Th - Trimestriel édité par le ThéâtredelaCité CDN Toulouse Occitanie. Gratuit
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Trimestriel édité par le ThéâtredelaCité 1 rue Pierre Baudis, 31000 Toulouse CDN Toulouse Occitanie. Gratuit www.theatre-cite.com Journal du ThéâtredelaCité Printemps 2019 Centre Dramatique National Toulouse Occitanie Direction Galin Stoev
2 Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 É D I T O Pendant ce temps, daNs la maison des artistes On traverse des temps mouvementés. Depuis que la du théâtredelacité et ses huit appartements… notion de crise s’est installée dans notre quotidien, on vit dans une atmosphère chargée et bruyante. La rue et les réseaux sociaux augmentent ce bruit à tel point qu’on se fait emporter par un tourbillon où se mélangent l’injustice sociale, la colère et l’envie de changement. Dans une situation pareille, notre théâtre devient plus qu’un théâtre. Il est aperçu comme une institution chargée de symboles et de sens politiques qui dépassent largement l’artistique. Le théâtre est vu comme un écran sur lequel des individus et des groupes variés, et souvent opposés, projettent leurs espoirs, leurs rêves, leurs frustrations ou leurs revendications. Pourquoi ? Pourquoi là, maintenant ? Pourquoi ici ? Parce que la culture reste l’un des endroits sécurisés de dialogue, elle est un des garants de ci- toyenneté et un des intermédiaires qui peut encore relier les éléments d’une réalité sociale et culturelle en pleine mutation. C’est pour cela que dans des moments de crise un théâtre doit faire son devoir. En d’autres termes, un théâtre doit assurer que ses spectacles se jouent, que ses publics soient accueillis et que cet espace fragile et éphémère d’écoute et de compréhension envers autrui continue d’exister, même en cas de chaos et de division qu’il pourrait nous être imposé comme seule réalité légitime. Galin Stoev En résidence au ThéâtredelaCité ce printemps Prince Lepetit Cie CRÉATURE / Lou Broquin Du 11 février au 13 mars Création au ThéâtredelaCité le 14 mars Énéide(s) Cie Crossroad / Maëlle Poésy Du 8 avril au 4 mai Création au festival Théâtre en mai de Dijon le 30 mai Cannes Cie Y / Étienne Gaudillère Du 22 au 27 avril Création au Théâtre Molière Sète – scène nationale archipel de Thau le 14 mai © Pierre Vanni J’ai rêvé d’un cafard Sonia Belskaya Du 20 mai au 14 juin Création au ThéâtredelaCité UniverCité : Rencontre #2 Les HallesdelaCité en novembre « Espace(s) des possibles ? » Tout le monde ne peut pas Loges à fromage, sushis, cochonnaille, huîtres, Toute personne a ses espaces, réels être orphelin soupes, vin et cocktails… Chiens de Navarre ou imaginaires, revendiqués ou ignorés, limités Du 30 mai au 15 juin ou en mouvement, sociaux ou (et) intimes, proches ● Ouvertes Création aux Nuits de Fourvière de Lyon ou lointains. Comment interagissent-ils entre eux ? le 22 juin du mercredi au samedi « L’Espace vide », « Espèces d’espaces », à partir de 18 h « L’Espace du dedans », du dehors, Des cadavres qui respirent et tous les soirs Laura Wade / Chloé Dabert / AtelierCité du désordre, pour faire autre chose… : de représentation Présentation de saison Du 17 au 20 avril et du 15 mai au 3 juin autant de questionnements qui ont jalonné Création au ThéâtredelaCité le 4 juin 2019/2020 les parcours de Galin Stoev, d’Aurélien Boryet de leurs invités.e.s. « Espace(s) des possibles ? » Falaise Le restaurant Deux soirées de présentation sera le point d’ancrage de cette matinée Baro d’evel / du ThéâtredelaCité de la prochaine saison Camille Decourtye et Blaï Mateu Trias de réflexions partagées. Du 17 juin au 6 juillet Du petit-déjeuner au dîner, pour boire un verre, ● Lundi 3 et mercredi 5 juin Création au festival Grec Rencontre conçue et animée de Barcelone en juillet sur ses banquettes ou sa terrasse végétalisée, à 19 h par le ThéâtredelaCité en semaine et le week-end au ThéâtredelaCité et le groupe de recherche CAS (Université Jean Jaurès) — ● Ouverture prochainement, Entrée libre sur réservation représenté par Emeline Jouve du mardi au samedi à partir de 10 h à partir du 7 mai et le dimanche 12 h – 18 h au 05 34 45 05 05 ● Samedi 13 avril Le ThéâtredelaCité 10 h – 12 h aux HallesdelaCité en tournée Entrée libre sur réservation ce printemps 05 34 45 05 05 Exposition Vide dressing PRLMNT Va dans ta chambre ! De Camille de Toledo En collaboration avec l’association Mise en scène Christophe Bergon Venez découvrir la chambre Étincelle Occitanie qui a pour but d’améliorer 26 et 27 mars 2019 Procès / Débat d’adolescent de Galin Stoev la qualité de vie des malades du cancer grâce Théâtre de l’Archipel, les acteur.rice.s culturel.le.s dans le cadre de l’exposition participative à la mise en place d’un programme Perpignan au banc des accusé.e.s Va dans ta chambre !. personnalisé d’accompagnement Venez accuser, défendre et témoigner Cataract Valley thérapeutique dès le diagnostic, pendant D’après la nouvelle Camp Cataract ● Jusqu’au 27 avril les traitements, et après la maladie. de Jane Bowles ● Dimanche 24 mars Fondation espace écureuil Un projet de Marie Rémond de 15 h à 17h 30 Adaptation et mise en scène 3 place du Capitole, Toulouse ● Samedi 15 juin dans La Salle du ThéâtredelaCité Marie Rémond dans le hall du ThéâtredelaCité et Thomas Quillardet Entrée libre Restauration sur place Du 15 mai au 15 juin 2019 Et à partir de 18 h Renseignements Odéon – Théâtre de l’Europe, soirée conviviale dans le hall 05 62 30 23 30 Entrée libre Paris caisseepargne-art-contemporain.fr Entrée libre
Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 3 Tristesses trempés, que l’artiste belge inscrit dans la modernité d’un langage scénique d’aujourd’hui, lequel est lui- même travaillé par son rapport au cinéma et aux séries télévisées. Un polar « L’ensemble au théâtre… du spectacle joue C’est rare, le polar, au théâtre. Et pourtant, ça peut être sur le dedans très bien, à l’image de Tristesses, le formidable spectacle que signe l’auteure-metteure en scène-comédienne belge Anne-Cécile Vandalem. Avec Anne-Cécile Vandalem, et le dehors, l’intérieur Tristesses est une île sur laquelle nous habitons tous, aujourd’hui en Europe, même si dans l’histoire qu’elle raconte, elle ne compte plus que huit habitants. L’artiste et l’extérieur, belge s’est inspirée d’un fait divers qui a eu lieu sur l’île de Samso, au Danemark, pour écrire cette fiction qui fait montre d’un goût et d’un talent certain pour la nar- ration et la comédie noire. Sur Tristesses, confetti perdu au nord du Danemark, ce qui est montré et ce que l’on vivaient donc des centaines d’habitants, jusqu’à ce que les abattoirs, qui étaient le seul employeur local, ne fas- sent faillite. Alors l’île s’est vidée, et ils ne sont plus que huit à l’habiter. Tous sont plus ou moins cousins. Un bon polar, c’est d’abord une question d’atmosphère, et on peut dire qu’Anne-Cécile Vandalem sait y faire dans ce domaine. Tout, sur le plateau, con- cache. » court à installer une légère étrangeté qui ne se dément pas, tout au long du spectacle, et qui par son hyperréa- Tristesses n’en garde pas moins un soubassement lisme déjoue le naturalisme narratif de l’histoire. théâtral très fort, notamment dans le jeu, à la fois très Il paraît qu’Anne-Cécile Vandalem aime les mai- incarné et légèrement distancié, que portent de très sons, et ce que l’on découvre d’abord, ce sont les bons comédiens. quelques chalets de bois serrés les uns contre les autres, comme pour se tenir chaud, dans le froid du petit matin. Fabienne Darge, L’ensemble du spectacle jouera ainsi sur le dedans et le extrait de l’article Avignon : « Tristesses », beaux rivages, dehors, l’intérieur et l’extérieur, ce qui est montré et ce paru le 9 juillet 2016 dans Le Monde que l’on cache. Anne-Cécile Vandalem rejoint ici la grande tradition du polar politique, de Dashiell Hammett à Jean-Patrick Manchette. Les peurs, les fantasmes d’invasion, le ● 9 – 12 avril sentiment d’abandon, la corruption, les manipula- Anne-Cécile Vandalem / Conception et mise en scène tions politiques, la macération d’une communauté Das Fräulein [Kompanie] endogamique, sont tricotés en un engrenage fatal, sans La Salle / 2 h 10 démonstration ni didactisme. Mais si son spectacle s’offre dans une forme acces- ALLER PLUS LOIN sible et ouverte à tous, il est sous-tendu par une solide réflexion, nourrie par les philosophes Gilles Deleuze Préambule et Georges Didi-Huberman notamment, sur la « tris- Mercredi 10 avril tesse » produite par l’impuissance et l’impasse politiques que nous subissons. Tout passe donc ici par le filtre Bord de scène d’une narration classique, avec des personnages bien Jeudi 11 avril Tristesses © Phile Deprez Kind 5 ANECDOTES À PROPOS DE KIND — Kind est une nouvelle occasion pour Gabriela Carrizo et Franck Chartier de coréaliser à nouveau ensemble. Une trilogie — Contrairement à Vader et Moeder, Kind se déroule dans un cadre extérieur. familiale Le décor est une forêt avec des arbres et des falaises. — Le casting de Kind est constitué de 5 danseurs, d’une mezzo-soprano Kind (Enfant) est le troisième et dernier volet d’une et de 3 enfants. recherche sur les émotions cachées dans les constella- tions familiales. La trilogie de la compagnie Peeping Tom a débuté en 2014 avec Vader (Père), dirigé par Franck — La création a débuté avec un atelier Chartier, suivi par Moeder (Mère) en 2016 de Gabriela pour enfants comme préparation Carrizo, tous deux accueillis au ThéâtredelaCité. aux recherches pour la pièce. Pour Kind, ils reprennent la direction artistique ensemble. — Kind est la huitième Le point de vue de l’enfant constitue la base de la pièce. production de Peeping Tom. Les enfants ont toujours été présents dans l’univers de Peeping Tom, mais jamais de façon aussi concrète. Sur scène, les enfants représentaient principalement un point de vue d’adulte. Cette fois, les actions sont guidées par la façon dont ils perçoivent le monde, par leurs peurs et leurs désirs. Dans Kind, Gabriela Carrizo et Franck Chartier L E S AV I E Z - V O U S ? expriment une fascination pour le potentiel expressif et physique des enfants et des adolescent.e.s. Ils étu- — L’équipe de Peeping Tom – artistes, dient comment le point de vue d’un enfant change chorégraphes, technicien.ne.s, designers et se développe en grandissant, avec tous les choix, et autres collaborateur.rice.s – est composée pressions, peurs, doutes et changements physiques associés ; comment cela se traduit en gestes et en lan- de plus de 13 nationalités différentes. gage corporel. Pour cette création, les chorégraphes ont multiplié — L’artiste le plus âgé de Peeping Tom les recherches préparatoires approfondies avec des a 80 ans et le plus jeune, 26. jeunes de milieux et de statuts différents : privilégiés, défavorisés, perturbés, orphelins ou réfugiés. Leur monde mental et la façon dont ils voient les choses dif- — Plus de 280 000 personnes féremment des adultes ouvrent la voie à de nouvelles à travers le monde ont vu idées. Les chorégraphes leur ont donné toute la liberté une représentation de Peeping Tom. d’auto-accentuer certains éléments, avec lesquels les créateurs ont pu travailler. Les personnages sont — Plus de 1500 figurant.e.s interprétés par des artistes qui ne sont pas nécessaire- ment enfants, mais toujours à partir d’une perspective à travers le monde ont joué dans fournie par des enfants ou des adolescents pendant le une représentation de Peeping Tom. processus de création. — En 2015, Peeping Tom a remporté Véritable entrelacement de la danse avec la théâtralité, le prestigieux Olivier Award à Londres Gabriela Carrizo & Franck Chartier © Jesse Willems le texte, les chansons, la scénographie et la pratique amateur, le style Peeping Tom perdure. Là encore, ils pour 32 rue Vandenbranden. ● 12 – 14 juin font appel à des figurants locaux, souhaitant travailler Gabriela Carrizo et Franck Chartier /Peeping Tom Conception et mise en scène avec diverses générations qui se juxtaposent sur scène. La Salle / 1 h 30
