DROIT DE VOTE POUR TOUS. LES CONTOURS D'UN DÉBAT - Revues ...

 
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DROIT DE VOTE POUR TOUS.
                               LES CONTOURS D’UN DÉBAT

                                                                                                                 N° 1229 - Janvier-février 2001 - 21
                               Pour le moins récurrent en France, le débat autour du vote des résidents
                               non nationaux masque la question du statut et des droits politiques des
                               immigrés. Comme les esclaves autrefois, comme les indigènes et les femmes
par                            il y a quelques décennies, les étrangers se sont vu opposer des arguments
Saïd Bouamama,                 basés sur une prétendue incapacité, puis sur la non-appartenance à la nation.
socio-économiste,              Au fond, leurs revendications – régularisation des sans-papiers, droit à une
chargé                         naturalisation par simple déclaration, droit de vote – sont trois aspects d’une
de recherche                   même question : une démocratie peut-elle s’accommoder d’une non-
à l’Ifar de Lille,             citoyenneté pour une partie importante des habitants de son territoire ?
militant associatif*
                                   Les résidents étrangers ne voteront pas aux prochaines élections muni-

                                                                                                                       VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE
                               cipales de 2001. Pourtant, la fin de l’année 1999 a été marquée par une
                               effervescence des partis de la gauche plurielle et par une mobilisation
                               des réseaux associatifs sur cette question. La Realpolitik l’a une nou-
                               velle fois emporté sur le courage politique. Le Premier ministre se refuse
                               à “repassionner” le débat sur l’immigration, qu’il estime avoir “désamorcé”
                               par l’action de son ministre de l’Intérieur, Jean-Pierre Chevènement. Si
                               le débat sur le droit de vote aux résidents étrangers est ancien, il semble
                               buter sans cesse sur les mêmes arguments. Compte tenu des évolutions
                               sociologiques et politiques en œuvre au sein des populations issues de
                               l’immigration, ces arguments apparaissent comme des prétextes pour
                               refuser ou retarder des évolutions incontournables. Derrière le débat sur
                               le droit de vote pourrait ainsi se cacher un autre enjeu : celui des fron-
                               tières idéologiquement sacralisées de la nation, et de leurs consé-
                               quences économiques et politiques sur les “hors-frontières”.
                                   Les résidents étrangers ne sont pas la première catégorie de citoyens
                               à propos de laquelle la question de l’entrée dans la sphère politique
                               est posée. Avant eux, les esclaves, les femmes, les ouvriers, les coloni-
                               sés ont vécu de longues périodes d’exclusion du politique. Les débats
                               de ces périodes ont pour caractéristiques d’utiliser exactement les
                               mêmes arguments que ceux mis en avant aujourd’hui pour les résidents
* Cet article est tiré
                               étrangers. Il n’est pas inutile de rappeler brièvement ces argumenta-
de l’ouvrage paru              tions et de s’interroger sur les raisons d’une telle ressemblance.
cette année aux éditions
de l’Esprit frappeur,
J’y suis, j’y vote, La lutte
pour les droits politiques
                                  L’ESCLAVE ÉDUCABLE
aux résidents étrangers          Au moment où la Révolution française pose les principes du droit
(voir aussi la chronique
“Livres”).                     naturel et de l’universalité des droits de l’homme, elle maintient en
l’état le “code noir” régissant l’esclavage. L’enjeu est déjà lié à la ques-
                                          tion des frontières. Il ne s’agit même pas de la frontière des droits
                                          politiques, mais de celle de l’appartenance ou non à l’humanité. Le
N° 1229 - Janvier-février 2001 - 22

                                          raisonnement à la base de cette contradiction entre principes affi-
                                          chés et pratiques concrètes est aujourd’hui encore à l’œuvre à pro-
                                          pos de l’immigration. Le nègre est considéré comme appartenant à
                                          l’humanité (les principes sont ainsi saufs), mais cette “humanité”
                                          serait non encore parvenue à maturité (le principe d’exclusion
                                          momentanée apparaît ainsi légitime). Même un Condorcet, pourtant
                                          l’un des penseurs les plus cohérents de la rupture révolutionnaire,
                                          considère qu’on “ne peut dissimuler qu’ils n’aient en général une
                                          grande stupidité” ; qu’il convient de les aider à “sortir de la cor-
                                          ruption et de l’avilissement” afin qu’ils réapprennent “les sentiments
                                          naturels de l’homme” et deviennent enfin dignes “qu’on leur confie
                                          le soin de leur bonheur et du gouvernement de leur famille”(1). Cela           1)- Condorcet, Réflexion
                                                                                                                         sur l’esclavage des Nègres,
                                          conduira Condorcet à proposer un moratoire de “soixante-dix ans                1781, cité in Saïd Bouamama,
                                                                                                                         J’y suis, j’y vote, La lutte
      VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE

                                          minimum” pour cette action de “réhumanisation”. Les nègres ont                 pour les droits politiques
                                          donc perdu leurs capacités et/ou leurs facultés à être des citoyens            aux résidents étrangers,
                                                                                                                         éd. L’Esprit frappeur, n° 77,
                                          libres, et il convient de les leur réapprendre.                                Paris, 2000.
                                              La Révolution française restera fidèle à cette logique et adoptera
                                          l’idée du moratoire, sans en fixer pourtant la durée. Voici ce que
                                          déclare Bonnemain à l’époque : “Il ne serait pas plus juste ni plus
                                          humain de rendre subitement la liberté aux Noirs qu’il n’est juste
                                          et humain de les avoirs retenus dans l’esclavage. La première opé-
                                          ration du gouvernement doit donc être de leur rendre la faculté d’être
                                          libre.”(2) La logique capacitaire ainsi proclamée permet en réalité de         2)- Bonnemain,
                                                                                                                         “Régénération des colonies,
                                          préserver les intérêts des colons. Cette logique était promise à un            ou moyen de restituer
                                          grand avenir, dans la mesure où elle justifiera la colonisation pour           graduellement aux hommes
                                                                                                                         leur état politique,
                                          l’extérieur et l’exclusion des droits politiques (en particulier pour les      et d’assurer la prospérité
                                                                                                                         des nations ; et moyens pour
                                          femmes et les ouvriers) pour l’intérieur. L’élitisme républicain est ainsi     rétablir promptement l’ordre
                                                                                                                         dans les colonies françaises”,
                                          le noyau commun aux exclusions liées à la colonisation et aux exclu-           1792, in Louis Sala-Molins,
                                          sions internes à la société civile française.                                  Le code noir, Puf, 1987.

                                             INTÉGRATION DES INDIGÈNES ÉVOLUÉS,
                                             ÉDUCATION DES OUVRIERS INCAPABLES
                                             Le sénatus-consulte du 14 juillet 1865 intègre les “indigènes
                                          musulmans” à la nationalité française sans leur accorder la citoyen-
                                          neté, considérée comme incompatible avec leur statut personnel
                                          musulman. La France, si réticente à l’idée d’une dissociation entre
                                          nationalité et citoyenneté, a su y recourir dans d’autres circonstances
                                          historiques, quand ses intérêts économiques le lui commandaient.
                                          Soulignons cependant une exception à la règle : celle concernant les
indigènes les plus “évolués”, à qui
                                                                              seront reconnus les droits du citoyen.
                                                                              Toutes les réformes concernant le sta-

                                                                                                                         N° 1229 - Janvier-février 2001 - 23
                                                                              tut des colonisés se contenteront
                                                                              d’élargir la sphère des “évolués”, indi-
                                                                              quant en cela le maintien du principe
                                                                              capacitaire pendant toute la période
                                                                              coloniale. Un certain discours sur les
                                                                              “élites issues de l’immigration” aujour-
                                                                              d’hui a sans aucun doute un lien avec
                                                                              ce concept “d’évolués” de la logique
                                                                              coloniale.
                                                                                 La même logique capacitaire sera
                                                                              de nouveau déployée pour justifier la
                                                                              “république des propriétaires”, c’est-
                                                                              à-dire le régime censitaire français.

