Info santésuisse 3/13 - Santésuisse
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Page 4 Page 8 Page 16 Verena Nold, la nouvelle directrice de Les statistiques de l’OFSP montrent que de Le palmarès des médicaments met en santésuisse, nous livre ses objectifs et ses nombreux chirurgiens manquent de pratique évidence l’effet sur les ventes d’un priorités. Pour elle, une bonne collaboration pour certaines opérations. médicament de l’échéance du brevet. est primordiale. Sommaire 4 Interview de la nouvelle directrice de santésuisse, Verena Nold No 3, juillet 2013 Paraît six fois par an prix de l’abonnement Sous la loupe 54 fr. par an, 10 fr. le numéro 8 Les patients ignorent tout de la qualité de leur hôpital Éditeur et administration 11 Médicaments : plus de mal que de bien ? santésuisse, 12 Sécurité de la médication aux interfaces Les assureurs-maladie suisses, Römerstrasse 20, case postale, 14 La charte des chirurgiennes et chirurgiens suisses 4502 Soleure Responsable de la rédaction Domaine de la santé Frédérique Scherrer 15 Angelina Jolie, un exemple à suivre ? Ressort Communication, Case postale, 4502 Soleure 16 Le palmarès des 30 médicaments les plus vendus Téléphone : 032 625 41 27, Fax : 032 625 41 51, Rubriques Courriel : redaction@santesuisse.ch 18 A lire : deux ouvrages de référence sur la santé et le droit production : Rub Media SA, Seftigenstrasse 310, 3084 Wabern/Berne 20 En bref : modifications dans l’assurance obligatoire des soins Conception de la mise en page 21 Nouvelles d’Europe Pomcany’s mise en page Henriette Lux administration des annonces Toutes les annonces – les offres d’emploi y compris – sont à adresser à : « infosantésuisse », Römerstrasse 20, case postale, 4502 Soleure courriel : redaction@santesuisse.ch Administration des abonnements Téléphone : 032 625 42 74, Fax : 032 625 41 51 Portail : www.santesuisse.ch Page de titre : santésuisse/Prisma ISSN 1660-7236
Le vent du changement « Quand souffle le vent du changement, les uns construisent des murs et les autres des moulins à vent » (proverbe chinois) Les moulins tirent judicieusement parti du vent pour produire de l’énergie. On insuffle ainsi de l’élan à ce qui existe. Appliqué à la branche, cela signifie que santésuisse continuera, comme jusqu’ici, à défendre le système de santé actuel, libéral, innovant et de qua- lité. Elle s’engagera avec force et cohérence sur le plan politique, auprès des fournisseurs de prestations et des payeurs de primes. Il est important que tous les partenaires du domaine de la santé Christoffel Brändli Président du conseil d’administration conservent leur libre choix et que les interventions de l’Etat se li- santésuisse mitent au strict nécessaire. Selon le Moniteur de la santé gfs 2013, 76 % des sondés se disent sa- tisfaits de notre système de santé. Il s’agit là d’un taux supérieur aux années précédentes. « Une part de ce gâteau revient certainement aux assureurs-maladie » commentait à juste titre un journaliste. Mais pour que les assurés le reconnaissent aussi, ils doivent être mieux informés sur le fonctionnement de notre système et sur le rôle ma- jeur qu’y jouent les assureurs-maladie. Ce sont eux qui contrôlent les factures, négocient des tarifs avantageux et s’efforcent de conte- nir les coûts, dans l’intérêt des payeurs de primes. Pour santésuisse, fournir ces explications est la priorité absolue. Contre les mythes véhiculés par les partisans de la caisse publique, il faut en revanche construire des murs. Prétendre qu’une caisse étatique jouissant d’un monopole occasionne moins de frais admi- nistratifs que les assureurs-maladie revient à nier les faits. Avec la création de curafutura, le vent du changement n’a pas épar- gné la branche. Nous profiterons de cette brise pour accroître notre expertise afin d’assumer encore mieux notre tâche d’interlocuteur des assureurs dans le domaine de la santé. Nous continuerons à of- frir à nos membres une large palette de services. Avec tarifsuisse sa et SASIS SA, nous pouvons compter sur deux filiales bien établies, dont les activités sont idéalement complétées par la SVK. Quand souffle le vent du changement pour détruire notre système qui fonctionne globalement bien, il est réjouissant que l’ensemble de la branche – RVK, santésuisse et la nouvelle association – tire à la même corde. Nous ne voyons pas pourquoi notre système de santé performant est mis en jeu avec autant de légèreté pour tenter l’expérience perilleuse d’une caisse publique dont l’issue est impro- bable. Ce vent n’apporte aucune énergie, mais seulement destruc- tion et désolation. Utilisons plutôt les bons vents… 3 | Éditorial 3/13
Interview avec Madame Verena Nold, nouvelle directrice de santésuisse « Il est primordial de tirer tous à la même corde » Depuis mi-juin, Verena Nold est directrice de santésuisse. Son objectif est de concilier les intérêts des membres et ensemble, avec eux, de tirer à la même corde, dans la même direction. Par ailleurs, elle souhaite mieux exploiter le potentiel de synergies grâce à une meilleure collaboration entre santésuisse, tarifsuisse, SASIS et la SVK. Enfin, sur le plan externe, santésuisse prendra acti- vement part à l’évolution du système suisse de santé. Madame Nold, une tâche herculéenne vous attend. Qu’est-ce qui vous a incité à accepter de relever le défi d’être directrice de santésuisse ? Je trouve qu’il est très stimulant de pouvoir à nouveau parti- ciper activement à l’évolution du système suisse de santé et de contribuer à ce que les générations futures puissent aussi bénéficier d’un système de qualité