LAS NOTICIAS DE S. Fragments de la vie d'une coopérante en Colombie
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LAS NOTICIAS DE S. Fragments de la vie d’une coopérante en Colombie N°3– Juillet 2014 Chers et chères ami-e-s, famille, Je vous souhaite un très bel été et vous remercie nouvellement pour votre soutien. Durant ces derniers mois, j’ai continué à travailler le thème de la protection. J’ai participé aux deux pre- mières rencontres régionales de protection du Magdalena Medio regroupant quatre communautés accom- pagnées par Pensamiento y Acción Social ainsi que qu’à des ateliers de protection et autoprotection avec certaines de ces communautés. J’ai également facilité une formation en sécurité et protection pour les coo- pérant-e-s d’E-Changer et MBI. Par ailleurs, je continue mon travail de renforcement institutionnel de PAS. Je profite également de mon temps libre pour découvrir de nouveaux coins de ce magnifique pays. Rencontre nationale des coopérant-e-s Le fleuve Magdalena Chacun amène sa chaise... Réunion à Las Pavas 1
Las Pavas, une lutte pour le droit à la terre En Colombie, la question du contrôle de la terre continue de donner lieu à de nombreux conflits. Le pays compte 4 millions de déplacés internes qui ont été victimes d’accaparement de leurs terres par des acteurs du conflit armé, en particulier par les groupes paramilitaires. Dans le cadre du processus de justice transitionnelle, la Ley de Victi- mas y Restitución de Tierras, entrée en vigueur en 2011, a initié un processus de restitution de terres. Néanmoins, la mise en œuvre de cette loi laisse à désirer et de nombreux paysan-ne-s n’ont toujours pas récupéré les terres qui leur permettraient de subvenir à leurs besoins. Les 120 familles de Las Pavas, une communauté pay- sanne du sud du département de Bolívar, luttent paci- fiquement depuis plus de 10 ans pour le respect de leurs droits et la restitution de leurs terres. Durant cette période, la communauté a été déplacée et est revenue sur ses terres à trois reprises. Ce processus de résistance pacifique a été récompensé par le Prix na- tional de la paix 2013. Pensamiento y Acción Social accompagne la communauté de Las Pavas depuis 2010. Histoire de Las Pavas Les familles paysannes occupent et travaillent les terres de Las Pavas, qui leurs sont indispensables pour produire l’alimentation nécessaire à leur subsistance, depuis une vingtaine d’années, ces terrains ayant été Restes calcinés d’un rancho brûlé par les employés de l’entreprise abandonnés au début des années 90. En 2003, après plusieurs années de travail, les paysan-ne-s sont vic- naces se poursuivent et les terres sont rachetées par des times de menaces de la part de paramilitaires, ce qui entreprises produisant de l’huile de palme. provoque alors un déplacement massif des familles. En 2009, les paysan-ne-s décident de retourner une nou- En 2006, suite à la démobilisation des paramilitaires et velle fois à Las Pavas mais sont expulsés quelques mois après une série de retours et de nouveaux déplace- plus tard, suite à la plainte pour occupation illégale por- ments, ASOCAB, l’organisation formée par les familles tée par les entreprises. ASOCAB a dénoncé à l’époque le paysannes de Las Pavas, entreprend des démarches fait que l’ordre d’expulsion comportait de nombreuses auprès de l’Institut colombien pour le développement irrégularités. rural afin que les terrains de Las Pavas soient reconnus comme abandonnés et qu’ils leurs soient officielle- Deux ans plus tard, la communauté annonce publique- ment attribués en vertu de la réforme agraire. Malgré ment qu’une nouvelle fois elle exercerait son droit à culti- des résultats positifs dans leurs démarches, les me- ver ses terres. Depuis lors, la communauté réside de ma- nière permanente à Las Pavas. Les familles paysannes ont été reconnues en tant que victimes du conflit armé par l’Unité nationale des victimes et ont obtenu un nouvel examen de la titularisation des terres. Malgré cette re- connaissance, fin 2011, la communauté, ses leaders et les organisations accompagnatrices sont victimes d’une cam- pagne médiatique de diffamation cherchant à remettre en question leur statut de victimes. Situation actuelle Depuis qu’elles sont retournées vivre à Las Pavas, les fa- milles ont dû faire face à un harcèlement constant de la Plantation de palmiers à huile 2
