Viva - inspirer L'art ne connaît pas de frontières - Helvetia
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viva. Numéro 2|2018 Le magazine des collaborateurs Helvetia inspirer L’art ne connaît pas de frontières
2| 1 Qu’est-ce que l’art? Peut-être vous est-il déjà arrivé de vous dire, en visi- Couverture Œuvre d’Amélie (6 ans), l’une des tant une exposition: «Ça, mon neveu de cinq ans sait heureuses gagnantes du concours aussi le faire»… Pourtant, même si l’art semble se d’art Helvetia pour enfants. Pour en résumer parfois à quelques coups de pinceaux, quelques savoir plus, rendez-vous à la page 49. © Amélie Fritsch zones de couleur, les choses ne sont pas aussi simples. Illustration «Quand j’étais enfant, je dessinais comme Raphaël, © Filip Fröhlich mais il m’a fallu toute une vie pour apprendre à dessiner comme un enfant», constatait le grand peintre espa- gnol Pablo Picasso… Ce tiraillement entre l’art professionnel, l’Art avec un grand A, et l’art enfantin, nous l’avons trouvé si passionnant que nous lui consacrons notre page de couverture. On y voit l’œuvre d’Amélie, six ans, qui nous a été envoyée dans le cadre du concours d’art pour enfants lancé par Helvetia (voir p. 49). Sur près de 60 candidatures, le jury a sélectionné cinq lauréats. En tant qu’assureur d’art de premier plan, nous le savons: les goûts et les couleurs ne se discutent pas, la valeur d’une œuvre est difficile à évaluer. Il faut pour cela une bonne dose de compétence et d’expérience. Mais il faut aussi un regard admiratif sur les petits et les grands artistes de ce monde qui, du bout du pinceau et avec quelques couleurs, rendent sensible l’invisible. Donnez libre cours à votre inspiration! Mona Blum Rédactrice viva Nina Eiber Rédactrice viva
SOMMAIRE «Il m’a fallu toute une vie pour ap- 4 M OT D E L A D I R E C T I O N 32 CO LO N N E DU GROUPE Max Küng prendre à dessiner Dans les règles de l’art Art comme un enfant.» 8 L’A S S U R A N C E D ’Œ U V R E S 33 S U R P L AC E Pablo Picasso D ’A R T H E LV E T I A Se balader au Havre Vos œuvres d’art – habilement assurées 3 4 L’A R T E T L A N U M É R I S AT I O N 11 L E S E RV I C E S P É C I A L I S É Christie’s – la tradition A R T D ’H E LV E T I A et le tout numérique La collection d’entreprise Helvetia entre hier et «Nous mettons au jour un 3 6 aujourd’hui véritable trésor» 14 H E LV E T I A «La numérisation contri- 38 ART SPONSORING buera à professionnaliser Engagée pour l’art le marché de l’art» 16 T E A M T I M E Agence générale Bâle 40 P O U R O U CO N T R E Est-ce l’art? 18 UN JOUR DANS L A VIE DE Olga Britschgi 42 E N T R E V U E D ’A R T I S T E Mentions légales Une conteuse polyglotte Ce magazine des collaborateurs 22 L’A R T E T L E C R I M E d’Helvetia paraît en trois langues Grütter mène l’enquête 4 4 L A M O N D E D E L’A R T (D/F/I). H E LV E T I A Éditeur 24 ENCYCLOPÉDIE Sponsor, collectionneuse, Helvetia Assurances, D U S AV O I R I N U T I L E assureur St. Alban-Anlage 26, 4002 Bâle, Inspiré? Dufourstrasse 40, 9001 Saint-Gall. 4 6 L ’A R T E T L E S M É D I A S Rédaction interne 26 U N R E S TAU R AT E U R S O C I AU X Mona Blum et Nina Eiber D ’A R T R ACO N T E Maître ès réalité (rédactrices en chef), Isabella Awad, Le secret du maître virtuelle Natascha Fabian. Rédaction externe 29 L ’A R T, U N E A FFA I R E 48 LE MONDE DE GMÜR Sara Meier, Christine Stöckli-Harte, TO U T E P E R S O N N E L L E Le vrai art fait la Margrith Mermet, Walter Steiner. différence Traductions Doris Russi Schurter Français: Helvetia Assurances, 24translate GmbH, Saint-Gall, 3 0 L E S C L I E N T S N O U S 49 C O N CO U R S D ’A R T P O U R italien: Chantal Gianoni, Locarno. PA R L E N T E N FA N T S H E LV E T I A Conception, maquette, L’art de collectionner Cinq gagnants mise en page et correction Linkgroup AG, Zurich. 31 Une œuvre d’art, Impression c’est un bien culturel Ostschweiz Druck AG, Wittenbach. Contact redaktion.viva@helvetia.ch, Tél. 058 280 53 24. La rédaction se réserve le droit de raccourcir ou de modifier les textes.
2| 3 26 U N R E S TA U R AT E U R D ’A RT R A C O N T E 31 Le secret du maître L E S C L I E N T S N O U S PA R L E N T Une œuvre d’art, c’est un bien culturel © depositphoto 42 D O IT YO U R- SELF E N T R E V U E D ’A R T I S T E Une conteuse polyglotte À colorier Matériel nécessaire: feutres ou crayons de couleur
MOT DE LA DIRECTION DU GROUPE Dans les règles de l’art David Ribeaud dirige le seg- ment Specialty Markets et donc l’unité Specialty Lines Suisse/International avec les secteurs Assurances tech- niques, Transport et Art. Il nous explique comment les niches peuvent être utilisées comme un avantage concur- rentiel et comment la confiance résulte de la combinaison des relations personnelles et de l’expertise. INTERVIEW Sara Meier PHOTOS Ismael Lorenzo David Ribeaud au Foyer d’art Helvetia, devant l’œuvre «J’adore with joy» (2018) de Klodin Erb.