4 Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 Des cadavres qui respirent Une comédie à l’humour anglais Construite comme un puzzle géant, où chaque découvreur de cadavre devient lui-même un cadavre, cette pièce à l’humour noir nous livre cinq scènes, cinq tranches de vie où humour, ennui et ironie se côtoient, mettant à jour les petites et grandes souffrances ordinaires. La mort, omniprésente, ne montre jamais le même visage. Elle est tour à tour grotesque, pitoyable ou cruelle… Et l’auteure s’en amuse. — Blandine Pélissier, traductrice de l’œuvre Entretien qui m’a intéressé (par définition, un cadavre ne peut pas respirer), parce qu’il coïncide multiples approches, esthétiques et techniques, ce que je fais et transmets c’est ça, ce théâtre les pièces énigmatiques comme Orphelins – Prix Impatience 2014, Festival d’émergences théâ- avec Laura Wade, aussi avec le paradoxe de la chronologie de la pièce qui est impossible (comme un ruban de auquel je crois. J’interviens à un endroit par- ticulier : sur une approche de l’interprétation trales à Paris – ou L’Abattage rituel de Gorge Mastromas de Dennis Kelly ou dans un autre registre, auteure Möbius, NdlT). Quand on n’est pas heureux.se dans sa vie, on peut se sentir comme un cadavre dénuée de présupposés, considérant que tout vient du plateau, sur le travail du rythme et J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne de Jean-Luc Lagarce. Comment relevez- qui respire et qui continue à fonctionner. de la musicalité de la langue, sur la dialectique vous ces énigmes, véritables défis dramaturgiques, Comment avez-vous abordé l’écriture de cette pièce ? entre le cadre de la fiction et l’incarnation du scénographiques ? Quelle en était l’idée première ? Pourquoi écrire pour le théâtre ? Quelles en sont, selon personnage, entre le réalisme et l’onirisme. Cette pièce-ci comporte effectivement des L’idée première est venue très vite, d’un coup. vous, les principales spécificités ? J’apporte des outils dont les gens s’emparent énigmes scénographiques et dramaturgiques Au cœur de la pièce, il y a, très fort, la lutte pour J’écris pour le théâtre parce que j’aime le théâ- et avec lesquels ils font ce qu’ils veulent. C’est à résoudre, c’est excitant. J’aime travailler sur la joie, le bonheur. J’ai eu l’idée de trois per- tre, j’adore aller voir des pièces et j’ai donc pour ça que j’encourage les acteurs à avoir des les défis de mise en espace et d’incarnation. sonnages qui deviendraient chacun le cadavre envie de contribuer à ça. J’aime beaucoup pédagogues différents, à recevoir des enseigne- Le texte forme une boucle, il y a une sorte de de la scène d’après. C’était non linéaire, dès le aussi l’idée du travail en équipe, de la commu- ments différents, à élargir leur palette d’outils. circularité : j’ai l’impression que si c’est trop départ. Il y a eu très très peu de changements nauté. Je travaille toujours au plateau avec les réaliste, ça ne fonctionnera pas. Un autre élé- en répétitions, parce que la pièce est construite metteur.e.s en scène. Quand on écrit un roman, Parlons un peu des Cadavres qui respirent, le texte ment important est que le spectacle est destiné comme un puzzle, ou un château de cartes. Si on est plus solitaire. Maintenant, je commence de Laura Wade que vous créez en juin prochain avec à tourner en décentralisation, la scénographie on enlève une carte, le château s’écroule. J’ai un à collaborer avec les metteur.e.s en scène dès le l’AtelierCité. Qu’est-ce qui vous a mené à cette pièce ? doit être légère et rapide à monter. Si je n’ai pas peu joué avec l’ordre des scènes au tout début, début de l’écriture. Une pièce reconnue en Angleterre – élue meilleure pièce encore de réponses sur la manière dont nous mais très vite je m’en suis tenue à cette struc- en 2006 et pour laquelle la Britannique a reçu le prix allons relever ces défis, les contraintes du texte ture. C’est une structure en « nœud papillon », Propos recueillis et traduits par Blandine Pélissier, de l’auteure la plus prometteuse par le Critics’ Circle associées aux contraintes techniques posent avec la première partie de la pièce dans une traductrice de l’œuvre Theatre – mais encore non créée en France je crois. un cadre à l’intérieur duquel on va inventer. couleur, puis, au milieu, le nœud de la scène violente, puis la deuxième partie qui repart sur C’est un vrai coup de cœur collectif, une pro- Propos recueillis par Mélanie Jouen, janvier 2019 une autre couleur. fonde envie de faire découvrir cette auteure. Souvent, je choisis les textes en rêvant simul- Que vous voulez faire éprouver aux spectateur.rice.s à travers la structure de la pièce ? Entretien tanément aux acteur.rice.s que je distribuerai. À mon sens, il doit y avoir une vraie rencontre [EXTRAIT] J’aime que le public travaille. Et aussi qu’il avec Chloé Dabert, humaine entre un texte et ses interprètes. Là, ne les connaissant pas, je n’arrivais pas à choi- EMMA : Merde. Désolée. Désolée. Elle regarde un moment vers le lit, comme si le puisse prendre du plaisir à voir la pièce et à comprendre ce qu’il se passe entre les person- metteure en scène sir seule, alors on a choisi ensemble. Je savais qu’ils étaient sept, je connaissais leur parcours, cadavre avait dit quelque chose. Non, ça va. nages, même s’il ne comprend pas tout de la Emma se frotte les yeux et sourit faiblement. structure. Quand la pièce s’est jouée au Royal Que représente pour vous cet engagement auprès de avais leurs photos. J’avais aussi envie de revenir C’est juste que… vous êtes mort et que je Court, elle était programmée dans la salle l’AtelierCité ? à des dramaturges anglais, après avoir monté vais peut-être me faire virer, alors… Jerwood, tout en haut. J’avais très envie que le C’est tout d’abord une relation, avec Galin il y a quelques années deux pièces de Dennis C’est pas… c’est pas génial, hein ? public cherche à comprendre ce qu’il avait vu Stoev et Stéphane Gil, qui