L'accès à l'éducation n'est rien, si la formation n'est pas de qualité
←
→
Transcription du contenu de la page
Si votre navigateur ne rend pas la page correctement, lisez s'il vous plaît le contenu de la page ci-dessous
MAGAZINE COALITION NATIONALE DE L’EDUCATION POUR TOUS EN RDC N°001 / Février-Avril 2017 COLIN NZOLANTIMA «La gratuité de l’enseignement, c’est possible au Congo» La CONEPT RDC en campagne pour l’abolition des frais de scolarité JACQUES TSHIMBALANGA “L’accès à l’éducation n’est rien, si la formation n’est pas de qualité”
SOMMAIRE BILLET A CŒUR OUVERT * Sauvons * Les confidences nos écoles du Père Ekwa P.3 P.10 * Wali Bela : «Grâce au CONEPT INFOS Proseb, nous avons distribué 22 millions de manuels dans les écoles * La Conept-Rdc de la RDC» en campagne P.12 pour l’abolition des frais de scolarité P.4 * Jacques Tshimbalanga : «L’accès à l’éducation n’est rien, si la formation n’est pas de qualité» * Société civile : P.15 des comités pour veiller sur l’éducation * Colin Nzolantima : de qualité «La gratuité de P.5 l’enseignement, c’est possible au Congo» P.18 * Unesco, un allié de taille * Guy David Kabango : dans la quête de « La gratuité de l’éducation pour l’enseignement n’est tous pas effective, suite à un P.6 problème de gestion » P.20 ECOLE ACTU * La Conept * ‘‘Girl Rising’’, une campagne mobilise pour pour scolariser le plus de filles la prévention des en RDC violences à l’école P.22 P.7 * PAM et UNICEF volent à la rescousse des 30.000 enfants en âge scolaire P.24 * Dîner plaidoyer : DOSSIER les ministres d’éducation * RDC : 70% des dépenses de sensibilisés au Kongo l’éducation sont à charge des central et dans l’ex ménages Equateur P.8 P.27 EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 2
N°001 / Février-Avril 2017 Éditorial Une publication de la Coalition Nationale de l’Education Pour Tous Sauvons nos enfants en République Démocratique du Congo avec l’appui financier de l’Open de la déperdition scolaire Society of Southern Africa/RDC N os enfants ont tous droit à une éducation de qualité. La Constitution en vigueur en République démocratique du Congo est formelle à ce propos. Au re- gard de l’article 43 de la Loi fondamen- tale, ‘‘toute personne a droit à l’éduca- tion scolaire.’’ C’est dans cette optique que le Législateur a disposé que l’en- seignement primaire soit obligatoire et Ce numéro a été réalisé avec la collaboration du Réseau gratuit dans les établissements publics. des Professionnels des Médias Ce vœu pieux tarde toutefois à se Spécialistes de l’Education Pour concrétiser, onze ans après la promulgation de la Constitution. L’accès Tous « REPROMEPT » à l’école demeure encore un luxe. Et, bien que réclamée et souhaitée, la Rédaction Centrale gratuité reste encore utopique pour un grand nombre d’enfants. Augustin Kinienzi / Journal Le potentiel Comment alors arriver à rendre l’école obligatoire quand les établisse- Benoît Mudiayi / CMB-DIGI ments scolaires exigent des frais exorbitants aux élèves dont les pa- Mathy Musau / Journal Forum des As rents sont, pour la plupart, démunis? Yves Kalikat/ Le Journal du Citoyen La conséquence saute aux yeux. 3,5 millions d’enfants de 6 à 11 ans Photographie sont contraints de se cantonner en dehors de l’école. Parallèlement, Benoît Mudiayi 7,3 millions d’autres enfants de 16 à 17 ans sont également privés de Chantal Kalala scolarité. Yves Kalikat L’effectif total de ces enfants fait de la République démocratique du Congo la deuxième réserve au monde, après le Nigéria, des enfants Supervision condamnés à végéter en dehors de l’école. Yves Kalikat Et ce n’est pas tout! Encore faut-il compter des millions d’autres en- Coordination fants qui sont menacés chaque jour d’expulsion, faute de liquidités Chantal Kalala / chargée de pour poursuivre les études. communication et plaidoyer- CONEPT-RDC Contraints de flâner dans la rue ou de se livrer à des sales besognes Jacques Tshimbalanga / pour survivre, ces millions d’enfants constituent aujourd’hui une véri- coordonnateur national table bombe à retardement, qui risque d’exploser au moment où l’on de la CONEPT-RDC s’y attend le moins. Il est donc temps de tirer la sonnette d’alarme, avant qu’il ne soit trop Conception et mise en page tard. Le temps d’interpeller les consciences des décideurs qui peuvent Ing. Jérémie Daddy Mbansing encore sauver les meubles au moment où ils ont à leur portée la ges- et Art. Faïda Kasindi Yseult tion du Trésor public. Fruit des contributions de la masse laborieuse Prépresse MÉDIASPAUL du pays. Contact : Il est donc temps de gérer à bon escient toutes les ressources finan- Tél. : (+243) 991390284 cières collectées à travers le pays pour servir l’intérêt général. Et non (+243) 814869740 les laisser s’évaporer vers les paradis fiscaux ou disparaitre dans les Courriel : coneptrdc2011@gmail.com poches des particuliers. Il en va de l’intérêt de tous… Comme le sou- Site web : www.coneptrdc.org Blvd Lumumba n°390 haite d’ailleurs ardemment la Coalition nationale pour l’éducation pour 4e Rue Limete Industriel tous (Conept). Avec l’appui de Jacques TSHIMBALANGA Editeur EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 3