élevée, financé par des Verena Nold Rebetez n’est pas une inconnue de la branche. La nouvelle directrice de primes supportables. J’aime les défis, et en particulier celui santésuisse connaît les partenaires et qui consiste à assumer la fonction de directrice de santésuisse. le fonctionnement du système de santé en raison de sa longue activité dans ce Que pouvez-vous apporter en tant que directrice ? domaine. Concernant les tâches difficiles qui l’attendent, elle précise : « J’aime les défis, et J’ai une longue expérience de la branche, sais comment fonc- en particulier celui qui consiste à assumer la tionne le système suisse de santé et connais de nombreux fonction de directrice de santésuisse. » partenaires personnellement. Grâce à mes nombreuses an- nées chez santésuisse et tarifsuisse, je connais parfaitement les besoins des assureurs-maladie. Ce sont des atouts impor- tants pour assumer cette fonction. Faut-il équiper ce poste d’un siège éjectable ? Non, cela n’est pas nécessaire. Il y aura certes des turbu- Quelle est votre mission en tant que directrice et com- lences, mais on peut les surmonter aisément avec une bonne ment comptez-vous la remplir ? équipe et éviter ainsi le crash. Sans oublier que les défis sont Mon objectif est clair. Je souhaite concilier les intérêts des une réelle chance de trouver de nouvelles solutions. membres et ensemble, avec eux, tirer à la même corde et dans la même direction. Mais pour y parvenir, il est impor- Comment santésuisse assumera-t-elle son rôle d’associa- tant qu’ils soient tous associés aux processus de décision. tion faîtière des assureurs-maladie sous votre direction ? santésuisse doit jouer un rôle de précurseur pour le système suisse de santé. Elle doit élaborer des propositions permet- tant d’améliorer durablement le système de santé. santésuisse Verena Nold Rebetez (1962), nouvelle directrice de prendra les mesures requises pour progresser selon les ob- santésuisse, a déjà exercé la fonction de directrice adjointe de jectifs définis et en recherchant des solutions, afin de conti- l’association et de responsable du département Négociations ta- nuer à jouer son rôle important d’avant-garde. rifaires, de 2004 à 2010. Ensuite, elle a dirigé tarifsuisse sa, une filiale de santésuisse. Dans cette fonction, elle a mené des né- santésuisse est toujours l’association des petits, moyens et gociations tarifaires au plan national et cantonal, siégé dans de grands assureurs-maladie dont les intérêts divergent au nombreuses commissions œuvrant dans le domaine des tarifs sein même du conseil d’administration. Ces intérêts pour- et de l’assurance qualité et a dirigé une soixantaine de collabo- ront-ils être mieux conciliés dans la nouvelle constella- rateurs. Auparavant, de 1990 à 1997, Verena Nold a travaillé tion ? pour Helsana Assurances SA /Helvetia Assurance-maladie, ce qui Les intérêts ne dépendent pas seulement de la taille. Il est lui a permis, en tant que membre de la direction, d’effectuer de donc tout à fait possible de développer des positions que nombreuses expériences en matière de marketing et de déve- tous soutiennent. loppement de produits. En mai 2013, Verena Nold a relevé un nouveau défi en devenant directrice de la clinique Le Noirmont Quels dossiers devrez-vous traiter ces prochaines années (JU), centre de réadaptation pour les maladies cardio-vasculaires. en tant que directrice de santésuisse ? Sur quels résultats Depuis juin 2013, elle est directrice de santésuisse. 4 | Domaine de la santé 3/13
Photos : Walter Imhof le conseil d’administration devra-t-il vous évaluer dans équivalant à un milliard de francs par an. De plus, ils leur cinq ans ? offrent un très bon service en remboursant rapidement et Il faut revoir de toute urgence le tarif médical TARMED, tout de manière non bureaucratique les factures, en répondant comme introduire des structures tarifaires uniformes au plan avec promptitude et compétence à leurs clients et en leur national pour la réadaptation et la psychiatrie, pour ne ci- prodiguant de surcroît des conseils personnalisés. Enfin, les ter que deux des dossiers importants. Actuellement, empê- assureurs-maladie développent des modèles d’assurance in- cher que la caisse unique ne voie le jour est la priorité ab- novants. En se montrant novateur, un assureur se démarque solue. Si nous y arrivons, nous aurons déjà insufflé beau- de la concurrence et gagne de nouveaux clients. Une caisse coup d’élan au système pour l’avenir. étatique n’apporte en revanche aucune valeur ajoutée mais uniquement des désavantages. Les assurés perdent leur libre Au-delà du rejet de la caisse unique, qu’est-ce qui unit la choix, les innovations se font rares et le service aussi se dé- branche ? grade car l’assuré mécontent n’a plus la possibilité de chan- Tous les assureurs-maladie défendent un système de santé ger de caisse. Je ne vois pas pourquoi on met en jeu avec libéral avec le moins d’interventions possibles de l’Etat et de autant de légèreté notre système de santé performant pour vastes possibilités de choix pour tous. une expérience périlleuse à l’issue improbable. « Il est important d’associer tous les Que pensez-vous de l’existence de plusieurs associations ? Faut-il voir cette concurrence d’un bon œil ? membres aux processus de décision.» Lorsqu’il n’est pas possible de réunir toute une branche au- tour d’objectifs communs, il peut s’avérer utile de consti- Dans la perspective de la votation sur la caisse unique, tuer plusieurs associations. La concurrence est stimulante et il est légitime de se demander quelle valeur ajoutée la oblige toute organisation à se remettre sans cesse en ques- branche de l’assurance-maladie apporte réellement aux tion. Dans la perspective de la votation sur la caisse pu- assurés et au système de santé dans son ensemble. Où la blique, l’existence de plusieurs associations n’est toutefois voyez-vous ? pas un avantage. Les assureurs-maladie s’engagent en faveur d’une utilisation efficace des primes et pour éviter des prestations inutiles ou Des intérêts divergeants existent aussi dans d’autres trop chères. Grâce à un contrôle rigoureux des factures, les branches, mais les membres s’entendent néanmoins sur assureurs font bénéficier les assurés d’économies de primes les questions essentielles, comme par exemple les méde- 5 | Domaine de la santé 3/13
