Prix 2022 Diversité dans les formations, unité dans la réussite
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Anfh – Service communication Design et coordination éditoriale : Atelier Marge Design Reportages : Nolwenn Le Jannic Photographies : Clément Savel Impression : Decombat, juin 2022
Prix Anfh édition 2022 Diversité dans les formations, unité dans la réussite Mettre en place des formations originales et de qualité peut être l’apanage de tous types d’établissements, de services, de personnels et de sujets... comme le démontrent les lauréats de la quinzième édition du prix Anfh. Ainsi, deux Ehpad sont distingués pour leurs démarches fort différentes. Celui d’Argonne (Grand Est) obtient en effet le Grand prix pour avoir mis sur pied une VAE aide-soignant hybride. Une réponse innnovante face au manque de personnel qualifié en Ehpad, qui permet de faire monter en compétences des agents déjà présents dans les établissements. L’Ehpad de Comines (Hauts- de-France) reçoit quant à lui le prix « Métiers et compétences sociales et médico-sociales » pour une initiative originale : un jeu de société pour former aux normes HACCP. Le sujet, parfois un peu aride, est ainsi assimilé bien plus facilement par les agents… et les services vétérinaires eux-mêmes ont noté l’amélioration des pratiques. Dans les établissements de santé mentale, la formation est également fon- damentale et l’EPSM de Charcot (Bretagne) a décidé d’en consacrer une à la prise en charge de l’urgence vitale. Le moyen ? La simulation. Une technique pédagogique éprouvée et reconnue qui permet de se préparer au mieux à faire face à des situations par nature stressantes. C’est d’ailleurs à la simula- tion qu’a également fait appel le centre hospitalier de Béziers (Occitanie), là encore pour la gestion d’une urgence vitale : la réanimation du nouveau-né en salle de naissance. Dans un cas comme dans l’autre, l’objectif est de former les soignants régulièrement afin d’entretenir la mémoire des procédures et les automatismes des gestes… et d’assurer au final une prise en charge plus sereine et plus efficace. Enfin, les enfants sont au cœur de la formation « Mauvais traitement à l’en- fance : dépister et soigner », déployée à l’hôpital Nord-Ouest, à Villefranche- sur-Saône (Auvergne-Rhône-Alpes). Des outils concrets, un langage commun aux différents corps de métier et une collaboration accrue entre ceux-ci en ont émergé, là encore aux bénéfices des patients. Car sous la diversité des sujets et des traitements se cache une constante à tous les lauréats : leurs actions ont eu et ont encore un impact positif réel sur la pratique de leurs personnels et donc au final, sur la prise en charge de leurs patients. Et c’est bien là tout l’enjeu de la formation continue dans la Fonction publique hospitalière.
Le palmarès Édition 2022 Grand prix Prix DPC médical Prix DPC médical Ehpad d’Argonne, et paramédical et paramédical en Meuse (Grand Est) Centre hospitalier EPSM Sud Bretagne-Charcot, de Béziers (Occitanie) à Caudan (Bretagne) « VAE hybride » « Simulation à la « Gestion d’une La pénurie d’aides-soignants n’épargne pas les Ehpad du GCSMS prise en charge urgence vitale Meuse. Pour y faire face, les éta- des situations en psychiatrie » blissements ont décidé de puiser dans les forces vives déjà dans la d’urgences Les urgences vitales ont beau être place : leurs Agents des services hospitaliers qualifiés (ASHQ). En vitales d’un peu fréquentes en psychiatrie, les soignants doivent quand même mettant sur pied une VAE hybride, nouveau-né parfois y faire face. dotée d’un solide accompagne- ment, ils leur permettent de en salle de Le défi est donc de pouvoir leur offrir suffisamment de pratique et valoriser leur expérience profes- sionnelle et de la transformer en naissance » de maîtrise autour des premiers secours pour que ces situations diplôme d’État d’aide-soignant. exceptionnelles soient prises en Au centre hospitalier de Béziers, Et fidélisent ainsi leurs agents tout charge efficacement et avec le une pédiatre et une puéricultrice en répondant à leurs besoins. moins de stress possible. L’EPSM ont pris en main la formation de Prochaine étape : y associer l’ap- Charcot, à Caudan, a trouvé une leurs collègues à la réanimation prentissage pour multiplier encore solution : la formation par simula- des nouveau-nés. L’objectif, les les recrutements locaux. tion, qui permet un entraînement aider à surmonter le stress généré par ces situations rares et exi- régulier dans des conditions → p. 5 proches du réel. Et cela fonctionne. geantes. Le moyen : la simulation. Depuis, les personnels commu- niquent mieux, sont mieux prépa- → p. 17 rés… et la prise en charge s’est améliorée. La formation, qui participe au DPC, vise à être dispensée régulièrement à tous les membres du pôle femme-mère- enfant. → p. 11 2
