QUELLE REPRISE, QUELLE RELANCE DANS LES TERRITOIRES À LA SORTIE DU CONFINEMENT ? - ANALYSES ET PROPOSITIONS DE L'ADCF

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QUELLE REPRISE, QUELLE RELANCE DANS LES TERRITOIRES À LA SORTIE DU CONFINEMENT ? - ANALYSES ET PROPOSITIONS DE L'ADCF
QUELLE REPRISE,
QUELLE RELANCE DANS
 LES TERRITOIRES À LA
      SORTIE DU
   CONFINEMENT ?

      ANALYSES ET PROPOSITIONS DE
                           L’AdCF
QUELLE REPRISE, QUELLE RELANCE DANS LES TERRITOIRES À LA SORTIE DU CONFINEMENT ? - ANALYSES ET PROPOSITIONS DE L'ADCF
I - ANTICIPER LES IMPACTS ÉCONOMIQUES ET TERRITORIAUX DE LA
    CRISE PANDÉMIQUE POUR CIBLER LES MESURES
    Les incidences du Covid-19 (coronavirus SARS-                                     Pour sa part, l’institut Xerfi s’est efforcé
    CoV-2) sur l’économie réelle sont encore                                          de réaliser un premier calcul à partir d’une
    aujourd’hui très difficiles à déterminer avec                                     hypothèse de confinement de 45 jours (jusqu’à
    précision tant elles seront liées à la durée de                                   la fin avril). Environ 50 % du PIB français est
    la crise sanitaire, à l’efficacité des dispositifs de                             relativement abrité compte tenu du poids
    soutien mis en place dans un cadre national,                                      du secteur non marchand (administrations
    mais aussi aux actions coordonnées de relance                                     publiques) et de certains secteurs peu affectés
    au niveau mondial (FMI, G20…) et européen.                                        (immobilier). Par ailleurs, quelques secteurs
                                                                                      marchands qui subissent actuellement le
    Les incidences de moyen terme sur les marchés                                     choc pourront néanmoins compter sur des
    et les systèmes bancaires… font l’objet de                                        effets de report sur le reste de l’année, ou de
    multiples études et prévisions mais qui n’ont                                     rebond possible dans la durée. Il en est ainsi de
    qu’une valeur très relative tant que la crise                                     certaines filières industrielles. D’autres secteurs
    sanitaire durera. Ces questions doivent être en                                   (surtout de services) sont davantage concernés
    partie dissociées des travaux consacrés aux                                       par des pertes non récupérables, sans report
    impacts sur l’économie réelle qui commencent                                      possible (tourisme, activités culturelles, transport,
    à être estimés, à partir d’une analyse du double                                  restaurants…) qui pèsent environ 25 % du PIB.
    choc d’offre et de demande.                                                       Quelques effets de substitution ont lieu en ce
                                                                                      moment (e-commerce, livraisons à domicile,
    On peut déjà noter deux premières études                                          produits culturels en ligne…) mais ils ne
    d’impact réalisées par l’INSEE et l’OFCE sur la                                   compenseront pas les pertes.
    France. L’INSEE évalue l’impact d’un mois de
    confinement à environ une perte de 3 points de                                    Au total, l’économiste Olivier Passet (institut
    PIB. L’OFCE parvient à un chiffre légèrement plus                                 Xerfi) a proposé un premier calcul sommaire qui
    faible (- 2,6 %) mais du même ordre de grandeur.                                  conduit à un choc de – 3,5 % de PIB sur l’année,
                                                                                      avec des marges d’incertitude liées aux impacts
    Une étude de la Coface1 intègre une hypothèse                                     du commerce mondial sur le secteur productif
    de confinement prolongé, avec un pronostic                                        marchand, aux déformations des prix et des
    de récession de 6,8 % en France, proche de                                        coûts du crédit2.
    l’Allemagne, plus élevé encore en Italie ; la zone
    euro subissant l’un des chocs les plus forts du                                   De toute évidence, l’intensité et la profondeur
    monde.                                                                            des chocs sur les PIB nationaux, les défaillances
                                                                                      d’entreprises, l’emploi, le pouvoir d’achat des
    Ces évaluations des instituts macro-                                              ménages, les déficits et dettes publics… sont
    économiques reposent naturellement sur des                                        encore évolutives, largement tributaires de la
    hypothèses de travail et ne préjugent pas de                                      durée des confinements stricts, mais aussi du
    la plus ou moins grande capacité à relancer                                       rythme des futurs dé-confinements (l’Autriche
    l’activité économique, notamment par les                                          a commencé à engager son dé-confinement
    dispositifs de soutien des entreprises via les                                    progressif ce 6 avril !).
    mesures de chômage partiel et de trésorerie.
    Coface anticipe par exemple des taux de                                           Les modèles prédictifs des instituts n’ont
    défaillance d’entreprises beaucoup plus élevés                                    encore qu’une valeur relative car ils reposent
    aux Etats-Unis qu’en Europe. Dans le même                                         sur des modèles conçus pour d’autres
    temps, ses modèles prédictifs prévoient une                                       contextes. Beaucoup de choses dépendront
    récession moins prononcée aux Etats-Unis, en                                      des décisions prises sur le plan politique, du
    partie en raison de la plus faible part d’intrants                                pilotage de la gestion de crise et de l’intensité
    dans leurs chaines de valeur nationales.                                          des risques sanitaires. Il est également difficile
                                                                                      de connaître les formes que prendra la reprise

