Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...

La page est créée Daniel Dupre
 
CONTINUER À LIRE
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
Mercredi 22 décembre 2021 - Supplément - Côte-d'Or

Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma BUONCRISTIANI
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
2         SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                                                                               Mercredi 22 décembre 2021

  Centre Georges-François-Leclerc

Voici le centre anti-cancer
Georges-François-Leclerc en 2025
                                                                                                                                900
                                                                                                                                 En 10 ans, le CGFL est passé
                                                                                                                                 de 450 employés à 900.
                                                                                                                                 Il accueille actuellement
                                                                                                                                 23 000 patients qui viennent
                                                                                                                                 de toute la région.

En 2025, voici ce à quoi le centre de lutte contre le cancer Georges-François-Leclerc (CGFL) devrait ressembler avec 13 000 m² en plus. Visuel fourni par le CGFL

Quatre ans de travaux à venir          « Il nous fallait des locaux      aussi héberger nos activités
pour un investissement de
plus de 45 millions d’euros.
                                     plus adaptés à l’évolution de
                                     nos activités. Nous man-
                                                                         nouvelles. Notre projet
                                                                         s’inscrit dans la vision de ce     } Notre projet s’inscrit
Le centre Georges-François-          quons de place, que ce soit         que sera la prise en charge        dans la vision de ce que
Leclerc ajoute 13 000 m² à           en laboratoire, en pharma-          du cancer en 2030, avec au
                                     cie, même dans les vestiai-         cœur de tout ceci, les pa-
                                                                                                            sera la prise en charge
ses locaux pour faire face à
une augmentation de son              res et locaux de stockage.          tients. Un parcours émi-           du cancer en 2030,
activité depuis dix ans. Passé       En dix ans, nous sommes             nemment technique et per-          avec au cœur de tout
                                     passés de 450 à 900 sala-           sonnalisé, avec une vision
de 450 employés à 900 et de
                                     riés. »                             globale du parcours et un          ceci, les patients. ~
48 à 118 millions d’euros de
                                                                         accès fluide aux soins de
budget, il dessine aujour-             Création                          support ».                               Professeur Charles Coutant,
d’hui la prise en charge du            d’une cafétéria,                    Concrètement, l’extension                       directeur du CGFL
cancer de demain.                      d’un accueil                      de 13 000 m² « dans un es-
                                       ambulatoire,                      pace contraint », comme le
                                       d’une salle de sport…             souligne le directeur général      prunt, pour l’autre sur fonds    plateau d’accueil ambula-

U    ne extension du centre
     Georges-François-Le-
clerc (CGFL) pourquoi ?
                                       Autre raison : « Simplifier
                                     le parcours patient ». Et
                                                                         adjoint Alain Lalié, a néces-
                                                                         sité de ruser. À venir, la créa-
                                                                         tion d’un cinquième étage
                                                                                                            propres du centre. Enfin, un
                                                                                                            bloc nouveau sortira de ter-
                                                                                                            re, composé de trois étages
                                                                                                                                             toire avec la consultation
                                                                                                                                             externe, « un moyen de fa-
                                                                                                                                             voriser la communication
C’est le directeur, le profes-       troisième motif : « Il y a une      sur le bâtiment existant qui       et d’un parking en sous-sol      entre les praticiens et de
seur Charles Coutant, qui            insuffisance au niveau de la        coûtera 7,5 millions d’euros       offrant 81 places.               fluidifier le parcours de nos
nous parle de la genèse du           capacité d’hébergement en           dont 7 millions fournis par          Dans ces nouveaux lo-          malades », souligne le Pr
chantier débuté il y a quel-         hospitalisation complète ou         la région, grâce à des fonds       caux, il y aura une cafétéria,   Coutant.
ques mois et qui faisait par-        ambulatoire. On a aujour-           européens. Il y aura une ex-       jusque-là inexistante, tou-        Dans cet ensemble, on
tie de son projet de mandat          d’hui 36 chambres doubles           tension de la façade sud           jours pour plus de confort       trouvera également une sal-
lors de sa prise de poste à la       que nous souhaitons trans-          pour 37,5 millions d’euros,        pour les patients, leurs visi-   le de repos « digne de ce
tête du centre anti-cancer.          former en simples. Il fallait       pour moitié assurée par em-        teurs et le personnel. Et un     nom pour le personnel » et
                                                                                                                                             une salle de sport, « d’abord
                                                                                                                                             pour les pour les patients
                                                   Quelques changements sont déjà visibles                                                   car il est scientifiquement
                                                                                                                                             établi que le sport favorise
                                                   Comme l’explique Alain Lalié, direc-         coup à la confidentialité des échanges       la guérison en cas de cancer.
                                                   teur général adjoint, « les locaux exis-     et avons donc privilégié des box pour        C’est primordial durant les
                                                   tants ne seront pas impactés dans leur       les enregistrements. » À part ce lieu        soins, mais aussi après. Des
                                                   fonctionnement. La grosse difficulté,        déplacé, rien ne change pour les 23 000      créneaux seront aussi réser-
                                                   c’est de se garer. Un parking provisoire     patients qui viennent de toute la ré-        vés aux salariés, pour amé-
                                                   a été créé, grâce au CHU qui nous a          gion.                                        liorer leur qualité de vie au
                                                   prêté une bande de terrain. Il est à                                                      travail ».
                                                   destination des ambulances et taxis,         Le CGFL évolue sans impact                     Le chantier est parfaite-
                                                   avec un dépose-minute pour les pa-           sur la prise en charge                       ment ancré dans le territoi-
                                                   tients. Et l’entrée a été déplacée provi-    Le centre Georges-François-Leclerc           re, puisque c’est l’ architecte
                                                   soirement ».                                 (CGFL) évolue, la prise en charge con-       dijonnais Hervé Madiot qui
                                                   Quand on visite les lieux, on peine à        tinue. « De plus, en parallèle des fonds     est à la maîtrise d’œuvre. De
                                                   reconnaître ce qui était, il y a peu         alloués à ces travaux nous poursui-          plus, 15 des 18 entreprises
                                                   encore, une petite route dédiée aux          vrons les investissements avec 30 mil-       qui s’attaquent à l’extension
                                                   ambulances. Le nouvel accueil privilé-       lions d’euros sur cinq ans dans nos          de la façade sud sont côte-
                                                   gie le confort, avec de nombreux sièges      installations et sur notre plateau tech-     d’oriennes. L’appel d’offres
 Alain Lalié, directeur général adjoint du CGFL.   évitant l’effet « hall de gare », explique   nique. La vie continue et ne s’arrête pas    pour la création du cinquiè-
 Photo LBP/A.R.                                    le Pr Coutant. « Nous tenions beau-          avec les travaux. »                          me étage est en cours.
                                                                                                                                                         Amandine ROBERT
W2102 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
Mercredi 22 décembre 2021                                                                  SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                    3

