No.12 - Une autre face du Japon : Douceurs et friandises - Web Japan
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Printemps Eté Automne Hiver niponica est publié en japonais et six autres langues (anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe) pour présenter au monde les Japonais et leur culture. Le titre niponica provient de “Nippon”, le terme japonais dé- Reportage spécial signant l’Archipel japonais. no. 12 Reportage spécial Une autre face du Japon : S o m m a ir e Une autre face du Japon : Douceurs et friandises Douceurs et friandises La confiserie traditionnelle japonaise (wagashi), aux saveurs subtiles, est généralement en harmonie 04 Le Japon bec sucré 20 Les supérettes sont le paradis de la friandise avec la saison en cours. Comme l’illustrent les étalages de nombre d’échoppes, les douceurs japonaises 10 Friandises japonaises : présentent une variété quasi infinie de parfums et de formes. Elles jouent un rôle essentiel dans savoureuses, drôles et mignonnes ! 23 Mettre la main à la pâte pour la culture du cadeau et leur emballage est souvent étonnament recherché—tant de variétés, tant de savourer l'expérience des délices, tant de beauté, le tout panaché de mystère. Dans ce numéro, goûtez aux plaisirs merveilleux 14 Confiseries dans la culture friandises japonaises du cadeau des douceurs et des friandises. 24 Balade au Japon Photos du haut : Empilement de pétales de fleurs de cerisiers, No. 12 16 Beauté et tradition au Asakusa et Mukojima : feuilles d’érable d’un vert rafraîchissant, insectes d’un bosquet chantant la lune d’automne, première neige saupoudrant une 14 mars 2014 cœur de l'emballage des Balade et grignotage dans le feuille de houx. Les gâteaux wagashi célèbrent chaque saison. Publié par le Ministère des Affaires friandises japonaises Tokyo d'autrefois (Créations par Akasaka Shiono) étrangères du Japon Couverture : Gâteaux tai-yaki faits d'une pâte à base de farine Kasumigaseki 2-2-1, Chiyoda-ku, de froment et d’œufs. Elle est ensuite fourrée d'une mousse Tokyo 100-8919, Japon 18 De la tradition à un nouveau 28 Souvenirs du Japon de fèves an et pressée dans un moule en forme de poisson http://www.mofa.go.jp/ monde de douceurs Thé vert avant d'être cuite. (Kotai-yaki, par Tourindou Co. Ltd.) Photos par Takeuchi Akio 2 niponica 3
Le Japon bec sucré Dialogue Kurokawa Mitsuhiro et Aoki Sadaharu Admirer la ronde des saisons, apprécier la beauté des formes, savourer chaque ingrédient un par un —ces usages ont tous contribué à enrichir la fabuleuse culture de la friandise au Japon. Friandises traditionnelles et modernes sont ici explorées par Kurokawa Mitsuhiro, propriétaire et patron d’une confiserie japonaise fondée voici plus de 480 ans, et Sadaharu Aoki, chef pâtissier japonais dont les créations font parler le tout Paris. Photos par Natori Kazuhisa Collaboration : TORAYA Co., Ltd. et a-sweets house inc. technique de fabrication des marrons Kurokawa : De nos jours, cependant, Confiserie japonaise et occi- glacés français, qui consiste à confire De nouvelles frontières pour je ne pense pas qu’il soit anathème dentale : quelles différences ? des châtaignes dans un sirop, res- les ingrédients traditionnels d’incorporer la poudre de thé vert dans Kurokawa : Le Japon distingue les semble fort à la production de an à Kurokawa : Il y a une dizaine d’an- des gâteaux japonais. On en trouve confiseries en deux catégories : ja- partir de fèves azuki. nées, nous avons ouvert des boutiques bien dans des pâtisseries un peu par- ponaise ou occidentale. L’on emploie proposant des friandises “fusion” tout dans le monde, de même que le pour le wagashi (gâteau japonais Kurokawa : Le wagashi porte au pi- —wagashi panachés d’éléments oc- gingembre et le wasabi ; et je suis traditionnel) des ingrédients typi- nacle la célébration des cinq sens. cidentaux. Par exemple, le mariage du prêt à parier que le miso5 va finir par quement japonais tels que fèves azuki Tout d’abord le goût, bien sûr. En- an et du chocolat dans un gâteau inti- s’ajouter à la liste. Un jour peut-être, ou pâte de riz mochi, tandis que les suite, la vue—ces créations ont une tulé “Azuki et Cacao Fondant”. Autre les chefs pâtissiers français pourraient pâtisseries dites occidentales se com- apparence tentante, séduisante. Troi- exemple : une pâte an modifiée par bien considérer le an comme un in- posent d’ingrédients originellement sièmement vient l’odorat ; plus subtil nos chefs pour s’employer comme grédient parfaitement ordinaire. importés d’Occident. Le Japon se que les sucreries occidentales, le par- une confiture. Je suis convaincu que Il y a de cela quelque temps, le chef coupa du monde au cours du XVIIe fum du wagashi a le chic pour mettre nous allons vers plus de métissages, pâtissier mondialement connu Pierre siècle, mais lorsqu’il s’ouvrit à nou- en valeur la saveur du thé matcha que dès lors que wagashi et pâtisseries Hermé a émis le souhait de visiter nos Kurokawa Mitsuhiro Aoki Sadaharu Dix-septième patron et propriétaire de la veau à la fin du XIXe, c’est alors que l’on sirote durant la cérémonie du thé. occidentales commencent à échanger ateliers pour découvrir la fabrication Chef pâtissier chez pâtisserie Sadaharu Pâtisserie TORAYA, qui existe depuis presque les éléments culturels occidentaux fi- (C’est pourquoi l’arôme du wagashi se leurs ingrédients. du an. Nos employés, surpris et ho- AOKI paris. Il a reçu le prix de Meilleur cinq siècles. Tout en gardant vivantes les rent leur apparition. C’est la base de doit d’être léger). La texture fait en- Pâtissier de France et le Prix des Maires traditions, il propose aussi des créations norés, l’ont reçu avec les honneurs de France pour ses gâteaux européens, nouvelles dans ses boutiques comme le cette dichotomie. trer en jeu le toucher : les pâtisseries Aoki : L’un de mes clients parisiens qui lui étaient dûs. J’espère bien que incluant des ingrédients japonais tra- TORAYA CAFÉ. Président de l’Association ja- doivent être à la fois suffisamment ayant exprimé le désir de goûter le thé ce genre de collaboration ne va faire