoute, considération, autonomie… les demandes sont importantes. Alors des salarié.e.s de façon globale. D’après le dernier baromètre établi par le que la pandémie a rappelé l’importance de prendre soin de l’autre, est-ce que cabinet Empreinte humaine, spécialisé dans la Qualité de Vie au Travail, 45% les employeur.se.s partiront dans cette direction ? des salarié.e.s étaient, avant l’été, en détresse psychologique, notamment les jeunes, les femmes et les managers. « S’il est encore trop tôt pour se prononcer », observe Jérôme BALLARIN, le président de l’Observatoire de la qualité de vie au travail, « les relations Conséquence d'un télétravail, qui a été généralisé dans des conditions pas managériales ont déjà évolué dans le bon sens : avec le télétravail, la toujours optimales : équipements défaillants, appartements exigus, famille relation entre les managers et leurs équipes est passé d’un management nombreuse… sans compter un contrôle parfois pesant et la tendance des de contrôle à un management de confiance, basé sur la confiance et la salarié.e.s à travailler davantage - malgré la loi de déconnexion de 2017. responsabilisation ». Arnaud, 45 ans, chef de projet pour un sous-traitant automobile en région parisienne, ne compte plus ses jeunes collègues arrêtés pour stress, Plus prosaïquement, la QVT, et notamment la prévention des risques, dépression, burn-out : « Vivement le retour au bureau », espère-t-il. s’avère stratégique pour la performance de l’entreprise : pour rebondir économiquement, mieux vaut des équipes motivées, heureuses, en bonne Revenir, oui ! Mais comment ? Concrètement, il ne s’agit donc pas seulement santé et donc efficaces. Le bien-être va de pair avec la productivité. d’apporter de la convivialité dans les locaux. Améliorer la QVT nécessite de se pencher sur les conditions et l’organisation du travail. A.M Une tâche que les entreprises confient spontanément au service des Ressources humaines – avec la nomination d’un.e « responsable QVT », pour négocier avec les cadres et les représentant.e.s du personnel présent.e.s au CSE (Comité social et économique). Objectif ? Identifier les problèmes existants dans les différents services (absentéisme, turn-over…) puis recommander des actions correctives, avec des actions de formation, de soutien ou des interventions d’experts, etc. Or, pour réussir les négociations, « il faut impliquer toutes les parties prenantes dans le dialogue social » avertit l’Agence nationale des conditions de travail (Anact), un organisme qui relève du ministère du Travail. SUITE DU DOSSIER 5
SUITE DU DOSSIER La Qualité de Vie au Travail post-COVID « Des salariés qui sont en grande souffrance, j'en vois tous les jours » ADIXIO : Comment accompagnez-vous les entreprises ? Pierre-Eric SUTTER : Cela tient en 3 points : cadrer, diagnostiquer et agir. Avant de poser un diagnostic, il faut évaluer le contexte : quelles sont les caractéristiques des personnes et quels sont leurs facteurs de risque ? Vient ensuite le diagnostic, que l’on établit selon une approche à la fois quantitative (questionnaires scientifiques…) et qualitative (rencontres…). Dernière étape, le plan d’actions à préconiser à l’entreprise. Quelles solutions peut-on prescrire : réduire le télétravail ? mieux former les managers ? mieux répartir la charge de travail ? Les employeurs sont astreints à une obligation de moyens, mais également de résultats : zéro personne malade à cause de son travail. Pierre-Eric SUTTER ADIXIO : Est-ce que retourner au bureau sera bénéfique ? Psychologue et préventeur en Pierre-Eric SUTTER : C’est variable. Ceux qui souffrent d’isolement découvrent santé du travail, fondateur du que le collectif de travail leur apportait un soutien moral qui les aidait à cabinet Mars-Lab, un cabinet être bien au travail. Cela peut redevenir un facteur de protection, sauf si l’employeur doit, pour faire des économies, supprimer des bureaux ou des de conseil en management postes. D’autres salariés au contraire ont découvert les joies de télétravailler de la performance et en et trainent un peu des pieds… tout dépend aussi de leurs conditions de prévention des risques télétravail. professionnels. ADIXIO : Les employeurs sont-ils conscients de cette souffrance accumulée ? Pierre-Eric SUTTER : Beaucoup n’ont pas encore pris la mesure de ce qui s’était joué, continuent de mettre la pression sur leurs collaborateurs ou sont contraints, pour survivre à la crise, d’ouvrir un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi). Mais attention, le risque ultime de la dépression ou du burn-out, c’est le suicide. Et des salariés qui sont en grande souffrance, j’en vois tous les jours. 6