 centre georges-François-Leclerc

Le centre anti-cancer tient le cap
et lance un appel aux dons
Alors que s’achève une année de plus                                                nous faisant des dons ou des legs.
placée sous le signe des projets, mais                                              Car il est impensable pour nous
aussi de la crise sanitaire, le centre
Georges-François-Leclerc espère plus
                                                                                    de laisser un reste à charge aux
                                                                                    malades. »                                } Nous avons le
que jamais que la générosité de ses                                                                                           devoir, la nécessité, de
donateurs ne fera pas défaut.                                                        La crise a porté un coup                 continuer à soigner les
                                                                                     rude aux dons
                                                                                                                              patients qui affluent
T   hérapies innovantes, présen-
    tations lors du congrès mon-
dial de cancérologie, traitements
                                                                                      La recherche est également un
                                                                                    axe majeur pour le centre anti-
                                                                                                                              toujours plus nombreux
de pointes proposés à peine mis                                                     cancer dijonnais au rayonnement
                                                                                                                              entre nos murs. ~
sur le marché, innovations théra-                                                   régional, avec près de 12 millions                        Pr Charles Coutant,
peutiques et toujours plus d’essais                                                 engagés chaque année et 120 sala-                  directeur général du CGFL
cliniques “maison” permettant                                                       riés exclusivement réservés à cet-
d’offrir aux patients des traite-                                                   te activité, supportée par une pla-
ments d’avant-garde : le centre                                                     te-forme dédiée. Les études et
Georges-François-Leclerc                                                            essais cliniques « sont bien sou-         355 000 €. Mais nous sommes
(CGFL) a vécu une année intense                                                     vent d’envergure internationale.          fiers, malgré la pandémie, d’être
et poursuit ses efforts pour des                                                    Mais là encore, une partie de             plus que jamais tournés vers l’ave-
soins toujours plus personnalisés                                                   l’activité de recherche est finan-        nir. Fort des travaux en cours, fort
et une prise en charge fluide.                                                      cée sur nos fonds propres ». Don-         de son expérience qui s’accroît
Pourtant, comme tous les établis-                                                   ner au CGFL, c’est décider soi-           chaque jour, fort des données et
sements de santé, le centre anti-                                                   même à quoi sera allouée                  des résultats des nombreuses étu-
cancer a dû composer, et compo-                                                     l’enveloppe offerte, quel que soit        des que nous menons, le CGFL
se toujours, avec un contexte                                                       son montant. À la recherche et au         tient le cap. Il continue d’offrir à
sanitaire marqué par la pandémie          Le Pr Charles Coutant devant l’accueil    développement de nouvelles thé-           nos patients le meilleur des soins,
de Covid, comme le déplore le             de l’établissement déplacé le temps des   rapeutiques ou pour le quotidien          sur l’ensemble du territoire régio-
directeur général, le Pr Charles          travaux. Un chantier affiché comme l’un   et le bien-être des usagers grâce à       nal ».
Coutant.                                  des projets phares du directeur général   l’achat de matériel et le finance-                          Amandine ROBERT
  « Cela fait deux ans que le mon-        dès sa prise de poste à la tête du        ment d’activités de support.
de de la santé connaît une terrible       centre, qui draine 23 000 visiteurs à       Plus que jamais, l’engagement             Chiffres clés
crise, mais malgré ce que l’on peut       l’année. Photo LBP/Amandine ROBERT        du public est nécessaire : « Nous
vivre et les nécessaires adapta-                                                    tenons à remercier nos donateurs            Le CGFL compte 1 525 donateurs
tions et précautions au quotidien,        supports, absolument essentiels           fidèles qui, malgré la crise, malgré        actifs en 2021 (ayant fait un don en
le cancer ne s’est pas confiné, ni        au patient dans sa prise en charge.       les aléas des différentes vagues et         2021). Le montant de dons enregis-
arrêté. Nous avons le devoir, la          Je pense à un suivi psychologique,        les annulations d’événements, ont           tré au 15 décembre pour l’année
nécessité, de continuer à soigner         de l’onco-coiffure et onco-esthéti-       tenu bon. Ils sont 1 500 à nous             2021 est de près de 355 000 €. Il était
les patients qui affluent toujours        que, de la gym douce ou adap-             suivre régulièrement dans les               de 620 000 en 2019 et de 475 600 €
plus nombreux entre nos murs,             tée, etc. Toutes ces actions, abso-       épreuves et à donner pour l’amé-            en 2020. Une diminution conséquen-
surtout, avec le retard pris au           lument nécessaires pour le bien-          lioration des chances face au can-          te liée au Covid et aux annulations
niveau des diagnostics que nous           être et l’amélioration de l’état des      cer. Toutefois, nous avons accusé           d’événements caritatifs grand public.
éclusons encore à ce jour, avec           usagers du CGFL, ne sont pas ou           des pertes importantes. En 2019,            Nombre de salariés : 900 dont 120
des cas de cancer plus avancés à          très mal financées. Nous offrons          nous avions récolté 620 000 € sur           chercheurs. Chaque année, ce sont
cause d’un dépistage retardé par          donc ces soins de support en              l’année, en 2020 nous tombions à            12 M€ qui sont consacrés à la recher-
le Covid. Pour autant, nous conti-        puisant sur nos fonds propres,            475 000 € pour aujourd’hui, au              che, soit 10 % du budget annuel.
nuons à proposer des soins de             grâce à la générosité du public           15 décembre 2021, nous affichons

Les travaux au Centre Georges-François-Leclerc à Dijon ont commencé cet automne et sont en cours. Ils dureront quatre ans. Photo LBP/Emma BUONCRISTIANI
                                                                                                                                                               W2103 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
4         SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                                                                                     Mercredi 22 décembre 2021

  Centre Georges-François-Leclerc

Maladie professionnelle : le long
parcours vers la reconnaissance
Travailler avec rigueur toute
sa vie et en tomber malade.
Faire reconnaître sa tumeur
comme maladie profession-
nelle est un véritable par-
cours du combattant. C’est
pourquoi le centre Georges-
François-Leclerc (CGFL) a
créé une consultation spé-
cialisée pour détecter et
accompagner les patients.

P    hilippe a 66 ans et vit à
     Dijon. Il témoigne aujour-
d’hui dans l’anonymat, car
« beaucoup de mes proches
ignorent mon état de santé. Je
ne le crie pas sur tous les toits,
un peu par crainte du regard
des autres ».
  Cet ancien travailleur du
BTP s’est mis à son compte
comme désamianteur à la
grande époque des décontami-
nations. Les risques, il les con-
naissait par cœur et maîtrisait
sur le bout des doigts le proto-
cole sanitaire, qu’il appliquait
scrupuleusement, pour s’éviter
les soucis de santé « et préser-
ver [s] es employés ».