ditionnels. Basé à Paris, il est à la tête ponaise de Wagashi. de 11 boutiques, dont certaines à Tokyo Aoki : Oui, par exemple, le wagashi fermes et moelleuses pour se laisser vert dans un gâteau, je créai des éclairs que renforcer l’expansion du monde et Taiwan. fait usage d’une grande variété de couper à l’aide d’un bâtonnet et se parfumés de poudre de thé vert. Ce fut de la friandise. sucres, avec diverses méthodes. La pâ- laisser mâcher agréablement. le déclencheur et je me mis à employer tisserie occidentale est souvent à base Concernant le cinquième sens de plus en plus d’ingrédients japonais. Aoki : Mes boutiques parisiennes de farine, alors que, pour le wagashi, enfin, l’ouïe : une chose encore qui Actuellement, j’ajoute du sésame noir, consomment presque une demi tonne c’est le riz. distingue les wagashi des concoctions du citron yuzu, du thé vert torréfié, de fèves azuki par an, une belle aug- occidentales, c’est leur capacité à sti- voire du wasabi à certaines de mes mentation comparée aux 25 kg Kurokawa : Je considère le wagashi muler l’imagination par leur seul nom, créations, qu’il s’agisse de macarons de départ. comme une classe à part parce qu’il que l’on associe à un paysage ou à ou de truffes au chocolat. J’aime sur- Mon gâteau de Noël contient géné- contient des ingrédients entièrement une saison. Un exemple entre mille : prendre les Parisiens, emmener leurs ralement azuki, poudre de thé vert, et végétaux : jamais de graisse animale, les cerisiers en fleurs. papilles dans des voyages inattendus. praliné. Les chefs pâtissiers français pas de produits laitiers ni de gélatine. M. Kurokawa, vous vous souvenez qui me rendent visite au Japon me Aoki : Les wagashi ont encore bien peut-être qu’un jour, vous êtes venu disent tous combien ils aiment l’azuki. Aoki : Une autre caractéristique du d’autres qualités merveilleuses, voire me rendre visite à Paris et, qu’ayant wagashi est qu’il est souvent cuit à surprenantes, propres à captiver le goûté mes macarons au thé vert, nous la vapeur. monde. Leurs parfums et couleurs avons évoqué le fait que la poudre Le yokan pourrait-il un jour Les choux à la crème français, qui se font discrets, avec une tendance de thé vert n’est jamais un ingrédient détrôner le chocolat ? se composent d’une coque creuse dans le camaïeu pastel hautement de wagashi. Votre explication m’avait Kurokawa : 33 ans ont passé depuis fourrée de crême pâtissière, peuvent artistique. Comparez cela aux pâ- semblé frappée au coin du bon sens— l’ouverture de notre première bou- s’apparenter aux pâtisseries japo- tisseries françaises dont les nuances c’est parce que, traditionnellement, les tique parisienne en 1980. Gelée yokan traditionnelle au sucre brun Thé vert matcha, sésame noir, framboise, (en haut), et yokan de style occidental par- naises comme le monaka1, le manju2 proclament haut et fort le contenu. wagashi sont servis avec du thé fait La gelée yokan6 est un élément thé vert torréfié, macaron au chocolat… fumé à la poire (en bas). Deux exemples et le daifuku3 qui, de même, compor- Quoi qu’on en dise, personnellement, de poudre de thé vert, durant la céré- phare de notre ligne de produits au Quelques échantillons des saveurs nou- pour illustrer combien la pâtisserie TORAYA velles que le chef pâtissier Aoki Sadaharu ne cesse d’innover, tout en restant fidèle tent une croûte extérieure de pâte je trouve que le wagashi satisfait plus monie du thé. Japon et nous espérons bien arriver crée en mariant ingrédients japonais aux anciennes traditions. fourrée, dans leur cas, de an4. La complètement les sens. à séduire les Parisiens aussi. De fait, et occidentaux. 4 niponica 5
A gauche : Aoki occupé aux finitions de son gâteau Bambou au thé vert matcha. Ci-dessous : Ses éclairs exceptionnels, à la riche saveur et dont les couleurs soulignent les parfums. A partir du haut : fruits aci- dulés, vanille, chocolat noisette. elle commence à connaître une cer- base d’algues), enfin se rapprocher lorsqu’il fut importé pour la première taine popularité. Le yokan se présente du marron glacé. fois en Espagne au cours du XVIe sous forme de bloc, sa couleur est fon- Le yokan a souvent plus le goût de siècle. Mais une fois sucré, il a connu cée, et l’on ne peut deviner son goût sucre que d’azuki. Et le palais euro- la popularité mondiale que l’on sait. par son seul aspect. Quoi qu’il en soit, péen apprécie généralement assez peu J’aimerais bien mener le yokan vers nous avons commencé à lui ajouter la texture de l’agar-agar. un succès similaire. des parfums correspondant davantage aux goûts européens, comme cas- Kurokawa : Vous avez raison de dire Partageons nos secrets et sis, menthe, poire ou encore pomme que les Français ne sont pas encore cuite. Nous avons ensuite donné des férus de yokan, mais les Asiatiques offrons au monde entier les couleurs plus attrayantes à ce yokan en revanche y prennent goût. Chinois, douceurs japonaises nouveau style, et nous l’avons pré- Coréens et habitants d’Asie du Sud- Aoki : Les mains des Japonais sont senté en bouchées. Est connaissent bien l’azuki mitonné, agiles et minutieuses : pensez à l’ori- ingrédient majeur du yokan. En outre, gami ou aux simples baguettes ! Nos Aoki : Je ne suis pas fan de yokan comme sa texture rappelle celle des goûts aussi sont délicats ; les Japonais non plus, pour être honnête ! Pour dattes7 qui sont consommées cou- ont en général des attentes élevées en attirer les papilles européennes, vous ramment au Moyen-Orient, il est fort matière de raffinement. La cuisine ja- devrez sans doute le modifier davan- possible que ces populations se met- ponaise, comme le wagashi, est toute tage : texture plus agréable avec une tent aussi au yokan. en subtilité, tandis que gastronomie pâte de fèves plus ferme voire gru- Mais quand on y pense, les gens et confiserie européennes soulignent meleuse, éviter l’agar-agar (gelée à trouvaient le chocolat bien amer souvent plus hardiment les saveurs. Forme rectangulaire et couleurs vives : tels sont les gâteaux du chef pâtissier Aoki Sa- daharu. Premier plan : Bambou, une création à laquelle la poudre de thé vert matcha apporte une touche de raffinement. Ces bonbons chocolat sont aussi colorés qu’une palette d’artiste. Les couleurs du thé vert matcha, du raifort wasabi et de l’agrume yuzu font saliver d’avance. 6 niponica 7