                                                                                                                               VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE
                                                                              Voici comment Sieyès décrivait l’in-
                                                                              capacité des pauvres : “Parmi les
                                                                              malheureux voués aux travaux
                                                                              pénibles, producteurs des jouissances
                                                                              d’autrui et recevant à peine de quoi
Un bureau de vote à Bagnolet lors des élections présidentielles d’avril 1995. sustenter leur corps souffrant et plein
© N. Amir/IM’Média.
                                                                              de besoins, dans cette foule immense
                                    d’instruments bipèdes, sans liberté, sans moralité, sans intellec-
                                    tualité, ne possédant que des mains peu gagnantes et une âme absor-
                                    bée […] est-ce là ce que vous appelez des hommes ? On les dit poli-
3)- Emmanuel Sieyès,                cés ! Il y en a-t-il un seul qui fût capable d’entrer en société… ?”(3)
Textes choisis, présentés
par Roberto Zapperi,                    Ces propos de Sieyès ne sont pas isolés et conjoncturels. Ils reflè-
éditions des Archives               tent le regard dominant posé sur les “pauvres” pendant plus d’un siècle
contemporaines, Paris, 1985.
                                    et demi. Donnons la parole à Benjamin Constant pour tirer la conclu-
                                    sion politique de cette logique capacitaire appliquée aux classes labo-
                                    rieuses : “Je ne veux faire aucun tort à la classe laborieuse, cette
                                    classe n’a pas moins de patriotisme que les autres classes. Elle est
                                    souvent prête aux sacrifices les plus héroïques et son dévouement
                                    est d’autant plus admirable qu’il n’est récompensé ni par la for-
4)- Benjamin Constant,              tune ni par la gloire. Mais autre est, je le pense, le patriotisme qui
“Principes de politiques            donne le courage de mourir pour son pays, autre est celui qui rend
applicables
à tous les gouvernements            capable de bien reconnaître ses intérêts. Il faut donc une condition
représentatifs
et particulièrement                 de plus que la naissance et l’âge prescrits par la loi. Cette condi-
à la Constitution actuelle
de la France”, in De la
                                    tion c’est le loisir indispensable à l’acquisition des lumières, à la
liberté chez les modernes :         rectitude du jugement. La propriété seule rend les humains capables
écrits politiques, Hachette
Littérature, Paris, 1989.           de l’exercice des droits politiques.”(4)
Cette vision des “classes laborieuses” connaîtra des variantes mais
                                          sans remettre en cause l’idée d’une incapacité. Les divergences por-
                                          teront sur le caractère transitoire ou non de cette incapacité à la poli-
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                                          tique. Comme pour les esclaves ou les colonisés, l’opinion selon
                                          laquelle l’éducation permettrait aux “pauvres” d’accéder à la raison
                                          est fréquente tout au long du XIXe siècle. Éduquer le peuple plutôt
                                          que d’assurer l’égalité économique est, on le voit, une vieille rengaine
                                          en France. Nous sommes, ici aussi, au cœur de l’élitisme républicain
                                          encore tant présent aujourd’hui.

                                             LES FEMMES, ÉTERNELLES MINEURES
                                              Si l’incapacité des ouvriers est expliquée à partir des conditions
                                          sociales, celle des femmes le sera à partir d’une prétendue spécifi-
                                          cité naturelle. Le résultat reste cependant le même : l’exclusion de
                                          la sphère politique. Voici ce que Diderot développait sur cette “spé-
                                          cificité” : “La femme porte au-dedans d’elle-même un organe sus-
      VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE

                                          ceptible de spasmes terribles, disposant d’elle et suscitant dans son
                                          imagination des fantômes de toute espèce […]. Si j’avais été légis-         5)- Denis Diderot,
                                          lateur… Je vous aurais mises au-dessus de la loi ; vous auriez été          “Des femmes”, 1772,
                                                                                                                      in Lettres à Sophie Volland,
                                          sacrées, en quelque endroit où vous vous fussiez présentées.”(5) Au-        Gallimard, 1984.
                                          dessus de la loi plutôt que dans la loi, voilà une excellente façon d’ex-
                                          clure des droits politiques tout en “valorisant” la prétendue spécifi-
                                          cité féminine.
                                              Une nouvelle fois le législateur républicain restera cohérent avec
                                          cette approche et le conventionnel Amar pourra déclarer en conclu-
                                          sion de cette approche “naturaliste” : “Les fonctions privées aux-
                                          quelles sont destinées les femmes par nature même, tiennent à l’ordre
                                          général de la société. Cet ordre résulte de la différence qu’il y a entre
                                          l’homme et la femme. Chaque sexe est appelé à un genre d’occupa-
                                          tion qui lui est propre ; son action est circonscrite dans ce cercle
                                          qu’il ne peut franchir, car la nature qui pose ses limites à l’homme,
                                          commande impérieusement et ne reçoit aucune loi.”(6) D’autres argu-         6)- Cf. Yvonne Kniebiehler,
                                                                                                                      “L’obscurantisme des lumières”,
                                          ments ont bien entendu été avancés pour refuser le droit de cité aux        in Yvonne Kniebiehler,
                                                                                                                      Marcel Bernos, Élisabeth
                                          femmes. Ils sont tous à base capacitaire. Nous les reprendrons ulté-        Ravoux-Rallo, Éliane Richard,
                                          rieurement dans notre raisonnement tant ils sont ressemblants à ceux        De la pucelle à la minette.
                                                                                                                      Les jeunes filles de l’âge
                                          mis en avant pour exclure les résidents étrangers du droit de cité.         classique à nos jours,
                                                                                                                      Temps actuels, 1983.
                                              Si nous nous sommes étendus sur ce soubassement historique de
                                          l’exclusion des droits politiques, c’est que celui-ci influence encore
                                          fortement les débats sur la reconnaissance de nouveaux citoyens.
                                          Chaque étape de l’élargissement de la sphère politique fait réappa-
                                          raître la logique capacitaire avec, certes, un vocabulaire moins cari-
                                          catural, mais avec toujours les mêmes conséquences excluantes. C’est
selon nous la raison pour laquelle nous pouvons retrouver aujourd’hui
                         des similitudes entre le discours colonial (et les mesures qui en décou-
                         lent) et le discours tenu sur les populations issues de l’immigration,

                                                                                                        N° 1229 - Janvier-février 2001 - 25
                         même de nationalité française. Le champ d’exercice de la logique
                         capacitaire déborde ainsi de beaucoup la seule question de l’accès
                         à la sphère politique.