Prix Métiers et Prix Amélioration Paroles de lauréats compétences sociales de la qualité des soins Prix 2022 et médico-sociales Hôpital Nord-Ouest, Ehpad Les Fleurs de la Lys, à Villefranche-sur-Saône → p. 34 à Comines (Hauts-de-France) (Auvergne-Rhône-Alpes) « Les normes « Mauvais Prix Anfh HACCP traitement Pour qui, pourquoi ? en s’amusant » à l’enfance : → p. 36 S’amuser autour des normes dépister HACCP ? C’est possible ! Si le sujet et soigner » semble ardu, les professionnelles de l’Ehpad Les Fleurs de la Lys, à Détecter les signes, parfois infimes, Comines, ont trouvé le moyen de d’une enfance maltraitée : pour les le rendre ludique et digeste en personnels hospitaliers, la tâche adaptant un jeu de société : le Resto’ est ardue et la peur de se tromper Crobe. Un succès auprès des est un véritable frein. Alors l’hôpi- agents… et même des services tal Nord-Ouest a décidé de fournir, vétérinaires. De quoi motiver les via une formation, un socle com- porteuses de projet à créer bientôt mun et des outils à tous les person- leur propre jeu sur d’autres sujets. nels de son pôle femmes-enfants. Le but ? Développer leurs compé- → p. 23 tences, favoriser leur coopération et au final, améliorer la prise en charge des jeunes patients. Le dispositif porte ses fruits : depuis deux ans, le regard des profession- nels sur la protection de l’enfance a changé à l’hôpital. → p. 29 Reportages Retrouvez les reportages sur les lauréats en vidéo sur le site de l’Anfh → www.anfh.fr 3
Grand Prix Ehpad d’Argonne, Groupement de coopération sociale et médico-sociale, en Meuse (Grand Est) « VAE hybride » La pénurie d’aides-soignants n’épargne pas les Ehpad du GCSMS Meuse. Pour y faire face, les établissements ont décidé de puiser dans les forces vives déjà dans la place : leurs ASHQ. En mettant sur pied une VAE hybride, dotée d’un solide accompagnement, ils leur permettent de valoriser leur expérience professionnelle et de la transformer en diplôme d’État d’aide-soignant. Et fidélisent ainsi leurs agents tout en répondant à leurs besoins. Prochaine étape : y associer l’apprentissage pour multiplier encore les recrutements locaux. 5
Grand prix D’ASHQ à aide-soignant, une VAE hybride pleine d’atouts Le GCSMS Meuse « C’était une formation vraiment enrichissante présents dans les établissements pour les faire en chiffres et très bien encadrée. Donc si des collègues ont évoluer vers le métier d’aide-soignant. Et c’est — envie de se lancer, qu’elles n’hésitent pas ! » Ce ainsi que la VAE AS hybride a été mise sur pied. 2 320 message enthousiaste est délivré par Aline Urs- La première promotion, entrée en septembre lits et places prung, aide-soignante à l’Ehpad d’Argonne, à 2020, compte une vingtaine d’Agents des ser- — Varennes-en-Argonne. Et la formation dont vices hospitaliers qualifiés (ASHQ). Ceux-ci ont 1 370 elle parle est celle qui lui a permis d’accéder été sélectionnés selon deux critères : avoir fait agents — justement aujourd’hui à ce métier : une VAE fonction d’aide-soignant pendant au moins 10 (Validation des acquis de l’expérience) hybride 1 607 heures, comme l’impose la règlementation destinée à obtenir le diplôme d’État d’aide- autour de la VAE… et être assez motivés pour Ehpad publics — soignant. retourner sur les bancs de l’école. Ce qui n’em- 1 La VAE, dispositif qui existe depuis une ving- pêche pas certaines craintes : « J’ai arrêté les établissement taine d’années, permet de transformer une études à 18 ans et j’étais ASHQ au sein de l’Ehpad social et médico- expérience professionnelle ou personnelle en depuis treize ans quand on m’a proposé la for- social diplôme. Mais l’originalité de la formation du mation, illustre Aline Ursprung. Alors j’ai dit GCSMS (Groupement de coopération sociale “oui, j’y vais” mais j’avais quand même peur de L’Ehpad et médico-sociale) Meuse réside dans son côté ne pas réussir à suivre les cours, d’être perdue ». d’Argonne « hybride » : la VAE devient une démarche d’éta- Heureusement, l’encadrement est là. en chiffres blissement lors de laquelle les candidats sont — préparés en groupe et bénéficient d’un accom- Un accompagnement sur mesure 3 pagnement pour la réalisation de leur dossier, La formation consiste en premier lieu en quatre sites — d’une formation théorique à certains modules mois d’accompagnement pour aider à la réali- 217 et de stages. Un outil unique, né de la grève sation du livret 1 de la VAE, un dossier qui ras- nationale des aides-soignants en janvier 2018. semble le parcours du candidat. Ensuite, ce lits et places — « Suite à celle-ci, il y a eu une fuite de nos agents dernier prépare le livret 2, qui doit apporter la 185 vers les hôpitaux ou le domicile et nous nous agents sommes retrouvés en grande difficulté, rappelle Sylvie Bousselet, directrice de l’Ehpad d’Ar- « En mai 2018, nous gonne et secrétaire générale du GCSMS Meuse. En mai 2018, nous avions à peu près 40 % de avions à peu près postes vacants d’aides-soignants dans les dix Ehpad du GCSMS. » 40 % de postes vacants Page précédente d’aides-soignants Manipulation Indispensable motivation d’un patient, un La directrice prend alors l’initiative d’aller frap- dans les dix Ehpad geste désormais réalisable par les per aux portes de l’IFAS (Institut de formation d’aides-soignants) de Verdun, de l’ARS, du du GCSMS. » ASHQ devenus aides-soignants département et de la région. Son idée : réfléchir Sylvie Bousselet, secrétaire générale via la VAE. à une formation à proposer aux agents déjà du GCSMS Meuse 6
