Partageons nos expertises - RECUEIL DES ACTES 2018 - Association Hospitalière SAINTE ...
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Membres du comité d'organisation : Nadine Angenieux / Directeur des Soins CHSM Le Puy-en-Velay Isabelle Copet / Directrice CHSM Clermont-Ferrand Dr Jean-Yves Giordana / Médecin-Chef CHSM Nice Dr Lionel Gratuze / Psychiatre CHSM Le Puy-en-Velay Frédéric Henry / Directeur des Soins CHSM Nice Julie Mallet / Chargée de mission RH AHSM Laurence Mouyon / Directeur des Soins CHSM Privas Dr Frédéric Pillet / Médecin-Chef CHSM Rodez Dominique Reynaud / Directeur des Soins CHSM Clermont-Ferrand Dr Philippe Seguin / Médecin-Chef CHSM Privas Dominique Snider / Directeur des Soins CHSM Rodez Dr Pascal Vaury / Médecin-Chef CHSM Clermont-Ferrand Dr Jean-Alexandre Lesturgeon Conception : Mathias Gelineau AHSM
REMERCIEMENTS Les actes présentés dans ce recueil, relatent de la richesse des échanges qui ont eu lieu le Mercredi 17 octobre 2018, lors du Colloque Sainte-Marie de Clermont-Ferrand. Plus de 280 professionnels de la psychiatrie et de la santé mentale se sont réunis pour cette journée de « Partage des expertises », donnant la parole aux 88 intervenants (communicants, modérateurs et présidents) des 32 communications au programme. L’Association Hospitalière Sainte-Marie remercie tous ceux et celles qui, par leur engagement, ont permis la bonne tenue de cette journée qui restera, dans son histoire, un témoignage de ses spécificités, réunissant des professionnels de l’ensemble des sites (Alpes-Maritimes, Ardèche-Drôme, Aveyron, Haute-Loire, Puy-de-Dôme), laissant entrevoir la diversité des compétences et des pratiques qu’elle a su développer. Le Colloque Sainte-Marie a mis en évi- dence leur forte mobilisation et celle de leurs partenaires, à agir (s’interroger, créer, développer, évaluer, rencontrer, se former…) pour la personne qui franchit les murs de l’institution, et qui a besoin de soins et d’aide. Merci encore, nous espérons que vous percevrez - ou vous rappellerez - la qualité des échanges de cette journée, à la lecture du présent recueil. Bonne lecture ! Pour toute information : colloque-sainte-marie@ahsm.fr 1
ÉDITO « Souvenons-nous, les résultats du baromètre social de 2015 faisaient apparaître que 75% des professionnels ne connaissaient pas les prises en charge des autres établissements Sainte-Marie, confirmant alors, la nécessité de poursuivre le travail engagé sur la cohésion de l’AHSM, au sein du projet d’entreprise Sainte-Marie 2020. Le colloque Sainte-Marie « Partageons nos expertises », c’est une pierre à la construction de l’édifice groupe, une autre façon de transmettre et de progresser, ensemble, au service de nos usagers. C’est bien ce dont il est question dans ce programme que vous avez construit pour ce premier événement, et nous vous en remercions. Une trentaine de communications (dont quelques pépites) sont proposées par la communauté soignante Sainte-Marie. » Alain Noziglia, Président AHSM Jean-Paul Pernet-Solliet, Directeur Général AHSM « Je suis honoré de présider ce premier Colloque Sainte-Marie. Ce colloque aura pour objectif premier de dresser un panorama des pratiques et surtout des initiatives développées dans les différents établissements. Les communications soumises ont permis au comité d’organisation de concevoir un programme diversifié qui témoigne de la richesse des activités thérapeutiques au sein de l’Association. Nous espérons que la combinaison des thèmes débattus, permettra aux participants de confronter leurs propres expériences et de trouver, dans les présentations un écho à leurs pratiques et à leurs réflexions théoriques. » Dr Jean-Yves Giordana, Président du Colloque Sainte-Marie 2018, Président de la CME du CHSM Nice 2
SOMMAIRE SÉANCE PLÉNIÈRE Comment repérer, mesurer et réduire l’auto-stigmatisation ? Page 5 Dr Jean-Yves Giordana / Médecin-Chef CHSM Nice Expérience du CHSM Le Puy-en-Velay en éducation thérapeutique du patient Dr Nadine Héritier-Branco / Pharmacienne-Chef CHSM Le Puy-en-Velay Page 12 Freins à la prise en charge du public migrant précaire : constats et ébauches de solutions Page 16 Dr Anne-Laure Pontonnier / Psychiatre CHSM Clermont-Ferrand Soins sous contraintes pénales Dr Michel Berger / Psychiatre CHSM Privas Page 19 Don et contre-don Dr André Gassiot / Psychiatre CHSM Rodez Page 23 SESSIONS THÉMATIQUES SESSION THÉMATIQUE 1 Page 28 Du partenariat au réseau : pratiques et perspectives / Privas SESSION THÉMATIQUE 2 Page 32 Le soin différemment / Rodez SESSION THÉMATIQUE 3 Page 37 Organisation institutionnelle / Nice SESSION THÉMATIQUE 4 Page 42 Parcours de soins et Réhabilitation / Clermont-Ferrand SESSION THÉMATIQUE 5 Page 48 Soins et pratiques spécifiques / Le Puy-en-Velay CONCLUSION Page 56 3
SÉANCE PLÉNIÈRE Comment repérer, mesurer et réduire l’auto-stigmatisation ? Dr Jean-Yves Giordana / Médecin-Chef CHSM Nice La stigmatisation des maladies mentales d’une manière gé- par la méconnaissance (voire l’ignorance) d’une situation ou nérale et de la schizophrénie tout particulièrement constitue d’un état, et qui va générer des conduites et des comporte- une difficulté majeure pour la prise en charge (notamment ments de discrimination (ségrégation – exclusion). Il s’agit par précoce) et l’inclusion sociale des patients présentant ce type exemple de toute parole ou action qui viserait à transformer d’affection. le diagnostic d’une maladie, en une « marque » négative pour la personne ayant cette affection. C’est en quelque sorte « un Norman Sartorius, dans son ouvrage « Paradigm’s lost »[1], po- processus d’attribution, à des individus, de caractéristiques qui sait la question : « Est-ce que les maladies mentales sont des ma- les rendent culturellement