 Mener à bien traitements
 et administratif
                                     Avec l’aide du centre Georges-François-Leclerc (CGFL), Philippe, 66 ans, est parvenu à faire reconnaître son cancer des poumons
  C’était sans compter les ex-       comme maladie professionnelle, depuis le mois de juillet. « J’avais les connaissances et pourtant l’amiante m’a attrapé. Lui qui m’avait
positions qu’il ignorait, au gré     permis de vivre est en train de me tuer. » Photo d’illustration Philippe
de sa carrière dans le bâtiment,
lorsque l’amiante était partout      voulais prévenir ma femme…           spécialisée en maladie profes-       chose à penser (j’étais hospita-
« dans les joints, les enduits, la
colle des carrelages et il n’y
                                     J’avais des métastases, des tâ-
                                     ches aux poumons, au cer-
                                                                          sionnelle du centre anti-can-
                                                                          cer. En place depuis un an, la
                                                                                                               lisé à ce moment-là). Et quand
                                                                                                               on a de gros problèmes de san-      } Quand on a
avait alors aucun équipement         veau. Bref, avant même d’ima-        cellule prend déjà en charge         té, l’argent n’est pas le nerf de   de gros problèmes
de protection individuelle, pas      giner un traitement, j’ai            plus de 50 dossiers et vise à        la guerre. On revoit ses priori-
de masques, juste un foulard         contacté mon notaire pour            faire reconnaître certains can-      tés. Tout le reste passe après.
                                                                                                                                                   de santé, l’argent
autour du nez ». C’était avant       mettre mes affaires en ordre »,      cers comme maladies reliées          Et puis, il y avait un aspect       n’est pas le nerf
1997 et la grande révélation
des dangers encourus.
                                     se remémore-t-il, amer. Une
                                     fois l’annonce digérée, il insis-
                                                                          au travail.                          psychologique aussi, un senti-
                                                                                                               ment presque de honte. Cette
                                                                                                                                                   de la guerre. ~
  Alors quand à peine un an          te pour être transféré au centre      « Au début, j’étais très            maladie m’a donné la sensa-                     Philippe, 65 ans
après avoir pris sa retraite et      Georges-François-Leclerc              réticent à faire valoir             tion d’être un “looser”. Je
cédé son entreprise, il est tom-     (CGFL), « ici on ne m’a jamais        mes droits »                        n’avais pas été capable de l’évi-
bé malade, le choc a été double      parlé de la fin, toujours de mes                                          ter alors que j’avais les con-      tre, qui s’est chargé de tout, je
et extrêmement violent.              options ».                             Le Dr Bernard Cazier, con-         naissances et pourtant              ne l’aurais probablement pas
  Philippe est d’abord hospita-        Cancer des poumons + tra-          sultant en la matière pour le        l’amiante m’a attrapé. Lui qui      fait. »
lisé à Valmy puis à la clinique      vail dans le BTP et amiante,         CGFL, passe au crible sa vie         m’avait permis de vivre est en        Aujourd’hui, Philippe ne re-
Benigne-Joly après une double        Philippe cochait les cases pour      professionnelle et confirme le       train de me tuer. »                 grette pas sa décision. Il tou-
embolie pulmonaire à 65 ans :        relier sa pathologie à son an-       lien, mais encore faut-il accep-       Très vite, Philippe réalise la    che une rente mensuelle indi-
« On m’a annoncé brutale-            cienne activité. Il est très rapi-   ter de faire valoir ses droits.      complexité du montage admi-         vidualisée de la caisse primaire
ment que je n’allais pas m’en        dement orienté par son onco-         « Au début, j’étais très réticent.   nistratif (lire par ailleurs).      d’assurance maladie (CPAM).
sortir et on m’a demandé si je       logue sur la consultation            Déjà parce que j’avais autre         « Sans le service social du cen-    En général, cette réparation
                                                                                                                                                   double les revenus des retrai-
                                                                                                                                                   tés et sa femme et ses ayants
  Des cancers professionnels largement « sous-déclarés »                                                                                           droit (enfants et petits-enfants)
                                                                                                                                                   pourront en bénéficier après
  Une série d’obstacles expliquent que                                                            ailleurs) : « J’ai hésité car je ne voulais      son départ.
  « les cancers professionnels sont sous-                                                         pas que le repreneur de ma société soit
  déclarés », déplore le Dr Aurélie La-                                                           dans l’embarras, alors qu’il n’y était pour       « Cet argent ne rachètera
  grange, oncologue médical. En effet, ils                                                        rien ».                                           pas ma santé »
  ne représenteraient en France que 1 800                                                         L’autre raison, selon le Dr Lagrange,
  cas par an, « alors qu’on estime leur                                                           « c’est que nous, médecins, n’établis-             « Ce n’est pas négligeable.
  nombre réel à six fois plus… D’abord                                                            sons pas toujours le lien entre les can-         J’ai encore des enfants à char-
  parce que les patients ignorent souvent                                                         cers et le travail. Notre premier constat        ge, dont une fille en étude. Je
  leurs droits. Ensuite, certains sont aussi                                                      à l’ouverture de cette consultation spé-         ne le vois pas comme une vic-
  réticents à mettre dans l’embarras leurs                                                        cialisée, c’est qu’il y avait “des trous dans    toire pour autant. Cet argent
  employeurs, qui les ont fait vivre des                                                          la raquette’’. Et pour éviter qu’un malade       ne rachètera pas ma santé. »
  années ». Pourtant, s’il est vrai que les                                                       passe à travers les mailles du filet, nous         En parallèle, ses soins sont
  grosses entreprises ont à charge la répa-                                                       avons établi un questionnaire systémati-         pris en charge à 100 % et le
  ration d’un salarié malade, ce n’est pas                                                        que au moindre doute ».                          fonds d’indemnisation des vic-
  le cas des petites structures, qui voient                                                       Enfin, l’ultime barrière, c’est la lourdeur      times versera à Philippe et sa
  simplement leurs taxes augmenter. Une                                                           administrative : « Quand il n’y a pas un         famille un capital compensa-
  tendance que confirme Philippe, dont le                                                         service social, comme au CGFL, pour              toire dont il préfère taire le
  cancer des poumons a été reconnu com-                                                           aider les prétendants, on hésite parfois à       montant « car ce n’est pas là
  me maladie professionnelle suite à une          Dr Aurélie Lagrange, oncologue                  soumettre nos patients déjà épuisés à ce         l’essentiel ».
  exposition à l’amiante (lire par                médical. Photo DR/CGFL                          parcours supplémentaire ».                                        Dossier réalisé
                                                                                                                                                             par Amandine ROBERT
W2104 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
Mercredi 22 décembre 2021                                                                    SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                  5

  Centre Georges-François-Leclerc

Maladie professionnelle : le parcours
vers la reconnaissance (suite)
« Accompagner de A à Z les patients »
■ C’est quoi un cancer                                                                                                                     pour faire reconnaître une
professionnel ?                                                                                                                            maladie professionnelle.
  Un cancer est dit profes-                                                                                                                Et surtout de les accompa-
sionnel lorsqu’il est la con-                                                                                                              gner tout au long de ce
séquence de l’exposition                                                                                                                   parcours administratif qui
d’un travailleur à un fac-                                                                                                                 est, pour beaucoup, très
teur cancérigène sur son                                                                                                                   compliqué à mettre en pla-
lieu de travail ou encore                                                                                                                  ce ».
lorsqu’il est possible d’éta-
blir un rapport direct et es-                                                                                                              ■ Le service maladies
sentiel entre la maladie du                                                                                                                professionnelles
patient et son travail habi-                                                                                                               en chiffres
tuel à une époque donnée.                                                                                                                    Depuis la création du ser-
Il s’agit d’une procédure                                                                                                                  vice fin décembre 2019, et
déclarative relevant du pa-                                                                                                                ce malgré la survenue de la
tient lui-même. Il existe                                                                                                                  pandémie, une consulta-
vingt tableaux cliniques                                                                                                                   tion se tient deux fois par
très précis, et donc forcé-                                                                                                                mois au centre, mais l’épi-
ment restrictifs, décrivant                                                                                                                démie du Covid a sérieuse-
ce qu’est un cancer profes-                                                                                                                ment entaché l’activité.
sionnel.                                                                                                                                     En 2020, la consultation a
                                                                                                                                           concerné 59 patients, soit 6
■ Une consultation en                                                                                                                      femmes et 53 hommes,
place depuis un an                                                                                                                         âgés de 36 à 85 ans. La
  En décembre 2019, sur la                                                                                                                 majorité souffre de cancer
constatation de nombre de                                                                                                                  des bronches (37). Sur l’en-
cancers ayant le travail                                                                                                                   semble de ces consulta-
pour origine, la direction                                                                                                                 tions, 55 expositions pro-
du Centre-Georges-Fran-                                                                                                                    fessionnelles ont pu être
çois-Leclerc (CGFL) con-                                                                                                                   établies, mais quatre pa-
fiait au Dr Aurélie Lagran-                                                                                                                tients n’ont pas souhaité
ge, oncologue médical, la                                                                                                                  donner suite à une deman-
mise en place d’une consul-      Des consultations spécialisées ont été mises en place au CGFL afin d’aider les patients à faire valoir    de de reconnaissance de
tation de maladies profes-       leurs droits. Photo LBP/Amandine ROBERT                                                                   maladie professionnelle.
sionnelles. À ses côtés, le                                                                                                                Sur les 51 demandes dépo-
Dr Bernard Cazier, méde-         fessionnels, aider les pa-         fonds d’indemnisation des          qui suit « de A à Z les pa-         sées, 17 ont eu un accord
cin consultant en maladies       tients dans leur déclaration       victimes de l’amiante. Cet-        tients, dès lors que l’onco-        notifié (après enquête) par
professionnelles, et les as-     aux organismes de Sécurité         te consultation est pluridis-      logie les adresse à la con-         la CPAM, 22 sont en cours
sistantes sociales du servi-     sociale, assurer le suivi du       ciplinaire, « un vrai travail      sultation maladies                  d’étude, 4 sont en cours
ce social.                       dossier, la gestion des pro-       d’équipe », détaille Évely-        professionnelles. Le but de         d’étude en seconde instan-
                                 cédures, ainsi que l’établis-      ne Billot, ingénieure socia-       cette cellule est de mieux          ce, après un premier refus.
■ Les missions ?                 sement des demandes d’in-          le. Elle est responsable du        repérer les patients concer-        Huit ont échoué à convain-
 Identifier les risques pro-     demnis ation auprès du             service social du CGFL,            nés dans leurs démarches            cre lors de cet appel.