se tisse désormais Kelly. Il s’agissait aussi de leur transmettre un Ça la fait rire. tout le temps où il redescendait les escaliers et plus largement avec cette maison. Je suis con- objet destiné à appartenir à la troupe, un objet Voilà que je vous parle. qui doit être vu, qui doit vivre. À partir de ces Elle fronce les sourcils, regarde autour d’elle. que les gens en parlent entre eux ! tente, flattée même, d’être conviée ici, d’une éléments, je suis arrivée avec plein de proposi- C’est nouveau, ça. part avec Iphigénie, d’autre part avec Des cadavres Elle soupire et se tourne vers le cadavre. Comment avez-vous travaillé le rythme et l’oralité de qui respirent, la création sur-mesure que je signe tions. On a passé une semaine à lire et puis il y Comment vous vous appelez, Monsieur votre texte ? Pour cela, avez-vous travaillé avec des avec l’AtelierCité. Ma présence au sein de cette a eu ce texte-ci, dont les personnages collaient L’homme ? acteurs pour aboutir à la version finale du texte ? maison s’inscrit dans un projet plus global de bien avec le groupe, dont l’écriture et l’énergie Elle regarde le lit et fait comme si le cadavre lui En fait, cela me vient naturellement, j’entends véritable compagnonnage. Il y a ici une volonté ont tout de suite plu. On a tout de même avait répondu. des voix dans ma tête et je travaille à voix haute d’intégrer l’artiste à la vie de la maison, qu’il mesuré les points forts, les points faibles, les Je vais descendre leur dire dans une minute. quand je suis bloquée, ça m’aide. J’ai travaillé à soit de passage comme moi ou en permanence défis. On a envie de partager la découverte Ils vont croire que je blague, cette fois. des tempos légèrement différents pour chaque comme cette troupe. Je me sens proche de cette stimulante d’une écriture qu’on ne connaît pas Un temps. Emma aperçoit une enveloppe en encore en France, traduite mais jamais mon- évidence sur la coiffeuse. personnage. philosophie, que j’essaie d’insuffler également tée en effet, un projet passionnant pour un tel Oh, vous avez fait une lettre. C’est gentil. à la Comédie de Reims dont je viens de pren- Emma saisit l’enveloppe. La mort et la sexualité ont l’air d’être deux sujets très dre la direction. J’ai très vite ressenti que les spectacle. Vous avez l’air… Je suis sûre que vous proches dans toute la pièce. Quelle est votre intention sept comédien.ne.s de l’AtelierCité font tous étiez sympa. Je suis sûre que vous étiez ou idée là-dessus ? déjà pleinement partie de cette belle maison. Vous qui travaillez le texte comme une partition très… très gentil. Pas quelqu’un à qui Je voulais travailler sur la coexistence du C’est très important que les artistes, les équi- musicale, avec précision, d’une manière très rythmique j’aurais adressé la parole peut-être. Mais corps et de l’esprit. Je m’intéressais beau- pes et les publics se côtoient ainsi, dans une voire mathématique, quel rythme détient ce texte-ci vous avez l’air vraiment sympa. Vous êtes coup, à l’époque, au processus physique de la possible familiarité. En tant que metteure en spécifiquement ? pas mon genre, non, vous êtes un peu mort. C’était quelque chose que je trouvais à scène, je ne travaille pas différemment avec les C’est un rythme que j’ai déjà éprouvé et qu’il vieux pour moi. la fois répugnant et fascinant, les fluides qui acteur.rice.s de l’AtelierCité qu’avec d’autres me plaît de travailler : ça va vite, ça fuse. Je Des cadavres qui respirent s’échappent des corps morts, comme les flui- interprètes. Certes, ce sont des acteur.rice.s peux ainsi leur apporter quelques éléments Scène 1 des qui s’échappent des corps pendant l’acte qui ont la particularité d’être jeunes, mais qui techniques à partir desquels on va pouvoir cons- sexuel. La mort qui termine la vie et l’acte sexuel que soit celui face à moi, la relation s’invente truire. Ce texte est finalement le socle d’une qui peut donner la vie ont quelque chose de toujours de manière singulière. transmission puisqu’il se situe exactement à physiquement similaire dans le corps. Je trouve mon endroit de recherche. La pièce est ensuite ● 4 – 14 juin De Laura Wade ça fort au niveau philosophique et émotionnel. « Le théâtre se transmet et on ne transmet que ce en délicieusement complexe car il n’y a pas de Traduction Blandine Pélissier et Kelly Rivière quoi l’on croit » dites-vous : en quoi croyez-vous ? message clair. Il règne une certaine ambiguïté, Mise en scène Chloé Dabert « Quand un homme a perdu ce qui faisait sa joie, je Je souhaite amener l’autre au plus proche de lui- un trouble, un suspense. Il est drôle, violent Avec les comédien.ne.s de l’ AtelierCité 2018-2019 : Sélène Assaf, tiens qu’il ne vit plus. C’est un cadavre qui respire. » même. Je cherche une forme de simplicité, de poétique et irrésolu, d’un possible réalisme, il Thomas Bellein, Maud Gripon, Adrien Guitton, Vous utilisez cette citation d’Antigone de Sophocle sincérité, sans douleur, avec douceur. Quelque nous entraîne vers le surnaturel. C’est un texte Thibaut Prigent, Simon Ribet, Mélissa Zehner Produit par le ThéâtredelaCité en guise d’avant-propos, que vous évoque-t-elle ? chose qui soit ni violent, ni intrusif. Je fais du qui pose question et c’est ce qui fait son intérêt. Pour la création de Des cadavres qui respirent, Tous les personnages, d’une certaine façon, théâtre d’une certaine manière, je l’aime d’une l’équipe artistique est accueillie en résidence au ThéâtredelaCité se battent pour être heureux.ses dans leur vie. certaine manière et c’est ce théâtre-là que je Dans les écritures contemporaines auxquelles vous pendant 4 semaines. C’est le paradoxe des « cadavres qui respirent » nomme lorsque je parle de croyance. S’il y a de vous êtes attelée, vous semblez avoir un penchant pour Le CUB
Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 5 L’AtelierCité Les Habits froids Atelier dirigé par Aurélien Bory en un coup En partenariat avec le LIDO, centre des arts du cirque du 2 au 13 avril d’œil Présentations publiques ce printemps du mercredi au samedi 13 avril / 18 h 30 / Salle de répétition 1 Coréalisations de courts-métrages En partenariat avec l’ENSAV Des cadavres qui respirent Tournage du 25 février au 9 mars Laura Wade / Chloé Dabert Projection des films le mardi 14 mai / Répétitions du 17 au 27 avril et du 17 mai au 3 juin 18 h 30 – Le CUB Répétition publique mardi 21 mai / 18 h 30 Représentations du 4 au 14 juin PRLMNT # L’Invention d’un monde Camille de Toledo / Christophe Bergon Atelier dirigé par Galin Stoev 26 et 27 mars – L’Archipel, Perpignan du 2 au 11 mai et du 17 au 29 juin Présentations publiques (dates à préciser) Réservations pour les présentations publiques (entrées libres) : c.chausson@theatre-cite.com Les comédien.ne.s de l’AtelierCité. De gauche à droite : Sélène Assaf, Thibaut Prigent, Maud Gripon, Adrien Guitton, Simon Ribet, Mélissa Zehner, Thomas Bellein © Polo Garat Iphigénie Un mythe fondateur Entretien drame épique tel qu’on le retrouve aujourd’hui dans des formes très diversifiées jusque dans avec Chloé Dabert les séries télévisées comme Game of Thrones dont le succès, mondial, témoigne de l’ancrage de la culture moderne dans le mythe. Il n’est pas anodin que l’un des épisodes parle d’un Racine. Dire le nom de cet auteur est déjà plonger homme qui doit sacrifier sa fille pour accéder dans l’histoire du théâtre et de la culture française. au trône. Par ambition, par épuisement et sous Était-ce cette confrontation qui vous intéressait ou vous la contrainte, il accepte. Je travaille beaucoup éloignez-vous de cette idée pour y trouver l’indépendance en ateliers avec des adolescents et de jeunes de votre génération ? adultes, et ce type de résonance est une source Iphigénie est un texte qui m’habite depuis de réflexion, d’inspiration. Nous y retrouvons l’adolescence et auquel je reviens régulièrement. la trame d’Iphigénie que Racine a lui-même Le choix de cette pièce a rapidement été une reprise à Euripide. Qu’est-ce que cette pratique évidence. Les protagonistes y sont « arrêtés, raconte de notre propre rapport à l’expiation, bloqués » dans un camp militaire situé entre au retour au calme, à l’apaisement, à la fin la plage et la mer, et ils attendent que le vent, d’un cycle ? Pourquoi s’agit-il de sacrifices de jusque-là défavorable, se lève pour pouvoir par- jeunes femmes ? Je n’ai pas de réponse, je ne tir au combat. Mon choix tient aussi au dialogue cherche d’ailleurs jamais à en donner une aux qu’entretient ce type de mythes fondateurs avec spectateurs. L’important pour moi est de nous notre temps. Que représente le fait de sacrifier retrouver ensemble face à un constat, de nous une jeune fille pour une idée, une raison d’État ? poser la question de nos propres limites, de Qu’est-ce qui sous-tend le fait de se soumettre à nos systèmes de valeurs, sachant qu’un sacri- un oracle ? De « croire l’oracle » ? L’ Iphigénie de fice aura bien lieu et que le vent se lèvera. Cela Racine parle à travers le temps, et nous renvoie nous conduit à une autre question : quel sens au présent. L’humain ne se questionne plus sur moral pouvons-nous donner à la conclusion la fin de son prochain. Il agit et accepte de sacri- de Racine ? S’agit-il ici de justifier ou non fier l’un des siens au nom de l’intérêt commun. un acte ? Le théâtre est là pour interroger et ébranler. Personnellement, j’aurais préféré que Les grandes figures féminines comme Antigone, le vent ne se lève pas. Au-delà du rapport aux Iphigénie, Penthésilée sont souvent des personnages qui croyances et au pouvoir, la pièce questionne Iphigénie © Victor Tonelli permettent aux lecteurs et spectateurs d’entrer dans le la figure féminine dans son rapport à l’intime. hommes, d’égaler Iphigénie aux yeux d’Achille monde du théâtre. Elles sont de magnifiques miroirs. À travers ces trois femmes qui arrivent dans en « valant » autant qu’elle… Tandis que chez Iphigénie est fille de roi. Elle incarne parfaite- ce camp militaire – Iphigénie, Clytemnestre, Euripide, c’est une biche qui est sacrifiée au ment sa fonction de princesse, et bientôt de Ériphile – et alors que chacune d’elles sait final, je trouve qu’il y a quelque chose de très sujet sacrifié. De par son éducation, elle ne ● 16 – 19 avril qu’elles n’y ont pas leur place, on perçoit moderne dans la résolution de Racine qui met De Jean Racine remet pas en question l’autorité, elle accepte qu’elles se battent avec les moyens qu’elles de côté toute forme de surnaturel pour con- Mise en scène Chloé Dabert / Cie Héros-limite son sort, elle « croit » en l’oracle. Il y a une ont à leur disposition. Ces personnages clure sur un sacrifice humain. Rappel violent Accompagné par le ThéâtredelaCité forme de conditionnement de cette jeune fille m’amènent à interroger la place des corps, à de notre modernité. La Salle / 2 h 30 qui accepte d’être sacrifiée. Elle se bat avec les me poser la question du désir. Iphigénie et armes qu’elle a à sa disposition, à savoir son ALLER PLUS LOIN Ériphile aiment le même homme, Achille. Le corps qu’elle offre par amour pour son père et sacrifice d’Ériphile à la fin de la pièce est pour Propos recueillis par Marion Guilloux Bord de scène par sens du devoir. Nous sommes ici dans le sa part guidé par le fait d’exister aux yeux des pour le Festival d’Avignon Jeudi 18 avril