Touzakura (“Fleurs de cerisier dans le loin- tain”) par la Pâtisserie TORAYA. Le nom évoque les cerisiers en fleurs sur le flanc d’une montagne lointaine. La fabrication demande de mélanger de la pâte de fèves, de la farine de riz, de l’eau et du sucre pour faire une pâte qui enveloppe une pâte de fèves, que l’on recouvre ensuite d’une autre pâte colorée et affinée. Ce que l’on peut dire, cependant, en Europe comptent souvent dans c’est que les chefs qui apprennent la leur cuisine du personnel venant manière japonaise savent que le raffi- des quatre coins du monde ; mais je nement s’atteint au moyen d’une liste n’ai pas encore vu le moindre étran- Gâteau cru Taori-Zakura formé dans un réduite d’ingrédients. ger trimer dans l’arrière-cuisine des moule de bois. Le nom est synonyme du meilleurs bars à sushi du Japon. désir que l’on a de serrer des pétales de Kurokawa : Un pâtissier ayant atteint Nous devons davantage mettre en cerisier dans sa main pour les emporter chez soi. On les trouve, aux côtés des Tou- le rang de Meilleur Ouvrier de France valeur aux yeux du monde les atouts zakura, uniquement à la saison des m’a un jour donné un conseil qui ré- du Japon, dans l’espoir que nos visi- cerisiers en fleurs. sonna chez moi comme une révélation teurs portent ensuite la bonne parole, personnelle : il faut toujours être prêt une fois rentrés chez eux. Notre gé- à partager ses techniques. Nous autres nération a le devoir d’enseigner au Japonais avons tendance à trans- monde les techniques raffinées qui mettre nos tours de main dans le font notre richesse. secret ; mais c’est par la transparence que nous pourrons progresser plus ef- Kurokawa : Le Japon va accueillir les ficacement sur la scène mondiale. Jeux Olympiques en 2020. Ce serait pas mal, comme vous l’avez suggéré, Aoki : C’est vrai, les gens des autres de proposer aux visiteurs venus pour pays ont tendance à être plus di- les Jeux des pâtisseries japonaises 1 rects, à moins garder pour eux ce qui transcendent les frontières entre Monaka : Garniture an placée entre deux fines coques de pâte mochi cuite. qu’ils savent. friandises occidentales et wagashi. 2 Manju : Pâte à base de farine de froment ou de riz, Peut-être qu’alors on pourrait trou- fourrée de an, et cuite à la vapeur. 3 Daifuku : Boulette molle de pâte mochi fourrée Kurokawa : Je connais une Française ver au Japon ces concoctions dans les de an. 4 qui, au Japon, étudie très sérieuse- boutiques de wagashi comme dans les An : Fèves (généralement azuki) confites dans un sirop, puis réduites en purée. L’azuki est le plus cou- ment pour devenir chef en wagashi. pâtisseries à l’occidentale, voire même rant, mais on trouve aussi haricot rouge, potiron, Elle n’est pas découragée par le fait sur les rayons des supérettes. Ce serait châtaigne, etc. 5 Miso : Pâte fermentée à base de fèves de soja cuites qu’elle ne parle pas un mot de japo- formidable qu’ainsi les gens de tous à la vapeur et additionnées de riz malté et de sel. nais. C’est le genre de personne que pays puissent les goûter et se dire que 6 Yokan : Une sucrerie consistant en un mélange an solidifié en un bloc gélatineux assez long. Une forme j’aiderais avec plaisir. voilà des friandises typiques. M. Aoki, de yokan est produite en cuisant à la vapeur un mé- retroussons-nous les manches ! lange de an et de farine de blé ou d’arrow-root, une Aoki : Les restaurants trois-étoiles autre en faisant bouillir le an avec de l’agar-agar. 7 Dattes: Fruits du palmier dattier. An nouveau style, que l’on peut étaler sur sa tartine, voire faire fondre dans son café. Page d’en face : friandises recréées dans le style ancien, lorsque la Pâtisserie TORAYA était le fournisseur officiel de la Cour im- Gâteau appelé Azuki et Cacao Fondant, périale en 1812. Cette renaissance fut riche et moelleux, que prépare TORAYA inspirée par un livre illustré (en dessous) CAFÉ. Contient du chocolat et de la pâte datant de cette époque. Formes, coloris et d’azuki. saveurs témoignent de la poursuite sans relâche du raffinement le plus parfait. (Photo par Tanai Fumio) 8 niponica 9
Friandises japonaises savoureuses, drôles et mignonnes ! La mascotte de la préfecture de Kumamoto est l’ours Kuma-mon. L’emballage mignon orné d’un ours (kuma en japonais) dissi- Le chapeau du champignon est fait de chocolat, le pied de bis- cuit. (Kinoko no Yama, par Meiji Co., Ltd.) Cette “fleur” présente une saveur rustique, à base de farine de fro- ment et de sarrasin. La variété est infinie, depuis les douceurs traditionnelles mule des bouchées au chocolat. particulières à chaque région jusqu’aux bonbons favoris des (Ikinari Dango, par Tirol-Choco Co., Ltd.) enfants. Les friandises japonaises réjouissent le palais, le regard, et peut-être même les émotions ? Photos par Takahashi Hitomi, Tanai Fumio Ce biscuit en forme de koala Mignons monaka en forme d’ob- cache une surprise – du chocolat jets artisanaux. (Kaga Hachiman bien sûr! (Koala no March, par Okiagari Monaka, par Kanazawa Lotte Co., Ltd.) Urata) Confiserie évoquant les fleurs de Petits biscuits croquants en glycine. (Toudango, par Kiyome forme de créatures marines. (Ot- Mochi Sohonke) totto, par Morinaga & Co., Ltd.) Boulettes dango à base de farine de riz et d’ar- moise, nappées de pâte de haricot rouge. (Kusa Dango, par Chimoto) A partir du haut : Bonbons konpeito, faits de sucre cristallisé autour d’un cœur de granulés ; Un chocolat qui se prend pour okoshi faits de riz ou autres grains liés ensemble par la confiserie ; bonbons kiri-ame, issus Une pousse de bambou tout une capsule spatiale. (Apollo, par d’un bâton découpé—à chaque coupe, le visage ou le kanji sont identiques. (Kintaro Ame, juste sortie de terre ? Mais non, Meiji Co., Ltd.) Kaiun Eto Ame, et Suehiro Kotobuki Ame, par Kintaro-ame Honten) c’est un biscuit recouvert de