Pompéi, une image mythique 62 par un fort tremblement de terre avant d'être complètement ensevelie par une pluie - AMOPA 44

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Pompéi, une image mythique 62 par un fort tremblement de terre avant d'être complètement ensevelie par une pluie - AMOPA 44
AMOPA 44

L      es Pouilles, une destination un peu énigmatique pour la plupart des
       40 participants au voyage de l’Amopa44 du 6 au 13 septembre 2018. Comme un
       livre d’images, feuilletons en les pages pour découvrir cette terre qui décore « le
talon de la botte italienne ».

Dès la sortie de l’aéroport, on aperçoit le Vésuve, avec son cratère conique tronqué, qui
a explosé la nuit du 24 août 79, haute de 980 m alors qu’elle culminait à plus de
2 000 m !

Pompéi, une image mythique
Située à 16 km du Vésuve, la prospère Pompéi avec ses 15 000 habitants fut secouée en
62 par un fort tremblement de terre avant d’être complètement ensevelie par une pluie
de cendres et de lapilli en 79. Rayée de la carte, la ville ne se releva pas de ses ruines et
la zone fut abandonnée, elle fut retrouvée par hasard au XVIe et des fouilles furent
entreprises au XXVIIIe. Deux mille ans plus tard, la cité romaine n’en finit pas de nous
émerveiller et de livrer de nouveaux secrets comme récemment la demeure des
dauphins. Reculons donc dans le temps pour découvrir cette ville fondée par les Osques
4s av JC et habitée par les Etrusques. Pompéi est un livre à lui seul et il aurait fallu plus
de temps pour arpenter les vestiges si bien conservés de cette cité florissante.

Ah, qu’il est bon s’asseoir sur les gradins en calcaire du petit théâtre Odéon, autrefois
couvert, et imaginer un spectacle de mimes entrecoupés de poèmes. Puis assis comme
des personnalités dans les tribunes en marbre du grand théâtre non couvert, nous avons
l’impression d’entendre les clameurs des 5 000 spectateurs. En déambulant dans ces
rues bien tracées avec égouts, trottoirs et passages surélevés pour piétons, on y voit
encore les marques des roues des charrettes. On essaie d’y déchiffrer les enseignes, les
inscriptions gravées ou peintes qui racontent l’histoire et les mœurs des habitants. En
arpentant la principale artère, celle de l’Abondance, avec ses boutiques aux larges
portes coulissantes surmontées d’un étage, nous nous sommes accoudés à un des
comptoirs du « Mac Do » de l’époque, où étaient maintenues nourriture et boissons
chaudes dans les vasques et amphores, une boutique ouverte sur deux côtés montrant
ainsi l’affluence des clients A vrai dire sous la chaleur italienne, nous rêvions plutôt de
glaces ou de boissons fraîches ! La fraîcheur goûtons y un peu dans les thermes, qu’ils
soient déclinés au féminin ou au masculin, ils offraient des bains chauds, avec plancher
chauffant, double paroi, des bains tièdes et de frigidariums, ces bains froids nous
auraient alors bien tentés ! Bien sûr, d’autres images défilent devant nos yeux comme le
temple d’Apollon, la basilique, le forum et, pour assouvir la curiosité de certains, le
lupanar, une des 25 maisons de prostitution avec ses petits tableaux aux scènes
érotiques. Puis jetons un regard nostalgique sur ces moulages en plâtre qui ont permis
de fixer les attitudes des habitants surpris par cette pluie de cendres. Un regret toutefois,
celui de n’avoir pas pu accéder à la villa des Mystères, une merveille à elle seule.