part de plusieurs employés de l’entreprise d’huile de tant que victimes, de l’obtention du Prix national de la palme Aportes San Isidro S.A.S. qui exploite actuelle- paix en 2013 et des mesures de protection attribuées par ment une partie des terres. Des employés du départe- l’Unité nationale de protection, les agressions se poursui- ment de sécurité de l’entreprise ont agressé physique- vent. Ces actes de violence ont généré la peur, le déses- ment, à plusieurs reprises, des membres de la commu- poir et la division au sein de la communauté. Les nauté, menacé de violer des femmes et jeunes filles de membres d’ASOCAB ont dénoncé publiquement les la communauté, brûlé des logements, empoisonné des agressions et menaces et ont recouru à de nombreux mé- animaux, détruit des récoltes, et intimidé les membres canismes juridiques. Cependant, ils constatent, jour après de la communauté de façon constante. jour, que le pouvoir de l’entreprise est supérieur à celui de l’État. A ce jour, aucune sanction n’a été prononcée à De plus, la culture extensive de palmiers à huile n’est l’encontre de l’entreprise ou de son département de sé- pas sans conséquences pour l’environnement. Le Mi- curité pour les actes de violence dont ont été victimes les nistère de l’environnement a déclaré en 2011 que les paysan-ne-s de Las Pavas . plantations de palmiers sur le territoire de Las Pavas avaient des impacts négatifs sur la biodiversité et causé PAS accompagne la communauté dans la mise en œuvre une détérioration de l’écosystème. de mesures de protection. Par exemple, PAS a soutenu ASOCAB lors de l’élaboration d’une stratégie collective de En dépit des nombreuses décisions judiciaires et admi- protection qui a été présentée à l’Unité nationale de pro- nistratives reconnaissant le droit de la communauté à tection. cultiver ces terres, de la reconnaissance officielle en Portraits de Las Pavas du charbon 3
Les réseaux de protection : une stratégie de protection pour les communautés rurales Pensamiento y Acción Social accompagne des communautés du Magdalena Medio dans l’établissement et la mise en œuvre de leurs stratégies de protection. En effet, ces communautés font face à de sérieux risques car leurs terres sont convoitées par d’autres. Ces paysan-ne-s sont victimes de menaces, d’attaques, de criminalisation et de diffamation, en particulier, elles sont accusées de faire partie de la guérilla. Afin que ces communautés puissent améliorer leur sécurité, PAS leur a présenté un outil de protection particulièrement utile dans le cas de communautés relativement isolées : les réseaux de protection. Dans le Magdalena Medio, PAS organise des ren- Solidarité et contrôle du territoire contres régionales de protection entre les quatre com- Les actions de protection se basent sur la connaissance et munautés accompagnées afin qu’elles puissent renfor- le contrôle du territoire parce que les communautés vi- cer leur processus organisationnel et réaliser des ac- vent et agissent dans le cadre d’un territoire géographi- tions de protection de manière coordonnée et complé- quement délimité. Les agresseurs potentiels ont comme mentaire. Ces rencontres constituent également un objectif de contrôler le territoire des communautés, afin espace de partage d’expériences et d’analyse du con- d’y développer leurs activités, que ce soit l’exploitation texte régional. En effet, au-delà de leurs situations par- de ressources naturelles ou le transit de produits illégaux. ticulières, ces communautés sont confrontées à des Il y a donc une lutte d’intérêts divergents pour le contrôle acteurs ayant des intérêts similaires, qui cherchent à du territoire, ce qui constitue une menace pour ces com- s’accaparer de leurs terres. munautés et leur environnement. Cependant, de nom- Les réseaux de protection sont une stratégie partant breux exemples en Amérique latine ont montré que des du principe qu’une protection efficace doit partir du communautés qui s’étaient organisées pour la défense territoire et se fonder sur l’organisation collective. En de leur territoire avaient réussi à empêcher l’action de effet, ces communautés étant éloignées de la capitale, ceux qui cherchaient à s’approprier leurs terres, que ce les personnes en situation de risque imminent ne peu- soit par la résistance contre des projets d’exploitation vent se permettre d’attendre une réaction venant des minière ou en empêchant l’entrée d’acteurs armés sur organisations nationales basées à Bogota. Les commu- leur territoire. nautés doivent donc mettre en place des mesures Le développement de réseaux de protection repose sur d’autoprotection pour assurer leur propre sécurité et trois principes : l’organisation communautaire, le renfor- pouvoir compter sur un réseau de soutien local. cement organisationnel pour la protection et le contrôle Les actions collectives de solidarité ont empêché plusieurs expulsions illégales. 4