« Le travail est un enjeu à repenser collectivement » ADIXIO : Les salariés vont mal… Danièle LINHART : Oui, les salariés ont été malmenés mais leur souffrance ne provient pas que des angoisses dues à la pandémie… Ce qui est néfaste, c’est l’injection contradictoire. D’un côté, on est encouragé à s’engager à fond dans son travail, à montrer toutes ses qualités, etc. et de l’autre, on reste prisonnier d’une organisation taylorienne, avec, même pour les cadres, des contraintes permanentes en termes de procédures à suivre et de reporting à faire. Ce qui crée des tensions. ADIXIO : De quoi les salariés ont-ils besoin après le COVID ? Danièle LINHART : Ils ont besoin de retrouver du sens à leur travail. A la mise en Danièle LINHART place du télétravail, on a pu penser que cela leur était bénéfique, avec le sentiment Sociologue du travail et de gagner du temps et de l’autonomie, mais les contraintes managériales n’ont chercheuse émérite au CNRS. pas changé et beaucoup se sont trouvés isolés et mal. Est-ce qu’ils iront mieux en reprenant le chemin du bureau ? Non, ils ont besoin de savoir à quoi ils servent et cette réponse doit se faire en les associant : ils ont besoin de donner leur point de vue sur le contenu, les modalités et la finalité de leur travail. ADIXIO : Les employeurs sont-ils conscients de ces nouveaux enjeux ? ADIXIO : Que peuvent faire les entreprises ? Danièle LINHART : Purifier l’air des bureaux, poser des Plexiglass, faire Danièle LINHART : Il y a des consultants, mais on ne peut pas tout en attendre. respecter les gestes barrières… En cette rentrée les employeurs s’empressent Les solutions doivent venir aussi des salariés eux-mêmes, qui pourraient se de montrer qu’ils prennent soin de leurs salariés et les protègent, mais ce mettre ensemble pour se faire entendre et s’épauler, en formant des collectifs, n’est pas cela qui permet d’améliorer la qualité de vie au travail… Ni le fait de au lieu de vivre la pression individuellement. Ils engagent leur énergie, leur nommer des « happy officers », de proposer des viennoiseries ou des séances temps, leurs compétences dans l’entreprise, il faudrait qu’ils soient reconnus, de méditation ! Pour prendre en compte les besoins des salariés, il faudrait impliqués et consultés, et enfin, que leurs propositions soient expérimentées : revoir l’organisation et la définition du travail, organisées jusque-là autour de le travail est un enjeu à repenser collectivement. la productivité et de la subordination uniquement. 7
INTERVIEW Pierre POLOMÉNI : « Les salariés ont décompensé en consommant des produits psychoactifs » Après avoir été responsable d’un service d’addictologie dans les hôpitaux universitaires, Pierre POLOMÉNI intervient comme psychiatre- addictologue référent chez Orange. Pierre POLOMÉNI Psychiatre-addictologue chez Orange ADIXIO : Est-ce courant qu’un addictologue travaille en entreprise ? ADIXIO : Cet exemple correspond-il, concrètement, à votre travail ? Pierre POLOMÉNI : Depuis 2014, je travaille une demi-journée à une journée Pierre POLOMÉNI : Oui c’est un travail en plusieurs étapes, que nous déclinons par semaine chez Orange. J’ai été recruté car je suis psychiatre-addictologue, désormais au sein d’Orange. La première consiste à poser, avec le manager, le mais également médecin du travail et familier du monde des entreprises. constat le plus objectif possible, sans se laisser perturber par les « bruits de couloir Orange avait besoin d’un référent pour accompagner les 80 médecins du » : y a t-il eu des absences ? du travail non fait ? des heurts avec les collègues ? travail dans leur pratique et démêler les situations complexes. On m’a par Cela permet d’évaluer, factuellement, les conséquences de la consommation exemple appelé la semaine dernière au sujet d’un collaborateur paranoïaque sur le quotidien. Vient ensuite l’axe médical et social : quels sont les échos du et agressif envers ses collègues. C’est vrai qu’employer un psychiatre- hiérarchique, du médecin du travail, du représentant du personnel, voire de addictologue, c’est assez atypique, mais cela devrait s’accroître à l’avenir : on l’association de patients-experts ? Enfin c’est le temps de choisir la meilleure rencontre en entreprise de plus en plus de situations psychiatriques, liées aux orientation pour le patient, en privilégiant son maintien en emploi : CSAPA addictions, qui perturbent à la fois la personne et son environnement. ? CAARUD ? Equipes de liaison ? Service hospitalier ? Addictologue libéral ? A chaque fois l’écoute du patient est primordiale. ADIXIO : Quelle est votre mission ? Pierre POLOMÉNI : Via la médecine du travail, les entreprises s’occupent de la santé à la fois physique et mentale de leurs salariés, et notamment de leurs addictions. Je pense qu'en me recrutant, Orange a voulu encourager le service de Santé au travail à mettre en place des outils spécifiques, comme le RPIB (Repérage précoce et intervention brève), une procédure de prévention visant à repérer les conduites addictives et entrainer un changement. Je suis également à la disposition des médecins et infirmiers du travail pour échanger autour des substances psychoactives et des possibilités de traitements. Un exemple ? Après notre interview, je vais me pencher sur le cas d’un collaborateur, qui, depuis qu’il est en télétravail, connait de sévères troubles psychiques associés à une consommation d’alcool excessive. Nous aurons un échange au téléphone, pour esquisser des pistes ensemble. 8