MOT DE LA DIRECTION DU GROUPE Comment sont nées les Specialty Lines? d’art car les œuvres d’art sont de plus en Elles sont nées sous leur forme actuelle en plus chères. Nous atteignons lentement, 2014 dans le cadre de l’alliance avec Natio- mais sûrement, les limites de capacité. En nale Suisse. Helvetia ne proposait d’ailleurs outre, nous sommes clairement numéro 1 pas d’assurances d’œuvres d’art auparavant. en Suisse avec une part de marché esti- Les Specialty Lines ont des orientations mée à 20%. Nous souhaitons bien entendu très différentes. Qu’ont-elles en commun? conserver cette position et continuer en Elles sont toutes d’une grande complexité. même temps à croître de manière durable. Cela suppose d’avoir des experts fiables et Selon nous, le principal potentiel de un conseil de premier plan. D’autre part, développement est à l’heure actuelle auprès les marchés de niche exigent des systèmes des clients privés. De nombreux particu- adaptés pour une gestion et un service liers aisés possèdent de précieuses collec- efficaces. tions pour lesquelles ils n’ont pas (encore) À quoi ressemble la dimension straté- d’assurance. gique des Specialty Lines? Est-ce la même Quels sont vos objectifs à l’étranger? que l’assurance d’œuvres d’art? Les Nous souhaitons là aussi nous développer. niches génèrent rarement du volume. Mais L’art est devenu dans le monde entier une elles portent en elles une opportunité de nouvelle catégorie de placement, et les collec- différenciation. Avec les Specialty Lines, tionneurs sont de plus en plus nombreux. nous prouvons que la gestion de la complexité, La swissness est extrêmement importante le courage de traiter des sommes d’assu- sur le plan international, avec les valeurs rance élevées ainsi qu’un excellent conseil de fiabilité et de qualité qu’elle véhicule. sont inscrits dans notre ADN. Ainsi, nous À propos des valeurs: quelles sont les pouvons encore mieux nous positionner au- valeurs communes à l’art et à Helvetia? près des PME et des clients industriels et Parmi nos valeurs centrales que sont le contribuer à la stratégie de la clientèle en- dynamisme, l’enthousiasme et la confiance, treprises pour tout le Groupe. je place la confiance au tout premier plan. La plupart des compagnies d’assurance Les propriétaires d’œuvres d’art permettent assurent les œuvres d’art exclusivement aux conseillers en assurance de découvrir dans le cadre de l’assurance inventaire du leur collection et la valeur de leurs objets. Ils ménage et de l’assurance objets de valeur. veulent pouvoir lui faire confiance à 100%. Avec nos assurances individuelles d’œuvres Une telle relation est unique et perdure d’art tous risques, nous offrons à notre même dans un monde numérique. clientèle de meilleures couvertures et des D’autres secteurs vont-ils être intégrés connaissances techniques approfondies par aux Specialty Lines? Oui. La cyber-assu- le biais de nos experts internes. Nous nous rance est venue s’ajouter récemment. Il assurons ainsi une position unique sur le existe d’autres produits de niche potentiels marché, l’accès à une clientèle intéressante et une source de revenus supplémentaire. «L’art est devenu dans le Quels sont vos plans pour le secteur de monde entier une nouvelle l’art? Nous constatons une forte augmenta- tion de la valeur pour les gros risques sur le catégorie de placement.» marché suisse de l’assurance des œuvres David Ribeaud
6| 7 En arrière-plan: «Wundersame Vermehrung» (Multiplication miraculeuse) de Klodin Erb (2018). David Ribeaud est arrivé chez Helvetia lors de la fusion avec Nationale Suisse. Ce scientifique diplômé et actuaire SAV dirige le secteur Specialty Markets ainsi que l’unité de marché Specialty Lines Suisse/International et est membre de la direction du Groupe. Il trouve son activité fascinante de par la diversité, la complexité et les exigences associées en termes de collaboration, d’expertise et d’internationalité transversales. Specialty Markets et Specialty Lines Le segment Specialty Markets comprend trois unités: les Specialty Lines Suisse/International regroupent les secteurs Engineering (Assurances techniques), Marine (Transport) et Art. L’unité de marché France agit principalement comme spécialiste de l’assurance transport. La réassu- rance active entretient des relations étroites et de longue date avec des assureurs primaires dans le monde entier et couvre ainsi tous les secteurs. Les Specialty Markets contribuent au volume d’affaires annuel d’Helvetia, en apportant plus de 900 millions de CHF. 25% proviennent des Specialty Lines et environ 1.5% de l’art. comme la responsabilité des dirigeants ou l’assurance aviation. Avant de nous lancer sur un tel marché, nous vérifions s’il corres- pond à notre positionnement stratégique et s’il peut être rentable à moyen ou long terme. Quelles sont les synergies entre l’assu- rance d’œuvres d’art, le service spécialisé Art et le sponsoring d’art? Les assurances d’œuvres d’art sont un vrai métier. Que nous soyons en plus des mécènes et possédions notre propre collection ne fait que souligner Artistes préférés notre affinité pour l’art en général. V I N C E N T VA N G O G H FE R D I N A N D H O D L E R M A R K R OT H KO
L’A S S U R A N C E D ’Œ U V R E S D ’A RT H E LV E T I A 8| 9 Vos œuvres d’art – habilement assurées Avec Artas, Helvetia se détache nettement de ses concurrents en matière d’assurance d’œuvres d’art. Pourquoi ce produit est-il reconnu dans les milieux artistiques, et pourquoi faut-il conserver la facture lorsqu’on achète une œuvre d’art? Les explications d’Edit Schneider, responsable Assurance d’œuvres d’art Suisse chez Helvetia. TEXTE Margrith Mermet PHOTOS Daniel Bossart H elvetia propose une couverture d’assurance complète pour les œuvres d’art de toute na- ture. Dès que la somme d’assurance dépasse CHF 200 000, souscrire une assurance d’œuvre d’art s’impose. «En-deçà de ce montant, les œuvres entrent dans l’assurance inventaire du ménage ou objets de valeur», précise Edit Schneider, responsable Assu- rance d’œuvres d’art Suisse chez Helvetia. «Artas, c’est une police sur mesure, adaptée aux besoins du client». Autre spécificité: la couverture tous risques. Une même police couvre tous les lieux de conservation de l’œuvre et son transport. Par exemple, lorsqu’on emporte un L’installation «Aufgeweckter tableau de chez soi jusqu’à une maison de vacances, il Rosenscheitel» (Bouton de est assuré aux deux endroits et pendant le transport, rose éveillé) de Pipilotti Rist fascine Edit Schneider que la destination se situe en Suisse ou dans l’espace chaque jour. européen. La condition est toutefois que l’emballage et le transport s’effectuent de manière professionnelle.