inacceptables ou jugés inférieurs » ladies comme toutes les autres ? ». (Castillo)[3]. Il s’interrogeait plus précisément sur le statut de maladies 2. Qu’est-ce que la discrimination ? qui génèrent des fantasmes d’imprévisibilité, de violence et de dangerosité. Des maladies qui suscitent la peur des lieux La discrimination est une distinction injuste dans la façon de de soins et des professionnels de santé. Des maladies qui traiter différentes catégories de personnes. Certains indi- amènent à des attitudes de rejet et d’isolement des patients vidus, en raison d’une caractéristique, parmi d’autres, vont et au final l’exclusion sociale des malades. être traités différemment des autres (moins bien ou mieux) dans une situation comparable. Il s’agit de la restriction ou de Si la stigmatisation impacte manifestement les soins apportés l’élargissement des droits de cette personne par rapport aux aux malades psychiques, leur suivi et leur possibilité de réta- autres. blissement, elle entrave également l’amélioration des straté- gies thérapeutiques et les progrès réalisés dans le domaine de 3. Les conséquences de la stigmatisation des personnes la psychiatrie. ayant une schizophrénie entravent manifestement le cours évolutif de la maladie et compromettent les possibilités de ré- La stigmatisation est donc un problème central qui affecte la tablissement et de réinsertion dans la communauté. vie des personnes présentant des troubles psychiques[2] avec En effet, la stigmatisation peut constituer un réel problème en pour conséquence une diminution des chances de guérison et ce qui concerne l’accès au logement, l’accès au travail, l’accès un effet péjoratif sur les soins et sur la qualité de vie. à un réseau amical ou social, l’accès aux soins somatiques[4] etc… L’association canadienne pour la Santé Mentale évoque, pour sa part : « l’obstacle actuel majeur à l’amélioration du traitement Un aspect particulièrement important concerne l’accès aux des maladies mentales » et l’Organisation Mondiale de la Santé soins psychiatriques avec fréquemment un retard ou un refus (OMS) classe ce fait comme l’obstacle le plus important à sur- à une prise en charge précoce avec un délai de psychose non monter dans la communauté et fait de la lutte contre la stig- traitée (DUP) dont la durée aggrave le pronostic fonctionnel matisation le « fondement de la psychiatrie moderne ». Il s’agit de la maladie. Une étude australienne (P. Mc Gorry)[5] montre donc d’un enjeu à plusieurs niveaux : que même là où les services de soins existent et sont acces- sibles, seulement 35% des personnes atteintes de troubles • au niveau sociétal avec l’exclusion de la vie publique et la mentaux vont consulter un professionnel de santé. limitation à la participation à la vie sociale • au niveau interpersonnel avec mise à distance, exclusion Outre les problèmes d’accès aux soins et des délais de recours et ségrégation des personnes qui en sont victimes aux soins, la stigmatisation est également à l’origine de fré- • au niveau de la personne stigmatisée elle-même selon quents arrêts de traitement et d’une manière générale d’une un phénomène d’auto stigmatisation ou stigmatisation faible adhésion au traitement. internalisée. Rappelons que ce phénomène de stigmatisation liée à la ma- 1. Mais qu’est-ce que la stigmatisation ? ladie mentale et à la schizophrénie ne se limite pas au seul malade. Il s’étend à l’ensemble de son environnement, ce que La stigmatisation est un terme complexe qui fait référence à Goffmann qualifie de «courtesy stigma ».[6] un concept multidimensionnel. Il est soutendu par une atti- tude générale de l’ordre de l’injustice et du préjudice, induite Le jugement péjoratif va toucher sa famille avec des notions 5
(longtemps avalisées par les professionnels de santé) de tion générale révèle des opinions concernant prioritaire- « mère de psychotique », de « famille schizophrénogène », de « père ment les notions de violence et de dangerosité absent », etc… • Autres stéréotypes fréquemment rapportés par le grand public au sujet de personnes ayant une schizophrénie : Les professionnels de santé, les établissements spécialisés, l’imprévisibilité, le caractère « hors norme », hors des les médications spécifiques sont également évoqués sur un conventions, hors des règles et des lois et en consé- mode négatif avec pour effet d’entraver le recours à l’assis- quence l’irresponsabilité tance médicale et de renforcer l’isolement et la souffrance • Enfin, on retrouve quelquefois l’idée de personnes ayant des malades. une perception infantile du monde. C’est le stéréotype de benêt, du béta, de l’idiot 4. Quels sont les mécanismes qui conduisent à la stigmati- sation ? Ces représentations sociales sont de nature à générer dans la population générale trois types d’attitudes : Différents travaux et différentes approches ont au final attri- bué à la théorie de « l’étiquetage » un rôle prépondérant dans • En réponse à la violence et à la dangerosité se déve- le développement de stéréotypes, d’attitudes et de compor- loppent la crainte, la peur ainsi que des comportements tement rendant compte de la stigmatisation et de la discri- de mise à l’écart, de ségrégation et d’exclusion mination des personnes ayant une schizophrénie. La théorie • Face à l’imprévisibilité et l’irresponsabilité se mani- de « l’étiquetage » considérée que le fait d’affubler un individu festent l’autoritarisme, les attitudes dirigistes d’une étiquette amène ce dernier à accepter et à intérioriser • Enfin l’infantilisme, l’absence d’autonomie et le caractère cette étiquette et à agir en conséquence. régressif de certains malades appellent à la bienveillance et aux conduites de protection Elle relève également la tendance des membres d’un