2
    1
        https://www.coface.fr/Actualites-Publications/Actualites/Barometre-Coface-COVID-19-vers-une-montee-soudaine-et-mondiale-des-defaillances
    2
        V. la vidéo, https://www.xerficanal.com/economie/emission/Olivier-Passet-Un-premier-cadrage-de-la-recession-vue-par-l-economie-reelle_3748521.html
QUELLE REPRISE, QUELLE RELANCE DANS LES TERRITOIRES À LA SORTIE DU CONFINEMENT ? - ANALYSES ET PROPOSITIONS DE L'ADCF
d’activité. Les comparaisons avec les crises                                            sous-traitance qui ont alors subi les principaux
antérieures (1968, 1974, 1993-94, 2008-                                                 chocs comme l’avait montré l’étude publiée
2009…) présentent d’importantes limites                                                 par l’AdCF, réalisée par Laurent Davezies pour
car cette crise pandémique du Covid-19 est                                              l’association et l’Institut CDC pour la recherche3
sans équivalent, combinant à la fois un choc                                            à la suite d’un groupe de travail réuni pendant
d’offre et un choc de demande. On assiste                                               un an. L’étude avait analysé à la fois les différents
de surcroît à des réorganisations des modes                                             moteurs économiques des zones d’emploi et
de production qui n’existaient pas lors des                                             évalué leur exposition aux premiers effets de la
crises antérieures (notamment le télétravail,                                           crise.
les productions 3D, l’essor de l’e-commerce…).
La crise peut ainsi contribuer à accélérer des                                          Les bassins d’emploi du grand quart Nord-est
recompositions de processus productifs qui                                              et du grand bassin parisien (hors Ile-de-France),
étaient latents mais à rythme modéré. Economie                                          les bassins industrialisés de Rhône-Alpes, de
circulaire, relocalisation de productions, circuits                                     Franche-Comté et de quelques autres régions,
courts, réorganisations logistiques, nouveaux                                           avaient subi les plus fortes baisses d’emploi (cf.
commerces, travail à distance, digitalisation des                                       cartes pages 5 et 7 extraites de l’étude).
entreprises… peuvent connaître un changement
de dimension à l’occasion de cette crise.                                               En dehors de ces bassins au profil spécifique,
                                                                                        les chocs économiques avaient été plutôt bien
QUELS IMPACTS DE LA CRISE SUR L’ÉCONOMIE                                                amortis par les stabilisateurs automatiques de
RÉELLE ET SUR LES TERRITOIRES FRANÇAIS ?                                                la protection sociale et des salaires publics.
                                                                                        L’économie « présentielle » avait été moins
A court terme, le mérite des premières réponses                                         touchée, grâce à un maintien du pouvoir d’achat
françaises à la crise est d’avoir protégé du                                            et des revenus. Nombre de territoires, orientés
mieux possible les trésoreries des entreprises                                          essentiellement sur des activités résidentielles,
et leur structure productive, via le chômage                                            touristiques, ou non-marchandes, ont été
partiel. La France bénéficie par ailleurs de                                            relativement peu affectés par la crise de 2008.
mécanismes amortisseurs puissants via son                                               Contrairement à 1993-94, l’Ile-de-France avait
niveau élevé de protection sociale et le poids                                          moins subi la crise de 2008-2009 que d’autres
des services non-marchands dans l’économie                                              territoires. Les régions méridionales, la façade
réelle. Ces stabilisateurs automatiques avaient                                         atlantique, la Corse… ont même connu des
massivement joué en 2009 pour atténuer la                                               croissances de l’emploi entre 2007 et 2008.
récession. Ils vont à nouveau jouer un rôle mais
ne protégeront pas toute l’économie.

TIRER LES ENSEIGNEMENTS (ET TENIR COMPTE
DES LIMITES) DU PLAN DE RELANCE DE 2009.

Alors qu’en 1993-94 (crise liée à la guerre
du Golfe, marquée par l’effondrement de
l’immobilier des grandes métropoles mondiales)
la récession avait affecté plus fortement
l’économie francilienne et celle des grands
centres urbains (immobilier de bureau….), la crise
financière de 2008-2009 s’était surtout traduite
par une rétraction du tissu productif des bassins
manufacturiers. Ce sont en effet les bassins
d’emploi les plus orientés vers les activités de
                                                                                                                                             3
3
    La crise et nos territoires : premiers impacts, rapport préparé par Laurent Davezies pour l’AdCF et l’Institut CDC pour la

Recherche (Caisse des Dépôts), octobre 2010? https://www.adcf.org/files/ADCF-etude-crise-20101105.pdf
EVOLUTION DE L’EMPLOI SALARIÉ PRIVÉ ENTRE 2007 ET 2008

                                                           Source : AdCF-Institut CDC pour La Recherche, Laurent Davezies, 2010
                                                                                 Cartographie : Patrick Poncet - MapsDesigners

     En intégrant une année de plus (2009) pour analyser les effets différés, et en corrélant les analyses aux
     « moteurs » des économies locales, l’étude avait confirmé la forte exposition des bassins productifs, la
     récession sur l’emploi se propageant vers l’ouest industrialisé.

     En l’espace d’une année, entre le 2e trimestre 2008 et le 2e trimestre 2009, les bassins d’emploi
     manufacturiers avaient enregistré une hausse du taux de chômage allant jusqu’à +114 %. Sur la période
     2e trimestre 2008-1er trimestre 2010, cette augmentation a atteint jusqu’à 170 %.

4
VARIATION DU TAUX DE CHÔMAGE ENTRE 2008 (T2) ET 2009 (T2) DANS LES ZONES D’EMPLOI
FRANÇAISES

                                             Source : AdCF-Institut CDC pour La Recherche, Laurent Davezies, 2010   5
                                                                   Cartographie : Patrick Poncet - MapsDesigners
CRISE COVID-19 : DES IMPACTS TERRITORIAUX
    TRÈS DIFFÉRENTS À ANTICIPER