                            RÉSIDENTS ÉTRANGERS ET DROIT DE CITÉ
                          Il n’y a pas eu d’évolution spontanée des idées rendant caduques
                       les frontières antérieures de la sphère politique. C’est à chaque fois
                       par des luttes sociales se traduisant en rapport de forces que les limites
                       de la sphère politique ont été repoussées jusqu’à regrouper (du moins
                       au niveau formel) l’ensemble des citoyens majeurs de la société fran-
                       çaise (la notion de majorité étant elle-même un enjeu lié aux rapports
                       de forces). Avec l’immigration, une nouvelle question se pose et est
                       posée : la sphère politique peut-elle s’ouvrir à des personnes n’ayant

                                                                                                              VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE
                       pas la nationalité française ? Il n’est dès lors pas étonnant qu’aux argu-
                                                       ments capacitaires se surajoutent des
                                                       justifications nouvelles liées à la défini-
   La distinction entre le droit d’élire               tion de la nation. Cependant, même pour
et le droit d’éligibilité n’est pas neutre ;           ces arguments-là, la logique capacitaire
   on la retrouve encore aujourd’hui                   nous semble encore en œuvre.
 à propos des élections prud’homales.                      Logique capacitaire et logique
L’immigré est considéré comme ayant                    nationaliste vont s’articuler au sein
     les capacités d’un citoyen passif                 d’un élitisme républicain rendant par-
    mais pas celles d’un citoyen actif.                ticulièrement lent le processus d’accès
                                                       aux droits des résidents étrangers et
                       bloquant entièrement l’accès aux droits politiques. La seule pers-
                       pective proposée est celle de la naturalisation, et encore, pour une
                       “élite”, c’est-à-dire les nouveaux “indigènes postcoloniaux évolués”.
                       Les deux logiques vont finir par se fondre et se confondre dans un seul
                       énoncé présenté comme une évidence : seuls les Français ont natu-
                       rellement les capacités à une citoyenneté active et à plus forte raison
                       à une citoyenneté politique. L’État français peut ainsi renouer, à pro-
                       pos de personnes vivant en métropole, avec l’idée d’une citoyenneté
                       à plusieurs vitesses. Les étrangers obtiendront le droit d’élire des repré-
                       sentants du personnel dans les entreprises, mais pas celui d’être élus.
                       La distinction entre le droit d’élire et le droit d’éligibilité n’est pas
                       neutre ; on la retrouve encore aujourd’hui à propos des élections pru-
                       d’homales. L’immigré est considéré comme ayant les capacités d’un
                       citoyen passif mais pas celles d’un citoyen actif. Il a le droit d’être repré-
                       senté et les capacités de choisir ses représentants, mais pas celui de
représenter. On comprendra, dès lors, le danger actuel de certaines
                                          propositions consistant à octroyer le droit de vote aux résidents étran-
                                          gers sans le droit d’être élu.
N° 1229 - Janvier-février 2001 - 26

                                             DES EXIGENCES DIFFÉRENTES
                                             POUR L’ACCÈS À UN MÊME DROIT
                                             L’une des formes d’expression de la logique capacitaire est l’exi-
                                          gence de conditions supplémentaires pour l’accès à un droit. Derrière
                                          cette exigence est posé le double postulat d’une impossibilité d’exer-
                                          cice du droit sans la capacité mise en avant, et celui d’une posses-
                                          sion de cette capacité par l’ensemble des Français de nationalité.
                                          Ainsi, la loi du 27 juin 1972 autorise les résidents étrangers à siéger
                                          dans les comités d’entreprise et à être élus comme délégués du per-
                                          sonnel avec comme condition supplémentaire de “savoir lire et
                                          écrire le français”. Il faudra attendre encore trois ans pour que cette
                                          formulation se transforme en “pouvoir s’exprimer en français”.
      VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE

                                             L’exigence inégalitaire pour l’accès à un même droit n’est pas neuve
                                          en France et dépasse de beaucoup la seule sphère politique. Elle est
                                          au cœur du principe même de la discrimination dans l’application
                                          des droits acquis (comme en témoignent les discriminations à l’em-
                                          bauche aujourd’hui). Elle est, au niveau des droits formels, une néga-
                                          tion de l’idée d’universalité du droit consubstantielle à toute pensée
                                          démocratique. Voici ce que des militantes pour l’accès aux droits poli-
tiques pour les femmes écrivaient en 1914 : “La femme n’est pas assez
                               intelligente pour comprendre quelque chose à la politique. Réponse :
                               pour admettre un homme à voter, exige-t-on qu’il soit intelligent ?