groupe social à adopter une attitude particulière avec les personnes 5. Les études portant sur la stigmatisation qu’ils perçoivent comme différentes. Les recherches sur la stigmatisation ont d’une part mis en Il convient de considérer ici un véritable processus circulaire évidence le caractère universel de cette problématique. En avec d’une part, un individu qui présente une caractéris- effet les études portant sur la stigmatisation, en Afrique, en tique qui n’obéit pas aux normes du groupe social, mais aussi, Asie du sud-ouest, en Amérique latine, en Europe amènent à d’autre part, un groupe social qui considère que cette caracté- constater qu’il n’y a pas de société ou de culture où les per- ristique se situe au-delà de la norme. sonnes atteintes de maladies mentales sont traitées à légal Cette lecture systémique fait apparaître que le comporte- des autres. ment de l’un influence le comportement de l’autre et rend compte d’un mécanisme d’identification et de la mise en route Les liens étroits entre stigmatisation et représentations so- d’un processus de catégorisation. ciales ont été confirmés par de nombreux travaux. En corollaire à ce mouvement, le groupe social, face à cette Il semble également que la stigmatisation et la discrimination différence insupportable (quelque chose de nous que nous ne des personnes souffrant de troubles psychiques aient existé supporterions pas) va d’une part se protéger de cette intru- de tout temps. sion (par des conduites d’exclusion, de ségrégation, de mise à l’écart) et d’autre part se construire dans cette altérité en 5-1. Qu’est-ce qu’une représentation sociale ? se confirmant dans sa norme (selon un clivage : soi – non soi, nous – eux, normal – fou). Les « idées reçues » concernant les malades psychiques et tout particulièrement les personnes ayant une schizophrénie ap- Dans les années 70, Linck et Wierner feront évoluer cette paraissent extrêmement péjoratives et lourdement pénali- théorie vers une lecture de « l’étiquetage modifié » qui fera in- santes.[8] tervenir un changement de niveau du cognitif à l’émotionnel.[7] L’enquête « Santé Mentale en population générale : image et réa- La perception d’une différence, qui peut résider dans l’habi- lité » menée par le CCOMS aux Comores, à Madagascar, à l’Île tus, la tenue vestimentaire, le comportement, la mimique ou Maurice, en France Métropolitaine, en Algérie, en Grèce, en encore tout effet secondaire d’une médication antipsycho- Mauritanie, en Tunisie, en Italie, a notamment consisté en une tique (tremblement, rigidité, fixité du regard), va générer des recherche socio-anthropologique sur les représentations de représentations, des stéréotypes qui vont mobiliser des réac- « la folie », de « la maladie mentale », de « la dépression » et celles tions émotionnelles à l’origine de comportements spécifiques. des modes d’aides et de soins.[9] D’autre part le rôle majeur des représentations sociales dans l’attitude du groupe social vis-à-vis des malades psychiques et Dans cette enquête, le « fou » est un terme qui recouvre une tout particulièrement des personnes ayant une schizophré- image imprécise d’un individu frappé d’inhumanité (différent nie. de nous – étranger), un individu vivant dans une autre réalité, ne partageant pas les mêmes repères et les mêmes valeurs, De façon schématique on peut considérer qu’il existe trois incompréhensible, imprévisible, incurable et surtout violent types de représentations : et dangereux, capable d’actes abominables. • La très large majorité des enquêtes menées en popula- Pour le « malade mental » le grand public fait part d’une vision 6
plus médicalisée et moins effrayante que celle de la folie (fo- phénomène sur la vie quotidienne des patients. lie médicalisée). La maladie mentale est une pathologie avec tout ce que cela suppose (une causalité, un diagnostic, un trai- 5-4. L’étude INDIGO (international study of discrimination and tement, un possible retour à la santé) et en référence à une stigma outcome – 2009)[11] inaugure une nouvelle voie de re- atteinte du cerveau. cherche. Cette étude concernant exclusivement des patients ayant une schizophrénie avait pour objet de décrire la nature, Dans cette recherche-Action, les représentations sociales de la direction (avantage, désavantage) et la sévérité de la stig- la dépression sont sensiblement différentes. Si le « fou » et le matisation vécue (expérimentée) et de la stigmatisation anti- « malade mental » sont perçus comme « l’autre », « l’étranger », cipée (évitée) rapportées par les patients ainsi que la relation le « dépressif » est considéré comme plus proche de nous. La pouvant exister entre ces deux concepts. dépression est envisagée par le grand public comme la consé- quence d’événements de vie douloureux et consécutive au La stigmatisation y est abordée à partir du vécu même de malheur ambiant. la personne qui en est victime et non plus à partir d’hypo- thèses théoriques ou à partir des représentations des autres 5-2. D’autres études corroborent ces résultats membres de la société. De plus, elle vise à mesurer l’impact du diagnostic et non pas celui du comportement ou des troubles. Les travaux de Crisp et Col[10] menés auprès d’une population Cette étude multicentrique, internationale (impliquant 27 de 1737 individus donnant leur opinion sur les caractéris- pays) coordonnée par G. Thornicroft et supervisée par N. Sar- tiques et dimensions de sept types de troubles (dépression torius a concerné 732 patients (« représentatifs des situations – anxiété – schizophrénie – démence – anorexie / boulimie que rencontrent habituellement les patients ayant une schizo- – alcoolisme – toxicomanie) montrent que le stigmate n’a pas phrénie »). le même impact selon le type de maladie mais surtout qu’il existe un dénominateur commun qui réside dans la percep- L’étude INDIGO met en évidence l’extrême fréquence des si- tion de la différence. tuations de discrimination négative auxquelles sont confron- tés les sujets ayant une schizophrénie notamment dans les Dans cette étude le panel de personnes interviewées quali- domaines suivants (par ordre décroissant) : se faire ou conser- fiait les personnes ayant une schizophrénie de dangereuses ver des amis – les relations avec les proches (famille, voisins) (71.3%), d’imprévisible (77.3%), dans l’incapacité de commu- – pour conserver un emploi – pour trouver un emploi – les re- niquer (58.4%), de personnes différentes des autres (57.9%) lations intimes ou sexuelles.