La Conept-Rdc en campagne pour l’abolition des frais de scolarité La Coalition nationale de l’édu- cation pour tous (CONEPT Manifestation de la CONEPT contre la marchandisation RDC) est en campagne. Focali- de l’enseignement en janvier 2013 lors du Forum social sée sur l’abolition des frais de africain à Kinshasa. scolarité en République démo- cratique du Congo, cette cam- pagne a démarré à Kinshasa par la publication, le 18 no- vembre 2016, de la note de plaidoyer pour la gratuité de l’enseignement de base. C ’est dans la salle parois- siale Notre-Dame de Fa- tima que les hauts cadres de CONEPT RDC ont don- né le coup d’envoi de la campagne axée sur le thème ‘‘Abolir les frais de scolarité dans l’éducation de base, c’est investir pour l’avenir’’. doyer pour la gratuité de l’ensei- congolais projette «la construction Destinée à mobiliser l’opinion tant gnement de base est un document d’un système éducatif inclusif et de nationale qu’internationale sur la validé par 72 organisations de la qualité, contribuant efficacement nécessité de favoriser l’accès pour Société civile évoluant dans le sec- au développement national, à la tous les enfants à l’éducation, cette teur de l’éducation. Elle permet aux promotion de la paix et d’une ci- activité va se dérouler tout au long acteurs de parler le même langage toyenneté démocratique active». de l’année 2017. dans la défense du droit de l’enfant Aux dires de plusieurs défenseurs à une éducation gratuité et de qua- Cependant, avec 4,9 millions d’en- des droits de l’enfant, la RDC lité. fants non scolarisés, l’enseigne- éprouve à ce jour d’énormes diffi- ment primaire et secondaire uni- cultés pour garantir à tous les en- Etat des lieux du financement pu- versel restera une utopie si l’aide fants le droit à une éducation de blic de l’éducation ne parvient pas à atteindre ceux qui qualité qui puisse être, en plus, en ont plus besoin, notamment les gratuite et obligatoire. C’est en fait Pour l’essentiel, ce document de enfants en milieux ruraux, les filles, l’un des rares pays où l’on trouve plaidoyer fait le point de la question les vulnérables et les personnes vi- 3,5 millions d’enfants de 6 à11 ans, du financement public de l’éduca- vant avec handicap. qui n’ont pas d’espoir de s’asseoir tion, où les ménages supportent à sur un banc de l’école. Un des rares 73% la charge de l’éducation. Ce qui Des engagements que la RDC peine Etats aussi à disposer d’un effectif signifie en d’autres termes qu’en à respecter de 18 millions d’enfants qui ne sont RDC, l’école publique n’existe plus. pas sûrs de demeurer à l’école. Car, on assiste à une privatisation Dans le souci de réduire l’effectif silencieuse de l’école publique. d’enfants en dehors de l’école, le La note de plaidoyer, un moyen de Gouvernement a pris l’engagement, pression De la lecture du document, il se dé- à travers la loi-cadre de l’enseigne- La journée était donc une opportu- gage qu’avec l’adoption de l’Agenda ment national promulguée en 2014, nité pour ces acteurs de consolider 2030 pour le développement du- d’offrir huit années d’éducation de leur engagement de travailler à la rable en 2015, la RDC et la commu- base gratuité aux enfants. promotion des droits de l’enfant nauté internationale se sont fixé un à l’éducation gratuité de qualité. objectif ambitieux pour l’éducation, Avec l’adoption de l’ODD 4, Kinsha- Cette journée avait été préparée appelant à garantir «l’accès de tous sa et la communauté internationale cinq mois auparavant, au moment à une éducation, sur un pied d’éga- se sont engagés à offrir douze an- où des consultations avaient été ini- lité, et promouvoir les possibilités nées d’éducation primaire et se- tiées pour arracher, en faveur des d’apprentissage tout au long de la condaire, et au moins une année de enfants, le droit d’aller à une école vie». pré-primaire de qualité gratuité et de qualité. obligatoire. Entre 2015-2025, par le biais de la Présentée au grand public au cours Stratégie sectorielle de l’éducation Faute de financement domestique de la manifestation, la note de plai- et de la formation, le gouvernement adéquat, la probabilité de réaliser EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 4
la totalité de ces objectifs nationaux par élève au primaire, selon une produit par le Réseau national des et internationaux semble de plus en étude de SOFRECO, l’ensemble journalistes de l’éducation pour plus illusoire. Alors que la RDC a des frais de scolarité de ce niveau tous, décortique la question du fi- actuellement un budget trop faible, d’enseignement ne représenterait nancement de l’éducation, à travers évalué à près de 6 milliards USD, que 3,3% du montant perdu dans reportages et interviews d’acteurs le pays perd chaque année environ la fraude fiscale et des exonéra- majeurs de la société congolaise. Le 15 milliards USD dans la fraude fis- tions. Ces frais ouvrent la voie à second est un document produit par cale. la marchandisation de l’éducation le cadre de concertation du Kongo et ferment les portes aux enfants, Central, où les parents et autres ac- Trop de frais à charge des parents adolescents et adultes les plus vul- teurs de la société se plaignent de la nérables, et issus des familles à re- multiplicité des frais qui s’imposent Au niveau actuel des contributions venu faible. aux parents. des ménages dans le financement La cérémonie a connu la projection Augustin KINIENZI de l’éducation, estimé à 40.000 Fc de deux documentaires. Le premier, Société civile : des comités pour veiller sur l’éducation de qualité violations du droit de l’enfant à l’éducation, de faire le plaidoyer auprès des autorités locales et administratives correspondantes de l’entité