L’A S S U R A N C E D ’Œ U V R E S D ’A R T H E LV E T I A «En cas de sinistre, les exposition par exemple, notre couverture peut atteindre montants en jeu se CHF 400 millions. En cas de sinistre, le montant en jeu se chiffre vite en millions.» Heureusement, ces cas chiffrent vite en millions.» sont rares, précise Edit Schneider, mais elle se sou- Edit Schneider, responsable Assurance vient d’un sinistre peu ordinaire survenu il y a quelques d’œuvres d’art Suisse années dans un musée munichois. «Ce musée expo- sait ‹The Red Room (Parents)› de Louise Bourgeois, une installation conçue autour d’un grand lit rouge. Qu’est-ce qui vaut quoi? Une souris l’a trouvée à son goût, elle s’y est installée Pour bien assurer une œuvre d’art, il faut en connaître aussitôt et a causé des dégâts considérables.» la valeur. Afin d’évaluer la prime, les spécialistes d’Helvetia se rendent chez les clients et expertisent L’œuvre du temps les œuvres à assurer. Ils se fondent notamment sur les A force d’être professionnellement en contact avec expertises antérieures, les factures et les certificats l’art, Edit Schneider a développé un intérêt personnel d’authenticité. «En l’absence de justificatifs de valeur, pour ce domaine – mais elle manque de temps. Par ce qui arrive dans le cadre des successions, nos spé- chance, il y a de magnifiques expositions à visiter à cialistes recherchent des œuvres similaires dans les deux pas de chez elle. «J’aime bien aller à la Fonda- banques de données en ligne ou se renseignent auprès tion Beyeler ou au musée d’art de Bâle», dit-elle. Et ce de galeries et de maisons de vente aux enchères.» qu’elle préfère, c’est visiter des expositions assurées Dans une déclaration de plausibilité, ils définissent en- par Helvetia. «Je connais alors la valeur des tableaux suite une fourchette de prix qui sert de base au calcul accrochés au mur et je ne suis plus une visiteuse lamb- de la prime. da, je vois tout avec un regard un peu différent. C’est fascinant!» Des compétences de pointe Helvetia dispose en interne de précieuses compétences. «Nos experts sont sur un pied d’égalité avec les clients et comprennent leurs besoins», souligne Edit Schnei- der. C’est important, ajoute-t-elle, pour que les clients se sentent entre de bonnes mains. Certains des un- derwriters sont historiens de l’art et tous les membres de l’équipe disposent d’une longue expérience dans L’assurance d’œuvres d’art Artas L’assurance d’œuvres d’art relève du domaine l’assurance d’œuvres d’art. «Sans compter que mon «Marine & Art», qui fait partie des Specialty équipe est très stable. Environ 80% de ses membres Lines. Ce service se subdivise en quatre équipes ont dix ans d’ancienneté.» Le volume de primes de l’as- d’underwriting (Bâle, Zurich, Romandie, Tessin) et compte onze collaboratrices et collaborateurs. surance d’œuvres d’art en Suisse est estimé à environ Edit Schneider, qui le dirige, travaille dans le CHF 50 millions, dont une part importante revient à secteur des assurances depuis 26 ans. Ces neuf Helvetia. Cette dernière joue ainsi un rôle de premier dernières années, elle a exercé diverses fonctions de direction au sein du service Art – d’abord plan en la matière et, grâce à son offre sur mesure et chez Nationale Suisse puis, depuis 2015, chez à ses équipes de spécialistes, elle se détache nette- Helvetia en qualité de responsable Assurance ment de la concurrence. d’œuvres d’art Suisse. Une souris ravageuse Le niveau de couverture que permet la réassurance compte aussi parmi les avantages d’Artas. «Pour une Artistes préférés JEFF KOONS PIPILOTTI RIST
L E S E R V I C E S P É C I A L I S É A R T D ’ H E LV E T I A 10 | 11 La collection d’entre- prise Helvetia entre hier et aujourd’hui L’architecture moderne, qui fait une large place au verre, met les curateurs de collections d’entreprise à rude épreuve, tout comme les espaces de travail ouverts. Andreas Karcher, responsable du service des Beaux-Arts chez Helvetia, relève le défi au quotidien et, avec son équipe, il ne cesse d’enrichir la collection d’art d’Helvetia. L ’art occupe une grande place chez Helvetia. À la La légitimation d’un savoir-faire fois assureur d’œuvres d’art et mécène, cette en- C’est en 1943 que, par passion personnelle notam- treprise possède la plus ancienne collection d’art ment, le directeur de l’époque jeta les bases de ce de Suisse – une collection représentative de la créa- qui allait devenir l’activité de collection d’Helvetia tion artistique dans notre pays, du 20e siècle à nos (voir encadré). Aujourd’hui, cette activité répond à des jours. «Nous prenons soin de la collection et nous l’en- préoccupations «contemporaines». «Ce n’est pas seu- richissons grâce à de nouvelles acquisitions. Nous la lement une question d’image. En tant que leader de rendons aussi accessible au personnel et au public», l’assurance d’œuvres d’art, nous légitimons notre pro- explique Andreas Karcher. fessionnalisme par l’expérience acquise dans le cadre de notre longue activité de collection», souligne Une longue tradition Andreas Karcher. Mais l’enjeu, c’est aussi la responsa- La maxime qui régit l’activité de collection d’Helvetia bilité de l’entreprise envers la société et le personnel. n’a pas changé depuis les débuts, il y a 75 ans. «Nous «L’art fait partie de notre culture d’entreprise. Il crée un nous focalisons sur l’art contemporain suisse. Nos dis- cadre agréable pour toutes celles et tous ceux qui tra- ciplines de prédilection sont la peinture, le dessin et la vaillent ici.» Il n’y a aucune appréhension à surmonter, photographie, sans oublier la sculpture, les objets et comme parfois lorsqu’on franchit le seuil d’une galerie – la vidéo», précise Andreas Karcher. Les achats sont l’art est là, tout simplement, et produit son effet. «Beau- confiés à une commission d’acquisition dont font partie, coup considèrent comme un privilège d’être entourés outre Andreas Karcher, sa collègue curatrice Nathalie d’œuvres d’art dans leur quotidien professionnel.» Loch et Endre Horvath d’Helvetia. Ils s’effectuent dans Andreas Karcher, lors d’un job d’été chez Natio- des galeries, directement dans les ateliers ou parfois nale Suisse Assurances, fut fasciné lui aussi par l’omni- lors de salons, avec une priorité pour les jeunes présence de l’art. La curatrice de la collection alors en artistes. poste, Verena Widmer, lui demanda un beau matin s’il accepterait de rédiger des petits textes sur les artistes de la collection pour un catalogue d’exposition. Le pre- mier pas était franchi...