 éclairage
                                          niveau de la prévention des risques.        (amiante, pesticide) ou là, c’est sous      matière et nous n’avons encore pas
                                          Il y a aussi une notion socio-écono-        forme de capital que la réparation est      mobilisé le fonds d’indemnisation
                                          mique importante : que le payeur            faite. Mais en cas de refus, il y a         des victimes de pesticides. C’est pro-
                                          soit le responsable du préjudice.           possibilité d’appel auprès du comité        bablement parce que les pathologies
                                          C’est primordial de comprendre que          régional de recours des maladies pro-       consécutives sont des cancers du
                                          si la caisse maladies est déficitaire en    fessionnelles. En général, le refus est     sang en majorité, pris en charge
                                          France, celle des accidents du travail      maintenu. »                                 ailleurs que chez nous. Ce que je
                                          et maladies professionnelles (AT/                                                       souhaite, dans l’intérêt des patients,
                                          MP), alimentée par les employeurs,          “Nous souhaitons                            c’est que nous devenions un centre
                                          est largement excédentaire. Or, lors-                                                   de référence sur lequel orienter tous
                                          qu’un patient à une pathologie pro-         devenir un centre                           les malades pouvant souffrir de ma-
                                          fessionnelle avérée, c’est bien sur cet-    de référence pour les                       ladies professionnelles. D’autant que
                                          te ligne financièrement viable que          cancers professionnels”                     nous participons déjà à une réunion
                                          sera prélevée sa rente mensuelle in-                                                    de concertation pluridisciplinaire
                                          dividualisée. Chaque année en Fran-         Dr Bernard Cazier,                          nationale, chaque mois. »
                                          ce, faute d’usage, cette caisse AT/         consultant en maladies
Évelyne Billot.                           MP, reverse 1 milliard à la caisse          professionnelles au CGFL
Photo DR/CGFL                             maladies pour combler le fameux             « Un de nos objectifs depuis un an,
                                          “trou’’. Il serait profitable à tout le     c’est justement de monter en puis-
“La caisse accidents                      monde que les malades ne passent            sance sur cette consultation. Pour le
                                          plus à travers les mailles du filet et      moment, les patients qui viennent
du travail et maladies                    qu’une fois leur cancer reconnu com-        nous voir sont ceux soignés au
professionnelles est                      me lié au travail, la réparation se         CGFL. On est donc sur des cancers
largement excédentaire”                   fasse via la bonne voie. Quant à ima-       du poumon, du rein, liés essentielle-
                                          giner que certains en profitent, cela       ment à des produits chimiques, à la
Évelyne Billot, cadre du service          est peu probable vu la complexité           sciure de bois ou à l’amiante. Toute-
social en faveur des patients,            des dossiers à monter. Un premier           fois, notre terre viticole est source de
ingénieure sociale                        doit être envoyé à la CPAM pour une         maladies pour les viticulteurs et tra-
« Il y a des enjeux importants derriè-    reconnaissance de maladie profes-           vailleurs de la vigne. On le sait, ces
re la meilleure déclaration des can-      sionnelle. Si l’organisme donne son         professions sont les plus touchées
cers comme maladies professionnel-        accord, le malade et ses ayants droit       dans le monde agricole à cause de
les. C’est un plus pour la société, car   touchent une rente mensuelle indivi-        l’usage de pesticides. Mais on a très
cela permet de sacraliser certains        dualisée. Un second dossier part au         peu de demandes de reconnaissance           Dr Bernard Cazier.
dangers et de mettre les moyens au        fonds d’indemnisation des victimes          de maladies professionnelles en la          Photo DR/CGFL
                                                                                                                                                               W2105 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
6         SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                                                                         Mercredi 22 décembre 2021

  Centre Georges-François-Leclerc

Cancer du sein : un traitement
efficace mais presque inaccessible
En mars 2021, Laetitia Pin-                                                                                                             mises en échec par le cancer
guet-Joblon, 38 ans, de Se-                                                                                                             du sein triple négatif.
longey, luttait contre un can-                                                                                                           Après être passée dans le
cer du sein triple négatif                                                                                                              cabinet de son médecin, elle
métastatique. Elle avait pu                                                                                                             en était ressortie avec un
bénéficier d’un traitement                                                                                                              plan de traitement sur trois
rare, venu des États-Unis, le                                                                                                           mois, renouvelable. À rai-
Trodelvy. En France, très peu                                                                                                           son d’un rendez-vous par se-
de femmes ont obtenu l’auto-                                                                                                            maine, durant deux semai-
                                                                                                                                        nes, suivi d’une pause de
risation temporaire d’utilisa-
                                                                                                                                        sept jours avant reprise du
tion (ATU) nominative du                                                                                                                rythme. Après que les soi-
produit, bloqué quelques                                                                                                                gnantes l’eurent installée
semaines après l’ouverture                                                                                                              dans son box, un pharma-
sur le marché national.                                                                                                                 cien lui expliquait : « C’est
                                                                                                                                        ce que l’on fait pour chaque

N    ous l’avions retrouvée
     dans la salle d’attente
du centre Georges-Fran-
                                                                                                                                        nouvelle thérapie. On re-
                                                                                                                                        parle des effets, des contre-
                                                                                                                                        indications, des choses à at-
çois-Leclerc (CGFL), où el-                                                                                                             tendre et de celles à
le était suivie depuis le dé-                                                                                                           surveiller. Au début, vous
but de son cancer du sein                                                                                                               serez peut-être plus fati-
triple négatif, en 2018.                                                                                                                guée, mais plus on avancera
Après quatre lignes théra-                                                                                                              dans le traitement, plus la
peutiques différentes, Laeti-                                                                                                           fatigue baissera. L’avantage,
tia Pinguet-Joblon était la                                                                                                             c’est qu’il y a rarement des
première patiente du centre                                                                                                             nausées ou des vomisse-
à bénéficier d’une nouvelle                                                                                                             ments. Je vous conseille de
molécule aux effets prou-                                                                                                               rester prudente, mais
vés : le Trodelvy. Venu d’un                                                                                                            d’avoir une vie la plus nor-
laboratoire américain, le                                                                                                               male possible ».
traitement, qui a bénéficié                                                                                                                         Amandine ROBERT
en France d’une autorisa-        Laetitia Pinguet-Joblon, 38 ans, a pu bénéficier jeudi d’un traitement rare, venu des États-Unis, le
tion temporaire d’utilisa-       Trodelvy. Elle a été la première patiente du CGFL à y avoir eu accès. Photo LBP/Cesar VARGAS             * Une ATU nominative per-
tion (ATU)* nominative (au                                                                                                                met l’utilisation exception-
cas par cas), est déjà épuisé     L’habitante de Selongey,          que ça. Il était presque plus       Cette méthode d’une chi-          nelle de spécialités pharma-
avant même d’avoir pu se         âgée de 38 ans, n’en revenait      enthousiaste que moi (ri-          miothérapie embarquée sur          ceutiques ne bénéficiant pas
généraliser (lire par            pas : « Il y a encore deux         res). Vu la situation du Tro-      un anticorps (lire par             d’une autorisation de mise
ailleurs).                       semaines, je n’y croyais           delvy en France, je voulais        ailleurs), ciblant directe-        sur le marché (AMM) et ne
                                 plus. Quand l’oncologue            attendre d’avoir une date et       ment les cellules cancéreu-        faisant pas l’objet d’un essai
 Moins toxique                   m’a dit que la liste d’attente     une heure de rendez-vous,          ses, est moins toxique et net-     clinique. L’ATU nominative
 et plus efficace                avait bougé, que c’était mon       une certitude quoi, avant de       tement plus efficace que les       s’adresse à un seul patient
 que les chimios                 tour, je n’ai pas plus réagi       me réjouir ! ».                    chimios standards, souvent         nommément désigné.