Stéphanie Gérard Sylvie Bousselet Aline Ursprung Peggy Foret Nathalie Winiger, aide-soignante directrice de aide-soignante administratrice du coordinatrice l’Ehpad d’Argonne GCSMS Meuse pédagogique des et secrétaire IFSI-IFAS de Verdun générale du Rémy Chapiron, GCSMS Meuse directeur des IFSI-IFAS de Verdun et coordinateur pédagogique du GHT Cœur preuve de l’expérience acquise à travers la des- cription de son travail et de ses compétences. « La formation Grand Est Pour mettre là encore toutes les chances de leur fidélise nos agents côté, les ASHQ partent pendant six mois à l’IFAS, où ils intègrent la promotion des aides- en leur offrant une soignants en formation initiale afin de suivre trois modules. « Les agents acquièrent ainsi des reconnaissance compétences de cœur de métier, centrées sur le et une montée soin, pour lesquelles il leur faut vraiment une formation », explique Nathalie Winiger, coor- en compétences. » dinatrice pédagogique des IFSI-IFAS de Verdun. Peggy Foret, administratrice du GCSMS Meuse Certains candidats, ayant des blocages à l’écrit ou ne sachant pas utiliser les outils informa- tiques, bénéficient en plus d’un accompagne- compétences. Des personnels éloignés de l’école ment individuel, voire de la mise à disposition obtiennent ainsi un diplôme d’État. Elle répond de matériel par leur établissement. « Nous avons également aux besoins du territoire en diplômant été très bien soutenues et accompagnées, y com- de nouveaux aides-soignants. Et enfin, les nou- pris par notre direction, qui nous a donné tous velles aides-soignantes étant auparavant ASHQ, les moyens de réussir », estime ainsi Stéphanie elles fluidifient la communication entre les Gérard, aide-soignante fraîchement diplômée. équipes. » « Le dispositif permet aussi de sécuriser Les futurs aides-soignants effectuent également l’offre de soins, ajoute Nathalie Winiger. Nous deux stages, de cinq semaines chacun, dans accompagnons des agents qui ont souvent tra- d’autres services, dont médecine-chirurgie- vaillé longtemps avec des personnes âgées ou obstétrique, afin d’observer l’ensemble des dépendantes et leur apprenons à repérer les zones facettes du métier. de fragilité. » Et le dispositif est un succès : 100 % des agents Fort de cette réussite, le GCSMS Meuse a fait de la première promotion ayant suivi la forma- entrer 12 agents dans la deuxième promotion, tion jusqu’au bout ont obtenu leur diplôme ! en septembre 2021, et une troisième promotion « C’est une étape valorisante et une satisfaction de 20 candidats doit démarrer en septembre d’arriver au même niveau que nos collègues aides- 2022. Une quatrième est attendue en février 2023. soignantes. Et puis notre nouveau statut s’accom- « Nous allons accélérer le rythme des entrées en pagne d’une augmentation de salaire », apprécie formation, notamment parce que les candidats Stéphanie Gérard. ne manquent pas, se réjouit Sylvie Bousselet. Si au départ, les agents étaient un peu frileux, ils Trois promotions en préparation ont vu les premiers résultats et se sont ensuite Pour Peggy Foret, administratrice du GCSMS rapidement saisis du dispositif. » Résultat : 40 Meuse, les avantages du système sont nom- nouveaux aides-soignants pourraient être formés breux : « La formation fidélise nos agents en leur chaque année. De quoi soulager la tension sur offrant une reconnaissance et une montée en le métier dans le territoire et les établissements. 7
↑ Entretenir le vivier de futurs diplômés également chercher à diversifier notre offre de Les futurs et se tourner vers l’apprentissage formation en nous tournant vers l’apprentis- aides-soignants Le nombre de candidats n’est d’ailleurs pas un sage », annonce Peggy Foret. Ouvert aux métiers bénéficient d’un soutien et d’un obstacle à la montée en puissance du dispositif… d’infirmiers et d’aide-soignant, « il ne s’agit pas accompagnement grâce à une démarche ingénieuse : les agents d’une formation aménagée, précise Rémy Cha- soigné au sein de en formation sont remplacés par des deman- piron, directeur de l’IFSI-IFAS de Verdun et leur établisse- deurs d’emploi, formés pendant deux mois au coordinateur pédagogique du GHT Cœur ment. métier d’ASHQ en établissements et services Grand Est. Le cursus est le même que dans la médico-sociaux (ESMS). Ceux-ci ont alors formation initiale mais les étudiants sont sala- l’occasion de faire fonction d’aide-soignant riés par l’établissement donc y effectuent une pendant 1 607 heures et peuvent à leur tour partie de leurs stages et y travaillent une partie prétendre à la VAE AS hybride. « Nous entrons de leurs vacances. » Pour les établissements qui dans un véritable cercle vertueux : d’un côté nous ont du mal à recruter dans le contexte actuel, fidélisons nos agents et de l’autre, nous attirons ce système permet d’avoir des renforts. Les de nouveaux personnels et créons un vivier de apprentis, eux, touchent un salaire et pour les futurs aides-soignants diplômés », se félicite futurs aides-soignants, la signature du contrat Peggy Foret. Certains remplaçants de la pre- permet d’intégrer l’IFAS sans avoir à passer par mière promotion vont ainsi faire partie de la la sélection d’entrée. « C’est un autre levier pour troisième ! répondre aux besoins du territoire, poursuit Le GSCSM Meuse ne compte évidemment pas Rémy Chapiron. Et il peut prétendre aux mêmes s’arrêter là : « La VAE AS hybride se poursuivra objectifs que la VAE hybride : attirer et fidéliser aussi longtemps que nécessaire et nous allons les agents. » 8
↑ L’action en bref Public Pour prétendre à → ASHQ des établissements la VAE, il faut avoir été faisant-fonc- Objectifs du GCSMS Meuse ayant fait tion aide-soignant → Fidéliser les agents des établisse- fonction d’aide-soignant pendant pendant 1 607 ments en leur offrant reconnais- au moins 1 607 heures. heures. sance et montée en compétences. → Demandeurs d’emploi. → Attirer de nouveaux personnels dans les Ehpad pour entretenir le vivier de futurs diplômés. Programme → 4 mois d’accompagnement pour la réalisation du livret 1. → 6 mois de formation et de stage entre l’IFAS et les établissements hospitaliers pour la préparation du livret 2. → 2 mois de formation pour les demandeurs d’emploi. 9