    D’ores et déjà, il est clair que la crise actuelle     de l’Institut Xerfi sur les impacts prévisibles de
    se traduira par des impacts dont l’intensité           la crise du Covid-19 sur les différents secteurs
    sera géographiquement contrastée et très               d’activité, et en projetant ces impacts sectoriels
    différente de la dernière crise. Nombre de             sur les territoires, il sera possible de proposer
    territoires « abrités » de 2008 ne le seront pas du    rapidement une cartographie des territoires les
    tout cette fois-ci. Si les bassins de vie dont les     plus exposés à la crise.
    revenus proviennent massivement des transferts
    sociaux (pensions de retraites, allocations,           Une première analyse a été conduite par le
    remboursements des soins…) ou d’activités              cabinet OPC en lien avec l’AdCF. La carte de
    non-marchandes peuvent compter sur la force            la page 7 fait apparaître en teinte foncée les
    des stabilisateurs automatiques, les territoires       territoires dont les emplois du secteur marchand
    très tributaires du tourisme, du bâtiment et           sont très exposés à la crise actuelle. On retrouve
    de l’économie résidentielle marchande vont             les territoires les plus dépendants des activités
    fortement subir la crise actuelle. Les inquiétudes     touristiques (Alpes, Corse, littoraux…) mais aussi
    qui se font jour en Corse, sur les littoraux, en       nombre d’intercommunalités à socle productif
    montagne, en Outre-Mer… sont parfaitement              industriel important. Les mesures de chômage
    compréhensibles. L’AdCF va de fait s’intéresser        partiel et certaines aides de trésorerie vont
    aux effets territoriaux de la crise et à ses impacts   contribuer à protéger ces emplois mais ils
    différenciés en fonction des moteurs de                demeurent plus exposés à la crise et aux pertes
    développement.                                         de chiffre d’affaire.

    En évaluant la crise à l’aune de ses impacts
    « asymétriques » sur les différents secteurs
    d’activités, il est également possible d’évaluer
    en partie ses futurs impacts territoriaux. Les
    analyses des tissus économiques locaux réalisées
    ces dernières années par l’AdCF (cf. notes
    économiques sur les intercommunalités ou étude
    sur les moteurs des agglomérations françaises)
    ont permis de mesurer les différences des profils
    productifs des territoires et de leurs portefeuilles
    d’activités. En utilisant les analyses de l’OFCE,

6
Même si tous les territoires seront affectés          LA SOLIDITÉ DES ENTREPRISES AVANT CRISE
par les difficultés du bâtiment, des travaux
publics, des activités hôtelières, culturelles,       Une autre clef de lecture de la crise, tout à fait
évènementielles… leur dépendance                      complémentaire, peut partir de l’état de santé
économique à ces secteurs n’est pas la même           et la solidité des économies locales avant la
partout. La carte fait apparaître des territoires     crise. Un travail a été engagé entre l’AdCF et la
ruraux également proportionnellement moins            Banque de France, dont les premières cartes ont
affectés en raison, sans doute, du maintien           été présentées lors de la convention nationale
plus important de l’activité agricole et agro-        de l’association à Nice en octobre 2019, pour
alimentaire. Le poids dans l’économie locale          évaluer la « résilience » des économies locales
des administrations publiques, des structures         à partir du poids de l’emploi salarié situé dans
hospitalières, des filières agro-alimentaires,        des entreprises jugées fragiles (cotations 5
des quelques secteurs tertiaires marchands            et 6 de la Banque de France), à l’exclusion
qui ont pu maintenir leur activité (sous forme        des entreprises menacées ou compromises
de télétravail) … peut jouer un rôle très             (cotations 7 et 8). Les critères sont la capacité
stabilisateur et contra-cyclique sur l’emploi et la   jugée faible ou très faible de l’entreprise à
consommation.                                         honorer ses engagements financiers à l’horizon
                                                      de 3 ans. L’étude propose une analyse à l’échelle
                                                      de chaque intercommunalité. Elle ne porte
                                                      pas sur toutes les entreprises mais sur celles

                                                                                                      7
auxquelles la Banque de France attribue une             dans des entreprises fragiles en 2019, donc avant
     cotation, à savoir les entreprises disposant d’un       le déclenchement de la crise. Ce sont pour la
     chiffre d’affaires supérieur à 750 k€. Beaucoup         plupart des territoires ruraux, ou semi-ruraux,
     de très petites entreprises ou d’auto-entreprises       fragiles, avec des concentrations fortes dans des
     sont donc hors périmètre, mais elles pèsent             départements comme la Nièvre, l’Allier, la Marne,
     faiblement dans l’emploi local.                         l’Orne, l’Eure, le Pas-de-Calais, les Pyrénées-
                                                             Orientales…
     La carte ci-dessous propose ainsi un indicateur
     de fragilité structurelle de l’économie                 Trésoreries fragiles, chiffres d’affaires peu
     marchande des intercommunalités. Certaines              toniques et rentabilités faibles… caractérisent
     voient plus de 40 % des effectifs des entreprises       les entreprises cotées 5 et 6. En termes de
     (de plus de 750 k€) du secteur marchand situés          résilience, ces données sont donc intéressantes.

PART DES EMPLOIS SALARIÉS PRIVÉS OCCUPÉS DANS LES ENTREPRISES FRAGILES (COTÉES 5 ET 6 PAR LA
BANQUE DE FRANCE) À L’ÉCHELLE DES INTERCOMMUNALITÉS, EN %

                                                              Si moins de 50 salariés concernés, le territoire n’est pas représenté
                                                                                                Source : Banque de France, 2020

      De même que les chocs varieront en intensité           différencier les situations et demeurées ciblées,
      d’un territoire à un autre, ce sont donc aussi les     pilotables localement au vu des situations
      entreprises et les secteurs d’activité qui seront      particulières. Des dispositifs « aveugles » à
      inégalement exposés. De fait, les mesures des          ces spécificités pourraient produire des effets
      plans de soutien actuels, comme les mesures            d’aubaine peu compréhensibles et coûter très
      d’aide à la reprise puis à la relance, se doivent de   cher aux finances publiques.