  DIJON
  Course Odysséa : 6 300 participants et 42 000 € pour le centre Georges-François-Leclerc

  Photo DR/CGFL

  Fidèle et précieux soutien du centre Georges-François-Leclerc et de ses recherches sur le cancer du sein notamment, l’association Odysséa a pu organiser
  la course en présentiel le 10 octobre dernier, réunissant 6 300 participants au parc de la Colombière. L’événement a permis de collecter 51 000 € dont
  42 000 € reversés au CGFL. La remise de chèque officielle, initialement prévue le 9 décembre au CGFL, a dû être reportée par souci de précautions
  sanitaires à la suite des annonces gouvernementales.

W2106 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
Mercredi 22 décembre 2021                                                             SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                7

 Centre Georges-François-Leclerc

Cancer du sein : un traitement
efficace, presque inaccessible (suite)
 Trodelvy : pourquoi ça coince ?
   Le Trodelvy, c’est quoi ? Techni-                                              « Le Trodelvy n’est pas un trai-
 quement parlant, c’est une chi-
 miothérapie conjuguée à l’anti-
                                                                                tement miracle, mais il a claire-
                                                                                ment une efficacité et il améliore     } Le Trodelvy n’est
 corps. En clair, sur l’anticorps,                                              surtout la qualité de vie des pa-      pas un traitement
 qui sert de “vaisseau’’, on embar-                                             tientes. Il faut absolument que
 que la chimiothérapie. Pourquoi                                                nous l’ayons à disposition », lâ-
                                                                                                                       miracle, mais il a
 un anticorps ? Parce qu’il est                                                 che le Dr Courèche Kaderbhaï,          clairement une
 capable de reconnaître une proté-
 ine spécifique qui est à la surface
                                                                                l’oncologue de Laetitia. C’est lui
                                                                                qui, dès l’ouverture des ATU no-
                                                                                                                       efficacité et il améliore
 de la cellule cancéreuse. Il va                                                minatives en France, a déposé          surtout la qualité de vie
 donc se “poser’’ à la surface de la                                            une demande pour elle. Trois           des patientes. ~
 cellule malade de façon plus spé-                                              autres femmes suivies au CGFL
 cifique. Une fois le vaisseau                                                  ont pu en bénéficier aussi. Toutes
                                                                                                                                Dr Courèche Kaderbhaï,
 amarré à son objectif, il libère la                                            ont été inscrites sur la liste d’at-                oncologue au CGFL
 chimiothérapie au sein même de                                                 tente.
 la cellule atteinte. Contrairement                                               « Cette molécule a obtenu une
 à une chimio classique, qui se                                                 ATU nominative qui permet un           en cancérologie se sont rués sur
 répand dans tout l’organisme et                                                accès en attente de son rembour-       les demandes d’ATU nominatives.
 dont la toxicité agit sur les orga-                                            sement officiel, donc avant qu’el-     « Le souci, c’est que le laboratoi-
 nes sains, le Trodelvy est intro-                                              le puisse être utilisée couram-        re américain à l’origine du Tro-
 duit très majoritairement dans les    Dr Courèche Kaderbhaï.                   ment en thérapie. De telles ATU,       delvy est aussi le seul à le fabri-
 cellules touchées. La thérapie est    Photo LBP/A.R.                           on en a plein sur le territoire,       quer et il ne peut pas suivre le
 donc plus ciblée – donc plus                                                   c’est un bon compromis. » La           rythme de la demande mondiale.
 efficace – et surtout moins toxi-       poraire d’utilisation (ATU) nomi-      procédure est très simple pour         Que ce soit au niveau de la
 que et moins éprouvante pour les        native, les vannes se sont brutale-    obtenir le sésame, à partir du         production ou de la distribu-
 patientes. C’est un véritable che-      ment refermées, brisant les es-        moment où les patientes entrent        tion. » Face à un embouteillage
 val de Troie qui offre aux femmes       poirs de centaine de patientes.        dans les critères. « Les valida-       monstre, le fabricant fait machi-
 un meilleur pronostic (avec un          Seules une poignée d’élues a pu        tions tombent très vite générale-      ne arrière et ferme la porte aux
 bénéfice d’environ quatre mois          obtenir une place sur la liste         ment. Il y a une liste constituée et   nouvelles demandes dès la fin
 en survie s ans progression).           d’attente, dont Laetitia Pinguet-      le traitement est ensuite déli-        janvier, soit un petit mois à peine
 L’atout majeur du traitement,           Joblon (lire par ailleurs) et trois    vré. »                                 après le top départ tant attendu…
 c’est qu’il améliore drastique-         autres patientes prises en charge                                               « Heureusement, le laboratoire
 ment la qualité de vie des mala-        au CGFL. Mais depuis janvier,           « Le laboratoire américain            a dit qu’il honorerait les deman-
 des.                                    rien n’avait bougé et Laetitia se       ne peut pas suivre le                 des déjà validées. C’est pourquoi
                                         désespérait. Le 25 mars, elle a été     rythme de la demande                  Laetitia a pu avoir accès au traite-
 Pour qui ?                              la première patiente du CGFL à          mondiale »                            ment jeudi. Mais nous n’avons
   Seules les femmes porteuses           bénéficier de cette nouvelle ligne                                            toujours pas de visibilité sur la
 d’un cancer du sein triple négatif      thérapeutique. Mais depuis jan-          « Ce n’est absolument pas lié à      liste d’attente actuelle et encore
 métastatique ayant eu au moins          vier, pour toutes les autres qui       un problème français, adminis-         moins sur la date de reprise des
 deux protocoles de chimiothéra-         n’ont pas pu avoir une ATU nomi-       tratif ou autre », précise le Dr       demandes d’ATU nominatives. »
 pie au préalable peuvent deman-         native, c’est l’angoisse : en effet,   Kaderbhaï, le Trodelvy a tout            Ce qui laisse des centaines de
 der à être traitées avec le Trodel-     aucune autre demande d’ATU no-         simplement été victime de son          femmes porteuses d’un cancer du
 v y du laboratoire américain            minative n’a pu être déposée.          succès. Quand en décem-                sein triple négatif avec métasta-
 Gilead. Enfin, pouvaient deman-                                                bre 2020, la molécule est arrivée      ses dans une attente insupporta-
 der. Car après quelques semaines         « Il faut absolument que              sur le marché français, avec une       ble, alors même que le temps est
 à peine d’ouverture sur le marché        nous l’ayons à disposition »          grosse médiatisation, toutes les       un luxe qu’elles n’ont malheureu-
 français via une autorisation tem-                                             malades concernées et les acteurs      sement pas.