sur les matières de leur com- pétences. Ces tâches s’étendent à l’organisation du suivi citoyen du budget de l’éducation et du financement de l’école, ainsi qu’à l’exercice d’une veille pour une gestion transparente des ressources allouées à la base, en prenant comme cible les écoles de la commune, du territoire… Séance d’installation des Comités de C’est aussi s’assurer que les ressources transférées aux veille communautaire et de redevabilité écoles de la commune, du territoire… atteignent les bé- publique à Selembao . néficiaires et sont utilisées dans la transparence. L Les Comités de veille communautaire et de redevabili- a Coalition Nationale de l’Education pour tous té publique sont également tenus d’organiser des dia- (CONEPT - RDC) est déterminée à accompagner logues communautaires pour l’école et, sur base des l’Etat congolais dans ses efforts visant à améliorer problèmes identifiés, de fixer des objectifs de plaidoyer la qualité de l’enseignement. C’est dans cette optique réalistes et réalisables. qu’elle a procédé récemment à la mise en place des Comi- tés de veille communautaire et de redevabilité publique Quid des ‘‘Task Forces’’ ? (CVCRP), de même qu’à l’installation des ‘‘Task forces’’. Face au déficit de la responsabilisation, de l’engagement Cette démarche entreprise par la CONEPT vise à pro- et de la participation des citoyens à la base dans le pro- mouvoir l’exercice des droits à l’éducation pour tous en cessus d’élaboration, de la mise en œuvre, du suivi et de RDC, et à aider la Société Civile à être alerte, efficace, pro l’évaluation des politiques d’éducation, la mise en place active et capable d’apporter des changements positifs des ‘‘Task Forces’’ constitue une réponse adéquate de la dans l’offre des services éducatifs. CONEPT. Le rôle des Comités de veille communautaire… ? Ces organes prennent encrage dans la théorie selon la- quelle l’école étant un bien au service de la Communau- Les Comités de Veille Communautaire et de Redevabili- té, l’implication de tous est indispensable. En vue certes té Publique dans le domaine de l’éducation sont établis d’assurer l’efficacité des services pour garantir l’accès de pour veiller à ce que l’offre éducative de qualité ne laisse tous à une éducation de qualité et améliorer la gouver- aucun enfant en dehors du milieu scolaire. Ces comités nance des écoles. sont censés opérer dans les chefferies, dans les secteurs, dans les quartiers, dans les communes, dans les terri- Beaucoup plus thématiques, les ‘‘Task Forces’’ ont entre toires... autres pour rôles de traiter les rapports de suivi prove- nant des CVCRP. Ils sont tenus de faire des études, des Ils ont pour rôle de suivre à la base la mise en œuvre des analyses et le suivi des politiques entrant dans leur thé- politiques (plans, programmes…) en matière d’éduca- matique pour les rapporter à la coordination avec des tion, notamment en ce qui concerne les frais de scolarité, propositions concrètes. Au finish, les ‘‘Task Forces’’ les constructions scolaires, la distribution des livres, la permettent de constituer une banque des données fiables motivation et la formation des enseignants. dans le secteur d’éducation. C’est à ces structures qu’incombe la tâche d’organiser Benoit MUDIAYI la veille communautaire, d’alerter et de documenter les EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 5
Unesco, un allié de taille dans la quête de l’éducation pour tous L’Unesco est fermement engagé dans la promotion d’une éducation de qualité pour tous en République démocratique du Congo. C’est dans ce cadre que son bureau de Kinshasa a scellé un partenariat avec la Coalition nationale pour l’éducation pour tous (CONEPT/ RDC), qu’il accompagne depuis quelques années, notamment en matière de plaidoyer au- près du Gouvernement. C e partenariat avec la CONEPT aide à mobiliser chaque pays en vue de l’élaboration et de la mise en l’ensemble des acteurs, mais aussi à renforcer la œuvre d’un Plan d’Action National EPT (PAN/EPT)». qualité et la pertinence des interventions en faveur de l’Education», renseigne E. Meissa Diop, spécialiste Un rôle déterminant du programme CAPEFA à l’Unesco. «Notre interven- «Lors de cette rencontre, note Meissa Diop, il était re- tion, poursuit-elle, est beaucoup plus intense lors de la commandé à chaque Etat de mettre en place des struc- Semaine Mondiale d’Action en faveur de l’Education tures de mobilisation et de plaidoyer telles que les coali- pour tous (EPT), qui se tient le plus souvent en avril de tions d’acteurs. Ainsi, dans la plupart des pays, la RDC chaque année». y compris, il a été mis en place une Coalition Nationale pour l’EPT (CONEPT)». «L’occasion s’avère ainsi propice pour renforcer le plai- doyer en vue d’encourager l’accès à l’éducation pour «Cette Coalition devait regrouper l’ensemble des ac- tous, et particulièrement pour les enfants marginalisés teurs de la Société civile (ONG, Syndicats, Associations, (handicapés) et démunis vivant en RDC», fait remarquer etc.), en vue d’une meilleure coordination des interven- Meissa Diop, tout en soulignant que ‘‘cet appui s’inscrit tions. L’UNESCO avait, dès lors, reçu mission d’accom- dans le cadre de la mise en œuvre des ODD’’. pagner les acteurs non étatiques qui jouent auprès des Etats, en tant que membres de la Société civile, un rôle «Lors de la rencontre de Corée en 2015 en effet, la Com- déterminant dans l’élaboration des plaidoyers