cins qui s’unissent pour défendre le libre choix du mé- Vous avez toujours affirmé qu’il existe un lien très étroit decin et des soins. Comment comptez-vous accorder les entre les structures tarifaires et les négociations de prix. visions des assureurs-maladie sur la compensation des Comptez-vous réintégrer tarifsuisse sa au sein de l’asso- risques et le partenariat tarifaire ? ciation. Une fusion est-elle envisagée ? Au cours des dernières années, les positions des assureurs- Il ne faut pas nécessairement fusionner pour bien travailler maladie sur la compensation des risques se sont rapprochées, ensemble. On peut tout à fait traiter des dossiers dans des il sera donc plus facile de se mettre à l’unisson sur ce point. organisations différentes et néanmoins collaborer de façon En ce qui concerne le partenariat tarifaire, les positions des positive et étroite. assureurs n’ont jamais divergé au point d’empêcher des ac- cords. Je suis sûre que nous arriverons à définir des posi- Existe-t-il un potentiel de synergie dans la collaboration tions communes pour cette question et d’autres également. entre santésuisse, tarifsuisse, SASIS et la SVK ? Et si oui, où et comment l’exploiter ? « Une caisse étatique n’apporte Les quatre organisations disposent chacune d’un grand sa- voir-faire dans leur domaine de compétence respectif. Il est aucune valeur ajoutée.» tout à fait possible de mieux utiliser ce savoir-faire en tra- vaillant étroitement ensemble sur certains sujets. Je pense Comment envisagez-vous la collaboration future avec Cu- que c’est justement l’un des grands atouts de santésuisse et rafutura ? des organisations associées. santésuisse est prête à entamer des discussions avec Curafu- tura. Dans les secteurs où les intérêts concordent, une col- La presse a déploré l’absence de leaders chez santésuisse, laboration est parfaitement judicieuse. qui représentent la branche à l’extérieur, et d’un commu- nicant chevronné, qui porte la voix de l’association. Par- Le départ de membres importants va peser sur les fi- tagez-vous cette analyse ? nances de l’association et se traduire par des pertes de re- santésuisse a des leaders, ils doivent simplement prendre plus cettes. Quelles prestations seront à l’avenir supprimées souvent la parole. Une communication active est primordiale. ou limitées ? Aucune prestation ne sera supprimée. santésuisse doit four- L’assurance de base est une assurance sociale. Dans quelle nir ses prestations plus efficacement. mesure l’est-elle encore ? L’assurance de base est toujours une assurance très sociale. Faut-il s’attendre à des réductions du personnel ? Les assurés paient par exemple la même prime quel que santésuisse dispose de provisions, aucune mesure d’écono- soit leur état de santé. La solidarité existe entre les bien- mie n’est donc nécessaire à ce stade. portants et les malades, entre les personnes jeunes et âgées ainsi qu’entre les hommes et les femmes. Sous quelle forme santésuisse s’engagera-t-elle ces pro- chaines années dans les domaines de la politique ta- « santésuisse doit jouer un rôle rifaire, des structures tarifaires et des négociations de prix ? de précurseur pour le système suisse santésuisse représentera ses membres dans les organisations de santé.» tarifaires nationales importantes comme TARMED Suisse et SwissDRG SA. Elle participera activement à l’avenir aussi à la politique tarifaire en soumettant des propositions concrètes Vous avez quitté la Clinique Le Noirmont après l’avoir di- d’amélioration aux instances politiques. Les négociations rigée pendant un mois seulement. Cette clinique affron- de prix seront menées par les différentes sociétés d’achat. tant certains problèmes de légitimité, une question vient automatiquement aux lèvres : ne croyez-vous pas à l’ave- En tant qu’ancienne directrice de tarifsuisse, vous ne vous nir de cette clinique ? êtes pas fait que des amis parmi les fournisseurs de pres- La Clinique Le Noirmont est la plus importante clinique de tations. Cela représente-t-il un obstacle à une collabora- réadaptation cardiaque stationnaire en Suisse. Il n’y a donc tion constructive future ? aucune raison de ne pas croire à l’avenir de cette excellente J’assume chez santésuisse une fonction différente de celle clinique, au contraire. J’ai beaucoup apprécié de travailler que j’ai occupée chez tarifsuisse. santésuisse ne mène pas de du côté des fournisseurs de prestations. Cette brève expé- négociations de prix, ce qui simplifiera la collaboration avec rience très enrichissante me sera fort utile chez santésuisse. les fournisseurs de prestations. Je suis confiante que nos par- tenaires sauront l’apprécier et en tenir compte. interview : silvia schütz 6 | Domaine de la santé 3/13