Le soir, à l’heure où les méditerranéens vivent, nous avons découvert la ville grouillante
de Naples où vespas et voitures se « frottent » et se disputent les voies de circulation.
Naples, la plus grande ville du sud de l’Italie avec 3 millions d’habitants, est aussi la
capitale des pâtes de semoule de blé dur, alors que plus au Nord de l’Italie elles sont
fabriquées avec du blé tendre. «On a même cru qu’elles n’étaient pas assez cuites ». La

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Pompéi, une image mythique 62 par un fort tremblement de terre avant d'être complètement ensevelie par une pluie - AMOPA 44
cuisine napolitaine est synonyme de pizza dont la Marguarita, aux couleurs italiennes,
avec basilic, mozzarella et tomates, créée pour la venue de la reine Marguerite.

Naples, une image sulfureuse
A l’image du Vésuve, ce volcan majestueux qui domine sa magnifique baie en forme de
croissant, Naples a souvent dégagé une identité éruptive et turbulente. Son passé
sulfureux fait de Naples une insoumise ! La troisième ville d’Italie est en perpétuel
mouvement et tout son décor semble être pris par cette frénésie indomptable. Les Grecs,
les Normands, mais aussi les Espagnols et les Bourbons y ont laissé des traces. La
présence de châteaux, palais, églises, et on en compte plus de 500, démontrent que la
cité bouillonne d'un passé culturel chargé. Au cours de 2 800 d’histoire, les peuples ont
tour à tour construit Néapolis ou Neopolis « la ville nouvelle », une ville romantique,
une ville-musée dans un théâtre à ciel ouvert ! Ce n’est donc pas un hasard si le vieux
centre a été classé au patrimoine mondial par l'Unesco en 1995. Aucune autre ville en
Europe n’a réussi à traverser les vicissitudes des siècles tout en maintenant sa
personnalité, en sauvant son âme. Bouillonnante, active, humaine, Naples nous a offert
de belles tranches de vie, de belles images !

Avant de prendre le pouls de la belle insoumise, allons l’admirer d’une des 4 collines
aux parois abruptes ! De Posillipo, quartier résidentiel élégant, prisé des artistes et du
président, admirons cette vue panoramique sur la côte napolitaine étincelante de lumière
avec au fond le Vésuve. « La colline de la Chartreuse est dédiée à Saint-Martin,
protecteur des infidèles, il aurait donc fallu la monter à pied pour voir si les hommes
portaient leurs femmes, signe d’infidélité ! Dixit notre guide napolitaine

Naples, c’est un théâtre baroque où se télescopent les continents et les époques.
Allons donc à la découverte du Quartier Monumental avec une image lumineuse,
celle de la Galerie Umberto. Construite après les épidémies de choléra à la fin du
XIXe et la destruction des ruelles et tripots, c’est un symbole d’art nouveau. Avec ses
puissantes colonnes, ses statues et ses mosaïques, l’intérieur présente un élégant
décor néo-renaissance et sa grande verrière illumine l'ensemble. La galerie a toujours
eu un grand succès grâce à son organisation spatiale qui mêle boutiques, habitations,
affaires, cafés et vie publique.

Admirons en passant le théâtre San Carlo. Commandé en 1737, par Charles de
Bourbon, il est accolé au Palais Royal avec un passage secret pour les souverains.
La façade, avec son élégante colonnade et ses bas-reliefs, a été largement remaniée
au début du XIXe, pour correspondre au goût néoclassique de l'époque. Ce temple du
bel canto, dirigé un temps par Rossini, et où les meilleurs chanteurs s'y produisent, à
l'instar des célèbres castrats, est une référence européenne artistique. Le public
napolitain, en tenue de soirée, s'y presse les soirs de représentation et y affiche un
caractère exigeant et conservateur.

Sur la « Piazza del Plebiscito », admirons le « Palazzo Reale », construit sur un plan
carré au XVIe et sa belle façade extérieure où se nichent les statues des plus grands
dirigeants de Naples comme Charles 1 er d’Anjou et Charles Quint

Qu’il est bon de s’imprégner de l’atmosphère napolitaine, en dégustant en terrasse le
« Vésuve en baba au rhum » avec un fameux café Salento, cet « expressino freddo »
avec du lait d’amande et des glaçons !