                                                                                                                                Repère
 Cancer du sein triple négatif : l’ennemi redouté                                                                               ■ La recherche pour une
 Pour bien comprendre l’importan-                                                   tes, comme peut l’être le Trodel-            thérapie du futur
 ce de molécules comme le Trodel-                                                   vy ».                                        Au CGFL, c’est en moyen-
 vy, il faut remonter à la racine du                                                Les acteurs de la lutte contre le            ne un patient sur cinq qui
 mal, le cancer du sein triple négatif                                              cancer attendent beaucoup de la              est inclus dans un essai cli-
 métastatique. Si chaque année les                                                  molécule américaine, qui a pu être           nique. S’il n’y a pas encore
 cancers représentent 55 000 nou-                                                   administrée à de rares élues, faute          de chiffres définitifs pour
 veaux cas, la majorité se décline en                                               de produit disponible sur le marché          2020, on sait qu’en 2019, le
 plusieurs catégories basées sur                                                    (lire par ailleurs). « Ce n’est pas          taux d’inclusion était de
 l’identification de trois marqueurs,                                               simple d’expliquer aux patientes             20,4 %. Cela classe le
 pour lesquelles des thérapies spéci-                                               qui, en plus, sont très informées            CGFL à la 4e place parmi
 fiques existent. Toutefois, 10 à 15 %                                              qu’une solution existe, mais qu’elle         l’ensemble des centres de
 des cancers n’expriment aucun de                                                   n’est pour l’instant pas accessible.         lutte contre le cancer en
 ces marqueurs. Ils sont donc consi-                                                Surtout quand le temps est comp-             matière de taux d’inclusion
 dérés, par défaut, comme triples                                                   té. » Heureusement, les “Triplette-          des patients dans des étu-
 négatifs. C’est là que les choses se                                               s’’, comme elles se nomment, ont             des cliniques.
 compliquent, comme l’explique le                                                   formé un collectif et se soutien-
 Dr Jean-David Fumet, oncologue                                                     nent, s’informent et boostent à leur
 au CGFL : « On fait face à plu-                                                    manière la liste d’attente nationale,
 sieurs difficultés. D’abord, une ab-                                               en médiatisant leur combat. Et
 sence de traitement spécifique,                                                    puis, comme le souligne le Dr Fu-
 donc peu d’options thérapeutiques,        Le Dr Jean-David Fumet, oncologue        met, elles ne sont pas laissées sans
 alors on donne de la chimiothéra-         au CGFL. Photo LBP/A.R.                  solution : « Le CGFL favorise la
 pie standard, pas ciblée. L’autre                                                  recherche, en incluant chaque an-
 souci est que les triples négatifs        mois d’espérance de vie lorsque les      née un patient sur cinq dans un
 sont plus agressifs, avec une évolu-      premières métastases sont déce-          essai thérapeutique, qui produira
 tion rapide, rendant le pronostic         lées, ndlr). Il y a donc urgence à       peut-être plus tard le traitement du         Le CGFL. Photo LBP/C. VARGAS
 plus défavorable (douze à quinze          développer des thérapies innovan-        futur ».

                                                                                                                                                      W2107 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
8        SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                                                                                      Mercredi 22 décembre 2021

  Centre Georges-François-Leclerc

Cancer du sein : un nouvel appareil
précieux pour le CGFL
Grâce à un soutien finan-
cier de 58 500 euros attri-                                                                                                                           Une aide rendue
bué par le Rotary, le centre                                                                                                                          possible grâce
dijonnais de lutte contre le                                                                                                                          à l’opération
cancer a pu s’équiper d’un
Femto Pulse. Une machine                                                                                                                              « Jetons cancer »
qui va permettre aux cher-
cheurs d’étudier l’évolu-                                                                                                                             Depuis 2015, les bénévoles
tion de la pathologie can-                                                                                                                            du Rotary réalisent, chaque
                                                                                                                                                      premier samedi de février
céreuse mammaire à
                                                                                                                                                      (en écho à la Journée mon-
travers l’ADN. Explications.                                                                                                                          diale contre le cancer), une

C   omment évolue la structure
    de l’ADN aux différentes
phases de développement d’un
                                                                                                                                                      collecte de fonds à l’entrée
                                                                                                                                                      des grands magasins en don-
                                                                                                                                                      nant un jeton de caddie con-
cancer du sein ? Et ces évolu-                                                                                                                        tre un euro. Avec l’argent
tions peuvent-elles permettre                                                                                                                         récolté, le club finance di-
un diagnostic précoce de la ma-                                                                                                                       vers projets qui ont pour but
ladie ? Telles sont les deux ques-                                                                                                                    de lutter contre la maladie.
tions auxquelles vont tenter de
répondre les équipes impli-
quées dans un nouveau projet          Romain Boidot, biologiste moléculaire du Centre Georges-François Leclerc, sera chargé de                        En effet, aucune étude n’a en-
de recherche au Centre Geor-          l’interprétation des données obtenues avec ce nouvel appareil. Photo DR                                       core comparé les variations
ges-François Leclerc de Dijon.                                                                                                                      structurales de l’ADN entre les
                                        Un outil, rare en France, ‘’in-   Un projet élargi                     ticien, pour les analyses bio-in-    différents stades de développe-
Une machine                           dispensable pour utiliser les sé-   à d’autres types de cancer ?         formatiques des données et Ro-       ment d’un cancer du sein. Il est
qu’on trouve peu en France            quenceurs de 3ème génération          Pour le moment, trois person-      main Boidot, biologiste molécu-      donc possible que les variations
 Un projet rendu possible grâce       et permetre la quantification et    nes sont impliquées dans ce          laire, chargé de l’interprétation    structurales de l’ADN arrivent
au coup de pouce apporté par le       la qualification de l’ADN et de     projet : « Sandy Chevrier, assis-    des données ».                       très rapidement, voire avant
Rotary qui a récemment attri-         l’ARN ». Le tout avec une « sen-    tante ingénieur, en charge de la       Dans un premier temps, ce          l’apparition de la majorité des
bué une dotation de 58 500 eu-        sibilité 10 fois plus élevée pour   partie technique du projet avec      projet se focalisera sur le cancer   mutations. Tout comme, il se
ros à l’établissement dijonnais       les frottis et jusqu’à 100 fois     la préparation et la qualification   du sein, mais dans le futur, d’au-   pourrait que cette technique
afin d’acquérir un appareil in-       pour les fragments » que les ap-    des échantillons ainsi que la gé-    tres types de cancers pourront       n’aide pas à un dépistage préco-
dispensable à ces travaux. Son        pareils auparavant présents à       nération des données brutes ;        être analysés si les premiers tra-   ce…
nom ? Le Femto Pulse.                 Dijon.                              Corentin Richard, bio-informa-       vaux s’avèrent concluants.                                      A.Ma.