Actuellement, la priorité absolue pour la nouvelle directrice de santésuisse est d’empêcher que la caisse publique ne voie le jour. A plus long terme, la révision du TARMED et l’introduction de structures tarifaires uniformes au plan national représentent également des objectifs importants. 7 | Domaine de la santé 3/13
Indicateurs de qualité des hôpitaux : seul le nombre d’interventions est actuellement publié Les patients ignorent tout de la qualité de leur hôpital De nombreuses équipes chirurgicales manquent d’expé- opérations du pancréas devraient être réalisées chaque an- rience, car elles réalisent trop d’interventions diffé- née, au moins deux chirurgiens ultra-spécialisés faire partie rentes. L’évaluation de l’OFSP du nombre d’opérations d’une équipe ultra-qualifiée, un colloque multidisciplinaire du pancréas le démontre clairement. Aux Pays-Bas, les se tenir chaque semaine, une salle d’opération être dispo- assureurs-maladie peuvent refuser d’indemniser les inter- nible 24 h sur 24 et des soins intensifs spécialisés être garan- ventions pratiquées trop rarement. Cela incite les hôpi- tis », déclare le Professeur Pierre-Alain Clavien, chirurgien à taux à se spécialiser et augmente la sécurité des patients. l’hôpital universitaire de Zurich. Dix-huit hôpitaux en Suisse allemande, seize en Romandie et trois au Tessin ne remplis- Il n’est pas rare que des complications et des décès évitables saient pas ces critères. Ils ont pratiqué moins de dix résec- surviennent à la suite d’interventions réalisées par des équipes tions du pancréas pendant toute l’année 2010. Dix autres hô- chirurgicales inexpérimentées. Pour la première fois, les pa- pitaux l’ont réalisée sur moins de vingt patients (voir le ta- tients peuvent consulter sur le site1 de l’Office fédéral de la bleau page 10). santé publique (OFSP) à quelle fréquence un hôpital réalise certaines opérations. Les chiffres « actuels » datent toutefois Les décès ne sont saisis que par l’hôpital de 2010. La Suisse accuse ainsi un retard très net par rap- L’OFSP indique pour les différents chapitres hospitaliers com- port aux Pays-Bas qui publient déjà les statistiques de 2012. bien de patients sont décédés à l’hôpital pendant ou après l’intervention. Les décès survenant jusqu’à trente jours après Le nombre d’interventions, un critère de qualité décisif Des complications inutiles, comme une deuxième opération, des saignements postopératoires, des infections ou même des décès arrivent fréquemment lorsque des hôpitaux ou des chirurgiens pratiquent rarement certaines interventions et manquent ainsi d’expérience. « Il est admis depuis les an- nées 90 que la qualité des interventions chirurgicales dé- pend du nombre d’interventions pratiquées », explique Jan Maarten van den Berg de l’inspection néerlandaise de la santé. Il surveille les résultats des opérations pratiquées dans les hôpitaux hollandais. « C’est en forgeant que l’on devient forgeron », cela vaut également pour les chirurgiens et les équipes médicales hospitalières. Aux Pays-Bas, les assureurs- maladie peuvent refuser la prise en charge d’opérations lorsqu’elles sont réalisées trop rarement. Cela incite les hô- pitaux à se spécialiser. La fréquence des interventions n’est que l’un des nombreux critères qui déterminent le résultat d’une opération, mais il est le plus facile à mesurer. Pour les autres critères, les hôpitaux suisses ne mettent pas de données comparatives à disposi- tion. Ils ont même gardé secret pendant longtemps le nombre d’opérations réalisées. Leurs chiffres peuvent par ailleurs se différencier de ceux de l’OFSP, qui utilise une autre base de données. L’analyse comparative de la statistique de l’OFSP n’est toutefois pas aisée. Il faudrait prendre exemple sur l’Of- fice vétérinaire fédéral et sa statistique du nombre d’expéri- mentations sur les animaux, qui est de surcroît plus actuelle. Moins de dix opérations par an Les statistiques de l’OFSP sur la résection du pancréas suite à un cancer ou à une infection grave sont inquiétantes. Plus de cinquante hôpitaux se sont répartis les 740 opérations ré- alisées en Suisse en 2010. Cette intervention délicate peut en- traîner le décès et de nombreuses complications postopéra- toires. Pour les éviter autant que possible, « au moins 20 à 30 Plus de 35 hôpitaux suisses ont pratiqué moins de dix résections du pancréas pendant toute l’année 2010. Or cette intervention délicate requiert au moins 20 à 30 opérations par an pour diminuer les com- plications postopératoires. 8 | Sous la loupe 3/13
l’opération seraient néanmoins plus révélateurs, comme cela d’opérations du pancréas ont enregistré 16 % de décès de se pratique aux Pays-Bas. L’évaluation de la statistique de patients contre moins de 4 % dans ceux en pratiquant beau- l’OFSP fait cependant apparaître des différences très nettes coup. Aux Pays-Bas, le nombre de décès suite à une pan- déjà au niveau du nombre de décès à l’hôpital : les hôpi- créatectomie a chuté de moitié par rapport à 2008, précise taux universitaires pratiquant un nombre élevé d’interven- Jan Maarten van den Berg. Le nombre plus élevé d’interven- tions ont enregistré un quart de décès de moins pendant ou tions ainsi que la saisie comparable et contrôlée des compli- après la résection du pancréas que l’état de santé des pa- cations ont contribué à ce résultat. tients ne l’aurait laissé supposer (5,4 % au lieu de 7,4 %). A l’inverse, dans les petits hôpitaux généralistes, 12 % de pa- Peu d’interventions également pour d’autres pathologies tients de plus sont décédés malgré des pathologies moins L’expérience est indispensable également pour de nom- graves (6,7 % au lieu