de quali- munauté internationale avait confié à l’Unesco la coor- té», conclut Meissa Diop dination, le suivi et le plaidoyer en faveur de l’ODD4, Mathy MUSAU spécifiquement dédié à l’Education», note-t-il, rappelant que ‘‘la Société civile travaille aux côtés des Etats pour les accompagner dans le plai- doyer en faveur d’une meilleure édu- cation’’. Rôle d’accompagnement Aux dires de Meissa Diop, la Confé- rence mondiale sur l’éducation, tenue à Dakar en 2000 (Dakar 2000), après celle de Jomtien (Thaïlande en 1990), s’était assigné six objectifs à réaliser en 2015 dans le cadre de l’Education de qualité pour Tous (EPT). «Cette rencontre, souligne-t-il, avait connu la participation des Etats, des Institutions spécialisées et des ac- teurs de la Société civile qui militent dans le secteur de l’éducation. La communauté internationale avait à cet effet confié à l’Unesco la respon- sabilité du suivi et de la coordination des actions de plaidoyer en faveur de l’EPT. Cette institution spécialisée de El Hadji Meissa Diop, chargé de projet et coordonnateur du Programme d’Appui à la décentralisation du système éducatif en vue de la réalisation des objectifs d’Education l’ONU devait ainsi accompagner «CapED/RDC» au bureau de l’UNESCO/Kinshasa. EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 6
La Conept mobilise pour la prévention des violences à l'école La prévention des violences en milieu scolaire fait désormais partie de l’agenda de la Coalition nationale de l'Education pour Tous (CONEPT). Soucieux d’assurer la sécurité dans les écoles, les membres de cette plate- forme peaufinent des stratégies susceptibles de prémunir élèves et ensei- gnants de tout acte de violence. Bien d’autres employés d’établissements scolaires sont aussi concernés. C ’est dans cette optique D’après Chantal Kalala, la chargée Conept/RDC, de AEDE (Aide aux que les membres de de communication de Conept/RDC, enfants de la rue), de REJEER... Conept ont conçu ce pro- la vulgarisation du projet en cours jet sur la sécurité en mi- va bientôt s’étendre aux clubs des Pour un premier temps, la phase lieu scolaire. Ils tâchent, dès lors, jeunes qui auront aussi à assumer initiale du projet va démarrer dans de le vulgariser en interne à travers les notions sur la prévention des trois communes pilotes, en l’occur- une série d’ateliers de formation. violences en milieu scolaire. rence Bumbu, Kintambo et Maka- La toute récente formation a eu la. Le lancement officiel est prévu lieu au début de l’année, dans les Une synergie d’ONG pour le mois de mai, notamment locaux de la Coalition à Kinshasa. mobilisée dans certains établissements sco- laires ciblés. Au cours de cet atelier, une quin- Initié par l'ONG Promundo inter- zaine de membres de la plateforme national (Programme H), ce projet L’expérience du Kivu ont pris activement part aux expo- sera bientôt mise en œuvre avec sés, ainsi qu’aux échanges et dis- les concours des plateformes et Conept met déjà à la disposition cussions pour améliorer la mise en ONG locales spécialisées en ma- du projet un groupe de formateurs œuvre dudit projet, bien avant son tière de prot ection des droits des des formateurs. Ces experts ont lancement officiel. enfants. Il s’agit notamment de d'abord été formés à Goma où le projet a été expérimenté dans les camps militaires, les écoles et les communautés locales. Cet appui a été rendu possible grâce au concours de l'ONG Living Peace, basée dans cette ville de la province du Nord-Kivu, à l’est du pays. L’expérience s’est prolongée à Bukavu, la ville voisine, dans la province du Sud-Kivu. «Grâce à ces différentes forma- tions, les concepteurs du projet ont réussi à élaborer des plans de travail à réaliser à Kinshasa. Des démarches sont présentement en cours pour obtenir l'implication des chefs d'établissements scolaires. La prévention des violences en milieu scolaire fait Sans leur concours en effet, la désormais partie de l’agenda de la Coalition nationale mise en œuvre du projet sera blo- de l’Education pour Tous quée», assure Chantal Kalala. Yves KALIKAT EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 7
Les ministres d’éducation sensibilisés au Kongo central et dans l’ex-Equateur La Coalition nationale de l’éducation pour tous en République démocratique du Congo (CONEPT/RDC) a amorcé, depuis le 21 octobre 2016, une série de plaidoyers à travers les provinces pour rendre effective la gratuité de l’en- seignement public au niveau primaire. Destinée également à appuyer l’accès des filles et des garçons à une éducation de base de qualité, cette campagne a démarré par deux dîners-débats, organisés au Kongo central et dans l’ex-pro- vince d’Equateur. L a Coalition Provinciale du Kongo Central a organisé le dîner de plaidoyer sur l’abolition des frais de sco- larité le 21 octobre dernier à l’hôtel Vivi Palace, dans la ville de Mata- di. Cette activité, la première d’une série qui devrait se tenir aussi bien dans l’ex-province de l’Equateur qu’à Kinshasa, a réuni autour d’une table les ministres ayant en charge l’Education et les Affaires sociales, ainsi que les députés de l’Assemblée Provinciale du Kongo Central. Etaient aussi de la partie les autori- tés scolaires (le Directeur provincial de l’EPS-INC, les Sous-directeurs provinciaux, l’Inspecteur provincial et les Coordonnateurs des écoles), ainsi que les organisations de la so- ciété civile, conviées à participer à travers les réseaux