« Il n'y a pas beaucoup ADIXIO : Y a-t-il beaucoup ADIXIO : Mais faut-il tout attendre de l’entreprise ? de salariés dépendants ? d'entreprises qui font appel à Pierre POLOMÉNI : Il n’y a pas beaucoup d’entreprises qui font appel à autant Pierre POLOMÉNI : Alcool, de médecins de travail, psychologues, psychiatres…. Mais je ne dirais pas non autant de médecins du travail, tabac, médicaments, plus qu’il faut tout attendre de l’entreprise : je ne le crois pas. Bien sûr, elle opiacés… En entreprise, chez est responsable de la santé de ses salariés, c’est écrit dans le Code du Travail, psychologues, psychiatres » Orange comme ailleurs, c’est mais elle n’est pas la seule, l’Etat a aussi un rôle à jouer - même si les services comme dans la population psychiatriques souffrent beaucoup aujourd’hui… A propos du rôle de chacun, générale : il y a le même volume de personnes ayant des conduites addictives, je voudrais mentionner la part du patient : les moyens mis par l’entreprise à cela près que travailler protège plus de la dépendance qu’être inactif. Mais ne doivent pas oublier que le patient reste au centre et se reposer sur autrui, nous, les médecins, n’en voyons qu’une minorité : on a beau savoir que 8% notamment sur le psychiatre, pourrait faire oublier ses propres capacités à des patients pris en charge en médecine générale le sont pour des problèmes réagir. La mission du psychiatre n’est pas de le soigner malgré lui, mais bien d’alcool… beaucoup de consommateurs ne font pas parler d’eux et restent, de l’accompagner et de l’aider à ouvrir de nouvelles portes. par conséquent, totalement invisibles. Au-delà des moyens mis en œuvre chez Orange, cette proportion ne pourra changer que si l’on accroit, dans ADIXIO : Diriez-vous que le COVID a augmenté les consommations ? notre pays, la sensibilisation et la prévention aux substances psychoactives, en réexpliquant notamment que l’alcool peut apporter du plaisir, mais être Pierre POLOMÉNI : Oui, j’ai reçu en 2021 trois fois plus d’appels de la part également un poison. Plus on le dira clairement, plus cela facilitera l’accès des médecins du travail qu’en 2019. Les conduites addictives se sont accrues des patients aux soins. à cause du contexte du COVID (angoisse, ennui, isolement…), qui s’est rajouté aux problématiques personnelles type dépression. Le télétravail, qui s’est généralisé rapidement, a mis sur la table de nouvelles questions sur la table, ADIXIO : Combien de personnes suivez-vous… et guérissez-vous ? comme l’isolement, l’inconfort des logements, la maltraitance… Toute une série de facteurs qui ont poussé les salariés à décompenser en consommant Pierre POLOMÉNI : Pour avoir une idée, je dirais que l’on a repéré chez Orange des produits psychoactifs, dont beaucoup d’alcool. On a vu aussi des salariés près de 200 personnes qui semblent avoir un problème avec une substance sortis d’une alcoolisation passée recommencer à consommer. Or, côté soins, psychoactive. Est-ce qu’on va les guérir ? C’est une question difficile : vous cela n’a pas été simple : on avait pris des lits pour soigner les malades du savez, j’ai été chef d’un service qui compte 26 lits, j’accueillais en consultation Covid et 20 à 40% des services d‘addictologie ont dû réduire leur activité. plusieurs centaines de personnes par an... et je suis bien incapable de dire combien s’en sortent durablement ! Si on me demandait de sauver 1000 A.M personnes par an de l’alcoolo dépendance, cela n’aurait pas de sens… Mais ce qu’on peut dire, c’est que l’entreprise se situe moins dans une obligation de résultats que de moyens. 9
REPORTAGE A la clinique Marmottan : des patients hors-normes Le centre médical Marmottan, à Paris, qui va fêter son 50ème anniversaire en décembre prochain, n’a pas fermé pendant la crise sanitaire, et depuis cet été, il reçoit beaucoup d’appels d'un nouveau type de patients. Michel HAUTEFEUILLE, psychiatre-addictologue, praticien hospitalier, qui part bientôt à la retraite, a exercé toute sa carrière à Marmottan, après avoir dirigé un service d’addictologie dans le Val d’Oise : « j’avais besoin de retrouver mon métier, sans passer des heures en réunion et Claude Olievenstein m’a entendu », se souvient-il. Aujourd’hui, pas facile de quitter ses patients, qui viennent le consulter pour jeux d’argent, chem sex ou dopage au quotidien, un sujet sur lequel il a travaillé avec l’association Additra : « Il y a 15 ans, je me suis aperçu que de plus en plus de patients prenaient des toxiques pour supporter leur vie Michel HAUTEFEUILLE professionnelle », se souvient-il. Psychiatre-addictologue à la clinique Marmottan, Après le premier confinement de mars 2020, il a d’ailleurs vu revenir d’anciens praticien hospitalier patients, comme cette jeune femme, assistante, qui avait rechuté pendant le télétravail généralisé et recommencé à prendre des dizaines de gélules de caféine pour tenir jusqu’au soir, alors qu’elle avait tout arrêté. Si dans les semaines à venir, il prévoit un afflux de patients sur ce sujet, il se dit confiant : « C’est compliqué, on ne s’arrête pas en une seule fois. On leur montre la route et à eux de la faire ! ». Lui-même a du mal à raccrocher : « La toxicomanie, je n’ai jamais considéré Pour ses 50 ans, Marmottan voit les que c’était désespérant. Avant d’être un problème, la drogue est d’abord choses en grand ! une réponse à une souffrance et les toxicomanes ont une force de vie peu Au programme : commune. Ainsi que des parcours de vie hors-normes ». • Le 3 décembre > colloque à la A.M Cigale de 8h30 à 18h • Les 4 et 5 decembre > portes ouvertes et expositions Pour s'inscrire, c'est juste ici. 10