8
II - PRÉPARER LA SORTIE DE CRISE

En 2009-2010, les mesures du plan de                                       les leviers proposés en direction des territoires
relance, suite à la grande récession de                                    et du secteur public local. Des mesures plus
2008, se sont traduites par un soutien massif                              ciblées, moins automatiques, devraient être
de la consommation des ménages qui a                                       envisagées. Il faudra néanmoins un pilotage
maintenu provisoirement l’activité. Dans son                               agile pour avoir un effet déclencheur rapide, et
évaluation du plan de relance, la Cour des                                 porter sur des projets d’investissement pouvant
Comptes4 distinguait le rôle des stabilisateurs                            être engagés rapidement, sans procédures trop
automatiques liés au modèle social français                                longues.
(et particulièrement puissants), des mesures
budgétaires spécifiques mises en œuvre au titre                            LA NÉCESSITÉ D’UNE APPROCHE TRÈS
du plan.                                                                   TERRITORIALISÉE DU DÉCONFINEMENT

Au sujet des stabilisateurs, la Cour écrivait : « Le                       La nouveauté radicale de la crise du Covid-19,
Fonds monétaire international – FMI – évalue                               portant à la fois sur des chocs d’offre et de
la contribution positive de ces stabilisateurs à                           demande, liés pour l’essentiel à des mesures
0,6 point de PIB en 2008 et 1,9 point en 2009,                             de confinement, impose de repenser la reprise
contre une moyenne de respectivement 0,3                                   progressive de l’activité, territoire par territoire
point et 1,2 point dans les pays du G20. L’effet                           (logique de bassin de vie). Accès au travail,
combiné des stabilisateurs a conduit, sur deux                             réorganisation des circuits de distribution, remise
ans, à un avantage d’environ 1 point de PIB en                             en route des services publics, réouvertures
France, limitant la baisse du PIB à 2,5 % en 2009                          des commerces et des équipements collectifs,
alors qu’elle a été de 4,2 % pour l’ensemble de                            reprise des chantiers de bâtiment et de travaux
la zone euro et d’environ 5 % en Allemagne, en                             publics… vont imposer des approches très
Italie et au Royaume Uni ».                                                décentralisées, avec des analyses au cas par
                                                                           cas, fortement négociées (avec les salariés, les
La Cour se montrait en revanche assez critique                             riverains, les autorités administratives…). D’ores et
sur le Plan de relance lui-même, le choix des                              déjà de très nombreuses initiatives ont été prises
leviers retenus et son pilotage. Le choix de                               sur le terrain pour s’adapter à la situation, trouver
constituer un ministère dédié n’était pas mis                              des solutions adaptées, concilier continuité
en cause mais elle lui reprochait de n’avoir                               d’activité et augmentation des protections
pas animé le dispositif avec l’ensemble des                                sanitaires.
opérateurs, collectivités, entreprises publiques.
                                                                           Sur les services publics essentiels, les soutiens
Sur l’investissement public, elle considérait que                          aux personnels de santé, les actions de solidarité
la mesure-phare, à savoir les remboursements                               en direction des populations vulnérables, la
anticipés de TVA via le FCTVA, n’avait pas eu                              résilience des territoires a été le plus souvent
de réel effet de volume, jouant davantage un                               remarquable, donnant lieu à des entraides et
effet de trésorerie, permettant aux bénéficiaires                          des collaborations insoupçonnées. C’est de
de réduire leur besoin de financement. La Cour                             toute évidence sur ces capacités qu’il faudra
n’hésitait pas à évoquer un « effet d’aubaine »                            s’appuyer pour organiser la reprise d’activité.
sans véritable effet multiplicateur sur
l’investissement public dans la durée, ni sur son                          Il y aura même tout à gagner à pérenniser
orientation stratégique.                                                   dans la durée ce « capital social » qui s’est
                                                                           construit à l’occasion de la gestion de la crise :
En tirant les enseignements du précédent de                                engagements bénévoles, réseaux d’entraide,
2009-2010, il serait donc nécessaire de repenser                           implication des industriels, nouveaux circuits

4
    http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/cr-cfiab/09-10/c0910102.pdf                                                        9
de distribution, solidarités de voisinage… Ces         Les activités moins immédiatement essentielles
     réseaux peuvent contribuer à renforcer la              (équipements culturels, sportifs…) devront
     cohésion sociale et représenter une forme de           également être progressivement remises en
     création d’activités et de richesses, sous une         ordre de marche, sans pour autant conduire
     forme non-monétaire (mais chacun connaît               à des regroupements collectifs massifs.
     les limites du PIB au regard des critères de           Certains équipements se prêteront mieux au
     richesses).                                            déconfinement que d’autres (ex. courts de
                                                            tennis vs terrains de rugby ; plages et bases
     ASSURER LA REPRISE AVANT LA RELANCE                    nautiques vs piscines fermées).

     Avant même d’engager un plan de relance                Des politiques de gestion de flux, via des
     de l’économie, c’est à un plan national de             systèmes de réservation, pourraient être
     reprise de l’activité qu’il va falloir s’atteler,      envisagées pour un retour très progressif à
     afin de réduire au maximum les pertes de               l’activité normale, avec des enjeux de politiques
     chiffre d’affaire, les difficultés de trésorerie       tarifaires adaptées pour les publics prioritaires,
     et le coût exorbitant du chômage partiel.              des créneaux réservés, des horaires conçus en
     Ce plan national devra être discuté avec les           conséquence.
     organisations patronales et de salariés, les
     diverses fédérations professionnelles et filières      AMORTIR L’EFFONDREMENT DU TOURISME ET
     stratégiques, mais aussi avec les différents           PRÉPARER LE REBOND
     niveaux de collectivités. Il se confirme que
     l’activité ne pourra reprendre que de manière          Le déconfinement s’opérant à la veille de la
     différenciée, ajutée à des réalités évolutives, et     saison estivale, il sera essentiel de réfléchir
     nécessitant des coordinations fortes aussi bien        à la manière de l’articuler avec les activités
     au niveau des chaînes de valeur ou filières pour       touristiques, durement touchées au printemps.
     synchroniser les montées en cadence, qu’au             Cet enjeu sera capital pour de nombreux
     sein des régions et des territoires.                   territoires pour lesquels il constitue un moteur
                                                            économique essentiel, voire principal (le
     A l’échelle des agglomérations et de nos bassins       tourisme porte près de 30 % du PIB en Corse
     de vies, des plans territoriaux de reprise de          par exemple).
     l’activité pourraient être proposés au cours des
     prochains mois pour coordonner et planifier            La fermeture des frontières étant amenée à se
     la reprise des chantiers de BTP, sécuriser les         prolonger (hors dérogations), il faudra réfléchir
     lieux de travail (zones et parcs d’activités), leurs   à une organisation adaptée en mobilisant toute
     dessertes, leurs équipements collectifs (cantines,     la profession. Pour éviter les regroupements sur
     restaurants…).                                         les mêmes lieux, des incitations pourraient être
                                                            données pour lisser les pics touristiques dans
     De même, c’est à l’échelle locale qu’il faudra         le temps en jouant sur une période estivale très
     sans doute planifier les réouvertures des              large, du 15 juin au 15 septembre par exemple,
     établissements scolaires, péri-scolaires et de         et en multipliant les destinations possibles. Des
     garde d’enfants, en lien étroit avec l’offre de        plans « découvertes » pourraient être conçus
     transport scolaire et de structures d’accueil.         pour proposer un tourisme diffus, mieux
     Dans les intercommunalités, les conférences            réparti sur le territoire national, avec des courts
     de maires devraient permettre d’assurer                ou longs séjours, dans un cadre régional ou
     des coordinations régulières et efficaces. La          national.
     gestion des mobilités mais aussi des offres
     de stationnement devra être également                  Un volet social devra être intégré pour les
     coordonnée, en lien avec les activités de              populations qui partent peu, et qui auront
     logistique et de livraison, pour assurer des flux      souvent subi les formes les plus éprouvantes
     plus importants, mais compatibles avec les             de confinement (immeubles collectifs,
     mesures durables de distanciation.                     surpeuplement des appartements…).