6 Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 À nos Atrides ! Laurent Pérez de la À côté d’eux, Camille ajoute une couche de peinture noire aux planches accrochées à l’échafaud – objet principal du décor. Compagnie L’Émetteur, Mardi 22 janvier Les comédien.ne.s sont dans une autre salle, plus grande, plongée dans le noir, où seule la scène est éclairée. Les musiciens jouent, côté cour. Trois personnes sont installées crée cette adaptation derrière des machines de régie. Des pièces du décor sont installées, comme cette espèce d’échafaud gris-noir. Louise et Régis sont sur le plateau, costumés. Laurent est assis sur le sol. À sa gauche, Sarah suit le texte sur un ordinateur. Elle souffle les répliques oubliées. Souvent, Laurent se lève, entre sur le plateau et donne ses indications. Dans de L’Orestie d’Eschyle. ces cas-là, les technicien.ne.s allument la salle toute entière. Quand une barre du décor tombe bruyamment, il la remet. Laurent exprime ses doutes, il cherche à « ce que quelque chose opère ». Le personnage de Cassandre est au centre du travail. Parfois, En janvier tout le monde se tait, pour réfléchir calmement. À la pause, ils vont sur la terrasse du troisème étage, fumer une cigarette, abrités de la forte pluie par une coursive. Presque un déluge de tragédie grecque. avec les comédien.ne.s Mercredi 23 janvier Une dizaine de personnes regardent la répétition de la fin de la pièce. Ceux qui ne et les technicien.ne.s, jouent pas sont installés par terre. Les régisseur.se.s ajustent les projections de vidéos et l’utilisation d’un micro – trop d’échos, problème d’allumage. Agacé.e.s, les comédien.ne.s tapent du pied au sol quand leur réplique leur échappe. Laurent monte sur l’échafaud et montre ce qu’il attend : « Tu vois ce que je veux dire ? » Cette question est un leitmotiv. ils étaient Cette salle du cinquième étage est une espèce de moulin silencieux. Des personnes y entrent, en sortent, très discrètement. Des ouvreuses observent. Une femme photo- graphie. La gravité et la démesure du mythe des Atrides sont telles qu’elles déteignent au ThéâtredelaCité sérieusement sur l’atmosphère ambiante, presque en-dehors du monde. « Commence pas à me faire rire, je suis fatigué » concède Laurent, le sourire aux lèvres. La journée termi- née, toutes lumières allumées, il faut déplacer l’échafaud. C’est un bazar à transbahuter. pour travailler. Une comédienne s’y suspend et fait des tractions. D’autres s’improvisent danseurs de cla- quettes en patientant. Les régisseur.se.s discutent. Tout ça forme une petite cacophonie. Ce récit vous ouvre la porte Jeudi 24 janvier Les comédien.ne.s et les régisseur.se.s « traversent » la pièce entièrement. Ils la jouent, du début à la fin, sans marquer d’arrêt, pour la première fois. Mathieu accorde sa guitare, Régis relit le texte, Sylvie se lave les dents. D’autres bavardent. Une douce agitation se de la salle de répétition. déploie. « OK. OK. On peut se voir en plateau, là ? » Laurent rassure et motive la troupe. Les premières scènes se suivent et, désormais, c’est la folie que l’on sent à plein nez. Ce que jouent les deux musiciens est lent, délicat, aiguë, étrange et rappelle les mugissements d’animaux marins. Les portes de « la maison au sol imbibé de sang » s’ouvrent. La colère de Sylvie, jouant une Clytemnestre en robe blanche athénienne, impressionne. Les deux Lundi 21 janvier ou trois spectateur.rice.s sont inquiet.e.s par cette démence. L’air est empli de menaces. Il est neuf heures. Le hall du théâtre est vide, les lumières sont allumées. Il faut monter Et de promesses, pour le spectacle qui vient. au cinquième étage, emprunter des chemins tortueux, un ascenseur, des escaliers, Valentin Chomienne pour trouver Laurent, les comédien.ne.s et les technicien.ne.s. Dans une grande salle, ● 12 – 15 mars presque nue, ils sont six assis autour d’une table. Dessus, il y a gourdes, tasses, flacons D'après L’Orestie d’ Eschyle d’huiles essentielles, stylos, mouchoirs, carnets et téléphones. Ils travaillent le texte des Adaptation et mise en scène Laurent Pérez / Compagnie L’Émetteur premiers épisodes et chants du chœur. Ils répètent les scènes afin de bien comprendre Accompagné par le ThéâtredelaCité ce que les personnages – Agamemnon, Ismène, etc – veulent dire. Laurent regarde et Présenté avec et au Théâtre Sorano écoute attentivement. Il arrête Sylvie pour lui demander de changer de ton, de davan- Pour la création d’À nos Atrides !, l’équipe artistique est accueillie en résidence au ThéâtredelaCité tage s’enfoncer dans une humeur. Elle écrit et rature son texte. Un son indistinct pendant 2 semaines. parvient jusqu’à la salle – ce sont les deux musiciens (Roland et Mathieu) qui jouent. Au Théâtre Sorano / 2 h environ À nos Atrides ! © Fanny Batier Prince Lepetit en audiodescription L’accès pour tou.te.s au spectacle vivant ! Prince Lepetit Accompagner les publics en situation de handicap dans l’accès au spectacle vivant, notamment les personnes en situation de déficience visuelle, est L’histoire de Prince Lepetit a fait dit aussi qu’en tant que spectateur.rice.s, on doit accepter de dépasser l’approche naturaliste, se laisser immerger. Accepter qu’un personnage ait plusieurs figures qui le définissent, aller écho illico auprès de Lou Broquin, sans peur vers davantage d’abstraction et se laisser embarquer dans cette aventure ». un enjeu essentiel pour enrichir l’écoute et nourrir l’imagination de chaque spectateur ! Propos recueillis par Cécile Brochard l’artiste qui met en scène le beau texte À l’occasion de la création de Prince Lepetit, le ThéâtredelaCité a commandé une audiodescription du spectacle : description de l’ensemble des éléments « Le texte de Prince Lepetit visuels – décors, costumes, entrées et sorties des co- médiens ou encore situations – seront détaillés en d’Henri Bornstein. Un aperçu sensible direct lors de la représentation du lundi 18 mars à a bouleversé l’adulte que je suis en lui 14h30. En amont, les spectateurs seront conviés à de sa création en quelques mots choisis : rappelant l’enfant que j’ai été. » une visite tactile de l’espace scénique ainsi qu’à une rencontre avec Lou Broquin. Audiodescription réalisée par Dune Cherville Lou Broquin ● Lundi 18 mars / 14h30 / Le CUB Enfance : « Dès la première lecture, j’ai aimé ce texte. Ce n’est pas parce qu’on crée pour Représentation ouverte aux groupes et aux spectateurs des enfants qu’on doit manquer d’exigence et d’honnêteté. S’adresser aux petits ce n’est pas individuels, petits et grands — Informations et réservations écrire à genoux pour se mettre à leur taille, mais c’est parler à des êtres