Les origines antiques du centre historique de Naples sont encore visibles dans le
plan d'ensemble du quartier, organisé en damier autour des trois axes principaux de
l'ancienne Neapolis. En arpentant la Spaccanapoli, qui fend le centre historique en
deux, on découvre la ville la plus mystérieuse d’Europe, à la fois turbulente et
lumineuse, prospère et démunie, opportuniste et mystique. C’est dans cette artère

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Pompéi, une image mythique 62 par un fort tremblement de terre avant d'être complètement ensevelie par une pluie - AMOPA 44
aussi que s’épanouit l’univers des crèches où se mêlent sacré et profane. Naples est
le paradis des crèches, la représentation de la Nativité se perpétue depuis des
siècles, les artisans répandent l’amour de l’art et de la culture par le biais de leurs
créations, avec théâtralité et richesse de détails.

Dans le vieux Naples, l’histoire de la chapelle Sansevero est entourée de mystères.
Le duc di Sangro la fit construire après une guérison miraculeuse au XVIe. Féru de
sciences, ce franc-maçon voulait étonner la population. Cet édifice de style baroque
est célèbre pour ses sculptures dont la plus connue est l’œuvre de Sanmartino, le
fameux Christ voilé en marbre blanc, remarquable par sa finesse et son réalisme. La
crypte abrite les machines anatomiques dont deux squelettes logés dans des vitrines
et d’étranges statues celle de la chasteté ou encore celle du désenchantement qui
représente un homme se débattant dans un filet de pêche comme le passage de la
mort à l’après !

L'église du Gesù Nuovo se dresse à l'emplacement de l'ancien palais de la famille
Sanseverino, puissants princes de Salerne au XVe, qui s'opposèrent au 16 ème siècle au
pouvoir espagnol. Confisqué par le gouvernement espagnol puis vendu aux Jésuites
en 1584, ce palais était d'une rare beauté architecturale avec une façade de pierres
volcaniques en pointes de diamant. Elle fut légèrement modifiée en y ménageant
trois ouvertures face à chacune des trois nefs de l'église. A l'opposé de cette sobre
façade, l'intérieur du Gesù Nuovo est d'une exubérance baroque remarquable :
marbres polychromes, sculptures, fresques, peintures recouvrent l'église du sol au
plafond, dominé par une monumentale coupole et sur le mur, la gigantesque fresque
de Francesco Solimena représente Héliodore chassé du temple.A côté, la basilique
San Chiara, mais dommage, nous n’étions pas invités au joli mariage !

Puis certains sont partis visiter le Musée archéologique pour se délecter d'art et
d'architecture dont des objets antiques issus de la collection Farnese et des fouilles
réalisées sur les sites de Pompéi et Herculanum. D’autres se sont délectés d’une
glace avant d’aller faire un plongeon dans les abysses de 20 000 lieues sous les mers
en prenant le métro pour admirer les stations converties en œuvres d’art comme celle
de Tolédo créée sur le thème de l’eau et de la lumière.

Mais ne quittons pas Naples sans saluer un chef d’œuvre nazairien amarré dans le
port « the Symphony of the Sea » et sans évoquer deux châteaux, celui Castel
dell'Ovo, le château de l’œuf est entouré de mystères et de légendes. Il émerge des
fondations grecques sur un rocher dans la mer et est lié à la figure supposée magique
du poète latin Virgile qui aurait caché un œuf placé à l’intérieur d’une carafe, de
l’avenir de l’œuf dépendait celui de la forteresse. « Ambrogino Visconti emprisonné
dans les geôles du château aurait dans sa fuite cassé l'œuf, mais Naples est toujours
là ! »