de 6 %). Les écarts sont encore plus im- breuses autres opérations. Certains chirurgiens prétendent portants entre les différents hôpitaux. Les comparaisons sont opérer dans différents hôpitaux et disposer ainsi de suffi- toutefois difficiles à réaliser car lorsque les interventions sont samment d’expérience. Mais pour la plupart des interven- peu nombreuses, un seul décès de plus ou de moins influe tions, l’expérience de toute l’équipe médicale est tout aussi fortement sur la statistique. cruciale. Celle-ci doit veiller, avant et après l’opération, que Selon une statistique publiée dans le New England Medical tout soit en ordre et identifier rapidement les complications. Journal il y a dix ans, les hôpitaux américains réalisant peu Pour la résection prostatique transurétrale par exemple, il faut non seulement un chirurgien expérimenté, mais aussi un hôpital spécialisé pour éviter les complications ultérieures, constatait le British Medical Journal il y a dix ans déjà. Or en Photo : Keystone Suisse, treize hôpitaux ont réalisé cette intervention sur moins de trente patients en 2010. Les treize hôpitaux avec le nombre le plus élevé d’interventions l’ont pratiquée 170 à 300 fois. Le spécialiste en chirurgie cardiaque Thierry Carrel met en garde depuis longtemps contre un éparpillement des inter- ventions de chirurgie cardiaque, qui entraîne des décès et des complications évitables. A l’Hôpital de l’Ile où il exerce, 1371 opérations du cœur ont été réalisées en 2010 contre moins de dix dans les hôpitaux cantonaux de Nidwald, Obwald et Uri ainsi que dans les hôpitaux d’Uster, Männedorf et Wetzi- kon. L’hôpital cantonal d’Aarau en a pratiqué dix-sept et ce- lui de St-Gall vingt. La statistique de l’OFSP révèle une situa- tion similaire pour les prothèses du genou et de la hanche ou les fractures du col du fémur. Les patients ont donc in- térêt à s’informer sur le nombre d’opérations réalisées par leur hôpital en 2010. Cette recherche est assez simple sur le site de l’OFSP : dans la rubrique mentionnée en note, re- chercher l’hôpital sous « Requête », puis sélectionner l’opéra- tion (indicateur). Urs Gasche/infosperber 2 1 www.bag.admin.ch/hospital/index.html > Indicateurs de qualité. 2 Cet article est une reproduction résumée de l’article publié en allemand sur infosperber www.infosperber.ch/Artikel/Gesundheit/Spitaler-Fallzahlen- vermeidbare-Todesfalle-Komplikationen 9 | Sous la loupe 3/13
Deux exemples du nombre d’opérations réalisées I.1.3.M première implantation d’endoprothèse e.7.1.M résection du pancréas totale de genou hôpitaux de toute la suisse 2010 hôpitaux de toute la Suisse 2010 suisse allemande Romandie et tessin suisse allemande Romandie et tessin Inselspital Bern 74 Merian Iselin 699 CHUV Centre Hospitalier Universitaire Vaudois 52 Schulthess Klinik 609 Klinik Beau-Site AG 50 Salem-Spital 449 Universitätsspital Zürich 44 Luzerner Kantonsspital 424 Les Hôpitaux Universitaires de Genève HUG 43 Clinica Ars Medica SA 374 Kantonsspital St. Gallen 38 Kantonsspital St. Gallen 333 Universitätsspital Basel 27 Lindenhofspital 326 St. Claraspital 26 Les Hôpitaux Universitaires de Genève HUG 263 Luzerner Kantonsspital 24 CHUV Centre Hospitalier Universitaire Vaudois 241 Kantonsspital Aarau AG 22 Kantonsspital Winterthur 229 Klinik Hirslanden AG 21 Stiftung Krankenhaus Sanitas 225 Kantonsspital Liestal 20 Kantonsspital Bruderholz 214 Kantonsspitäler Frauenfeld & Münsterlingen zus. 18 Hirslanden Klinik am Rosenberg 213 Spitäler Solothurner, Olten, Dornach zus. 17 Klinik Hirslanden AG 200 Hôpital du Valais (CHCVs) – Spitäler Martinach, Sitten und Siders 17 Clinique de Valère SA Clinique Générale 197 Kantonsspital Baden AG 17 Privatklinik Bethanien AG 186 Kantonsspital Winterthur 16 Klinik St. Anna, Luzern 181 Lindenhofspital 15 GZO Spital Wetzikon 178 Kantonsspital Bruderholz 15 Uniklinik Balgrist 177 EOC Ente ospedaliero cantonale 14 Hirslanden Klinik Aarau 169 Stadtspital Triemli 11 Clinique Générale – SteAnne SA 169 Spital Netz Bern (Ziegler, Münsingen, Aarberg) 10 Kantonsspital Liestal 166 Hôpital Neuchâtelois HNE 10 Kantonsspital Baden AG 165 Kantonsspital Graubünden 10 Clinique la Colline 164 Stadtspital Waid 10 Clinique Bois Cerf SA 155 HFR – Hôpital fribourgeois**
Des médicaments censés nous soigner Plus de mal que de bien « Un médicament n’est pas un bonbon » ont martelé divers médecins lors de la polé- mique médiatique autour de la pilule. Les médicaments sont des substances actives, destinées à améliorer un état de santé précis. Mais leur activité justement peut présenter des risques, qu’il convient d’évaluer correc- tement au regard des béné- fices. Et que se passe-t-il quand intérêts politiques et économiques s’en mêlent ? Un dossier*, publié en France en février 2013, rassemble une des médicaments à charge de l’assurance-maladie, et ce se- série de plusieurs dizaines de médicaments estimés plus dan- lon les trois critères de l’efficacité, l’adéquation et l’écono- gereux qu’utiles, qui devraient être écartés des soins et reti- mique. Or actuellement, seul le caractère économique est rés du marché. Les objectifs déclarés des auteurs sont d’ai- contrôlé. Pourtant, une évaluation systématique de l’effica- der les soignants à mieux soigner les patients, en prenant cité serait également nécessaire en Suisse, d’autant plus que en compte les résultats d’une évaluation clinique des médi- l’instrument pour le faire existe. En effet, un programme HTA caments prétendue rigoureuse et indépendante, mais aussi (Health Technology Assessment), tel qu’utilisé dans plusieurs d’interpeller