L E S E R V I C E S P É C I A L I S É A RT D ’ H E LV E T I A «L’art fait partie de notre culture d’entreprise.» Andreas Karcher, responsable du service des Beaux-Arts Andreas Karcher à l’exposition de Klodin Erb au Foyer d’art Helvetia. La collection d’art Helvetia Les débuts de la collection d’art Helvetia remontent à 1943 – l’époque de l’ancienne Nationale Suisse Assurances. Le directeur d’alors, Hans Theler, était un collectionneur averti et avait noué de nombreux contacts avec des artistes et des galeries. Pour constituer la collection d’entreprise, il se concentra sur l’art contemporain suisse. Helvetia s’inscrit dans la même lignée: la Commission d’art, constituée en 1998, a gardé cette orientation pour l’activité de collection et considère que son engagement fait partie intégrante de la responsabilité d’entreprise.
12 | 13 Le défi des espaces de travail ouverts Intégrer l’art avec doigté dans l’environnement de tra- vail, c’est un défi pour les curateurs. En effet, «la mul- tiplication des espaces ouverts signifie pour nous une réduction des surfaces d’accrochage», note Andreas Karcher. Dans l’architecture moderne, il y a peu de cloisons, mais beaucoup de verre et de lumière inci- dente – or les œuvres d’art, souvent sensibles à la lu- mière, peuvent en pâtir. Toutefois, cette évolution est aussi l’occasion d’explorer de nouvelles voies en créant par exemple des salles d’exposition, des zones dédiées à l’art au sein des bâtiments, ou encore des projets comme «Art et architecture». Nul doute que cela influera sur l’activité de collection d’Helvetia à l’avenir et la fera évoluer. Le Foyer d’art Helvetia Helvetia possède déjà son propre espace d’exposi- tion – dans le nouveau bâtiment du Steinengraben, à Bâle, juste à côté du fameux bâtiment administratif où la collection prit son essor. Andreas Karcher et sa col- lègue Nathalie Koch y présentent des expositions thé- matiques réunissant des œuvres de la collection et des prêts. Parfois, ils donnent carte blanche à des ar- tistes dont les œuvres sont présentes dans la collection. L’assurance et le monde du travail sont des thèmes récurrents, comme lors des expositions «All-Risk», dont le titre parle de lui-même, ou «Have a Seat», en- tièrement consacrée à la position assise. Le Foyer d’art Helvetia accueille chaque année trois à quatre expo- sitions accessibles au personnel à tout moment. TEXTE Margrith Mermet PHOTO Daniel Bossart Artistes préférés REMBRANDT PIPILOTTI RIST M A R I N A A B R A MOV I Ć JULIAN CHARRIÈRE
«Pour assurer des œuvres d’art, mieux vaut s’y connaître.» Dr Dietrich von Frank, responsable Art Sponsoring Dietrich von Frank devant «Der Pianist» de Paul Camenisch (1925). Engagée pour l’art Grâce à Helvetia, c’est possible: une fois numérisées, des œuvres jadis cachées au regard du public, entreposées dans d’obscures réserves, retrouvent la lumière des salles d’expo- sition. Mais ce n’est là qu’un des multiples engagements en faveur de l’art que Dr Dietrich von Frank, responsable Art Sponsoring chez Helvetia, concrétise avec passion. TEXTE Margrith Mermet PHOTO Daniel Bossart
H E LV E T I A A R T S P O N S O R I N G 14 | 15 L ors de la fusion avec Nationale Suisse, Helvetia Une opportunité à saisir a repris la collection d’entreprise et ses quelque Le passage de Nationale Suisse à Helvetia fut une op- 1800 œuvres; elle a aussi investi le segment de portunité pour Dietrich von Frank, d’autant plus qu’il l’assurance d’œuvres d’art, de sorte que l’art occupe s’accompagnait d’une nouvelle mission: développer le aujourd’hui une place importante au sein de l’entreprise. sponsoring artistique au sein du département Bran- Il était évident qu’Helvetia, outre son solide engagement ding. «En la matière, Helvetia a entrepris d’écrire un en faveur du sport, de la culture et du développement nouveau chapitre de son histoire et a abordé la ques- durable, resterait un promoteur et un défenseur actif tion avec beaucoup d’ouverture et de curiosité.» Mais des activités artistiques. Dietrich von Frank, après avoir il reste selon Dietrich von Frank un potentiel à exploiter exercé différentes fonctions chez Nationale Suisse, est pour mieux valoriser et faire connaître cet engagement aujourd’hui responsable Art Sponsoring chez Helvetia. auprès du public. «Les musées se prêtent remarqua- «Mon objectif est de positionner Helvetia, aux yeux du blement bien à l’organisation d’événements pour les grand public, comme une entreprise qui aime l’art», clients. Les projets de numérisation permettent de jeter affirme-t-il. un œil en coulisse, ce qui est toujours apprécié des visiteurs.» Un nouveau regard sur l’art Le projet de numérisation lancé dans le sillage de la Une passion personnelle au service stratégie helvetia 20.20 est essentiel à cet égard. Il d’un métier consiste à aider des musées suisses à numériser leurs L’art joue un rôle capital dans la vie de Dietrich von collections (voir encadré). «Les curateurs n’ont d’autre Frank. La rencontre s’est faite dès l’enfance, lorsqu’une choix que de développer des formats d’exposition tota- de ses tantes lui a offert un livre de photographies sur lement nouveaux, afin d’attirer la génération montante», le château de Sans-Souci à Potsdam. «Ce livre, je l’ai note Dietrich von Frank. Avec le soutien financier littéralement dévoré», se souvient-il. A sept ans, la d’Helvetia, les spécialistes des musées numérisent les beauté