des femmes et la Coordination Provinciale de la So- ciété civile. Maître Bavon BAVUIDI Ministre Provincial de l’Education (Kongo-Central Les limites du Gouvernement provincial pour la résolution de la probléma- gestionnaires et établissements sco- Ministre provincial de l’Education, tique en discussion, dans la mesure laires. «Ce qui sera toujours un frein Me Bavon Bavuidi a déclaré devant où le secteur de l’éducation est en- à la mise en œuvre de la gratuité l’assistance que le plaidoyer de la core gérée au niveau national, alors dans la province du Kongo Cen- CONEPT/RDC est une action à sou- qu’en principe, la gestion locale de tral», a-t-il souligné. tenir. «La province, dit-il, est dispo- ce secteur devrait revenir directe- Accompagner les efforts de Conept sée à respecter le droit à l’éduca- ment aux provinces.» tion des enfants du Kongo Central, Pour le ministre provincial de l’Edu- A Mbandaka, la Coalition Provin- surtout en ce qui concerne l’accès et cation, la répartition des frais de sco- ciale de l’Equateur a, elle, organisé la qualité.» larité est un problème qui empêche le dîner de plaidoyer le vendredi 25 les enfants de la province à jouir de novembre 2016 à l’hôtel Nina River. «Toutefois, a-t-il mentionné, le gou- leur droit à une éducation gratuite Parmi les autorités politiques pré- vernement provincial a encore du de qualité, suite à un système en- sentes, on a aussi noté la présence mal à lever les options nécessaires couragé par les différents bureaux des ministres de l’Education, de la EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 8
la CONEPT en ce qui concerne la gratuité de l’éducation de base. Un chemin parsemé d’embuches Le Ministre provincial de l’Educa- tion a, lui, reconnu que la mise en œuvre de la gratuité est un chemin parsemé d’embuches. A ce propos, il s’est demandé où était passée la commission interministériel chargée de la mise en œuvre de la mesure de gratuité de l’enseignement primaire qui, depuis sa 1ère réunion du 15 avril 2011, avait décidé que le gouverne- ment provincial devrait suivre l’exé- cution de la gratuité dans son entité. Le Ministre Provincial de l’Education (Prov. Pour sa part, le président de la com- de l’Equateur) Alexis NKUMU ISANGOLA intervenant lors du diner de playdoyer mission socio-culturelle de l’Assem- organisée par la CONEPT à l’Hôtel NINA blée provinciale de l’Equateur a indi- RIVER de la ville de Mbandaka qué que le plaidoyer de la CONEPT en faveur des enfants de sa province est une initiative louable, mais dont les résultats seront assez difficiles à atteindre dans les délais. Famille et Enfant, ainsi que le Direc- A l’affiche, le coordonnateur natio- teur de Cabinet du Ministre du bud- nal de la CONEPT est intervenu pour «Il est impérieux d’accompagner la get, aux côtés des représentants de plaider en faveur de l’abolition des CONEPT dans ce plaidoyer et d’ap- l’Assemblée provinciale de l’Equa- frais de scolarité. Jacques Tshim- puyer les efforts menés pour assu- teur. Les autorités scolaires et et les balanga a axé son plaidoyer sur les rer la suppression de la motivation délégués de la Société civile étaient textes nationaux et internationaux des parents», a-t-il conclu. aussi de la partie. qui appuient le plaidoyer mené par Yves KALIKAT Les Ministres Provinciaux Maître Bavon BAVUIDI de l’Education et Thérèse MAMBU NIANGI du Genre Famille et Enfant en pleinne débat avec la société Civil sur la gratuité de l’Education au Kongo-Central EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 9
Les confidences du Père Martin Ekwa Bis Isal ► «Aux années 60, l'Etat congolais mobilisait 26 à 30% du budget national à l’éducation», atteste l’ancien président du Bureau national de l’Enseignement catholique. Missionnaire de la Compagnie de Jésus, le Père Martin Ekwa Bis Isal a passé toute sa vie de prêtre dans l’éducation de la jeunesse. Ré- férence en la matière dans l’histoire de la Ré- publique démocratique du Congo, cet ancien président du Bureau national de l’Enseigne- ment catholique (BEC) a participé à l’essor du système éducatif congolais postcolonial, avant d’assister, impuissant, au déclin de l’éducation, sous le diktat du régime Mobutu. Ceux qui l’ont approché se sont rendu compte de la maîtrise qu’il avait du secteur éducatif dans son pays et du souci de voir la gratuité de l’enseignement redevenir effective. Nous publions ci-dessous, à titre posthume, les confidences qu’il nous a faites en 2007 (Voir Journal du Citoyen n° 99 du 17 au 23 sep- tembre 2007) sur l’âge d’or de l’enseignement en RDC, une année après la promulgation de «De notre époque, personne n’achetait la Constitution du 18 février 2006, avant son un livre, ni un cahier de sa propre poche», décès, à 87 ans, le 18 août 2014. assurait le Père Ekwa. (Photo Tiers) Père Ekwa, depuis quand êtes- mon expérience et de mon passage quentaient l’école sur une popula- vous actif dans le secteur de dans les milieux de l’enseignement. tion de 15 millions d’habitants. De l’enseignement? C’est ainsi que j’ai été président de ces jeunes, 129 étaient étudiants la Commission de l’éducation de la dans les deux universités du pays, J’ai été nommé président du Bu- Conférence nationale souveraine celle de Lubumbashi et celle de reau national de l’enseignement (CNS) de juillet 1991 à décembre Kinshasa. Cependant, la plupart catholique en octobre 1960. Je suis 1992. J’ai également été rapporteur des parents