chocolat. (Takenoko no Sato, par Meiji Co., Ltd.) Les friandises sont avant tout un plaisir, et c’est pourquoi et la couleur. toutes les formes que l’on rencontre autour du monde atti- Charmantes et réconfortantes—deux mots pour qualifier rent l’œil. Cependant, il est bien possible que les sucreries les boulettes dango, souvent présentées par deux sur une japonaises comptent parmi les plus mignonnes, gratifiant petite brochette. Pour les préparer, il faut pétrir la farine le regard sous de multiples aspects. de riz, la façonner, puis la cuire à la vapeur. L’accompa- La présentation visuelle est centrale en cuisine japonaise. gnement est généralement soit une pâte de fèves, soit une Découpe artistique des ingrédients, mise en place minu- sauce à base de sauce de soja. Les dango existent depuis tieuse, élégance de la vaisselle... Tout doit concourir à la des siècles, qu’il s’agisse d’en faire l’offrande lors de cé- beauté de la table et cet esprit existe aussi dans les frian- rémonies bouddhiques, ou de les servir lors de festivités. dises. Concoctions crues ou séchées, façonnées en œuvres Depuis les temps médiévaux l’on peut les acquérir chez des d’art proches de la nature animale ou végétale—tout cela marchands postés le long des antiques voies de poste, ou les Bonbon à la fraise au cœur de Friandise traditionnelle de la Du rouge, du blanc, des fronces ne se présente plus, mais même les sucreries les plus ba- déguster dans les maisons de thé sises dans l’enceinte sacrée lait croquant. (Ichigo Miruku, par préfecture de Yamagata en et des vagues : la tarte aux nales font preuve d’une certaine élégance dans la forme des sanctuaires. Piquées sur leur brochette de bambou, les Sakuma Confectionery Co., Ltd.) forme de tête de renard, à base fraises est le gâteau favori des de farine de haricot rouge. (Kit- Japonais. sune Men, par Umezu Kashi-ten) 10 niponica 11
dango sont un en-cas de choix, et de nos jours nombreux et au moment du Nouvel An constitue en outre, dit-on, un Monaka en forme de maillets et de ballots de riz, contenant des bonbons représentant par exemple sont les promeneurs qui s’en sustentent en route. genre d’horoscope. une daurade (un poisson de fête) ou de mignonnes Les monaka, dont la forme se décline presque à l’infini Les biscuits de riz senbei se composent de farine de blé ou figurines d’argile. On se les arrache au moment du Nouvel An, car on dit qu’ils portent bonheur. pour représenter à peu près n’importe quel objet imagi- de riz, pétrie, finement étalée puis grillée. Ils se prêtent très (Futtoku Senbei, par Moroe-ya Confectionery) nable, se composent d’un cœur de pâte de fèves pris en bien à représenter tel paysage naturel ou telle spécialité lo- sandwich entre deux fins biscuits grillés de mochi. On en cale. Avez-vous repéré le mont Fuji en senbei sur ces pages? trouve partout dans le pays. A Kanazawa, dans la préfecture Il est désormais classé sur la liste du Patrimoine Mondial. d’Ishikawa, ils constituent une douceur traditionnelle des On ne peut oublier, bien sûr, tous les bonbons aux cou- jours de fête, mais à la place de la garniture de fèves clas- leurs vives. Les bonbons japonais sont un plaisir tant sique s’y dissimule un petit bonbon ou une menue figurine visuel que gustatif, dont les plus célèbres sont sans doute d’argile. Cela ajoute un peu de suspense à la dégustation ces bandes de confiserie multicolore roulées ensemble Senbei représentant les quatre saisons du Mont Fuji : poudre de thé vert matcha (printemps), poivre noir (été), poivre rouge (au- tomne), sucre (hiver). Tous ont le parfum de la sauce de soja qui les nappe. (Assortiment Fuji-san, par Sen-ya) sous forme de bâton, que l’on coupe ensuite en tranches Douceurs façonnées en créatures marines drôlatiques, pour révéler un héros populaire enfantin ou un caractère “champignons” dont le chapeau est fait de chocolat, gâ- kanji, toujours identique sur chaque tranche. Ces bonbons teaux ornés d’une dentelle de décoration... Visions oniriques kiri-ame font depuis le XVIIIe siècle la joie des enfants fré- et fantaisies les plus échevelées prennent vie dans les frian- quentant les foires et les festivals. De nos jours, leur aspect dises depuis les temps les plus reculés, pour le plaisir intact artisanal a un côté réconfortant que les bonbons industriels des petits comme des grands. ne sauraient procurer. Leur popularité ne se dément pas, dès qu’il s’agit de faire un petit cadeau. 12 niponica 13
Confiseries dans la culture Kanzaki Noritake Kanzaki est un expert en folklore, directeur de l’Institut pour la Culture du voyage, pro- fesseur invité à l’Université d’agriculture de Tokyo, et spécialiste au service du du cadeau Conseil aux Affaires culturelles de l’Agence gouvernementale des Affaires culturelles. Il est l’auteur de Souvenirs : Cadeau et voyage dans la culture japonaise, et de L’étiquette dans la culture du Japon. Du mariage à la tombe, et lors de toutes les fêtes, l’on offre des présents, mais au Japon tout est prétexte à offrande : changement de saison, souvenirs de voyage, gratitude, accueil, demande de pardon, création d’obligation, voire échange de bons procédés. Les friandises constituent depuis longtemps un cadeau apprécié pour célébrer les occasions spéciales de la vie. Commentaire : Kanzaki Noritake Photos par Takahashi Hitomi Partager des souvenirs de Tout cela remonte au faisaient souvent cadeau de sucre. Au Et ainsi, durant de nombreuses années, début de l’ère moderne, l’on importait le sucre demeura de l’ordre du doux voyage partage du mochi pas mal de sucre suite aux échanges rêve pour le commun des Japonais. Les gens de l’époque prirent aussi Si l’on remonte le temps pour trou- avec les Hollandais, mais pas de quoi Il fallut attendre le XVIIe siècle pour l’habitude d’aller en pèlerinage, en ver l’origine de l’usage d’offrir des en faire un produit culinaire répandu. que débute la production du sucre au particulier aux sanctuaires d’Ise et friandises, il faut parler des gâteaux de Konpira. Ils en rapportaient des de riz mochi. Produits du pilonnage souvenirs, dont