architecturale et la décoration intérieure d’un œuvres marquantes et les intègrent dans une banque pavillon munichois du 18e siècle l’ont fasciné. Ce de données. «Etudiants, chercheurs, amateurs d’art, furent deux expériences fondatrices, annonciatrices tous peuvent ainsi accéder en ligne à ces œuvres et de sa carrière professionnelle. Après des études en faire des recherches sans avoir à se déplacer.» Mais histoire de l’architecture, il a travaillé dans le com- l’engagement d’Helvetia ne s’arrête pas avec la numé- merce d’objets d’art, l’architecture d’intérieur, l’assu- risation de la dernière œuvre. «Nous soutenons, pro- rance d’œuvres d’art, et enfin l’Art Sponsoring. «La mouvons et accompagnons les expositions nées des passion pour l’art est comme un fil rouge dans ma vie», projets de numérisation – financièrement, mais aussi constate-t-il. Il aime dialoguer avec les artistes, car en termes de contenu», précise Dietrich von Frank. «on regarde et on comprend une œuvre tout autrement quand on connaît son auteur.» Les projets de numérisation Outre le lancement de projets de numérisation sur différents marchés, une des ambitions de Dietrich von – Musée Kirchner, Davos: numérisation de 160 carnets d’esquisses (projet en cours jusqu’à fin 2018), voir article Frank est de numériser la collection d’art d’Helvetia et p. 34 de proposer une expérience interactive de celle-ci. – Musée d’art Lucerne: traitement conservatoire et «Ce serait quand même saugrenu que nous aidions numérisation de vidéos d’artistes des années 1960–70 des musées à numériser leurs collections alors que la (projet en cours jusqu’à fin 2019) – Musée d’art Berne: projet «Meret Oppenheim digital»: nôtre, qui n’a rien à leur envier, reste sous forme ana- traitement conservatoire et numérisation de vidéos d’artistes logique», souligne-t-il avec malice... des années 1960–70 (projet en cours jusqu’à fin 2020) – Musée d’art Bâle: numérisation de 3000 dessins anciens datant des 15e, 16e et 17 e siècles (projet en cours jusqu’à fin 2020) Artiste préféré L U C I O F O N TA N A
TEAM TIME Le conseiller nouveau est arrivé! Bonne ambiance à Bâle: 41 des 53 collaborateurs de l’agence générale Bâle. AG Bâle Facts & Figures – Effectifs: 53 – Clients: 28 000 – Segments de clientèle: clients entreprises, vie collective – Chiffre d’affaires: objectif: chaque conseiller fixe 15 rendez-vous par semaine, deux dans le conseil global et deux pour les PME – Le conseil de Patrick Kronenberg: Art Basel, la plus grande foire de l’art au monde, et TRESOR Basel, une exposition modeste mais brillante, qui met à l’honneur les outsiders
16 | 17 44 musées et galeries et la plus grande foire artis- tique au monde: à Bâle, on n’est jamais loin de l’art. C’est en tout cas l’avis de notre agent général Patrick Kronenberg et de son équipe. L e foisonnement culturel et artistique de Bâle Des fondations solides pour un édifice se reflète dans le travail de cette Agence robuste générale. Non seulement les collabora- «Les affaires d’assurance nécessitent de bien combiner teurs sont friands de musées et d’exposi- la vente et le soutien à la vente», continue Patrick tions, mais leurs clients se renseignent régu- Kronenberg. Une maison n’est solide que si elle re- lièrement sur les assurances qui couvriraient pose sur des fondations fortes. C’est pourquoi les leurs tableaux de maîtres et autres trésors. «Par exemple, collaborateurs de longue date tiennent à transmettre ils souhaitent accrocher dans leur salle à manger une leur savoir-faire aux plus jeunes: «Investir dans la re- œuvre valant un demi-million – et c’est là qu’inter- lève, c’est essentiel pour Helvetia.» Et le patron montre viennent nos conseillers», raconte Patrick Kronenberg. l’exemple: «Je tends toujours la main à ceux qui veulent Outre le thème de l’art, son Agence générale s’occupe progresser.» aussi de l’industrie pharmaceutique – surtout parmi la clientèle entreprises. C’est ainsi que la diversité bâloise Direct et sincère détermine les priorités du travail quotidien. L’Agence générale de Bâle emploie 53 collaborateurs, dont cinq apprentis. Patrick Kronenberg s’entend bien Un métier en pleine mutation avec tout le monde: «Je suis très direct et ouvert. Pour Patrick Kronenberg n’en doute pas: le travail de conseil- moi, c’est important que chaque collaborateur sache ler est à l’orée de grands changements. «Certes, les où il en est, ce qu’il fait bien et où nous devons lui clients qui souhaitent assurer des œuvres précieuses fournir du soutien.» Mais après des journées intenses, ou confier leur prévoyance LPP à un assureur continue- voire stressantes, Patrick Kronenberg sait faire le vide ront de compter sur un conseiller personnel. Mais le et se détendre. Par exemple, en faisant un tour au client lui-même devient de plus en plus ‹hybride›, et musée... les interactions en ligne deviennent toujours plus im- portantes – surtout pour les questions triviales. Le TEXTE Natascha Fabian PHOTO Barbara Jung conseiller doit avoir beaucoup de cordes à son arc s’il souhaite se rendre indispensable», estime Patrick Kronenberg. Le comportement des clients se trans- forme, et à sa suite les processus de conseil: les clients veulent en effet obtenir une plus-value. Cela veut dire que le conseiller doit non seulement être ultra-qualifié, mais aussi maîtriser les derniers développements de la société et de la politique: c’est le conseil à 360 degrés.