BILLET Les espaces sans tabac Plages, piscines, parcs, aires de jeux, écoles, hôpitaux, stades… les espaces extérieurs sans tabac sont de plus en plus nombreux : plus de 3700 partout en France, depuis la première plage labellisée en 2012. Pornichet, rentrée scolaire 2021 : après avoir déposé leurs enfants à l’école, Cigarettes : "persona non grata" ? les parents qui voudraient s’allumer une cigarette sont priés de s’éloigner un S’ils introduisent une interdiction qui s’ajoute à celle de ne pas fumer dans peu. Aux clubs de voile et de plage qui ont ouvert la voie se sont ajoutés cette les lieux publics fermés (2008), les espaces sans tabac sont bien acceptés : année douze nouveaux "espaces sans tabac" : écoles, crèches, aires de jeux… le tabac est perçu comme cancérigène- 75 000 décès lui sont imputables Des zones, où l’on est invité.e à ne pas fumer se multiplient grâce à la Ligue chaque année, et, comme polluant –30 milliards de mégots sont jetés nationale contre le cancer. Le rythme s’est ralenti avec la pandémie, mais dans la rue. D’autant que les villes misent moins sur la verbalisation des de nouveaux espaces ont pu être inaugurés et en avril dernier, l’association contrevenant.e.s, que sur la médiation. « Le public a bien accueilli la mise recensait 3 730 espaces labellisés sans tabac dans 48 départements. en place de ces espaces, les parents d’élèves et les directeurs d’école étant même en attente de tels espaces » confirmait sur Radio-France, courant juin, Objectif : dénormaliser la cigarette Amandine FRANÇOIS-GOGUILLON, élue à l’éducation de Caen, qui a labellisé « Il s’agit de changer ce qui, jusque-là, était considéré comme "acceptable". plus de 300 lieux sans tabac. Ce qui contribue à réduire l’entrée dans le tabagisme. Le Centre international Est-ce que l’expérience est concluante ? « Ce que nous voudrions, c’est de recherche sur le cancer l’a démontré : moins le tabac est présent au généraliser à toutes les communes ces espaces sans tabac aux abords des quotidien, moins il y a de risques que les enfants deviennent fumeurs à l’âge lieux ouverts aux enfants : écoles, aires de jeux, piscines… » confie Yana adulte », explique Yana DIMITROVA-LAINE, chargée de mission Prévention à DIMITROVA-LAINÉ. Mais, cette fois ci, « non, par des arrêtés municipaux mais la Ligue. Cela correspond à l’objectif du Programme national de lutte contre par une règlementation nationale ». le tabac : atteindre en 2030 une première génération sans tabac, avec moins A.M de 5% de fumeur.se.s. Pour rappel, près d’un quart des Français.e.s fument quotidiennement, un chiffre qui s’accroit depuis le début de la pandémie. Répartition des espaces sans tabac en France métropolitaine et Corse (Source : http://umap.openstreetmap.fr/fr/map/espaces-sans-tabac_508957#6/46.725/1.165) L’initiative, déjà ancienne dans les pays anglo-saxons - les villes de New York et de Los Angeles ayant été les premières à interdire de fumer en plein air, est plus récente en France et la première plage sans tabac, celle du Centenaire à Nice, a été labellisée en 2012. Depuis, il y a La Rochelle, Strasbourg, Nantes… Des collectivités de tous bords politiques lui ont emboité le pas. C’est l’occasion pour ces villes de montrer qu’elles se soucient de la santé de leurs électeur.rice.s. « Mais il ne s’agit pas seulement de planter un panneau : en contrepartie, la ville s’engage à participer aux actions de lutte contre le cancer (Mois sans Tabac, octobre rose…) et à encourager la sensibilisation des écoliers », poursuit Yana DIMITROVA- LAINÉ. Les chiffres clés 3 730 espaces labellisés sans tabac recensés en avril 2021 Moins de 5% de fumeur.se.s en 2030 vs 25% aujourd'hui 11
ACTUALITÉ Drogue : le grand débat n'aura pas lieu Alors que le pays semblait prêt à un grand débat sur la légalisation encadrée du cannabis récréatif, voilà que le gouvernement fait sourde oreille, en relançant la "guerre à la drogue". Évacuation des crackers au nord de Paris, opérations « coup de poing » pour Mais gare aux malentendus : Emmanuel MACRON avait en fait envoyé fermer des points de deal… A quelques mois de l’élection présidentielle, la un message différent : « À l’inverse de ceux qui prônent la dépénalisation question des dépendances n’est plus abordée, dans le débat public, que sous généralisée, je pense que les stups ont besoin d’un coup de frein, pas d’un l’angle de l’insécurité. coup de publicité. Dire que le haschisch est innocent est plus qu’un mensonge. Sur le plan cognitif, les effets sont désastreux ». Il ne semble plus question, notamment, d’envisager de légaliser le cannabis Depuis, le débat semble avoir disparu des agendas, au grand dam des récréatif, un sujet pourtant ouvert par Emmanuel MACRON pendant la addictologues. Car la situation, elle, ne s’est pas améliorée. Tout en possédant campagne présidentielle de 2017, ce qui avait donné espoir aux acteur.rice.s une législation sur le cannabis parmi les plus répressives en Europe, basée de la réduction des risques. sur la loi de 1970 qui pénalise l’usage des drogues (la sanction peut aller jusqu’à 3750 euros d’amende et un an de prison), la France est de fait, le plus Un espoir nourri par les conclusions, en février, de la consultation citoyenne