Quant au Castel Nuovo, placé dans un secteur stratégique entre le centre historique
et la mer, il fut construit par Charles Ier d'Anjou à la fin du XIIIe et devint le siège du
pouvoir et la plus grande résidence royale fortifiée du XVe. On observe aujourd'hui
les puissantes tours crénelées de l'époque et leur base escarpée, taillée pour rendre
impossible tout assaut. C’est un lieu où histoire et légende s’entremêlent, les chargeant
encore plus d’un voile de mystère et de curiosité, comme celle du crocodile, « il y avait
dans un fossé un crocodile qui aurait été amené d'Egypte à Naples, par la reine Jeanne
II, mariée à Jacques de Bourbon. Elle donnait ses amants à manger au crocodile pour
que son mari ne puisse pas les découvrir. »

En quittant Naples vers le sud est, nous ouvrons vraiment le livre de la Pouille ou des
Pouilles, cette terre ancienne au cœur de la Méditerranée, « comme un grand salon
entouré de montagnes », est une terre de charme et d’âmes anciennes, celle qui a vu se
succéder tant de civilisations, comme les Summites, ce peuple de bergers, les grecs…
tous y ont laissé leurs empreintes. Isperia, ce pays du soir, situé entre les Apennins et le
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Vésuve, est une terre sismique qui bouge toujours. Terre à moustiques et à gibiers,
réserve fruitière de l’Italie, réputée pour ses parfums d’agrumes, les fameuses notes
d’Espéride. Avec ses canyons et ses profondes vallées, cette région est souvent choisie
pour les tournages dits « western spaghetti ». Sur cette langue de sable asséché qui se
prolonge dans la mer, les anciens ont préféré se retirer loin des côtes et y ont construit à
300 ou 400 m d’altitude pour surveiller et mieux respirer. Cette grande plaine des
Pouilles est traversée par l’autoroute dite des « tomates », sa terre rougeâtre y est très
fertile, on y voit des champs d’éoliennes et une mer d’oliviers. Certains de ces arbres
noueux plus que millénaires crèvent en raison d’une bactérie importée avec des plantes
exotiques. Les olives pour la consommation sont récoltées de novembre à janvier, puis
en mars, ce sont les olives pour le savon, pendant longtemps l’huile a servi pour
éclairer les capitales d’Europe avec une lumière claire et sans fumée. Le Moyen Age
représente l’apogée de la vie culturelle et civile des Pouilles, des fortifications, des
monuments, des palais et châteaux et toute une série de cathédrales y furent bâties car
les croisés s’y faisaient bénir.

Castel del Monte, une image lumineuse
La vision d’une couronne de pierres blondes perchée en pleine nature est presque
irréelle. Construite vers1240, cette résidence de chasse de Frédéric II montre un
équilibre parfait. Féru de sciences et connu pour l’éclectisme de sa culture, le souverain
de Sicile a transmis à son château tout le mystère qui entourait son image. Il est connu
pour sa forme octogonale unique et pour les influences astronomiques qu’il évoque.
La rigueur de sa planimétrie adopte le 8 comme ligne directrice et sa position a été
étudiée afin de créer des symétries de lumière les jours de solstice et d’équinoxe. Tous
ces symboles passionnent les experts depuis des siècles et pour nous visiteurs, c’est une
image énigmatique. L'intérieur a sans doute été majestueux, avec ses salles
trapézoïdales disposées de façon à former un octogone, ses hautes voûtes, apparaît
désormais privé des décorations. Marbres et mosaïques ont disparu à cause d'une longue
période de négligence et de vandalisme. Les deux étages intérieurs communiquent avec
les tours à travers des escaliers en colimaçon qui montent dans le sens inverse des
aiguilles d'une montre. Les façades en pierre calcaire et quartz montrent la solidité
interrompue par quelques fenêtres. L'entrée en brèche coralline, mélange d’argile et de
chaux, est en forme d'arc de triomphe qui encadre un arc en ogive, "une sorte de
prélude à la Renaissance" tout comme l'installation hydraulique des services
hygiéniques, d'origine orientale. Malgré sa beauté et son prestige, le château devenu
prison a été longtemps abandonné et pillé. Castel del Monte, chef d'œuvre de l'histoire
d'Italie, mérite pleinement l'appellation de "patrimoine de l'humanité » Ce château est le
dernier maillon des 7 châteaux de Frédéric II, à mi-chemin entre la mer et la basilique
au milieu de la voie arienne. Quittons ce magnifique château devenu rose en fin d’après
midi, un vrai régal pour les yeux !