10
Les territoires de résidences secondaires ou
de maisons de familles seront certainement                                            Il est désormais confirmé que la reprise graduée
très prisés cet été, ce qui peut constituer un                                        des activités, adaptée aux consignes sanitaires,
levier de rattrapage pour certaines destinations.                                     aura à combiner des « publics » dé-confinés et
Le roulement dans les occupations devrait                                             des personnes plus exposées, encore soumises
être facilité par les locations ou les prêts, la                                      à des recommandations de confinement strict.
performance des plateformes numériques.                                               Un plan de reprise d’activité puis de relance
Les offices de tourisme devraient être incités, dès                                   de l’économie gagnerait à combiner, à la sortie
que se préciseront la stratégie de déconfinement                                      du confinement, à la fois un soutien fort de la
et les consignes à respecter, à concevoir avec                                        commande publique (augmentée en volume et
leurs partenaires des offres territoriales adaptées                                   réorientée en priorités), des mesures de relance
(évènements, visites, systèmes de réservation…).                                      de la consommation, si possible favorables aux
L’étalement de la saison sur une longue durée,                                        biens et services « made in France », respectant
rendue possible par la non-réouverture des                                            des standards écologiques européens
classes, mais aussi le besoin d’aération des                                          (éco-conception), et une réorganisation en
familles après le confinement, peut contribuer                                        conséquence des chaines de valeur.
à limiter les impacts de la crise sur les activités
touristiques, tout en les orientant sur des formes
plus soutenables de tourisme (réduction du « sur-
tourisme », moindres pressions sur les milieux…).

III - STIMULER L’INVESTISSEMENT LOCAL ET LA COMMANDE
PUBLIQUE
Le plan de reprise et de relance doit contribuer à                                    être une manière de se rassurer, mais il convient
consolider le rebond de la commande publique                                          de rappeler que le sous-investissement public
qui commençait à être constaté depuis deux                                            est une caractéristique lourde de la plupart
ans, après les très fortes chutes des années 2014-                                    des Etats membres de l’Union européenne
2017.                                                                                 (Scandinavie mise à part), et particulièrement
                                                                                      de l’Allemagne qui accumule des retards
Sous l’effet des coupes brutales dans les                                             préoccupants dénoncés par ses propres milieux
dotations de l’Etat aux collectivités, mais aussi                                     économiques.
des contraintes budgétaires des hôpitaux, des
opérateurs de l’Etat, puis des bailleurs sociaux,                                     En 2014-2015, redoutant les impacts des
la commande publique a atteint un niveau                                              baisses de dotations aux collectivités, l’AdCF
historiquement bas en 2016. Les marchés de                                            avait appelé à des assises nationales de
travaux ont particulièrement reculé depuis                                            l’investissement pour déterminer des priorités
2012-2013, conduisant la France a une situation                                       stratégiques. Le document d’analyses et de
critique, proche du seuil de dépréciation de                                          propositions qu’elle avait adressé au Premier
la valeur de ses actifs. Certains secteurs sont                                       ministre comprend des suggestions qui restent
marqués par d’évidents déficits d’investissement                                      valables aujourd’hui5.
(canalisations, lignes ferroviaires, ouvrages de
génie civil, infrastructures routières, écoles…).
Se comparer aux autres pays européens peut

5
    https://www.adcf.org/articles-assises-de-l-investissement-les-analyses-et-propositions-de-l-adcf-2191                              11
En réponse à ces propositions, des assises                                        domaines. Par rapport à l’année haute de 2012
      régionales de l’investissement avaient été                                        (96 milliards d’euros de marchés attribués), les
      réunies à l’initiative du gouvernement Valls                                      années 2014-2018 ont été marquées par une
      sous l’égide des préfets de région, mais sans                                     baisse de 20 milliards par an, soit une réduction
      lendemain. De fait, la mandature 2014-2020 des                                    cumulée de près de 100 milliards sur cinq ans.
      élus municipaux et intercommunaux aura été, sur
      la durée, marquée par une commande publique
      de très basses eaux, au risque d’accumuler des
      « dettes grises » dans un certain nombre de

     LA COMMANDE PUBLIQUE PUBLIÉE EN FRANCE (EN MD€)

                                                                         -8,8 %

     96,0
                           92,2
                                                                                                                                                 87,5
                                                                                                                             78,4
                                                                                                         77,4
                                               77,3                76,7
                                                                                      72,2

                          -3,9 %              -16,2 %              -0,7%             -6,0 %                7,3%               1,2 %              11,6 %

     2012                 2013                2014                2015                2016                2017                2018               2019

                                                                                                            Baromètre de la commande publique AdCF / CDC

      Commande publique : près de 100 milliards d’euros de marchés attribués par an

      L’AdCF a constitué avec la Banque des territoires un observatoire de la commande publique
      renseigné par la société Vecteur Plus qui recense tous les marchés publics publiés et attribués. Ce
      baromètre fournit des indications précises, depuis 2012, trimestre par trimestre, des volumes des
      marchés publics, à la fois en montants budgétaires et en nombre de lots, selon les territoires, les
      autorités adjudicatrices (Etat, opérateurs, collectivités, entreprises publiques locales, hôpitaux,
      bailleurs sociaux…), les destinations de la commande (transports, bâtiments publics, réseaux
      d’eau, énergie, numérique…), les natures (travaux, services, fournitures, ingénieries…). Après
      avoir fortement dévissé entre 2014 et 2016, notamment sous l’effet des baisses de dotations aux
      collectivités, la commande publique a commencé à se redresser à partir de 2017 pour revenir en
      2019 à des niveaux proches de ceux de 2012-20136.