Prix DPC Médical et paramédical Centre hospitalier de Béziers (Occitanie) « Simulation à la prise en charge des situations d’urgences vitales d’un nouveau-né en salle de naissance » Au CH de Béziers, une pédiatre et une puéricultrice ont pris en main la formation de leurs collègues à la réanimation des nouveau-nés. L’objectif : les aider, grâce à la simulation, à surmonter le stress généré par ces situations rares et exigeantes. Depuis, les personnels communiquent mieux, sont mieux préparés… et la prise en charge s’est améliorée. Dans le cadre du DPC, la formation vise à être dispensée régulièrement à tous les membres du pôle femme-mère-enfant. 11
Prix DPC Médical et paramédical La simulation pour aider à gérer le stress de la réanimation Le CH de Béziers Pour être efficace, la réanimation d’un nouveau- en santé avec application pédiatrique ». À leur en chiffres né en salle de naissance doit être précoce et retour, elles ont précisé, avec l’organisme de — rapide. La maîtrise des procédures et l’automa- formation, la forme et le contenu de ce qu’elles 1 162 tisme des gestes sont donc indispensables. Mais souhaitaient dispenser : une journée d’apports lits et places dans les maternités où des réanimations ne sont théoriques et pratiques grâce à la simulation répartis sur 3 sites que rarement nécessaires, faute de pratique, pour mieux prendre en charge la réanimation — cette maîtrise tend à disparaître. Lorsque la des nouveau-nés. Une initiative qui arrivait à 2 784 situation se présente, elle entraîne alors stress point nommé : depuis 2020, le centre hospita- professionnels et insécurité pour le personnel. Jusqu’en 2016, lier a déployé un service maternité d’un niveau hospitaliers les pédiatres du CH de Béziers essayaient de 2B, et le nombre de prématurés a augmenté. — former leurs collègues mais ces tentatives « La formation par simulation en santé est une 30 puéricultrices n’avaient lieu que de manière informelle et irré- technique pédagogique reconnue par la Haute 38 sages-femmes 40 auxiliaires gulière, et ne répondaient pas totalement aux autorité de santé, qui permet d’exposer les appre- de puériculture demandes des soignants. « J’avais besoin d’une nants à des situations d’urgence vitale complexes 8 pédiatres conduite à tenir fixe, d’un cadre fixe et de points- et variées, sans risque pour le patient, précise dans le pôle clés à connaître et à avoir en tête pour être plus Bettina Borm Sfeir. En plus, tous les soignants femme- mère-enfant efficace et plus sereine lors des réanimations peuvent participer, jouer leur propre rôle et évo- — néonatales », se souvient ainsi Liza Rougier, luer directement sur leur lieu de travail. Nous 1 500 sage-femme au service maternité. sommes ainsi le plus proche possible des condi- naissances La réponse lui a été apportée par deux de ses tions réelles. » Les objectifs de la formation sont par an en collègues : Bettina Borm Sfeir, pédiatre, et Julia ambitieux : acquérir connaissances théoriques moyenne Loubet, puéricultrice. Celles-ci ont en effet et compétences techniques ; connaître le maté- décidé de mettre sur pied une véritable forma- tion à la réanimation en salle de naissance, en s’appuyant sur la simulation. « Le Dr Borm Sfeir et Mme Loubet connaissaient les effets positifs « La formation par de la simulation sur site sur l’ensemble de la simulation en santé qualité de travail de l’équipe, retrace Dominique Pouget, cadre de santé, chargée de formation est une technique continue. Mais pour l’appliquer, il leur fallait de la méthode. » pédagogique qui Au plus près des conditions réelles permet d’exposer En 2016, grâce au plan de formation et au sou- les apprenants à des Page tien du Dr Pierre Callamand, chef de service précédente de pédiatrie et président du pôle femme-mère- situations, sans risque Entraînement à la réanimation enfant, et de Michelle Domergue, cadre supé- rieure des soins, les deux soignantes ont donc pour le patient. » sur le mannequin d’un nouveau-né. suivi un diplôme universitaire en « simulation Bettina Borm Sfeir, pédiatre 12
Bettina Dominique Pouget Julia Loubet Liza Rougier Marjorie Vigroux Borm Sfeir cadre de santé, puéricultrice sage-femme au auxiliaire pédiatre au pôle chargée de formation au pôle service maternité de puériculture au femme-mère- continue femme-mère-enfant service maternité enfant riel et tous les équipements de la salle de nais- sance ; renforcer le travail d’équipe ; améliorer « Au quotidien, on la qualité et la sécurité des soins au profit de voit une amélioration l’enfant et des professionnels… pour in fine optimiser la prise en charge de la réanimation et une harmonisation des nouveau-nés en salle de naissance. de nos pratiques La communication au cœur avec une application de l’amélioration de la prise en charge La matinée de formation est consacrée aux ap- rigoureuse de l’algori- ports théoriques basés sur les recommandations européennes de la réanimation du nouveau-né thme de la réanimation en salle de naissance. Puis, les professionnels du nouveau-né. » participent à des ateliers pratiques pour s’entraî- ner aux gestes techniques sur un mannequin Julia Loubet, puéricultrice (ventilation, pose de cathéter veineux ombilical, compressions thoraciques…). L’après-midi, des en salle de naissance. Car si une détresse respi- scenarii (comme une détresse respiratoire chez ratoire arrive, je sais quels gestes appliquer, dans un nouveau-né à terme ou chez un prématuré) quel ordre, ce que je dois dire au médecin quand sont déployés pour le groupe pluridisciplinaire je l’appelle pour anticiper le soin