Locorondonto, une image circulaire
La page suivante s’ouvre sur un des villages les plus pittoresques des Pouilles. Il est
juché sur une colline, cernée par une étendue verdoyante, un patchwork de champs,
vignobles et oliveraies parsemé de trulli. En arrivant, la première image dominicale est
celle d’un des symboles de l’Italie du XXe, un alignement de fiats 500 multicolores
étincelantes sous le soleil matinal. La partie historique de la ville est construite sur un
plan tout en rondeur, d’où son nom. Quel moment paisible cette balade dans un dédale
de petites ruelles bordées de maisons blanchies à la chaux et serrées les unes contre les
autres; de bâtiments historiques, certains humbles et délavés, d'autres avec des arches et
des détails architecturaux plus grandioses ! Et un petit détour dans l’église du XVIIe
dédiée à Saint-Georges et aux peintures de la chapelle st Nicolas. C'est une bourgade
agréable et soignée, avec des pots de fleurs ornant escaliers et balcons, quelques anciens
pieds de vigne sortent même des murs !

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Castellane, une image souterraine
Connues pour leur aspect insolite et spectaculaire, utilisées dès l’Antiquité, les grottes
ne sont redécouvertes qu’en 1938 par Franco Anelli. C’est l’espace souterrain le plus
vaste et le plus monumental de l’Italie, on y accède par un gouffre immense de 60 m de
haut d’où s’élèvent de grandes stalagmites. Un couloir conduit aux différentes grottes
avec des formes fantastiques de stalactites aux couleurs variant de l’ocre au rouge ou au
blanc. La visite plus longue que prévue nous fit arriver en retard au restaurant. Aussi, en
attendant les plats nous nous sommes mêlés aux danses des autres convives fêtant
baptême et anniversaire, moment délicieux où on a pu apprécier l’ambiance chaleureuse
des italiens.

Alberobello, une image conique
Alberobello, c’est une champignonnière géante avec de petites maisons typiques au toit
conique ! Edifiés avec des pierres sèches ramassées dans les champs, les trulli ont
hérité d’une technique de construction préhistorique. Les pierres, coupées
grossièrement, sont empilées à sec, sans mortier pour les tenir mais constituent des
structures résistantes, quand il pleut l’eau coule en bas dans un réservoir. Les toits
coniques sont réalisés en pierres plus fines superposées de façon concentrique et fermés
par un monolithe au sommet. Au XVIe, afin d’éviter le paiement de l’impôt sur les
habitations fixes, les habitants démontaient les toits pour les remonter après le passage
des collecteurs d’impôts du roi de Naples. Classé au patrimoine mondial de l’Unesco,
ce village est d’une étonnante beauté avec un ensemble unique de mille trulli blanchis à
la chaux qui confère à l'ensemble un aspect homogène et lumineux.

Au retour, arrêt bienvenu chez le producteur de vins Collucci San Martino à Martina
Franca. Ses vignes sont cultivées sur des terres calcaires et argileuses et les vins sont
conservés dans des réservoirs peints avec une peinture réfléchissante pour éviter de
« cuire » les arômes. A présent, les différentes phases de travail sont toutes automatisées
avec l’utilisation d’une machine par tâche. Avant, il fallait employer 30 personnes et
maintenant 3 suffisent pour sortir 3 000 boîtes de 3 bouteilles en une heure, pour les
vendanges, 9 à 10 personnes sont nécessaires et deux seulement pour l’entretien des
vignes. Chacun a pu déguster les vins parfumés et plus alcoolisés qu’en France. L’Italie
est le 1er producteur de vins.