de tous ces jeunes resté à la tête de ce bureau pendant des Etats généraux de l’éducation. étaient des illettrés. Certains repro- quatorze ans. Ensuite, au niveau Mais aujourd’hui, je ne suis plus chaient à l’école d’aliéner la men- international, j’ai été secrétaire gé- dans le secteur de l’enseignement. talité de leurs enfants, d’autres di- néral de l’Office international de saient que c’était une bonne chose. l’enseignement catholique (1975– Comment était organisé l’en- Aujourd’hui néanmoins, personne 1984). Revenu au pays, j’ai été ap- seignement à l’époque colo- ne conteste l’importance de l’école pelé à m’occuper du Centre d’ac- niale et après l’indépendance? comme outil de développement. tions pour dirigeants et cadres des Au moment de l’indépendance, il entreprises catholiques (Cadicec). Au moment de l’indépendance, il n’y avait pas de médecins, pas de Quand il y a des problèmes impor- y avait des écoles partout, mais es- juristes, pas d’ingénieurs. Après tants dans le domaine de l’ensei- sentiellement des écoles primaires. l’indépendance, tout a complète- gnement, on recourt parfois à mon Au niveau national, on comptait ment changé. On a implanté des intervention, sans doute à cause de juste 1.800.000 jeunes qui fré- écoles secondaires un peu partout. EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 10
De 1960 à 1970, le Congo était par- l’Enseignement catholique (BEC), mi les tout premiers pays africains il estime que l’Etat congolais n’a à avoir un programme scolaire bien pas assez de ressources pour rendre conçu. Beaucoup de pays venaient l’enseignement gratuit cette année. voir comment l’enseignement fonc- tionnait ici et envoyaient leurs étu- Père Ekwa, depuis quand êtes- diants se former dans nos univer- vous dans le secteur de l’ensei- sités. Ce système, dont le Congo gnement? était fier, avait produit, en moins de vingt ans, la classe intellectuelle J’ai été nommé président du Bu- que l’on voit dispersée aujourd’hui reau national de l’enseignement un peu partout dans le monde. catholique en octobre 1960. Je suis Malheureusement, avec la zaïria- resté à la tête de ce bureau pendant nisation, on a détruit ce système quatorze ans. Ensuite, au niveau qui avait produit des médecins, des international, j’ai été secrétaire gé- ingénieurs, etc. Tout simplement néral de l’Office international de parce qu’on avait peur que des étu- l’enseignement catholique (1975– «On ne peut pas obliger aux diants contestataires des universi- 1984). Revenu au pays, j’ai été ap- enfants d’aller à l’école, en tés ne puissent mettre en danger les pelé à m’occuper du Centre d’ac- demandant aux parents, pouvoirs politiques. Aujourd’hui, le tions pour dirigeants et cadres des sans moyens, de payer», es- pays est tombé à son niveau le plus entreprises catholiques (Cadicec). bas en ce qui concerne l’enseigne- Quand il y a des problèmes impor- timait le Père Martin Ekwa. ment. tants dans le domaine de l’ensei- (Photo Tiers) gnement, on recourt parfois à mon L’enseignement était-il gratuit? intervention, sans doute à cause de mon expérience et de mon passage l’école. Mais si les enfants ont En ce moment-là, l’Etat subven- dans les milieux de l’enseignement. l’obligation d’aller à l’école, il faut tionnait les écoles. A plus forte C’est ainsi que j’ai été président de que cette dernière soit gratuite. raison, en 1960, non seulement la la Commission de l’éducation de la On ne peut pas obliger les en- subvention, mais aussi tout l’en- Conférence nationale souveraine fants d’aller à l’école, en deman- seignement était supporté essen- (CNS) de juillet 1991 à décembre dant aux parents, sans moyens, de tiellement par le gouvernement. Le 1992. J’ai également été rapporteur payer. Gratuité et obligation, oui. budget de l’enseignement variait des Etats généraux de l’éducation. Mais, on sait que l’Etat n’a pas de entre 26 à 30 % du budget natio- Mais aujourd’hui, je ne suis plus moyens aujourd’hui pour rendre nal. Aujourd’hui, il n’est que de 1%. dans le secteur de l’enseignement. l’enseignement primaire obliga- Je n’avais jamais connu la grève toire. Ça signifie qu’il faudrait que des enseignants. C’était une chose Comment était organisé l’en- l’Etat supporte les frais de scolari- impensable durant toute ma jeu- seignement à l’époque colo- té de tous les élèves. S’ils sont, par nesse, de l’école primaire jusqu’à niale et après l’indépendance? exemple, 6 millions, il faudrait que l’Université. Avant même que les l’Etat supporte, en définitive, tous subventions de l’Etat n’arrivent, les Au moment de l’indépendance, il leurs frais. On devrait calculer à écoles appartenaient aux missions y avait des écoles partout, mais combien coûte la scolarité d’un qui se débrouillaient soit par l’aide personne n’achetait un livre, ni élève par an et multiplier ce mon- qu’elles obtenaient des «bienfai- un cahier de sa propre poche. On tant par le nombre d’élèves... teurs», soit par l’autofinancement mangeait même trois fois par jour des écoles à travers les produits du à l’internat. Donc, l’enseignement L’Etat est-il capable de le faire? jardinage, de l’élevage… primaire et secondaire était gra- tuit. Quand je dis « gratuit », je ne Sinon, il pourrait dire, dès cette an- Les parents ne payaient-ils pas veux pas dire que l’enseignement née, que tous les élèves qui entrent la scolarité de leurs enfants? se passait sans argent! Non. Il faut en première année primaire, il