[12] et d’incurables (50.8%). Quelques situations de discrimination positive expérimen- 5-3. La fondation Fondamental a également conduit une enquête tées (vécues) sont également évoquées (dans moins de 10% (juin 2009) pour appréhender le niveau d’acceptation de la des cas). Elles concernent les relations avec la famille et l’ob- maladie par le grand public. Est-ce que les personnes enquê- tention de certains avantages (pension d’invalidité, prise en tées accepteraient de travailler avec une personne atteinte charge financière des soins médicaux). d’autisme, d’une maladie maniaco-dépressive, de schizophré- nie ? Est-ce qu’elles accepteraient que leurs enfants soient Enfin la discrimination anticipée (s’empêcher de rechercher dans la même classe qu’un enfant atteint de ces affections un emploi – s’empêcher de rechercher une relation) est im- psychiques ? Est-ce qu’elles accepteraient de vivre sous le portante et bien plus fréquente que la discrimination réelle- même toit qu’un proche présentant ces troubles ? ment expérimentée dans ces domaines. Les résultats témoignent de la grande réticence des per- De la relation entre discrimination vécue et anticipée, rete- sonnes sondées et surtout d’une attitude de rejet vis-à-vis des nons que la discrimination évitée n’est pas la conséquence de sujets ayant une schizophrénie. la discrimination préalablement vécue. Plus de la moitié des participants à l’étude ont anticipé une discrimination qu’ils Cependant si les études en population générale sont nom- n’avaient jamais réellement expérimentée. breuses et amènent à des résultats homogènes, elles pré- sentent incontestablement certaines limites. Elles sont es- 6. L’auto stigmatisation sentiellement descriptives et elles résident dans l’étude des attitudes que les personnes questionnées penseraient avoir Ainsi l’étude INDIGO met en lumière l’importance de la dis- si elles étaient confrontées à telle ou telle situation. Elles crimination anticipée ou évitée et révèle les conséquences explorent ce que les personnes feraient dans des situations délétères de cette dernière sur la vie quotidienne de cette imaginaires, des situations virtuelles. Par exemple, ce qu’elles personne. Les situations dans lesquelles une personne a été feraient face à un voisin ou un collègue de travail souffrant amenée à se limiter, ou s’empêcher de postuler à un emploi, de schizophrénie ou plus précisément ce qu’elles imaginent de rechercher une relation proche, d’entreprendre une acti- qu’elles feraient dans cette situation. vité importante pour elle ou encore a cherché à dissimuler le diagnostic de sa maladie. Ainsi ces recherches traitant des attitudes ne prennent pas en compte les émotions, les sentiments, le contexte et de ce Cette étude fait apparaître que de très nombreuses personnes fait la stigmatisation n’était pas abordée directement et au fi- (plus de la moitié des patients enquêtés) avaient anticipé une nal ces travaux ne fournissent pas de réponses claires sur la discrimination qu’elles n’avaient jamais expérimentée. Cette façon dont il serait possible de prévenir le rejet social. Ainsi observation conduit à penser que la personne qui reçoit un dia- elle n’apporte que peu de chose sur les conséquences de ce gnostic de maladie schizophrénique partage les mêmes repré- 7
sentations du « malade mental », du « schizophrène » que le grand La recherche menée au travers du programme « SEE ME » public et qu’il a de lui-même l’image que s’en fait la société. (2012) en Ecosse a mis en évidence que l’auto stigmatisa- Il ne s’agit pas de quelqu’un qui blessé par une situation humi- tion se perpétue au travers de sept domaines clés de la vie : liante choisit de ne plus s’exposer (selon l’adage « chat échaudé la société, la communauté, l’utilisation des services actifs, le craint l’eau froide ») mais bien de la réaction d’un individu qui travail, la famille, les particuliers, les professionnels de santé. appartient à un groupe stigmatisé et qui retourne l’attitude Elle engendre la perte d’espoir, de confiance, la faible estime stigmatisante contre lui. de soi, le retrait et l’isolement social, le malaise de divulguer ses problèmes. La personne diagnostiquée « schizophrène » (et bien souvent sa famille) accepte et intériorise les opinions négatives que De nombreux travaux font l’hypothèse que l’échec à réaliser le corps social véhicule aux sujets des individus auxquels elle des buts, le plus souvent, n’est pas dû à la maladie mentale est assimilée, au point de penser qu’elle mérite la façon dont elle-même, mais à ce phénomène d’auto discrimination. Il elle est traitée. Elle s’applique à elle-même les stéréotypes du apparait que l’auto stigmatisation est étroitement articulée malade mental, du schizophrène, elle s’attribue les clichés et à l’importance du vécu de légitimité de la discrimination ex- les préjugés qui sont véhiculés à ce sujet et elle s’exclue elle- périmentée. En effet, la plupart des malades ayant une schi- même de toute participation