Ostuni, une image toute blanche
Ostuni du haut Salento est un mirage de lumière et de pierre calcaire ! La reine blanche
est la seule de la vallée d’Itria à avoir un débouché sur la mer Adriatique. La ville
perchée sur trois collines occupe une position panoramique. Toutes les maisons sont
blanchies à la chaux jusqu’au toit, sauf les bâtiments sacrés pour les identifier et les
distinguer. Cet usage attesté depuis le Moyen âge est favorisé par la profusion du
calcaire, il protège de la grande chaleur et accroît la luminosité dans l’exigüité des
ruelles. Coutume qui a joué un rôle important au XVIIe car la chaux a empêché la peste
de se propager. Cette pratique a été relancée afin qu’Ostuni reste digne de son
qualificatif de « ville blanche ». Le centre historique est construit comme des cercles
concentriques avec au centre la cathédrale. Sa façade en gothique flamboyant est
divisée en trois plans avec une alternance de courbes concaves et convexes, la partie
centrale se termine par un pignon en accolade alors que les pans latéraux sont surmontés
d’un arc rampant. Au centre une grande rosace où trône le Christ. Tout près, l’église
Saint-Vit avec sa façade curviligne fastueuse et sa corniche mouvementée, de style
baroque leccese, en pierre « gentille » car facile à travailler. Un coup d’œil à l’église St
François d’Assise et ses belles cariatides en marbre de Calabre. La colonne de Saint
Oronce de 20 m de haut est emblématique avec sa décoration baroque exubérante. Les
murailles aragonaises encore visibles sont renforcées de tours circulaires. A Ostuni
fréquentée il y a déjà 50 000 ans, un tombeau vieux de 24 500 ans a été retrouvé, il
contient le corps d’une jeune femme en train d’accoucher avec au bras un bracelet de
coquilles.
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Continuons la découverte de la région, fière de ses céramiques, de son agriculture et de
ses eaux poissonneuses et de ses magnifiques oliviers séculaires, cette partie ressemble
un peu à notre Provence.

Lecce, une image théâtrale
Et voici la « Florence du Sud », riche en traditions artistiques et culturelles. C’est une
belle image baroque que nous découvrons avec des monuments remarquables et des
façades enrichies de chapiteaux pour donner une perspective théâtrale. Le style de
Lecce est dû à l’utilisation de la pierre calcaire locale qui devient dorée avec le temps.
C’est un musée à ciel ouvert où on entre par des portes monumentales comme celle de
Napoli d’où nous découvrons la place San Oronzo avec au centre la statue éponyme
datant de l’époque romaine, tout comme l’amphithéâtre du 1er siècle, avec ses gradins
assez bas pour favoriser l’acoustique, il pouvait accueillir 15 000 personnes et fut
découvert par hasard en 1939 par un habitant souhaitant agrandir sa cave. Une partie
seulement est visible, le reste demeure enfoui sous les fondations de divers bâtiments.

La place du dôme est une chef d'œuvre de composition monumentale avec la
cathédrale, le campanile, le palais épiscopal et d’autres palais. Cet ensemble témoigne
de la richesse de la cité et de l'originalité du style baroque développé, notamment grâce
à la pierre blonde de Lecce pouvant être aisément travaillée. Elle permet la profusion de
détails et des décors sculptés et confère un aspect léger et lumineux aux édifices. Le
dôme de Lecce est l'une des cathédrales les plus importantes d'Italie par la richesse de
son patrimoine artistique avec son architecture baroque exceptionnelle du XVIIe, son
campanile haut de 70 m. Le palais du Séminaire avec ses propylées est une sorte de
porte monumentale ornée de statues sur 4 étages. Plus loin, la basilique Sainte-Croix,
véritable trésor architectural est l’expression la plus aboutie du baroque Lecce, avec sa
façade très riche, ses balcons et l’abondance de ses chapiteaux, de ses frises qui côtoient
la magnifique rosace montrant, avec sa guirlande de fruits, la circulation de la sérénité,
« c’est comme une force centrifuge qui envoie un message fort aux spectateurs ».
L'intérieur conserve des éléments de la Renaissance mais se distingue par son plafond à
caissons et par la profusion et la finesse de ses autels baroques,