les plus populaires, du riz collant étuvé, les mochi étaient étant donné que les frivolités su- un élément essentiel des festivals cé- crées constituaient habituellement un lébrant une récolte abondante et luxe inaccessible, étaient le hi-gashi s’offraient couramment lors des funé- (confiserie sèche durcie au sucre) et le railles et des cérémonies en l’honneur shoga-to (jus de gingembre mitonné des ancêtres. Une fois les formalités dans un sirop jusqu’à durcir). Il ne terminées, le mochi était partagé entre fallut pas longtemps pour trouver les personnes présentes pour commu- une clientèle pour les manju (gâ- nier et renforcer les relations entre teaux de farine de riz fourrés de pâte les vivants. de haricot sucrée) marqués sur le des- Le mochi enrobé d’une pâte de fèves sus au fer chaud de calligraphie ou sucrée (bota-mochi ou o-hagi) est tou- d’une illustration. Ces manju, hémis- jours consommé de nos jours durant phères satinés marqués d’un symbole, les festivals bouddhiques higan qui constituaient un medium si pratique ont lieu à l’époque des équinoxes de qu’ils existent encore de nos jours, printemps et d’automne, lorsque l’on qu’il s’agisse de rappeler un souvenir rend visite aux tombes familiales et spécial ou tout bonnement de faire que l’on fait des offrandes aux es- de la pub. Le Japon est sans doute prits des ancêtres. Cette coutume unique dans la variété des friandises devint aussi l’occasion de manger et desserts, décorés d’illustrations ou du mochi de concert, en particulier d’écriture. dans les communautés rurales, dont Les gâteaux manju fourrés de pâte sucrée de haricot se prêtent facilement à l’écriture de messages simples. Premier plan : Les caractères kanji identiques se lisent kotobuki (“Félicitations !”). Second les membres consacraient temps et plan : Manju marqués du nom de l’établissement et du symbole pour les sources chaudes ♨. L’emballage laisse parler les efforts à fabriquer de leurs mains quantités de bota-mochi pour offrir sentiments aux membres de leurs familles, leurs Japon, au début de l’ère d’Edo (1603- la coutume en une affaire grandiose Lorsque l’on offre formellement une voisins, et toute personne en lien avec 1867), période de paix et de prospérité. durant laquelle les seigneurs daimyo friandise, l’étiquette exige un embal- eux. Cette coutume a pour ainsi dire À cette époque, la consommation de renouvelaient leur allégeance au Sho- lage qui exprime la raison de ce don, disparu de nos jours, mais il y a en- thé se démocratisa et, avec lui, appa- gun, tandis que les douceurs étaient selon qu’il s’agisse de célébration ou core 20 ou 30 ans, elle était encore rurent petit à petit des friandises de libéralement distribuées. de condoléance. Cela se traduit par le suffisamment répandue pour qu’ait mochi et autres douceurs, dont beau- Il ne fallut pas longtemps pour choix du papier d’emballage, avec un encore du sens le dicton “Higan no coup existent encore de nos jours que les daimyo à leur tour se met- ornement noshi pour l’élégance et une bota-mochi—ittari kitari” (“Le bota- comme friandises traditionnelles. tent à organiser leurs propres rituels ficelle mizuhiki pour attacher le tout. mochi du higan, ça va ça vient”). Les seigneurs féodaux daimyo se et à rivaliser entre eux à coups de ca- L’origine du noshi vient de l’offrande rendaient à Edo, la capitale politique, deaux de bienvenue, pour lesquels les d’une bande de chair d’ormeau séchée Une douceur, le meilleur des pour assister à la cérémonie du kajo confiseries s’avéraient tout aussi ac- lors des cérémonies religieuses, tandis dans une grande salle d’apparat du ceptables que tonneaux de saké ou que les mizuhiki sont de fines cor- présents Château d’Edo, et se faisaient réga- rouleaux de soieries. Faire un présent delettes de papier japonais entortillé. Pas de sucreries sans sucre. Lorsque ler de sucreries offertes par le Shogun à un supérieur résultait automati- C’est ainsi que l’emballage formel le sucre atteignit les rivages japonais en personne. Cette cérémonie remon- quement en la réception d’un cadeau d’une friandise est plus qu’une cou- en provenance de Chine au début du tait au temps où les membres de la en retour, ce qui créa un cycle pour verture—il exprime les sentiments du VIIIe siècle, l’on allait jusqu’à lui prê- Cour impériale, de concert avec les ainsi dire infini d’échanges et donna donateur. L’art du cadeau développé ter des propriétés médicinales, ce qui Une boîte de friandises enveloppée de papier blanc, avec gens du peuple, offraient des sucreries naissance à un commerce particu- par les Japonais est indissociable en faisait une denrée d’autant plus re- un ornement noshi (en haut à droite de la boîte) et la aux dieux le 16 juin pour repousser lier—négocier les cadeaux inutiles d’une sensibilité subtile qui fait sans cherchée. Les classes supérieures se ficelle mizuhiki rouge et blanche. Les extrémités du le mauvais sort. Le shogunat modifia au daimyo. doute partie intégrante de leur culture. nœud spécial kaeshi musubi finissent au même endroit pour porter chance et succès. 14 niponica 15
Beauté et tradition au cœur de l’emballage Paniers, poteries, papier japonais— des friandises japonaises l’artisanat de l’emballage Feuilles de sasa, bambou, pelures de fruits, caissettes de bois, papier japonais… De tels La valeur artistique de ces récipients vous donnera envie de matériaux naturels composent des emballages traditionnels qui réjouissent l’œil et les conserver bien après que le contenu a été dégusté. font anticiper les délices qu’ils contiennent. Minuscule commode recouverte de pa- Photos par Kawakami Naomi pier chiyo-gami chatoyant. Chaque tiroir dissimule quelque douceur colorée, faite d’un type différent de sucre. (Chiyo Tansu, par Shioyoshi Ken) Emballages naturels L’écorce de bambou et les feuilles de sasa sont un emballage traditionnel pour conserver les produits ali- mentaires et leur seule vue est un peu la garantie des délices à venir. L’écorce du bambou enveloppe solide- ment les gâteaux mochi qu’elle contient. Le sucre brun apporte une douceur