gros pays consommateur. L’OFDT** totalise ainsi 5 millions d’usager.e.s dans l’année, dont 1,4 million de consommateur.rice.s régulier.e.s. en ligne : plus de 80% des 250 000 répondants s’étaient dits d’accord pour autoriser la consommation et la production dans un cadre régi par la loi. « On sait désormais que la légalisation du cannabis n'est plus un tabou en Une répression qui n’empêche pas les produits de circuler, alimentant France », avait estimé Caroline JANVIER, la députée LREM et rapporteure de insécurité, violence et trafic d’armes dans les cités, malgré la saisie par la Mission d’information parlementaire sur la réglementation des différents les forces de l’ordre l’an dernier de 96 tonnes de résine et d’herbe (source usages du cannabis. OFAST***). Attaqué sur ce bilan par ses opposants de droite et d’extrême-droite, Le Président de la République donnait alors un signe d'ouverture, en Emmanuel MACRON a soudainement multiplié les déplacements sur ce thème annonçant le 19 avril, dans le Figaro, la tenue prochaine d’un « grand débat aux côtés du Premier Ministre Jean CASTEX et du Ministre de l’Intérieur Gérard national sur la consommation de drogue », avec les ministres concerné.e.s, DARMANIN, lequel déclarait fin juin, dans La Voix du Nord son opposition à les élu.e.s, la Mildeca*, quelques jours avant que la Mission parlementaire l’ouverture d’une salle de réduction des risques : « La drogue ne doit pas être ne se prononce début mai pour « une légalisation encadrée qui permette à accompagnée mais combattue ». Quitte à créer de la cacophonie dans son l’Etat de reprendre le contrôle de la production, de la consommation, de la propre camp, le Ministre de la Santé, Olivier VÉRAN, disant au contraire « distribution de cannabis, en contrôlant les substances qui sont vendues ». regarder avec intérêt les pays qui avaient légalisé ». *Mildeca : Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives **OFDT : Observatoire français des drogues et de toxicomanie ***OFAST : Office anti-stupéfiant 12
Avec ce virage sécuritaire, la Santé publique a été oubliée et alors que la Mission parlementaire plaidait pour plus de prévention, La Fédération Addiction les consommateur.rice.s sont désormais marginalisé.e.s. Depuis septembre appelle à une régulation 2000, ils risquent une amende forfaitaire délictuelle de 200 euros, assortie d’une inscription dans le casier judiciaire : 100 000 amendes ont déjà été La Fédération Addiction s’est prononcée en faveur dressées, d’après le ministère de l’Intérieur. Pire, ils sont accusés d’être « d’une « régulation » de la production et de l’usage des complices du trafic de drogue ». « L’idée que dans certains quartiers ce serait substances psychoactives : « La question des drogues ne branché de prendre de la drogue pour que, dans d’autres, on ait des jeunes peut pas s’envisager sous le seul angle de la sanction qui se fassent tuer parce qu’ils la vendent ou surveillent, c’est terminé », du consommateur, il s’agit d’un problème aux origines déclarait ainsi le Président, à Marseille où les règlements de compte ont fait multiples qui demande une approche ferme et engagée 8 morts cet été. articulant éducation, information, accès aux soins et évidemment règles et sanction. La pathologie addictive, quant à elle, est souvent l’expression de vulnérabilités François-Michel LAMBERT, ex-député LREM, auteur d’une proposition de loi familiales, psychologiques ou sociales qui méritent des sur la légalisation encadrée, et membre de la Mission parlementaire a brandi réponses spécifiques. un joint début mai, au sein de l’hémicycle, pour interpeller le gouvernement : Pour « briser » le « tabou », il faut sortir de ces positions « La légalisation, contrôlée par l’État, permettrait outre de garantir au segmentées, caricaturales voir même stimagtisantes consommateur des produits contrôlés, mais également d’assécher les trafics pour des personnes et leur entourage en difficultés avec et de créer des recettes fiscales et des emplois. Elle s’accompagnerait de l’usage de drogues illégales comme légales. Personne ne véritables politiques de prévention en direction des jeunes pour réduire la banalise la consommation de substances psychoactives, consommation et les risques ». et notamment celle d’alcool, c’est pour cette raison que nous continuons de demander une politique de S’il a réussi à interpeller l’opinion publique, le grand débat n’aura sans doute régulation cohérente et ambitieuse. (…) Oui, une pas lieu, du moins pas cette année : entre l’élection présidentielle à venir, nouvelle politique de régulation des drogues est possible, l’agenda législatif déjà chargé, la gestion de la crise sanitaire sans oublier la elle est même indispensable. » future Présidence française du Conseil de l’Union européenne, difficile de voir quand il pourrait se dérouler. A.M Le rapport de l'Assemblée Nationale En mai 2021, la mission d’information relative à la réglementation et à l’impact des différents usages du cannabis se prononce en faveur d’une légalisation encadrée du cannabis et propose de lancer un grand débat national sur ce sujet. Dans son rapport, elle dresse la liste des questions auxquelles le débat public doit répondre : • Quels sont les objectifs de la légalisation ? • Comment encadrer la production ? • Quel modèle de distribution ? L'échec de la prohibition La France fait partie des 7 pays de l’UE qui sont encore dans l’interdit pénal de la consommation de cannabis, mais presque une personne sur deux entre 15 et 64 ans en a fumé au moins une fois dans sa vie, d'après le dernier rapport de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies, publié en 2020. 13