derrière... Je des participants, qui rassemble environ huit me sens plus efficace, j’ai l’impression d’avoir soignants. Chacun joue alors son propre rôle. plus de compétences et d’assurer une meilleure « Le choix des scenarii s’est fait par rapport aux prise en charge. » Elle apprécie également l’ac- situations que nous pouvons rencontrer et qui cent mis sur la communication entre les diffé- peuvent nous mettre en difficulté », précise Julia rents acteurs de la réanimation : « On la travaille Loubet. Briefing et debriefing sont l’occasion beaucoup et tant mieux car c’est ce qui nous d’échanger et de refaire le point, avant que cha- manquait. En communiquant mieux, on gagne cun reparte, rassuré. en temps et en efficacité et le stress diminue. » « La formation m’a appris à trouver ma place au sein de l’équipe, à savoir quels gestes effectuer Maintenir la formation en priorité, ce qu’il faut préparer, estime Mar- pour maintenir les bonnes pratiques jorie Vigroux, auxiliaire de puériculture. Le La formation est tellement bénéfique que le stress est toujours présent en amont mais une seul reproche que lui font les participants… est fois que chacun fait ce qu’il a à faire, on se sent qu’ils aimeraient pouvoir la suivre plus souvent. plus à l’aise, mieux équipé pour faire face à la Trente sessions ont été organisées en salle de situation. Nous n’avons pas besoin de réfléchir, naissance depuis 2017, permettant à Marjorie les gestes se font automatiquement et c’est plus Vigroux d’en bénéficier trois fois et à Liza Rogier simple. » Liza Rougier abonde : « Depuis la for- de la suivre deux fois, mais toutes deux sont mation, je n’ai plus d’appréhension à travailler unanimes : il faudrait pouvoir se remettre à jour 13
↑ au moins tous les ans. Ce dont convient Bettina depuis début 2022. « Cette visibilité et l’engage- Les personnels Borm Sfeir : « Les études montrent qu’au bout de ment des deux formatrices a eu un effet boule de ayant en charge 6 à 12 mois, les connaissances acquises com- neige au sein de l’hôpital, note Dominique Pou- les nouveau-nés effectuent leur mencent à disparaître. Nous voulons donc orga- get. D’abord, dès 2018, la formation par simu- travail dans un niser des sessions très régulièrement, au moins lation pour la prise en charge des urgences vitales climat plus serein six fois par an, pour former en continu l’ensemble a été élargie au service des urgences pédiatriques. depuis la mise en du personnel. » Et cette année, au cours des entretiens de forma- place de la formation. Les deux formatrices maintiennent d’ailleurs tion, nous avons trois demandes de DU de simu- elles aussi leurs connaissances à jour, tant sur lation en santé ! C’est une très bonne chose : avoir le plan de la réanimation, en assistant notam- des formateurs internes entraîne une dynamique, ment à des congrès et formations, que sur la une remise en question et un vrai maintien des pédagogie par simulation, via des stages en compétences. » centres de simulation en santé. Et tout cela Le centre hospitalier n’a pour l’instant pas fait porte ses fruits : « Au quotidien, on observe une le choix d’ouvrir la formation aux établisse- amélioration et une harmonisation de nos pra- ments extérieurs. « Car l’un de ses points forts tiques avec une application rigoureuse de l’algo- est qu’elle se déroule justement sur le lieu de tra- rithme de la réanimation du nouveau-né », se vail des personnes formées, dans des locaux félicite Julia Loubet. qu’elles connaissent et avec une équipe pluridis- Conséquence logique de ce succès : la formation ciplinaire au complet, poursuit Dominique est inscrite au plan de formation du centre hos- Pouget. En revanche pourquoi ne pas l’exporter pitalier, et, reconnaissance supplémentaire, et aller la proposer directement dans les établis- elle est proposée comme validation du DPC sements intéressés ? » La piste est à l’étude… 14
↑ L’action en bref Depuis 2017 Préparation du → 30 sessions pour la réanimation matériel avant Objectifs en salle de naissance. une séance de → Améliorer les connaissances → 40 soignants formés chaque formation par simulation. théoriques et les compétences année. techniques des personnels en matière de réanimation des Depuis 2019 nouveau-nés en salle de naissance. → 10 sessions pour la prise en → Renforcer le travail d’équipe. charge des urgences pédiatriques. → Optimiser la prise en charge de la → 55 soignants formés réanimation des nouveau-nés en en deux ans. salle de naissance. Programme → 1 journée de formation Public par simulation avec apports Par session : théoriques, ateliers pratiques → 1 pédiatre ; et mises en scène de scenarii. → 1 interne ; → 2 sages-femmes ; → 2 puéricultrices ; → 2 auxiliaires de puériculture. 15
Prix DPC Médical et paramédical EPSM Sud Bretagne-Charcot, à Caudan (Bretagne) « Gestion d’une urgence vitale en psychiatrie » Les urgences vitales ont beau être peu fréquentes en psychiatrie, les soignants doivent quand même parfois y faire face. Le défi est donc de pouvoir leur offrir suffisamment de pratique et de maîtrise autour des premiers secours pour que ces situations exceptionnelles soient prises en charge efficacement et avec le moins de stress possible. L’EPSM Charcot, à Caudan, a trouvé une solution : la formation par simulation, qui permet un entraînement régulier dans des conditions proches du réel. Et cela fonctionne. 17