UN JOUR DANS LA VIE DE Ce que 5.6.18 vaut un Picasso La vie d’Olga Britschgi tourne autour de l’art. Chargée de souscription pour les produits Art en Romandie, elle estime les œuvres détenues par des particu- liers, mais aussi par des galeries et des musées, et leur propose des solutions d’assurance sur mesure. Son temps libre toutefois, elle préfère le passer entou- rée de sa famille plutôt que de grands artistes. 6 h 30 – Alors que la maisonnée dort encore, Olga Britschgi se met en po- sition du lotus et fait quelques exer- cices de yoga. 7 h 15 – Elle réveille ses deux fils, Aurélien et Maxime, âgés de sept et dix ans. Fini le calme! Il faut se dépêcher de s’habiller et déjeuner. Olga essaie d’accompagner ses enfants à l’école: «J’aime cette promenade de 15 minutes, surtout en été, quand il fait beau et chaud dès le matin...». 8 h 30 – Au bureau, Olga lit tout d’abord ses e-mails, et y répond tout de suite. «Je préfère que les tâches ne s’empilent pas sur mon bureau.» 10 h 00 – Elle accompagne un conseiller chez son client, dans une banlieue cossue de Genève. Après un café et un peu de bavardage, le client les em- mène voir sa collection, qui comprend une cinquan- taine d’œuvres de divers artistes. «Je photographie
18 | 19 10:00 10:15 Après avoir étudié l’histoire de l’art à Genève et avoir travaillé chez Christie’s et dans une galerie d’art contemporain, Olga Britschgi est entrée chez l’ancienne Nationale Suisse en 2011. Depuis, en tant que souscriptrice Assurance d’art, elle assiste les agences générales et les courtiers en Romandie dans le conseil à leurs clients. Il y a quelques années encore, elle pensait le monde de l’art beaucoup plus élitiste qu’aujourd’hui. Ses artistes préférés? «J’en ai beaucoup, mais j’admire particulièrement Zao Wou-Ki.» Olga Britschgi vit avec son mari et ses deux fils à Genève.
UN JOUR DANS LA VIE DE 12:00 les peintures et sculptures et note les données de ré- de la création artistique. Après un tour de l’exposition, férence de chaque œuvre. J’en ai besoin pour faire elle discute avec les conseillers et leurs clients autour un inventaire et une offre détaillée», explique Olga. Y de l’apéro dînatoire. avait-il des Picasso, des Rembrandt, des Rodin? On ne 22 h 00 – Enfin de retour à la maison! Elle et son le saura pas. mari se racontent brièvement leur journée. Avant de 12 h 00 – De temps en temps, Olga Britschgi s’endormir, elle feuillette le journal. Elle songe à la s’offre à midi une heure de taï-chi. «Un contrepoint à journée qui l’attend, avec satisfaction: «Demain, ce ma journée agitée.» Elle mange ensuite une salade à sera une journée plutôt calme, sans déplacements – je son bureau, et se met à étudier l’inventaire du collec- pourrai donc passer la soirée avec mes fils!» tionneur visité le matin. À 14 h 15, le train l’emmène à Les week-ends d’Olga sont entièrement consa- son prochain rendez-vous, à Lausanne. crés à sa famille et ses amis. «Nous allons nous pro- 15 h 30 – Olga Britschgi rencontre un marchand mener en montagne ou en forêt. Parfois, nous allons d’art dans sa galerie. Elle inspecte les lieux et s’informe aussi au musée – mais jamais trop longtemps, car mes des artistes représentés par la galerie. Ensemble, ils fils s’y ennuient vite!», rit-elle. Le soir, les Britschgi aiment définissent la couverture d’assurance appropriée. Olga recevoir des amis. «Mon mari est un excellent cuisi- promet au galeriste une offre sous 48 heures. Avant le nier», confie-t-elle. rendez-vous suivant, elle a le temps de prendre un café avec un collègue. TEXTE Isabella Awad PHOTOS Fabian Unternährer 18 h 00 – Cette année, Helvetia parraine l’expo- sition «Hodler et le Léman» au Musée d’art de Pully. Ce soir, une agence générale de Lausanne y invite ses clients. Olga Britschgi présente brièvement l’événe- ment, expliquant l’engagement d’Helvetia en faveur Artiste préféré ZAO WOU-KI
20 | 21 «Son temps libre toutefois, elle préfère le passer entourée de sa famille plutôt que de grands artistes.» Olga Britschgi 15:30
L’A R T E T L E C R I M E Henri Matisse, sculpture en bronze de sa fille Marguerite (1906) © Succession H. Matisse/2018, ProLitteris, Zurich © Courtesy Galerie Kornfeld, Berne Grütter Registre des œuvres d’art perdues (ALR) L’ALR, dont le siège est à Londres, mène est la plus grande base de données au monde des œuvres d’art volées ou perdues. Il a été créé en 1991 par des maisons de vente, par le marché international de l’art, par l’enquête des représentants de l’industrie des assurances et par l’International Foundation for Art Research. Sur demande, l’ALR entreprend des recherches sur l’authenticité, la provenance, l’importation et l’exporta- tion et sur la valeur des œuvres d’art enregistrées. Un mystère artistique et www.artloss.com policier – une histoire vraie. Philippe Grütter Philippe Grütter est spécialiste Senior des sinistres œuvres d’art depuis près de 15 ans. À ce titre, il traite tous les cas en Suisse et d’ampleur internationale. La cause principale des sinistres sur des œuvres d’art est l’erreur humaine, par exemple une manipulation inappro- priée lors de l’accrochage ou du décrochage, à l’emballage, lors de l’entreposage ou du transport. Les vols d’œuvres d’art sont heureusement assez rares.