lé- Les feuilles de sasa ont des propriétés antimi- gère, et les noix de cajou tout leur crobiennes. Elles enveloppent ici des chimaki, croquant. (Yakumo Mochi, par Chimoto) produits par une échoppe dont le riche héritage remonte au XVIe siècle. Deux types différents sont présentés ici : le blanc contient seulement de l’arrow-root, de l’eau et du sucre, tandis que le rouge comporte en plus de la pâte de haricot rouge. Tous deux sont tout à fait délicieux et frais, pénétrés qu’ils sont par la saveur des feuilles de sasa. (Chimaki, par Kawabata Doki) Boîte de bois remplie à ras bord de petits Cette boîte de papier orné d’une bonbons de cinq couleurs. La farine de luxuriante branche de pin contient riz est mélangée à du miel, façonnée en des gâteaux, composés d’amidon boules, cuite, puis recouverte de cou- d’arrow-root kuzu pétri de l’agrume leurs correspondant chacune à un yuzu. Les branches et les aiguilles parfum : abricot ume, agrume yuzu, gin- de pin sont le symbole traditionnel gembre, sésame ou cannelle. (Tama de la joie. (Yuzu no Kuzu-yaki, par Orihime, par Matsu-ya Tobe’e) Murasaki no Wakuden) Secouez ce flacon de céramique en forme de gourde pour en faire sortir une poignée de petites étoiles sucrées Menus monaka en forme de grelot, joli- konpeito (sucreries rondes à surface ment alignés dans leur minuscule panier Le jus du yuzu (un agrume japonais) est pointée). (Furidashi, par Murasaki no fait de bambou tressé. Le croustillant de mélangé à de l’agar-agar (gélose d'al- Wakuden) la croûte grillée de mochi se marie dé- gues marines) et mis à solidifier dans licieusement à la douceur de la pâte de son écorce. Un délice hivernal parfumé. fèves. (Suzu no Monaka, par Suzukake) (Yu-kogori, par Murasaki no Wakuden) Les minuscules grains sucrés du wasan- bonto fondent presque instantanément sur la langue. Ils se présentent envelop- pés dans un fin papier de soie japonais. Cette gelée mizu-yokan, contenant Le petit point écarlate au sommet purée de fèves, sucre et agar-agar est évoque la bouche d’une danseuse maiko. durcie au froid. L’on atteint sa douceur (O-choma, par Kagizen Yoshifusa) rafraîchissante en la faisant glisser hors du tube de bambou. (Chikuro, par Ponto- cho Suruga-ya) Cette friandise exclusivement estivale consiste en un agar-agar sucré mis à durcir dans des coques de palourdes, avec un haricot parfumé de miso, pris au milieu de Confiseries molles en forme de plantes chaque. Présentées dans un panier de de saison. Le motif chatoyant du cou- bambou tressé sur un lit d’aiguilles de vercle de papier varie aussi de manière cyprès japonais, ces douceurs sont aussi saisonnière. Sur la photo, un assorti- un coup de fraîcheur pour l’œil. (Hama- ment automnal. (Han-Nama-Gashi, zuto, par Kame-ya Norikatsu) par Nagato) 16 niponica 17
Croquez dans l’une de ces tuiles Fabrication du yatsuhashi mou, rectangulaires et laissez vos papilles fourré de pâte de fèves. Tester la prochaine recette s’épanouir dans la cannelle et la dou- du siècle ceur. Ces gaufrettes fines et brunes, Loin de se reposer sur leurs lauriers, qui contiennent uniquement farine de les fabricants de yatsuhashi veillè- riz, sucre et cannelle, sont fabriquées rent à conserver leur avantage en ne et vendues sous le nom de yatsu- cessant d’innover, sans pour autant hashi en tant que symbole de la ville sacrifier la saveur traditionnelle. Leur de Kyoto, une destination touristique ligne de yatsuhashi inclut mainte- de renommée mondiale. nant des versions molles en forme de Les théories abondent quant aux fleurs (couleurs vives à l’avenant) et origines du yatsuhashi, mais la lé- Facade de la maison-mère d’une des friandises comportant des ingré- fameuse pâtisserie en activité de- gende la plus convaincante parle puis plus de 320 ans. Le toujours populaire dients nouveaux, comme le caramel. d’un moine aveugle du XVIIe siècle du yatsuhashi dans sa version molle, Les compagnies communiquent avec fourré de haricot rouge. Devant : style Hijiri parfumé de cannelle. nom de Yatsuhashi Kengyo. Il com- Derrière : style Hijiri Matcha parfumé de poudre de thé vert. la jeunesse, en particulier les jeunes posait de la musique pour le koto, un Kyotoïtes qui n’ont pas tant goûté de antique instrument à cordes, dont il Farine de riz, sucre et nikki (can- yatsuhashi dans leur enfance ; ils tes- jouait dans le style Sokyoku. L’on dit nelle) : ce sont les trois choses tent de nouvelles recettes, capables de que la forme des biscuits est semblable à la surface incurvée du koto, en guise de commémoration pour le musicien. De la tradition nécessaires à la fabrication tradi- tionnelle des biscuits yatsuhashi. Kyoto, destination touristique par résister aux 100 prochaines années. Kyoto s’enracine dans des siècles de fière tradition qui sert de tremplin à Bien plus tard, puisqu’il fallut at- tendre le début du XXe siècle, les yatsuhashi furent la première frian- à un nouveau excellence, est bien connue pour ses friandises traditionnelles, mais son esprit aventureux et tourné vers l’avenir. Les friandises, qui sont partie intégrante de la culture de la ville, n’y dise vendue sur un quai de gare au Japon : cela se passait à la station Shichijo (la gare de Kyoto actuelle). monde de les fabricants de yatsuhashi ont aussi à cœur de développer des saveurs et des formes en phase font pas exception. L’événement fit grand bruit et, depuis lors, les yatsuhashi s’enlèvent comme des petits pains. douceurs Photos par Takahashi Hitomi avec leur époque, repoussant les frontières du délicieux. Collaboration: Shogo-in Yatsuhashi Sohonten Le prestige de la tradition inspire l’innovation Les amateurs de souvenirs sont tous Le nom de Yatsuhashi Kengyo fans de yatsuhashi, mais une autre évoque un lien fort avec les confi- Leurs formes et leurs saveurs varient, mais series éponymes. C’était un maître tous sont de véritables yatsuhashi fourrés. En friandise, dans le style mou cette fois, de l’instrument de musique ap- partant du haut : Hijiri Kurogoma (sésame a également un pedigree fort respec- pelé koto (visible dans le coin noir) ; Hijiri