Mais visiter Lecce à l’heure de la sieste ne nous a pas permis d’entrer dans plusieurs
bâtiments dont celui de l’Eglise Santa Chiara avec ses plafonds en papier mâché,
uniques au monde.
Dans cette région du Salento, nous aurions bien entamé une tarentelle dansée autrefois
avec frénésie par les femmes épuisées pendant les vendanges et qui auraient été piquées
par une tarentule…

Tarante, une image fantôme
Un bref passage par Tarante ou Tarente, héritière d’une colonie spartiate, une des cités
très prospère de la Grande Grèce, base navale française au XIXe, la ville doit sa
splendeur à sa position maritime exceptionnelle et à son pôle industriel… mais Tarante
est devenue l’ombre d’elle-même. Les poussières cancérigènes dégagées par les
aciéries se sont déposées sur toutes les surfaces et ont pollué la ville, les 2/3 des
maisons sont fermées. Les opérateurs téléphoniques envoient même des SMS à leurs
abonnés « Attention, vous arrivez à Tarente ! »

Matera, une image biblique
Située dans la région méconnue du Basilicate, c’est une ville creusée et sculptée à la
main dans un paysage spectaculaire de ravins et de grottes troglodytes. Matera est une
des plus anciennes cités du monde après Alep et Jéricho. C’est la Bethléem égarée en
Italie du sud dans un décor pétrifié de façades blanches. Inscrite au patrimoine mondial
de l’Unesco en 1993 et désignée capitale européenne de la culture pour 2019, ce succès
redore le blason du passé peu glorieux des années 1950. C’était un gigantesque

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bidonville où des familles nombreuses s’entassaient au sein de grottes insalubres
affichant une mortalité infantile de 50 % et où le paludisme endémique décimait une
population survivant dans une misère affligeante où les bébés dormaient dans le tiroir
de l’unique commode, où poules, ânes, chèvres partageaient le même habitat. Les
paysans se croyaient exclus de la chrétienté, expliquaient-ils à Carlo Levi, jeune
médecin relégué là-bas. Il écrivit alors « le Christ s’est arrêté à Eboli ». Une région
laissée pour compte, où la modernité, voire la dignité, n’était pas arrivée, « la honte du
pays » jusqu’à ce que le gouvernement lance un programme de relogement pour
30 000 habitants entre 1953 et 1958. Mais la population, contrainte de quitter les sassi
pour la ville moderne sur les hauteurs, ne voulait pas partir, les gens vivaient ensemble,
partageant tout dans un esprit de solidarité. La vieille cité troglodyte fut ainsi
abandonnée jusqu’à devenir, dans les années 1980, une ville fantôme et un chef-
d’œuvre architectural oublié en proie à une détérioration rapide.

La visite de Matera se révèle passionnante, émouvante voire envoûtante. Cheminer dans
les ruelles, c’est sentir le parfum du passé, c’est crapahuter dans l’histoire de l’humanité
sous le soleil chauffé à blanc. Imaginer la vie des hommes depuis l’âge de pierre, se
promener dans les venelles sinueuses entièrement intégrées dans leur site naturel,
découvrir l’église rupestre de Sainte Lucie dans une simple caverne, avec ses fresques
du XIe, constituent une expérience unique et inoubliable. Déambuler dans cet entrelacs
urbain habité depuis dix mille ans, monter une volée de marches et visiter cet habitat
troglodyte creusé dans le tuf qui s’étage sur plusieurs niveaux, découvrir leur
écosystème, un mécanisme astucieux de ventilation naturelle, de récolte des eaux de
pluie, de stockage des déchets qui a traversé des millénaires, c’est fort intéressant. Seule
la surpopulation en a eu raison, égouts et citernes ayant été transformés en habitations.