22 | 23 U ne sculpture de Matisse est volée en l’époque tout comme aujourd’hui, celui-ci est détruit Suisse et disparaît. 30 ans plus tard, passé un délai de dix ans. Une aubaine peut néanmoins elle refait soudain son apparition en aider le propriétaire initial: il a archivé quelques docu- France. Sept mois s’écoulent avant ments dans ses caves. que l’expert en art d’Helvetia Phi- Avec l’aide du Registre des œuvres d’art perdues, lippe Grütter puisse la serrer dans Philippe Grütter réussit à faire saisir «Marguerite» en ses bras. Un cas de sinistre fort en sensations. France et à organiser son transfert depuis la maison de vente à destination de la Suisse. Il reçoit un courrier 1906, dans l’atelier d’art d’Henri Matisse de la Brigade de répression du banditisme de la po- à Paris. lice parisienne. Il est indiqué que les autorités doua- La petite Marguerite regarde son père travailler. Il est nières refusent l’expédition de la statuette car il s’agit en train de sortir une petite statue en bronze de son d’un cas Interpol non résolu pour lequel tout négoce moule. D’une habile main de maître, il grave le numéro est illicite conformément à la Loi sur le transfert des d’édition dans la représentation en bronze de sa «fille biens culturels (LTBC). Mais l’histoire ne s’arrête pas là: de l’atelier» si chère à son cœur. dans l’entreprise de logistique qui avait transporté la statue pour qu’elle soit vendue en France, les docu- 1990, un lundi matin dans un musée ments d’importation ont disparu. en Suisse: Grütter a beaucoup à faire. Il doit premièrement Un collaborateur du musée remarque l’absence de prouver qu’Helvetia est la propriétaire légale de «Mar- «Marguerite» et le signale à la police. Pendant les guerite». Deuxièmement, il doit établir que l’importation jours fériés, la sculpture a été détachée de son socle en France s’est déroulée de façon licite et, troisième- et subtilisée. La police locale met tous les moyens en ment, qu’une exportation de l’œuvre ne constitue pas œuvre jusqu’à lancer un appel à Interpol. Nationale une violation de la LTBC. Et pour finir, il doit obtenir Suisse qui était alors l’assureur de ce don est également une suppression de l’avis Interpol. informée du vol simple. Il enregistre l’œuvre dans le Ce qu’il doit faire en premier est compliqué Registre des œuvres d’art perdues (voir encadré). Mais puisque Nationale Suisse, c’est aujourd’hui Helvetia. «Marguerite» n’est pas retrouvée – les voleurs non plus. Il doit donc présenter un certain nombre de pièces et apporter des preuves aux autorités étrangères. Le 2017, janvier, au Steinengraben à Bâle, deuxième point est délicat mais il réussit finalement dans le bureau de Philippe Grütter, spécialiste des grâce au transporteur auquel il confie le transfert-re- sinistres œuvres d’art: Grütter répond au téléphone et tour. Pour le troisième point, la sollicitation du Minis- ses yeux s’écarquillent. Il apprend par le Registre des tère public est nécessaire. Et le quatrième point s’avère œuvres d’art perdues que la statue en bronze «Mar- quasiment impossible puisque le service de police guerite» a été vue dans une maison française de qui avait rédigé l’avis Interpol n’existe plus. vente aux enchères. Le vendeur doit rester anonyme Grâce au bon esprit d’équipe, à la patience et tout comme le motif de la vente. Philippe Grütter se au tact exceptionnel de toutes les parties prenantes, met au travail. Philippe Grütter a pu enfin aller chercher «Marguerite» D’un point de vue formellement juridique, «Mar- à la douane le 3 août 2017. Il fêtera la fin heureuse de guerite» appartient à Helvetia. Après la déclaration ce feuilleton par un apéro de bienvenue avec les col- de vol et l’enquête de police sans résultat, Nationale lègues d’Underwriting Art et l’équipe Sinistres de Suisse avait indemnisé l’œuvre d’art au titre d’un Specialty Lines chez Helvetia. dommage total. Ainsi, les droits de propriété ont été transférés à la compagnie d’assurances, laquelle a été TEXTE Sara Meier PHOTOS Barbara Jung intégrée à Helvetia en 2015. Dans les archives, Grütter ne trouve plus le dossier du sinistre. En effet, à Artiste préféré: A L B E R TO G I ACO M E T T I
E N C Y C L O P É D I E D U S AV O I R I N U T I L E Inspiré? Voici de quoi vous inspirer… ou vous faire rire ou soupirer. © depositphoto Le café facilite la concentration, mais ce n’est pas la bonne boisson pour les personnes en quête d’inspiration. L’alcool, en revanche, influe sur les neurones du cerveau et entraîne des hésitations dans le traite- ment des informations. Cela permet donc de tracer plus facilement des liens entre différentes idées. L’inspiration s’en trouve donc stimulée! Attention: La consom- L’art grâce à l’intelli- mation irraisonnée gence artificielle? d’alcool crée un chaos Apparemment, la créativité n’est plus réservée à très peu inspirant. l’humain: des robots apprennent également à peindre. Le programme Deep Dream génère, à partir de tableaux existants, de nouvelles œuvres – qui se négocient déjà à des prix élevés!