les autorités françaises pour les inciter à prendre pays européens, a été développé. Il est dommage que l’Of- les mesures qui, selon eux, protègeront vraiment les patients. fice fédéral de la santé publique manque d’activité sur ce sujet, alors que le cadre légal existe. « Des médicaments à écarter pour mieux soigner » Les auteurs du dossier résument la situation ainsi : « Au mo- Sous l’angle politique et financier ment de choisir parmi les médicaments pour tel ou tel pro- Une décision de remboursement est un choix politique qui blème de santé, la prudence est de préférer les plus éprou- revient aux autorités. Cependant, santésuisse plaide pour vés, ceux dont les effets nocifs sont rendus acceptables par que tous soient soumis aux mêmes règles et disposent des une efficacité démontrée sur des conséquences concrètes. mêmes instruments. Or, dans le domaine des médicaments, Mais chaque année, de nombreux nouveaux médicaments seule l’industrie pharmaceutique peut faire une demande sont autorisés, malgré l’absence de preuve d’un progrès par de mise sur la liste des spécialités et dispose d’un droit de rapport aux médicaments de référence. Parfois, ils sont en recours envers les décisions de l’OFSP. Il existe pourtant pratique moins efficaces ou plus nocifs. Pour d’autres mé- des situations où d’autres acteurs sont plus à même de ju- dicaments, plus anciens, les espoirs initiaux d’efficacité sont ger un besoin. Ainsi les pharmaciens hospitaliers ont tenté déçus par les avancées de l’évaluation. Ou bien leurs effets de faire inscrire sur la liste certains anesthésiques très utili- indésirables s’avèrent plus importants qu’on ne le pensait. sés dans l’ambulatoire, mais leur demande n’a pas été prise Au final, de nombreux médicaments sont utilisés, alors qu’ils en compte. Enfin, les assureurs-maladie estiment qu’en tant sont plus dangereux qu’utiles, ou que d’autres médicaments que représentants des payeurs de prime, ils devraient avoir leur sont préférables. En pratique, un trop grand nombre le même droit de recours que l’industrie pharmaceutique. de personnes prennent des médicaments qui ne sont pas Cette demande, destinée à défendre les assurés, est d’au- les meilleurs choix possibles, parce qu’il existe des médica- tant plus légitime vu l’utilisation de ce droit faite par l’in- ments aussi efficaces et avec moins d’effets indésirables, ou dustrie ces derniers temps. Il s’agit là de millions payés en parce que des solutions non médicamenteuses sont dispo- trop par les patients. nibles et préférables. » Frédérique Scherrer Evaluation trisannuelle des médicaments Cette publication française interpelle. L’Allemagne a elle aussi * Prescrire, « Pour mieux soigner : des médicaments à écarter », en accès libre sur reconnu qu’il est nécessaire de s’intéresser de près à l’effi- www.prescrire.org > libre accès > les articles en une (Rev Prescrire 2013 ; cacité réelle des médicaments. Les autorités ont ainsi inclus 33 (352) : 138-142) dans la loi une analyse d’utilité. Qu’en est-il en Suisse ? Nos autorités font-elles preuve d’assez de vigilance ? La LAMal et son ordonnance prévoient une réévaluation tous les trois ans 11 | Sous la loupe 3/13
Journée thématique de la fondation pour la sécurité des patients et de la GSASA Sécurité de la médication aux interfaces Que l’on soit pharmacien, infirmière ou médecin, la de sa sortie aura l’effet contraire. La réponse est de pou- question de la continuité des soins semble évidente, et voir prendre conscience de ce problème et de faire un sa- c’est ce thème qui a suscité maintes réflexions lors de vant dosage entre ces deux extrêmes. la journée « Sécurité de la médication aux interfaces, des coupures aux sutures », le 23 avril dernier à Berne. Standardisation et informatisation Résumé Il faut communiquer, certes, mais parlons-nous tous la même langue ? La transmission des informations d’un ser- De nombreuses études suisses ou internationales, citées lors vice à un autre et du corps médical au patient est essen- des présentations, ont montré l’ampleur des problèmes qui tielle. Or entre le dialecte d’une unité et le jargon médical, surviennent tout au long du parcours entre l’ambulatoire et il y a de quoi perdre son latin ! La question du langage en l’hôpital. Il y a, certes, de nombreux intervenants : médecins DCI (Dénomination Commune Internationale, le nom non de famille, pharmaciens d’officine, médecins hospitaliers, commercial d’une substance active pharmacologique, ndlr) pharmaciens hospitaliers, soignants, entourage du patient, a notamment été posée par L. Gattlen, qui pointe les dispa- etc., mais chacun d’entre eux joue un rôle primordial. Ces rités de connaissances entre les corps de métier. rôles doivent être extrêmement bien définis afin que cha- Faisons-nous tous la même chose ? La continuité des soins cun comprenne ce que fait l’autre et ne se cantonne pas à passe par la standardisation des préparations (dilution, éti- son propre « bout de terrain ». quetage, rangement, documentation…). Cette notion a été en effet encouragée par de nombreux intervenants. Coordination et communication Lisons-nous et écrivons-nous de la même manière ? L’infor- De nombreuses interfaces existent au sein de l’hôpital : plu- matisation dans les institutions joue un grand rôle : affichage sieurs médecins pour un même patient, changement de multiple, graphiques standardisés, vison globale… exit les nom de produit, liste restrictive, voie d’administration… prescriptions manuscrites illisibles ! Les médicaments ne tout cela demande au quotidien beaucoup de