Actions de prévention et réactions d’urgence L’objectif étant de contrôler le territoire, le réseau doit avoir la capacité d´agir en différentes circonstances. D’une part, il doit pouvoir réagir dans des cas d’urgence et de menace imminente. Le but est alors de neutraliser la menace le plus rapidement possible. La réaction d’ur- gence doit suivre un protocole préétabli indiquant, par exemple, qui est en charge de lancer l’alerte, le rôle de chacun et les normes de sécurité à suivre. Les actions de solidarité constituent le principal moyen permettant de répondre à une menace ou un risque imminent. D’autre part, les actions préventives visent à éviter que ne se réalisent des menaces prévisibles. Ces actions se basent sur l’analyse de la stratégie supposée de l'agres- seur potentiel, afin de déterminer quelles actions pré- du territoire. En s’organisant et en agissant de manière ventives permettraient d’éviter qu’il ne mette en œuvre collective et solidaire, la communauté peut articuler ses ses intentions de nuire. Les actions de préventions doi- efforts et ainsi son action aura un impact plus impor- vent avoir lieu à différents niveaux : local, national et tant. L’objectif est de contrôler son territoire, de savoir international. C’est pour cette raison qu’il est indispen- ce qui s’y passe, afin d’identifier les risques et pouvoir sable que des organisations nationales et internatio- entreprendre des actions de prévention et également nales fassent aussi partie du réseau de protection. Ce de pouvoir réagir de manière rapide en cas de situation sont ces dernières qui pourront mener des actions de d’urgence. La systématisation de l’information et son plaidoyer auprès d’autorités nationales ou d’acteurs tel analyse sont indispensables à la compréhension de ce que le corps diplomatique le cas échéant. qui se joue dans le territoire. Un des buts du réseau de L’accompagnement de PAS en faveur d’un travail en protection est la transmission et le partage de l’informa- réseau entre les communautés accompagnées dans le tion nécessaire pour comprendre quels sont les intérêts Magdalena Medio a déjà porté ses fruits. En effet, au en jeu, les intentions des différents acteurs ainsi que mois de juin, la communauté El Guayabo a bénéficié leurs relations, les rapports de force et les dynamiques d’un soutien important des autres communautés lors de pouvoir. Cette information doit circuler entre les d’une tentative d’expulsion illégale menée par les membres de la communauté faisant partie du réseau et forces de police. Grâce à cette action de solidarité, les les organisations soutenant la communauté. Cette infor- paysans del Guayabo peuvent, à ce jour, continuer à mation est constituée essentiellement de rapports cultiver leurs terres et à nourrir leurs familles. d’incidents de sécurité, d’informations sur les agres- seurs potentiels et de données portant sur le contexte. 5
Rencontres régionales de protection du Magdalena Medio PAS travaille en utilisant une méthodologie participative. Durant les deux premières rencontres régionales de protec- tion, ont été abordés des thèmes tels que les réseaux de protection et les stratégies d’action collective, le contexte régional et le développement économique de la région, les actions directes non-violentes ainsi que les stratégies juri- diques de défense du droit à la terre. Pour soutenir le projet Contacts CCP :17-7786-4 Mes coordonnées : Depuis l'étranger www.pas.org.co sandra@pas.org.co IBAN : CH5-109000 000 1700-77864 Groupe de soutien BIC :POFICH BEXXX Personne de contact : Ariane Ninck-Lehmann Sans oublier de mentionner: arianelehmann@hotmail.com « PAS-Colombie », Sandra Froidevaux www. e-changer.ch 6
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