Prix DPC médical et paramédical Urgence vitale : la simulation au secours de la psychiatrie L’EPSM en C’est un problème d’équilibre : « D’un côté nous internes. Le hic ? « Depuis 2009, les professionnels chiffres ne traitons pas d’urgence vitale tous les jours, doivent obtenir l’AFGSU, l’Attestation de forma- — mais de l’autre, nous y sommes confrontés assez tion aux gestes et soins d’urgence. Or pour pouvoir 10 200 régulièrement pour devoir être préparés », expose être formateur AFGSU, il faut avoir travaillé patients pris en Morgane Richard, infirmière en gérontologie dans un service d’urgence et de réanimation et charge — psychiatrique. En effet, les effets secondaires que l’établissement dispose d’un service d’urgence 8 lits des traitements dispensés dans les établisse- ou de réanimation, ce qui n’est pas le cas de notre pour les 0 à 16 ans ments psychiatriques peuvent parfois entraîner EPSM, ni de nos formateurs, poursuit Frédéric — des pathologies somatiques. Et d’une manière Bierent. Il n’était donc plus possible d’organiser 107 lits au pôle secteur générale, les patients ont plus de risques cardio- cette formation comme avant. » adulte urgence vasculaires que la population moyenne. Mor- 16 à 70 ans gane Richard souligne ainsi les cas de phlébites, Allier pratique procédurale et simulation — d’embolie, d’arrêts cardio-respiratoires ou, dans Il faut donc repenser l’action et l’EPSM en pro- 79 lits et un autre registre, de fausses routes. « Notre éta- fite pour se fixer un double objectif : permettre 103 places d’hospitalisation blissement est à une quinzaine de minutes du aux professionnels de disposer d’une formation de jour Groupe hospitalier de Bretagne Sud, l’établisse- approuvée par le CESU 35 (Centre d’enseigne- au pôle de ment support de notre territoire, précise Frédé- ment des soins d’urgence) et créer un contenu réhabilitation ric Bierent, cadre de santé. Il faut que nos pro- spécialement adapté aux situations que les psychosociale 16 à 70 ans fessionnels puissent avoir un maximum d’outils agents sont susceptibles de rencontrer à l’EPSM. — et être formés à la gestion d’une urgence vitale Grégory Folou, alors cadre de santé, et Jean- 65 lits et en attendant les secours appropriés. » Marc Le Gac, ancien médecin somaticien à 12 places Ceux-ci bénéficiaient depuis 2006 d’un « recy- l’EPSM, devenu coordinateur médical du B3S d’hospitalisation clage » régulier, via le module PSC1 (Prévention (le centre de simulation en santé du Groupe de jour pour les plus de 70 ans et secours civique), dispensé par des formateurs hospitalier Bretagne Sud), se mettent à l’œuvre — pour bâtir une formation sur mesure. Ils sont 38 ETP rejoints par Frédéric Bierent, lors de son arrivée personnel médical « L’objectif est de à l’EPSM. L’idée se précise : la formation asso- ciera une journée à l’EPSM pour la pratique — 549 ETP travailler sur l’inter- procédurale à une demi-journée au B3S pour personnel soignant disciplinarité afin des mises en situation. La première est animée par les formateurs internes à l’EPSM : ils orga- — 872 agents d’optimiser le travail nisent des ateliers pratiques et des mises en situations pour rappeler aux participants les Page en équipe et la prise gestes et soins d’urgence (protection, alerte, précédente bilan avec la méthode ABCDE, etc.) et leur Massage en charge de l’urgence application en fonction des différentes situations cardiaque sur un mannequin lors vitale. » (malaises, obstruction des voies aériennes, vic- time consciente ou victime qui ne respire pas, d’une séance de formation. Pascal Chapelain, coordinateur pédagogique du B3S traumatismes, etc.). Le second temps repose sur 18
la simulation : par équipe pluridisciplinaire, les participants sont immergés dans deux ou trois « Cette formation scenarii mettant en scène des situations d’ur- permet d’aborder les gence vitale. « L’objectif est de travailler sur l’interdisciplinarité en abordant les facteurs situations d’urgence, humains et organisationnels afin d’optimiser le travail en équipe et la prise en charge de l’urgence stressantes par vitale en santé mentale », précise Pascal Chape- Morgane Richard infirmière en définition, avec plus lain, coordinateur pédagogique du B3S. de sérénité et de gérontologie Les sessions rassemblent sept participants psychiatrique (médecins, cadres de santé, infirmiers et aides- soignants). Depuis leur inscription dans le plan sécurité, en particulier de formation en 2017 (et sous programme DPC lors des gardes. » depuis 2019), elles ont déjà permis de former près de 300 professionnels. Dr Yves Petit, pédopsychiatre à l’EPSM Charcot Parés pour la réalité Une enquête menée en 2021 révèle la satisfac- « En tant que psychiatre, je suis peu confronté à Pascal Chapelain tion des soignants concernant la formation, la réanimation cardio-respiratoire et aux gestes coordinateur mais également ses bénéfices directs. Morgane d’urgence, illustre le Dr Yves Petit, pédopsy- pédagogique Richard, qui l’a suivie en mai 2021, s’est par chiatre à l’EPSM Charcot, formé en mars dernier. du B3S exemple retrouvée face à une urgence vitale en Pourtant, je dois les maîtriser et cette maîtrise septembre de cette même année et a pu réagir ne peut s’acquérir que par un entraînement avec efficacité. « C’était comme si la simulation régulier. Cette formation complète et d’un ex- se remettait en place dans ma tête, se souvient- cellent niveau permet d’aborder les situations elle. Appel au médecin, déclenchement du PTI d’urgence, stressantes par définition, avec plus – le dispositif d’appel d’urgence pour la protection de sérénité et de sécurité, en particulier lors des des travailleurs isolés –, les