coordina- sont pas en reste : la GSASA, en collaboration avec l’indus- tion. Or tous ces petits grains de sable s’immiscent dans les trie, a récemment édité des recommandations d’étiquetage, rouages d’un processus déjà complexe. De plus, lorsque fort utiles pour réduire certaines erreurs, tels les look-alike. nous apprenons par le Prof. Dr. K. Fattinger, que seul 25 % des patients ont une anamnèse d’entrée juste ou que 50 % Collaboration des changements ne sont pas documentés dans les lettres Les pharmaciens ne doivent pas se cantonner seulement de sortie, la question des lacunes dans la communication se au sous-sol d’un hôpital, comme l’a rappelé le Dr. P. Muff. pose. A l’inverse, submerger un patient d’information lors Les bases de la pharmacie clinique sont posées, mais un Photo : Keystone La continuité du traitement médicamenteux est d’une importance capitale pour le patient. Les interfaces, par exemple entre l’ambulatoire et l’hôpital, représentent un moment critique à cet égard, et méritent une grande attention. 12 | Sous la loupe 3/13
Photo : HUG long chemin reste encore à parcourir. Une base de don- nées centrale pour l’anamnèse semble idéale, mais ce pro- jet ambitieux est quelque peu perturbé par nos multiples cantons et nos diverses caisses d’assurance-maladie. Mal- gré cela, un travail multidisciplinaire est obligatoire et les pharmaciens se positionnent comme un maillon important, pour l’anamnèse mais aussi lors de ruptures de stock et Comme des jumeaux… une ressemblance parfois fatale d’obtention des médicaments à la sortie de l’hôpital, thèmes qui ont fait couler beaucoup d’encre ces derniers temps. Innovation Comme des jumeaux… une ressemblance parfois fatale Ne soyons pas effrayés par ce mot, bien au contraire ! L’in- tervention de la Prof. M. Stebbins nous a démontré que des Vous connaissez Dupont et Dupond, les fidèles amis de Tin- nouveaux programmes existent aux Etats-Unis (Mary Nay- tin ? Ou les jumeaux Igor et Grichka Bogdanov, célèbres pour lor’s model, CTI, RED et BOOST) afin de gérer au mieux leur émission de science-fiction ? Ces deux exemples, sympa- les transitions ambulatoire-hôpitaux. Tous ces modèles ont, thiques dans le domaine de la culture, illustrent une réalité pré- entre autres, réussi à diminuer les réadmissions des patients occupante du quotidien du personnel soignant et médical : de nombreuses erreurs médicamenteuses sont consécutives aux « hospitalisés, motivation première pour qu’un hôpital amé- sound-alike » et aux « look-alike ». En effet, si des médicaments ricain soit remboursé. Autre point commun : la sortie de aux indications et effets totalement différents ont des noms aux l’hôpital doit se préparer dès le premier jour de l’admis- consonances similaires (sound-alike), le risque de confusion est sion et s’accompagne bien au-delà. Toute l’équipe pluri- grand dans une pratique médicale complexe comme celle du disciplinaire, intra et extra hospitalière, doit garder en tête milieu hospitalier. Un petit exemple, ayant conduit à des inci- la qualité de vie du patient, ses besoins et sa satisfaction. dents en 2012 : valGANcyclovir (Valcyte) et vALAcyclovir (Valt- rex). Il en va de même si les médicaments ont des emballages et De l’admission à la sortie, une bonne organisation. des étiquetages d’apparence semblable (look-alike). A l’hôpital, les discussions d’entrée patient-soignants se Le thème a été porté récemment sur la scène des autorités et de révèlent être un art à part entière et ne doivent pas se li- la politique. Il est possible d’améliorer la situation, par des ac- miter à un rapide dialogue parsemé d’interruptions. Une tions au niveau de l’industrie et des hôpitaux, avant et après la étude réalisée à Heidelberg et présentée par Dr. H. Sei- commercialisation des médicaments (utilisation de la DCI, TALL dling, a montré qu’une double discussion patient-médecin MAN letters, indication du traitement sur l’ordonnance, com- et patient-pharmacien permettait d’obtenir une anamnèse munication, entre autres). Certaines mesures organisationnelles d’entrée beaucoup plus exhaustive. Il est ainsi important préconisées, telles que listes, stockages séparés ou ré-étique- de multiplier les sources, de croiser les informations, et de tage, n’ont pas d’efficacité démontrée et ne sont probablement bien les documenter électroniquement. Pendant le séjour, pas très robustes. Une lecture électronique de codes-barres aux la simplification des processus, décrit par Dr. S. Henz, est différentes étapes est beaucoup plus prometteuse et robuste, également obligatoire afin de ne pas transformer un par- mais nous en sommes malheureusement encore loin. De nom- cours de soins en un véritable parcours du combattant ! breux acteurs œuvrent à la prévention de ces confusions. Ainsi Même si l’adhérence a été simplifiée par des thérapies moins la GSASA, en collaboration avec l’industrie pharmaceutique et la contraignantes (ex : médicaments oncologiques per os pré- fondation pour la sécurité des patients, a publié des recomman- senté par Mme I. Bachmann-Mettler,) ou encouragé par des dations pour améliorer la situation dans le futur. www.gsasa.ch entretiens de polymédication (présenté par K. Hersberger), la sortie du patient doit toujours être accompagnée. Cette Frédérique Scherrer, d’après la présentation de Pascal Bonnabry, HUG sortie comporte un plan de traitement, comme nous le rap- pelle le Dr. R. Pichon, mais son implantation et son accep- tation ne sont pas forcément une chose aisée. Autres discussions Le pharmacien se positionne toujours comme une véritable Le mot de la fin charnière tant logistique (approvisionnement, infovigilance, Nous devons garder à l’esprit que c’est le système qui va génériques et équivalence…) que thérapeutique (polyme- devoir s’adapter aux patients, et non l’inverse. Nous avons dication check, produits OTC, adhésion…). Dans ce mé- entre nos mains la capacité de transformer toutes les cou- tier, nous parlons souvent d’interactions. Utilisons aussi ce pures d’un parcours de soins en de belles sutures, à nous terme sans connotation médicale, c’est-à-dire en se focali- maintenant de les mettre en œuvre chaque jour dans nos sant sur les réactions réciproques positives que nous pou- équipes respectives. vons avoir entre professionnels. Olivia François, Hôpitaux Universitaires de Genève 13 | Sous la loupe 3/13