12    6
          https://www.adcf.org/articles-barometre-de-la-commande-publique--les-intercommunalites-contribuent-tres-fortement-a-la-reprise-5156/
En 2019, l’AdCF et la Banque des territoires                                     La vidéo d’Alexandre Mirlicourtois, de l’institut
ont constaté une forte reprise et un retour à                                    Xerfi, explique très bien l’impact de la crise sur
un niveau proche des flux de commande des                                        le BTP et ses effets économiques8.
années hautes (2012-2013). L’un des enjeux sera
d’éviter un nouvel effondrement au cours des                                     Comme on l’a vu plus haut, le « bloc communal »
prochains mois.                                                                  constitue, avec ses nombreux organismes
                                                                                 rattachés (syndicats mixtes, entreprises
Les données sur la commande publique aux                                         publiques locales, CCAS …), le principal fer de
mois de mars-avril 2020 seront naturellement                                     lance de la commande publique. En 2019, la
très affectés par la crise sanitaire, mais il convient                           commande publique de ce dernier a représenté
de tenir compte de sa superposition avec les                                     41 milliards d’euros soit près de 50 % de la
échéances électorales du « bloc communal ». Au                                   commande publique totale, via les communes,
regard du poids déterminant de ce dernier dans                                   les communautés et métropoles, mais aussi les
la commande publique, une chute importante                                       syndicats mixtes (transports, déchets, eau…). Par
de celle-ci était prévisible en tout état de cause,                              ailleurs, une bonne part des 5 milliards d’€ de
indépendamment de la crise. La société Vecteur                                   commande des offices publics HLM et des 2,8
Plus compare ainsi la période actuelle, marquée                                  milliards d’€ des entreprises publiques locales
par une compression forte du nombre d’appels                                     (SEM, SPL, SEMOP) peut être rattachée au « bloc
d’offre avec la période équivalente de mars-avril                                communal ».
2014. La chute de moitié des appels d’offres et
des marchés en mars est dans l’ordre des choses                                  Le report des élections, au mieux à l’automne
(elle aurait eu lieu sans la crise)7.                                            voire au-delà, aura pour effet de prolonger
                                                                                 les effets du cycle électoral, puis de la crise
Mais la question qui va se poser désormais est                                   sanitaire, et de renvoyer très loin la reprise
celle du gel des chantiers et des « flux » d’appels                              de la commande publique. La première
d’offre, des reports des dates limites pour les                                  préoccupation sera de « purger » les retards
dépôts de dossiers, la prudence sur les projets                                  pris sur les chantiers engagés et dont la reprise
futurs, les interrogations des exécutifs locaux                                  va accaparer les capacités de production, sans
prorogés à titre transitoire pour gérer les affaires                             permettre de rebond.
courantes mais qui se sentent moins légitimes
pour prendre des décisions engageant l’avenir.                                   Il sera de fait fondamental de faire redémarrer
                                                                                 dans les meilleurs délais, et avec toutes les
Stoppés à 90 % début avril, les chantiers de                                     précautions sanitaires requises, les chantiers
construction (BTP) qui étaient déjà ouverts                                      interrompus, reprendre l’instruction des dossiers
vont progressivement accumuler les retards et                                    suspendus (il est à noter que de nombreuses
bloquer toute reprise. Ce secteur représente                                     intercommunalités poursuivent l’instruction des
à lui seul 1,5 million de salariés et approche les                               autorisations d’urbanisme)… afin de réduire les
deux millions avec les non-salariés (314 000). Il                                « stocks » des chantiers et dossiers en attente
pèse environ à lui seul 5 % du PIB, mais il s’insère                             d’ici l’été. Des efforts de rattrapage pourraient
surtout dans des chaines de valeur multiples                                     être conduits avant la période estivale (et si
qui dépendent de lui. Il exerce de très forts                                    possible pendant celle-ci).
effets d’entrainement tant en amont (cabinets
d’études, aménageurs, architectes, AMO…)                                         Aussi semble-t-il utile de distinguer une relance
qu’en aval (professions immobilières, activités                                  en deux temps :
de maintenance…). Le secteur de la construction                                     • une première phase concentrée sur la
a surtout un rôle essentiel dans l’entretien du                                     reprise de l’activité et la remise en route
patrimoine du pays et la valeur de ses actifs tant                                  des circuits économiques massivement
publics que privés.                                                                 désorganisés. Cette phase devrait durer
                                                                                    plusieurs mois, qui laisseront le temps