en que quelqu’un paye. Le système a assure la gratuité. Il y a longtemps Non. Nos parents n’ont jamais payé commencé à s’éteindre au moment qu’on le dit, mais qu’attend-on l’enseignement, pour la simple rai- où l’Etat s’était accaparé tout le sys- pour le faire ? Il faut que l’Etat son que si on leur avait demandé de tème éducatif. C’était là la rupture, congolais supporte tout. S’il ne le payer, ça ne leur aurait rien dit, la fin du système. veut pas le faire, il devra négocier parce qu’ils ne voyaient pas à quoi avec les autres partenaires de l’en- servait l’école. De notre époque, le La gratuité de l’enseignement seignement. C’est question de ges- Père Martin Ekwa a passé toute sa primaire est-elle possible au- tion et d’organisation. Il n’y a pas vie de prêtre dans le système éduca- jourd’hui? de miracle. tif. Agé aujourd’hui de 80 ans, il n’a jamais été curé de paroisse. Ancien Ce qui est reconnu, c’est l’obli- Propos recueillis par Yves KALIKAT président du Bureau national de gation pour les enfants d’aller à EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 11
Wali Bela : «Grâce au Proseb, nous avons distribué 22 millions de manuels dans les écoles» (Photo Conept) «A travers le PROSEB, nos enfants pourront apprendre, non pas seulement à lire dans les classes terminales du primaire, mais surtout à s’accommoder plus tôt à la lecture pour réellement apprendre», assure Wali Bela. Coordinatrice du Projet de soutien à l’éducation de base (PROSEB), Mme Wali Bela de Bobozo assure depuis plusieurs années l’assistance exécutive du Secrétaire général à l’Enseignement Primaire, Secondaire et Initiation à la Nouvelle citoyenneté (EPS-INC). C’est à ce titre qu’elle éclaire les lecteurs du magazine ‘‘Education pour tous’’ sur ce programme ambitieux, qui a entre autres pour mission de renforcer la formation des enseignants congolais et la distribution des manuels scolaires dans les écoles primaires disséminées à travers la République démocratique du Congo. EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 12
C’est quoi le PROSEB pour les profanes? «Aujourd’hui, nous pouvons être fiers de déclarer que nos enfants savent maintenant lire le caractère C’est un programme financé par le d’imprimerie», tranche Wali Bela. (Photo Conept) Partenariat mondial pour l’éduca- tion, qui est mis en œuvre au sein du ministère de l’EPS-INC. Il a été lancé en juillet 2013 et sera clôturé en février 2017, après avoir bénéficié d’une prolongation de six mois. PROSEB a entre autres pour mission la formation et la dis- tribution des manuels scolaires en RDC. Comment cela s’est-il passé sur le terrain? Ce sont les structures du minis- tère qui mettent en œuvre ce pro- lule spécialisée du ministère, pour transporteurs locaux pour que ces jet. Lorsque le ministère a élaboré qu’enfin, les fournisseurs, venus d’ici manuels puissent être acheminés à le Plan intérimaire de l’éducation et d’ailleurs, puissent soumissionner travers les 300 sous-proved du pays. (PIE), il avait en tête trois axes prin- avant de fournir ces manuels au mi- C’est à partir des sous proved que cipaux que le Projet est venu maté- nistère. les directeurs d’écoles étaient char- rialiser. J’ai toujours l’habitude de gés de retirer ces manuels pour les dire que le Proseb est la fille aînée du Quelles sont les difficultés que emmener dans leurs établissements PIE. Proseb a connues dans la mise scolaires. en œuvre du projet? Pour les manuels destinés aux Ce projet a visé, de prime abord, classes de 3ème et 4ème primaires, l’amélioration de l’accès et de Nous avons connu plusieurs dif- l’opération intervenait d’une ma- l’équité des enfants au primaire. ficultés, particulièrement dans la nière additionnelle. Puisqu’un pro- En deuxième lieu, il fallait veiller à distribution des manuels scolaires. gramme précédent, mis en œuvre l’amélioration de la qualité de l’ap- Etant donné que le pays est grand, par la Coopération Technique belge prentissage par la distribution des cette activité du projet a revêtu une (CTB), avait déjà permis de distri- manuels scolaires et la formation des dimension d’envergure nationale, buer une bonne quantité de ma- enseignants. Il était, enfin, question puisque nous devrions couvrir les nuels scolaires. Cependant, pour d’assurer le renforcement du sys- écoles de toute la République démo- les classes de 5ème et 6ème années tème. Il fallait ainsi que ces acteurs, cratique du Congo. Nous avons ainsi primaires, la quantité totale des ma- qui ont l’habitude de travailler au réussi à distribuer premièrement 20 nuels mobilisés était destinée à cou- vrir tous les effectifs d’élèves inscrits sur tout le territoire national. «En fonction de terrain, nos partenaires Au cours de cette distribution, on ont emprunté toute sorte de moyens de a remarqué que nous avions fait communication pour acheminer les manuels. un progrès dans l’accès. Puisque, lorsque nous avions prélevé l’ef- Qu’il s’agisse de moto, de véhicule, de pirogue, fectif des élèves au montage du d’avion…» programme, nous avons passé sein du ministère, qui connaissent millions d’exemplaires. Aujourd’hui, commandes des manuels en nous leurs tâches et leurs responsabilités, nous en sommes à 22 millions de référant au nombre d’enfants enre- soient renforcés pour que le système manuels acheminés à travers les gistré. Malheureusement, lors de la connaisse, à son tour, un élan nou- 30 provinces éducationnelles de phase