sociale. zophrénie ressentent la stigmatisation dont ils sont victimes comme légitime. Ils se montrent résignés et oscillent entre L’effondrement de l’estime de soi va l’amener également à une totale acceptation et une relative indifférence. Cepen- être moins enclin à rechercher de l’aide ou à adhérer à un dant certains témoignent d’une contestation et d’une « juste programme de soins. Elle va anticiper et éviter les situations à colère » en raison du préjudice subi. Et le fait de penser que risque de rejet et de discrimination et va ainsi se limiter dans cette discrimination n’a aucune légitimité, semblerait être un ses interactions sociales pour se protéger. En quelque sorte facteur protecteur contre l’auto stigmatisation. cette personne va passer de la situation de « avoir une maladie mentale » à « être un malade mental » et de « avoir une schizo- Les recherches les plus récentes chez les patients schizo- phrénie » à « être un schizophrène ». phrènes et les études sur l’impact de l’auto stigmatisation ont L’association mondiale de psychiatrie distingue ainsi deux établi des liens entre stigmatisation internalisée et capacité types de stigmatisation : la stigmatisation publique et l’auto réduite ou manque de motivation à chercher de l’aide, diminu- stigmatisation ou stigmatisation internalisée. tion des ressources à faire face (« coping with ») et risque accru d’hospitalisation. [16] La stigmatisation publique par des stéréotypes centrés sur des croyances négatives au sujet d’un groupe de personnes Cette hypothèse ouvre alors une voie essentielle au plan de la générant des réactions émotionnelles de l’ordre de la crainte prise en charge et des soins apportés à ces personnes. et de la peur amène à des comportements de mise à distance, d’exclusion et de ségrégation. Ainsi dans son article : « global pattern of experienced and anti- cipated discrimination against people with schizophrénia : a crow L’auto stigmatisation repose sur des croyances négatives sur sect tional survey », Thornicroft et Co[11] postulent que toute soi-même suscitant des sentiments de faible estime de soi et action visant à la réhabilitation psycho-sociale de personne de faible auto efficacité et amène la personne à se limiter elle- ayant une schizophrénie ne peut être bénéfique que si elle est même dans des activités importantes pour elle. accompagnée voire précédée par un travail spécifique orienté vers le renforcement de l’estime de soi. Cette forme particulière de discrimination (auto stigmatisa- Ainsi les programmes de soins établis consistent à encourager tion, self stigma, stigmatisation internalisée, stigmatisation le malade à prendre un rôle actif par rapport à son affection. intériorisée) fait actuellement l’objet de très nombreuses Ce travail thérapeutique spécifique conduit à « l’Empower- études qui chacune en souligne la forte prévalence (Yanos – ment » avec rejet de la stigmatisation vécue comme incorrecte Roe - Lysaker 2011).[13] et non méritée. Rappelons que l’Organisation Mondiale de la Ces travaux montrent l’impact délétère dans de très nom- Santé dans sa définition de « l’Empowerment » fait référence breux domaines mais tout particulièrement dans l’accès au niveau de choix, de décision, d’influence et de contrôle que aux soins, l’adhésion au traitement avec une réduction des les usagers des services de Santé Mentale peuvent exercer chances d’obtenir une rémission et un rétablissement. sur les événements de leur vie. Park (2013)[14] identifie les nombreuses « attitudes dysfonc- Jakovljevic et Co[17] insistent sur des dimensions de personna- tionnelles » en lien avec la stigmatisation internalisée. Il lité avec notamment un niveau élevé d’évitement du danger évoque notamment : l’isolement social, les attitudes de re- (« harm avoidance ») définie comme une dimension reflétant trait et l’inhibition, la perte d’opportunité économique et la le tempérament anxieux et la tendance à la dépressivité. précarité, les difficultés à obtenir un logement et un emploi, la tendance à l’auto-dénigrement associé au vécu de honte L’étude européenne GAMIAN repère trois facteurs de prédic- et de culpabilité, l’attente permanente de la mise à l’écart et tibilité de l’auto stigmatisation en observant : le niveau d’au- du rejet, le sentiment d’infériorité, la faible estime de soi, la tonomisation, le niveau de discrimination perçue et l’intensité perte de confiance et de motivation, la perte d’espoir de gué- des contacts sociaux ou du repli social. L’intervention sur ces rison, la faible auto efficacité et le renoncement à prendre un trois facteurs de prédictibilité serait de nature à réduire l’auto rôle actif dans divers domaines de la vie (« pourquoi essayer ? » stigmatisation. - Corrigan et Rush 2009)[15] en s’enfermant dans son statut de Enfin, Lysaker, Co[18] accorde une place prépondérante à l’an- malade mental. xiété sociale qu’il définit comme une tendance à l’inquiétude 8