                                                                                                            N° 1229 - Janvier-février 2001 - 27
7)- Ligue nationale pour       Pourquoi ne poser cette question que lorsqu’il s’agit de femmes ?”(7)
le droit de vote des femmes,
“Aux urnes citoyennes”,
éditorial du Journal,
26 avril 1914.
                                  COMME LES FEMMES, LES IMMIGRÉS
Cité in Patricia Latour,
Femmes et citoyennes,
                                  SERAIENT NAÏFS ET MANIPULABLES
éd. Le temps des cerises,         Le dernier argument capacitaire est celui d’une absence de cul-
1995.
                               ture démocratique parmi les résidents étrangers. Une période pro-
                               batoire d’apprentissage serait donc nécessaire pour acquérir cette
                               capacité à l’exercice des droits politiques. Fréquent dans le passé,
                               cet argument est de moins en moins mis en avant, tant il est contre-
                               dit par la réalité sociale (activité syndicale, associative, culturelle,
                               etc.). Il n’est cependant pas inutile de le rappeler, pour souligner
                               l’ampleur du consensus de départ. En effet, dans un passé pas si
                               ancien, des hommes se revendiquant de la gauche comme de la droite

                                                                                                                  VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE
                               mettaient en avant ce type d’explication.
                                  L’articulation des logiques capacitaire et nationaliste est ici
                               patente : le caractère influençable et la naïveté des résidents étran-
                               gers menacent la souveraineté nationale. Outre les ouvriers, les
                               femmes ont eu elles aussi à subir cet argument. Considérées comme
                               trop dépendantes de leur mari ou de leur curé, elles étaient censées
                               provoquer un raz de marée de la droite. Voici leur réponse en 1914 :
                               “Chose curieuse : l’objection la plus grave vient des ‘esprits avan-
                               cés’. Ils disent : si la femme votait, il en résulterait une réaction ter-
                               rible. Réponse : d’abord, il n’est pas prouvé que les femmes ont plu-
                               tôt telle opinion que telle autre. Ensuite, si elles l’ont, ça ne vous
                               regarde pas. Vous ne pouvez décemment leur refuser le droit de vote
8)- Ligue nationale            sous prétexte qu’elles ne voteraient pas bien, c’est-à-dire comme
pour le droit de vote
des femmes, article cité.      vous.”(8) Rappelons que le droit de vote des femmes n’a bien entendu
                               pas provoqué le raz de marée réactionnaire en question.

                                  UNE MUTATION VERS DES ARGUMENTS
                                  “NATIONALITAIRES”
                                  Les arguments capacitaires développés ci-dessus ne se présentent
                               plus que rarement comme tels, ce qui ne veut bien entendu pas dire
                               que la logique capacitaire qui les a produits a disparu. L’épuisement
                               de certains arguments est le reflet de leur discrédit au regard de la
                               réalité sociale, aux yeux certes des électeurs français, mais également
                               aux yeux des premiers concernés, c’est-à-dire les résidents étrangers.
                               La même logique d’exclusion recherche dès lors de nouveaux arguments.
                               Les débats de la décennie sur les droits politiques pour les résidents
étrangers soulignent cette mutation et ce glissement des arguments
                                          utilisés. Certains raisonnements disparaissent, d’autres glissent d’un
                                          pôle politique à un autre, d’autres enfin émergent comme les formes
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                                          nouvelles d’une ancienne logique. C’est la raison pour laquelle il était
                                          important de présenter les arguments capacitaires au préalable, même
                                          s’ils ont tendance à disparaître du champ discursif et politique fran-
                                          çais. Car l’argument le plus fréquemment évoqué pour s’opposer ou pour
                                          limiter l’accès aux droits politiques est celui de la “souveraineté natio-
                                          nale”. Sous une forme ou sous une autre, il y aurait danger à faire dis-
                                          paraître la frontière des droits politiques. Le principe de cette fron-
                                          tière étant posé, les variantes peuvent alors se développer.
                                              Fréquent dans le passé, autant à droite qu’à gauche, l’argument
                                          est devenu, dans sa “forme pure”, l’élément central du discours de
                                          l’extrême droite. Pour cette dernière, la nation est une entité natu-
                                          relle et organique, a-historique et invariable. Nous débouchons dès
                                          lors sur une vision “sanguine” de la nation et de la nationalité, posant
      VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE

                                          une frontière absolue non seulement sur l’idée de droits politiques,
                                          mais sur l’idée même de droits. L’étranger n’est qu’un invité présent
                                          de manière momentanée sur le sol français. L’immigration ne sau-
                                          rait être de peuplement, sous peine de menacer l’existence même
                                          de la nation. La nationalité se structure alors autour du principe du
                                          “droit du sang” : “[L’acquisition de la nationalité française se fait]
                                          d’abord par filiation, être français, cela s’hérite ou se mérite : la        9)- Jean-Marie Le Pen,
                                                                                                                       Contrat pour la France
                                          naturalisation ne pourra s’obtenir que par décret avec casier judi-          avec les Français, document
                                          ciaire vierge, capacité d’assimilation à la population française, être       de campagne pour
                                                                                                                       les élections présidentielles
                                          accepté par la communauté nationale, prêter serment.”(9) Jean-               de 1995.
                                          Marie Le Pen propose de fait la renonciation à sa nationalité d’ori-
                                          gine pour l’étranger devenant français et le réexamen de la situation
                                          des 2 500 000 naturalisés depuis 1974. La même logique avait conduit
                                          Pétain à retirer la nationalité française aux citoyens de confession
                                          juive naturalisés depuis 1927. La seconde conséquence est l’opposi-
                                          tion absolue à l’idée de droits politiques pour les résidents étrangers :
                                          “Le droit de vote en France doit être réservé aux Français. Les res-
                                                                                                                       10)- Jean-Marie Le Pen,
                                          sortissants des pays de l’Union européenne qui se sentent suffi-             réponse à un questionnaire
                                          samment intégrés dans la société française peuvent demander                  de l’Aseca,
                                                                                                                       Migrations société, n° 42,
                                          leur naturalisation et ainsi participer à la vie politique du pays.”(10)     décembre 1995.

                                             L’IMMIGRÉ, CET ÊTRE OBÉISSANT
                                             À D’AUTRES RÈGLES QUE LE CITOYEN
                                             À droite, l’argument nationalitaire est moins caricatural mais bel
                                          et bien présent. Ainsi, Édouard Balladur n’accepte le droit de vote
                                          pour les résidents communautaires que parce qu’existe la récipro-
cité pour les Français résidant dans les autres pays de l’Union euro-
                            péenne. Le droit n’est pas ici reconnu comme un droit universel
                            attaché à la personne, mais comme le résultat d’un accord entre

                                                                                                       N° 1229 - Janvier-février 2001 - 29
                            États : “La situation des autres étrangers se trouvant sur le ter-
                            ritoire français est juridiquement différente puisque la France
11)- Édouard Balladur,      n’est pas liée à d’autres États que ceux de l’Union par un traité
réponse au questionnaire
cité.                       comparable à celui de Maastricht.”(11) Le citoyen n’est donc pas
                            porteur de droits inaliénables, mais est propriété d’un État qui peut,
                            par contrat avec d’autres pays, restreindre ou étendre sa citoyen-
                            neté. De la même façon, l’immigré continue d’être considéré comme
                            propriété de son État d’origine, et ses comportements sociaux et
                            politiques comme dépendants du pays dont il possède la nationa-
                            lité. L’immigré serait ainsi un être à part, possédant une rationa-
                                                           lité elle-même spécifique. À l’inverse
                                                           des autres citoyens, il ne raisonnerait
          Si l’on s’attache à la réciprocité,              pas politiquement à partir de ses inté-
       le citoyen n’est pas porteur de droits

                                                                                                             VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE
                                                           rêts sociaux et économiques, mais selon
  inaliénables, mais est propriété d’un État le seul critère de sa nationalité. La
   qui peut, par contrat avec d’autres pays,               souveraineté nationale s’étend ici sur
      restreindre ou étendre sa citoyenneté.               le concept de citoyen défini comme
        De même, l’immigré est considéré                   propriété de son État.
   comme propriété de son État d’origine.                     Le principe de réciprocité comme
                                                           condition nécessaire à l’accès au droit
                            a d’ailleurs été rejeté par le Conseil constitutionnel français. Dans
                            sa décision du 30 octobre 1981, celui-ci a expressément affirmé que
                            “la loi française peut accorder à des étrangers des droits même non
                            reconnus aux Français par les États étrangers concernés”. Cette
                            décision de bon sens prend simplement acte du fait que le résident
                            étranger n’est pas une propriété mais un acteur porteur de droits dans
                            son pays de résidence. On ne peut pas ne pas souligner ici le retour-
                            nement paradoxal à propos de la question de la “souveraineté natio-
                            nale”. Sous prétexte de préserver cette dernière, on en arrive à enle-
                            ver à l’État français le droit de légiférer sur les droits de personnes
                            résidant sur son territoire.
                               La contradiction n’est pas propre à Édouard Balladur. Elle est issue
                            du mode d’approche du fait national. Si le FN, par ses positions, nous
                            oblige au choix entre une définition ethnique et culturelle de la nation
                            d’une part, et une vision politique de celle-ci, Balladur et la droite
                            posent, eux, le nécessaire choix entre une définition territorialisée
                            de la nation et une définition non territorialisée. La nation peut-elle
                            se concevoir sans territoire d’exercice des droits et des devoirs ? Les
                            droits sont-ils liés à l’appartenance à une nationalité juridique ou à
la présence durable sur un territoire ? La nation elle-même regroupe-
                                          t-elle l’ensemble des résidents d’un territoire ou se limite-t-elle à
                                          ceux possédant la nationalité juridique ? Tels sont les enjeux des posi-
N° 1229 - Janvier-février 2001 - 30