de distribution, nous avons veau à travers le Plan intérimaire de l’époque, qui équivalaient aux 11 an- constaté que l’effectif des élèves a su- l’éducation. ciennes provinces du pays, alors qu’à bitement augmenté. Ce qui ne nous ce jour, nous comptons 26 provinces a donc pas permis d’atteindre le ra- Et donc, pour pouvoir améliorer administratives. tio souhaité pour certaines classes, la qualité de l’éducation, le projet à savoir : un manuel par élève. Le a distribué environ 20 millions de Dans les provinces éducationnelles, nombre d’élèves avait donc augmen- manuels scolaires. Ouvrages qui ont ces manuels ont été pris en charge té entre le moment de la commande été élaborés par la Direction des pro- par ceux qu’on appelle les ‘‘direc- et celui de la distribution. C’est grammes et matériels didactiques du teurs de province’’ ou ‘‘Proved’’. pourquoi nous sommes passés de 20 ministère. Ces manuels ont, ensuite, Avec une commission qui a été créée millions de manuels distribués à 22 fait l’objet d’une procédure de pas- sur place, ils se sont chargés de faire millions pour atteindre le ratio d’un sation des marchés à travers la cel- la passation des marchés avec les manuel par élève. EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 13
ration. Ce partenariat s’est révélé très «Grâce donc au concours efficace, vue l’étendue du territoire des transporteurs, nous avons national. Avec ces partenaires, nous pu atteindre 50.000 écoles à avons notamment eu à faire face aux travers le pays» problèmes de viabilité au niveau du réseau routier, de l’hydrographie, de la végétation… pour acheminer les manuels à destination. Ces transporteurs ont ainsi bravé des routes où aucun véhicule n’était plus passé depuis des mois, voire des années ! Ils se sont engagés, pas seulement pour tirer des dividendes financiers, mais surtout par souci d’appuyer le secteur éducatif à tra- vers la distribution des manuels sco- laires. En fonction de terrain, nos parte- Vous savez que c’est très important, Quels sont les principaux parte- naires ont emprunté toute sorte de puisque pendant longtemps, nos naires qui vous accompagnent moyens de communication. Qu’il élèves n’ont pas eu accès facile aux dans la mise en œuvre du pro- s’agisse de moto, de véhicule, de manuels scolaires. Or, avec notre jet de distribution des manuels pirogue, d’avion… Dans un coin programme, ces manuels ont été dis- scolaires à travers le pays ? comme Shabunda par exemple, au tribués gratuitement. Sud-Kivu, nos partenaires ont dû Outre les ‘‘proved’’ et les directeurs utiliser exclusivement le transport Et aujourd’hui, nous pouvons être des écoles, nous travaillons avec les aérien. A Boende, dans l’ex-province fiers de déclarer que nos enfants transporteurs locaux dans l’optique d’Equateur, des camions ont même savent maintenant lire le caractère du partenariat public-privé, mais frôlé la catastrophe en s’engageant d’imprimerie. Avec ce projet, nos en- également en perspective d’une sur des ponts mal structurés. fants pourront, non pas apprendre à réelle appropriation de nos projets lire seulement dans les classes ter- par les communautés locales. Dès le Grâce donc au concours des trans- minales du primaire, mais s’accom- départ, nos équipes sont descendues porteurs, nous avons pu atteindre moder plus tôt à la lecture pour ap- sur le terrain pour expliquer aux 50.000 écoles à travers le pays. prendre réellement. «Pour acheminer les manuels scolaires dans Sur quelles branches précisent des zones reculées, les transporteurs locaux ont se focalisent les manuels sco- laires que vous distribuez ? emprunté des routes où aucun véhicule n’était plus passé depuis des mois, voire des années» Ce sont des manuels des ‘‘branches mères’’ destinés aux écoliers de 3ème communautés bénéficiaires la quin- Nous avons tenu compte de toutes et 4ème années primaires de la Ré- tessence même du projet. les écoles, tant publiques que pri- publique démocratique du Congo. vées… Le travail s’est avéré labo- On y retrouve essentiellement des Nous avons réuni les transporteurs rieux, comme vous l’avez constaté, livres de français et des mathéma- locaux pour leur expliquer ce qui al- tant la quantité des manuels était tiques. Et pour les classes de 5ème lait réellement se passer. Nous leur importante. Avec ces partenaires, nous avons notamment Par carton en effet, on trouvait entre eu à faire face aux problèmes de viabilité au 60 et 80 livres. Et chaque groupe de- niveau du réseau routier, de l’hydrographie, de vrait prendre en charge les établis- la végétation… pour acheminer les manuels à sements scolaires de toute la ‘‘sous destination. proved’’. Or, une ‘‘sous proved’’ comprend au minimum entre 100 et et 6ème années primaires, nous avons avons dit que nous aurons besoin 400 écoles. Ajouter à cela le nombre consacré des manuels de français, de leur concours pour transporter de classes par école. Vous imaginez des mathématiques, des sciences, les manuels à travers les différentes alors la quantité d’ouvrages à trans- et également d’éducation civique et contrées de leurs milieux. Nous porter! morale. A travers ces matières, ces avons ainsi constitué un réseau des manuels veulent jeter les bases pour transporteurs fidélisés avec qui nous Interview réalisée par Yves KALIKAT les Congolais nouveaux. avons développé une étroite collabo- EDUCATION POUR TOUS/Magazine n°001 Février-Avril 2017 14
Vous pouvez aussi lire