7
    https://app.gotowebinar.com/unified/index.html#/webinar/5664699705394440971/attend/6667184929623969549                                              13
8
    https://www.xerficanal.com/economie/emission/Alexandre-Mirlicourtois-SPECIAL-CRISE-le-coup-d-arret-du-BTP-et-l-impact-sur-l-economie_3748524.html
d’élaborer une stratégie plus complète ;
        • une deuxième phase de véritable relance,
        adossée à une stratégie approfondie et             Un fléchage privilégié des crédits budgétaires
        négociée (Etat, opérateurs, collectivités,         du plan de relance consacrés à l’investissement
        filières professionnelles…), cohérente avec        public local pourrait s’opérer en direction de
        les grands programmes opérationnels                ces programmes structurants, et réduire toute
        européens, les outils contractuels (contrats       propension au saupoudrage. Contrairement
        Etat-régions…) et programmes, des exécutifs        à la mesure budgétaire de 2009 (FCTVA),
        locaux et territoriaux renouvelés.                 ouverte sans aucune discrimination des projets
                                                           ni conditionnalité (potentiel fiscal, impacts des
     POUR UN RENDEZ-VOUS STRATÉGIQUE                       chocs économiques, caractère prioritaire des
     CONSACRÉ À LA RELANCE DANS LES                        projets…), le volet investissement public du
     TERRITOIRES                                           plan de relance devrait être ciblé sur quelques
                                                           priorités fortes et visibles, en réponse aux
     Dans le cadre d’un vaste plan de relance, la mise     enseignements de la crise sanitaire. Des pactes
     en place d’un « Grenelle » de la commande             territoriaux de relance et de croissance
     publique (- celui-ci pouvant s’appeler Assises,       devraient être proposés pour prendre le relais
     Comité stratégique, Conseil national… peu             des dispositifs existants (contrats de ruralité,
     importe –) réunissant les principales parties         contrats de villes, contrats sectoriels…).
     prenantes serait opportun pour bâtir ce volet
     territorial d’un plan de relance de l’économie.       QUELQUES AXES STRATÉGIQUES À PRIVILÉGIER

     Un pilotage par le ministère de la cohésion           Parmi les axes prioritaires de ces plans
     des territoires, en lien étroit avec les ministères   territorialisés peuvent être évoqués les thèmes
     de l’Ecologie et de l’Economie, aurait tout son       suivants :
     sens. Cette instance pourrait s’appuyer sur des
     instances comme la Médiation des entreprises          AU TITRE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE :
     (qui intègre l’ancienne médiation des marchés
     publics), la Banque des territoires…                     • soutiens budgétaires aux actions
                                                              d’efficacité énergétique des logements
     Ce « Grenelle » de l’investissement public               (publics, privés), des bâtiments publics et
     territorial aurait pour intérêt d’intervenir             équipements collectifs (piscines, théâtres…) ;
     dans une phase préparatoire des grandes                  • soutiens à la résilience territoriale et aux
     programmations pluriannuelles 2021-2026 que              adaptations aux changements climatiques
     sont notamment les programmes opérationnels              (gestion des milieux aquatiques et
     européens et les contrats Etat-région.                   prévention des inondations, identification
     La déclinaison du « Green deal » annoncé au              des infrastructures à risques, préservation des
     niveau européen n’aura de sens qu’en s’appuyant          zones humides, renaturation…) ;
     sur une très forte territorialisation de sa mise en      • investissements massifs d’entretien et
     œuvre.                                                   de renouvellement sur les réseaux d’eau
                                                              et assainissement, traitement des micro-
     Ces programmations gagneront également                   polluants, préservation quantitative et
     à s’appuyer sur les nouveaux programmes et               qualitative de la ressource ;
     contrats engagés depuis quelques mois comme              • soutiens des projets d’économie circulaire ;
     Cœurs de villes, Territoires d’industrie, contrats       • développement des filières de recyclage
     de transition écologique (CTE), nouveaux                 et de réemploi ;
     contrats locaux de santé portant le plan Ma              • soutiens aux actions de reconquête de la
     santé 2022, programme d’efficacité énergétique           biodiversité (et à ses fonctions sanitaires), à
     (SARE), les programmes de rénovation urbaine…            la réduction des consommations foncières

14
(renaturation, optimisations foncières…), à la        • accompagnement des grandes mutations
  nature en ville ;                                     du commerce (combiner e-commerce et
  • conversion accélérée de nos modèles                 commerces de proximité, nouveaux circuits
  agricoles : réduction des phyto, renforcement         de distribution…) ;
  des circuits courts via les projets alimentaires      • accélération des programmes
  territoriaux, montée en puissance des filières        d’équipement numérique du territoire (dont
  bio (pour faire face à la croissance de la            les infrastructures de stockage), renforcement
  demande) ;                                            de la sécurisation des systèmes et données,
  • soutien aux nouvelles formes de mobilités           soutiens aux projets d’inclusion numérique
  du quotidien (transports collectifs, co-              et de la digitalisation des organisations
  voiturage, développement du vélo et                   (entreprises, administrations, éducation…) ;
  des vélos à assistance électrique), au                • investissements dans les compétences
  verdissement des flottes de véhicules, à la           (formations à distance, certifications…).
  qualité des interconnexions (pôles gares…) ;
  • améliorations de nos infrastructures             AU TITRE DE LA COHÉSION SOCIALE ET
  routières (éclairage plus sobre, enrobés           TERRITORIALE :
  amortisseurs de bruit, perméabilisation
  et franchissement pour les corridors                  • relance de la production de logements
  écologiques, récupération des métaux                  sociaux (en chute depuis deux ans) et
  lourds…) ;                                            programmes de rénovation urbaine ;
  • maîtrise des consommations énergétiques             • structures d’accueil et d’hébergement
  liées à l’essor du numérique (récupération            d’urgence ;
  énergie fatale des Data centers…) ;                   • adaptation de l’habitat au vieillissement et
  • incitations fortes à des modèles de                 aux enjeux de l’autonomie ;
  production énergétiques décentralisés                 • contrats locaux de santé pour conforter et
  (méthanisation, biomasse…), aux énergies              déployer les CPTS ;
  renouvelables ou décarbonées (hydrogène               • investissements massifs sur les hôpitaux, les
  vert…), aux modèles d’autoconsommation.               GHT et les réseaux de soins (renforcement du
                                                        plan en cours pour déployer les CPTS) ;
AU TITRE DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE :                  • soutiens des maisons France services ;
                                                        • consolidation des réseaux de services
  • stratégies de relocalisation d’activités            à domicile (portage de repas, services
  industrielles (cf. « pactes de relocalisation »       postaux…) ;
  lancés en Grand Est, mobilisation annoncée            • appui au tissu associatif local pour faire
  de la Banque des territoires…) ;                      face aux urgences sociales ;
  • financement accéléré des projets                    • investissement social fort dans
  d’investissement des Territoires d’industrie ;        l’employabilité et l’insertion économique ;
  • soutiens aux projets de décarbonation,              • renforcement des dispositifs
  de sobriété et d’efficacité énergétique               d’engagement civique et de solidarités
  (innovations techniques et sociétales) ;              actives (réserves civiques et sanitaires, plans
  • recyclage de fonciers industriels (friches)         de mobilisation…) ;
  et requalification des zones d’activités (pour        • reconquête des centralités (Cœurs
  accueillir de nouveaux investissements) ;             de villes, petites centralités…) et
  • investissements dans les compétences et             encouragements de nouveaux modèles
  la R&D ;                                              d’urbanisation résilients aux changements
  • relance de l’activité touristique orientée sur      climatiques et protecteurs de la biodiversité.
  des offres à plus forte valeur ajoutée (plus
  diffus sur le territoire national en termes de
  destination) ;