                                          tions défendues par la droite à propos des droits politiques pour les
                                          résidents étrangers.

                                             LES FRANÇAIS “NE SERAIENT PAS PRÊTS”
                                             Si les positions de la “gauche plurielle” sont différentes, puisque
                                          désormais l’ensemble des partis la composant (PS, PC, MDC, Verts)
                                          se déclarent pour le droit de vote au moins au niveau municipal, leurs
                                          arguments légitimant cette position restent ambigus. Jean-Pierre Che-
                                          vènement et le MDC ont le mérite de la cohérence sur cet aspect.
                                          Pour lui et son mouvement, c’est la contradiction produite par l’oc-
                                          troi du droit de vote aux étrangers ressortissants de l’UE qui semble
                                          faire reculer les frontières des droits politiques, et non la recon-
                                          naissance d’un nouveau droit inaliénable pour les étrangers ou une
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                                          transformation dans la définition de la nation. L’argument de la “sou-
                                          veraineté nationale” reste sauf et Che-
                                          vènement peut préciser, pour que per-           La naturalisation, dans sa forme actuelle,
                                          sonne ne s’y trompe : “À partir du fait               est vécue comme un reniement,
                                          nouveau qu’est, depuis l’adoption du            d’où l’urgence et la nécessité d’assouplir
                                          traité de Maastricht, l’octroi du droit de         la naturalisation et de la débarrasser
                                          vote aux étrangers communautaires                   de son présupposé assimilationniste.
                                          pour ces élections, j’ai trouvé normal
                                          qu’il n’y ait pas de ségrégation sur une base ethnique entre étran-
                                          gers communautaires et extra-communautaires, plus particuliè-
                                          rement à l’égard des ressortissants de pays notamment africains
                                          qui ont versé leur sang pour la libération du pays. C’est dans ce
                                          souci que j’ai préconisé le droit de vote uniquement aux élections
                                          municipales et seulement pour les titulaires de la carte de dix ans
                                          au moment du renouvellement. Ce droit de vote accordé dans ces
                                          conditions serait un pas vers la complète intégration de ces étran-
                                          gers établis de longue date en France. C’est donc dans la perspec-
                                          tive de la naturalisation française des étrangers concernés que j’ai
                                          déclaré : ‘Après les municipales viendront naturellement les élec-
                                          tions nationales’. Il n’y a donc pas dans ma pensée rupture entre
                                          la citoyenneté et la nationalité comme je l’entends dire. Le droit de
                                          vote aux élections locales resterait ainsi une propédeutique pour 12)- Jean-Pierre
                                                                                                                    Chevènement, in Le Monde,
                                          l’accès à la citoyenneté française par la voie de la naturalisation.”(12) 17 décembre 1999.
                                             On ne peut pas ne pas souligner l’arrière-plan cynique du discours
                                          chevènementiste. Conditionner le droit de vote au renouvellement
                                          d’une carte de dix ans, alors que le même Jean-Pierre Chevènement a,
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Élections du Conseil        par ses mesures, précarisé la stabilité du séjour et développé les cartes
consultatif des étrangers
à Amiens en 1989.
                            d’une durée d’un an, c’est soit de l’incohérence grave, soit du cynisme
© IM’Média.                 profond. Le parti socialiste, pour sa part, continue de jouer la même
                            partition du “changement nécessaire mais encore impossible aujour-
                            d’hui”. Pour ce faire, il alterne les arguments, depuis “les Français qui
                            ne sont pas prêts” jusqu’aux “obstacles juridiques”, en passant par la
                            proximité trop forte des échéances électorales. Le Parti communiste et
                            les Verts continuent, malgré leurs positions de principe positives, à faire
                            le grand écart pour ne pas compromettre la majorité plurielle.
                               Les échéances municipales de 2001 ne seront donc pas un ren-
                            dez-vous électoral pour les résidents étrangers. La raison principale
                            reste l’absence de courage politique d’une majorité plurielle qui reste
                            hantée par l’utilisation que pourrait faire la droite d’une telle réforme.
                            Le gouvernement continue à se glorifier d’avoir “dépassionné” le débat
                            sur l’immigration, même si le prix à payer pour cela s’appelle non-
                            régularisation des sans-papiers et nouveau report du droit de vote
                            pour les résidents étrangers. Quant aux autres échelons des droits
                            politiques, ils sont renvoyés aux calendes grecques.