ZOOM Le CBD, un produit tendance ? Thés, tisanes, sucettes, cosmétiques, compléments alimentaires, e-cigarettes… Des centaines de boutiques ont fleuri dans toute la France pour vendre des produits à base de CBD, la molécule non psychotrope du cannabis. Un produit à la vertu relaxante, très tendance. « Avez-vous du mal à vous endormir ? ou êtes- vous plutôt anxieux, en journée ? » Mais qu’en est-il vraiment ? Si l’odeur, la forme des feuilles ou la texture Depuis cet été, la vendeuse de la parapharmacie de Monoprix Meudon (92) des fleurs font immédiatement penser au cannabis « récréatif », le CBD n’est propose tisanes mélangées, huiles alimentaires à mettre sous la langue, cure pas un stupéfiant, puisque les variétés commercialisées ne contiennent que de 60 gélules… à base de cannabidiol ou CBD « Je le conseille aux clients qui très peu de THC (tetrahydrocannabinol) : 0,2% maximum en France selon la sont stressés, qui ont des troubles du sommeil ou qui souffrent de douleurs : législation. « Ce qui permet de se relaxer, sans être défoncé : le CBD n’a pas migraines, douleurs de règles, maux de dos… », explique-t-elle. d’effets euphorisants ou psychoactifs », poursuit-elle. On peut donc l’acheter légalement, librement et sans ordonnance. Aux vendeurs de conseiller En cette rentrée, du CBD, on en trouve partout : grandes surfaces, bureaux l’arôme, le dosage (5 à 20%) et le format les plus adaptés à la demande du de tabac, boutiques de vape, et bien sûr, boutiques spécialisées : CBD Shop, client : le CBD peut être ingéré, fumé, vapoté ou être appliqué sur la peau. Greenboyz, CBD Corner, Deli Hemp CBD, etc. D’après le Syndicat professionnel du chanvre, il existe déjà 400 boutiques, sans oublier la vente en ligne. Problème : impossible de savoir ce qu’un produit contient précisément, un flou réglementaire souligné notamment par le magazine « 60 millions de Si autant d’enseignes se penchent sur ce nouveau marché, qui pourrait consommateurs » qui a publié un comparatif, début 2021. Le marché du CBD atteindre le milliard d’euros d’ici 2023 selon le SPC – le prix des fleurs, qui n’étant pas régulé, il n’existe aucune exigence en termes de qualité - comme représentent 85% du marché, oscillant entre 5 et 12 euros le gramme, c’est la norme AFNOR qui s’impose désormais pour les liquides de vapotage par que le secteur du bien-être est en pleine expansion. La raison ? La crise exemple. Si le taux de CBD affiché sur l’étiquette n’est pas forcément celui sanitaire. « Peur du virus, inquiétude pour ses proches, incertitude pour son qui se retrouve dans le produit, il y a pire pour la santé du consommateur : travail… les clients me disent qu’ils sont à cran », explique la vendeuse de la consommer du CBD de mauvaise qualité, synthétique, coupé avec des boutique Aponia herbals, qui vient de s’implanter à Boulogne-Billancourt (92). produits toxiques, contaminé par des pesticides ou des métaux lourds… ou Elle leur vend du CBD, comme elle vendrait « des fleurs de Bach » : pour se bien beaucoup plus riche en THC que ce qui est autorisé. détendre. Preuve que cela fonctionne ? « Les clients reviennent ». En attendant une réglementation claire, attention à garder une consommation modérée, en ayant en tête le risque de somnolence – puisque le CBD est un myorelaxant, ainsi que celui d interactions médicamenteuses (anti- épileptiques, anti-coagulants…). Concrètement, mieux ne vaut éviter de prendre le volant ! A.M 14
Question Combien de THC ? Témoignage En Europe, les produits à base de CBD doivent exclusivement provenir des trois DU CBD pour arrêter le cannabis variétés de la plante Cannabis sativa L. (chanvre agricole) contenant moins de « Le CBD est aussi utilisé en réduction des risques, notamment lorsque 0,2 % de THC. le patient qui veut réduire sa consommation se heurte à un palier et qu’il se trouve bloqué », explique François-Xavier Mathres, éducateur spécialisé au Csapa Traits d’Union de Boulogne-Billancourt (92). « Le CBD peut alors constituer une solution alternative à un traitement médi- camenteux, somnifères ou antidépresseurs. Il est consommé la plupart du temps sous forme de fleur, de résine ou de liquide pour vapoteuse ». Est-ce que cela fonctionne ? « Cela n’est pas une molécule miracle, cela peut fonctionner chez certaines personnes et pas d’autres, comme un substitut nicotinique par exemple ». Actualité Le gouvernement veut interdire les fleurs et les feuilles La commercialisation du CBD est un véritable feuilleton. Dernier épisode en date : la publication, le 21 juillet dernier, d’un projet d’arrêté par le gouvernement qui interdit la vente aux consommateurs de fleurs ou de feuilles brutes de chanvre, seules ou en mélange, comme produits à fumer ou tisanes. Seuls les produits comme les huiles, les aliments ou les cosmétiques à base de CBD resteront autorisés ! La raison ? La nocivité pour les consommateurs Les femmes et le CBD des fleurs qui sont souvent fumées avec du tabac. En off, on soupçonne aussi la confusion possible, pour les forces de l’ordre, entre consommation de CBD La douleur liée aux menstruations est un sujet encore trop peu étudié et de cannabis récréatif. par la médecine. Cependant, des voix s’élèvent pour promouvoir l’utili- Ce projet, qui devrait être publié fin 2021 ou début 2022, fait suite à la sation du cannabis CBD pour soulager les douleurs de règles qui peuvent décision de la Cour de justice de l’Union européenne, en novembre 2020, faire aussi mal qu'une crise cardiaque selon un étude de 2016. de rappeler le principe de la libre-circulation des marchandises dans l’UE: De plus, des études, prouvant que le CBD pouvait aider à traiter et si la France était libre d’encadrer la production de CBD sur son sol, elle ne calmer les symptomes de l'endométriose (malade touchant 10% des pouvait considérer comme illégale la vente de CBD issu d’un autre pays de femmes), ont été récemment publiées. l’UE, à condition qu’il y soit fabriqué légalement. Le CBD étant une substance no- stupéfiante en Europe, il était aussi impossible d’en limiter la vente aux Les recommendations d'usage : produits issus de fibres et graines uniquement, comme le souhaitait alors la Il faut privilégier les produits Bio et toujours en Full Spectrum. Cela ne France. Une décision européenne que la Cour de Cassation avait entériné le garantit pas totalement la qualité du produit mais cela réduit tout de 23 juin 2021. A suivre. même les risques de mauvaise qualité. 15
ACTION Le projet PACTS : prévention en milieux spécifiques ADIXIO, vient de remporter, avec trois autres partenaires, un appel à projets lancé par la Mildeca. Il s’agit d’assurer des sessions de prévention des risques, liés aux conduites addictives en milieux de travail spécifiques : salarié.e.s en situation de handicap, en intérim ou en situation de rupture d’emploi. Cet été, cela a travaillé dur dans les bureaux d’ADIXIO ! L’association a en En quoi consiste le projet ? effet remporté le dernier appel à projets lancé par la Mildeca (Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives ), un Les actions prévues s'organisent autour de deux axes : la prévention des organisme placé auprès du Ministre de la santé, qui portait sur la mobilisation conduites addictives, à l’attention des salariés ou bénéficiaires, d’une part, et de la société civile. d’autre part, la formation des acteurs de l’entreprise, qu’ils soient managers, RH ou médico-social sur ce sujet. Et notamment la gestion des situations Résultat : pendant deux ans, ADIXIO bénéficiera d’un financement du Fonds complexes. « D’après notre expérience, il apparait que les entreprises sont de lutte contre les addictions pour assurer, en entreprise, des sessions de souvent démunies et bricolent au cas par cas », poursuit-elle. prévention et de formation aux risques induits par les conduites addictives, Tout est prêt : après la réalisation d’une phase d’étude cet été, un calendrier mais en milieu de travail spécifique. a été établi et les actions ont démarré cet automne. Les trois secteurs confondus, une centaine de sessions de prévention auront lieu d’ici 2023, Si ADIXIO coordonne le projet, il associe trois associations partenaires : gratuitement, dans plus de 400 organisations, entreprises, collectivités, de APF France handicap, la plus importante association française de défense des plus de 20 salarié.e.s, choisies par les trois partenaires. personnes en situation de handicap, qui comprend un réseau d’entreprises adaptées et d’établissements de service d’aide par le travail ; le FASTT (Fonds Concrètement, l’équipe a validé un format court et propice aux échanges : d’Action Sociale du Travail Temporaire) un organisme paritaire qui s’emploie à plusieurs ateliers abordant plusieurs consommations et comportements « faciliter la vie et l’emploi des salariés intérimaires » au nombre de en présentiel si la situation sanitaire le permet. Par exemple, un atelier 2,6 millions ; et la FNATH – Association des accidenté.e.s de la vie, qui de trente minutes par groupe de 10 personnes avec un système de accompagne les personnes victimes d’accidents du travail et de maladies questions/réponses pour répondre de façon la plus personnalisée professionnelles. aux interrogations. Nous aurons aussi la possibilité de communiquer toutes les ressources situées dans les entreprises ou à proximité. Alcool, médicaments, opiacés, jeux d’argent… Dans chacun de ces secteurs, Exemple de ces ressources : « Rappeler le rôle de la médecine du travail ou les conduites addictives et la consommation des substances psychoactives encore celui des Csapa* où l’on peut consulter un addictologue de façon peuvent être très présentes. « Qu’elle soit liée à un arrêt, une maladie gratuite et anonyme », explique Agathe, qui animera ces sessions. « Nous professionnelle, une période de chômage, ou même un proche dont il faut précisons toujours que nous ne sommes pas médecins ». s’occuper, une longue rupture dans leur parcours peut gravement impacter la santé, placer ces personnes en situation de fragilité et les amener à Dans un autre des ateliers, les intervenant.e.s ont