humains qui sont déjà ● 14 – 21 mars à l’accueil du théâtre actifs dans la construction du monde. Je protège leur vulnérabilité mais je laisse le chemin D’ Henri Bornstein des questions grand ouvert ». Conception et mise en scène Lou Broquin / Cie CRÉATURE Accompagné par le ThéâtredelaCité Liberté : « Au fur et à mesure de la création, mes images, mes présences, mes fantômes se Pour la création de Prince Lepetit, l’équipe artistique est accueillie en résidence au ThéâtredelaCité Dessine-moi sont ajoutés à ceux du récit et le livre s’est déplié, déployé. Et mes visions de départ ont pendant 5 semaines. changé au passage au plateau, elles sont devenues plus oniriques, intimes, totalement en Le CUB / 1 h 15 un personnage prise avec les états d’âme de Prince, sa perception, ses émotions et son évolution. Au final, sans que j’en modifie une ligne cette histoire m’a donné une liberté totale ». À partir de 8 ans ALLER PLUS LOIN Parcours croisés Dépasser : « C’est un mot qui dit d’abord que quel que soit son âge, on peut aller plus loin que la souffrance. Ce petit garçon confronté à une séparation brutale d’avec sa mère dont on ne Bord de scène Ce parcours, proposé à trois classes de CM1-CM2 connaît d’abord pas l’issue, sublime ce drame grâce à l’imaginaire et à la rêverie. Ce mot nous Samedi 16 mars, à l’issue de la représentation de 20 h des écoles Falcucci et Ronsard, invite les élèves à explorer activement la relation entre un texte et le travail de mise en scène. Une metteure en scène et un auteur, Lou Broquin et Henri Bornstein, ont rencontré des enfants pour raconter leur processus créatif et expliquer comment un texte naît dans l’esprit d’un.e auteur.rice et prend corps entre les mains d’un.e metteur.e en scène. Les deux artistes ont proposé aux enfants de créer des productions plastiques à partir des personnages de Prince Lepetit. Chaque élève s’est emparé d’un personnage pour en faire son portrait. Avant de passer à la réalisation plastique, les enfants ont dû convoquer leur sensibi- lité et leur imaginaire afin de définir les traits du Père, de la Mère, d’Aristote ou encore de Prince Lepetit. Chaque élève a pu appréhender le temps de cette aventure la démarche de la metteure en scène. Ce parcours croisé est l’occasion de créer des pas- serelles entre deux lieux, le Centre culturel Henri Desbals et le ThéâtredelaCité. Les enfants assisteront à deux spectacles mis en scène par Lou Broquin, Bouchka au centre Culturel Henri Desbal le 13 février et Prince Lepetit au ThéâtredelaCité entre le 14 et 21 mars. Grâce à ces deux propositions les élèves dé- couvriront la matière et l’univers de Lou Broquin. ● Les productions plastiques des élèves seront exposées dans le hall du ThéâtredelaCité du 14 au 21 mars. Prince Lepetit © Arnaud Peyraube
Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 7 Nous/Eux (Wij/Zij) « Légèreté et humour sont les armes évitant à Nous/Eux d’être un spectacle L’espoir et la vie… « J’ai bien aimé le spectacle pesant, sans pour autant taire la gravité des événements » Beslan (Russie), 1er septembre 2004. Le jour de la rentrée des classes, des terroristes tchétchènes prennent d’assaut une école. Ils retiennent, pendant trois jours, plus de mille parce que vous parlez Filip Tielens, Cobra (BE) personnes dans la salle de gym. Cette prise d’otages se solde, dans un chaos total, par la mort de 334 personnes, dont 186 enfants. La compagnie bruxelloise Bronks s’est inspirée du documentaire d’Ewa Ewart et Leslie Woodhead, Children of Beslan, pour raconter les d’un drame « Une pièce de théâtre remarquable, mais en rigolant. » faits à hauteur d’enfant, à travers le regard d’un garçon et d’une fille. Un spectacle à voir en famille, plusieurs fois récompensé depuis sa création en 2014, qui permet d’évoquer ludique, étonnamment la menace terroriste avec les plus jeunes. L’accent n’est pas mis sur la tragédie, mais sur et douloureusement drôle l’espoir et la vie. Nous/Eux est loin d’être le récit tragique de cette prise d’otage, mais une pièce qui Jeune spectatrice à la sortie de la salle, après une représentation autant que bouleversante. » raconte comment les enfants – à leur manière – sont à même d’assumer des situations Lyn Gardner, The Guardian extrêmes. Sur le plateau, des craies pour délimiter les espaces, un garçon, une fille pour raconter avec facilité et décontraction cet évènement. ● 9 – 11 mai ALLER PLUS LOIN (UK) Le spectacle Nous/Eux confronte, avec lucidité et humour, le regard et la logique de Texte et mise en scène Carly Wijs / Compagnie BRONKS l’enfant face à la perception de l’adulte. Le CUB / 1 h Bord de scène À partir de 9 ans Samedi 11 mai Nous/Eux © FKPH Un homme qui dort Bruno Geslin invente une chambre imaginaire et nous plonge dans une dérive mentale entre insomnie et rêves éveillés. Sous l’impulsion du violoncelle de Vincent Courtois et de magnifiques séquences vidéo, on suit cet homme qui refuse de se plier au diktat du monde social et se détache progressivement du réel. Tristesse et joie dans la vie des girafes © Pierre Grosbois Tristesse et joie dans la vie des girafes Une traversée épique de Lisbonne à hauteur d’enfant, une quête dérisoire où les rencontres sont autant d’étapes pour grandir. Un homme qui dort © Bruno Geslin ● 19 – 21 mars ● 3 – 6 avril D’après l’œuvre de Georges Perec De Tiago Rodrigues ALLER PLUS LOIN Conception et mise en scène Bruno Geslin Traduction et mise en scène Thomas Quillardet / Compagnie 8 avril Présenté avec le Théâtre Sorano Le CUB / 1 h 15 Bord de scène La Salle (public installé sur le plateau) / 1 h À partir de 9 ans Vendredi 5 avril