et à la préoccupation excessives, un évitement craintif et des La seconde (10 items) évalue la « divulgation » et la réticence symptômes assimilables à la phobie sociale. Cette anxiété so- des personnes à évoquer ouvertement leurs difficultés psy- ciale serait retrouvée chez plus d’un quart des patients schi- chiques en raison de leurs craintes d’être discriminées. La zophrènes soit environ le triple de la population générale. troisième (5 items) explore les aspects potentiellement po- L’anxiété sociale aurait une valeur prédictive sur la stigmati- sitifs de la maladie sur la vie du patient. Cette échelle a été sation, la baisse de l’estime de soi et l’auto stigmatisation. Elle traduite en français et validée par S. Morandi et l’équipe de serait en lien avec un risque suicidaire élevé. Lausanne en suisse (2013)[21]. Cette équipe a par ailleurs pro- posé une version abrégée à 9 items qui conserve la structure Ces données ont encouragé des travaux sur les liens entre de l’échelle originale, renforce les qualités psychométriques stigmatisation intériorisée, insight et dépression chez des de l’instrument et bien entendu réduit le temps de passation. personnes souffrant de schizophrénie[19]. Nous citerons encore l’échelle PDD (Perceived Devaluation and Discrimination Scale). L’insight apparait étroitement corrélé à la compliance au trai- tement et à un meilleur pronostic mais aussi à la dépression. 7-2. La recherche d’instruments permettant de mesurer l’au- Les effets dépressiogènes d’une amélioration de l’insight to-stigmatisation repose sur l’hypothèse que la stigmatisation restent une problématique majeure dans la prise en charge internalisée est associée à des cognitions mal adaptées et des des patients schizophrènes. Ce lien entre insight et dépres- attentes d’échec. Elles sont en lien avec des attitudes dysfonc- sion serait médiatisé par le niveau de stigmatisation interna- tionnelles. A ce jour les échelles d’évaluation de l’auto stig- lisée, mais les résultats des études montrent que la stigma- matisation sont peu nombreuses. Il existe quelques échelles tisation intériorisée est bien plus liée à la dépression que ne d’estime de soi en version française validée. Parmi celles-ci l’est l’insight. Ainsi il convient d’admettre que pour limiter la l’échelle d’estime de soi de Rosenberg.[22] dépression chez les patients schizophrènes, il serait plus utile de faire un travail spécifique pour réduire la stigmatisation L’échelle ISMI (Internalised Stigma of Mental Illuess) déve- intériorisée avant de chercher à développer l’insight. loppée par Ritsher (standford 2003) et traduite en français et validée par Robillard (2007)[23] est une échelle de type Likert Aider ou encourager les personnes à reconnaitre leur maladie à 29 items. Elle compte 5 sous échelles de mesure : le niveau mentale serait donc moins important que de les aider à sur- d’aliénation – les stéréotypes de Caution – la discrimination monter leurs stigmates auto attribués ou publics. perçue - le retrait social et le repli sur soi – la résistance à la stigmatisation. D’autres travaux se penchent sur les liens entre auto stigmati- sation et troubles cognitifs dans la schizophrénie en explorant L’échelle IMS (Identity Management stratégies) développée tout particulièrement le domaine des cognitions sociales et de par Ilic[24] évalue les stratégies d’adaptation (coping) face à la théorie de l’esprit. différentes situations de stigmatisation. 7. Comment mesurer la stigmatisation et l’auto stigmatisa- L’échelle BACE (Barriers to Access to care Evaluation Scale) tion ? développée par Clément et Co[25] est la plus récente des échelles validées. Nous avons souligné l’importance de la littérature ayant trait à la stigmatisation des personnes ayant une maladie mentale Sa traduction en français et sa validation est actuellement en et tout particulièrement des personnes souffrant de schizo- cours[26]. Elle permet d’évaluer spécifiquement les différents phrénie selon le point de vue de la population générale. facteurs qui sont susceptibles de gêner ou de retarder l’accès aux soins. En revanche, beaucoup moins d’études se sont penchées sur la stigmatisation telle qu’elle est vécue et perçue par le pa- Cette échelle permet de mesurer les obstacles structurels, tient lui-même. comportementaux, et liés à la stigmatisation qui empêchent l’accès aux traitements pour un problème de santé mentale. 7-1. Pour l’étude INDIGO, G. Thornicroft et Co ont élaboré une échelle de discrimination : la DISC (Discrimination and Stigma Ces outils visent à mettre à disposition des cliniciens des pos- Scale). sibilités d’évaluation quantifiée de la stigmatisation et de l’au- to stigmatisation. Ils sont de nature à permettre un partage Cette échelle élaborée avec l’ensemble des équipes de re- des connaissances sur l’existence et la sévérité de la stigmati- cherche du réseau INDIGO répondait au besoin de disposer sation vécue et anticipée et de la discrimination. d’un outil de mesure de la discrimination fiable dans le cadre d’une recherche internationale. Avoir des instruments de mesure validés de la stigmatisa- tion intériorisée pourrait encourager les cliniciens à inté- En 2007, King et Co[20] ont développé la « stigma Scale », une grer la réduction de la stigmatisation dans leur programme échelle composée de 28 items, construits sur la base d’entre- de soins et pourrait les amener à faire de la réduction de la tiens avec des usagers des services de psychiatrie (Échelle stigmatisation un objectif de traitement vérifiable en plus de de type Likert allant de 0 « tout à fait d’accord » à 4 « pas du la rémission des symptômes. tout d’accord ». Elle se décompose en trois sous échelles : la première (13 items) concerne la discrimination et se réfère principalement aux réactions négatives auxquelles les pa- tients ont pu être confrontés en raison de leur trouble mental. 9