Photo: màd. 3 questions à Ralph A. Schmid*, président de la Société suisse de chirurgie SSC « De nombreux hôpitaux cherchent à augmenter le nombre des interventions chirurgicales » Pour fêter ses 100 ans d’existence, menté de 25 % alors même que la po- différentes manières de procéder. Le la Société suisse de chirurgie SSC a pulation n’a pas fortement vieilli ni que médecin référent assiste par exemple à récemment lancé une charte contre son état de santé se soit dégradé. Cette l’opération et touche de ce fait un ho- les incitations financières inadmis- augmentation s’explique par des inci- noraire. La SSC a notamment reçu une sibles. En la signant, les chirurgiens tations erronées. Les interventions pla- demande officielle d’un médecin réfé- s’engagent à limiter leurs inter- nifiables permettent d’accroître facile- rent qui voulait savoir s’il devait vrai- ventions aux actes motivés par des ment le nombre de cas. Chez nos voi- ment être présent lors d’une opération raisons strictement chirurgicales et à sins du nord, la pose de prothèse or- pour laquelle il facture des honoraires. rejeter les traitements basés sur des thopédique a explosé. La situation est Il est aussi envisageable que des hôpi- réflexions quantitatives et ce, avant souvent plus claire pour les interven- taux régionaux reçoivent des commis- tout pour protéger les patients. tions d’urgence, même s’il n’est pas ab- sions de cliniques privées lorsqu’elles La SSC a également annoncé des solument nécessaire d’opérer chaque leur adressent des patients. Je n’ai per- mesures contre l’utilisation de faux appendicite par exemple. Pourtant, on sonnellement pas observé de faits de ce titres universitaires. le fait parce que c’est financièrement genre en Suisse. Les cabinets de groupe rentable. La pression à opérer peut aussi aussi négocient des rabais avec les hô- Le premier point de la charte prévoit venir de la direction de l’hôpital. Dans pitaux. De tels contrats ne sont pas ap- que les interventions chirurgicales le système allemand, il est monnaie cou- propriés. ne sont motivées que par des raisons rante que les chirurgiens reçoivent des médicales. Cela ne va-t-il pas de soi ? bonus s’ils opèrent beaucoup ; plus ils Avec la charte, de quoi les chirur- Exprimés ainsi, les principes de la charte le font, plus le bonus est élevé. Les mé- giens veulent-ils protéger les pa- peuvent paraître banals mais leur appli- decins indépendants agréés reçoivent tients ? cation n’est pas si évidente. Aussi, nous parfois des directives quant au nombre Lorsqu’un médecin adresse un patient voulons attirer l’attention assez tôt et de d’opérations qu’ils « doivent apporter » à à un autre médecin, il ne doit pas re- manière honnête sur les risques liés à l’hôpital. En Suisse, je n’ai pas connais- cevoir une commission à l’insu du pa- la pression exercée sur les coûts. Celle- sance de tels contrats et il s’agit de les tient. Un tel agissement porte atteinte ci a pour effet que de nombreux hôpi- empêcher. au libre choix du médecin et à la qua- taux cherchent à augmenter le nombre lité, sans que le patient s’en rende des interventions chirurgicales. L’équi- Il paraît que le transfert de patients compte. En règle générale, les patients libre entre la médecine et l’économie à l’hôpital donne également lieu au font confiance à leur médecin et partent risque d’être compromis. En Allemagne, versement d’une commission occulte. de l’idée qu’il les adresse là où ils se- depuis l’introduction des forfaits par Il y a des médecins qui tirent profit ront le mieux soignés. Ils ne conçoivent cas, le nombre des opérations a aug- lorsqu’ils adressent un patient. Il y a pas que des considérations écono- miques entrent en ligne de compte. Nous conseillons aux patients de tou- jours poser à leur médecin la question, Charte SSC peut-être dérangeante mais nécessaire : 1. Les interventions chirurgicales sont motivées par des raisons médicales. « Gagnez-vous quelque chose si vous 2. Pas de transfert ou d’attribution des patients pour obtenir des avantages financiers et m’adressez au Dr XY ? ». pas de commission liée à ces opérations. 3. Les honoraires doivent correspondre aux soins médicaux effectifs. silvia schütz 4. Pas de traitement fondé sur des réflexions quantitatives financières. Afin de maintenir et de renforcer la confiance des patients, la SSC demande à ses * Le professeur Ralph Alexander Schmid est directeur de la clinique universitaire de chirurgie membres d’indiquer l’origine de leurs titres. Cette donnée est publiée sur www.sgc-ssc.ch, thoracique à l’Hôpital de l’Île à Berne et président dans la liste des membres. La SSC fête cette année ses 100 ans d’existence. de la Société suisse de chirurgie. 14 | Domaine de la santé 3/13
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