La ville nouvelle de Matera veille sur ses sassi (pierres), ces maisons enchevêtrées,
recroquevillées dans le roc qui semblent se tenir pour ne pas finir dans le lit du torrent.
Actuellement, les Sassi renaissent à la vie sociale et culturelle, les particuliers les
restaurent, chambres d’hôtes et hôtels s’y installent et les chiens errants ne sont plus
seuls maîtres des lieux ! Les urbanistes du monde entier s’intéressent à ces habitats
ingénieux en harmonie avec l’environnement et transmis à la postérité. Ils constituent
un modèle de développement durable exploitant les ressources des alentours sans les
altérer. Ils prouvent que l’homme peut vivre depuis des millénaires en symbiose avec
l’écosystème qui l’entoure. Des fenêtres font pénétrer la lumière et aèrent les maisons.
De plus, les troglodytes conservent la fraîcheur, ce qui permet de supporter les
températures très élevées en été, sans ventilateur, ni climatisation.

Les images suivantes nous font découvrir cette région agréable des Pouilles avec une
vie culturelle de haut niveau, une région peu polluée, bien gérée, propre, agréable pour
y vivre, c’est la petite Suisse d’Italie où on trouve des asperges sauvages et des
cyclamens.

Capri, une image paradisiaque
Terminer ce beau voyage dans les Pouilles par une journée à Capri, quel rêve ! Si au
début de notre ère Capri était reliée au continent, ce n’est plus le cas et nous avons pris
le bateau pour une heure de traversée. Connue depuis l'Antiquité pour sa beauté, elle est
un lieu de villégiature dès l'époque romaine. Contrairement aux autres îles du Golfe de
Naples, Capri n'est pas d'origine volcanique mais sédimentaire, elle constitue l'extrême
contrefort du système montagneux de la péninsule de Sorrente.
A Anacapri, découvrons la villa San Michele, accrochée à un éperon rocheux entre ciel
et mer. C’est l’antre d’Axel Munthe, cet écrivain philanthrope suédois qui fut médecin
mondain à la mode et médecin des pauvres à Naples où il soigne gratuitement les
malades du choléra. Sa villa est son refuge « Ma maison doit être ouverte au soleil, au
vent et aux voix de la mer, comme un temple grec, et la lumière, la lumière partout !»
disait-il. L’esthète suédois, épris d’absolu et de nature, écoute et soulage par la parole et
la musique, il pratique l’hypnose dans ses appartements peuplés de statues antiques. Ici,
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la beauté classique et l’austérité monacale cohabitent, sublimées par la luxuriance des
jardins. Ce Scandinave avant-gardiste devient confident de la reine de Suède…
Écologiste avant l’heure, il lutte pour la protection des oiseaux de l’île.
Puis balade dans les petites ruelles où nous avons goûté bien sûr au fameux limoncello.
Le tour de l’île en bateau est un pur moment d’enchantement. Les cheveux au vent, le
visage caressé par les embruns pétillants, nous avons pris beaucoup de plaisir à
découvrir ses falaises vertigineuses, son paysage accidenté, son littoral spectaculaire
parsemé de criques dont la grotte bleue, ses eaux à la fois calmes et bouillonnantes qui
se teintent d’un bleu électrique profond sous la lumière du soleil
Il faut bien refermer ce beau livre d’images qui tournent en boucle dans notre tête. Les
Pouilles, ce sont les reflets d’une aventure exaltante pleine de couleurs, d’émotions et
de sensations, au cœur des riches empreintes du passé dans un décor théâtral et une
nature luxuriante baignée par la luminosité. Une semaine de soleil, peut-être grâce à
leur porte-bonheur, le piment ! Combien de sites mystérieux, de villages haut perchés,
d’énigmes aimerions-nous encore découvrir, une autre année peut-être avec
l’Amopa44 ?

                                                        Anne-Marie Poulard-Vighetti

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