8. Comment réduire la stigmatisation qui affecte les per- 3. Les campagnes de contact sous forme de rencontres et sonnes ayant une schizophrénie ? d’échanges entre malades et grand public à la recherche d’une meilleure connaissance et d’une plus grande familiarité avec 8-1. L’auto stigmatisation les personnes malades. La stigmatisation internalisée fait depuis quelques années Au final il apparait que, couplée à la dimension éducationnelle, l’objet de différentes recherches sur les modalités d’interven- cette stratégie se révèle le plus efficace moyen de lutte contre tion. Il s’agit de restaurer l’estime de soi, la confiance en soi, la stigmatisation et la discrimination tout en augmentant les d’amener le patient à devenir acteur de ses soins, acteur de attitudes positives envers les personnes malades. sa santé, responsable de ses choix et de ses décisions avec la conviction d’avoir le droit « d’exister », et le droit « d’avoir un avenir ». RÉFÉRENCES A titre d’exemple citons l’étude de KM. Fung (2011)[27] qui a élaboré un programme destiné à diminuer l’auto stigmati- [1] - Sartorius N, Stuart H, Arboleda-Florez J. - “Paradigmes lost” - Fi- sation. Ce programme a été construit à partir de données ghting stigma and lessons learned ” - Oxford – University press issues de la psychoéducation, des thérapies cognitives et motivationnelles, de l’entraînement aux habilités sociales, de [2] - Giordana J.-Y. - “Lutter contre la stigmatisation : un enjeu majeur en santé mentale” - Soins psychiatrie N°275 juillet aout 2011 p14-18 la réalisation d’objectifs. 66 patients souffrant de schizophré- nie avec auto stigmatisation ont été inclus et randomisés en [3] - Castillo M.-C., Lannoy V,, Seznec J.-C. et al - “ Etude des repré- deux groupes et ont fait l’objet de 6 évaluations. Le groupe de sentations sociales de la schizophrénie dans la population générale et patients ayant suivi le programme intégré montre à 6 mois, dans une population de patients schizophrènes” - Evolution psychia- comparativement au groupe contrôle, une diminution des trique 2008 ; 73(4) : 615-28 troubles de l’estime de soi, une augmentation de l’envie de changer ses comportements, une augmentation de l’adhésion [4] - Giordana J.-Y. : “ Stigmatisation et auto-stigmatisation des pa- au traitement. tients atteints de pathologies psychiatriques comme obstacles aux soins somatiques ” - Pratiques en santé mentale 2013 N°2 41-44 8-2. La stigmatisation publique [5] - McGorry P.-D. - “ Is early intervention in the major psychiatric disorder justified ? Yes” - BMJ - 2005 ; 337 : a695 Trois grands types de campagnes ont pu ainsi être développés : [6] - Goffmann E. - “ Stigmate “- Paris : Edition Minuit, 1963 (1975 1. Les campagnes de protestation : pour la traduction française). Elles visent à surveiller la nature des messages diffusés au [7] - Link B., Phelan J.-C. - “ Conceptualizing stigma ” - Annu Rev Sociol 2001 ;27 : 363- 85 grand public et à stopper ceux porteurs d’une forte charge discriminante. Instances de contrôle médiatique, elles ont [8] - Kohl F.-S. - “ Les représentations de la schizophrénie ” – Congrès pour objectif de rompre avec les comportements de rejet et de psychiatrie et de neurologie de langue française – éd. Masson d’exclusion 2006 - 146p 2. Les campagnes de sensibilisation et d’éducation à la santé : [9] - Roelandt J.-L., Caria. A., Defremont L., et al. - “ Représentations sociales du “ fou ”, du “ malade mental ” et du “ dépressif en population Elles empruntent différents registres de communication. Par- générale en France ” - Encéphale 2010 ; 3 (suppl1) :7-13 mi celles-ci citons : [10] - Crisp A.-H., Gelder M.-G., Rix S., et al., “Stigmatisation of people with mental illness” - Br J psychiatry, n° 177, 2000, p.4–7 • Les campagnes de solidarité : qui proposent un change- ment de regard et de comportement en sollicitant une at- [11] - Thornicroft G., Brohan E., Rose D., Sartorius N., Morven L., for titude solidaire avec les personnes souffrant de troubles the Indigo study group - “Global pattern of experienced and antici- psychiques (sur le modèle du « Téléthon » et du « Sidaction »). pated discrimination against people with schizophrenia : a cross–se- • Les campagnes de révélation et de diffusion des solu- tionnal survey” - www.thelancet.com janvier 2009. tions : qui consistent à informer le grand public sur les [12] - Daumerie N., Vasseur-Bacle S., Giordana J.-Y., Bourdais-Man- réponses médicales, leur pertinence, leur efficacité, leur none C., Caria A., Roelandt J.-L. - “ La discrimination vécue par les accessibilité et montrer que, comme pour les autres ma- personnes ayant reçu un diagnostic de troubles shizophréniques. ladies, il existe des traitements et des moyens de soula- Premiers résultats français de l’étude INDIGO” - L’Encéphale 2012 ; ger la souffrance. 38 : 224-31 • Les campagnes de témoignages qui amènent des per- sonnes confrontées à la maladie à s’exprimer au grand [13] - Yanos P.-T., Roe D., Lysaker P.-H. - “ Narrative enhancement and jour et à adresser un message d’encouragement, un mes- cognitive therapy: a new group-based treatment for internalized stig- sage positif à ceux qui seraient dans la même situation. ma among persons with severe mental illness” - International Journal of Group Psychotherapy 61 : 577–595, 2011 CrossRef, Medline • Les campagnes de pédagogie qui présentent l’intérêt d’informer le grand public au sujet de différents aspects [14] - Park S.-G., Bennett M.-E., Blachard J.-J. - “ Internationalized stig- insuffisamment connus de la maladie (les différentes ma in schizophrénia : relations with dysfunctional attitudes, symp- affections – la prévalence des troubles – les facteurs de toms and quality of life ” - Psychiatry Res. 2013 jan 30 ; 205(1-2) risque etc…) 10