une "boite addicto" consommer des produits psychoactifs », explique Agathe BRENGUIER, dans laquelle il y a des échantillons factices (et vides) comme une boite de coordinatrice ADIXIO, qui travaille avec la FNATH. « Or, vers qui peuvent-elles médicaments, une bouteille de rhum, un paquet de cigarettes, des sachets se tourner : Pole emploi ? le médecin du travail ? le généraliste ? Ne pas de cocaïne, de la résine de cannabis, de l’herbe, une manette de console savoir qui solliciter freine une possible entrée dans un parcours de soins » de jeux, une chaussure de sport… Ils ont pour objectif d’ouvrir la discussion poursuit-elle. et d’interpeller les participant.e.s autour des conduites addictives qui restent encore tabous : • A quoi cela vous fait penser ? • Qu’est ce qui est autorisé en entreprise ou non ? • Qu’est ce qui est légal ? • Y a-t-il des addictions plus graves que d’autres ? • Certaines substances sont-elles plus addictives que d’autres ? * Csapa : Centres de Soin, d'Accompagnement et de Prévention en Addictologie, lieu de consultation gratuite et anonyme. Liste des Csapa : www.drogues-info-service.fr 16
Ces mallettes devront être enrichies pour être adaptées aux besoins spécifiques de chaque secteur : un groupe de travail a réfléchi, en juillet, avec les différents intervenants, sur les attentes de ces secteurs. « Ce que nous voulons, c’est De la prévention en truck impliquer dans la création de cette nouvelle mallette les différentes structures », Adecco, Manpower, Randstad… sont des agences que Nadège VIRIOT, explique Aurélie VERNY, qui travaille plus spécifiquement sur le handicap. Et chef.fe de projet sur la partie Interim connait bien. Elle travaille déjà la nouvelle mallette, une fois testée et validée, sera prête à être déployée avec le FASTT sur le dispositif "A vous la santé" dédié à la prévention des début 2022. risques professionnels (TMS...). Pour rencontrer les intérimaires sur leurs lieux de travail, ils se déplacent en truck, ce qui leur permet d’intervenir Des sessions longues d’une à deux journées seront aussi destinées à directement sur les sites de production industrielle ou les quais des « outiller » les encadrant.e.s : chef.fe d’entreprise, managers, préventeur.rice.s, plateformes logistiques. chargé.e.s de ressources humaines, éducateurs… sur la définition des risques addictifs, l’obligation règlementaire de l’entreprise en matière de santé du Le procédé sera repris dans le cadre de ce nouvel appel à projets, qui salarié.e ainsi que, la gestion, sur le terrain, des salarié.e.s concerné.e.s par leur permettra de se focaliser uniquement sur la prévention des conduites des conduites addictives. Par exemple : comment repérer un comportement addictives. « Il est prévu 90 actions de sensibilisation dans une trentaine inhabituel chez un.e salarié.e ? Comment faire en sorte que ce.cette salarié.e d’entreprises, en deux ans », explique-t-elle. Avant d’envoyer des trucks ne décroche pas du travail et s’enfonce dans un comportement addictif ? dans toute la France, le groupe de travail, constitué avec le FASTT, a éla- Comment accompagner le retour d'un.e salarié.e suite à un arrêt? Comment boré cet été la réalisation de supports d’animation - reprenant les outils favoriser le travail pluridisciplinaire avec la médecine du travail? Tout un conçus et utilisés par ADIXIO, ainsi qu’un document-cadre définissant programme de réflexion et d'accompagnement. les bonnes pratiques à tenir qui sera distribué aux agences de travail temporaire et aux entreprises accueillant des intérimaires. A.M Une opérationnalisation rapide et efficace Avril 2021 chez SOPROFEN à Froideconche Juillet chez GERFLOR à Tarare Septembre chez CEPL à Moreuil Une identité commune, signe fort d'une collaboration tripartite 17
NOUVEAUTÉS Les supports ADIXIO ADIXIO, experte dans le sujet des addictions, vous propose du contenu de qualité dans des formats divers et variés. Les vidéos sur de sujets divers et variés Tabac et retour au bureau Tabac chauffé Webinaire avec le Président de la Mildeca, Nicolas Prisse Bientôt disponible ! La newsletter ADIXIONS Pour s'y inscrire, c'est juste ici 18
en milieu de travail ADHÉRER À ADIXIO, C’EST : SOUTENIR le travail des militant.e.s dans leur action d’entraide et d’écoute ENCOURAGER les actions de prévention des addictions au sein de La Poste et d’Orange S’IMPLIQUER dans la vie démocratique de l’association BULLETIN D’ADHÉSION OU DE SOUTIEN J’adhère à l’association (18€) Je fais un don supplémentaire de € Je joins un chèque de € à l’ordre d’ADIXIO NOM : PRÉNOM : DATE DE NAISSANCE : / / ADRESSE PERSONNELLE : E-MAIL : APPARTENANCE : Orange Groupe La Poste Autres Bulletin à envoyer à ADIXIO - 82 bis rue Blomet - 75015 PARIS Les informations recueillies sont nécessaires pour votre adhésion. Elles font l’objet d’un traitement informatique et sont destinées au secrétariat de l’association. En application des articles 39 et suivants de la loi du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification aux informations qui vous concernent. Si vous souhaitez exercer ce droit et obtenir communication des informations vous concernant, veuillez vous adresser à : contact@adixio.fr ou 01 53 79 61 61
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