  Centre Georges-François-Leclerc

À Dijon, un protocole pour mieux
accompagner les jeunes patients
Au centre régional de                                                                                                                               pédiatrie où, entourés d’en-
lutte contre le cancer (le                                                                                                                          fants, il n’y a pas davantage
CGFL), un protocole                                                                                                                                 d’espace pour eux. »
« AJA » (pour adolescents                                                                                                                             À travers le protocole AJA,
et jeunes adultes de 15 à                                                                                                                           outre l’amélioration du bien-
30 ans) a été mis en place                                                                                                                          être des patients, l’enjeu est de
afin d’accompagner au                                                                                                                               réduire les conduites à risque.
mieux ces jeunes pa-                                                                                                                                La tentation est grande, chez
tients. Tour d’horizon.                                                                                                                             les jeunes, de ne pas prendre
                                                                                                                                                    leur traitement, voire d’aban-

C    haque année, en France,
     2 500 enfants apprennent
qu’ils sont porteurs d’un can-
                                                                                                                                                    donner les soins, notamment
                                                                                                                                                    s’il y a rechute.

cer. Au centre régional de lutte                                                                                                                     « Offrir, en tout lieu
contre le cancer (le CGFL), un                                                                                                                       du territoire,
protocole « AJA » (pour ado-                                                                                                                         le même accès
lescents et jeunes adultes de 15                                                                                                                     aux soins médicaux
à 30 ans) a été mis en place, qui                                                                                                                    et soins de support »
permet de « mieux accompa-
gner les patients et les soi-                                                                                                                         E n B o u r g o g n e - F r a n ch e -
gnants, eux-mêmes déstabili-                                                                                                                        Comté, un réseau AJA s’est
sés », explique Rachel                                                                                                                              constitué au sein du réseau
Dameron, psychologue au                                                                                                                             OncoBFC, annonce Rachel
CGFL. Les psychologues ren-                                                                                                                         Dameron. « Les recrutements
contrent désormais tous les                                                                                                                         sont en cours de finalisation
jeunes patients, « dans l’idéal       À travers le protocole AJA, outre l’amélioration du bien-être des patients, l’enjeu est de réduire les        pour offrir, en tout lieu du terri-
dès l’annonce du diagnostic »         conduites à risque. Photo AdobeStock                                                                          toire, le même accès aux soins
– ou, à défaut, en cours de                                                                                                                         médicaux et soins de support.
traitement.                           adulte, des bouleversements         par exemple à leur capacité à        « 67 % des AJA sont hospitali-       L’équipe se composera de deux
  De fait, le cancer, à cet âge-là,   physiques », dit Rachel Dame-       avoir un jour des enfants.           sés dans des services auprès         infirmiers de coordination,
est difficile à vivre, physique-      ron. Les jeunes se retrouvent        Les adolescents et les jeunes       d’adultes, où ils ne se sentent      d’un psychologue (0,5 ETP),
ment et émotionnellement. « Il        également confrontés à des          adultes sont d’autant plus per-      pas à leur place ; ils y sont        d’un assistant social (0,5 ETP)
crée des bouleversements sur          questions qui se posent à des       dus que, quel que soit le lieu de    entourés de personnes souvent        et d’un animateur en activité
un corps qui connaît déjà, avec       adultes, rarement à des pa-         prise en charge, ils sont décon-     âgées, constate Rachel Dame-         physique adaptée (0,5 ETP). »
la puberté et le passage à l’âge      tients de cet âge – qui touchent    nectés des autres patients.          ron. 33 % sont hospitalisés en                    Alexandra CACCIVIO
W2108 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
Mercredi 22 décembre 2021                                                                      SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                            9

 Centre Georges-François-Leclerc

Primée pour ses recherches visant
à détecter plus tôt les cancers du sein

Carmen Garrido est directrice de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale. Photo DR

Carmen Garrido, directri-          de recherche contre le can-        drid. Lors de sa thèse, qui        équipe multidisciplinaire
ce de recherches à l’Ins-
                                                                                                                                        55
                                   cer du sein. Ce prix est la        portait sur la génétique           de cinquante-cinq person-
titut national de la santé         plus haute distinction dé-         moléculaire, elle jongle en-       nes travaillent depuis plus
et de la recherche médi-           cernée chaque année par            tre l’Espagne et les États-        de vingt ans sur des protéi-
cale, a reçu le grand prix         l’association (lire par            Unis, notamment Los An-            nes appelées « protéines
Ruban rose grâce à ses             ailleurs).                         geles et Boston.                   de choc thermique » ou,
                                     « C’est une fierté pour            « Je suis ensuite arrivée à      plus généralement, nom-        C’est le nombre de per-
avancées scientifiques                                                                                                                  sonnes qui composent
qui pourraient permettre           moi d’avoir obtenu ce prix         l’institut Pasteur de Lille,       mées protéines de stress.
de détecter de façon               dans une petite ville, c’est       j’y ai rencontré mon mari                                         l’équipe multidisciplinaire
précoce les cancers du             une reconnaissance pour            qui est agriculteur et j’ai          « Cette technique            qui travaille, avec Carmen
sein.                              Dijon. »                           découvert la campagne de             pourrait                     Garrido, depuis plus de
                                                                      l’Yonne. Je suis une habi-           également                    vingt ans sur des protéi-
A    près avoir décroché le
     premier prix “Avenir”
décerné par l’association
                                    L’étude des protéines
                                    de choc thermique
                                    dans le cancer
                                                                      tuée des grandes villes et je
                                                                      n’avais jamais vu une va-
                                                                      che de près », s’amuse-t-el-
                                                                                                           être utilisée pour
                                                                                                           d’autres cancers »
                                                                                                                                        nes appelées « protéines
                                                                                                                                        de choc thermique ».
Ruban rose en 2017, la                                                le a raconté avec un accent          Ces protéines sont nom-
docteure Carmen Garrido,            Arrivée en France il y a          hispanique plein d’énergie.        breuses dans les cellules
directrice de recherche à          vingt-sept ans, Carmen             « Je suis donc restée en           sanguines de patients at-      technique est très promet-
l’Inserm (Institut national        Garrido, 62 ans, a focalisé        France, j’ai rejoint l’In-         teints de cancers. Via un      teuse et pourrait égale-
de la santé et de la recher-       son travail sur l’étude des        serm de Dijon en tant que          prélèvement sanguin et         ment être utilisée pour
che médicale), vient d’ob-         protéines de choc thermi-          chercheuse en 1995 et j’y          d’autres procédés plus         d’autres cancers. Le futur
tenir le grand prix Ruban          que dans le cancer. Née à          suis devenue directrice de         compliqués réalisés par        des cancers, c’est la méde-
rose ainsi qu’un chèque de         Séville, en Espagne, elle a        recherche en 2002. »               des physiciens, il serait      cine personnalisée », con-
200 000 € pour son projet          réalisé ses études à Ma-             Carmen Garrido et son            possible, en quantifiant       fie la chercheuse.
                                                                                                         ces protéines, de détecter       Les 200 000 € qui accom-
                                                                                                         le cancer du sein plus pré-    pagnent le grand prix Ru-
 Grand prix de la recherche Ruban rose                                                                   cocement et d’adapter les
                                                                                                         traitements. Une étude –
                                                                                                                                        ban rose seront utilisés
                                                                                                                                        pour lancer une plus gran-
 Les prix Ruban rose pour la recherche,             Le plus prestigieux, le grand prix Ruban             qui a été publiée cette an-    de étude et améliorer la
 créés par l’association Ruban rose en              rose, salue les travaux reconnus interna-            née – a été réalisée sur des   technique de prélèvement
 2003, sont destinés à soutenir la recher-          tionalement de médecins, chercheurs ou               patientes ayant déjà décla-    et de recherche de ces pro-
 che. Leur dotation, en 2021, est de 850            équipes. Cette distinction soutient un               ré un cancer du sein et qui    téines de stress. Dans
 000 €, soit 280 000 € de plus que 2020.            travail de recherche fondamental ou de               sont suivies au centre         l’avenir, il sera peut-être
 Ils ont été alloués à ce domaine au tra-           recherche clinique d’intérêt majeur dans             Georges-François-Leclerc.      possible de détecter n’im-
 vers de six récompenses : un grand prix            le domaine du cancer du sein ou du                   « Nous avons ensuite com-      porte quel cancer, de fa-
 Ruban rose ; trois prix Ruban rose “Ave-           cancer en général, à condition que les               paré nos résultats avec        çon précoce, grâce à un
 nir” ; deux prix Ruban rose “Qualité de            recherches intéressent directement le                ceux des cliniciens qui        simple prélèvement san-
 vie”.                                              cancer du sein.                                      s’occupaient de ces fem-       guin.
                                                                                                         mes et ça collait. Cette       Alicia WARCHOLINSKI (CLP)
                                                                                                                                                           W2109 - V0
Le CGFL, actuellement en travaux, poursuit sa modernisation et fait de Dijon une ville qui compte dans la lutte contre le cancer. Photos LBP/Emma ...
10 SUPPLÉMENT NUMÉRIQUE                                                                                                                            Mercredi 22 décembre 2021