Chocolat ; Hijiri Ichigo (fraise). droit en bas). L’on dit, selon la table, bien que, par le passé, n’étant tradition, qu’après sa mort, en Nestlé produit une barre KitKat pas de longue garde, elle était connue hommage à sa contribution à la dont le chocolat blanc parfumé de musique de koto, les pâtissiers surtout localement. Il s’agit du yatsu- créèrent ces friandises dont la Bâtonnets de Cannelle (fine pâte cannelle est parsemé de miettes de yatsuhashi, roulée puis cuite) croquantes de yatsuhashi (par Nestlé hashi dit nama (ce qui veut dire cru). forme rappelle l’instrument. Japan Ltd.). C’est à partir d’une sugestion émise lors d’une cérémonie de thé au cours des années 1960 que les fabricants de yatsuhashi les plus en vue se mi- rent à fabriquer ce nouveau produit : un yatsuhashi enveloppant une pâte de fèves. Ces friandises triangulaires avec leur cœur de pâte de fèves sucrée connurent vite une grande popularité et prirent une place importante dans l’industrie du souvenir de Kyoto. Plus tard, les producteurs commen- cèrent à varier leur offre, proposant le yatsuhashi mou fourré de diverses garnitures et saveurs, et le yatsu- hashi cuit saupoudré de sucre, voire La toute dernière création de yat- de chocolat. Il en résulta une impor- suhashi moelleux est mignonne tante demande auprès de toutes les et colorée. La boutique qui les vend (à gauche) boutiques et stands de souvenirs à se présente sous l’aspect d’une pâ- travers la ville. tisserie occidentale. (Nom de l’éta- blissement : nikiniki) Biscuits yatsuhashi cuits. L’alliance des saveurs de la pâte de riz sucrée, des parfums de la cannelle et de leur texture croustillante fait tout leur charme. 18 niponica 19
Bonbons et chocolats impeccablement alignés. Les produits nouveaux et les plus populaires sont disposés à hauteur des yeux, tandis que sucreries ou bonbons-surprises pour les enfants sont placés plus bas. C’est la règle de base de la mise en rayons des friandises dans les supérettes. Les supérettes sont le paradis de la friandise Depuis les produits habituels jusqu’aux dernières nouveautés Ce n’est pas facile pour un produit nouveau de s’assu- rer une place dans un rayon de supérette. Des systèmes de gestion informatisés permettent de restocker rapidement Il serait bien difficile d’imaginer la vie au Japon sans les supérettes (“conbini,” de Toujours disponibles, y compris dans les quartiers rési- un produit populaire, tandis que les produits moins perfor- l’anglais convenient store). Les conbini sont ouverts jour et nuit, sont dentiels dépourvus de tout autre forme de commerce, partie mants disparaissent sans délai. À peine 20% des friandises omniprésents et proposent une infinie variété de produits roboratifs, intégrante de la vie japonaise... Oh certes, l’on trouve des sont des produits de base, tout le reste change ; dans cer- incluant bien évidemment en-cas et autres confiseries. en-cas et des douceurs partout dans le pays, mais la sé- taines chaînes, entre 20 et 30 produits disparaissent chaque lection offerte par les conbini bat tout le monde à plates semaine, incessamment remplacés par d’autres. Photos par Natori Kazuhisa Collaboration : sociétés MINISTOP Co., Ltd. et Lawson, Inc. coutures, puisqu’elle occupe souvent presque la moitié des gondoles de la boutique moyenne. Les douceurs et les sucreries peuvent se classer en trois Aussi bon, mais bien moins cher que chez catégories : produits de base, éditions spéciales, et nouveau- le pâtissier tés. Dans la catégorie de base se trouvent par exemple les Ces dernières années, la ligne de desserts réfrigérés chips et le chocolat, des valeurs sûres connues de tous— “Conbini sweets” a connu une grande popularité. Leur parfois depuis plusieurs générations. Les éditions spéciales qualité n’a pour ainsi dire rien à envier aux meilleures ne se trouvent qu’à certaines époques ou dans certains en- pâtisseries, mais ils sont comparativement bon marché. droits. Elles sont souvent saisonnières ou correspondent à Tout le monde ne parlait que de “Conbini sweets” en des spécialités locales. 2009. Leur image joua d’abord sur le luxe, avec des prix Les supérettes sont une part incontournable de la vie quotidienne japonaise. L'on y trouve une grande variété d'en-cas et de friandises, depuis les simples paquets de chips jusqu'à des pâtisseries qui ne dépareraient pas un éta- blissement spécialisé. 20 niponica 21
La ligne “Conbini sweets” fait fureur de nos jours. Pas étonnant : leur saveur ne laisse rien à désirer. Mettre la main à la pâte pour savourer l’expérience des friandises japonaises Pourquoi ne pas rendre votre visite du Japon un peu plus excitante en apprenant à fabriquer certaines frian- dises typiques ? C’est possible en rendant visite à certaines boutiques bien établies ou des endroits populaires. S’essayer à fabriquer des confiseries à la main Vous auriez sans doute du mal à fabriquer des wagashi sans un minimum d’instructions. Heureusement, il existe à Kyoto nombre d’établissements respectés ayant chacun leur propre culture du wagashi, et de plus en plus nombreux sont les gens, jeunes femmes en particulier, désireux d’essayer cet art traditionnel. Photos par Takahashi Hitomi Collaboration : Kanshundo Rouler en boule la pâte de fèves, puis la juste un peu plus élevés que le produit de base d’une su- recouvrir d'une autre pâte colorée, ma- laxée, affinée : Arriver à un joli résultat pérette. Ils connurent le succès en modifiant la perception est plus difficile que ça n'en a l'air. du dessert de conbini, passant de “pas cher, et pas mal pour le prix” à “pas trop cher, et délicieux”. Certaines chaînes de supérettes se sont associées avec 1 des experts en recherche culinaire et des chefs pâtissiers pour concocter des produits propres à attirer l’attention et proposer des saveurs novatrices. L’une des raisons du succès des “Conbini sweets”, c’est Ces wagashi aussi jolis qu’appétissants sont modelés pour évoquer la nature d’avoir su attirer des clients au-delà de la clientèle de base. en automne : feuillages colorés, châ- Jusqu’ici, l’écrasante majorité des clients