24 | 25 mio. Le prix le plus élevé jamais payé pour une œuvre d’art contemporaine Jean-Michel Basquiat En mai 2017, «Untitled», du peintre 750 Le vol le © Jean-Michel Basquiat, afro-américain Jean-Michel Basquiat, Area, New York, 1986 a été vendu pour 110,5 millions de plus coûteux (b/w photo) / Photo © Ben Buchanan / dollars au milliardaire japonais Bridgeman Images d’une œuvre Yusaku Maezawa, pour son futur musée privé. C’est la première œuvre artistique créée après 1980 à avoir dépassé aux enchères la barre des 100 millions de dollars. Mais le tableau le Le 21 août 1911, le monde a plus cher du monde est sans doute le «Salvator Mundi» retenu son souffle. Ce jour-là de Léonard de Vinci: l’an passé, il a été adjugé aux a été annoncé le vol le plus enchères par Christie’s pour plus de 450 millions de sensationnel de l’histoire: dollars. Eh oui, l’art est cher. Vincenzo Peruggia, 29 ans, avait volé le chef-d’œuvre de Les éclairs Léonard de Vinci, «La Joconde», au musée du Louvre. Ce n’est que deux ans et demi plus tard que l’énigme a été résolue et qu’on a retrouvé le tableau. La Joconde est considérée comme de génie le tableau ayant la plus haute viennent en marchant valeur d’assurance: les estima- Pour encourager l’inspiration, mieux tions vont de 750 millions à vaut bouger: d’après une étude de 1 milliard de dollars. l’American Psychological Association, le mouvement stimule la créativité. Allez, L’artiste le plus copié tous en marche! Bien copier les grands maîtres, c’est tout un art: aucun peintre n’est autant copié que © depositphoto Vincent Van Gogh. Même à la grande exposition Van Gogh de Bâle en 2009, au moins deux faux ont été présentés au public! Comment est-ce possible? Jusqu’à présent, il n’existe aucun répertoire officiel de ses œuvres.
U N R E S TA U R AT E U R D ’A RT R A C O N T E Le secret du maître Restaurer, c’est conserver. Cela nécessite «Que fait un restaurateur au juste?» de comprendre parfaitement l’artiste, Voilà une question que Markus Gross entend son œuvre et l’esprit de son époque. En bien souvent. Sa réponse est calme et précise: «Le cœur de mon travail de restaurateur ré- collaboration avec son équipe d’ex- side dans la préservation de l’art.» 80% sont perts, Markus Gross, responsable de la consacrés au contrôle, à l’entretien et à la restauration à la Fondation Beyeler, documentation, et 20% à la restauration. Il dévoile tous ces mystères avec respect est rare qu’il intervienne lui-même sur un et passion. objet. Et quand bien même, il s’agit le plus souvent de re-restaurations, c’est-à-dire de la restauration d’anciennes restaurations. TEXTE Sara Meier PHOTOS Daniel Bossart Restaurer, c’est aussi conserver. Markus Gross tente en premier lieu de dé- voiler l’intention initiale de l’artiste à partir des matériaux et des différents composants. Il suit le parcours d’une œuvre et de son maître sur plusieurs années ou décennies. Pour ce faire, il s’appuie sur des photos, des textes et des bases de données relatives à des artistes, à des œuvres, à l’époque et à des œuvres comparables. Cette analyse quasi scientifique s’inscrit dans le cadre d’une stratégie de conservation. Pour la mettre en La Fondation Beyeler est un musée d’art moderne et contemporain. Il est l’un des plus œuvre, il discute des mesures de restaura- beaux au monde. Il a acquis une renommée internationale et tion avec les conservateurs pour déterminer s’est imposé comme le musée d’art le plus visité de Suisse, en la mesure la plus judicieuse. Une bonne particulier grâce à ses expositions d’œuvres de célèbres artistes des 19 e, 20e et 21e siècles. Le musée se concentre sur le ressenti restauration doit être invisible à l’œil de personnel et l’expérience sensorielle du visiteur au contact de l’observateur. l’art de de la nature. Le couple de collectionneurs Hildy et Markus Gross décrit son activité Ernst Beyeler a rassemblé pendant 50 ans des œuvres prisées du courant moderne classique. En 1982, la collection a été comme un véritable travail d’équipe: «L’ana- transférée vers une fondation, puis présentée pour la première lyse, les décisions stratégiques et les réa fois au public en 1989. lisations interviennent dans le cadre d’un fondationbeyeler.ch dialogue étroit avec les conservateurs de
26 | 27 «Chaque chef-d’œuvre contient un mystère, qui ne se dévoile jamais entièrement.» Markus Gross
U N R E S TA U R AT E U R D ’A RT R A C O N T E la Fondation Beyeler et des experts ex- ternes, dont certains viennent du bout du monde», explique-t-il. Ainsi, le restau rateur est devenu un as du réseautage qui recrute des experts au profil approprié et tire toutes les ficelles. Plus une œuvre est récente, plus cette équipe est grande. La numérisation accélère la transformation de ce métier. La restaura- tion de tableaux classiques implique des expériences et des connaissances sur des technologies datant de plusieurs siècles. Les installations contemporaines sur la base de médias qui reposent, par exemple, sur une numérisation totale, posent de toutes nouvelles problématiques. L’empi- risme manque à l’appel: les matériaux ne se sont pas encore modifiés, on ne connaît ni leur fragilité, ni leur comportement au vieillissement. Pour Markus Gross, ce spectre est d’autant plus fascinant que la Fondation Beyeler abrite elle aussi quelques œuvres contemporaines. Art ou technique de conservation? La rencontre entre l’art et la nature est au centre «Un bon restaurateur doit maîtriser les des activités, lors de notre visite à la Fondation Beyeler, deux», explique Markus Gross, convaincu. où travaille Markus Gross. Pour lui, la matérialité passe au premier plan. Il s’intéresse au «comment», donc à la matérialité et à la méthode. En même temps, il a le plus grand respect pour le «pourquoi». En effet, une œuvre est selon lui l’expression individuelle, voire intime, d’un esprit créatif. C’est pourquoi il se consacre entièrement à l’artiste et à son œuvre et décrit son ressenti comme suit: «Dès que je me penche sur une Markus Gross est un restaurateur qualifié, qui dirige depuis 2001 œuvre, je m’y lance à corps perdu.» Selon le service Restauration de la Fondation Beyeler. Markus Gross, il se cache derrière chaque Son trio gère près de 350 œuvres – tableaux, œuvre un secret qui ne se laisse pas totale- sculptures, installations, travaux sur papier. ment percer. L’expert munichois s’intéresse à tout ce qui a trait à l’art, et donc aussi à l’artisanat, à l’histoire de l’art et à l’architecture. Véritable passionné de la nature, il est toujours enthousiasmé au quotidien par le concept de la fondation qui se concentre sur l’art et la nature. Artiste préféré: « L’ Œ U V R E Q U E J E PRÉFÈRE EST CELLE SUR L A Q U E L L E J E T R AVA I L L E . »
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