                                                                                                   15
Il sera nécessaire de réduire le plus possible      entrés en fonction, peuvent réfléchir à leurs
     les effets du cycle électoral, prolongés par le     premières décisions. Dans les autres communes
     report des élections, en autorisant des décisions   et au sein des intercommunalités, un travail
     exceptionnelles dans la période provisoire          de recensement des projets ou de décisions
     (notamment sur des travaux d’entretien qu’une       d’investissement d’entretien courant, rapides
     bonne gestion impose) et en commençant              à mettre en œuvre, pourrait être encouragé.
     à réfléchir au lancement de programmes              Des recommandations pourraient être faites
     d’investissement territorialisés dès la fin 2020    en ce sens par l’AdCF en direction des
     ou début 2021, en fonction des mises en place       intercommunalités de France (communautés
     des nouvelles équipes exécutives.                   de communes, communautés d’agglomération
     Il est à noter que 30 000 communes, plutôt          et urbaines, métropoles, établissements publics
     rurales ou petites villes, disposent d’ores et      territoriaux du Grand Paris).
     déjà de conseillers élus qui, sans être encore

     ELECTIONS MUNICIPALES ET INTERCOMMUNALES DE 2020
     PART DES COMMUNES CONCERNÉES PAR LE SECOND TOUR DANS LES INTERCOMMUNALITÉS

16
IV - PRÉPARER DES PLANS DE RELOCALISATION
En tout état de cause, il serait dommageable           En ce sens, la crise peut servir d’accélérateur,
d’engager des mesures de relance mal calibrées         le plan de relance ne devant pas seulement
et peu adaptées aux capacités de notre appareil        retarder des mutations ou jouer sur les trésoreries
de production à répondre à un stimulus sur la          des entreprises en attendant le retour au
demande (consommation privée et commande               monde d’avant. Les mesures exceptionnelles
publique). Des jeux coopératifs doivent être           doivent servir à une réorganisation de nos
également organisés au niveau européen                 modes de production et de nos modèles
pour s’assurer que les plans de relance soient         de développement. Il faudra aussi compter
coordonnés et profitent à l’ensemble des               sur une consommation intérieure beaucoup
Etats-membres, afin de ne pas renouveler les           plus sensible qu’il y a dix ans aux arguments
divergences stratégiques des années 2010-2012.         du « patriotisme économique », à l’attrait du
Beaucoup d’observateurs redoutent d’ores et            « made in France » mais aussi aux avantages
déjà des concurrences agressives (prises des           écologiques comparatifs de circuits courts. La
marchés, rachats d’entreprises fragilisées…)           proximité, la résilience et la sobriété des impacts
provenant des économies qui seront les                 environnementaux doivent irriguer le plan de
premières à repartir ou des groupes disposant          relance pour proposer aux Français un récit de
de fortes capacités financières. Des pactes de         l’avenir cohérent et désirable.
non-agression devraient être suggérés entre Etats
membres de la zone euro.                               COMMENT COMBINER LE NOUVEL IMPÉRATIF
                                                       INDUSTRIEL À NOTRE PLAN DE RELANCE ?
Il sera important de faire profiter le plan
de relance et la commande publique à de                Le rebond économique va être tributaire des
nombreuses filières économiques, au-delà des           conditions de reprise d’activité et de la capacité à
seuls secteurs de la construction. La commande         synchroniser les redémarrages des capacités de
publique concerne aussi de nombreuses activités        production. Il faudra également la synchroniser
agricoles, industrielles et de services (grandes       avec les mesures de soutien de la consommation
entreprises délégataires, ingénieries, cabinets        envisagées pour faire face au choc de la
d’architectes, professions juridiques, entreprises     demande. Les premières mesures de soutien de
de matériaux, constructeurs d’engins de chantier,      l’économie ont, à juste titre, visé à préserver la
horticulture…). Elle intègre aussi fortement les       survie du tissu économique national. Mais ces
filières agro-alimentaires comme le révèlent           mesures ne pourront se pérenniser et éviter
actuellement les impacts des fermetures de             des défaillances massives que si des réponses
cantines scolaires ou de restaurants administratifs.   sont également apportées au « choc sur la
                                                       demande », en préservant le pouvoir d’achat, en
Outre ses effets d’entrainement en « volume »          jouant sur la propension des entreprises (et des
sur les activités économiques marchandes, la           collectivités publiques cf. plus haut) à investir et
commande publique peut également servir                des ménages à consommer.
d’accélérateur puissant de transformation
sociale et territoriale. Elle peut amplifier les       Les premiers plans de soutien engagés dans
mutations en cours et la conversion de notre           les Etats ont été différents à cet égard comme
économie vers un modèle bas-carbone,                   le montre le graphique ci-dessous extrait d’une
sobre en ressources, plus résilient au regard          étude du fonds d’investissement BlackRock (le
des défis du XXIe siècle. Les engagements              Japon et les Etats-Unis actionnant davantage le
programmatiques forts pris par les candidats aux       levier fiscal pour contrer le choc de demande).
élections municipales (de toutes sensibilités et       Les mesures de trésorerie ou de garantie ont un
tous types de territoires) laissent augurer d’un       rôle « bouclier » qui n’est que temporaire, sans
« verdissement » de la commande publique.              donner des perspectives de sortie. Elles peuvent
                                                       multiplier des entreprises « zombies », sans carnet
                                                       de commandes.
                                                                                                         17
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