gestes… tout était gardes. Nous acquérons des réflexes et le fait de plus fluide. » travailler en équipe pluridisciplinaire entre Dr Yves Petit Sur du plus long terme, la formation offre éga- médecins, infirmiers, aides-soignants, permet pédopsychiatre lement aux participants du recul sur leur orga- à chacun de trouver sa place. » La simulation nisation et leur matériel. La gérontopsychiatrie offre ainsi la possibilité de s’approcher au plus a ainsi fait l’acquisition d’un nouvel aspirateur près des conditions réelles. Et pour cause : les de mucosités, a relocalisé les bouteilles d’oxy- scenarii proposés ont été établis à partir de gène dans le service, etc. « La formation m’a situations réellement rencontrées à l’EPSM par remise en alerte sur de nombreux points, des le passé. « Nous restons très réalistes et la simu- gestes aux procédures, en passant par le maté- lation ne se fait d’ailleurs qu’avec du matériel riel », résume Morgane Richard. Pour garder ce dont disposent réellement les soignants à Frédéric Bierent niveau de vigilance et de compétences, un rap- l’EPSM », note Frédéric Bierent. cadre de santé pel régulier est nécessaire. Le Dr Yves Petit 19
↑ estime ainsi que la formation devrait être renou- Chapelain. Pouvoir faire de la simulation in situ Mise en situation velée tous les ans… mais pour l’instant, les nous permettra de proposer des solutions entiè- réelle et analyse moyens ne le permettent pas. « Nous pouvons rement adaptées à l’établissement. » Les acteurs des pratiques. former 50 professionnels à l’année, explique de la formation réfléchissent également au Frédéric Bierent. Dans l’idéal, cela permettrait renouvellement des scenarii ou encore à l’achat de pouvoir proposer un recyclage à chacun de de matériel supplémentaire. « Les soignants nos agents tous les 3 ou 4 ans, mais avec les dif- nous demandent, par exemple, des bras à per- férentes contraintes, nous assurerons plutôt un fusion pour s’entraîner à la pose de voies, ce qu’ils renouvellement tous les 5 ans. » font peu au quotidien mais qui peut être utile dans une situation d’urgence vitale », détaille Objectif, simulation sur site Frédéric Bierent. Enfin, la collaboration entre Au-delà de la fréquence, une autre piste d’amé- les deux organismes ne s’arrête pas là : depuis lioration est à l’étude : amener la formation in cinq ans, le B3S profite de l’expertise de l’EPSM situ. La simulation, même si elle s’approche Charcot pour dispenser auprès des établisse- des conditions réelles, ne les imite pas tout à ments de santé du territoire et des internes en fait (salle, professionnels présents, etc.). L’EPSM psychiatrie une formation par simulation sur et le B3S souhaiteraient donc pouvoir la trans- le repérage et la prévention du risque suicidaire. poser sur le terrain, dans les locaux ou le parc Illustrant ainsi la complémentarité qui peut de l’EPSM Charcot. Une tentative a déjà été exister entre organismes de formation et éta- menée mais il reste des problèmes logistiques blissements de santé… et là, sans la simuler ! et techniques à surmonter. « Nous y arriverons car c’est une véritable volonté, annonce Pascal 20
↑ L’action en bref Public Séance de formation → Médecins, cadres de santé, collective à l’aide d’un mannequin patient. Objectifs infirmiers et aides-soignants. → Former les professionnels à la → 269 professionnels gestion d’une urgence vitale, dans de l’établissement formés les conditions les plus proches pour le moment. possibles du réel et en fonction du matériel à leur disposition à l’EPSM. Programme → Une journée de formation sur la pratique procédurale. → Une demi-journée de mise en situation au centre de simulation en santé B3S. 21
Prix Métiers et compétences sociales et médico-sociales Ehpad Les Fleurs de la Lys, à Comines (Hauts-de-France) « Les normes HACCP en s’amusant » S’amuser autour des normes HACCP1 ? C’est possible ! Si le sujet semble ardu, les professionnels de l’Ehpad Les Fleurs de la Lys, à Comines, ont trouvé le moyen de le rendre ludique et digeste en adaptant un jeu de société : le Resto’Crobe. Un succès auprès des agents… et même des services vétérinaires. De quoi motiver les porteuses de projet à créer bientôt leur propre jeu sur d’autres sujets. 1. Hazard Analysis and Critical Control Points ; en français, « Système d’analyse des risques et maîtrise des points critiques ». 23
Prix Métiers et compétences sociales et médico-sociales Les normes HACCP : presque un jeu d’enfant ! L’Ehpad « Puis-je consommer un produit dont la DLC est Quand on parle d’hygiène, c’est parfois lourd, on en chiffres dépassée depuis hier ? » « Non, parce qu’il peut pense systématiquement à des règles et des — y avoir un risque d’intoxication alimentaire. » contraintes. Le jeu rend tout ça plus accessible. » 238 « Exact. Même si à la maison on peut le faire, ici, Restait cependant à trouver le jeu qui puisse agents dont c’est interdit. Une DLC c’est une Date limite de répondre aux besoins de l’Ehpad… et Virginie environ 150 concernés par la consommation. Donc si elle est dépassée, on ne Hoedemaker déniche le Resto’Crobe, créé à préparation ou le donne pas le produit aux résidents. » destination des écoles hôtelières et des écoles service des repas Cet échange a lieu dans l’une des salles à man- de cuisine. La petite équipe fait alors part de — ger de l’Ehpad Les Fleurs de la Lys, à Comines. son idée de formation à la direction. capacité totale 220 résidents Sur la table, un plateau de jeu, des pions, des « Cette volonté d’action a été très bien perçue, en