10 Journal du ThéâtredelaCité, Printemps 2019 Maguy Marin DEMANDEZ LE PROGRAMME ! et son Portrait/Paysage DES SPECTACLES… • Partage de danses – Marin/Soto/Belarbi Fer de lance de la nouvelle danse française dès les années 70, elle dirige des Centres Chorégraphiques Nationaux Quatre pièces avec les danseur.se.s du Ballet du Capitole : à partir de 1985. Ses chorégraphies lui valent des prix dans le monde entier et même au-delà du milieu Liens de table Kader Belarbi de la danse, comme le Lion d’or de la Biennale d’Art Contemporain de Venise en 2016. Elle prend un malin Chorégraphie et scénographie Fugaz plaisir à créer des ponts entre la danse et d’autres arts comme le théâtre, la musique ou encore la littérature. Chorégraphie, mise en scène, costumes et lumières Eden (Duo) Cayetano Soto Chorégraphie, scénographie et bande son Maguy Marin Entretien rencontré l’écriture de Beckett. C’est surtout cette écriture-là qui m’a beaucoup marquée. Il « Je connais Groosland Chorégraphie Maguy Marin 13 – 15 mars avec Maguy Marin écrit beaucoup sur le corps. Ses corps sont tous en difficulté, avec des problèmes ; soit pour Kader Belarbi Au ThéâtredelaCité / 1 h 30 (avec entracte) Présenté avec le Théâtre du Capitole Si j’ai été amenée à mélanger ces disciplines, c’est parce que j’ai pu rencontrer d’autres artistes ; marcher, soit pour s’asseoir, soit ils sont enter- rés… Cette vision de Beckett m’a justement depuis longtemps. • Ha ! Ha ! Maguy Marin De des metteur.re.s en scène, des musicien.ne.s qui faisaient cette chose transgenre qui n’était pas donné envie de travailler sur le corps différem- ment, de rompre avec le travail chorégraphique Je me suis À 13 et 14 avril l’Usine à Tournefeuille / 1 h 15 régalée à travailler qui embellie, magnifie les corps : la perfor- Présenté avec l’Usine vraiment de la danse, mais où le corps, le rythme, mance, la jeunesse, la souplesse. J’ai eu envie de la musique et le jeu étaient centraux. C’étaient • Ligne de crête travailler à l’inverse de ça et l’écriture de Beckett des gens de théâtre qui travaillaient beaucoup sur le corps, plutôt que des chorégraphes. me l’a permis. avec lui De Maguy Marin 22 – 24 mai En 1970, La dernière création de Maguy Marin est Ligne de crête : une vision cynique comme interprète. Au Création théâtre Garonne / 1 h environ Accompagné par et présenté avec le ThéâtredelaCité, Maguy Marin, jeune danseuse d’opéra est une des premières inscrites à l’école Mudra, de la société de consommation, inspirée par l’essai Capitalisme, désir et servitude Je reconnais, le théâtre Garonne et La Place de la Danse créée par Maurice Béjart. Maurice Béjart est très exigent dans son travail. de Frédéric Lordon. C’est un économiste et un philosophe, qui tra- dans la façon dont …MAIS Il a fondé cette école, Mudra, dans laquelle justement les disciplines étaient poreuses entre vaille sur Spinoza. J’ai une passion pour Spinoza et le marxisme. Il m’éclaire sur le monde et il mène le Ballet PA S S E U L E M E N T elles. C’est Spinoza qui dit qu’on ne sait pas ce qu’un corps peut. En fait, c’est vrai, on ne sait arrive à me faire penser les choses, alors même qu’on a beaucoup de mal à le faire, car elles sont du Capitole, • Cours de danse ouvert au public (à partir de 7 ans) son exigence pas de quoi il est capable. Je suis assez fascinée devenues très complexes et très compliquées. 9 mars / de 12 h 15 à 13 h 30 par la façon dont on est marqué par son propre En fait, ce n’est pas si compliqué que cela : il y a Au ThéâtredelaCité corps et comment on vit avec ce corps. C’est artistique, son écoute, Théâtre du Capitole Avec le toujours cette question de ceux qui ont et celle justement ce qui m’intéresse : travailler sur des Renseignements : 05 61 22 31 32 de ceux qui n’ont pas. Ces questions restent corps qui ne sont pas forcément faits pour être sur un plateau. irrésolues et se re-posent sans cesse. Elles me font réfléchir et travailler. Mes pièces sont le sa générosité, • Carnet de danse (à partir de 10 ans) En 1981, Maguy Marin crée May B. Mal reçue à sa sortie, résultat d’une tentative de mise en forme de ces questions sans réponse. son sens Démonstrations et débats commentés par des danseur.se.s, des chorégraphes et des artistes invité.e.s autour de Partage de danses – cette chorégraphie est aujourd’hui considérée comme un chef d’œuvre. Propos recueillis par Mathieu Caburet de la troupe... » Marin/Soto/Belarbi 9 mars / de 19 h à 20 h Au ThéâtredelaCité May B est une pièce que j’ai faite assez jeune. pour Entrée Libre, émission diffusée sur France 5 Avec le Théâtre du Capitole Ça faisait une dizaine d’année déjà que j’avais le 14 décembre 2018 Maguy Marin Renseignements : 05 61 22 31 32 • Rencontre Avec les chorégraphes Kader Belarbi, Cayetano Soto et Maguy Marin 12 mars / 18 h Au ThéâtredelaCité Avec le Théâtre du Capitole Entrée libre sur réservation : 05 34 45 05 05 • Projection Maguy Marin, l’urgence d’agir de David Mambouch 12 mars / 20 h 30 À La Cinémathèque de Toulouse, en présence de Maguy Marin, David Mambouch et Kader Belarbi Dans le cadre de Danse à la Cinémathèque en partenariat avec La Cinémathèque de Toulouse et Le Ballet du Capitole Renseignements : 05 62 30 30 10 • Conférence « Organiser le pessimisme ». La danse politique de Maguy Marin 14 mars / 19 h À l’ Université Toulouse Jean Jaurès Avec La Place de la Danse et l’ Isdat spectacle vivant Entrée libre, dans la limite des places disponibles : 05 61 59 98 78 • Journée d’étude « Maguy Marin et... : L’artiste et ses doubles » 15 mars / de 9 h à 18 h À l’ Université Toulouse Jean Jaurès Avec La Place de la Danse et LLA-CRÉATIS Université Toulouse Jean Jaurès Entrée libre, dans la limite des places disponibles : 05 61 59 98 78 • Démonstration scolaire Rencontres et démonstrations commentées pour inviter les plus jeunes à découvrir la danse, son histoire, ses créateur.rice.s et sa technique. 15 mars Au ThéâtredelaCité Renseignements : 05 62 27 62 25 (réservé aux scolaires) • Projection de May B Projection de la pièce filmée en présence de Maguy Marin, David Mambouch et Kader Belarbi. 21 mai / 20 h 30 À La Cinémathèque de Toulouse Dans le cadre de Danse à la Cinémathèque en partenariat avec La Cinémathèque de Toulouse et Le Ballet du Capitole Renseignements : 05 62 30 30 10 Groosland © David Herrero
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