étaient masculins, taignes, kakis bien mûrs. Il ne reste plus qu’à déguster. étant donné que la supérette est ouverte en permanence et propose des repas à emporter (dont bien sûr des boîtes L’établissement Kanshundo, boutique de wagashi établie à Kyoto de- bento). Mais actuellement, il semble que toute la ville se 2 puis près d’un siècle et demi, propose presque chaque jour des cours croise entre les rayons du conbini. Du coup, pour satisfaire pour apprendre à préparer les friandises traditionnelles. Il vous suffit de réserver pour bénéficier à votre tour de cette connaissance. Des les goûts des femmes et des gens plus âgés, les supérettes instructions en anglais, coréen et chinois sont disponibles sur place. optent pour des friandises mettant l’accent sur la qualité Pour en savoir plus, contacter Kanshundo : http://www.kanshundo.co.jp/museum/make/annai.htm plutôt que la quantité (comme c’était le cas auparavant) ; les “Conbini sweets” sont plus petits mais ont meilleur goût. Les femmes font plus attention aux calories, et les conbini Un paradis de friandises se cache sous la Gare de Tokyo mettent en avant les friandises traditionnelles généralement moins sucrées. A part certains produits ultra-populaires tels D’innombrables voyageurs tant venus du Japon que de l’étranger se rendent à Tokyo, et la porte d’entrée de que les choux à la crème, les “Conbini sweets” connais- la ville est bien évidemment la Gare de Tokyo. Dans le sous-sol de la gare se trouve “Tokyo Okashi Land”, un sent, comme les autres friandises, une rotation importante, ensemble de boutiques exposant les créations des plus grands producteurs de friandises. L’on peut y goûter chaque variété faisant son temps entre un et quatre mois des douceurs à peine sorties de l’atelier, et acquérir des produits exclusifs. Ici se trouvent toutes sortes de avant de disparaître pour être remplacée par une autre. 3 snacks favoris des Japonais, tous aussi délicieux les uns que les autres. La supérette modèle l’enthousiasme des Japonais pour Collaboration : Tokyo Station Development Co., Ltd. leurs sucreries. Chaque semaine, des douzaines de nouvelles douceurs et sucreries apparaissent et disparaissent dans les rayons, fragments du défilé incessant des friandises dans le Japon d’aujourd’hui. En gas à gauche : Une autre boutique du sous-sol de la gare, Calbee+, est une succursale de la célèbre marque de 4 friandises CALBEE. Vous pouvez y déguster des chips tout droit sorties de la friteuse. En bas à droite : Les bonbons Hi-Chew présentent une texture proche du chewing-gum, et de temps à autre la boutique Morinaga Candy Shop organise un événement durant lequel les clients peuvent apprendre à modeler leur bonbon en des formes amusantes. 1. Le Premium Roll Cake a lancé le succès des “Conbini sweets”. (Lawson) 2. Ankoya Dora-yaki qui présente La confiserie d'Ezaki Glico s'appelle "Glicoya une texture moelleuse et cache une Kitchen" et vraiment, on ne pourrait l'appeler pâte de fêves sucrée. autrement—elle possède sa propre cuisine d'où (Lawson) sortent des friandises prêtes à déguster sur le 3. Les Cream Shiratama Zenzai Kuri champ. Un produit célèbre : les amandes enro- ne sont autres que des boulettes bées de chocolat, rendues tout à fait divines par dango garnies de pâte de fèves. un généreux saupoudrage de cacao (photo (MINISTOP) de droite). 4. Ankoya O-hagi : Gâteau de riz Pour en savoir plus, contacter Tokyo Okashi Land : http://www.tokyoeki-1bangai.co.jp/street/okashi mochi recouvert de pâte an (Lawson) 5 5. Deluxe Rare Cheese Cake Parfait (MINISTOP) *Certains produits ne sont peut-être plus disponibles. 22 niponica 23
Asakusa et Mukojima Mer du Japon Balade et grignotage dans le Tokyo d’autrefois Osaka Tokyo Photos par Ito Chiharu Plan par Oguro Kenji Asakusa, Mukojima 1 Océan Pacifique Balade au Une dizaine de minutes de marche depuis la gare d'Oshiage vous amène Japon sur le pont Jikken-bashi qui enjambe la rivière Kita Jikken-gawa, point de 3 vue idéal pour admirer le reflet sur l'eau de la tour Tokyo Skytree, dans le style sakasa (à l’envers). Ci-dessus à droite : Cette pâte yokan souligne les sa- veurs de la patate douce. (par Funawa Honten Co., Ltd.) À gauche : Les gâteaux moelleux ningyo-yaki présen- tent des formes variées, comme par exemple une pagode ou un pigeon. (par Kimura-ya Honten) 2 3 4 1. Les foules se pressent au Marché Nakamise. L’allée piétonne est bordé de quelque 90 échoppes. 2. La lanterne suspendue au portail Kaminari-mon pèse pas moins de 700 kg. Elle mesure 3,9 mètres de haut et 3,3 mètres de diamètre. 3. La salle principale du temple Senso-ji est dédiée à Kanzeon Bosatsu, le bodhisattva de la pitié et de la compassion. 4. L’énorme brûle-encens qui trône juste devant la salle principale attire toujours les foules. Selon la tradition, ventiler la fumée en direction de l’organe qui vous tracasse pourrait bien hâter votre guérison. Tokyo Skytree, actuellement la plus haute tour autonome populaires : simples et sans prétention, mais propres à vous du monde, se dresse tout près des quartiers d’Asakusa et combler d’aise. de Mukojima, destinations touristiques s’il en est, rendus Le symbole incontournable du quartier d’Asakusa n’est encore plus populaires depuis l’inauguration de la tour autre que le portail Kaminari-mon, qui garde l’accès au en mai 2012. La rivière Sumida sépare les deux quartiers. temple Senso-ji. Passez la porte et vous voici bientôt au Dans ces environs, l’on peut goûter à la culture gusta- cœur du marché Nakamise, une longue allée bordée de bou- tive des classes populaires de l’ère d’Edo (1603-1867). A tiques menant au temple. L’un des plus anciens quartiers cette époque, la vie politique du Japon se déplaça vers la commerçants du Japon, il déborde d’activité depuis l’ère métropole que l’on appelle Tokyo de nos jours. Les en-cas d’Edo. L’on peut y acquérir nombre d’objets artisanaux, traditionnels tokyoïtes sont un peu le reflet de ces classes de souvenirs, ainsi que diverses friandises et confiseries. 24 niponica 25
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