hébergement cartes et un sablier. Et autour de la table, sept d’autant qu’elle arrivait dans un contexte par- permanent agents de l’Ehpad (hôtelière, aides-soignantes, ticulier, se souvient Franck Masurelle, directeur — infirmières, aide-cuisine et cuisinière) accom- de l’établissement. La veille de ma prise de fonc- 2 pagnés par Virginie Hoedemaker, responsable tion en 2016, nous avions en effet eu une inspec- unités de vie hôtelière, et Céline Duprez, responsable de tion de la direction départementale de protection Alzheimer, 1 unité d’accueil de jour cuisine. Ce qui se déroule ici ? Une partie de des populations, qui s’est soldée par un avis défa- Alzheimer de 9 Resto’Crobe, le jeu de société qui permet de se vorable pour l’établissement concernant la tra- places, un pôle former aux normes d’hygiène HACCP en s’amu- çabilité, les normes en cuisine… Nous avions d’activités et de sant. Une formation née d’une réflexion des donc travaillé sur ces aspects et avions besoin de soins adaptés de professionnels de l’Ehpad. « Les normes HACCP ce genre d’initiative ! » 14 places et un service de soins sont nombreuses et draconiennes. Et lorsque j’ai Le jeu est commandé puis testé : certaines ques- infirmiers pris mes fonctions de responsable hôtelière au tions ne se révèlent pas adaptées à l’établisse- à domicile sein de l’Ehpad il y a quatre ans, j’ai réalisé que ment et d’autres manquent, alors les profes- de 90 places. pour qu’elles soient correctement appliquées, il fallait que les agents en comprennent le sens, retrace Virginie Hoedemaker. Je me suis alors « Quand on parle demandé comment intégrer ces normes, essen- d’hygiène, c’est tielles et obligatoires, sans que cela ne soit rébar- batif. Et j’ai pensé à un système de jeu puisque parfois lourd, on personnellement, je retiens plus facilement lorsque je m’amuse. » pense systématique- Un jeu « cousu main » pour l’Ehpad ment à des règles Sa démarche est rapidement soutenue par et des contraintes. Page Céline Duprez, Nathalie Ribeiro, infirmière précédente hygiéniste, et Céline Moens, pharmacienne et Le jeu rend tout Séance de formation à l’aide responsable hygiène. « Ce projet permettait d’aborder des sujets qui ne sont pas toujours ça plus accessible. » du jeu de société Resto’Crobe. simples de façon ludique, estime cette dernière. Céline Moens, responsable hygiène 24
Marina De Zorzi Franck Masurelle Laetitia Péral Virginie Céline Duprez aide-soignante directeur de responsable RH Hoedemaker responsable l’Ehpad Céline Moens responsable de cuisine pharmacienne hôtelière et responsable hygiène sionnelles à l’origine du projet ajustent les cartes et creusent les sujets autour des erreurs les plus « Chacun apprend fréquemment observées à l’Ehpad. forcément quelque En 2019, les sessions débutent et rassemblent tous les corps de métiers concernés de près ou chose ou au moins se de loin par la préparation et le service des repas aux résidents. Les équipes de cuisine et d’hôtel- remémore les bonnes lerie bien sûr, mais aussi les soignants. « Cer- pratiques. Car tains services disposent d’hôtelières, qui sont obligatoirement formées aux normes HACCP souvent, les erreurs tous les deux ans. Mais dans d’autres, ce sont les soignants qui prennent le relai des hôtelières, s’installent avec le explique Virginie Hoedemaker. Or leur métier, temps et il faut des c’est le soin et ils ne maîtrisent donc pas aussi bien les normes d’hygiène… alors qu’ils se doivent rappels pour retrouver eux aussi de les appliquer. » les bonnes habitudes. » Apprendre en s’amusant Céline Duprez, responsable de cuisine Deux équipes pluridisciplinaires, de quatre personnes maximum chacune, se retrouvent dans la formation, mais les personnels s’en autour du Resto’Crobe pour une formation de rendent moins compte ! » Le succès est tel que 2 heures, le temps de faire une ou deux parties. certains agents demandent d’eux-mêmes à Celles-ci se déroulent ainsi : Virginie Hoede- suivre ou à refaire la formation. « Ils nous ex- maker pose une question en lien avec un do- pliquent qu’elle leur fait du bien, qu’ils se sentent maine des normes HACCP. L’équipe peut choi- mieux après une telle piqûre de rappel, remarque sir de répondre directement ou demander la Céline Duprez. Chacun y apprend forcément proposition de choix multiples ; en cas de bonne quelque chose ou au moins se remémore les bonnes réponse, elle marque ainsi deux points dans le pratiques. Car souvent, c’est humain d’ailleurs, premier cas et un point dans le second… l’objec- les erreurs s’installent avec le temps et il faut des tif étant d’arriver sur la dernière case du plateau rappels pour retrouver les bonnes habitudes. » avant l’équipe adverse. Après chaque réponse, Céline Duprez apporte des compléments, ques- Déjà un tiers des personnels formé tionne les pratiques des professionnels et dis- Au cours de la première année, 55 profession- cute avec eux. « On a le droit de ne pas savoir, on nels, soit un tiers des effectifs concernés par la a le droit de se tromper et c’est d’ailleurs ce qui restauration, ont déjà pu être formés. Puis la est intéressant parce qu’alors on a l’explication, crise sanitaire est arrivée et le Resto’Crobe a dû précise la responsable de cuisine. Et très vite, temporairement être rangé au placard. Une l’envie de bien répondre prend largement le des- seule session a eu lieu en 2021. Pour pallier ce sus sur le côté amusant du jeu. On est vraiment manque, Virginie Hoedemaker a entre-temps 25
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