                               LA NÉCESSAIRE PRÉSENCE DES ABSENTS
                              Il reste à nous poser la question des positions des premiers concer-
                            nés. Un sondage de l’hebdomadaire L’Express datant de 1990 donne
                            une réponse sans ambiguïté à cette question : “Jusque-là, en effet,
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      VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE

                                          personne ne s’était inquiété de savoir s’ils étaient preneurs ou non         Patrick Braouzec,
                                                                                                                       maire de Saint-Denis,
                                          de cet éventuel nouveau droit. Réponse franche des immigrés : oui            aux Francs-Moisins en 1995.
                                          à 66 % et même à 73 % s’agissant des Maghrébins […]. Les immi-               © N. Amir/IM’Média.
                                          grés souhaitent avoir le droit de vote, et pas seulement pour les muni-
                                          cipales. Certes, la demande est particulièrement importante pour
                                          l’élection municipale (66 %), mais elle est également majoritaire
                                          pour la présidentielle (57 %) et même pour les législatives et les Euro-
                                          péennes […].”(13) La différence de pourcentage concernant les                13)- Guillaume Malaurie,
                                                                                                                       “Pour qui voteraient
                                          Maghrébins n’est pas à imputer à une quelconque rationalité poli-            les immigrés”, L’Express,
                                          tique spécifique, elle souligne simplement un séjour plus ancien et          n° 2020, 23 mars 1990.

                                          donc un enracinement plus fort.
                                              Ce sondage met en évidence une demande de participation poli-
                                          tique à tous les échelons. Nous employons à dessein le terme “enra-
                                          cinement”, plutôt que le terme “intégration”, qui s’appuie en France
                                          sur une volonté d’assimiler. Pour les résidents étrangers, il n’y a aucune
                                          contradiction à avoir des droits politiques en gardant la nationalité
                                          d’origine. La nationalité est perçue comme un héritage du passé por-
                                          teur d’une connotation identitaire liée au caractère postcolonial de
                                          l’immigration. La naturalisation, dans sa forme actuelle, est vécue
                                          comme un reniement. Ces résultats soulignent l’urgence et la néces-
                                          sité d’assouplir la naturalisation et de la débarrasser de son présup-
                                          posé assimilationniste. Ils indiquent également que l’octroi du droit
                                          de vote aux municipales posera immédiatement la question de l’ac-
                                          cès aux autres élections. L’exercice d’un droit politique, même au
niveau municipal, entraînera pour certains une accélération de la
           demande de naturalisation et, pour d’autres, l’exigence et le combat
           pour l’accès aux autres échelons. C’est dire le retard pris par la classe

                                                                                       N° 1229 - Janvier-février 2001 - 33
           politique vis-à-vis des évolutions sociales dans l’immigration. Quand
           Jean-Pierre Chevènement propose un choix entre droit de vote et natu-
           ralisation, les populations issues de l’immigration demandent les deux
           simultanément.
               Les blocages de l’ensemble de la classe politique sur la question
           rappellent une leçon du passé que nous avons tendance à oublier.
           Les droits démocratiques n’avancent que par la lutte de ceux qui
           y ont réellement intérêt. Confier une exigence démocratique à un
           parti ou à un homme préoccupé de sa réélection, c’est garantir l’en-
           terrement de la revendication ou sa dévitalisation. Les associations
           issues de l’immigration sont aujourd’hui interpellées pour reprendre
           l’initiative, sous peine de voir les droits politiques sans cesse repor-
           tés pour une longue période ou ramenés à leur échelon minimum,

                                                                                             VIE ASSOCIATIVE, ACTION CITOYENNE
           c’est-à-dire les municipales… et encore, sans droit d’éligibilité,
           après le renouvellement de la carte de dix ans (?), avec d’autres
           restrictions (?).
               Au-delà de la question du droit de vote, c’est la question du sta-
           tut de l’immigration qui est posée. À ce titre, le débat et le combat
           pour les droits politiques ne sauraient être séparés d’autres questions
           déstabilisant l’immigration. La régularisation de l’ensemble des
           sans-papiers, le droit à une naturalisation par simple déclaration et
           le droit de vote sont trois aspects d’une même question : une démo-
           cratie peut-elle s’accommoder d’une non-citoyenneté pour une par-
           tie importante des habitants de son territoire ?                       ✪

           Dossier Citoyennetés, n° 1139, janvier 1991

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