  Centre Georges-François-Leclerc

Que retenir du congrès mondial
de cancérologie ?
Chaque année, le congrès mondial de cancérologie est un moment important pour le centre de lutte contre le cancer Georges-François-Leclerc
(CGFL). L’occasion de faire le point sur les diverses études menées à l’international et de parler des changements thérapeutiques qui en dé-
coulent et toucheront forcément l’établissement bourguignon. Pour la seconde année consécutive, le congrès de l’American society of clinical
oncology (Asco de son petit nom) était dématérialisé, et c’est à distance que les participants du CGFL ont suivi les conférences et ont même
eu l’honneur de présenter leurs travaux. Et cette année, il y a du neuf !
                                                                                                           Dossier réalisé par Amandine ROBERT

Cancer du rein. Vers une nouvelle thérapie                                                                                                          Cancers digestifs.
                                                                                                                                                    Le centre
et déjà un essai ouvert au CGFL                                                                                                                     a un cran d’avance
                                                                                                                                                    « Les cancers digestifs
                                                                                                                                                    sont les parents pauvres
                                                                                                                                                    de l’immunothérapie
                                                                                                                                                    (IT), qui fonctionne peu
                                                                                                                                                    sur eux », déplore le Dr
                                                                                                                                                    Jean-David Fumet. L’an
                                                                                                                                                    dernier, le CGFL avait
                                                                                                                                                    présenté une combinai-
                                                                                                                                                    son positive d’IT et de
                                                                                                                                                    chimio pour les cancers
                                                                                                                                                    du côlon. Cette année,
                                                                                                                                                    toujours à l’Asco, d’au-
                                                                                                                                                    tres résultats de cette
                                                                                                                                                    combinaison ont été pré-
                                                                                                                                                    sentés mais pour le can-
                                                                                                                                                    cer de l’œsophage. Ils
                                                                                                                                                    sont, là aussi, très bons,
                                                                                                                                                    avec un bénéfice en sur-
                                                                                                                                                    vie.
                                                                                                                                                    « Au final, cette combi-
                                                                                                                                                    naison chimio et immu-
                                                                                                                                                    no va devenir le nou-
                                                                                                                                                    veau standard de
                                                                                                                                                    traitement dans le can-
                                                                                                                                                    cer de l’estomac. Nous
L’immunothérapie, voilà des années qu’elle est décrite comme une piste d’avenir en matière de cancérologie. Au CGFL, la recherche                   ne savons pas quand
n’est pas nouvelle. Photo d’illsutration LBP/Philippe BRUCHOT                                                                                       l’autorisation de mise
                                                                                                                                                    sur le marché et le rem-
  Dans le cancer du rein localisé, depuis         une baisse de 10 %, donc significative,         mine donc vers un changement de prati-            boursement tomberont
toujours les patients sont opérés, puis on        de rechute. De plus, il y a une bonne           que, mais l’accès à l’immunothérapie ne           en France. Dans l’atten-
met en place une surveillance. Or, dans           tolérance de ce traitement, sans trop           se fera pas tout de suite. »                      te, pour permettre à nos
ce cas, le risque de développer des mé-           d’effets secondaires », détaille le Pr Syl-       Pour ne pas rater le coche, le CGFL             patients d’avoir accès à
tastases est loin d’être négligeable, cela        vain Ladoire, oncologue médical au              participera à une étude internationale            cette avancée, plusieurs
arrive dans 30 % à 40 % des cas. « Ce qui         CGFL.                                           comme centre investigateur. Elle inclura          essais thérapeutiques
a été présenté en séance plénière à l’As-           De plus, on commence à voir, mais             au total 1 700 patients et permettra d’of-        sont ouverts au CGFL,
co, ce sont les premiers résultats de             c’est à confirmer, sur le long terme, qu’il     frir aux malades l’accès à l’immunothé-           avec cette stratégie thé-
l’usage d’immunothérapie en adjuvant              y aurait un bon signal sur la survie globa-     rapie « avec un protocole différent, mais         rapeutique.
(post-opératoire, ndlr). Résultat : il y a        le au bout d’un an d’étude. « On s’ache-        des molécules voisines ».

Cancer du sein triple négatif.
Une petite révolution en marche
  Pour les patientes porteuses des                                                                                                                cible : des malades atteintes d’un
fameux gènes BRCA1 et BRCA2,                                                                                                                      cancer du sein triple négatif.
les prédisposant à développer un                                                                                                                  « L’étude montre une baisse du
cancer du sein ou des ovaires, il y                                                                                                               risque de rechute de 7 à 8 %, ce
a du neuf. « On a repéré le talon                                                                                                                 qui est beaucoup et il y a un signal
d’Achille de la tumeur. En effet,                                                                                                                 précoce de bénéfice en survie glo-
ces mutations réparent moins                                                                                                                      bale. Il y aurait une baisse du
bien certains dégâts causés dans                                                                                                                  risque de développer des métas-
l’ADN tumoral. Les cellules can-                                                                                                                  tases et pas de surtoxicité », s’en-
céreuses meurent donc plus faci-                                                                                                                  thousiasme le Pr Sylvain Ladoire.
lement du fait de leur anomalie.                                                                                                                  En résumé : on apporterait beau-
On sait que l’usage de la thérapie                                                                                                                coup de bénéfices, sans léser la
ciblée que sont les inhibiteurs de                                                                                                                qualité de vie en activant le levier
PARP a de bons résultats en la                                                                                                                    “inhibiteurs de PARP’’ très vite
matière. Il y a un intérêt en phase                                                                                                               dans la prise en charge.
métastatique et même plus préco-                                                                                                                    « Au CGFL, tous les acteurs
cement », explique le Pr Sylvain                                                                                                                  s’organisent pour proposer dès
Ladoire. Restait à trouver le bon                                                                                                                 maintenant des tests génétiques
timing.                                                                                                                                           afin de déterminer si les patientes
  À travers l’étude internationale                                                                                                                avec un triple négatif sont porteu-
Olympia, à laquelle le CGFL a                                                                                                                     ses de cette mutation génétique. »
participé, on a cherché à savoir si                                                                                                               Cela impacte essentiellement les
l’usage, très tôt des inhibiteurs de                                                                                                              services de biologie moléculaire
PARP, juste après la chirurgie,        Le séquenceur 3e génération, acquis par le CGFL, est pour l’instant un outil de recherche, mais pourra     et d’oncogénétique. D’ailleurs, un
avec la radiothérapie et la chimio-    bientôt faire avancer la lutte contre le cancer. En parallèle, des séquenceurs plus classiques sont        sixième séquenceur ADN est en
thérapie,
W2110 - V0 apportait un plus. La       quotidiennement mobilisés pour le diagnostic précoce des mutations génétiques. Photo LBP/Amandine ROBERT   cours d’acquisition.
Vous pouvez aussi lire