[15] – Corrigan P.-W. – Larson J.-E. – Rush N. – “ Self stigma and the “why try” effect : impact on life goals and evidence – based practices – World psychiatry 2009 ; 8.75-85 [16] - Margetic B.-A., Jakovljevic M., Ivanec D., Margetic B.,Tosic G. - “ Relations of internalized stigma with temperament and character in patients with schizophrenia ” - Com Psychiatry. 2012 nov-dec, 51(6): 603-6 [17] - Brohan E., Elgie R., Sartorius N., Thornicroft G., GAMIAN-Eu- rope Study Group - “ Self stigma, empowerment and perceived discri- mination among people with schizophtrenia in14 European contries: the GAMIAN–Europe study” - Schizophr Res 2011 ; 122:232-8. [18] - Lysaker P.-H., Tsai J., Yanos P., et al. - “ Associations of multiple domains of self-esteem with four dimensions of stigma in schizophre- nia ” - Schizophrenia Research 98 ; 194–200, 2008 CrossRef, Medline [19] - Bouvet C., Bouchoux A. - “ Etudes des liens entre stigmatisation intériorisé, l’insight et la dépression chez des personnes souffrant de schizophrénie ” - Encéphale 2014 ; 07.006 [20] - King M., Dinos S., Shaw J. et al - “ the stigma scale : development of a standardises measure of the stigma of mental illness ” - Br J Psy- chiatry 2007 190 248-54 [21] - Morandi S., Gibellini Manetti S., Zimmermann G., Favrod J. et al - “ Mesurer la stigmatisation perçue chez les personnes souffrant de troubles psychiques” - traduction française, validation et adaptation de la Stigma Scale - Encéphale 2013 .03.002 [22] - Vallieres E.-F., Vallerand R.-J. - Traduction et validation cana- dienne-française de l’échelle d’estime de soi de Rosenberg. Int J Psy- chol 1990 ; 25:305-16 [23] – Ritsher J.-B., Phelan J.-C. “ Internalized stigma predicts erosion of morale among psychiatric outpatients “ - Psychiatry Res 2004 ; 129 : 257 - 65 [24] - Ilic M. - “Protecting self-esteem from stigma : a test of different strategies for coping with the stigma of mental illness ” - International journal of Social Psychiatry 58(3) 246-257 [25] - Clement S. , Brohan E., Jeffrey D. et al - “Development and psy- chometric properties the Barriers to Access to Care Evaluation scale (BACE) related to people with mental ill health” - BMC psychiatry 2012 12 36-47 [26] - Giordana J.-Y., Boggero M., Caci H., Tasset S., Bedira N. - “ Valida- tion française de l’échelle BACE– “Baniers to Acces Care Evaluation ” - Méthodologie et résultats préliminaires. 15ème congrès de l’en- céphale janvier 2017 [27] - Fung K.-M.-T., Tzang H.-W.-H., Corrigan P.-W. et al. “ Mesuring self-stigma of mental illness in china and its implications for recovery ” Int J Soc Psychiatry. 2007,53(5) : 408-418 Giordana J.-Y. “La stigmatisation en psychiatrie et en santé mentale” – Congrès de psychiatrie et de neurologie de langue française – Else- vier Masson 2010 – 241p 11
SÉANCE PLÉNIÈRE Expérience du CHSM Le Puy-en-Velay en éducation thérapeutique du patient Dr Nadine Héritier-Branco / Pharmacienne-Chef Hélène Le Boucher / Diététicienne CHSM Le Puy-en-Velay Durant la plénière, nous avons présenté l’éducation thérapeu- chute, diminuer le taux de ré-hospitalisation, préve- tique du patient (ETP) à travers la théorie et notre expérience nir le risque suicidaire, améliorer ses aspects fonction- au Centre Hospitalier Sainte-Marie Le Puy-en-Velay. nels (instinctuels, sociaux, cognitifs…) et de 2e intention : réduire la culpabilité et le sentiment de stigmatisation, aug- Dans la 1re partie, nous avons traité des généralités sur l’ETP : menter l’estime de soi et le bien-être, contribuer à la gestion C’est quoi ? Pourquoi ? Comment ? du stress, améliorer les comorbidités. Nous avons tout d’abord situé l’ETP dans la prévention ter- Nous avons détaillé les 3 pôles constituant l’ETP : tiaire par rapport aux 4 préventions existantes : • PÉDAGOGIQUE : éducation et information nuancées sur la nature de la maladie et ses conséquences pour le pa- tient et les membres de sa famille • PSYCHOLOGIQUE : soutien émotionnel (fardeau, re- noncement, deuil), acceptation de la maladie par le pa- tient et ses proches • COMPORTEMENTAL : enseigne les façons de gérer la maladie et le stress, apprend à avoir recours à des straté- gies de modifications du comportement Nous avons ensuite positionné l’ETP en psychiatrie dans la réhabilitation comme une intervention de réhabilitation, une Nous avons défini l’ETP comme à la fois un apprentissage démarche personnelle faisant partie du rétablissement. pratique spécialisé pour l’acquisition de compétences et une aide au changement de comportement de soin pour at- Le rétablissement que nous avons défini comme un chemine- teindre des objectifs personnalisés. ment personnel, pour se réapproprier sa vie et se réinsérer Nous avons donné son objectif : optimiser le traitement mé- dans la société, n’impliquant pas qu’il n’y ait plus de symp- dicamenteux, prévenir les récidives et diminuer le nombre et tômes persistants. Le rétablissement d’une maladie non la durée des hospitalisations, améliorer la qualité de vie du curable : c’est apprendre à vivre avec, c’est se rétablir de la sujet, dans toutes ses dimensions (personnelle, familiale, pro- catastrophe psychologique qu’est la maladie, retrouver un es- fessionnelle, relationnelle), favoriser, entretenir et consolider poir, différencier sa personne de sa maladie, c’est être capable l’alliance thérapeutique et avons décrit les 4 étapes de la dé- de gérer sa santé, son traitement, faire ses propres choix de marche : vie et prendre des risques mesurés. Nous avons situé l’ETP en psychiatrie et les actions de réha- bilitation selon les caractéristiques du rétablissement comme un processus subjectif du positionnement du sujet par rapport à sa maladie par Andresen en fonction des 5 stades de réta- blissement (Favrod, 2012) : stades établis par l’échelle STORI. Nous avons présenté les acteurs (professionnels de santé for- més à l’ETP, constituant un groupe pluridisciplinaire), techniques (communication centrée sur le patient : entretien motivationnel ....écoute active / pédagogiques : résolution de problèmes, jeux de rôles, exercices pratiques, témoignages documentaires, ...) et outils (affiches, bandes audio ou vidéo, ...) de l’ETP. Nous avons défini les objectifs spécifiques de l’ETP en psychiatrie, communément appelée psychoéducation, de 1re intention : améliorer l’observance, prévenir la re- 12
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